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Dossier scientifique

Diagnostic biologique
du paludisme d’importation
Guillaume Desoubeaux1,2,*, Jacques Chandenier1,2
1 Service de Parasitologie-Mycologie-Médecine tropicale, CHU de Tours, Hôpital Bretonneau, 1er étage du Bâtiment B2A,
2, boulevard Tonnellé,37044Tours, Cedex 9, France.
2 Université François-Rabelais, CEPR-INSERM U1100/Équipe 3,Faculté de Médecine, Bâtiment M, 10, boulevard Tonnellé, 37032 Tours,
Cedex 1, France.
*Auteur correspondant : guillaume.desoubeaux@univ-tours.fr (G. Desoubeaux).

RÉSUMÉ
Le paludisme d’importation est une infection parasitaire due
aux protozoaires du genre Plasmodium. Son diagnostic doit être
envisagé en urgence devant une fièvre au retour d’un séjour
en zone intertropicale. Il doit être précis afin de limiter l’aggra-
vation de la maladie et de proposer rapidement un traitement
adapté, les conséquences cliniques d’un accès palustre aigu
étant potentiellement très graves. Seule la recherche directe
des formes parasitaires dans le sang par le frottis sanguin et/
ou la goutte épaisse est capable de porter un diagnostic de
certitude, alors que la recherche d’antigènes circulants ne vient
qu’en complément de cette exploration microscopique. Res-
ponsables de la lecture microscopique des différentes prépa-
rations sanguines à visée diagnostiques, le biologiste médical et
les techniciens du laboratoire tiennent donc un rôle essentiel
dans la prise en charge initiale des patients concernés. Dans un
laps de temps de deux heures, le personnel doit rechercher les
formes parasitaires sanguines et, lorsque repérées, les identifier
et les dénombrer afin de répondre de la façon la plus précise
possible au clinicien, et d’orienter au mieux ce dernier dans

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sa prise en charge thérapeutique.

MOTS CLÉS
◗ diagnostic parasitologique
◗ frottis
◗ goutte épaisse
◗ paludisme ABSTRACT
◗ parasitémie Laboratory diagnosis of malaria in non-endemic countries
◗ Plasmodium Malaria is a parasite infection caused by protozoan of the Plasmodium genus. Its dia-
KEY WORDS gnosis should be suggested in every febrile patient who comes back from any tropical
country. It has to be thorough in order to limit disease worsening and to propose
◗ malaria
rapidly an adequate therapy. Microscopic observation of parasites within red blood
◗ parasitaemia
cells is currently the only laboratory mean to readily confirm malaria diagnosis in
◗ parasite diagnosis
routine. Thin and thick blood smears are usually implemented in such a context,
◗ Plasmodium
while antigen detection should only be considered as a complementary alternative.
◗ thin blood smear
Therefore, lab techs and doctors play a critical role in the process of malaria diagnosis.
◗ thick blood smear
They have to provide a definitive report by the first two hours following the blood
sampling. They are also expected to be able to distinguish between the Plasmodium
© 2017 – Elsevier Masson SAS species and to count the number of parasites in the blood.
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Voyages et biologie

