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Said AKRICH & Khadija MOHCINE Vol5 N°1

Said AKRICH Khadija MOHCINE


FSJES, Université Ibn Zohr FSJES, Université Ibn Zohr
Agadir, Maroc Agadir, Maroc
akrichsaid@yahoo.fr khadija.mohcine@gmail.com

APPROPRIATION DE LA RESPONSABILITE SOCIALE DES


ENTREPRISES PAR LES COOPERATIVES ET SPECIFICITES
D’EVALUATION
Résumé : L’engagement en matière de responsabilité sociale des entreprises est
aujourd’hui affirmé par de nombreuses entreprises relevant aussi bien de l’économie
marchande et de l’économie sociale et solidaire, en l’occurrence les coopératives. La RSE
n’est pas une nouveauté pour les coopératives. Depuis leur création, elles savent que
leurs actions affectent un grand nombre de milieux différents, y compris les employés, la
communauté et l’environnement dans lequel elles opèrent. A bien des égards, le
mouvement coopératif a été le pionnier de l’élaboration et de la mise en œuvre de la RSE
s’inscrivant ainsi dans une perspective de développement durable. L’objet de cet article
est de comprendre la manière dont les coopératives, appréhendent le concept de la RSE
à travers l’étude du cas de la COPAG. La question principale est la suivante : Comment se
construit la stratégie RSE dans le cas de la COPAG? Comment s’approprie-t-elle cette
démarche ? Et quels sont les outils d’évaluation ?
Mots-clés : Economie sociale et solidaire (ESS), Responsabilité sociale des entreprises
(RSE), Développement durable, Coopératives.
Abstract:The commitment to corporate social responsibility is now claimed by many
companies under both the market economy and the social economy, namely
cooperatives. CSR is not new for cooperatives. Since their creation, they know that their
actions affect many different backgrounds, including employees, the community and the
environment in which they operate. In many ways, the cooperative movement has
pioneered the development and implementation of CSR thus following a sustainable
development perspective.The purpose of this article is to understand how cooperatives,
apprehend the concept of CSR through the case study of COPAG. The main question is:
How is built CSR strategy in the case of COPAG? How does this approach appropriate?
And what are the assessment tools?
Keywords: Social and Solidarity Economy, Corporate Social Responsibility (CSR),
Sustainability, Cooperatives.
Appropriation de la responsabilité sociale des entreprises 33
par les coopératives et spécificités d’évaluation
Said AKRICH & Khadija MOHCINE Vol5 N°1

INTRODUCTION
L’histoire des organisations de l’économie sociale et solidaire n’est pas récente. Crées au
milieu du XIXème siècle pour faire face à la pauvreté et à l’exclusion, ces organisations
demeurent des partenaires et acteurs privilégiés dans la mise en œuvre des actions
sociales collectives. Toutefois, toutes sont confrontées aux bouleversements socio-
économiques et politiques successifs qui les ont contraints à réaliser de véritables
mutations afin de ne pas disparaître. Certaines ont fait le choix de changer d’orientations
stratégiques et développer leurs activités commerciales en adoptant des méthodes de
gestion entrepreneuriales pour mieux appréhender les contraintes du marché, d’autres
développent une voie conciliant des missions sociales et des objectifs commerciaux
dans le but de ne pas « perdre leur âme ».
Au même titre s’affirme avec force la responsabilité sociale de l’entreprise (RSE) qui
s’accompagne d’une nouvelle vision de l’entreprise, amenée à répondre aux attentes des
parties prenantes et qui s’inscrit dans une perspective de développement durable. La
RSE - outil nécessaire à la solidarité – s’appuie sur la démarche volontaire des
entreprises désireuses de sortir de leur vision étroitement économique et d’interroger
leurs relations avec la société. L’engagement en matière de RSE est aujourd’hui affirmé
par de nombreuses entreprises relevant aussi bien de l’économie marchande et de
l’économie sociale et solidaire, en l’occurrence les coopératives. La RSE n’est pas une
nouveauté pour les coopératives. Depuis leur création, elles savent que leurs actions
affectent un grand nombre de milieux différents, y compris les employés, la
communauté et l’environnement dans lequel elles opèrent. A bien des égards, le
mouvement coopératif a été le pionnier de l’élaboration et de la mise en pratique de la
RSE.
L’objet de cet article est de comprendre la manière dont, les organisations de l’économie
sociale et solidaire telles que les coopératives, appréhendent le concept de la RSE à
travers l’étude du cas de la COPAG. La question principale est la suivante : Comment se
construit la stratégie RSE dans la COPAG ? Comment s’approprie-t-elle cette démarche ?
Et quels sont les outils d’évaluation ?
A ce titre, après avoir présenté le cadre conceptuel et théorique de la recherche (1),
nous nous attacherons à mettre l’accent sur la méthodologie de l’étude (2). Ensuite,
nousnous focaliserons sur les résultats et discussions de notre étude (3).
1 Cadre conceptuel et théorique
1.1 La responsabilité sociale de l’entreprise
La responsabilité sociale de l’entreprise (RSE) ne constitue pas un thème d’apparition
récente, il s’agit plutôt de la réapparition sous forme actualisée d’une interrogation aussi
vieille que la discipline des sciences de gestion. En effet, les questions d’ordre éthique et
social soulevées par l’activité des entreprises ont toujours existé dans le domaine du
management. Si ces questions ont été souvent occultées par le passé, elles revêtent de

