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La Renaissance italienne et ses influences

Le développement de l’espace théâtrale et le jeu. Ce sont deux développements distincts dont


l’un opérant dans le théâtre institutionnalisé, l’autre en dehors de ce théâtre sur les plateaux en
espace public dans des salles de sociétés et donc, il y a un certain contrepoint entre un théâtre
élitaire qui s’institutionnalise à travers l’espace et de l’autre côté un théâtre populaire qui
résiste à cet autre développement à travers le jeu.
La Renaissance italienne pour le théâtre nous a donné deux héritages principaux d’un côté : la
salle à l’italienne et de l’autre côté : la commedia dell’arte (sorte de prédécesseur de toutes les
pratiques burlesques et dans la même ligné que la farce).

1. Développement du lieu théâtral en Europe : l’institutionnalisation du théâtre à


travers l’espace.
L’idée de l’espace théâtrale est une idée continentale (en Angleterre jusqu’à la venue des
protestants au milieu du 17e siècle, il y a un tout autre modèle ouvert, le développement sur le
continent est le contraire et c’est ce développement, ce modèle qui va aboutir sur la salle à
l’italienne pour en devenir dominant).

Vers la fin du 16e siècle, début du 17e siècle, on a à faire à un théâtre populaire, un théâtre
ouvert comme dans le théâtre Elisabéthain.

 Gravure de la place des Vosges à Paris, où l’on voit au milieu un plateau (un
échafaud). On joue des tragédies violentes. Théâtre qui se veut ouvert, où l’on
réfléchit sur le monde.
Définition de l’échafaud : « le petit théâtre que l’on dresse en une place publique, sur lequel
on roue les criminels, on couple la tête à un gentilhomme »
Dans le dictionnaire, il y a une confusion entre la violence réelle de l’exécution et la violence
symbolique des tragédies violentes.
Ça correspond à la réalité historique où à cette époque, un échafaud avait une triple fonction :
1. D’abord, on joue du théâtre
2. Ensuite, une messe
3. Puis, une exécution
Il s’agit de trois moments en dehors de l’ordinaire : le moment magique du comédien qui
devient un personnage, le moment magique de la transsubstantiation et le moment de
l’exécution, moment magique et cruel. = but était de créer une confusion entre la violence
réelle et la violence symbolique.
C’est donc un espace qui sortait de l’ordinaire et où l’on pouvait vivre quelque chose
d’extraordinaire.
Donc le théâtre en France, à cette époque, ne s’est pas encore institutionnalisé car c’est un
modèle très similaire au théâtre Elisabéthain.
Au cours de la 1ère moitié du 17e siècle, le théâtre va essayer de s’institutionnaliser, c’est-à-
dire s’autonomiser de la vie sociale et essayer de se développer en lieu à part.
En France, cela se fera par une étape intermédiaire
assez particulière que l’on appelle le jeu de paume.
C’était une sorte de sport entre le badminton et le
ping-pong, qui est pratiqué dans une salle
rectangulaire avec des balcons latéraux. Certaines
compagnies vont louer ces salles de paumes pour y
jouer du théâtre. D’abord pour quelques mois, puis
pour une grande partie de l’année et ensuite pour
une période stable.

Les salles de paume vont donc se transformer en salle de théâtre. L’exemple le plus connu :
c’est l’hôtel de Bourgogne, la salle de Molière.
Les spectateurs sont mal installés, ceux tout devant ne
voient quasiment rien, les balcons ne sont pas orientés vers
la scène, mais sur le parterre. C’est une situation très
compliquée pour les comédiens.
C’est un dispositif très connu dans l’histoire du spectacle où
l’on comprend que ce que l’on fait sur scène n’est qu’un
prétexte pour mettre en place un rituel social où l’on est
amené à utiliser le théâtre pour s’entrevoir, pour voir les autres spectateurs, pour se moquer
des autres, pour prendre plaisir des apparences.
Image du plan : théâtre du Marais, 1644

Grand espace central, deux balcons (trois si l’on compte le rez-de-chaussée) qui donnent sur
le parterre, au fond de la salle, il y a un gradin. Sur ce gradin, il y a le petit milieu théâtral, des
concurrents, des écrivains, des collègues, etc. Ces places, tout au fond de la salle, qui sont
mauvaises permettent aux professionnels du théâtre d’observer les réactions de la salle =
meilleure vue sur la réception de la pièce.

Peinture intéressante puisqu’elle démontre très bien le caractère hétéroclite de l’esthétique


théâtrale. En arrière-fond, on voit une toile d’arrière-fond prototypique, il y a des lustres sur
scène (que l’on retrouve également dans la salle), donc tout l’espace était illuminé, tout le
monde se voyait et c’était l’enjeu, en fait. On y voit des chandelles, qui fallait renouveler
après chaque acte, au fond de la scène, et sur scène, deux types de costumes : des comédiens
héritiers de la commedia dell’arte et des comédiens en costume esthétique « Molière ».
 Aucun problème pour combiner au sein du même spectacle, deux représentations
théâtrales.
En même temps, à la Cour, tout au long du 16e et 17e
siècles, on voit un modèle similaire : salle rectangulaire,
balcons des deux côtés, mais avec une différence, c’est
que le parterre est vide, car il est destiné au Roi et à sa
Cour qui se performe lui-même (Louis XIV).