Introduction Les trophozoïtes constituent le premier stade asexué


sanguin, celui qui se nourrit de l’hémoglobine des héma-
Sévissant en zones tropicales et subtropicales, et princi- ties. En se divisant par scissiparité, ils entament alors une
palement sur le continent africain, le paludisme est une schizogonie érythrocytaire, ou mérogonie, pour donner
infection parasitaire due aux protozoaires sanguicoles des naissance en 48-72 heures à un schizonte érythrocytaire,
espèces Plasmodium falciparum, P. vivax, P. ovale et P. mala- ou méronte, contenant plusieurs noyaux parasitaires.
riae, voire plus rarement P. knowlesi [1,2]. Globalement, le À l’origine des pics de fièvre, l’éclatement des schizontes
paludisme d’importation reste une infection rarement matures libère des parasites-fils, appelés mérozoïtes, qui
diagnostiquée en Europe, mais dont l’incidence en France parasitent ensuite des hématies saines, et le cycle schizo-
gonique érythrocytaire recommence alors. Lors de chaque
métropolitaine n’a toutefois cessé d’augmenter jusqu’à
cycle, la charge parasitaire sanguine augmente donc de
la fin du XXe siècle pour se stabiliser aujourd’hui autour
huit à vingt-quatre fois selon les espèces. En conséquence
d’une estimation annuelle de 4 000 nouveaux cas [3,4].
ceci signifie que l’approche diagnostique, liée au repérage
La gravité de certaines présentations cliniques engendre
des formes parasitaires dans le sang, ne sera pas la même
la survenue de cinq à dix décès par an en France, consé-
en fonction de la durée depuis laquelle évolue la maladie,
quences directes ou indirectes d’un diagnostic mal réalisé
les parasites ne devenant détectables que lorsqu’il y en a
ou retardé [5]. Ce dernier tient donc une place essentielle
environ 10-50 par microlitres (/μL) sang, soit une charge
dans la prise en charge initiale des patients concernés, qu’il
parasitaire totale d’environ 100 millions [8]. Après plu-
soit mis en place en milieu libéral ou au sein de structures
sieurs cycles schizogoniques successifs, et sous l’effet des
hospitalières spécialisées. Le diagnostic de certitude est
anticorps du patient ou d’un traitement antipaludique,
basé sur la recherche des parasites dans le sang. Afin de
certains mérozoïtes évoluent en des formes différenciées,
garantir la meilleure évolution clinique possible par le appelées gamétocytes, qui initient la phase sexuée. Globa-
choix d’une action thérapeutique en aval qui soit la plus lement dans les prélèvements sanguins, les trophozoïtes
adaptée [6], le biologiste médical et les techniciens de labo- sont plus fréquemment visibles que les schizontes et
ratoire doivent donc être capables de confirmer ou d’infir- gamétocytes. Ceci est particulièrement évident lors des
mer, de façon certaine et rapide, l’hypothèse diagnostique crises dues à l’espèce P. falciparum au cours desquelles
[7]. D’un point de vue plus général, la qualité du diagnostic les schizontes, bloqués dans les capillaires profonds, sont
biologique est également un élément essentiel à l’échelle absents de la circulation générale.
de la lutte mondiale contre le paludisme puisque, associée L’ensemble des considérations physiopathologiques rela-
à des traitements adaptés et ciblés, elle tend à diminuer le tées ci-dessus rappelle qu’il est souvent illusoire d’initier
risque de transmission autochtone. une quelconque démarche diagnostique visant la confir-
Dans cet article, nous aborderons les grands principes mation parasitologique d’un accès palustre d’importation
de la démarche visant au diagnostic biologique du palu- sans la notion de fièvre, puisque celle-ci est concomitante
disme d’importation, puis nous détaillerons les différentes à la multiplication parasitaire sanguine [9].
techniques mises en œuvre dans un tel contexte et dis-
cuterons de leurs éventuelles limites.
Principe général
Considérations générales sur de la démarche diagnostique
la prise en charge diagnostique Les recommandations officielles émanant des organismes
du paludisme d’importation référents préconisent d’initier sans tarder les démarches
diagnostiques pour tout patient suspect de crise de
Importance du cycle parasitaire paludisme [1,7]. Devant la gravité potentielle d’un accès
palustre qui se compliquerait, toute fièvre après séjour
dans la démarche diagnostique dans une zone intertropicale, tout particulièrement en
L’homme héberge la phase asexuée du cycle infectieux Afrique, doit d’abord être considérée comme un palu-
des différentes espèces parasitaires appartenant au genre disme jusqu’à preuve du contraire [9,10]. En France où la
Plasmodium [2]. Seuls les stades dits « érythrocytaires » maladie n’est pas endémique, le recours à un diagnostic
sont visibles dans le sang périphérique, au sein des héma- de certitude fiable est indispensable afin de confirmer ou
ties, et donc sont à même de conduire au diagnostic de d’infirmer cette hypothèse de paludisme car les signes
paludisme d’importation. À la suite de l'inoculation, les cliniques, aussi évocateurs soient-ils, ne sont pas spéci-
formes sanguines sont observables dans un intervalle de fiques et, de fait, peuvent masquer une autre maladie [11].
temps allant en moyenne de quelques jours à quelques Un prélèvement sanguin au pli du coude doit être
mois (correspondant à la phase de maturation hépatique réalisé en toute urgence, quelle que soit l’importance
avant le passage des parasites, génériquement appelés relative de la fièvre au moment-même de la ponction
plasmodies, dans le sang) ; par exemple, de sept jours à veineuse. Le recueil dans un tube avec anticoagulant de
deux mois pour l’espèce P. falciparum. type EDTA (éthylène diamine tétra-acétique) ou citrate

