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Biochimie clinique

Biochimie de l’inflammation

Introduction

o Les syndromes inflammatoires sont très fréquemment rencontrés en pratique courante :


25 à 30% des patients consultants ou hospitalisés.
o La réaction inflammatoire généralisée d'origine infectieuse ou non infectieuse peut
entraîner un état de choc grave (décès dans 50% des cas). Ces situations requièrent un
diagnostic et un traitement en urgence.
o Les maladies inflammatoires représentent la 3ème cause de mortalité après les affections
cardiovasculaires et les cancers.

1- Définition :

o La réaction inflammatoire est une réponse à une agression d'origine exogène (cause
infectieuse, traumatique) ou endogène (cause immunologique).

o C’est une composante de la réponse immune.

 Il s'agit, le plus souvent, d'une réponse adaptée strictement contrôlée par de multiples
systèmes régulateurs. Dans ce cas elle est protectrice en participant aux processus de
défense naturelle et à la réparation des tissus lésés.
 Si la réponse inflammatoire est inadaptée ou mal contrôlée, elle peut devenir
agressive.

o Elle peut être

 Aiguë, voire suraiguë (quelques minutes à quelques jours) exemple (choc septique)
 Chronique (semaines, années).

o Elle peut être

 Locale (vasodilatation locale, exsudation plasmatique et afflux local de cellules


inflammatoires).
 Générale (signes généraux comme la fièvre, production des protéines inflammatoires)

2-Etiologie:

L'inflammation peut être causée par :

 Des agents infectieux : virus, bactéries, champignons…


 Des agents physiques : température haute ou basse, les irradiations, les
traumatismes…
 Des agents chimiques : poisons, mercure, acide chlorhydrique, détergents…
 Conflit immunitaire (anomalie de la réponse immunitaire, allergies, auto-immunité...)
 Néoplasique: lymphomes hodgkiniens et non hodgkiniens, cancers solides…

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3-Les signes cliniques:

4 signes cardinaux:
 Une rougeur (érythème) : (vasodilatation locale)
 Un gonflement (œdème)
 Une sensation de chaleur
 Une douleur (qui semble pulser)
Altération du fonctionnement de l’organe touché (impotence fonctionnelle comme difficulté à
bouger une articulation).

4- Phases de l'inflammation

Phase I : initiation ou phase vasculaire

o Commence en général au niveau du tissu conjonctif,


o Vasodilatation : augmentation du débit sanguin dans la
micro-circulation qui irrigue la région lésée
o Augmentation de la perméabilité vasculaire avec:

 Libération de molécules préformées : histamine par les mastocytes et sérotonine par les
plaquettes
 Activation de protéines plasmatiques inactives (bradykinine, complément)
 Sécrétion de médiateurs lipidiques (prostaglandines, facteur d'activation plaquettaire
(PAF)).

Phase II: phase d’amplification ou phase cellulaire

a/ Afflux des cellules

o La perméabilité vasculaire facilite l’évacuation des leucocytes: polynucléaires


(neutrophiles ou éosinophiles) ou de monocytes hors des vaisseaux sanguins vers le foyer
inflammatoire, c’est la diapédèse.
o Cette migration est liée à l'action coordonnée de facteurs:
 chimiotactiques (médiateurs lipidiques, anaphylatoxines, cytokines et chémokines, des
interleukines)
 et de molécules d'adhérence (les sélectines, les intégrines) exprimées à la surface des
cellules sanguines circulantes et sur les autres surfaces de contact (endothélium,
matrice extracellulaire).

b. Activation des cellules et libération de médiateurs :

o Les leucocytes englobent les agents pathogènes, c’est la phagocytose. et éliminent les
débris cellulaires et des produits néoformés c’est l’ exocytose: Ex :
 Les protéases lysosomiales: collagénases, élastase…
 Les radicaux libres oxygénés en particulier l’anion super oxyde O₂⁻ =stress oxydant
L’ion super oxyde parait être l’un des agents d’extension de l’inflammation, par ailleurs il
exerce un effet chimiotactique sur les PN.

