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CUILLERAT Mickaël

RAPPORT D’ETUDE

L’avenir du patrimoine militaire


La reconversion au service de la dynamique urbaine

Directrice d’étude : Brigitte SAGNIER


ENSAL / UE 5RE / L3 / 2011/2012
« Reconvertir
le patrimoine militaire pour
accueillir des habitants et des activités, c’est en
quelque sorte renouer avec l’histoire de la cité. »

Jacques PELISSARD
Extrait du préambule de Patrimoine reconverti du militaire au civil 1

1
GODET Olivier, FOUGEIROL Benoît, 2007. Patrimoine reconverti du militaire au civil. Nouvelles éditions Scala. 271 p.

1
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
Sommaire
Introduction 3
I Le patrimoine militaire 5
01- Evolution du système défensif
02 - Diversité et identité
03- La prise en compte du patrimoine militaire : protection et conservation
A - Un patrimoine atypique à préserver
B - La muséification du patrimoine militaire
C - Les acteurs de la sauvegarde du patrimoine militaire

II La reconversion, nouvelle alternative contemporaine 13


01- Du militaire au civil
A - La cession des biens militaires
B - La dépollution des sites

02- Des reconversions variées, des réponses architecturales adéquates


A - Quel choix pour quel patrimoine ?
B - Quelles postures adopter ?

03- Étude de cas : la reconversion du Fort Saint-Jean à Lyon


III La ville à la reconquête des territoires militaires 23
01- Le fait militaire et la ville
A - La place du militaire dans l’environnement urbain
B - Reconstruire la ville sur elle-même : l’exemple lyonnais

02- Du bâtiment à la friche


03- La reconversion des friches militaires
A - Des usages au service de la ville
B - Désenclaver les emprises militaires
C - Le patrimoine au cœur des projets
D - Des projets à venir…

Conclusion 34
Corpus 36
Remerciements 42
Bibliographie / Webographie / Crédits photographiques 43

Première de couverture :
images de gauche, Fort Saint Jean, Lyon ; image de droite, quartier de Bonne, Grenoble

2
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
Introduction
Comment se fait-il que l’on puisse encore aujourd’hui
admirer les créations architecturales des siècles passés ? Comment
la ville a-t-elle su conserver tout son patrimoine bâti pendant tant
des siècles ? L’architecture, celle considérée comme expression de
l’art, expression de la culture, fut protégée par les hommes, par
l’architecture elle-même. L’architecture militaire au service de
l’architecture. Alors que l’on s’intéresse tant à l’Architecture, cette
architecture de l’esthétisme et des formes géométriques, pourquoi
ne pas tourner les yeux vers cette architecture qui nous a de tout
temps protégés et protégé l’Architecture, seules constructions
autrefois dignes de ce nom.

Si l’architecture militaire renvoie trop souvent à notre


imaginaire, éveillant des souvenirs de châteaux-forts et autres
constructions défensives, on oublie trop souvent que nous sommes
tous les jours confrontés aux traces de ces constructions défensives
autant qu’aux constructions encore présentes sur le territoire
urbain. Nombreux sont les bâtiments militaires aujourd’hui
désaffectés ou libérés de leur fonction défensive qui ponctuent le
territoire national autant que le territoire urbain. Nombres d’entre
eux ont déjà fait l’objet de réhabilitations ou de reconversions pour
répondre aux nouvelles attentes des villes et des populations. Mon
travail de L2 sur le Fort de Montluc, dans le cadre du TD d’histoire de
l’Architecture m’a permis de prendre conscience de l’enjeu des
reconversions dans le cadre du patrimoine militaire.

Alors qu’aujourd’hui la thématique de la reconversion des


bâtiments est de plus en plus d’actualité compte tenu des enjeux
urbains, on note que nous abordons peu ces domaines dans nos
projets de Licence. Si l’on note une évolution importante du
nombre de projets et de reconversions du patrimoine militaire,
l’attitude patrimoniale n’a pas toujours été privilégiée pour ce type
d’architecture « atypique ». Or les villes se doivent aujourd’hui, et
compte tenu des attentes urbaines autant qu’économiques, de
renouer le dialogue avec des constructions autistes du contexte
urbain. Nous nous questionnerons donc sur la qualité de ces
constructions et sur les choix pris pour la reconversion de ce
patrimoine.

La question se heurte entre autre à la problématique de la


persistance du patrimoine bâti sur le territoire, à son réemploi, à sa
reconversion pour adapter l’existant aujourd’hui obsolète à de
nouvelles fonctionnalités et attentes urbaines contemporaines,
mais l’enjeu est aussi urbain, au-delà de la seule échelle de la
construction solitaire. À l’heure où la situation géopolitique
européenne est stable, et alors que les engagements de l’Etat vis-à-
vis des cartes militaires débloquent de nouveaux terrains pour la
ville, celle-ci est confrontée à une problématique oubliée : comment
reconstruire la ville sur la ville, et comment reconstruire la ville dans
la ville ?

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L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
COMMENT LA RECONVERSION DU PATRIMOINE MILITAIRE
PEUT-ELLE AUJOURD’HUI ASSURER A LA VILLE UNE NOUVELLE
DYNAMIQUE URBAINE ?

Nous aborderons dans une première partie la situation


actuelle du patrimoine militaire, quelle est sa place dans le territoire
français et quelles sont les attitudes prises pour assurer la
conservation de ce patrimoine.
Ensuite nous nous orienterons dans un deuxième temps
vers la notion de reconversion des constructions militaires, en
étudiant les partis-pris et les attitudes de reconversions possibles
par plusieurs exemples, ainsi qu’une étude de cas du Fort Saint Jean
de Lyon (actuelle Ecole Nationale du Trésor). Enfin nous terminerons
cette étude par un retour à la grande échelle afin d’étudier le
rapport qu’entretient la ville avec les friches militaires dans le cadre
de la dynamique urbaine via plusieurs exemples contemporains
d’éco-quartiers et opérations urbaines dont le quartier de Bonne à
Grenoble et la place du patrimoine dans la constitution d’un
nouveau quartier de ville ou d’une nouvelle pièce urbaine.

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L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
I - Le patrimoine militaire

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L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
I - Le patrimoine militaire
01- Evolution du système défensif
La ville a de tout temps été confrontée à sa protection vis-à-
vis des assaillants et des villes voisines, que ce soit de la simple
colonie romaine au château féodal, en passant par la ville du
Moyen-Age ou à la ville nouvelle. Depuis l’histoire de la création de
la ville, celle-ci s’est développée autour de sa notion de protection,
de défense, de résistance à une attaque d’envahisseurs. Du modèle
de la ville ceinturée par une enceinte défensive à la citadelle en
passant par la ville protégée par des postes de défenses avancés, la
ville a su faire appel à des techniques de défense variées et
adaptées aux méthodes offensives de chaque époque.
L’architecture militaire est bien spécifique et évolue d’une manière
différente de l’architecture dite « classique », l’architecture des
logements, des équipements… On ne répond pas à un style, on ne
répond pas à une époque, à un courant de pensée, on répond ici
aux évolutions technologiques de l’armement, on conçoit en
fonction de l’autre, en fonction des avancées de l’assaillant.
L’homme, les politiques ont toujours cherché à se protéger, et à
protéger le fruit du travail, le fruit d’un héritage communautaire, la
résultante d’une construction élaborée par le pouvoir en place, les
habitants… Se protéger c’est assurer sa sécurité mais aussi la
sécurité des constructions. On construit des édifices militaires pour
protéger l’architecture. L’architecture à la défense de l’architecture,
l’architecture à son propre service.
Comment ont évolué ces systèmes défensifs pour répondre
aux attentes de protection des villes ?

Très tôt les villes ont pris conscience de la nécessité de se


défendre pour assurer la pérennité de leur cité, la sécurité des
habitants et du seigneur régnant sur ses terres. Le type de défense
privilégié jusqu’au Vème siècle est le modèle de l’enceinte urbaine,
hérité des procédés de défenses romains. Elle est composée de
courtines et de tours de flanquement et encercle la ville.
Très vite ce modèle d’enceinte, que l’on retrouve encore
aujourd’hui à Carcassonne (fig. 1) par exemple, devient onéreux et
laisse place au modèle du château à motte qui multiplie les
enceintes, d’abord en bois puis en pierre, autour d’une tour qui
1 - Carcassonne devient peu à peu un réduit défensif. On trouve plusieurs zones : la
basse cour où logent les communs, la haute cour accueillant les
nobles, et la tour placée sur une motte de terre naturelle ou
artificielle. Ce système va se généraliser sur le territoire français
comme européen mais évoluera au profit de la tour défensive
faisant office de résidence pour un seigneur. Les défenses sont
progressivement condensées dans une seule et unique tour
(comme à Loche (fig. 2))
Au XIIème siècle, l’évolution des modes de défenses et
surtout des modes d’offensives impose une modification de ces
tours défensives et résidentielles, héritées du modèle du château à
motte. Le château fort hérite du modèle de la tour défensive que
2 - Château de Loche l’on vient protéger par une enceinte flanquée de tours, pour devenir

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L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
progressivement une unique enceinte flanquée de tours et d’une
tour maitresse. On sépare à nouveau les fonctions résidentielles et
militaires. De nombreux modèles se succèdent faisant apparaitre de
nouveaux systèmes défensifs : le pont levis, les flanquements
verticaux…
Le château fort devient résidence peu à peu au XIVème
siècle sous Charles V avec des exemples célèbres, comme
Pierrefonds, Vincennes (fig. 3)… mais l’évolution rapide de la
3 - Château de Pierrefonds poliorcétique (art de la guerre) et les performances technologiques
imposent aux châteaux des solutions de fortunes pour résister aux
attaques.
De nombreux aller-retours sont faits entre plusieurs modes
défensifs pour tester les meilleures techniques de défense possible.
Dès lors se met en place une science de l’attaque et de la
défense imposant des modifications radicales sur la façon de
concevoir une place forte. Le modèle du bastion voit le jour au
XVème siècle, visant à assurer un minimum de possibilités à
l’ennemi de pénétrer dans l’enceinte de la place forte. Ces citadelles
modifient grandement les territoires alentours et accueillent des
casernements en leur sein, puis progressivement des villes entières
(comme à Neuf-Brisach (fig. 4) ou à Besançon).
4 - Citadelle de Neuf-Brisach L’arrivée de nouvelles armes rendent peu à peu les ouvrages
et leurs courtines fragiles, imposant l’utilisation de la terre comme
système de défense. Les forts utilisent massivement la terre et
deviennent de moins en moins étendus sur le territoire, comme le
montre les ouvrages des ceintures dites de Rohault de Fleury
(comme le fort de Villeurbanne (fig. 5) puis de Séré de Rivières à
Lyon (comme le fort de Bron (fig. 6).
Les derniers ouvrages défensifs en France datent de la
5 - Fort Montluc - Villeurbanne
Première et Seconde Guerre Mondiale. On trouve alors de
nombreux forts dans le quart Nord-Est de la France et d’autres
exemples sur les côtes atlantiques par exemple.

Si l’on compte de nombreux ouvrages défensifs sur le


territoire français, à cela s’ajoute l’ensemble des constructions visant
à loger les armées, à l’entrainement de celles-ci, au stockage du
matériel… qui ont de tout temps constitué une grande partie du
6 - Fort de Bron patrimoine militaire.