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suffit à l’ensemble des investigations de base. Ensuite, les bicarbonates sous 15 mmol/L, respectivement [6,7].
le choix de la ou des méthodes diagnostiques dépend L’association d’une protéine C-réactive (CRP) élevée
souvent des moyens à disposition, des circonstances au-delà de 8 mg/L et d’un taux d’haptoglobine effondré
locales, notamment du nombre de cas recherchés chaque sous 180 mg/L constitue un bon marqueur d’infection
année, et de la qualification du personnel de laboratoire. palustre active [9]. Enfin, une insuffisance rénale, maté-
Les outils de biologie médicale habituellement utilisés rialisée par des taux de créatinine ou d’urée supérieurs
pour le diagnostic de certitude de paludisme d’impor- à 265 μmol/L et 17 mmol/L, respectivement, est indica-
tation sont soit directs, c’est-à-dire basés sur la mise en trice d’une forme grave si le diagnostic de paludisme est
évidence directe du parasite au sein des hématies, soit ensuite confirmé par des preuves parasitologiques [6,7].
indirects, par détection d’antigènes plasmodiaux circulant
dans le sang, voire d’anticorps anti-Plasmodium dans de
rares cas très particuliers [1,7,12]. En plus de repérer les Considérations techniques
formes parasitaires, les approches directes permettent du diagnostic parasitologique
l’identification de l’espèce ou des espèces plasmodiales
impliquées, de leurs stades, ainsi qu’une appréciation de la du paludisme d’importation
charge parasitaire sanguine. Le frottis sanguin mince et la
goutte épaisse sont les méthodes les plus anciennes, mais Approche directe
toujours couramment utilisées. En plus du microscope à
lecture par immersion, elles ne nécessitent qu’un mini- Frottis sanguin mince
mum de matériel technique, ainsi qu’un agent fixateur et Le frottis sanguin mince est rapide, facile à interpréter
des colorants, mais leur lecture demande une certaine pour le personnel de laboratoire habitué à la pratique
expertise. À l’inverse, bien que de réalisation plus aisée, de l’hématologie. Il présente un seuil de détection d’envi-
les limites exposées ci-dessous des méthodes indirectes ron 50 trophozoïtes /μL de sang. Si les parasites sont en
doivent toujours inciter le personnel de laboratoire à nombre supérieur dans le sang, le frottis permet l’identi-
confirmer le diagnostic présumé de paludisme obtenu fication aisée de n’importe quelle espèce parasitaire, ainsi
par ce biais par l’une des techniques directes susmen- que de son stade, mais aussi une estimation de la charge
tionnées [7,13]. Qu’il soit négatif ou positif, le compte parasitaire sanguine, encore dénommée parasitémie.
rendu parasitologique fournissant une réponse définitive De façon pratique, une goutte de sang de l’ordre d’un
à la prescription du clinicien doit être livré dans les deux microlitre est minutieusement étalée sur une seule
heures qui suivent le prélèvement sanguin [7,13]. couche cellulaire à la surface d’une lame de verre stan-
Toutes les approches biologiques alternatives aux recher- dard. Le frottis sanguin mince, ainsi constitué en forme
ches parasitologiques énumérées ci-dessus ne doivent être de « langue de chat », est ensuite coloré selon la
considérées que comme de simples orientations diagnos- méthode de May-Grünwald-Giemsa (MGG) à pH = 7,2
tiques, contribuant au diagnostic, mais ne participant pas après fixation à l’alcool. La lame est attentivement lue à
directement à celui-ci. Par exemple, il est commun au l’aide d’un microscope optique, au fort grossissement
cours d’un accès palustre aigu d’observer une thrombo- (x 1 000 sous immersion à l’huile). L’opérateur doit choi-
pénie matérialisée par un taux de plaquettes sanguines sir des champs microscopiques où la répartition des
inférieur à 150.109/L. Elle est d’intensité variable, mais hématies semble homogène, sans superposition. Il est
parfois sévère, passant sous 50.109/L. Cependant, sa nécessaire de parcourir au moins 400 champs pour pro-
valeur pronostique est encore controversée [9], et elle clamer une lame négative, ce qui correspond à environ
peut être également due à toute autre affection que 20 minutes de lecture pour un lecteur expérimenté. S’ils
le paludisme, telle qu’une fièvre virale [14]. L’anémie sont présents dans l’échantillon analysé, les parasites du
hémolytique est un bon signe d’orientation mais elle genre Plasmodium sont endo-érythrocytaires : ils sont
peut manquer, surtout au début d’un accès palustre de repérables au sein de l’hématie par la couleur soutenue
primo-invasion tel que celui habituellement rencontré rose-orangée à violette de leur noyau, et la teinte bleu-
chez les voyageurs [15,16]. Lors des crises de paludisme nuage de leur cytoplasme (figure 1). Le microscopiste
avérées, si le taux d’hémoglobine est inférieur à 50 g/L, doit être averti de la possibilité de confusion qui existe
l’anémie devient alors un critère biologique de gravité [7]. avec des plaquettes superposées aux globules rouges,
Des cellules géantes bleutées, ou lymphocytes hyper- ou avec les corps de Howell-Jolly et anneaux de Cabot
basophiles activés, sont parfois visibles lors de l’analyse qui sont des reliquats de structures nucléaires éry-
hématologique de la formule sanguine, mais ne sont aucu- throcytaires (figure 2). Le diamètre de l’hématie para-
nement spécifiques, puisque rencontrés dans un grand sitée et l’allure de son cytoplasme varient en fonction
nombre de syndromes mononucléosiques. Une hypogly- de l’espèce plasmodiale. Dans le cas d’une infection
cémie, ainsi qu'une acidose métabolique concomitante, par P. falciparum par exemple, le parasite est retrouvé
sont possibles [17,18], et sont même considérées comme dans des hématies qui conservent une taille standard
des signes de gravité biologiques si la concentration en par rapport aux hématies saines environnantes. Avec
glucose est inférieure à 2,2 mmol/L, et le pH à 7,25 ou cette espèce, plusieurs trophozoïtes peuvent par

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Figure 1. Morphologie des différents éléments parasitaires observables sur frottis sanguin
mince et concourant au diagnostic parasitologique de certitude de paludisme d’importation
(coloration MGG, grossissement x1000).