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Phase III: phase de réparation des tissus

o La cicatrisation débute quand les débris cellulaires ont été éliminés.


o Les fibroblastes se mettent à synthétiser du collagène et des glycosaminoglycanes (GAG)
o La réparation cellulaire se fait soit par :

** Régénération : prolifération de cellules de même type que les cellules détruites.


**Remplacement : remplacement par des cellules d’un autre type ce qui entraîne une
cicatrice.

o Pour des raisons inconnues le processus peut continuer : cirrhose, fibrose pulmonaire,
athérosclérose…

5- Les types d'inflammation

5.1/ L’inflammation aigue

o Se caractérise par des modifications locales. Elle est immédiate et sa fonction est de
protéger les tissus contre l’agent d’agression. Une fois que l’agent est éliminé,
l’inflammation disparaît.
o Signes locaux: chaleur, douleur, rougeur, œdème.

5.2/ L’inflammation chronique

o L’inflammation devient chronique quand l’agent d’agression s’incruste et que la


réaction aigue persiste. Les symptômes peuvent se manifester pendant des mois ou des
années.
o signes généraux: fièvre, amaigrissement, asthénie, insuffisance circulatoire

6/ Exploration biologique

Le bilan biologique de l’inflammation permet :


 De rechercher les signes biologiques d'une inflammation = DIAGNOSTC
 Et d'évaluer l'importance de la réaction inflammatoire.

6-1-Marqueurs de l’inflammation:

Deux types de marqueurs:

 Marqueurs biologiques non spécifiques


Peuvent indirectement permettre de suspecter une réaction inflammatoire:
 Hémogramme (FNS):
 Vitesse de sédimentation (VS):
 Electrophorèse des protéines sériques

 Marqueurs biologiques spécifiques


Permettent de confirmer une réaction inflammatoire, quand leurs taux sont augmentés, sans
pour autant en préciser l'origine: Protéine spécifiques de l’inflammation.

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6.1.1/Marqueurs biologiques non spécifiques

o Hémogramme :

1- Anémie inflammatoire:
o Situation chronique: 3 à 4 semaines après le début de l’inflammation.
o Proportionnelle à l’intensité de l’inflammation
o Rarement Hb < 8 g/dl
o Aregénérative : numération des réticulocytes (< 80 000/mm3)
o Normo ou Microcytaire (volume globulaire moyen)
o Normo ou hypochrome (concentration corpusculaire moyenne en Hb)
o Hyposidéremie
o FERRITINEMIE  ( CARENCE MARTIALE) + TRANSFERRINEMIE BASSE
2- Hyperleucocytose ; polynucléose neutrophile +++
3- thrombocytose (plaquette ) proportionnelle au degré d’inflammation

b-Vitesse de sédimentation (VS)

o Examen simple, rapide, peu coûteux:


o Distance parcourue en 1 heure par les éléments figurés du sang qui sédimentent dans un
tube sous l’action de la gravité à travers le plasma.
o Elle dépend largement de la concentration plasmatique en fibrinogène.
o La VS augmente dans les cas suivants:

-Grossesse 3ème trimestre (40-50 mm/h) -Prise d'oestroprogestatifs


-Anémie -Hypergammaglobulinémie
-Syndrome néphrotique et IRC -Hyperlipémie

o Seuils de normalité en mm à la 1ère heure:


–Homme: âge (années) / 2
–Femme: âge (années) + 10 / 2

c- Électrophorèse des protéines sériques

**/Conditions de prélèvement

o Prélèvement de sang veineux (en général au pli du coude), avec garrot enlevé le plus
rapidement possible.
o Tube sec.
o Il n'est pas indispensable d'être à jeun.

**/Principe:

• L'électrophorèse consiste à faire migrer et à fractionner grâce à un champ électrique, au


sein d'un milieu variable et dans un tampon de pH déterminé, les protéines séparées par
leurs charges électriques.
• La migration se fait par une phase liquide imprégnant une phase solide (gel)
• Séparation sous forme de bandes révélées par différents colorants.

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**/Technique

• Consiste à déposer quelques microlitres de sérum sur le support,


• A choisir un tampon, qui est généralement à pH 8,6 auquel les protéines s'ionisent comme
des anions, migrant donc vers l'anode.
• Temps de migration fonction du support : 15 à 25 minutes pour l'acétate, 30 à 60 minutes
pour le gel de polyacrylamide.
• Fixation et coloration.
• Les colorants les plus utilisés sont l'amidoschwarz, le rouge Ponceau ou le bleu de
Coomassie.
• Après transparisation du support, la lecture photodensitométrique de la coloration de
chaque bande donne le tracé classique où apparaissent les 6 pics : Albumine, α1 α2, β1, β2
et γ-globulines.
• L'intégration de la surface de chaque pic conduit enfin à un pourcentage de chaque
fraction, traduit aussi en gramme/litre si le taux des protéines totales a été donné à
l'appareil.