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nos jours une forme spécifique et une importance particulière liées aux mutations socio-
économiques actuelles.
Loin de révéler tous les mystères d’une notion lourdement investie dans les cercles
académiques, nous allons d’abord faire un bref voyage dans l’histoire pour voir les
travaux fondateurs de la RSE (1.1.1) avant de présenter, par la suite, sa définition (1.1.2).
1.1.1 Genèse de la RSE
Même si ses antécédents nous font remonter aux grands auteurs des débuts du
capitalisme libéral au XVIIème siècle – voire pour certains à l’Antiquité, avec le code
d’Hammourabi au XVIIIème siècle avant notre ère – ou encore au paternalisme1 des
grands industriels européens et au fordisme (Henry Ford et la politique des 5$ par jour),
le concept moderne de RSE a très clairement des origines américaines. Le point de
départ généralement reconnu de la RSE, dans son sens contemporain, est la publication
du livre de Bowen en 1953, intitulé Social Responsibilities of the Businessman. Selon
Pasquero (2005a), la publication de cet ouvrage intervient dans un contexte particulier
où il est demandé aux entreprises de dépasser le cadre strict de leurs obligations
économiques pour assumer des obligations morales envers la société. L’objectif de
Bowen était alors d’une part d’étudier et analyser le discours d’un certain nombre
de capitaines d’industrie sur les responsabilités sociales de l’entreprise dans un
contexte euphorique d’après-guerre, et d’autre part de l’enrichir par des
contributions de grands courants de la critique sociale et morale de l’époque.
Son travail fut considéré comme « le pas qui fait le chemin» (Acquier et Gond, 2007). «
La RSE renvoie à l’obligation pour les hommes d’affaires de mettre en œuvre les
politiques, de prendre les décisions et de suivre les lignes de conduite répondant aux
objectifs et aux valeurs qui sont considérées comme désirables dans notre société »
(Bowen, 1953 ; p. 23). Friedman (1970 ; Cité par Gond, 2010 ; p. 14) a vivement réagi
considérant que : « La responsabilité sociale des entreprises est de faire du profit et que
toute autre attitude représentait un prélèvement indu sur la substance de l’entreprise,
sur les revenus de ses actionnaires et un obstacle au bon fonctionnement du
capitalisme ». Ce point de vue fut repris par Drucker (1984 ; Cité par Gond, 2010 ; p. 17)
qui soutint que : « Faire du profit est socialement incompatible avec la responsabilité
sociale de l’entreprise » qui a comme seule mission de créer du capital, permettant de
faire des investissements et donc de générer des emplois futurs ». Malgré cette
opposition, plusieurs auteurs ont contribué à développer le concept de RSE à l'instar de
Carroll, Wood, Gond, Capron,Wartick et Cochran, etc.
1.1.2 La RSE : En quête d’une définition universelle
Il est difficile de construire une définition théorique unique de la RSE en raison de la
multiplicité des analyses et des catégories conceptuelles. Le concept de RSE a toujours
été multidimensionnel. Parfois plus idéologique, parfois plus pragmatique, chaque

1Le paternalisme était largement influencé en Europe par le catholicisme social et plus tard aux États-Unis par les
Églises évangéliques protestantes qui ont pris le relais au milieu du XXe siècle. Ce mode de gestion confiait au
patronat la responsabilité de la prise en charge « de la naissance à la mort » des salariés et de leurs familles.