02- Diversité & identité


Si les techniques défensives ont évolué et ont été remaniées
de nombreuses fois, il nous reste aujourd’hui peu d’exemple très
anciens de structures défensives datant au-delà du Moyen-Age, voir
même au-delà du la Renaissance et de la période classique. On
trouve de nombreux forts, citadelles, remparts, casernes qui
ponctuent le territoire français. Aujourd’hui, et cela depuis les
années 1940-50 (depuis la fin des guerres européennes), les pays ne
se sont plus dotés de structures défensives. Les accords politiques
ont stabilisé la géopolitique européenne et les menaces ne
viennent plus de nos territoires mais sont repoussées au-delà des
frontières européennes. C’est donc d’un grand patrimoine militaire
construit que disposent les pays européens. On se chargera plus
dans ce rapport d’étude, d’aborder le patrimoine militaire français

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L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
car nous disposons d’une collection d’objets d’architectures
militaires assez importante en nombre comme en variété.
En France, le patrimoine militaire représente 0,5% du
territoire français, équivalent à plus de 260000 ha et 75000
bâtiments. C’est dire la part importante de ce patrimoine dans la
composition du paysage bâti français mais ce qui impressionne le
plus, c’est avant tout la variété de ce paysage patrimonial militaire.
Du rempart au fort, de la citadelle au bastion, de la caserne aux
équipements industriels, ce patrimoine n’est pas seulement le
témoin d’un primordialité de la défense et de la protection des villes
et des citoyens, c’est aussi le marqueur d’une époque, d’un style de
défense, le marqueur d’un rapport au site. On ne construit pas un
rempart comme on construit un bastion et encore moins comme on
construit une caserne. Même si ce patrimoine bâti présente une
identité commune : protection et sécurité, chacun de ces 75000
édifices possède une identité particulière qui en fait une pièce
exceptionnelle de l’environnement bâti. Qu’il soit isolé ou intégré à
la ville, chacun de ses bâtiments se dénote de l’environnement dit
« ordinaire ».

Peut-on parler de typologie de construction militaire dans le


cas d’une variété si importante. Difficile de classifier, et de
répertorier les différentes typologies défensives constructives. Mais
il est une qualité, ou plutôt un qualificatif que l’on peut attribuer
aux constructions militaires : il s’agit d’un espace, d’une
construction hermétique, close. On parle d’enceinte, de ceinture, de
fort, de citadelle… Toutes ces constructions renvoient à une forme
bien définie et idéalement close. Cela nous renvoie à l’image même
que nous avons de ce patrimoine militaire construit : des enclaves
impénétrables.
Et en second lieu, on identifie le patrimoine militaire à des
constructions d’une solidité à toutes épreuves. Les matériaux
participent à cette conception : pierre massive, béton, terre…
autant que les épaisseurs bâties nous indiquent la nécessité de ne
pas plier sous le joug des attaques.
Même s’il s’agit d’un patrimoine aussi diversifié, nous savons
identifier un ouvrage défensif au premier coup d’œil, des détails de
ces constructions défensives nous signalent immédiatement la
qualité protectrice du bâtiment : créneaux, meurtrières, fentes de tir,
mâchicoulis, échauguettes, fossés… dévoilent l’identité du
bâtiment. Nécessité, ou simple expression de la puissance d’une
ville, on retrouve ces éléments défensifs pendant de longues
périodes alors même lorsque les systèmes défensifs évoluent
rapidement et sont régulièrement modifiés.
L’architecture militaire se suffit à elle-même, nul besoin
d’ornementation, nul besoin d’un quelconque décor car
l’importance est de défendre. Seules folies acceptées, la porte peut
être soulignée. L’architecture militaire se veut sobre. « Elle bannit le
luxe et le choix des matériaux ostentatoires, se contentant
principalement de la terre et de la pierre : architecture de rigueur et de
simplicité, voire de sobriété » 2

2
DALLEMAGNE François, 2002. Patrimoine militaire. Nouvelles éditions Scala. 328 p.

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L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
03- La prise en compte du patrimoine
militaire : protection et conservation
Même si les villes ont abandonné leurs infrastructures
militaires et défensives afin de reconstruire et répondre à des
demandes à l’échelle urbaine, toutes les constructions, marqueurs
d’un passé défensif, n’ont pas hérité du même sort et n’ont pas été
victimes des démolitions.
Alors comment se fait-il que ces constructions, surtout ces
constructions urbaines intra-muros, aient été prises en compte
comme des éléments architecturaux remarquables, dignes de faire
partie du patrimoine bâti ?

A– Un patrimoine atypique à préserver


« Brutalement par pans entiers, sont entrés dans le domaine
patrimonial des catégories d’objets, des champs esthétiques ou
culturels obsolescents que la transformation industrielle et
l’aménagement de l’espace menaçaient de disparition » 3
La citation de P. NORA nous renvoie à notre question,
comment se fait-il que des édifices non conventionnels tels que les
constructions militaires, industrielles… viennent rejoindre le rang
des bâtiments patrimoniaux.

L’envie de démolir se confronte souvent à un fait


problématique : la question financière. Il coûte excessivement cher
de détruire ce qui est construit. C’est pourquoi de nombreuses
constructions ont été épargnées et ponctuent encore aujourd’hui
l’espace urbain. Il était plus aisé de construire ailleurs que de
reconstruire sur la ville construite. L’Etat et le ministère de la
Défense sont les principaux détenteurs du patrimoine militaire
construit ce qui a permis d’éviter nombres de démolitions qui
auraient pu être réalisées par les villes, ou d’autres maitres
d’ouvrage soucieux de récupérer des terrains intéressants.
On le citait précédemment, aujourd’hui on recense 75000
bâtiments militaires mais un très faible nombre bénéficie de la
protection du titre de Monuments historiques : seuls 170
constructions bénéficient de ce titre. Il y a une prise de conscience
lente et difficile de la valeur patrimoniale du bâti militaire compte
tenu de la variété des constructions et de l’impact du temps et de
l’évolution urbaine.
Les sites militaires abandonnés, intégrés à la ville ou isolés
sont souvent des sites atypiques, chargé d’histoire et qui véhiculent
un imaginaire à l’intérieur même de la ville. A Lyon, les pentes de la
Croix-Rousse se terminent en direction du Rhône par de curieux
espaces publics, déambulations entre les derniers remparts du
bastion Saint-Laurent, tout comme les rives de la Saône sont
surveillées et gardés par la présence du Fort Saint-Jean.

3
NORA Pierre, 1997. « L’ère de la commémoration », dans Les lieux de mémoire (tome 3), Paris, Gallimard, pp. 4687-4719

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L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
Tout un imaginaire urbain s’est créé autour de ces espaces,
vestiges d’un passé ancré dans l’histoire de la ville. Détruire le
patrimoine c’est en quelque sorte effacer l’histoire de la cité.
La patrimonialisation et la sauvegarde du patrimoine
militaire peut « contribuer à la mise en perspective du temps, à la
fourniture de repères historiques et territoriaux et au renforcement
d’une relation affective de la population avec son patrimoine. » 4

Les sites militaires ne sont pas tous des casernes et autres


forts de plaines, et l’exemple lyonnais en est la preuve. Le fort Saint
Jean est posé sur le flan de la colline, tout comme le fort de Vaise sur
la colline d’en face. Ces exemples de forts sont la preuve que leur
destruction serait certes un effacement dans le paysage d’un
élément fort et atypique, mais aussi que leur destruction reviendrait
à modifier le profil de la colline et à fragiliser celle-ci. Les bâtiments
font corps avec la colline autant qu’ils font offices d’éléments du
paysage. Il est donc impossible pour des raisons de maintien des
terres de supprimer ces constructions.

Importance paysagère, patrimoniale et structurelle, le


patrimoine militaire n’est pas amené à disparaitre aussi facilement
de paysage urbain à l’heure actuelle.

B– La muséification du patrimoine militaire


Même s’il y a une prise de connaissance et de conscience de
la qualité architecturale, historique et urbaine de ces constructions
défensives, celles-ci ont du mal aujourd’hui à être considérées
comme des édifices utiles à l’évolution de la ville dans leur état
actuel. Plusieurs solutions s’offrent à ces structures. On note
principalement la volonté des villes, des collectivités et de l’Etat
pour transformer ces édifices en témoins de leur propre passé
culturel. On voit la naissance de plusieurs musées patrimoniaux, ces
structures dépouillées de leurs fonctions défensives, ou relatives à la
défense de l’Etat.
Volonté de dynamisme économique et touristique ou
prétexte au sauvetage de constructions, la mise à profit du
patrimoine culturel afin de communiquer sur l’histoire d’une ville,
d’une région, sur les évolutions territoriales et les technologies
militaires a permis la prise de conscience de l’importance du
patrimoine et la diffusion de l’histoire.
On mesure la prise de conscience collective et l’intérêt porté
par la population sur ces sites et musées d’histoire lorsque que ces
derniers accueillent un nombre très important de visiteurs toute
l’année, mais surtout lors des Journée Européennes du Patrimoine.

Les villes, qu’elles soient de taille modeste ou importante


ont relevé le pari du tourisme patrimonial militaire. Saint-Nazaire a
réaménagé sa base sous-marine en « musée de la mer », accueillant
un paquebot reconstitué, un sous-marin… et est accessible au
public à l’intérieur comme en toiture dégageant une vue sur le port
7 - Base Sous-marine – St-Nazaire de Saint Nazaire et ses chantiers navals. (fig. 7)

4
DALLEMAGNE François, 2002. Patrimoine militaire. Nouvelles éditions Scala. 328 p.

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L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
Le bâtiment a donc rouvert ses portes aux civils en 2000
grâce à cette reconversion patrimoniale réussie. A Paris, les Invalides
accueillent le musée de l’Armée. Ouistreham accueille dans son
Bunker de la seconde guerre mondiale, le musée du Mur de
l’Atlantique. Verdun a transformé ses forts de Vaux (fig. 8),
Douaumont… en lieu de mémoire de la Première Guerre Mondiale,
intégré à un parcours touristique comprenant d’autres musées et
mémoriaux.
8 - Fort de Vaux - Verdun A une plus petite échelle, d’autres villes mettent à profit leur
patrimoine défensif dans un souci économique et touristique. A
Pérouges, la Maison des Prince et la Tour de Guet accueille un
musée relatif à l’histoire de la ville. A Ambérieu-en-Bugey, le
Château des Allymes (fig. 9), construction du XIIIème siècle, a été
sauvé de la ruine en 1960 en étant classé monument historique la
même année et ouvert au public en 1966. Ces décisions font suite à
la prise de conscience collective de la qualité historique et
patrimoniale d’un édifice mais souvent à la menace qui pèse sur
l’avenir d’un tel bien. A Pérouges par exemple, la création d’un
comité de défense en 1911 permet de sauver la cité, un temps
menacée de destruction.
La diversité des constructions réparties sur l’ensemble du
territoire français impose une diversité des espaces
muséographiques, lieux de mémoire et de transmission de l’histoire
9 - Château des Allymes de tout un pays.

Deux possibilités s’offrent aux municipalités et aux


organismes afin de promouvoir et de développer ces musées
d’histoire et de patrimoine : restaurer le patrimoine ce qui implique
l’apport de fonds financiers, ou la conservation en l’état, option
souvent choisie par les sites situés dans les petites villes, ou les sites
marqués par une histoire forte et une empreinte des attaques
souvent témoins du passé défensif. Ainsi les sites de batailles, de
sièges… ne peuvent pas être restaurés si l’on cherche à transmette
l’histoire du site.

C - Les acteurs de la sauvegarde du patrimoine


militaire
Nombreuses de ces structures muséales sont le fruit
d’associations de petites tailles qui militent pour la prise en compte
et la valorisation du patrimoine militaire. Ce sont souvent des
associations locales qui sont à l’origine de la création de ces musées
d’histoire et de patrimoine, et qui cherchent à promouvoir ce lieu de
découverte, ainsi qu’à conserver ces traces du passé militaire d’une
ville. Pour l’exemple cité précédemment du Château des Allymes,
l’aménagement du musée et sa protection au titre de Monument
historique a été possible grâce à plusieurs associations telles « les
Amis du Château des Allymes » qui veillent au bon fonctionnement
du musée et assurent des évènements visant à attirer un nouveau
public ou à faire redécouvrir ce patrimoine. A Pérouges, le Comité
de Défense du Vieux-Pérouges, qui s’est occupé de la restauration
des bâtiments de la cité, s’occupe aujourd’hui de promouvoir
l’histoire de la ville par un musée financé par l’association et dont
les biens sont des dons de familles pérougiennes. L’association a

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L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
permis également en 1912, sous la présidence d’Edouard Herriot de
sauver la cité de la destruction. L’argent récupéré grâce aux entrées
de ce musée permet l’apport de nouvelles pièces aux collections, la
restauration de certaines et participent à la restauration de la cité
toute entière.
D’autres associations tentent de promouvoir la valeur du
patrimoine militaire à l’échelle nationale comme l’association VPM,
Valoriser les Patrimoines Militaires, par le biais de colloques,
d’expositions…
Les communes sont aussi présentes pour assurer le
développement des musées patrimoniaux et à leur gestion.
L’initiative d’un musée peut donc être privée et gérée par une
association ou public et gérée par une commune.