© G. Desoubeaux et collégiale ANOFEL)


A – Nombreux trophozoïtes de Plasmodium falciparum, en forme de « bague à chaton » (➱) ou d’« écouteurs » (▲), encore parfois dénommés « bracelet
arabe ». La flèche grise indique une hématie polyparasitée par quatre trophozoïtes et contenant des taches de Maurer, reliquats de la vacuole digestive
parasitaire, alors que la fine flèche noire montre une forme trophozoïte marginée, très suggestive de l’espèce P. falciparum ; B – Un trophozoïte mature
de P. vivax d’aspect amiboïde avec un noyau fragmenté, à l’intérieur d’une hématie aux contours anguleux et contenant de nombreuses fines granulations
de Schüffner intra-cytoplasmiques, reliquats excédentaires du remodelage membranaire érythrocytaire ; C – Un trophozoïte mature de P. ovale d’allure
globuleuse, associé à de nombreuses granulations de Schüffner intra-érythrocytaires ; D – Deux trophozoïtes matures de P. ovale ; E – Un trophozoïte
mature de P. malariae d’allure parallélépipédique disposé en bande équatoriale à l’intérieur d’une hématie de petite taille, et donnant l’impression d’un
« drapeau » ; F – Un trophozoïte mature de P. malariae en forme de « panier » ; G – Un schizonte, ou méronte, de P. vivax comportant 24 noyaux de
mérozoïtes-fils ; H – Un gamétocyte falciforme (fine flèche noire) et de nombreux trophozoïtes de P.falciparum ; I – Deux gamétocytes de P. ovale, de
forme arrondie et produisant du pigment malarique, aussi dénommée hémozoïne, fruit de la digestion de l’hémoglobine, dispersé dans l’hématie parasitée ;
J – Un gamétocyte de P. malariae, très producteur de pigment malarique, ou hémozoïne, sombre.

Figure 2. Exemples de différents éléments cellulaires observés sur frottis sanguin


et pouvant induire la confusion lors du diagnostic parasitologique de paludisme d’importation
(coloration MGG, grossissement x100). © G. Desoubeaux et collégiale ANOFEL)

A – Une plaquette superposée au cytoplasme d’une hématie (fine flèche grise) ; B – Un corps de Howell-Jolly (cercle rouge), reliquat
nucléaire érythrocytaire ; C – Un anneau de Cabot (pointe noire), reste de fuseau mitotique érythrocytaire.

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ailleurs être observés au sein d’une seule et unique ficilement visibles, quelle que soit l’espèce plasmodiale
hématie (figure 1A). Pour P. vivax et P. ovale, l’hématie considérée. Les gamétocytes s’observent plus volon-
parasitée est plus jeune, donc plus grosse, fragilisée et tiers après la prise de médicaments antipaludiques ou
se déforme de façon soit anguleuse (figure 1B), soit pendant la phase de convalescence. Ainsi, ils doivent en
oblongue en s’allongeant dans le sens du frottis (figure général être plutôt considérés comme des marqueurs
1C-D), respectivement, tout en étant remplie de très d’évolution positive, et lorsqu’ils sont repérés isolément
nombreuses fines granulations sombres, dites granula- à distance du diagnostic initial, ne témoignent en rien
tions de Schüffner. Ces dernières correspondent à des d’un échec thérapeutique.
résidus de la membrane érythrocytaire, conséquences Les principales caractéristiques morphologiques
des remaniements faisant suite à l’entrée du mérozoïte concourant au diagnostic d’espèce sont résumées
dans le globule rouge. De disposition équatoriale en dans le tableau I. Le lecteur doit cependant être
« drapeau » ou d’aspect percé en forme de « panier », averti qu’il n’existe pas un seul et unique critère
les trophozoïtes de P. malariae sont plutôt observables universel permettant de poser le diagnostic de telle
au sein d’hématies âgées, dont la taille paraît diminuée ou telle espèce de façon certaine et définitive. Il est
par rapport aux hématies saines (figure 1D). Exception- plutôt encouragé à tenter de rassembler un faisceau
nellement diagnostiquée en Europe, P. knowlesi présente d’arguments au cours de l’observation de la lame afin
une morphologie microscopique très similaire à celle de de garantir une identification correcte. Pour toutes
P. malariae, et sa distinction nécessite obligatoirement le ces raisons, il apparaît déraisonnable de porter un
recours à des techniques diagnostiques additionnelles. diagnostic de paludisme et une identification d’espèce
Les stades parasitaires autres que les trophozoïtes, sur l’observation d’un seul élément parasitaire isolé.
c’est-à-dire les schizontes ou mérontes (figure 1G), L’opérateur doit donc s’efforcer de procéder à la lec-
ainsi que les gamétocytes (figure 1H-J), sont plus dif- ture d’un grand nombre de champs microscopiques.