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époque a privilégié certaines dimensions aux dépens des autres, mais toutes ont
contribué à l’enrichir (Pasquero, 2005b).
La littérature fournit de nombreuses définitions de la RSE issues à la fois des cercles
académiques, du monde des affaires et des instances régionales et internationales
(Commission Européenne, Parlement Européen, ONU, OCDE, OIT, BIT, BM, ISO, etc.),
sans pour autant qu’un consensus ne se dégage pour une définition universelle. Loin
d’explorer ce débat, l’absence d’une définition de la RSE partagée par la communauté
scientifique et les professionnels témoigne le degré de sa transversalité et sa complexité
dues à son caractère éponge et flou. La RSE vise à consolider les objectifs économiques,
sociaux et environnementaux. Elle interpelle les entreprises (et de manière générale les
organisations) à optimiser leurs effets positifs, à limiter leurs externalités négatives et à
adopter un comportement éthique.
A la lumière de ce qui précède, on peut définir la RSE comme l’application du
développement durable au monde des entreprises qui se matérialise par l’engagement
volontaire et réel des entreprises d’intégrer les préoccupations sociales et
environnementales dans leurs activités et leurs relations avec les parties prenantes en
veillant à limiter leurs externalités négatives et à consolider leurs effets positifs.
1.2 L’économie sociale et solidaire
Les experts économistes, sociologues et gestionnaires tentent de conceptualiser ce
secteur d’activité, de lui trouver une dénomination acceptée par tous. Nous choisirons
de présenter ce « tiers secteur », défini à l’échelle internationale comme le « secteur à
but non lucratif » en Europe ou « Non profit sector » aux Etats-Unis, à travers une
approche théorique (1.2.1) et statutaire (1.2.2).
1.2.1 La conception théorique de l’économie sociale et solidaire
Garrabé (2001 ; p. 35) définit l’économie sociale comme : « un espace d’activités à
lucrativité limitée et à profit non partagé, producteur de biens et de services collectifs
ou privés, marchands ou non, à financement marchand ou non ». L’économiste J.M.
Harribey montre que l’économie sociale évolue dans un espace économique « mixte ou
hybride », à la fois marchand et non marchand. Les entreprises de l’économie sociale
(EES) se trouvent soit entièrement dans le secteur marchand (assurances, coopératives,
associations soumises à la concurrence), soit dans le secteur non marchand (activités
d’utilité sociale financées par le contribuable) ou dans les deux à la fois. L’économie
solidaire, quant à elle est un « espace d’activités sans lucrativité, caractérisé par la mise à
disposition intra-communautaire des possibilités de financement et des moyens de
production de la part de chacun des membres » (Garrabé ; 2001 ; p. 42).
Si l’économie sociale est axée sur des dimensions compensatrices en faveur de groupes
défavorisés, l’économie solidaire définit contractuellement les conditions de projets
alternatifs avec les parties prenantes. Présentée comme une nouvelle économie sociale,
l’économie solidaire est un système hybride répondant aux exigences des trois
économies : non marchande, non monétaire et marchande.
En conclusion de ce point, on peut considérer l’économie sociale et solidaire comme un
secteur économique à part entière, inscrit dans le marché, car il comprend des activités

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et des entreprises qui produisent et échangent des biens ou des services. Il se distingue
du secteur public parce qu’il est porté par des citoyens agissant de façon autonome, et
du secteur privé de capitaux parce qu’il n’a pas pour objet premier la réalisation du
profit.
1.2.2 La conception statutaire de l’économie sociale et solidaire
Les organisations de l’économie sociale et solidaire (OESS) se distinguent par des statuts
qui définissent un cadre régissant à la fois leurs finalités et leurs activités, et dont
l’éthique se traduit par les principes suivants: la finalité de service aux membres ou à la
collectivité plutôt que de profit, l’autonomie de gestion, le processus de décision
démocratique et la primauté des personnes et du travail sur le capital dans la répartition
des revenus. Le cadre juridique des organisations à but non lucratif est organisé autour
de trois grands statuts (Bidet, 1997 ; p. 76):
- Les associations : « L’association est une convention par laquelle deux ou plusieurs
personnes mettent en commun, de façon permanente leurs connaissances ou leur activité
dans un but autre que celui de partager leurs bénéfices ».
- Les coopératives : « Une coopérative est une association autonome de personnes
volontairement réunies pour satisfaire leurs aspirations et besoins économiques, sociaux et
culturels communs au moyen d’une entreprise dont la propriété est collective et où le
pouvoir est exercé démocratiquement ».
- Les mutuelles : « Les mutuelles sont des personnes morales de droit privé à but non
lucratif qui mènent notamment au moyen de cotisations de leurs membres, et dans l’intérêt
de ces derniers et des ayant droit, une action de prévoyance, de solidarité et d’entraide (…)
afin de contribuer au développement culturel, moral, intellectuel et physique de leurs
membres et à l’amélioration de leurs conditions de vie ».
1.3 La responsabilité sociale des OESS : Un enjeu stratégique
Souvent critiquées et accusées pour représenter une concurrence déloyale, les OESS
s’interrogent sur leur positionnement dans le domaine de la RSE face aux entreprises de
droit privé à but lucratif. Capron et Quairel-Lanoizelée (2004) définissent l’entreprise
responsable sous l’éclairage des théories des organisations. Nous distinguons:
1.3.1 Les théories économiques
Gadrey (2003) souligne que les OESS, qui se positionnent sur n’importe quel marché de
biens et de services, privilégient les marchés de services. Il n’y a pas de différence entre
les entités dès lors que les entreprises et les organisations marchandes et non
marchandes sont en compétition sur un marché sur lequel les OESS respectent les
critères socioéconomiques.
1.3.2 Les théories contractuelles libérales
De Woot (2005) demande si les entreprises fondées sur la pensée néo-libérale, selon
laquelle leur responsabilité sociale est de maximiser le profit pour l’actionnaire,
s’engagent vers une démarche plus éthique. Ce principe de profit individualisé est celui
qui différencie les OESS des entreprises marchandes. Les OESS sont régies par le
principe de non-lucrativité qui s’oppose à celui du versement des richesses financières à
des actionnaires et le principe de solidarité qui est articulé autour d’un projet collectif.