Aujourd’hui la question du patrimoine militaire intéresse de


plus en plus les « starchitectes » : Jean Nouvel souhaite installer sa
fondation dans le Fort du Mont-Boron, Renzo Piano vient de
remporter la reconversion de la citadelle d’Amiens en université…
L’architecture militaire rentre aujourd’hui dans la considération des
édiles de l’architecture.

Les populations, de toutes les professions, de toutes les


régions prennent aujourd’hui conscience de la valeur patrimoniale
et architecturale des constructions militaires.

Les villes ne peuvent cependant pas toutes financer un


musée, qu’elles soient rayonnantes à l’échelle d’une collectivité,
d’une région, ou du territoire nationale. Elles sont donc forcées de
trouver d’autres moyens pour ne pas délaisser ce patrimoine et
éviter la disparition d’édifices uniques.

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L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
II - La reconversion, nouvelle alternative contemporaine

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L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
II - La reconversion, nouvelle alternative
contemporaine

01- Du militaire au civil


A- La cession des biens militaires
Suite à la réforme des armées engagées dès 1996 par le
gouvernement, et la nouvelle carte militaire instaurée et révisée en
2008, le Ministère de la Défense dispose d’un patrimoine construit
vaste, le premier patrimoine de l’Etat en terme de surface
comportant tous type de sites : casernes, fortifications, bases
d’entrainement, entrepôts… Nombres de sites sont situés en
périphérie des villes et entrent dans l’organisation urbaine de celles-
ci.
Que faire de ce patrimoine si vaste, si réparti et si divers
lorsqu’il n’est plus d’actualité que de défendre le territoire de façon
permanente, lorsqu’une armée professionnelle remplace les
nombreux jeunes qui réalisaient leur service militaire, lorsque les
infrastructures ne répondent plus aux attentes de la nouvelle
armée.

Deux possibilités s’offrent au Ministère de la Défense :

- Densifier les sites militaires maintenus actifs en apportant à


ceux-ci des nouvelles qualités et en assurant la centralisation. Il
faudra donc accueillir de nouveaux employés impliquant la
réalisation de nouveaux logements et services relatifs à l’arrivée de
nouveaux habitants. Cela a pour effet de redynamiser l’économie
d’une commune ou d’une communauté de commune. L’installation
de nouvelles industries et moyens logistiques relatifs à la
densification de ces sites est aussi nécessaire.
Il s’agit cependant d’une opération de requalification et de
réhabilitation dans le cadre du programme militaire, ces opérations
sont réalisées au sein même du Ministère de la Défense et restent
dans militaire.

- Reconvertir les sites aliénés.


Si le Ministère de la Défense ne souhaite pas intervenir dans
la réhabilitation ou l’usage militaire de ses propres terrains, les
autres ministères du gouvernement sont sollicités (tels que le
Ministère des Finances et du Budget, le Ministère de l’Enseignement
Supérieur, le Ministère de l’Éducation Nationale…).
Si aucun corps ministériel n’est intéressé par l’acquisition du
bien à reconvertir, le Ministère de la Défense a alors la possibilité de
faire appel aux communes ou communautés de communes dans la

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L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
perspective d’une reconversion. Lorsqu’un site militaire est aliéné, la
MRAI (Mission de Requalification de Actifs Immobiliers) du Ministère
de la Défense s’occupe d’évaluer le potentiel du site et vise à
trouver une reconversion possible de ce dernier. Crée en 1987, cette
structure est composée de négociateurs qui évaluent le potentiel de
reconversion d’un site dans le cadre civil. C’est en quelque sorte
l’ «Agence Immobilière » de la Défense mais elle s’assure de
proposer des scénarios de reconversions réalisables et
correspondant aux attentes tant du ministère que des collectivités.
La MRAI est composée d’une petite équipe de 10 personnes,
placées sous la responsabilité d’un ingénieur général des ponts et
chaussée dépendant de la DMPA (Direction de la Mémoire, du
Patrimoine et des Archives), direction responsable de la politique
immobilière de la Défense.
Lorsqu’un bien est aliéné la MRAI prend contact avec le
préfet du département accueillant le site pour que ce dernier fasse
part à la commune ou à la communauté de communes de la
possibilité d’acquérir un bien militaire et de réfléchir à la possible
reconversion de celui-ci. Si la commune est intéressée par
l’acquisition, le Ministère de la Défense finance les études de
reconversion et charge France Domaine (organisme rattaché au
Ministère du Budget) de fixer le prix de cession du bien en
partenariat avec les services des domaines du département (ou la
Brigade de documentation et d’évaluation domaniale pour les
opérations complexes). Le prix du bien militaire est relatif au projet
de reconversion et au potentiel de reconversion du site. La MRAI est
chargée de l’étude de reconversion autant que de la diffusion
d’informations qui pourraient intéresser une entreprise
d’exploitation, ainsi que de la négociation du bien.
En plus de 20 ans d’existence, la MRAI a traité 2000 dossiers
de cessions de biens militaires pour un montant de plus d’un
milliard d’euros. L’ensemble des recettes relatives à la vente
d’emprises militaires aliénées est reversé à 100% au budget de la
Défense et permet l’investissement dans de nouvelles structures ou
la réhabilitation de sites à moderniser.
La vente d’emprises militaires à des personnes privées n’est
pas autorisée.

B - La dépollution des sites


Si le Ministère se charge du financement de l’étude des
possibilités de reconversion possible pour un site, il ne se charge
cependant pas de la dépollution du site. Dès la création de la MRAI,
le ministère de la Défense devait céder les terrains et bâtiments
dépollués, aujourd’hui le Ministère essaye de céder les terrains tels
quels en négociant parfois les prix pour éviter de prendre à sa
charge les opérations de dépollution. La dépollution du site revient

15
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
de plus en plus à la charge de l’acquéreur pour accélérer aussi la
cession des terrains.
On dénombre plusieurs types d’opérations de dépollution.
Parmi celles-ci on trouve celles dites de dépollution
systématique et obligatoire faisant suite à une étude menée par le
SID (Service d’Infrastructure de la Défense) se basant sur des
données historiques et des relevés opérés par des entreprises
spécialisées. Elles concernent les opérations d’extraction de plomb,
d’amiante, d’hydrocarbure…Elles sont les plus courantes des
opérations de dépollutions des emprises militaires cédées par le
ministère. Sur le projet de l’ancien camp militaire de Sathonay
Camp, le ministère de la Défense a fait le choix de réaliser une
gendarmerie et une ZAC de logements, la dépollution a porté sur le
désamiantage du site et l’extraction des déchets non polluants
dispersés.
Les opérations de dépollution pyrotechnique viennent
compléter la liste. Elles concernent l’extraction et le traitement de
munitions non explosées de type explosif, toxique… Plus rares que
les opérations de dépollutions obligatoires, elles sont beaucoup
plus dangereuses et l’on fait appel à des entreprises privées ayant
pour spécialisation ces types de dépollution. L’Etat se doit dans
toutes cession de réaliser une étude de pollution pyrotechnique qui
se base elle aussi sur des données historiques et des relevés réalisés
sur site. En cas de diagnostic positif notant la présence de matériel
pyrotechnique, l’Etat lance un appel d’offre pour sélectionner une
entreprise de dépollution qui veille en même temps qu’au bon
déroulement du chantier de dépollution et à la sécurité des
employés.

16
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
02
- Des reconversions variées, des
réponses architecturales adéquates

A - Quel choix pour quel patrimoine ?


Même si les collectivités et les communes se tournent
souvent vers la muséification de l’architecture et l’intégration de
leur patrimoine militaire dans un contexte touristique ayant pour
but de sauver un patrimoine de la disparition, il existe d’autres
solutions que de figer un bâtiment dans son état et de nier une
possible évolution autre que des espaces d’exposition.
Si aujourd’hui on se pose la question de la réutilisation de
notre patrimoine militaire dans un but d’adaptabilité à la société
actuelle, la question a aussi été l’objet de toutes les attentions
depuis bien des décennies. Nombres de bâtiments ont été
reconverti en fonction des nécessités d’une commune et ont
changé d’usages à plusieurs reprises. Prenons quelques exemples
lyonnais. Le Fort de Montluc (Fort de Villeurbanne) a été transformé
en prison pendant la Seconde Guerre Mondiale par l’armée
allemande pour accueillir les déportés avant leur transfert vers les
camps de concentration. Le Fort Saint Jean fut tour à tour service de
santé des armées en 1932, siège de l’état-major des armées
allemandes durant l’Occupation, siège de l’inspection des services
vétérinaires à la Libération et ce jusqu’en 1998, date à laquelle il
acquiert sa fonction actuelle de centre de formation des contrôleurs
d’impôts.
« Dans la reconversion, des glissements s’opèrent, entre l’objet
et la fonction : dans le neuf, on conçoit une enveloppe pour un
programme donné, dans l’existant l’enveloppe existe et c’est pour elle
qu’il faut mettre au point de nouveaux programmes. » 5

Il est d’autant plus difficile de trouver une reconversion


adéquate pour un site dont l’architecture et l’ancienne affectation
restent ancrés dans l’identité du site. Plusieurs solutions sont
envisagées par les acteurs de la reconversion dont la MRAI et les
communes principalement. Quelques sites trouvent leurs projets de
reconversions par instinct et par l’impossibilité d’accueillir d’autres
fonctions. Ces sites se tournent principalement vers trois types de
reconversions dans les domaines de la culture, du logement et des
économiques et tertiaires.
Certains sites militaires ont été reconvertis pour accueillir de
nouvelles fonctions pour le ministère de la Défense ou la sécurité
des villes et du territoire. Ainsi sur Lyon, le fort de Villeurbanne est
devenu le nouvel Hôtel de Police de la ville, le fort du mont Verdun,
une base aérienne alors que le fort de Sainte-Foy accueille un centre
de CRS.

En ce qui concerne la culture, les emprises militaires telles


que les forts sont aujourd’hui privilégiées pour accueillir des lieux
d’enseignement. En effet la taille des emprises, la disponibilité d’un
grand nombre de bâtiments répartis à l’intérieur d’une enceinte, et
la disponibilité spatiale nous invite à filer la comparaison avec les
10 - Université de Bayonne campus universitaires. Ainsi les forts Vauban de Bayonne (fig. 10) et

5
SCHITTICH Christian, 2006. Construire dans l’existant. Edition Birkhäuser Détail, 176 p.
17
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
de Nîmes (fig. 11) sont d’ores et déjà les nouvelles universités de
leur ville, reconverties respectivement par les architectes Jean De
Giacinto et Andrea Bruno. Le fort Saint-Jean de Lyon accueille lui
l’école des inspecteurs des impôts. Demain la citadelle d’Amiens
sera reconvertie par l’architecte Italien Renzo Piano pour devenir
une université d’envergure régionale.
Certains sites accueillent des projets de structures
éducatives comme les Subsistances de Nevers qui sont aujourd’hui
11 - Université de Nîmes une structure de l’ISAT, Institut Supérieur de l’Automobile et des
Transports, école d’ingénieurs, la caserne Bissuel de la place Carnot
de Lyon est aujourd’hui l’Université Catholique de Lyon, alors que
les derniers travaux des Subsistances de Lyon ont permis
l’installation de l’école des Beaux-Arts de Lyon.
D’autres sites se tournent vers des projets culturels tels que
la caserne Villars de Moulins aujourd’hui musée du costume de
scène (fig. 12) réalisé par Willmote & Associés, ou encore le fort de
Saint Jean de Marseille accueille dans sa structure et dans un
12 - Musée Costume de Scène nouveau bâtiment, le MuCEM, Musée des Civilisations d’Europe et
Moulins de Méditerranée de Rudy Ricciotti, point d’orgue du projet
Marseille, capitale de la culture 2013.