Tableau 1. Critères morphologiques microscopiques pour l’identification


d’espèce plasmodiale lors du diagnostic de paludisme d’importation.
Pl. falciparum Pl. vivax Pl. ovale Pl. malariae
panaché à faible panaché à faible panaché à faible
Allure générale du frottis sanguin ™ monotone parasitémie parasitémie parasitémie
Polyparasitisme
fréquent inhabituel possible exceptionnel
(≥ 2 trophozoïtes/ hématie parasitée)
Taille des hématies parasitées standard augmentée augmentée diminuée

Forme des hématies parasitées standard trapézoïdale et anguleuse oblongue et frangée standard

Granulations de Schüffner intra-érythrocytaires š absentes nombreuses et très fines nombreuses et fines absentes

Taches de Maurer intra-érythrocytaires › occasionnelles absentes absentes absentes


Pigment malarique œ limité fin et dispersé fin et dispersé abondant et gros
fine en ‘bague’ ou
© G. Desoubeaux et collégiale ANOFEL)

Morphologie de l’anneau cytoplasmique épaisse évasée


en ‘écouteur’ ou épaisse en ‘drapeau’
des trophozoïtes matures de localisation et amoeboïde  et globuleuse ou en ‘panier’
marginée
ponctuée, parfois grosse, fragmentée et
Morphologie du noyau des trophozoïtes matures Š divisée déformée grosse et globuleuse grosse
10 – 14 μm, 12 – 24
Morphologie des schizontes Ÿ (si présents) / noyaux 10 μm, 8 – 12 noyaux 5 – 6 μm, 6 – 12

Morphologie des gamétocytes (si présents) 10 μm, falciforme 10 – 12 μm arrondie 8 – 10 μm, arrondie 5 – 6 μm, arrondie

™ un frottis monotone décrit une préparation qui ne présente qu’un elles correspondent possiblement à des renforcements du contour
seul stade asexué, au contraire d’un frottis panaché qui permet de la vacuole digestive parasitaire ;
d’observer au moins deux stades parasitaires différents ; œ synonyme de « hémozoïne » ;
š les granulations de Schüffner sont des inclusions intra-cytoplasmiques  définissant un cytoplasme parasitaire tortueux, aux contours
très nombreuses et très fines, correspondant à des reliquats de entrelacés ;
membrane érythrocytaire, conséquences du remodelage de cette ž les trophozoïtes immatures sont très ressemblants les uns aux
dernière au décours de l’entrée du mérozoïte dans l’hématie ; autres, quelle que soit l’espèce plasmodiale, et miment volontiers les
› les taches de Maurer sont des inclusions intra-cytoplasmiques en trophozoïtes de P. falciparum ;
forme en « coup d’ongle » limitées à une quinzaine par globule rouge ; Ÿ synonyme de « mérontes ».

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Figure 3. Morphologie des différents éléments parasitaires observables sur goutte épaisse
et concourant au diagnostic parasitologique de certitude de paludisme d’importation
(coloration MGG, grossissement x1000).

© G. Desoubeaux et collégiale ANOFEL)


A – Nombreux trophozoïtes de l’espèce P. falciparum, dont la plupart sont en forme de « bague » (cercle rouge) au milieu des
hématies lysées donnant un aspect nuageux violet au champ microscopique ; B – Un gamétocyte de P. ovale, entourée de pigment
malarique abondant, ou hémozoïne. Les noyaux des leucocytes, sombres, arrondis ou polylobés, et gros, sont toujours visibles,
malgré le traitement hémolytique préalable.

De même, il n’est pas impossible que deux espèces plas- ligne du diagnostic d’urgence du paludisme d’importa-
modiales cohabitent sur un même frottis sanguin, même tion, d’autant plus qu’elle présente une bien meilleure
si ce scénario reste relativement rare, représentant envi- sensibilité que le frottis, permettant en effet l’analyse
ron 0,5 % des diagnostics de paludisme d’importation en d’un volume sanguin supérieur [20]. Sa limite de détec-
France [4]. La charge parasitaire sanguine est estimée sur tion a ainsi été estimée à 1 à 10 parasites /μL de sang, ce
le frottis sanguin en pourcentage, en établissant un rap- qui permet, en cas de négativité et sous réserve qu’elle
port entre le nombre d’hématies parasitées et le nombre ait été lue en entier, d’éliminer l’hypothèse diagnostique
d’hématies totales, saines et parasitées, décomptées sur de paludisme avec une très grande valeur prédictive
plusieurs champs microscopiques homogènes en nombre négative. Dans ce sens, la goutte épaisse peut être
et répartition de globules rouges. Seuls les trophozoïtes considérée comme une technique de concentration
et schizontes doivent être considérés par ce dénombre- fiable, même si la distinction des espèces plasmodiales
ment. Lors du diagnostic d’un accès palustre d’importa- est globalement plus complexe que sur un frottis.
tion à P. falciparum, une parasitémie supérieure à 4 % est Le principe de la réalisation technique de la goutte
considérée comme un élément de gravité à rapporter épaisse repose sur l’observation complète d’une pré-
expressément au clinicien en charge du patient, afin paration sanguine, déposée en un cercle réduit sur une
d’adapter sa prise en charge thérapeutique [6,7]. lame de verre standard puis hémolysée via différents
types d’agents comme la saponine ou l’eau distillée,
Goutte épaisse et ensuite colorée selon la méthode de Giemsa [20].
Même si elle a toujours été considérée comme la Contrairement au frottis sanguin mince, l’intégrité des
méthode de référence, la goutte épaisse a longtemps cellules sanguines n’est plus préservée, ce qui peut
souffert d’une lenteur de réalisation qui ne lui conférait compliquer la lecture de la lame par un opérateur non
alors qu’un rôle de confirmation à distance du frottis averti. Les éléments parasitaires restent repérables
sanguin mince, ainsi que d’une difficulté de lecture qui grâce à leur noyau qui apparaît bien coloré sur un
ne la réservait qu’aux laboratoires les plus experts. Le fond violet pâle, et entouré d’un anneau cytoplasmique
développement d’alternatives rapides et plus aisées à bleu-gris plus ou moins épais en fonction de l’espèce
interpréter l’a définitivement fait entrer en première plasmodiale (figure 3). Connaissant précisément le