Peinture ci-dessous, très intéressante. C’est un éventail. Sur la peinture, on voit les spectateurs
debout d’un côté, on voit la scène de combat, il y a également des spectateurs des deux côtés
sur scène. Là, on a à faire au 4e groupe de spectateurs :
1) Ceux dans le parterre
2) Ceux sur les balcons
3) Ceux sur les gradins
4) Ceux sur scène

Les spectateurs sur scène y sont depuis le Cid de Corneille. (Œuvre qui a d’abord été refusée
par l’Académie française, puisque la pièce était beaucoup trop baroque et qui ne correspond
en rien au système esthétique du classicisme ce qui amènera une réécriture. Pièce qui aura un
énorme succès et donc pas assez de places. Ce qui va amener à l’installation d’un système de
banquettes pour les spectateurs sur scène. Places relativement coûteuses qui étaient achetées
par des jeunes arrivistes pour se montrer en spectacle, pour se faire voir.)
Le théâtre se veut populaire, où l’on discute, où les classes sociales s’observent, où l’on se
bat, où l’on deale, où l’on réagit de manière directe sur ce que l’on voit sur scène.

C’est ce que la gravure satyrique explique.

En parallèle, un peu plus tôt, au 16 e siècle, au moment de l’apogée de la Renaissance


italienne, il y a un autre développement qui se met en marche et qui va avoir un grand impact
sur la théâtralité européenne et qui va étape par étape, siècle par siècle, discipliner toutes les
formes hybrides présentées plus haut.
La clé, c’est toute la dynamique culturelle de la Renaissance où l’on va redécouvrir la
littérature classique, les tragédies, les textes de l’époque et on voit et constate en lisant ces
textes, que l’espace théâtrale médiévales est inadapté aux représentations de ces textes. On en
vient donc à réfléchir sur l’espace théâtral auquel on a besoin pour jouer les tragédies.
Un deuxième facteur (pas Patrick hein !) plus précis, c’est la réédition d’une œuvre autour de
l’architecture de Vitruve en 1511.
Page de ce livre :

Elle va être à la base d’une mode de l’architecture antiquisante où l’on va essayer de


construire des bâtiments style Renaissance.
Une autre source importante sont les dessins que l’on retrouve dans les éditions de Térence
(fin du 15e siècle) où l’on va ajouter l’ordre au dispositif médiéval. Ça sera une première
tentative de séparer la scène du public.
L’exemple le plus connu de ce nouveau modèle, c’est le Teatro Olimpico à Vincenza. C’est la
base d’un modèle du 4e mur où l’on essaye d’institutionnaliser le théâtre.

Autre développement typique de la Renaissance, c’est la toile d’arrière-fond qui donne une
illusion de 3D à la réalité théâtrale.

Avec trois prototypes de réalité scénographique (Serlio est l’un des premiers scénographes à
nous présenter ces prototypes) : la comédie, la tragédie et la pastorale.
C’est une idée qui reste, jusqu’au 19 e siècle, largement théorique car : bâtiment idéal qui va se
construire partout en Europe. Mais on sait que même si la volonté politique était
institutionnelle (faire taire le public), c’est tout autre chose qui se passait.
Tout au long du 17e siècle, on voit comment on essaye de perfectionner la technique avec des
machines et toutes autres sortes d’astuces.
On utilise la perspective théâtrale des machines pour créer une sorte d’illusion. Le spectateur
connait le contrat même avec toutes ces machineries.

2. L’émancipation du comédien : la résistance du théâtre populaire.

La commedia dell’arte est un théâtre centré sur l’acteur pas d’auteur, on improvise. (Si texte,
c’est très basique : on donne une situation)
Le seul devoir, la seule chose à respecter c’est qu’à un moment donné, on doit retourner à la
trame narrative de base pour qu’un autre comédien puisse continuer. C’est un théâtre où l’on
utilise des masques, une gestique particulière. On joue sur les prototypes sociologiques, les
stéréotypes, les classes sociales, …
La commedia dell’arte va amener une sorte de professionnalisation de l’acteur. Première fois
dans l’histoire, où l’on a à faire à des comédiens professionnels qui vont toujours jouer le
même rôle et qui deviendront de véritables stars locales. Il va y avoir une identification de
l’acteur dans son personnage et donc l’importance de la virtuosité technique.
Les grandes stars : les Zanni (servants comiques qui sabotent la trame narrative)
Ils jouent des Lazzi (petits textes comiques) qui peuvent ensuite devenir des Burle (quasiment
des spectacles autonomes).
 Art de l’improvisation
Ce sont tous des personnages prototypes avec des costumes, langages, masques prototypiques.

La commedia dell’arte se joue dans un espace public et non dans un théâtre institutionnalisé,
mais très similaire à l’échafaud et au modèle Elisabéthain.
 Théâtre populaire centré sur le jeu du comédien.
Cette commedia a eu un impact en tant que non théâtre institutionnalisé sur le théâtre :
Influence énorme sur Shakespeare, Molière… Il y a une continuité entre le Moyen Age et la
Renaissance à travers cette pratique performative et qui va être la charnière avec toutes autres
traditions de jeux burlesques.
Ex : Charlie Chaplin, Dario Fo, Bill Hicks et l’héritage du clown.
Deuxième développement qui va essayer de mieux intégrer le comédien dans l’illusion
théâtrale : le paradoxe du comédien (Diderot). Cela sera développer au cours.

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