Plus conventionnels, la récente cession des casernes


devenues inutiles et obsolètes pour le personnel de la Défense est
devenue source de projets de reconversion en logements. Peu
d’autres structures accueillent des programmes de logements dans
leurs projets de reconversion. L’est de la France riche d’un
patrimoine de casernes, a immédiatement saisi l’opportunité de
développer son parc de logements. Les structures très tramées de
ces sites imposent une modification partielle des voiles porteurs et
13 - Caserne Boudet - Bordeaux
une précise attention à la solidité de la structure. Aujourd’hui le
nombre de casernes reconvertis ne cesse de croitre. On peut citer
parmi elles la caserne Boudet de Bordeaux (fig. 13) et celle d’Arras
reconverties en résidences étudiantes, les casernes de Bonne de
Grenoble (fig. 14) et Châlons-en-Champagne accueillent des
logements de standing. Les casernes Drouot et Barbanègre à
14 - Caserne de Bonne - Grenoble Mulhouse et Aubry à Bourg-en-Bresse sont elles aussi devenues des
logements.

Le patrimoine militaire est aussi beaucoup prisé par les


entreprises et de nombreuses reconversions tertiaires. Ainsi certains
bâtiments militaires accueillent des sièges sociaux d’entreprises, des
bureaux ou encore, des sites de production. Dans le Jura le fort
Henry Martin aux Rousses (fig. 15) est aujourd’hui une cave
d’affinage de fromage et des bureaux pour la communauté de
commune. Pour autre exemple l’ancienne caserne Lyautey
15 - Fort Henry Martin aux Rousse d’Alençon est devenue le siège du Conseil général de l’Orne. On a
affaire à des reconversions variées puisque les hôpitaux militaires
Sédillot (fig. 16) et Baur de Nancy et Colmar sont devenus
respectivement le siège du Conseil général et un siège
d’entreprises.

On peut distinguer deux approches de la reconversion. Celle


qui consiste à se réapproprier une structure existante et celle qui
consiste à intégrer un bâtiment dans la reconversion d’un quartier.
16 - Hôpital Sédillot- Nancy On étudiera cette deuxième approche dans la dernière partie du
rapport.

18
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
B - Quelles postures adopter ?
Les bâtiments militaires sont vecteurs d’une identité
atypique et identifiable dans le paysage architectural. Leur identité
en fait des lieux difficiles à reconvertir tant par la nature de
l’architecture que par l’organisation spatiale de ceux-ci. Les
architectes choisissent de s’orienter vers plusieurs postures pour
reconvertir ces sites.
La reconversion ne propose pas à l’architecte de repartir de
zéro mais bien de tirer parti de ce qu’il a en sa possession pour créer
un projet ancré dans son site, dans son bâtiment d’origine et en
harmonie avec l’architecture déjà présente. Cela ne signifie pas qu’il
doit recréer à l’image de ce qui existe déjà, mais plutôt comprendre
l’existant pour construire en parallèle avec le sens de l’architecture à
reconvertir.
On trouve des reconversions qui laissent une grande
importance à l’apparence originelle du bâtiment. Celles-ci touchent
très peu à l’enveloppe du bâtiment, autant qu’à la structure interne.
Ce sont de reconversions légères qui tirent parti de la situation
actuelle du bâtiment. Celles si consistent en une « remise à neuf »
du bâtiment pour y accueillir sa fonction nouvelle. C’est ce que l’on
peut voir sur la plupart des projets de reconversions de casernes qui
respectent la trame porteuse originelle très rythmée. On n’a pas ou
peu de manifestations extérieures de la reconversion. Dans ce cas
de reconversion l’architecte considère que l’architecture du site se
suffit à elle-même et qu’il est possible de composer un nouveau
projet uniquement avec les éléments construits déjà présents.
D’autres projets nécessitent une intervention construite
nouvelle. Dans ce cas-là soit on fait le choix de construire une
extension nouvelle discrète, qui laisse place d’avantage au caractère
du bâtiment, ou alors on s’oriente vers une nouvelle architecture
radicalement différente et qui s’impose comme une nouvelle image
du site.
La première configuration laisse plus d’importance à
l’existant, l’autre vise plus à imposer le contemporain. Le choix
dépend essentiellement de la nature du site à reconvertir (dispose-
t-il d’un caractère affirmé ?), de l’ambition de la ville, de l’architecte
ou d’une société (faire un signal, un lieu reconnaissable d’envergure
métropolitaine, départementale, régionale voir nationale).
L’architecture de la reconversion se nourrit alors d’une dualité entre
architecture traditionnelle et militaire et architecture
17 - FRAC Centre - Orléans contemporaine. Les projets qui visent à considérer ces bâtiments
comme des nouveaux monuments urbains sont tous aussi variés les
uns que les autres, certains se servent uniquement de l’existant
comme toile de fond comme le projet du FRAC Centre à Orléans
réalisé par Jakob et MacFarlanne (fig. 17) qui affirment les
« Turbulences » de verre et d’acier comme la nouvelle identité du
lieu laissant les façades et la structure des Subsistance militaire en
arrière-plan, alors que d’autres projets, comme la reconversion de la
caserne Pélissier de Rouen (fig. 18), supprime l’élément toiture de la
caserne pour la remplacer par des volumes en acier corten,
matériau proliférant qui devient aussi matérialité des balcons
18 - Caserne Pélissier - Rouen rapportés en façade mais qui dialogue avec la brique,
ornementation des fenêtres.

19
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
Si certains projets se détachent de la véritable nature du
lieu, la majorité des projets respecte l’identité du site et la
reconversion se construit en cohérence même si le contemporain
s’impose de plus en plus et donne un nouveau visage à
l’architecture militaire.
Nous étudierons l’une des reconversions du patrimoine
militaire qui laisse une place au caractère du bâtiment tout en y
mêlant architecture contemporaine, car il s’agit d’une des postures
les plus rencontrées dans le domaine de la reconversion militaire.

03- Étude de cas : la reconversion du


Fort Saint-Jean à Lyon

Construit au XVIème siècle pour protéger Lyon de l’ennemi


suisse, le Fort Saint Jean fut beaucoup moins important que celui
que l’on peut voir aujourd’hui dominant la Saône de toute sa
massivité. Il n’est au XVIème siècle qu’un bastion de taille réduite et
est intégré dans la ligne de fortifications nord de la ville, souhaitée
par Louis XII, pour devenir au XIIIème siècle un véritable fort. Il
permettait de contrôler l’entrée nord de la ville tant sur terre que sur
la rivière. Il assurait un double rôle, la sécurité de la ville ainsi que la
sécurité du faubourg riche par rapport au faubourg plus instable
occupé par les canuts et ouvriers de la soie. En combinaison avec les
forts de Loyasse et Vaise, le fort Saint Jean assurait la sécurité de la
Situation géographique Saône. En 1834 et 1835 commence la construction des casernes,
poudrières et bâtiments situés à l’intérieur du fort encore visibles
aujourd’hui.

Malgré la situation du bâtiment, la disparité, la dispersion de


ses bâtiments… en font un site très difficile à reconvertir. Lorsque
l’inspection des services militaires quitte le site en 1998, la MRAI
cherche un acquéreur et une reconversion possible. La mission de la
MRAI s’est donc confrontée aux méfiances des sociétés
d’exploitations qui, toutes aussi variées qu’elles sont, ont pour
Organisation du site beaucoup abandonner l’idée d’acquérir le marché d’exploitation.

20
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
Par exemple un investisseur hôtelier, intéressé par la situation et la
vue qu’offre le bâtiment n’a pas souhaité lancer un projet risqué.
Une maison de retraite était intéressée par le site mais a dû refuser
de s’installer compte tenu de la difficulté d’accès et la topographie
du site qui en font un site difficile d’adaptabilité aux personnes
âgées ou handicapés. Complexes immobiliers, ensemble de
Ancienne caserne bureaux ont tour à tour révisé leur souhait de s’installer dans
l’ancienne ensemble fortifié de la ville.
C’est en 2000 que le Ministère des Finances fait savoir son
souhait de réaliser une structure regroupant en un seul lieu 18
centres répartis dans toute la France dans le Fort Saint Jean.
En 2001, suite à la cession du bâtiment du Ministère de la
Défense au ministère des Finances, le Fort Saint Jean est reconverti
par l’agence Pierre Vurpas & Associés pour accueillir l’École
Nationale des Contrôleurs d’Impôts. Le projet s’inscrit dans un cadre
de reconversion qui ne vise pas à masquer le caractère atypique et
l’identité forte du bâtiment et se veut dans le même temps un
projet contemporain, innovant, réconciliant tradition et
technologie, architecture et paysage, nature et urbanité.

Alors comment s’inscrire dans un site aussi complexe que


cet ancien fort désaffecté ?

L’architecte a ici fait le choix de réaliser une reconversion


légère du site qui laisse une place forte à l’identité du lieu. Ici le
choix est fait de reconvertir les corps de bâtiment en tirant parti des
structures et les enveloppes existantes. Le choix est fait d’utiliser les
façades existantes comme façades principales. Celles-ci sont
ravalées pour les bâtiments de casernement qui deviennent des
lieux de formations accueillant des salles de cours et des salles de
Façade ré-enduites travail et les administrations. Si certains bâtiments sont ravalés,
d’autres gardent leurs façades, marqueurs temporels, comme pour
souligner leur pré-existance, antérieure à la construction des
casernes. Dans l’optique d’une reconversion respectueuse de
l’existant, on note une non modification de la structure existante et
une restauration des structures existantes : le plafond à la française
de la bibiotèque a été conservé et restauré, la plupart des murs n’a
pas été enduite ou recouverte, pour affirmer la massivité du
bâtiment. On ne cherche pas a nier l’existant dans cette
reconversion , mais plutôt tirer partie de son identité.
Façades en pierres apparentes
conservées Mais alors dans ce site marqué par la temporalité comment
signifier son intervention ? Ici l’intervention se veut légère, sobre,
élégante. Dans un site éclaté, Pierre Vurpas vient intercaler un hall,
centre nevralgique du projet, reliant l’ensemble des pavillons. D’un
site fragmenté, l’ensemble est uni par la présence discrète d’un hall
trasparent, ligne horizontale de connexion. La contemporanéité de
l’intervention est marquée par l’utilisation de matériaux sobres mais
témoins de l’architecture actuelle : le béton brut, le verre et l’acier.
La reconversion est très sobre dans l’ensemble du fort mais se veut
Nouveau Hall d’entrée radicalement différente de l’existant dans ce hall.

21
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
Le hall, espace transversal de verre, de béton et d’acier n’est
pas la seul extension contemporaine visible. Si le hall n’est visible
que depuis la place d’arme, le restaurant ne l’est pas mais se trouve
enterré sous celle-ci et est un belvédère sur la colinne de Fourvière.
Chacune des extensions tire sa spécificité. Le hall annonce le
reconversion contemporaine depuis la cour, le restaurant annonce
la reconversion depuis l’extérieur. Les extensions jouent un rôle
Restaurant vu depuis Fourvière particulier et orienté.

La temporalité de la reconversion ne se signale pas


uniquement dans les extensions. Ici le choix est fait de laisser une
part majeure à l’existant, mais le mobilier contemporain et coloré
donne la teinte de la reconversion et intègre celle-ci dans la vision
actuelle de l’existant.
De plus lorsque que des interventions sont nécessaires dans
l’existant pour accueillir des nouveaux niveaux, des escaliers… le
choix est fait de trancher et non pas d’imiter les techniques
Foyer des étudiants
traditionelles mais d’assumer la dualité de deux temporalités.

Si l’architecture contemporaine tranche avec l’architecture


militaire, le choix des matériaux marque une continuité dans
l’approche de la conception. Des matériaux bruts et patinés sont
utilisés dans les extensions ce qui donne un caractère atypique et
une ambiance matérielle et constructive proche de celle présente
dans l’existant.

Intervenir sur l’existant dans une opération si complexe, ce


n’est pas faire du neuf pour se signaler comme une architecture
Bibliothèque
contemporain, c’est avant tout comprendre la logique du site, son
identité, son caractère.