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volume sanguin initialement déposé sur la lame, il microtube capillaire. Par centrifugation du microtube, la
est possible d’estimer la parasitémie en indiquant le sédimentation sépare les différentes couches cellulaires
nombre de formes parasitaires asexuées dénombrées de l’échantillon en fonction de leur densité respective :
sur l’ensemble de la goutte épaisse, ou calculée grâce les leucocytes, puis les hématies, et enfin les plaquettes.
à un produit en croix via les résultats de la numération La surface de la couche érythrocytaire est observée
formule sanguine, en ramenant le décompte de para- en lumière ultraviolette, à 480 nm de longueur d’onde,
sites au nombre de noyaux de leucocytes observés sur afin d’y rechercher les hématies renfermant l’acridine
la préparation. orange qui se serait fixée sur les noyaux parasitaires.
Les globules rouges étant normalement dépourvus de
La fluorescence directe toute structure nucléaire propre, seuls ceux héber-
La méthode de quantitative buffy coat Malaria (QBC geant un ou des parasites sont repérables, puisque
Malaria®) est une technique de concentration utilisant Plasmodium spp. est un protozoaire possédant un vrai
l’affinité d’un agent intercalant, l’acridine orange, pour noyau. Cette méthode a une sensibilité équivalente à
les brins d’acides nucléiques des noyaux plasmodiaux. celle de la goutte épaisse, et permet de détecter des
Pratiquement, après incorporation de l’acridine dans le parasitémies très basses, de l’ordre de 1 parasite/μL
spécimen sanguin à analyser, celui-ci est placé dans un sang. En revanche, elle nécessite l’équipement par un

Figure 4. Principe de fonctionnement d’un test de diagnostic rapide dans le cadre


de la recherche d’antigènes plasmodiaux circulants dans le sang périphérique.

© G. Desoubeaux et collégiale ANOFEL)

Environ 5-10 μL d’échantillon sanguin est déposé dans le réceptacle inférieur du dispositif, au niveau de la zone dédiée de la
bandelette de nitrocellulose (1). Si le spécimen biologique contient un ou des antigènes plasmodiaux reconnus par les anticorps
marqués libres, alors des complexes immuns antigène-anticorps se forment au point de dépôt. Du tampon de lyse, jouant le
rôle d’agent d’élution, est ensuite ajouté (2), permettant, par phénomène de capillarité, le début de la migration du solvant qui
contient les complexes immuns formés au préalable. Ceux-ci sont arrêtés lorsqu’ils sont retenus par des anticorps fixés le long
de la bandelette réactive. Ces anticorps fixés ne sont pas visibles avant le début de la réaction. Une bande de coloration sombre
apparaît alors au niveau de la zone de fixation en sandwich. Une solution de rinçage est parfois utilisée pour aider à nettoyer la
bandelette et mieux visualiser les bandes réactives. À l’extrémité terminale de la bandelette, une bande contrôle témoigne de
l’élution complète, donc du bon déroulement de la réaction, en fixant les anticorps du mélange qui n’ont pas été complexés au
départ. Dans l’exemple présent, la réaction est positive au niveau de la bande contrôle et de la bande HRP2, et non au niveau de la
bande PvLDH. Ce schéma est possiblement compatible avec un accès palustre récent ou actuel à P. falciparum, sous réserve d’une
confirmation microscopique dans le sang.
Abréviations :
EDTA : Éthylène diamine tétra-acétique - HRP2 : Histidin-rich protein de Plasmodium falciparum - PvLDH : Lactate déshydrogénase de
Plasmodium vivax

