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Conduite à tenir devant une Chéilite

Introduction :
Les chéilites correspondent à un état inflammatoire aigu ou chronique des lèvres. Elle
prédomine souvent sur la lèvre inférieure. La chéilite aiguë peut être érythémateuse,
œdématiée, érosive ou fissuraire ; elle est souvent douloureuse. La chéilite chronique
devient plutôt érythématosquameuse, croûteuse, kératosique, souvent asymptomatique. La
chéilite angulaire (perlèche) est une fissure de la commissure labiale antérieure, qui peut
être uni- ou bilatérale.
Interrogatoire :
-date et durée d’évolution de la chéilite,
-atteinte intermittente ou permanente,
-mode de vie (exposition solaire, climatique),
-facteurs irritatifs ou de contact, tabagisme, terrain atopique, prises médicamenteuses,
-maladies générales ; phototype
-Rechercher une altération de l’état général,
-des signes pulmonaires, des arthralgies, des sarcoïdes, un érythème noueux, orientant vers
une sarcoïdose.
-Des signes digestifs, à type de douleurs abdominales, de diarrhée ou de rectorragies, voire
des signes biologiques (anémie ferriprive, syndrome inflammatoire) doivent faire rechercher
une maladie de Crohn.
Examen clinique :
Rechercher une macération et irritation locale, surinfection mycosique ou bactérienne.
Il faut examiner l’ensemble de la cavité buccale les dents ; examen des muqueuses génitale,
anale et oculaire.
Le revêtement cutané lésions dermatologiques élémentaires (érythème, œdème, kératose,
squames, érosion, ulcération…).
Etiologie :
Les chéilites de cause locale :
Ce sont les étiologies les plus fréquentes des chéilites.
Chéilites climatiques : L’agression par le froid et le vent peut entraîner une chéilite sèche,
desquamative et fissuraire ; La lèvre inférieure peut être le siège d’une fissure chronique,
profonde, douloureuse, à bords kératosiques, peut être aggravé par un tic de léchage. Le
traitement : l’application pluriquotidienne de corps gras et d’émollients.
Chéilites mécaniques : Il faut rechercher tout facteur mécanique : contacts anormaux entre
dents et lèvres, tics, tétine, pratique d’un instrument de musique…
L’examen montre des excoriations ou des érosions labiales superficielles, Le traitement
consiste à faire prendre conscience au patient du tic, et à tenter de le corriger, ce qui est
difficile : une psychothérapie ou des anxiolytiques peuvent être nécessaires.
Chéilites actiniques :
La chéilite actinique aiguë : est liée à une exposition intense aux (UV), La lèvre inférieure, la
plus exposée aux UV, est le siège d’un œdème érythémateux et douloureux.
La chéilite actinique chronique : est secondaire à une exposition prolongée, pendant des
années, aux rayons UV, a été classée par l’OMS comme une « affection potentiellement
maligne » les UV induisent des dommages à l’ADN, pouvant évoluer vers des carcinomes
épidermoïdes, une ou plusieurs biopsies est recommandée.
En cas de dysplasie sévère ou de carcinome, la chirurgie par vermillonectomie reste le
traitement de référence. Les traitements destructeurs, non chirurgicaux, peuvent être
utilisés sur une chéilite actinique isolée ou avec une dysplasie légère : cryothérapie ou
cryochirurgie pour une atteinte focale, traitements par topiques (5FU, imiquimod) ou
photothérapie dynamique pour une plus large surface.
Chéilite leucokératosique tabagique :
Il s’agit souvent d’une atteinte de la lèvre inférieure, avec une plaque blanchâtre
(leucokératose). Une biopsie est nécessaire pour rechercher une dysplasie ou un carcinome.
Chéilites liées à un eczéma de contact : L’eczéma aigu se manifeste sous forme de chéilite
érythémateuse, œdémateuse, prurigineuse, qui évolue vers des vésicules, puis des érosions
post-vésiculeuses, suintantes et croûteuses. Il existe un prurit labial et péri-labial. Le
diagnostic est plus difficile en cas d’eczéma chronique, avec un aspect de chéilite lichénifiée,
des lèvres épaissies, érythématosquameuses, fissurées, peu ou pas prurigineuses.
Le traitement consiste à supprimer l’allergène en cause et appliquer des dermocorticoïdes.
Chéilites caustiques : liée à l’application d’une substance irritative. Il s’agit d’une chéilite
érythémateuse et œdémateuse, douloureuse. Il faut rechercher une stomatite caustique
associée.
Chéilites « factices » : Chéilite chronique, asymptomatique, où les lèvres sont recouvertes de
squames très épaisses, blanc jaunâtre voire brun noir, sont liées à une forme de
pathomimie, Il s’agit de patients avec un terrain psychologique particulier. Le traitement
comporte : émollients, ablation des croûtes, psychothérapie, psychotropes.