Salles de sport

22
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
III - La ville à la reconquête des territoires militaires

23
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
III - La ville à la reconquête des territoires
militaires

01- Le fait militaire et la ville


A– La place du militaire dans l’environnement
urbain
Un constat est d’évidence lorsque l’on aborde la question de
la reconversion du patrimoine militaire et son rapport à la ville. La
ville n’a pas été exemptée de la présence du militaire et des
constructions défensives. Même si de nombreuses constructions se
trouvent en périphérie des villes, et voire même isolées du
développement urbain, certaines sont situées dans les
agglomérations ou les périphéries proches. En 1980, sur une
superficie des constructions militaires de 260 000 ha, appartenant
19 - Citadelle de Lille
au Ministère de la Défense, on ne comptait que 19 000ha intégrés
dans la ville.

Il ne s’agit pas ici de lister ou d’énumérer les différents types


de fortifications et autres constructions défensives intégrées dans le
tissu urbain mais bien d’identifier un type d’évolution qu’a connu le
patrimoine bâti militaire. Quelle est aujourd’hui la trace laissée par
ce patrimoine dans la ville, dans le tissu urbain. Comment se sont
manifestées ces entités bâties dans la constitution des villes et
20 - Fort Saint Jean Lyon quelles en sont les traces visibles dans la ville d’aujourd’hui ? C'est-
à-dire en quoi le bâti, la trame viaire, le parcellaire se trouvent-ils
influencés par des constructions antérieures mais dont les traces
persistent. Si aujourd’hui les sites sont pour la plupart reconvertis,
comment cette mutation c’est signifiée autre qu’à l’échelle d’un
bâtiment dans l’histoire de la constitution des villes ?

Les structures militaires ont toujours été considérées


comme des pièces bâties d’une grande importance et d’une
21 - Caserne Sergent Blandan Lyon primordialité sans faille afin de sécuriser un territoire et d’assurer la
prospérité de celui, d’en promouvoir le développement à long
Quelques exemples de terme. Cependant ces infrastructures sont assujetties à un principe
constructions défensives intégrés
inévitable qui est l’adaptabilité aux évolutions contemporaines. Et la
dans la ville
ville propose deux types d’évolutions à ces constructions
défensives : l’adaptation aux techniques offensives nouvelles ou
encore l’intégration au tissu urbain. En effet la ville se développe de
plus en plus, que l’on se situe au XIXème siècle comme au XIIIème.
On note la nécessité d’accueillir toujours plus de personnes dans
l’environnement métropolitain. Cette extension urbaine n’assure
plus le recul suffisant des constructions militaires défensives par
rapport à la ville et celles-ci perdent de leur efficacité, de leur utilité
une fois intégrées et raccordées au tissu urbain. De même que pour
les évolutions des enceintes fortifiées on se doit de revoir
entièrement la conception des édifices pour suivre les avancées
technologiques militaires voire de reconstruire de nouveaux
équipements défensifs en cas de nécessité.

24
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
B - Reconstruire la ville sur elle-même :
l’exemple lyonnais

Il est très souvent arrivé dans l’histoire de la ville, que la


croissance urbaine rattrape des constructions périphériques qu’il
s’agisse de constructions isolées de logements, tout comme des
constructions défensives militaires. Ou même que la fonction de la
ville défensive, ville citadelle, voit son plan imposé par des logiques
militaires. Les villes nouvelles, ces citadelles sont organisées autour
de la seule notion de défense et l’organisation globale de la ville ne
sert que la cause défensive. Alors qu’en est-il des autres villes qui
n’ont pas été conçu sur un plan défensif mais qui ont connu des
constructions à postériori de leur création ?

Prenons la ville de Lyon comme exemple car il ne s’agit en


rien d’une ville défensive dont la forme est dictée par une logique
militaire. La ville offre des regards différents par la façon dont les
constructions militaires ont impacté ou non sur l’organisation
actuelle de la ville.

Prenons l’exemple du boulevard de la Croix-Rousse. Ce


boulevard est situé sur l’ancienne enceinte. Elle fut construite à la
périphérie Nord de la ville et n’a que très peu subi le
développement de la ville.
En effet, située très au Nord de la ville et sur la colline de la Croix-
Rousse peu urbanisée, on retrouve peu de trace de rupture dans la
composition du tissu urbain. Aujourd’hui l’ancienne enceinte
22 - Boulevard de la Croix-Rousse
Bastions
fortifiée est remplacée par un vide urbain de taille importante, un
boulevard construit en 1855 devant marquer la création du Second
Empire. De chaque côté on retrouve un tissu urbain caractéristique
des faubourgs, un tissu en lanières, que ce soit du côté de la montée
de la Grande Côte autant que du côté de la Grande rue de la Croix
Rousse. (Dans d’autres villes, la confrontation intérieure/extérieure
de la ville est nettement plus visible comme pour Paris)
Comme la ville s’est développée sur des terrains nouveaux, non
23- Le boulevard en 1855
intégrés dans la ville, les voies et les parcellaires ont été très
influencés par la forme des anciens bastions qui bordaient
l’enceinte déclassée. On note une persistante des formes militaires
dans la constitution des villes et dans l’organisation de la trame
viaire, comme s’il était difficile de s’émanciper d’une forme. (fig. 22
et 23)

L’ensemble des forts étaient reliés entre eux par des fossés
et constructions permettant de maintenir une ligne continue
cernant la ville, délimitant l’intérieur défendu et l’extérieur non
protégé. En 1884, les forts de la deuxième ceinture bâtis autour des
années 1830 sont déclassés et deux ans plus tard nait une
« rocade », un boulevard urbain, sur cette bande de terre non
urbanise et vierge de constructions. Les boulevards Vivier Merle,
Des Belges, des Tchécoslovaques… voient le jour entre l’ancien fort
des Brotteaux (aujourd’hui gare des Brotteaux), le Fort Montluc
(aujourd’hui Hôtel de police de Villeurbanne), la Lunette de
Charpennes (aujourd’hui emplacement du Lycée du Parc), la
Redoute des Hirondelles (aujourd’hui Manufacture des Tabacs).

25
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
Si les liaisons entre les constructions militaires sont
aménagées en voies de circulations automobiles majeures qui
irriguent l’ensemble du tissu urbain, les pôles militaires (tels que
ceux cités ci-dessus sont pour la plupart détruits car devenus
obsolètes. La récupération de ces terrains vastes intégrés dans la
ville permet à la commune de se doter d’équipements publics ou
privés de taille importante. L’exemple de Lyon est le bienvenu car la
24 - Ancienne Gare des Brotteaux ville a su par exemple installer sur la friche des Brotteaux la nouvelle
gare (fig. 24), sur le terrain de la Redoute des Hirondelles, la
Manufacture des Tabacs (fig. 25). Les espaces récupérés permettent
aussi de dégager des espaces publics comme la place Jean Macé à
la place du Fort du Colombier (fig. 26).

La ville a su se régénérer sur ce qui a assuré autrefois sa


sécurité mais qui ne répondait actuellement plus à sa protection.
25 - Manufacture des tabacs Les équipements militaires sont progressivement repoussés par
ceintures successives. Pour Lyon, on parle de première ceinture dite
ceinture Rohault de Fleury (contenant les forts des Brotteaux, de
Villeurbanne…), de deuxième ceinture dite de Séré de Rivières (Fort
de Feyzin, Corbas, Mont Verdun…).
Les constructions militaires et défensives ont largement subi
l’évolution urbaine et ont disparu sous une pression de
régénération de la ville. Nombreuses sont les marques de ce
patrimoine bâti aujourd’hui disparu dans le territoire et le tissu
26 - Place Jean Macé urbain.

02- Du bâtiment à la friche


Aujourd’hui le territoire est parsemé de constructions aussi
diverses les unes que les autres mais c’est désormais un type de site
militaire aliéné qui tend à devenir le support premier des nouveaux
projets de reconversion. Les sites atypiques tel le fort aujourd’hui
délaissé n’est plus le sujet majeur des opérations de reconversion.
Nous avons essentiellement porté notre attention dans ces
deux premières parties à la reconversion d’un bâtiment singulier
dans le paysage patrimonial militaire mais depuis la réforme des
armées, c’est avant tout un paysage de friches militaires composé
de casernes, de terrains d’entrainement, de hangars… qui
ponctuent le territoire. Nombre de villes, de département et de
régions accueillent ces camps d’entrainements militaires, sources de
dynamisme économique pour une ville compte tenu du nombre de
militaires professionnels et de la présence de leur famille.
Constructions modernes (années 50-60) ou camps
beaucoup plus anciens datant parfois du XIXème siècle, beaucoup
de villes ont dû trouver de nouvelles solutions lors de la réforme de
la carte militaire de 2008.
Ces emprises militaires aujourd’hui désaffectées et aliénées
représentent des surfaces de plusieurs hectares en périphérie ou
désormais intégrées dans le tissu urbain. Les villes ont donc la
nécessité de s’orienter vers la reconversion de ces espaces, pour
accueillir de nouveaux habitants, répondre à des questions urbaines
ou des attentes des habitants.
Nous sommes à la fin du modèle défensif du territoire que
nous avons connu en France comme en Europe pendant des siècles,

26
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
et les années 2000 insufflent un vent de reconversions, derniers
maillons de la chaîne d’évolution du patrimoine militaire sur le
territoire national.
On semble aujourd’hui redécouvrir des sites militaires, des
enclaves intégrées à la ville, il nous semble primordial de ré-
urbaniser ces friches militaires délaissées, alors que les instances
politiques et le bon sens de l’homme a tout au long de l’histoire eu
besoin de se confronter à la question du devenir des constructions
militaires. La ville s’est reconstruite sur elle-même, sur ses vestiges,
créant son futur sur les vestiges de son passé.
Quels sont donc les enjeux actuels des reconversions des
friches militaires et quelles sont les leçons à tirer du passé ou les
erreurs à ne pas réitérer pour réaliser des projets viables et
conscients de l’identité du lieu ?

03- La reconversion des friches


militaires
« Parce qu’il se compte en milliers d’hectares qui se
reconstituent sans cesse, parce qu’il handicape lourdement les espaces
déjà fragilisés qui en subissent ses conséquences, parce qu’il met en jeu
l’environnement et le cadre de vie, parce qu’il porte en lui une charge
symbolique, culturelle et affective, qui fait appel à la mémoire collective
et parce qu’il est un produit placé sur un marché, le dossier de ces
micro-territoires que sont les friches doit continuer de faire l’objet de
toutes les attentions. » (M.C. THERY)

A - Des usages au service de la ville


Hier la ville a aliéné nombres de structures défensives et la
plupart, pour celles situées en ville, ont été détruites entièrement ou
partiellement afin de construire des équipements utiles au
développement urbain : d’une part on cherchait à disposer
d’équipement culturels ou économiques, mais d’autre part à assurer
le développement de la ville via des voiries et des infrastructures de
transport à la pointe de la technologie. Autre vision plus hygiéniste,
mettant en valeur la ville, on cherche à doter celle-ci d’espaces
publics.
Alors que retenir de la reconstruction de la ville sur elle-
même déjà opérée pendant plusieurs siècles ?
Aujourd’hui on pourrait citer trois attitudes rencontrées lors
de l’acquisition d’une friche militaire par une commune :

- La première consiste à tirer parti du potentiel du site


désaffecté pour installer des nouvelles activités économiques.

- Le seconde reprend un des enjeux de la pensée humaine


et sociale des projets instaurés pendant les siècles précédents visant
à développer des lieux publics et des lieux de loisirs extérieurs.

- La dernière enfin est la plus courante, et consiste à


reconvertir une friche et son emprise foncière et parcellaire en
nouveaux projets urbains, en nouveaux quartiers de ville.

27
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
Nous choisirons pour chacun des types, un exemple de
reconversion réalisé, en chantier ou en projet et différents projets
pour les nouveaux quartiers.