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« Les organisations non marchandes (ONM) sont très concernées par les externalités qui
sont substantielles à leu mission, laquelle correspond le plus souvent à produire des
biens publics générateurs d’externalités positives actuelles ou potentielles » (Pérez et al.,
2005 ; p. 65).
1.3.3 La théorie des parties prenantes
Les OESS semblent se démarquer dans le processus de production dans lequel il existe
une très étroite interaction entre les prestataires, les clients ou usagers auxquels il faut
ajouter les bénéficiaires. La qualité et la diversité des relations avec les parties
prenantes se différencient dans cette « économie de parties prenantes multiples »
(Ughetto et Laville, 2007 ; p. 99). L’originalité des services solidaires est constituée par
l’articulation durable entre réciprocité, marché et redistribution que les parties
prenantes cherchent à réaliser au sein d’unités micro-économiques (Alcolea-Bureth,
2004). Les parties prenantes développent une collaboration pour partager un projet
collectif dans lequel elles établissent des relations au service d’une même finalité sociale
et économique.
1.3.4 Les théories sociologiques néo-institutionnelles
Les OESS se caractérisent par des relations contractuelles ou conventionnelles avec des
parties prenantes étatiques. Les relations institutionnelles sont souvent le fruit d’une
démarche volontaire et individuelle de la part de la direction. Les différences entre les
entreprises et les OESS sont de plus en plus restreintes. Leur visibilité est rendue
possible à condition de redéfinir des critères d’évaluation de la valeur, de l’utilité sur des
indicateurs différents de ceux basés sur le profit (Say, 1803 ; Cité par Gadrey, 2003). Car,
les organisations non-marchandes sont caractérisées par le fait de s’engager plus
particulièrement à produire des services publics générateurs d’effets induits positifs.
Cela constitue leur projet et leur finalité au service de la société.
1.3.5 La théorie éthique
Apprécier l’état moral d’une entreprise est un exercice difficile. Selon Mercier (1999),
depuis le début des années 1970, l’exercice se limite souvent à évaluer le comportement
de l’entreprise vis-à-vis de ses principales parties prenantes (actionnaires, clients,
salariés, fournisseurs, collectivités, environnement, etc.). Chaque partie prenante, selon
ses préoccupations et ses valeurs, s’efforce d’imposer ses intérêts, ses revendications,
voire de minimiser ses risques (Igalens et al., 2002). Pour justifier les investissements
socialement responsables (ISR) au sein des entreprises, la valeur ajoutée apparaît
comme un « supplément d’âme, permettant au capitalisme actuel d’offrir des
justifications éthiques aux épargnants et d’une façon plus générale aux cadres »
(Chiapello et Boltanski, 1999 ; p. 104). Les OESS souhaitent donc se démarquer et
valoriser leur création de sens ou de morale qui mettrait en exergue leurs services et
leurs finalités.
En guise de conclusion sur ce point, nous pouvons dire que l’engagement des OESS de
conduire des actions responsables peut être envisagé comme un véritable enjeu
stratégique vis-à-vis de leurs parties prenantes internes et externes. La Communication
de la Commission européenne de juillet 2002 soulignait que l’expérience des acteurs de

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l’économie sociale pouvait être employée pour identifier les bonnes pratiques et s’en
inspirer: « Les coopératives, mutuelles et associations, en tant qu'organisations fondées
autour d'un groupe de membres, savent depuis longtemps allier viabilité économique et
responsabilité sociale. Elles parviennent à un tel résultat grâce à un dialogue entre leurs
parties prenantes et une gestion participative et peuvent donc constituer une référence
majeure pour les entreprises » (Blanc, 2008 ; p. 8).
2 Méthodologie de l’étude
2.1 Choix du terrain de la recherche
Notre choix d’étude de terrain porte sur le secteur de l’économie sociale et solidaire
spécifiquement la coopérative agricole. Les valeurs que véhicule cette économie font
partie de celles qui sont généralement avancées lorsqu'on évoque la responsabilité
sociale des entreprises.La coopération agricole dispose d’atouts majeurs pour garantir
aux générations actuelles et futures la transmission et la valorisation d’un patrimoine
économique, environnemental et social. En effet, la coopérative semble être le lieu par
excellence où les valeurs humaines et sociétales s’épanouissent, où l’appartenance
sociale est forte et où les questions sociétales sont au centre des intérêts.
Parce que les coopératives sont fondées sur des valeurs : la démocratie, la promotion
des hommes, le mutualisme, l’équité ; parce qu’elles sont insérées dans les territoires, les
coopératives ont un lien fort avec leur environnement géographique et social.
Ainsi, le terrain de recherche porte sur la COPAG, une coopérative créée à l’initiative des
premiers adhérents dans le but de valoriser leur production agricole et rester maîtres
de leurs produits agricoles depuis la production jusqu’à un stade plus avancé de la
distribution.La COPAG est connue le plus par sa marque des produits laitiers « JAOUDA
». Elle s’est fait connaître, en l’espace d’un laps de temps, par la qualité qu’offrent ses
produits et par son statut et son mode de gestion coopératif. Elle opère sur un créneau
d’activités assez diversifié. Ses activités peuvent être résumées en domaine agricole
(production végétale et animale) et celui d’industrie agroalimentaire.
2.2 Détermination des méthodes d’enquête
Notre recherche empirique repose sur une étude exploratoire de type étude de cas,
fondée sur des méthodes de recueil d’informations qualitatives. Le choix de l’étude de
cas s’explique par deux raisons : D’une part, elle constitue une des méthodologies qui
permettent, lorsqu’elle est bien réalisée, de comprendre les interactions complexes, les
processus diffus. Elle permet de combiner plusieurs méthodes de collecte de données
comme les archives, les interviews, les entretiens en groupe, les questionnaires et les
observations. D’autre part, elle permet une analyse plus approfondie du phénomène et
des différents niveaux d’interprétation qui lui sont attachés ; elle aboutit à une
compréhension fine, difficilement accessible par l’intermédiaire de méthodes
quantitatives comme le questionnaire par exemple.
Les données proviennent de deux principales sources : les documents produits sous la
gouverne de la COPAG sous étude et les entretiens (semi-directifs) menés auprès des
professionnels identifiés comme principaux responsables de la formulation et de
l’implantation de la stratégie RSE, à savoir le chef du service financier et le chef du

