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* Georges Gloukoviezoff, post-doctorant, Geary Institute, University College (UCD) Dublin, Irlande.
Nicolas Rebière, maître de conférences en démographie, centre de droit comparé du travail et de la sécurité
sociale (COMPTRASEC), UMR 5114 CNRS/université Montesquieu-Bordeaux IV.
Acheter une voiture d’occasion, réparer une chaudière tombée en panne, payer
une caution pour accéder à un logement, financer une formation professionnelle ou
un permis de conduire sont autant de dépenses d’un montant raisonnable pouvant
s’avérer primordiales pour la préservation ou l’amélioration de la situation des
personnes. Certaines ne parviennent pourtant pas à y faire face.
Parce que leurs revenus sont trop faibles et qu’elles n’ont que peu ou pas
d’épargne, elles ne peuvent assumer seules ces coûts. Elles n’ont pas plus la pos-
sibilité de recourir à des financements extérieurs parce qu’elles ne désirent pas
solliciter leurs proches ou que ceux-ci n’ont pas les moyens de leur venir en aide ;
parce qu’elles-mêmes ou les besoins à financer ne sont pas éligibles aux dispositifs
d’aide sociale ; et parce que l’accès au crédit leur est refusé par les établissements
prêteurs.
Cette impossibilité d’accéder à une forme de financement appropriée alimente
alors le processus d’exclusion sociale soit en interdisant à ces ménages d’échapper
à leur situation de pauvreté, soit en contribuant à leur basculement vers la préca-
rité. En ce sens, ils sont victimes de l’articulation des processus d’exclusion ban-
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1. Souvent rapproché du microcrédit professionnel en France ou du microcrédit tel qu’il est pratiqué dans
les pays du Sud, le microcrédit personnel s’en distingue significativement en dépit de proximités réelles
(cf. Gloukoviezoff et Rebière, 2013b, p. 13-14).
2. Loi no 2010-737 du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation. Son chapitre III est consacré
au microcrédit.
Cet article est basé sur une étude d’impacts du microcrédit personnel menée à la demande
du Comité d’orientation et de suivi de l’emploi des fonds (COSEF) du Fonds de cohésion
sociale. Cette étude s’inscrit dans le cadre plus large d’un programme de recherche
scientifique international s’achevant en 2015 cofinancé par la Région Aquitaine (appel à
projet « recherche 2012 »), des partenaires français (Caisse des dépôts et Fonds d’action
sociale pour le travail temporaire) et irlandais (Central Bank of Ireland et Social Finance
Foundation). Ce programme de recherche, que mènent conjointement le centre de droit
comparé du travail et de la sécurité sociale (COMPTRASEC, UMR 5114 CNRS/université de
Bordeaux), l’institut 2G recherche et le Geary Institute (University College Dublin, Irlande),
analyse dans quelle mesure le microcrédit accompagne les évolutions institutionnelles
à l’œuvre ou bien constitue une potentielle alternative en offrant une opportunité de
renouveler la mise en œuvre de solidarités nationales, régionales et locales.
L’étude d’impacts du microcrédit personnel, à l’origine des développements du présent article,
repose sur quatre sources d’informations complémentaires :
3. Cette étude d’impact réalisée à la demande du COSEF s’est achevée en octobre 2013 après près de deux
années d’enquête et d’exploitation (Gloukoviezoff et Rebière, 2013a et 2013b). Pour plus d’information, cf. enca-
dré 2.
4. Exemple : dans le cas d’une personne divorcée ayant besoin d’acheter une voiture pour faciliter sa recherche
d’emploi et voir plus souvent ses enfants, on comptabilisera un projet professionnel et un projet relevant de
la cohésion familiale. Nous avons classé les projets en 5 catégories en fonction des déclarations des enquêtés :
insertion professionnelle, logement, insertion sociale (autonomie, éviter l’isolement relationnel, etc.), cohésion
familiale (créer, conserver ou resserrer des liens familiaux), santé, dettes.
5. La Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle.
Santé 29 % 4% 67 % 0%
Cohésion familiale 32 % 6% 61 % 1%
Logement 63 % 5% 32 % 0%
Insertion sociale 53 % 10 % 36 % 0%
Professionnel 51 % 15 % 33 % 1%
0% 20 % 40 % 60 % 80 % 100 %
6. À noter que ce constat reste valable si l’on exclut de l’analyse tous les projets combinant plusieurs dimensions
car les résultats restent quasiment identiques.
7. La survenue d’incidents de remboursement de microcrédit est corrélée avant tout avec des « aléas de la vie »
subis au cours du remboursement.
Les impacts observés tiennent à la rencontre des attentes et situations des emprun-
teurs avec les possibilités qu’offre le dispositif. Celui-ci est à la fois une opportunité
de financement mais également, comme le spécifie l’article 23 de la loi Lagarde,
59 % 59 %
32 %
20 % 21 %
11 % 10 %
5%
9. Le rapport qui résume les débats et les pistes de réflexions envisagées n’a pas été rendu public (Cavalli et
Tocqué, 2011).
11. La majorité des fonds sont actuellement fournis par la Délégation générale à l’emploi et à la formation
professionnelle.
Conclusion