Reconversions économiques
Le premier scénario consiste à reconvertir l’ensemble des
bâtiments industriels et militaires d’une friche militaire en locaux
d’entreprises afin de créer un parc d’activités économiques
d’envergure souvent situé en périphérie des villes. C’est un type
d’opération que l’on a pu voir se réaliser sur plusieurs sites dont les
potentiels semblent radicalement différents.
27 - Base sous-marine de Lorient
Prenons pour premier exemple celui de Lorient. La base
sous-marine composée d’alvéole en béton (fig. 27) semblait difficile
à reconvertir compte tenu de l’inflexibilité du site et de ses
constructions. La communauté d’agglomérations a donc lancé en
1999 un projet de reconversion relatif au monde de la mer et avant
tout au thème de la voile. On trouve désormais sur ce site trois types
d’activités : production industrielle dédiée à la construction de
28 - Nouvelles halles industrielles
matériel de navigation de plaisance (fig. 28), des centres
d’entrainement pour la voile et les courses maritimes ainsi qu’une
cité de la voile, centre culturel du nouveaux quartier et pôle
attracteur et touristique (fig. 29), en plus d’un port de plaisance déjà
installé sur le site. Dans ce projet Lorient a donc décidé de
reconvertir son site sous-marinier autour d’un même projet et on
note aujourd’hui la réussite de ce projet économique par la qualité
de la production, la reconnaissance des entreprises installées, mais
29 - Cité de la voile Eric Tabarly aussi par l’impact régional et national de ce pôle en matière
d’innovation.

Reconversions en espaces publics


Moins fréquentes sont les opérations visant à doter les villes
d’espaces publics. Celles-ci visent à reconquérir pour la plupart des
terrains intramuros et à les transformer en parcs urbains, nouveaux
poumons verts d’une ville et espaces de loisirs et de détente. Ces
friches militaires de grandes tailles permettent aux villes nécessitant
des espaces naturels de se doter de nouveaux parcs en centre-ville,
à la fois parc urbain, parc de proximité et centre de loisirs.
30 – Futur Parc Sergent Blandan
La ville de Lyon a signé en 2007, suite au rachat de la
caserne du sergent Blandan, le projet d’un parc urbain devant
concurrencer avec le parc de la Tête d’or et le parc de Gerland car
plus de 50000 habitants vivent à moins de 20 min à pied de ce parc.
Sur une surface de 17 hectares, la ville a l’ambition de créer un
véritable « oasis en centre-ville » (Source www.grandlyon.fr) (fig. 30 et
31), accueillant aussi bien une place polyvalente, des terrains de
sports, que des jardins potagers et pédagogiques, des espaces de
31 - Nouveaux espaces verts du parc détente et de découverte écologique… à long terme, la ville
souhaite même installer un complexe hôtelier dans l’ancien château
de la caserne aujourd’hui déclassé. Les travaux du parc ont
aujourd’hui commencé et seule la place d’arme de l’ancienne

28
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
caserne est accessible au public où déjà un grand nombre
d’habitant du quartier a pris l’habitude de se retrouver entre voisin,
entre amis. A peine désenclavé, le site militaire séduit énormément
de riverains qui investissent cet espace comme un élément de leur
quotidien.

Reconversions immobilières
Le dernier type de reconversion est le plus répandu et le
plus prisé par les villes et communautés urbaines. Celles-ci
consistent à reconvertir des friches militaires (souvent des sites
d’entrainement où logeaient des militaires) en nouveaux quartiers
intégrés aux villes. Aujourd’hui les villes cherchent de plus en plus
de terrains proches des centres-villes pour répondre aux problèmes
d’expansion urbaine mais elles se heurtent souvent aux prix du
foncier qui explosent. Les villes cherchent à reconvertir l’ensemble
des friches militaires situées à proximité de leur centre pour
plusieurs raisons : densifier leur tissus urbain, proposer de nouvelles
offres immobilières, reconquérir des enclaves rester trop longtemps
isolées alors qu’elles se trouvent au cœur du tissu urbain.
Reconversion, réhabilitation et vitrine de l’architecture, ces
nouveaux quartiers viennent pour la plupart apporter leur lot
d’innovation architecturale. Nombres de projets voient le jour afin
d’assurer une image nouvelle, dynamique et innovante de la ville
32 - Fort d’Issy-les-Moulineaux qui profitent de ces projets pour attirer l’attention des habitants,
des promoteurs et des entreprises à s’installer en périphérie.
Parmi les projets les plus novateurs réalisés ou encore en
chantier on peut citer le projet d’Architecture Studio à Issy-Les-
Moulineaux, ville dans laquelle l’agence réalise le Fort Numérique
sur le site de l’ancien fort Vauban (fig. 32), ou le projet de la ZAC des
Capucins sur le plateau du même nom à Brest (fig. 33). Aujourd’hui
peu de projets de nouveaux quartiers ont été livrés car les travaux
commencent tout juste compte tenu du temps nécessaire à
33 - ZAC des Capucins - Brest l’élaboration de tels projets.

Autre exemple, la ZAC de Bonne, située au cœur de


l’agglomération grenobloise, vient d’être livrée dans sa première
tranche en ce début d’année 2012 (fig. 34 et 35). Les derniers
immeubles de logements et les pôles de loisirs terminent
actuellement leur phase de finition. Situé sur l’ancien site militaire
de casernement aménagé en 1884, il subsiste aujourd’hui trois
bâtiments de casernement, ainsi que les deux bâtiments d’entrée
34 - ZAC de Bonne - Grenoble sur la cour d’honneur. Le terrain de l’ancienne caserne militaire de
Bonne, cédé par l’État à la ville de Grenoble en 1990, est envisagé
pour devenir un éco-quartier exemplaire, parmi les premières
expériences de ce type sur l’ensemble du territoire français. Le
projet de la ZAC de Bonne est donc lancé et supporté par le
programme Européen Concerto qui soutient et finance aujourd’hui
45 projets de quartier dans 18 pays du continent. C’est donc un
projet d’envergure, un projet signal pour la ville de Grenoble qui
doit voir le jour. Le projet reçoit en 2009 le Grand Prix National
35 - Nouveaux logements d’Eco-quartier.

29
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
Composée de bâtiments réhabilités et de nouvelles
constructions, la ZAC de Bonne est un parfait exemple de vitrine
architecturale contemporaine et l’image d’un quartier nouveau et
dynamique, expression du renouveau d’un passé militaire trop
souvent oublié.

B - Désenclaver les emprises militaires


Lorsque les collectivités émettent la possibilité de voir un
projet de reconversion se réaliser dans une ancienne emprise
militaire, la question du désenclavement est immédiatement posée.
Comment faire d’un site hier imperméable un nouveau quartier
vivant ? Comment relier ce quartier à la ville ? Comment attirer de
nouveaux habitants ?
Pour étudier ces questions et leurs applications dans un cas
concret nous choisirons la ZAC de Bonne présentée précédemment.

Les communes se doivent dans un premier temps d’assurer


l’accessibilité au nouveau projet depuis la ville. A Grenoble, le
quartier de Bonne était un quartier que l’on devait contourner avant
la reconversion du site en quartier d’habitation. Aujourd’hui les
tracés préexistants se prolongent à l’intérieur du quartier (même si
une place importante est dédiée au piéton). Le tramway passe à
proximité du site et permet son accès par les usagers depuis les
transports en commun. Pour assurer un accès facile aux
automobilistes, des places de stationnement ont été réalisées et un
parking sous terrain a été construit sous l’esplanade centrale.

L’offre de logement est aussi conséquente, et cherche à


attirer une population de classe aisée ou moyenne. On trouve des
logements de standing ainsi que d’autres logements en accession à
la propriété et des logements sociaux pour la plupart HQE (fig. 36).
La qualité de vie est mise en avant par la ville pour promouvoir ce
quartier longtemps resté isolé du développement urbain.

Le quartier se dote d’espaces publics de qualité destinés aux


36 - Nouveaux logements HQE habitants du quartier mais aussi aux habitants de l’agglomération.
Ainsi l’ancienne cour d’honneur devient l’esplanade Général Alain
Le Ray (fig. 37) et est connectée au boulevard Gambetta, axe majeur
de la ville. Celle-ci devient un lieu d’animation, un lieu de passage
tout comme un lieu de rencontre
L’ensemble du quartier est organisé autour d’un parc qui se
raccorde à la ville et traverse tout le quartier jusqu’au parc Hoche
déjà présent. Espace de promenade, de détente, d’activités, espace
de jeux d’enfants, cet espace se veut multifonction pour proposer
37 - Esplanade le Ray une diversité d’activités accessibles par tous et pour tous les âges.
(fig. 38)

La présence d’équipements du quotidien invite un grand


nombre de personne à s’installer dans le quartier. On y trouve
désormais une école maternelle, mais aussi une crèche, et des
commerces de proximité en rez-de-chaussée des logements situé
autour de l’esplanade Le Ray.
Des équipements attractifs sont construits pour attirer cette
38 - Jardins des vallons fois-ci de nouveaux habitants dans le quartier et attirer les habitants

30
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
de Grenoble à venir dans cette nouvelle pièce du puzzle urbain
grenoblois. On y trouve un centre commercial (fig. 39) qui devient le
premier centre commercial du centre-ville mais aussi un cinéma
d’art et d’essai (fig. 40). Nombres d’habitants de la ville sont amenés
à venir dans le quartier de Bonne ne serait-ce que pour l’offre
d’activités et de commerces.

39 - Centre commercial de Bonne Même si le quartier n’est pas terminé, une grande partie est
déjà réalisée et opérationnelle. L’ambition qui était celle de
connecter le quartier à la ville et de l’ouvrir, ainsi que d’attirer des
nouveaux habitants et de nouveaux services fonctionnent
aujourd’hui très bien.

Nombres de villes relèvent aujourd’hui le pari d’intégrer leur


friche militaire dans leur tissu urbain et de connecter ces nouveaux
quartiers à la ville existante. Infrastructure routières, transports en
communs, offre immobilière, pôles attractifs et services de
40 - Cinéma d’art et d’essai Méliès proximité, tout est mis en œuvre pour que le quartier puisse
fonctionner et retrouver une nouvelle vie.

C - Le patrimoine au cœur des projets


L’ensemble de tous ces projets, qu’ils soient quartiers, parcs
ou bien zones économiques, se situe sur des terrains marqués d’une
histoire et support d’un patrimoine construit d’exception ou du
quotidien mais témoin d’une activité militaire et défensive
aujourd’hui disparue. Tous ces projets ne peuvent donc pas
s’émanciper de prendre en compte le patrimoine bâti dès
l’élaboration des premières esquisses. Celui-ci entre même souvent
dans le parti-pris global du projet et permet d’élaborer des projets
enracinés dans leur contexte, des projets qui prennent conscience
de leur site et de son histoire.
Gardons toujours l’exemple de la ZAC de Bonne de
Grenoble qui nous permettra d’illustrer plusieurs des attitudes de
prise en considération du patrimoine militaire dans la constitution
d’un projet.

Reconvertir le patrimoine
Les projets s’organisent étroitement autour de la notion de
patrimoine. Tout d’abord lorsque l’on parle de patrimoine dans la
reconversion d’une friche on est souvent confronté à la question du
bâtiment icône, témoin d’un passé militaire qui ne peut disparaitre
du paysage.
41 - Ancienne caserne C’est de cette façon que le projet du nouveau quartier de
Bonne a souhaité intégrer en son sein, les trois anciens bâtiments de
la caserne (fig. 41). Ceux–ci ont été réhabilités pour accueillir des
logements. Il est évident que dans le cas d’une reconversion et du
réaménagement d’un quartier datant de 1884, on aura la question à
se poser de savoir s’il faut conserver ou démolir. En l’occurrence
dans le cadre de ce quartier, de cet éco-quartier il était impossible
de démolir ces trois bâtiments de casernement, aptes à être
réhabilités car il est dans les intentions d’un éco-quartier que de
42 - Caserne reconvertie respecter l’existant et de savoir l’intégrer dans une composition

31
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
urbaine nouvelle. Le cabinet AKTIS a donc fait le choix de préserver
ces trois corps de bâtiment tout en recomposant la façade jugée
trop terne et peu apte à accueillir de nouvelles constructions
contemporaines. On a choisi d’effacer partiellement la composition
tri-partite du bâtiment (socle, étage courant et couronnement) pour
souligner l’unité du corps rez-de-chausssée et étage, rendant
indépendant le couronnement ainsi souligné. La modénature des
éléments de décor est aujourd’hui nettement moins marquée pour
s’intégrer dans ce nouvel éco-quartier accueillant plusieurs
nouvelles constructions contemporaines. (fig. 42)
Cette intervention souligne l’importance accordée au
patrimoine mais surtout souligne le fait qu’un bâtiment n’est pas
seulement une pièce construite sanctifiée mais bien un bâtiment
comme les autres et qu’une intervention est nécessaire pour ne pas
faire d’une construction la cristallisation d’un temps passé.