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service de la coopération.L’objectif des entretiens semi-directifs est de donner aux


différents acteurs la possibilité de développer un discours approfondi sur leur
organisation, leurs modes d’action et les effets de leurs actions sur l’environnement. La
démarche que nous choisissons est l’analyse de contenu et plus précisément l’analyse du
discours. Cette méthode d’analyse est bien adaptée pour un type de recherche
exploratoire comme la notre. Au niveau de notre travail ; il faut préciser que nous avons
ciblé uniquement les chefs de services et divisions sans faire appel aux différents
membres du personnel de différents niveaux hiérarchiques, faute de temps et vu la
complexité du thème.
3 Résultats et discussion
La majorité des discours analysés semble intégrer les préoccupations RSE dans la
réflexion stratégique de la coopérative. De telles préoccupations sont abordées comme
des problématiques vécues et déjà intégrées aux autres problématiques managériales:
financières, commerciales, organisationnelles, etc.La finalité de la COPAG est de garder
l’organisation à un degré d’atteinte des objectifs sociaux et environnementaux toujours
supérieur ou égal au degré des réalisations des objectifs économiques.
La caractérisation des principes de la RSE de la COPAG a été effectuée en analysant les
citations de quelques responsables. Ainsi, la mission et les objectifs tels qu’ils sont
définis par eux : « La mission que nous assignons à la COPAG est d’: Assurer elle-même ou
par l’intermédiaire de ses adhérents le développement socioéconomique du milieu rural de
la région du Souss ; Offrir des produits agricoles d’origine animale et végétale de plus en
plus élaborés, qui peuvent satisfaire les attentes actuelles et futures des consommateurs ;
Améliorer le revenu de la COPAG et de ses adhérents à travers des actions conjuguées à
tous les stades de la production, de la transformation, et de la commercialisation des
produits agricoles à forte valeur ajoutée. Nos objectifs se définissent à travers les actions
d’approvisionnement, d’encadrement et de formation en collaboration étroite avec ses
partenaires nationaux et internationaux. La COPAG cherche à améliorer la productivité, la
rentabilité de ses activités, et par voie de conséquence à garantir la croissance économique
des secteurs d’activités où elle opère » précise lePrésident de la COPAG.
Ainsi, les dimensions économiques et sociales sont fortement imbriquées. D’un côté, la
COPAG est une coopérative économique ayant pour vocation le rôle que les dirigeants
entendent lui faire jouer afin de répondre aux besoins de l’environnement et ses
aspirations, en prônant le développement économique local de manière explicite. De
l’autre côté, ses finalités rejoignent la conception de la mission d’une entreprise de
l’économie sociale et donc une sorte d’entrepreneuriat social s’en associe.
L’entrepreneur social, à l’image du président de la COPAG, exerce dans une entreprise où
la finalité économique est conjointe à une finalité répondant à des valeurs de solidarité
entre personnes, groupes sociaux et territoires.
Le principe de non-lucrativité qui est au cœur de la fonction des OESS ne signifie pas
l’absence de profits, mais obéit à un statut coopératif différent de la logique court-
termiste des actionnaires. En effet, dans le cadre d’une économie plurielle, il est évident
que l’activité économique s’exerce dans le cadre de statuts pluriels. En d’autres termes,

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partant même de la vocation de l’économie qui vise la satisfaction des besoins