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microscope à fluorescence et n’autorise pas la déter- soient spécifiques d’espèce ou mixtes, telles que la
mination de la parasitémie, ni de l’espèce plasmodiale, LDH (lactate déshydrogénase) ou l’aldolase, surtout
et doit donc être considérée seulement comme une lors des infections avec l’espèce P. ovale pour lesquelles
technique de dépistage. des faux-négatifs sont très fréquents. Les TDR ne per-
mettent pas de mesurer la parasitémie, ni d’identifier
Approche indirecte l’espèce plasmodiale en cause quand les antigènes
qu’ils détectent sont mixtes, et souffrent de réactions
Détection d’antigènes circulants croisées avec certains éléments sanguins comme le
Basés sur le principe d’immunochromatographie sur
facteur rhumatoïde. De plus, à cause du temps de clai-
support solide, les tests de diagnostic rapide (TDR)
rance qui est prolongé, surtout pour l’antigène HRP2
détectent des antigènes parasitaires de nature pro-
de P. falciparum, le résultat de TDR peut rester positif
téique circulant dans le sang périphérique [13]. Cer-
plusieurs jours, voire semaines, après la résolution
tains dispositifs sont capables de fixer les antigènes
d’un accès palustre.
monospécifiques, c’est-à-dire ceux propres à l’espèce P.
falciparum, ou à P. vivax, d’autres détectent des antigènes Pour toutes les raisons évoquées ci-dessus, dans les
mixtes, appartenant à toutes les espèces plasmodiales. pays non endémiques du paludisme comme en Europe,
Les TDR sont très simples d’utilisation, généralement les TDR doivent être considérés comme de très bons
conditionnés en emballage unitaire, et ne nécessitent tests biologiques d’orientation, mais en aucun cas
que quelques microlitres de sang total à déposer à ne doivent se substituer totalement aux techniques
l’extrémité d’une bandelette de nitrocellu- microscopiques susmentionnées. De plus, même
lose. Au niveau de ce site de dépôt, le si cet argument est de moins en moins un
fabricant a préalablement déposé les obstacle à leur utilisation généralisée,
anticorps monoclonaux marqués leur coût unitaire apparaît encore
correspondants aux différents
Les tests relativement élevé, en tout cas en
antigènes recherchés. Si l’un de de diagnostic comparaison de celui du frottis
ces antigènes plasmodiaux est sanguin mince ou de la goutte
présent dans le sang testé, il se
rapide détectent des épaisse.
lie avec l’anticorps monoclonal antigènes parasitaires
marqué correspondant. Grâce à Détection d’anticorps
de nature protéique La détection d’anticorps anti-
l’apport d’un tampon de lyse, le
sang et les monoclonaux migrent circulant dans le sang Plasmodium n’a en général pas
ensuite par capillarité le long d’indication dans la démarche
périphérique diagnostique d’un accès palustre
de la bandelette. Si un complexe
immun s’était précédemment formé, aigu. Les anticorps ne sont en effet
il est arrêté là encore de façon immune, produits par les plasmocytes dérivés
et matérialisé par le développement d’une des lymphocytes B qu’environ 10-20 jours
bande colorée à l’endroit spécifiquement indiqué par après le premier contact avec le parasite dans le sang
le fabricant. Un contrôle interne est présent dans circulant et donc le début de l’accès. La détection des
chaque test : l’excès d’anticorps réactifs, non fixés sur anticorps anti-Plasmodium peut être éventuellement
le ou les antigènes plasmodiaux recherchés, continue réalisée dans des contextes diagnostiques très spéci-
à migrer le long de la bandelette, et est arrêté en aval fiques de patients présentant des formes chroniques
par un anticorps anti-anticorps non spécifique, fixé de l’infection, tels que le paludisme viscéral évolutif
à la membrane. Une nouvelle ligne colorée apparaît ou la splénomégalie palustre hyperactive qui sont
alors et valide ainsi le bon fonctionnement du test des entités plutôt diagnostiquées chez les sujets rési-
(figure 4). Au total, les résultats sont disponibles en dant en zones d’endémie, et non chez les voyageurs
moyenne en 5 à 30 minutes, en fonction des marques. épisodiques. Étant donné que sa positivité peut per-
Une dizaine de dispositifs différents de TDR est doré- durer jusqu’à deux ans après l’épisode infectieux, la
navant disponible sur le marché et bénéficie d’un mar- sérologie est aussi parfois employée pour établir une
quage « CE ». Tous présentent une bonne sensibilité, preuve rétrospective d’une fièvre passée, jusque-là
surtout pour la détection de l’antigène HRP2 (histidin- inexpliquée. Une autre circonstance de l’utilisation
rich protein 2), propre à l’espèce P. falciparum, pour de la sérologie, en dehors du strict cadre du dia-
lequel le seuil de détection est proche de celui de gnostic, est aussi la recherche d’un contact antérieur
la goutte épaisse. Seules les très faibles parasitémies, avec les plasmodies chez un sujet candidat à un don
ainsi que les très fortes par effet de zone, peuvent de sang. Les tests d’immunofluorescence indirecte,
fausser l’interprétation des TDR pour HRP2. Avec l’hémagglutination indirecte et l’ELISA (enzyme linked
des limites de détection proche de 100 parasites/␮L, immunosorbent assay) sont classiquement utilisés. Ce
les résultats sont globalement moins bons pour la sont des antigènes de l’espèce P. falciparum qui servent
détection des autres antigènes plasmodiaux, qu’ils généralement à préparer les kits réactifs.