Construire autour du patrimoine


Sur les projets de reconversion on trouve plusieurs types
d’intervention sur ou en relation avec l’existant qui le place au
centre des quartiers où autres réalisations.
Avec l’exemple de Bonne on peut illustrer cet exemple avec
la création du centre commercial qui vient s’accoler à l’ancienne
caserne et créer ainsi une rue intérieure commerçante (fig. 43). On
retrouve une répercussion partielle de l’architecture contemporaine
sur la façade existante. On retrouve toujours un respect important
43 - Rue intérieure
pour la façade existante, et peu d’aménagements sont faits sur
celle-ci, à l’exception des auvents en acier et verre, et de quelques
devantures ponctuant le socle du bâtiment. La trame des
commerces coïncide avec celle des ouvertures. On recherche une
mise à distance entre contemporain et existant par des « joints
creux ». Le nouveau bâtiment contemporain ne vient pas cacher le
bâtiment patrimonial, mais le met en perspective (fig. 44) pour que
l’on prenne conscience de sa présence quel que soit l’endroit où
l’on se trouve dans le quartier.
De même les constructions qui jouxtent le bâtiment sont
44 - Entrée centre commercial
composées dans un souci de connexion naturelle avec la caserne.
Ainsi on retrouve une composition tripartite des constructions
(socle, étage, couronnement) ainsi qu’une continuité des
colorations et des modénatures. Ces bâtiments cherchent toujours
à mettre de la distance avec l’existant pour éviter d’affaiblir le
caractère fort du bâtiment patrimoine. (fig. 45)
Si l’on considère que les friches militaires s’articulent autour
de « bâtiments patrimoines », nombre de projets se situent sur des
sites moins chargés d’histoire et ne disposant pas d’un aussi riche
45 - Bâtiment Nord-Est lot de constructions de qualité.

Héritage et contexte
Les projets comme celui de Grenoble s’axent autour d’un
héritage des formes urbaines et du contexte.
En ce qui concerne la ZAC de Bonne, l’esplanade Le Ray
prend place sur l’ancienne cour d’honneur de la caserne. On note ici
l’impact qu’un vide peut avoir et sa persistance dans le temps et
l’espace.

32
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
D’autres projets se basent sur des éléments constitutifs de
leur parcelle de projet. Dans le projet de Sathonay-Camp,
accueillant une nouvelle gendarmerie ainsi que des logements
sociaux ou à l’accessibilité, fait table rase du site sur lequel il
intervient excepté le mail végétal de l’ancien camp militaire, seul
élément aux yeux des architectes qui méritait une conservation.

Le difficile combat du patrimoine


Si certaines constructions font l’unanimité dans plusieurs
sites, plusieurs constructions peuvent par leur petite taille, leur
fragilité, leur discrétion, faire débat.
Ainsi sur le projet de la ZAC de Bonne, les anciennes écuries
situées autour du Jardins des vallons, devaient être réaménagées
pour accueillir des activités culturelles mais une nouvelle
construction accueillant un cinéma d’art et d’essai a été préféré à
l’ancienne structure.
Plusieurs choix on fait débat dans ce projet de Bonne
comme la volonté du paysagiste Christian Devillers de créer un
grand porche dans le bâtiment central de la caserne pour connecter
le jardin des vallons et l’esplanade Le Ray qui se voulait être une
extension du parc. Ce grand porche est aujourd’hui invisible,
remplacé par un simple percement en rez-de-chaussée du
bâtiment.

D - Des projets à venir…


Plusieurs villes se sont lancées dans la reconversion des
friches militaires, surtout depuis 2008 suite à l’aliénation de 83 sites
qui ferment successivement leurs portes depuis 2009 jusqu’en 2016,
dû au plan de restructuration des armées. Pour aider ces villes à
compenser leurs pertes économiques induites par le départ des
militaires, l’Etat a débloqué une somme de 320 millions d’euros d’ici
à 2015 pour aider les villes à reconquérir leurs friches. Chacune des
villes se verra attribuer une somme de 2 à 10 millions d’euros en
fonction des pertes que représente la fermeture du site militaire.
L’Etat va aider pendant une période de 3 à 5 ans ces sites pour qu’ils
puissent retrouver une économie qui compensera le départ des
militaires via des Contrats de Redynamisation des Sites de Défense
(CRSD) s’appliquant aux villes ayant perdu plus de 200 emplois. Ces
contrats, mis en place en juillet 2008 permettent aux villes d’assurer
la transition de leur friches du militaire vers le civil et d’assurer les
conditions d’une économie solide. Pour les villes perdant entre 50 et
200 emplois sont mis en place des Plans Locaux de Redynamisation
(PLR). Ils permettent de compenser la perte économique engendrée
par le départ des armées (comme un CRSD) mais s’appliquent aux
villes ressentant moins de bouleversements économiques.

Grâce aux investissements de l’Etat et à la volonté des villes


de retrouver une économie et une dynamique urbaine semblable à
celle connue pendant la présence des armées, on attend un nombre
florissant de projets de reconversion dans les prochaines années de
la décennie.

33
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
Conclusion
Au fil d’une étude plus ou moins variées d’un panel de
reconversions réalisées, en chantier ou en projet, nous avons pu
esquisser la qualité du patrimoine militaire et son utilité dans la ville
actuelle. Reconstruire la ville sur l’existant en tirant parti de ce qui
n’est plus utile à la protection de celle-ci. Redécouverte
contemporaine d’une attitude hérité des générations passées.

Le patrimoine militaire a pendant des années été considéré


comme un simple résidu des constructions défensives et son intérêt
patrimonial et historique en a très vite fait des sites muséifiés,
protégés ou classés, préservés des destructions. La préservation est
une chose mais que faire de ces structures obsolètes ? La
muséification est passée par là faisant naitre un nombre florissant
de musée d’histoire et de patrimoine sur le territoire français. Mais la
ville ne peut pas accueillir un nombre toujours croissant de
structures culturelles et patrimoniales. Conserver oui, mais être utile
à la ville et un développement urbain est une réponse adéquate au
contexte urbain actuel.

Les reconversions des constructions militaires aussi variées


qu’elles peuvent être se nourrissent d’une variété des édifices
défensifs, mais aussi de la diversité d’identités de celles-ci. Au
XXème siècle, l’intérêt pour ces structures en a fait des sites
privilégiés et dotés d’une identité atypique. Si l’on voit un
engouement pour la reconversion c’est aussi parce que la variété
des constructions implique une variété d’usages nouveaux
résidentiels, culturels, économiques, éducatifs…, des reconversions
qui touchent l’ensemble de la société ainsi que l’ensemble des
attentes de celle-ci.
Projets variés, attentes variées, à cela s’ajoute des postures
variées, du signal architectural à la simple restructuration d’un
édifice pour y accueillir de nouveaux usages, la reconversion
mesure l’impact des constructions au niveau territorial et urbain.
Que conserver de l’existant, faut-il privilégier l’effet contemporain
de l’extension sur la construction existante, s’effacer devant le
caractère du bâtiment, détruire, tout conserver ? Toutes ces
questions sont prises en compte par l’architecte chargé de la
reconversion pour répondre au mieux aux attentes d’une commune
et à un programme. Il n’existe pas de réponse « préfabriquée » pour
la question du parti pris architectural et de la reconversion, le projet
s’adapte au contexte encore plus qu’une construction neuve.

Reconvertir le patrimoine militaire s’attache à la notion du


bâtiment mais l’étendu territorial du patrimoine militaire impose
une réflexion au-delà des limite du bâtiment pour s’attacher plus à
l’ensemble des terrains d’une friche militaire. Comme l’étude a pu le
montrer la stabilisation géopolitique européenne et la
professionnalisation de l’armée a imposé une aliénation progressive
de nombreux sites de défense offrant à la ville l’accès à de nouveaux
sites enclavés mais situés en centre-ville. La préoccupation de
l’expansion urbaine pousse les collectivités à reconquérir ces

34
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
territoires pour répondre aux attentes d’une ville et de sa
population.
Les projets urbains et économiques se multiplient sur le territoire
national. La maturation de ces projets demande de nombreuses
concertations, réflexions et études urbaines, et les projets sortent
tout juste de terre.
L’étude va plus loin que les simple friches militaires, mais
pourrait être généralisée à l’ensemble des friches industrielles,
ferroviaires, portuaires… qui deviennent, à l’heure de la
modernisation extrêmement rapide de la société et du territoire, le
nouveau terrain de jeu des architectes et urbanistes. A la nécessité
d’aménagement des territoires libérés et proches des villes, s’ajoute
la prise en compte du patrimoine, l’appropriation de ces sites par les
nouvelles populations…

L’engagement de l’Etat, mais aussi des collectivités, des


villes, des habitants… dans l’ensemble des nouveaux projets de
reconversion montre la prise de conscience de la valeur et du
potentiel que représentent les friches militaire et leur patrimoine.

Ce patrimoine, bien au-delà de la simple conservation de


l’existant, pose la question de la nature du patrimoine. Peut-on tout
patrimonialiser ? On voit aujourd’hui que lors de la reconversion du
patrimoine militaire et de ses territoires, on se pose la question du
patrimoine pour savoir ce qui fait patrimoine dans l’environnement.
Peu de constructions du XXème siècle sont considérées comme des
bâtiments présentant une qualité patrimoniale. Peut-on encore
aujourd’hui « construire du patrimoine » ? Les constructions du
XXème siècle semblent aujourd’hui perdre de leur valeur au fil des
années et semblent dans l’incapacité de faire patrimoine.

La reconnaissance du patrimoine militaire, comme des


autres patrimoines, promet une véritable prise de conscience des
constructions atypiques dans l’ensemble des projets de
reconversion à mener, il est aujourd’hui temps d’assurer la
transmission du patrimoine, témoin du passé et de l’histoire d’un
site. Une transmission qui passera par la reconversion…

35
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
Corpus - Patrimoine reconverti, en cours ou en
projet de reconversion

Logements

Caserne Boudet -Bordeaux


Caserne d’Arras
Casernes de Bonne
Caserne de Châlons-en-Champagne
Casernes Drouot & Barbanègre - Mulhouse
Caserne Aubry - Bourg-en-Bresse
Caserne Pélissier – Rouen
Fort du Haut-Buc - Buc

Edifices culturels

Université de Bayonne
Université d’Amiens
Université de Nîmes
Centre de formation des collecteurs d’impôts – Fort Saint Jean –
Lyon
ISAT – Etablissement des Subsistance – Nevers
Ecole des Beaux-Arts – Etablissement des Subsistance – Lyon
Faculté Catholique – Caserne Bissuel - Lyon
Musée du Costume de Scène – Caserne Villars – Moulins
Cité du Design – Manufacture d’arme – Saint-Etienne
FRAC Centre – Etablissement des Subsistance - Orléans
MuCEM – Fort Saint Jean – Marseille
Fondation Jean Nouvel – Fort Mont-Boron - Nice

Secteurs d’activités

Cave d’affinage - Fort Henry Martin aux Rousses


Conseil général de l’Orne - Caserne Lyautey - Alençon
Conseil général - Hôpital militaire Sédillot – Nancy
Siège de la communauté de l’agglomération de Dijon – Caserne
Heudelet- Dijon
Siège d’entreprises – Hôpital militaire Baur - Colmar
Base sous-marine – Lorient
Hôtel de Police – Fort Montluc - Villeurbanne

36
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
Musées d’histoire et patrimoine

Bunker culturel – Base sous-marine - Saint-


Musée de l’Armée - Les Invalides – Paris
Musée du Mur de l’Atlantique – Ouistreham
Forts de Vaux & Douaumont - Verdun
Musée et Tour de Guet – Pérouges
Château des Allymes – Ambérieu-en-Bugey

Parcs

Parc Sergent Blandan – Caserne Blandan – Lyon


Jardins Suspendus – Fort Sainte-Adresse – Le Havre
Parc de l'ile St Germain – Issy-les-Moulineaux

Quartiers

ZAC de Bonne – Grenoble


Le Fort Numérique – Issy-les-Moulineaux
ZAC des Capucins – Brest
ZAC Castellane - Sathonay Camp
ZAC Forgeot Saint-Antoine - Châlons-en-Champagne
ZAC La Courouzze – Rennes

Quelques exemples de réalisations ou projets utilisés dans le


rapport d’étude….