individuels et collectifs par la production des biens et services divers, plusieurs logiques
de production peuvent être envisagées. Ainsi, en optant pour une logique de production
avec un statut coopératif, les membres de la COPAG se voient réunis autour de valeurs et
d’objectifs communs privilégiant le long terme et la gouvernance collective. Avec un tel
statut, jugé préférable aux autres formes d’entreprendre, la COPAG arrive à
concurrencer les sociétés anonymes de renommée du secteur au Maroc.
La réponse donnée à la question « Qu’est qu’on entend par responsabilité sociale chez la
COPAG ? » fut par le chef du service financier: « Nous ne posons pas la question en ces
termes. Nous avons d’abord un projet, une vision d’entreprise, puis des hommes et des
femmes qui travaillent ensemble pour le faire avancer, qui lui-même, guide nos décisions
au quotidien. La responsabilité sociale se situe dans notre projet d’entreprise et y trouve
son origine et se décline en faisant en sorte que les hommes et les femmes s’épanouissent
tout en faisant avancer ce projet ». Il continue en disant : « Nous vivons la responsabilité
sociale sans qu’elle ne fasse l’objet d’une quelconque charte. Cela ne peut pas se formaliser.
Les règles morales, oui, mais une démarche éthique, elle est vécue de l’intérieur… La RSE
suppose une prise de conscience de cet espace de liberté dont nous disposons pour prendre
la décision la moins mauvaise lorsqu’il s’agit de trancher entre l’économique et le social ou
l’environnemental car nous ne pouvons ignorer les valeurs économiques. Le profit est
important et la performance économique assure la crédibilité même du projet. Mais ce
n’est pas l’objectif en soi».Toujours dans le même contexte, le chef du service de la
coopération nous explique que le souci de la RSE est bel et bien présent, même en
l’absence du terme : « La tendance actuelle chez la COPAG est de développer cette culture
de la RSE. Peut être qu’on n’utilise pas le terme, mais c’est le sujet d’actualité sur lequel
nous travaillons aujourd’hui ».
La RSE chez la COPAG n’est pas réductible à de simples actions isolées conduites
séparément. Elle fait en sorte d’impliquer toutes les parties prenantes internes et
externes. Ainsi, salariés, instances représentatives du personnel, sous-traitants,
fournisseurs et même les clients sont concernés dans la stratégie RSE qui se manifeste à
travers : l’efficacité et la rentabilité économique (le volet économique), la valorisation
des Hommes (le pilier social) et l’environnement (le volet environnemental).
3.1 Le volet économique
La coopérative a amélioré la qualité de ses produits tout au long du processus de
production du lait et de ses dérivés. Pour cela, COPAG a créé en 2002 un département de
management de la qualité et de développement chargé de la mise en place, le
développement et l’amélioration du système de management de la qualité.Elle a mis en
place un suivi de la qualité des produits de l’amont jusqu’à l’aval, afin de garantir une
place importante sur le marché tant national qu’international.
En outre, COPAG s’est engagée dans une démarche qualité dans le cadre d’un projet
initié par l’Association des Fabricants d’Aliments Composés (AFAC) et dont les objectifs
sont : Consolidation de la position sur le marché en renforçant son poids dans
l’économie nationale et dans le secteur laitier ; Amélioration de l’organisation interne de

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la coopérative ; Construction d’une image crédible auprès des clients ; Développement


d’un avantage concurrentiel décisif grâce à l’innovation.
Tous ces objectifs visent à atteindre des résultats significatifs dans le futur et ce à
différents niveaux : Réalisation des économies sur la chaîne de la production ;
Fidélisation de la clientèle ; Conquête de nouveaux marchés ; Etre reconnue comme une
marque nationale.Pour se faire, elle a choisi de travailler selon un référentiel qui a fait
ses preuves, la norme ISO 90012 version 2000 complété par l’HACCP3 en faisant de
l’hygiène, de la sécurité et du respect de l’environnement des préoccupations
permanentes à tous les niveaux.
3.2 Le volet social
L’amélioration du bien être social est la base de la performance de la COPAG et se
manifeste à travers :
- L’emploi : La COPAG est responsable dans la sélection des employés à tous les niveaux,
la parité professionnelle et l’harmonie intérieure sont bien respectées sans oublier la
sécurité à l’emploi ;
- Le développement individuel et le contexte du travail : La formation est en tête des
pratiques responsables de la COPAG vu qu’elle développe un sentiment d’appartenance
et une culture de maison.Les considérations humaines revêtent également une grande
importance au sein de la COPAG et se traduisent par les éléments suivants : la
considération, l’épanouissement, l’implication et le bien être. Tandis que le souci d’une
vie interne est caractérisé par un management participatif et une justice sociale.
- La rémunération et périphériques : la paie au mérite, l’égalité des chances et la
réciprocité des faveurs sont les fondements d’une telle rubrique.
En outre, le soutien aux employés a été concrétisé par la création de l’Association des
Œuvres Sociales qui a eu comme vocation l’épanouissement des employés et de leurs
familles (environ 3 000 bénéficiaires). Depuis sa création en 2009 (mise en vigueur en
2010), cette institution n’a épargné aucun effort pour porter de l’aide et soutenir les
membres que se soient dans les cérémonies de mariage (1 500 DH), les cas
d’hospitalisation (2 000 DH + 200 DH de produits laitiers), les cas des décès (10 000 DH
au cas du décès du membre ; 2 000 DH au cas du décès de l’un de ses enfants et 1 000 DH
au cas du décès de l’un de ses parents + 30 litres stérilisés). Les adhérents bénéficient
aussi des cours de soutien au profit de leurs enfants à chaque rentrée scolaire (200 DH
pour le primaire, 300 DH pour le collégial et 400 DH pour le secondaire).L’expérience de
la COPAG est également un exemple réussi d’intégration dans les grandes distributions.
Elle est la seule coopérative ayant réussi une importante expérience de regroupement et
d’entrainement social. Des richesses ont été créées dans toute la région en termes
d’emplois, de revenus et d’amélioration des conditions de vie des éleveurs.
La COPAG a réussi en quelques années à s’intégrer à la grande distribution et à
concurrencer les opérateurs bénéficiant de moyens importants tels que la Centrale

2 Référentiel certifiable par une tierce partie et définissant une série d’exigences concernant la mise en place d’un
système de management de la qualité.
3Le référentiel HACCP constitue un système qui définit des dangers spécifiques, et indique les mesures à prendre en

vue de les maîtriser et de garantir la salubrité des aliments.