Valeurs normales

Albumine :55 - 65 % soit 36 - 50 g /l

α1 -globulines : 1 - 4 % soit 1 - 5 g /l

α2 -globulines : 6 - 10 % soit 4 - 8g/l

β- globulines :8 - 14 % soit 5 - 12 g/l

γ-globulines: 12 - 20 % soit 8 -16 g/l

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Selon le type du syndrome inflammatoire on distingue deux tracés éléctrophorétiques


caractéristiques:

 Inflammation aigue:
o Augmentation des α1: α1 antitrypsine, α1 antichymotrypsine, orosomucoide
o Augmentation des α2 : haptoglobine
o Généralement : taux stable de β-globulines : diminution de la transferrine et
élévation des fractions du complément

 Inflammation chronique:
o Augmentation des α2.
o Augmentation des γ-globulines Les maladies systémiques et les pathologies
infectieuses sont fréquemment associées à une augmentation polyclonale des
γ-globulines.
o Diminution de l’albumine qui masque partiellement l’hyperprotidémie réactionnelle
(taux des protéines totales normal)

Remarque :

- Le fibrinogène migre en β, il peut apparaître sur l’électrophorèse si un anticoagulant est


utilisé ou si le tube sec a mal coagulé.
- En cas d’hémolyse, on peut observer un pic d’hémoglobine migrant en β ou un pic
d’hémoglobine liée à l’haptoglobine migrant en α2.

6.2.1/Marqueurs biologiques Spécifiques: les protéines de l’inflammation

Classification:
Les protéines de l’inflammation peuvent être classées selon trois critères:
 Le sens de variation du taux
 Cinétique d’apparition au cours de la réaction inflammatoire
 Rôle dans la réaction inflammatoire.

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**Selon le sens de variation de la concentration:

Augmentation de la Diminution de la concentration


concentration
*Transferrine
*CRP *Rétinol Binding Protein
*Orosomucoïde *Albumine
*a1-antitrypsine * Pré-albumine
*a1-antichymotrypsine
*Haptoglobine
*Fibrinogène
*Céruléoplasmine
*C3
*Procalcitonine

**Selon la cinétique:

o Protéines de l’inflammation de cinétique rapide:


-Augmentation de la concentration plasmatique dès la 8è heure d’un processus inflammatoire
-1/2 vie biologique de 8 à 24 heures
-Protéine C-réactive, protéine amyloïde sérique A, α1-antichymotrypsine, procalcitonine.

o Protéines de l’inflammation de cinétique intermédiaire:


-Concentration plasmatique maximale en 3 à 4 jours
-1/2 vie biologique de 3 à 6 jours
-orosomucoïde, haptoglobine, fibrinogène, α1-antitrypsine.

o Protéines de l’inflammation de cinétique lente:


-Céruléoplasmine, C3, Ferritine

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**/Selon le rôle:

Catégorie 1:
Protéines qui sont chargées de neutraliser les protéases lysosomiales provenant des cellules
conjonctives lésées et des PN:
 α1-antitrypsine qui inactive l’ élastase
 α1-antichymotrypsine qui inactive les cathapsine G

Catégorie 2:
Protéines qui neutralisent les produits et les déchets toxiques:
 Cereluoplasmine: qui neutralise les ions O₂⁻: O₂⁻+2H⁺ → H₂O₂
 Haptoglobine qui prend en charge l’Hb provenant des hématies lysées

Catégorie 3:
Protéines responsables des effets biologiques de la réaction inflammatoire:
 CRP: régule l’activité des lymphocytes T
 Fg: protéines de la coagulation
 C3 et C4 détruisent les organismes étrangers et les cellules endommagées

Catégorie 4:
Protéines responsables de la cicatrisation
 Orosomucoide: favorise la croissance des fibroblastes, et contribue au remodelage du
tissus conjonctif en se fixant au collagène

7/ Etude de quelques protéines inflammatoires

7.1/La protéine C réactive. CRP

• Structure: 110 à 140 KD, 5 sous unités, migration gamma.