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Détection d’acides nucléiques par le traitement antipaludique, est tolérée. En revanche,


Longue à réaliser et encore relativement onéreuse en la notification de la présence de stades asexués sur le
comparaison avec les techniques directes, la recherche compte rendu biologique d’un contrôle parasitologique
d’acides nucléiques spécifiques des espèces du genre à une semaine de traitement doit attirer l’attention
Plasmodium par PCR (polymerase chain reaction) n’a du clinicien quant à un éventuel échec de sa prise en
classiquement pas sa place dans le diagnostic d’ur- charge thérapeutique.
gence d’un accès palustre d’importation [21]. Habi- Un dernier contrôle sanguin est préconisé un mois
tuellement, la petite sous-unité de l’ARNr (acide ribo- après le début du traitement, afin de garantir l’absence
nucleique ribosomale) est ciblée. Bien que très sensible de rechute d’apparition retardée qui ont été parfois
car permettant de détecter de très faibles parasité- décrites avec certains antipaludiques comme l’associa-
mies de l’ordre de 0,3 parasites/μL de sang, l’usage de tion atovaquone–proguanil [22].
la biologie moléculaire est pour l’instant réservé aux
centres spécialisés. Ces techniques sont par exemple
utilisées dans les cas équivoques avec de très faibles Conclusion
parasitémies ou avec des formes parasitaires altérées
par la prise médicamenteuse préalable d’antipalu- La recherche de paludisme d’importation doit être
diques, et donc difficilement reconnaissables. La PCR réalisée, en urgence absolue, devant toute notion de
est également utile dans le suivi post-thérapeutique et fièvre au retour de voyage en zone d’endémie palustre.
l’étude des gènes parasitaires impliqués dans la résis- Le diagnostic de certitude est obligatoirement basé
tance aux antipaludiques. La PCR quantitative autorise sur l’observation microscopique de formes parasi-
la quantification de l’ADN plasmodial et donc une taires sanguines. Des techniques anciennes, comme le
évaluation de la charge parasitaire [4]. frottis sanguin mince et la goutte épaisse, constituent
toujours les méthodes de référence, même si leur
interprétation nécessite une certaine expertise. Les
Importance du suivi tests de diagnostic rapides, qui tendent à dépister les
antigènes protéiques circulants, sont de très bons sup-
parasitologique dans les ports pour aider à orienter au mieux le diagnostic. Un
suites de la prise en charge contrôle parasitologique minutieux est indispensable à
distance, afin de garantir le succès du traitement anti-
diagnostique paludique qui a été prescrit au décours du diagnostic
initial. QQ
Au décours du diagnostic initial de paludisme d’impor-
tation, et une fois le traitement antipaludique initié, il Liens d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de liens
est indispensable d’assurer un suivi biologique rigou- d’intérêts.
reux, afin de garantir la bonne évolution clinique et
biologique du patient impaludé [6,7]. En plus des cri-
Remerciements
tères de gravité biologique, telles que par exemple la
Les auteurs remercient le Pr Dominique Chabasse pour
glycémie ou l’anémie dont il est important d’évaluer
la relecture attentive du manuscrit.
la correction rapide, le biologiste médical et les tech-
niciens de laboratoire sont principalement sollicités
pour apprécier l’involution de la charge parasitaire
qui est habituellement progressive, dans les jours qui
suivent l’instauration de la thérapeutique. La parasi- Points à retenir
témie est jugée 72 heures, très précisément, après la
première prise médicamenteuse. À ce stade, il n’est ◗tLe paludisme d’importation est responsable d’environ
pas impossible de constater la persistance de quelques 150-200 accès graves par an en France.
trophozoïtes sur le frottis sanguin ou la goutte épaisse. ◗tSon diagnostic passe par l’usage de techniques de
Sous antipaludiques traditionnels, tels que ceux dérivés laboratoires simples, réalisées à partir de prélèvement
de la quinine ou l’association atovaquone - proguanil, sanguin périphérique comme le frottis sanguin mince
celle-ci est habituelle et n’a rien d’inquiétant, à partir et la goutte épaisse rapide.
◗tLa détection d’antigènes plasmodiaux circulants dans le
du moment où elle a été abaissée d’au moins 75 % par
sang représente un test d’orientation diagnostique qui
rapport à la parasitémie initiale.
a grandement contribué à améliorer la prise en charge,
Un deuxième prélèvement sanguin de contrôle est même si une confirmation microscopique est toujours
ponctionné sept à huit jours après le début du traite- impérative au décours.
ment. Cette fois-ci, l’absence totale de formes parasi- ◗tLe laboratoire de biologie médicale doit être capable de
taires asexuées est attendue sur l’ensemble des diffé- rendre le résultat définitif de la recherche de paludisme
rentes préparations sanguines. Seule la présence de dans les deux heures qui suivent le prélèvement sanguin.
gamétocytes, témoins du stress induit sur le parasite

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