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Analyse Linéaire La Femme Gelée, Annie Ernaux
Analyse Linéaire La Femme Gelée, Annie Ernaux
Introduction
Présentation du contexte historique/littéraire et de l’extrait : Les années 60 sont en France une période de
réflexion et de débats, notamment sur les rapports hommes-femmes et la place de ces dernières dans la société,
dont les évènements de mai 68 seront l’expression historique. Dans La Femme gelée, œuvre largement
autobiographique, Annie Ernaux montre les limites de l’émancipation féminine dans les années 60.
Mariée à un étudiant en droit pourtant plein de théories idéales sur l’égalité des sexes, elle est vite happée par un
conditionnement imposé par la société et voit sa vie confisquée par toutes les tâches ménagères qu’elle est
finalement seule à accomplir.
Dans cet extrait, le lecteur observe la jeune femme pleine d’enthousiasme et de curiosité pour les études et
l’avenir, perdre peu à peu son élan, ses propres désirs de liberté et devenir comme tant d’autres une « femme
gelée ».
[Lecture du texte]
Plan :
lignes 1-7 (« […] Il fallait changer ») : expose l’envie de la narratrice de rendre plus équitable le partage des
tâches domestiques et sa culpabilité de n’être pas bonne ménagère.
lignes 7-12 (« A la fac […] braque ») : exprime alors la décision de la narratrice de demander conseil à d’autres
étudiantes mariées, ainsi que la mise en échec de sa démarche.
lignes 12-21 (« Alors, jour après jour […] arts d’agréments ») : présente le constat d’un certain silence généralisé
autour de la condition des femmes mariées, qui pousse la narratrice à se décourager et perdre le fil de ses études.
lignes 21 à la fin du texte : confronte le discours théorique du mari sur l’égalité à la réalité pratique vécue par la
narratrice.
4. Un effet de balancier qui ne sert que l’un des deux membres du couple : le mari.
- L’évocation d’un « flou étrange » + phrase non verbale « Moins de volonté » → déclin du désir
d’émancipation intellectuelle chez la femme, qui profite cependant au mari.
- Les couples de pronoms personnels « je/lui » se multiplient et s’opposent : « je table sur sa réussite à lui,
qui, au contraire, s’accroche plus qu’avant » → l’homme qui bénéficie de la dilution de la volonté
d’émancipation de sa femme
Conclusion
L’écrivaine Annie Ernaux utilise le cadre autobiographique pour dénoncer, à travers le récit de son quotidien
d’étudiante et de mère mariée, l’inégalité d’accès à la culture entre les hommes et les femmes dans la société
française des années 1960. Le récit de la narratrice dessine, à travers les sentiments de culpabilité et de
ressentiment qu’elle exprime, la déconstruction des mythes autour de la vie conjugale, les désillusions vécues
dans sa vie de couple et la mise en échec des discours sur l’égalité hommes-femmes, les limites de son
émancipation.
Dans L’Écriture comme un couteau (2003), Annie Ernaux explique le lien entre sa façon d’écrire et son milieu
d’origine : « J’importe dans la littérature quelque chose de dur, de lourd, de violent même, lié aux conditions de
vie, à la langue du monde qui a été complètement le mien jusqu’à dix-huit ans, un monde ouvrier et paysan.
Toujours quelque chose de réel ». Il s’agit pour elle de raconter au plus près des souffrances vécues, sans jamais
les édulcorer ni les embellir. Ce poids du réel et du quotidien fait de ses œuvres des écrits « à hauteur d’homme
», dans lequel il peut se projeter ou retrouver ses propres expériences : c’est ainsi qu’Annie Ernaux, en racontant
sa vie, raconte aussi celle des autres et atteint une dimension universelle.