• ½ vie 6 heures.
• Synthèse : foie.
• VN : <6mg /L.
• Rôle:
-Défense contre les bactéries: active la voie classique du complément, facilite la phagocytose.
-La CRP est une protéine qui reflète l'inflammation aiguë ; elle s'élève très rapidement au
cours de processus inflammatoires
- Protéine qui présente l’augmentation la plus importante (jusqu’à X 2000), c’est le marqueur
sérique le plus utile au clinicien pour confirmer et suivre un SI.
-Intérêt particulier dans:
o Infections bactériennes
o Infarctus du myocarde
o Certains cancers
o Traumatismes, brûlures
o Maladies inflammatoires (arthrites, rhumatisme articulaire aigu
o Diagnostic précoce et suivi des infections néonatales
o Surveillance post-opératoire : la CRP s’élève systématiquement après une intervention
chirurgicale
o Témoin précoce de l’efficacité thérapeutique,

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7.2/ α1-glycoprotéine acide : orosomucoide:

• Glycoprotéine la plus riche en glucides : 41% glucides, pHi 2.7


• ½ vie 5 jours
• De faible PM=41KDa.
• Synthèse et catabolisme hépatique.
• Taux : 0.4 a 1.4 g/L.
• Rôles:
- Coenzyme des LPL hydrolysant les TG.
- Inhibiteur de l’agrégation des plaquettes.
- Très bon Marqueur de l’inflammation

7.1/ α1-antitrypsine:

• Glycoprotéine : 10 à 12% glucides,


• ½ vie 5 jours
• De faible PM=55KDa.
• Synthèse hépatique catabolisme par les macrophages.
• Taux : 1.5 à 2 g/L.
• Inhibiteur naturel des protéases: trypsine, thrombine, élastase, collagénase...
• Marqueur de la phase aigue de l’inflammation.
• Déficit dans l’emphysème.

7.3/a2-macroglobuline

• C'est une glycoprotéine volumineuse P.M= 850 000 Da. 4 sous unités, 8% glucides.
• Elle se combine aux diverses enzymes protéolytiques circulantes
• Elle limite les effets néfastes de la réaction inflammatoire en inhibant les enzymes
lysosomiales déversées.
• VN : 1.5 à 3,5 g/l.
• Augmentation: syndrome néphrotique

7.3/Haptoglobine:
• c'est une α2 globuline, glycoprotéine : 19% glucides. Formes monomériques et
polymériques de 86 à 800 KD.
• ½ vie 3-5 jours, synthèse: foie et dégradation: foie et macrophage
• Rôle: capte Hb intra vasculaire sous forme de complexe Hp-Hb, dont la ½ vie est <
20mn, catabolisé dans le SRE, le fer libéré est récupéré par la transférine.
• Marqueur de l’hémolyse intra vasculaire
• VN: 0.5 à 1.5 g/l

7.4/ Céruléoplasmine:
• c'est une α2 globuline, glycoprotéine de 0.5% glucides. de 151 KD.
• Synthèse: foie et dégradation: SRE
• Rôle: transport du cuivre : 8 atomes par molécule
• Activité oxydasique quand elle est fixée au cuivre
• VN: 0.4 à 0.6 g/l

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• Diminue dans la Maladie de Wilson: héréditaire: synthèse d’une prot anormale ne fixe
plus le Cu ⁺⁺, qui sera transporté par l’ALB, avec surcharge et dépôt tissulaire.

7.5/Fibrinogène
• C'est une glycoprotéine, de forme allongée « fibreuse », PM= 330 000 Da
• ½ vie 5 j.
• Il est synthétisé essentiellement dans le foie
• Rôle: coagulation (polymérisation en fibrine par la thrombine), défense contre
l’extension du foyer inflammatoire.
• Les valeurs de référence chez l'adulte sont 2 à 4 g/l.

Remarques

•Les taux de certains PRI ne sont pas augmentés en cas de syndrome inflammatoire associé à
une autre pathologie, ce qui peut compliquer l'interprétation des résultats. Ainsi :

–L'haptoglobine est abaissée en cas d'hémolyse ;


–Le fibrinogène est abaissé en cas de CIVD ;
–Les fractions du complément peuvent être " consommées " en cas de maladies à
complexes immuns comme dans le lupus.

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