37
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
ZAC de Bonne Fiche Corpus #1
Grenoble (38 - Isère)

Le Carré Mansart :
Immeuble de logements en
accession à la propriété

Reconversion de l’ancienne
caserne

Architecte : Philippe Braymand &


Jean Bovier Lapierre

Livraison : juillet 2008

Crédits photographiques : http://www.villesetvillagescreations.com/construction-immobilier/


programmes-neuf-historique-36.html

38
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
ZAC de Bonne Fiche Corpus #2
Grenoble (38 - Isère)

Centre Commercial de
Bonne
Reconversion de l’ancienne
caserne

Architecte : Groupe -6

Livraison : 2010

Crédits photographiques : http://groupe-6.com/fr/agency/presentation#/fr/projects/view/16

39
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
ZAC de Bonne Fiche Corpus #3
Grenoble (38 - Isère)

Projet urbain du Quartier


de Bonne
(Planification urbaine, espaces
publics et implantations bâties)

Architecte : Christian Devillers et


AKTIS Architecture

Livraison : 2008 - 2012

Logement Ilot Henri IV

Architecte : Yves Lyon


Livraison : 2009

Logements Les Patios


d’Or

Architecte : AKTIS Architecture


Livraison : 2012

40
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
Fort Saint-Jean Fiche Corpus #4
Lyon (69 - Rhône)

Ecole Nationale du
Trésor
Reconversion de l’ancien Fort
Saint-Jean

Architecte : Pierre Vurpas et


Associés

Livraison : 2004

41
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
Remerciements
Je tiens à remercier l'ensemble des personnes qui ont
contribué à la rédaction de ce rapport d’étude, notamment :

- Brigitte SAGNIER, professeur référant et directrice de rapport


d’étude, pour avoir suivi l’évolution de ce rapport depuis le début
des recherches jusqu’à sa finalisation.

- Jean-Paul MOIROUD, du Service Infrastructure de la Défense du


Quartier Général Frère de Lyon pour m’avoir fait découvrir les
subtilités du transfert du patrimoine militaire vers le civil.

- L’administration de l’Ecole Nationale du Trésor pour son accueil et


pour m’avoir ouvert les portes de leur école.

- Jean-Yves BESSELIEVRE, Président de l’association VPM (Valoriser


les Patrimoines Militaires) pour les informations sur la valeur
patrimoniale des constructions militaires et l’action de leur
association.

42
L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
Bibliographie
Livres
DALLEMAGNE François, 2006. Les défenses de Lyon - Enceintes et
fortification. Edition Lyonnaise d’Art et d’Histoire. 255 p.

DALLEMAGNE François, FESSY Georges, MOULY Jean, 2002.


Patrimoine militaire. Nouvelles éditions Scala. 328 p.

GODET Olivier, FOUGEIROL Benoît, 2007. Patrimoine reconverti du


militaire au civil. Nouvelles éditions Scala. 271 p.

NORA Pierre, 1997. Les lieux de mémoire (tome 3). Paris, Gallimard,
Collection Quarto, 4751 p.

SCHITTICH Christian, 2006. Construire dans l’existant. Edition


Birkhäuser Detail, 176 p.

Actes de colloques
MEYNEN Nicolas (dir), 2008. Valoriser les patrimoines militaires.
Théories et actions, Presses universitaires de Rennes.

Articles de revues
NODIN Yannick, 2008. Reconversion : Scénario urbains pour les
friches militaires, Le Moniteur, n° 547 pp. 56-58.

Webographie
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/geo_0003-
4010_1998_num_107_599_20836

http://insitu.revues.org/

http://www.restructurations.defense.gouv.fr/

http://www.culture.gouv.fr/culture/inventai/patrimoine/

http://www.valoriser-patrimoines-militaires.fr/

http://www.debonne-grenoble.fr/

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L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
Crédits photographiques
1 - http://www.toursud.com/services/images/stories/excursions/
carcassonne/carcassonne.jpg

2 - http://www.visite-au-chateau.com/loches/donjon_loches.jpg

3 - http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/d/d1/Ch%C3%A2
teau_de_Pierrefonds_ vu_depuis_le_Parc.jpg

4 - http://4.bp.blogspot.com/_XG1nQ2ZWH8c/THfuocQpWnI/
AAAAAAAAJ4E/C0VfPTI-0hk/s200/neuf++brisach.jpg

6 - http://a4.idata.over-blog.com/259x194/3/86/97/45/Fort-
Bron/images.jpg

7 - http://www.bzh-explorer.com/local/cache-
vignettes/L500xH333/44stnazaire_balade1-6aa25.jpg

8 - http://www.cheminsdememoire.gouv.fr/image/Est/For_de_Vaux/
Fort_de_Vaux_09.jpg

9 - http://www.guide-du-tourisme.fr/photos-guide-tourisme-et-loisirs-
parcs-attractions-musees-divertissements/4248/1_tourisme-chateau-des-
allymes-01500-amberieu-en-bugey-chateaux-et-abbayes.jpg

10 - http://www.lemoniteur.fr/media/IMAGE/2010/04/29/380x285x
IMAGE_2010_04_29_5815547-380x505.jpg.pagespeed.ic.wrFS2HpswV.jpg

11 - http://4.bp.blogspot.com/_IBOCaQ0nwMM/TL3Xw9QhAsI/
AAAAAAAAABA/S3t3pYXvc98/s320/ courvauban5.jpg

12 - http://www.wilmotte.fr/images/projets/photos/201203142217-1.jpg

13 - http://4.bp.blogspot.com/_VaqF9ezR4B8/TSJN3zlwHNI
AAAAAAAAADQ/HvmvD2NgO28/ s320/caserne-boudet-rue-de-pessac-
300x192.jpg

15 - http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/e/eb/
Cave_affinage_Juraflore_-_Fort_ des_Rousses_02_by_Line1.JPG/800px-
Cave_affinage_Juraflore_-_Fort_des_Rousses_ 2_by_Line1. JPG

16 - https://docs.google.com/gview?url=http%3A%2F%2Fddata.over-
blog.com%2F1%2F49%2F86%2 F03%2Fcolloque_valoriser-patrimoines-
militaires_godet.pdf&docid=678c7f237894dc3d9e44d27895
14fb12&a=bi&pagenumber=3&w=841

17 - http://www.frac-platform.com/uploads/Frac_110422_ext_Bdef.jpg

18 - http://i604.photobucket.com/albums/tt125/micou2/rouen
/pelissier/IMG_2585copy.jpg? t=1257073082

19 - http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/f/f9/
Citadelle_vue_du_ciel.jpg

20 - http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/e/ef/
Lyon_Fort_Saint-Jean-4.JPG

21 - http://maps.google.fr/maps?rlz=1C1AVSW_enFR365&q=
caserne+sergent+blandan&um=1&ie=UTF-8&hl=fr&sa=N&tab=wl

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L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
22 - http://maps.google.fr/maps?hl=fr&q=boulevard+croix+rousse&
bav=on.2,or.r_gc.r_pw.r_qf.,cf.osb& biw=1600&bih=732&um=1&ie=UTF-
8&sa=N&tab=wl

23 - http://www.lyon-photos.com/images/diaporama/2/2011/
moyennes/cp_croixrousse_plateau09.jpg

24 - http://www.lyon-photos.com/diaporama/grande_1592.htm

25 - http://lyon.monplaisir.free.fr/images/Articles/Manu_8.jpg

26 - http://www.lyon-photos.com/images/diaporama/2/2014/moyennes
/cp_septieme10.jpg

27 - http://medias.francetv.fr/cpbibl/url_images/2010/05/03/image_
62856188.jpg

28 - Extrait de Patrimoine reconverti du militaire au civil. Nouvelles éditions


Scala. 271 p.

29 -http://v8.cache8.c.bigcache.googleapis.com/static.panoramio.com/
photos/original/9092352.jpg? redirect_counter=1

30 - 31 - http://www.baseland.fr/projet_en.php?idSM=1&idarticle=160

32 - http://www.bouygues-batiment-ile-de-france.com/reference/fort-
dissy--issy-les-moulineaux/
199/1/?PHPSESSID=bffd864b94e314911824352719162c62

33 - http://www.capucinsbrest.com/

34 – 38 - http://www.lemoniteur.fr/191-territoire/article/actualite/690355-
le-grand-prix-national-ecoquartier-2009-attribue-a-grenoble-pour-la-zac-
de-bonne

37 - http://i78.servimg.com/u/f78/12/48/95/51/1600pa11.jpg

39 - http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/5/50/
La_Caserne_De_Bonne_-_Grenoble.jpg/800px-La_Caserne_De_Bonne_-
_Grenoble.jpg

40 - http://www.debonne-grenoble.fr/var/fr/storage/images/les-
commerces-et-equipements/l-ilot-sud/le-melies/308-10-fre-FR/Le-
Melies.jpg

41 -http://rp.urbanisme.equipement.gouv.fr/puca/edito
/Zac_de_Bonne.pdf

Les autres photographies non référencées dans cette partie


ou dans le texte sont des photographies personnelles.

Les photographies des pages 17 à 19 sont fournies par


l’agence Pierre Vurpas & Associés dans le document de presse
destiné au magazine du Moniteur Architecture AMC lors des
sélections pour le Prix de l’Equerre d’argent.

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L’AVENIR DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE
ARCHITECTURE [NF] Art de construire des édifices

RECONVERSION [NF] Adaptation à de nouveaux besoins

PATRIMOINE [NM] Ce qui constitue le bien, l’héritage commun

MILITAIRE [A] Relatif à l’armée, aux soldats, à la guerre

FRICHE [NF] Terrain, bâtiment laissé à l’abandon en attente d’une nouvelle activité

La France a vu sa situation géopolitique se stabiliser dès le milieu du XXème siècle


entrainant une professionnalisation de l’armée et une aliénation progressive des systèmes
défensifs.
C’est tout un patrimoine militaire varié et obsolète qui ponctue aujourd’hui le territoire et
les villes françaises. Témoin d’un passé ancré dans l’histoire nationale, le patrimoine militaire tente
aujourd’hui de trouver une nouvelle vie au service de la ville. Sauvées des destructions, les
constructions défensives répondent aux attentes variées d’une société en pleine évolution.
La ville fait face à de nombreuses problématiques dont l’expansion urbaine, et la récente
cession des emprises militaires lui offre la capacité de se régénérer et répondre aux demandes en
termes de logements, édifices culturels, économiques… La ville se reconstruit sur ce qui hier l’a
protégé.
La reconversion du patrimoine militaire peut-elle assurer à la ville une nouvelle dynamique
urbaine ?

ARCHITECTURE [N] The art of designing buildings .

RECONVERSION [N] Adaptation to new needs

HERITAGE [N] What constitutes the property, the common inheritance

MILITARY [A] Concerning the army, the soldiers, the war

FALLOW [NF] Ground, building neglected in wait of a new activity

France saw her geopolitical situation being stabilized from the middle of the XXth century
leading a professionalization of the army and a progressive alienation of the defensive systems.
It's all a varied and obsolete military heritage which punctuates today the French territory
and cities. Witness of past anchored in the national history, the military heritage tries today to find
a new life in the service of the city. Saved from destructions, defensive constructions answer the
varied expectations by a society in full evolution.
The city faces numerous problems of which the urban expansion and the recent cession of
the military holds offers the capacity to regenerate and reply the requests in terms of housing,
cultural and economic buildings… City reconstructs on what protect her on past.
Can the reconversion of the military heritage insure cities a new urban dynamic ?

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ENSAL
L’AVENIR / UE 5RE / 2011/2012
DU PATRIMOINE MILITAIRE : LA RECONVERSION AU SERVICE DE LA DYNAMIQUE URBAINE

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