Chéilites infectieuses :
Chéilites bactériennes : L’impétigo chez l’enfant, peut être labial, réalisant un tableau de
chéilite vésiculopsutuleuse ou bulleuse, évoluant rapidement vers des érosions suintantes
recouvertes de croûtes méllicériques. Le traitement associe des soins antiseptiques locaux,
une antibiothérapie locale ou générale active sur le streptocoque et/ou le staphylocoque.
Chéilites virales :La principale cause est HSV1 ou HSV2, qui peut se présenter comme des
vésicules groupées en bouquet à cheval sur le vermillon et le versant cutané, qui évolue vers
des lésions croûteuses et disparaît en une dizaine de jours .
Chéilites mycosiques : liée à Candida albicans, peut se manifester par une chéilite
érythémateuse avec une perlèche bilatérale. Il faut rechercher d’autres signes de candidose
buccale, Le traitement comporte la correction des facteurs favorisants et la prescription
d’antifongiques.
Chéilites de cause « générale » :
La dermatite atopique : Le patient (adulte ou enfant) atopique peut avoir une chéilite
érythématosquameuse des deux lèvres et des commissures, fissuraire, chronique, associée à
une lichénification, voire des fissures radiées péri-buccales, Le prurit est fréquent. Le
traitement consiste en l’application de dermocorticoïdes et d’émollients.
Les chéilites carentielles : Les carences en fer et en vitamines (B9, B12) peuvent comporter
une chéilite érythémateuse volontiers angulaire, associée à d’autres manifestations buccales
(stomatite, glossite érythémateuse).
Dermatoses inflammatoires auto-immunes :
Le lichen plan : atteint fréquemment les lèvres, sous forme de stries d’aspect réticulé,
associées parfois à des plaques leucokératosiques L’examen endobuccal peut retrouver des
leucokératoses réticulées à la face interne des joues (lichen plan réticulé). Dans sa forme
érosive, le lichen plan peut se présenter comme une chéilite érosive associée à des plaques
érythémateuses et érosives endobuccales.
Le lupus érythémateux systémique et le lupus discoïde chronique peuvent s’accompagner
d’une chéilite leucokératosique, avec un érythème discret, des squames blanchâtres, parfois
des érosions, la présence d’autres lésions cutanéomuqueuses associées évocatrices de lupus
est quasi constante. La photosensibilité et le caractère photodéclenché de la chéilite
peuvent également orienter vers le diagnostic de chéilite lupique.
Les chéilites médicamenteuses : rétinoïdes (acitrétine, isotrétinoïne, alitrétinoïne).
Les chéilites d’origine immuno-allergique :
L’érythème polymorphe (EP) et le syndrome de Stevens-Johnson (SSJ) sont des
manifestations cutanéomuqueuses et systémiques secondaires à une réaction immuno-
allergique à un agent infectieux, Il existe des manifestations cutanées (cocardes acrales dans
l’EP, exanthème maculopapuleux avec pseudo-cocardes prédominant au tronc et à la racine
des membres dans le SSJ), ainsi qu’une atteinte des muqueuses orales, génitales, oculaires à
type d’érosions post-bulleuses. L’atteinte buccale est très évocatrice à type de chéilite
érosive et croûteuse associée à une stomatite érosive diffuse. Il existe des formes d’EP et de
SSJ avec atteinte muqueuse exclusive, appelées ectodermose pluriorificielle.
Macrochéilites granulomateuses :
Un œdème labial, survenant le plus souvent chez un adulte jeune, L’atteinte chronique
dévient moins œdémateuse, plus ferme. La confirmation diagnostique nécessite une biopsie.
La macrochéilite granulomateuse peut être isolée, idiopathique (macrochéilite
granulomateuse de Miescher) ou secondaire à une autre pathologie).
Le syndrome de Melkersson Rosenthal : d’étiologie inconnue, qui associe : une macrochéilite
granulomateuse, un œdème de la muqueuse gingivale, linguale, ou un œdème facial, des
ganglions cervicaux, une fièvre ; une paralysie faciale périphérique
Le traitement : des corticoïdes locaux, en injection intralésionnelle ou systémiques. Le
principal traitement systémique utilisé en France est la clofazimine, mais d’autres
thérapeutiques ont été rapportées comme la minocycline, le métronidazole ou anti-TNFα.
Les formes chroniques permanentes sévères peuvent relever d’une plastie chirurgicale.
Formes rares de chéilite
Chéilite plasmocytaire : est une forme rare de chéilite inflammatoire, d’étiologie inconnue,
Ce sont des pathologies bénignes, qui correspondraient à une réaction d’hypersensibilité à
un antigène. Cliniquement, il existe une chéilite érythémateuse, œdémateuse, érosive, qui
peut être associée à une atteinte orale plus étendue (gencives, palais, langue, pharynx). Les
traitements rapportés sont les corticoïdes (locaux ou intralésionnels), les inhibiteurs de
calcineurine topiques (tacrolimus topique).
Conclusion : Une chéilite est une inflammation des lèvres, C’est une affection très
fréquente, car cette zone fragile est souvent sollicitée et exposée à divers facteurs externes
mécaniques ou chimiques. Les chéilites sont secondaires aussi a des causes internes.

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