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Laitière et les domaines royaux. Une telle intégration a eu un impact sur la situation des
éleveurs, chose qui s’est traduite par des investissements importants en : bâtiments,
troupeaux bovins et équipements agricoles. L’amélioration des systèmes de production
dans les exploitations a eu un impact sur le changement des statuts des éleveurs se
traduisant par l’amélioration de leurs revenus et de leurs conditions de vie.
3.3 Le volet environnemental
Pour la COPAG, plusieurs chantiers ont été entrepris dans le domaine environnemental.
Elle s’est engagée dans des actions visant à limiter, voire même empêcher, les dégâts
occasionnés par ses activités sur son environnement. Après l’obtention du certificat ISO
9001 en 2008, elle s’est lancée dans une démarche environnementale pour obtenir
lelabel ISO 140014 vers la fin de l’année 2011. Ainsi, elle a démarré par : La mise en
œuvre des moyens et des ressources nécessaires pour assurer sa conformité
réglementaire permanente, et imposer des contraintes environnementales plus strictes
que les limites autorisées permettant ainsi d’anticiper toute modification de la
réglementation ; La mise en place d’outils et d’indicateurs afin d’évaluer ses
performances environnementales, de prévenir toute forme de pollution et de nourrir sa
démarche d’amélioration continue ; Le traitement de l’ensemble des déchets par la mise
en place de tri sélectif, dans le but d’augmenter les possibilités de recyclage, réutilisation
et valorisation et réduire ainsi la mise en décharge des déchets industriels ; La formation
et l’information de son personnel de l’utilité de l’intégration du respect de
l’environnement dans ses activités, et l’encouragement de ses adhérents, fournisseurs et
sous-traitants à adopter des règles de conduite respectueuses de l’environnement ;
L’introduction des critères environnementaux et spécifiquement l’économie d’eau dans
l’acquisition de nouveaux matériels et le développement de nouveaux procédés ; La
maîtrise, la réduction et le traitement des effluents liquides ayant un impact négatif sur
l’ensemble des éléments de l’environnement.
Par ailleurs, la COPAG a démarré un projet d’économie d’eau et de dépollution en 2004
découlant du projet Watershed Protection and Management (WPM)5, et cofinancé par le
Fonds de Dépollution Industrielle (FODEP)6. Les objectifs assignés à ce projet sont : La
sensibilisation des industriels quant à l'utilisation optimale de l'eau et à la protection de
l'environnement pour acquérir et adopter une compréhension du label vert et avoir une
stratégie de certification visant la certification ISO 14000 ; Le renforcement des
capacités techniques des unités en vue de faire de la gestion de l'eau et de
l'environnement une composante de la gestion globale ; La création de noyaux de
dissémination capables de servir de modèles pour les autres industries de la région ; La
contribution à la mise en place de la gestion intégrée des ressources en eau et de la
maîtrise de la pollution industrielle ; et La préparation des industriels à se conformer
aux exigences de l'Agence du Bassin Hydraulique du Souss Massa Drâa (BHSMD).

4 Norme internationale de certification environnementale qui vise une amélioration continue par rapport à la gestion
des impacts sur l’environnement, par la mise en place d’un système de gestion de l’environnement.
5 Projet de gestion et de protection des Bassins Versants.
6 Instrument incitatif visant l’encouragement des entreprises à réaliser des investissements de dépollution ou

d’économie de ressources et introduire la dimension environnementale dans leurs activités.

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3.4 Les démarches d’évaluation


La démarche de certification est basée sur une volonté réelle de la COPAG de faire
évoluer ses pratiques, son organisation et ses moyens afin de démontrer son
engagement sociétal envers ses parties prenantes et faire face à la concurrence. Elle se
présente comme un catalyseur de changement organisationnel dont les effets positifs les
plus avancés sont: la formalisation des procédures, la clarification des rôles et la
responsabilisation de tous les niveaux.Par exemple, les motivations de l’implantation de
la démarche ISO 14001 sont stratégiques pour la COPAG et obéissent à une logique de
recherche de performance selon un jeu « win-win ». L’ISO 14001 est considérée comme
un outil à multiples facettes. Vecteur d’image, l’ISO 14001, est tout à la fois, un outil de
dialogue, de mobilisation et de maîtrise des coûts. Les motivations stratégiques de
l’adoption de l’ISO 14001 peuvent être séparées en enjeux externes et enjeux internes.
Les enjeux externes regroupent l’amélioration de l’image de la COPAG, ainsi que le
renforcement de la confiance de ses parties prenantes à son égard en démontrant son
engagement environnemental. Figurent parmi les enjeux internes, la structuration des
pratiques de gestion environnementale à partir d’un cadre de référence éprouvé. Sont
également cités des facteurs tels que : la mise en place d’un projet fédérateur en interne,
la cohésion interne, la fidélisation des salariés et le développement de pratiques
managériales qui favorisent la rigueur et la constance dans l’atteinte des objectifs. Enfin,
le souhait de la COPAG est de favoriser l’engagement d’un maximum d’adhérents autour
de projets structurants.
En s’appuyant sur la documentation interne de la COPAG, nous pouvons constater
qu’elle s’est engagée dans des programmes de certification des produits et des procédés
visant d’une part à améliorer son image de marque de ses partenaires aussi bien
nationaux qu’internationaux, et d’autre part à rendre plus crédible sa réputation dans le
domaine des affaires. La COPAG s’est engagée dans une démarche responsable tout en
respectant les exigences en matière d’audit et de certification pour les fabricants de
denrées alimentaires. Parmi les procédés d’évaluation auxquels COPAG a fait recours, on
peut citer :
3.4.1 Tesco Nurture (TN 10)
C’est un code de bonnes pratiques agricoles axées sur la conservation de la biodiversité
et d’une manière générale, sur la conservation et la gestion environnementale de
l’exploitation agricole. Proche du code Global GAP, ce référentiel a été développé par la
chaîne de distribution britannique Tesco et ADAS (Agricultural Developpement
Advisory Service, ou service consultatif de développement agricole britannique). Les
exigences de Tesco Nurture sont parfois supérieures aux exigences légales. Ce
référentiel est développé autour de 7 piliers : Utilisation rationnelle des pesticides ;
Utilisation rationnelle des fertilisants minéraux et organiques ; Prévention des
pollutions ; Protection de la santé des hommes et des conditions de travail ; Utilisation

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rationnelle de l’eau, de l’énergie et autres ressources ; Recyclage et réutilisation et


Conservation et amélioration de la faune et de la flore.
3.4.2. BRC (British Retail Consortium) : Certification de la Norme
Mondiale pour la Sécurité des Denrées Alimentaires
La norme BRC pose un cadre général pour les producteurs de denrées alimentaires. Elle
aide ces derniers à produire des aliments sûrs, qui satisfont aux exigences légales, tout
en gérant la qualité des produits pour répondre aux besoins des clients. C’est une norme
de sécurité alimentaire reconnue dans le monde entier en tant que système de contrôle
dans le cadre de la Global Food Safety Initiative (GFSI), et élaborée de façon à ce que la
conformité des locaux, des systèmes d’exploitation et des procédures d’une entreprise
soit évaluée par un tiers compétent. En remplissant les exigences imposées par la norme
mondiale BRC, la COPAG prouve qu’elle maîtrise les critères de sécurité, de qualité et de
fonctionnement en vigueur dans le secteur de la fabrication des aliments. De plus, elle
respecte les prescriptions légales nécessaires ainsi que les mesures de protection des
consommateurs imposées par l’industrie alimentaire.
3.4.3 BSCI (Business Social Compliance Initiative)
Le code de conduite BSCI7 est en ligne avec les conventions de l’Organisation
Internationale du Travail (OIT) et encourage l’amélioration de la performance sociale
des fournisseurs. Son objectif est d’être homologué aux standards internationaux afin de
promouvoir des conditions de travail acceptables dans les usines du monde entier.
Le code de conduite BSCI couvre les domaines suivants : Conformité réglementaire ;
Heures de travail ; Salaires et avantages ; Interdiction du travail des enfants ;
Interdiction du travail forcé et mesures disciplinaires abusives ; Liberté d’association et
droit à la négociation collective ; Interdiction de toute forme de discrimination ; Hygiène
et sécurité sur le lieu de travail ; Système de management et Problématiques
environnementales et sécurité.
CONCLUSION
La COPAG vit les valeurs de la RSE dans les pratiques sans forcement avoir besoin d’une
charte, grâce à ses valeurs institutionnelles: fonctionnement démocratique, participation
des sociétaires, solidarité, valorisation des ressources internes, utilité sociale des
activités, mise en valeur de l'environnement de proximité, etc.
L’examen des pratiques de la coopérative montre, en effet, que l’action de l’entreprise
n’est pas réductible à une stratégie adaptative consistant à répondre aux attentes des
parties prenantes, il permet de dépasser une analyse en termes de jeux d’influence et de
rapports de force pour adopter une approche plus dynamique de l’action collective.
Toutefois, ce travail présente des limites. Tout d’abord les discussions ne sont pas
menées avec les différents membres du personnel de différents niveaux hiérarchiques ni
avec les autres parties prenantes internes et externes, elles concernaient uniquement les
chefs de services et divisions. Ensuite, il ne permet pas la généralisation des résultats
atteints pour toutes les entreprises de l’économie sociale et solidaire. Mais, il participe
au débat récent et émergent sur la RSE sous l’angle coopératif.
7
Initiative européenne pour le sourcing éthique initiée par la Foreign Trade Association (FTA) basée à Bruxelles.
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des relations complexes. Economies et sociétés, 42(1), 55-82.
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