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Dr N.

FETTAL

La bronchopneumopathie chronique obstructive(BPCO)

I-Définition (GOLD 2016) :c’est une maladie évitable et traitable caractérisée par une
limitation persistante du débit expiratoire qui est progressive et associée à une réponse
inflammatoire chronique augmentée dans les voies respiratoires et le poumon
secondairement à l’exposition à des particules ou gaz nocifs.

Les exacerbations et les comorbidités contribuent à la sévérité générale chez les individus
malades.

Le terme de BPCO a remplacé les anciennes dénominations de bronchite chronique,


bronchite chronique obstructive et d’emphysème pulmonaire.

La bronchite chronique est définie cliniquement par l’existence d’une expectoration


quotidienne ou quasi quotidienne 3 mois par an, au moins deux années consécutives.

L’emphysème pulmonaire est défini sur le plan anatomique par un élargissement anormal
des espaces aériens au-delà des bronchioles terminales, accompagné d’une destruction des
parois alvéolaires sans fibrose.

II-Facteurs de risque :

*Le tabac reste le principal facteur de risque de BPCO. La proportion de BPCO attribuable au
tabac est estimée à 85-90%.Les liens entre le tabagisme actif à l’âge adulte et la décroissance
du VEMS sont formellement établis.

*La biomasse : l’utilisation du charbon ou du bois pour la cuisson ou le chauffage dans des
pièces mal ventilées est associée à un risque accru de BPCO.

*Les facteurs professionnels : certains polluants en milieu industriel et agricole favorisent le


développement de la BPCO dans 15-20% selon l’ATS(les agriculteurs, les miniers, industrie
textile…)

*Le déficit en α1 antitrypsine. ; C’est une enzyme antiprotéase synthétisée par les
hépatocytes.

III-Physiopathologie

L’inflammation bronchique est la conséquence directe de l’intoxication tabagique. Elle


touche à des degrés divers, en fonction du stade évolutif de la maladie, toutes les structures
pulmonaires, allant des voies aériennes proximales jusqu’aux bronchioles terminales et le
poumon profond. L’infiltrat inflammatoire est caractérisé par des macrophages, des
neutrophiles et des lymphocytes de type CD8.Ces cellules libèrent des cytokines
responsables d’une métaplasie de l’épithélium bronchique et d’un remodelage bronchique à
l’origine d’une limitation des débits aériens. Le déséquilibre de la balance protéase et anti
protéase crée par une hyperproduction des protéases par les neutrophiles entraine une
destruction des fibres élastique et formation de bulles d’emphysème

Lorsque les destructions bronchiques et pulmonaires sont importantes, les échanges gazeux
sont perturbés aboutissant à une hypoxémie. Cette dernière entraine une vasoconstriction
réflexe et notamment un remodelage de l’artère pulmonaire responsable d’une
hypertension de l’artère pulmonaire(HTAP).

IV-Clinique :

Le diagnostic de la BPCO doit être évoqué chez tout patient de plus de 40 ans exposé à des
facteurs de risque, à fortiori si les symptômes respiratoires sont présents ; toux productive
chronique, dyspnée d’effort (parfois non perçu ou exprimée sous la forme d’une fatigabilité
l’effort ou simplement une réduction des activités quotidiennes).

L’examen physique reste une étape importante, même s’il est peu sensible et peu spécifique
dans le diagnostic de la BPCO.L’inspection peut mettre en évidence un temps d’expiration
prolongé, une distension thoracique et la participation mes muscles respiratoires
accessoires.

A l’auscultation, en fonction de la sévérité de la maladie, on peut percevoir des rales


sibilants, des ronchi ou des râles crépitants au début de l’inspiration

A un stade avancé de la pathologie, apparaissent des signes d’insuffisance respiratoire


chronique : la cyanose, l’hippocratisme digital et des signes d’insuffisance ventriculaire
droite(IVD).

V- La radiographie standard de face :

Elle est souvent normale, elle peut objectiver un emphysème qui associe des signes de
distension (thorax quadrangulaire, hyperclarté bilaterale, horizontalisation des cotes et des
coupoles diaphragmatiques) et des signes de destruction (présence de bulles)(photo 1 coupe
scanographique ,photo2 une radiographie standard de face).
Photo1 photo2

VI-Le diagnostic

Le diagnostic de la BPCO est confirmé par la spirométrie qui objective un trouble ventilatoire
obstructif (indice de Tiffeneau :( VEMS/CV<70%) irréversible sous bronchodilatateurs.

La spirométrie permet également de classer la BPCO en 4 stades en fonction de sa


sévérité(le tableau 1).

BPCO I : léger VEMS/CV<70%


VEMS>80% de la valeur prédite
Avec ou sans symptômes chroniques
BPCO II : modéré VEMS/CV<70%
VEMS entre 50 et 80% de la valeur prédite
BPCO III : sévère VEMS/CV<70%
VEMS entre 30 et 50% de la valeur prédite
BPCO IV : très sévère VEMS/CV<70%
VEMS<30% ou VEMS<50% de la valeur
prédite avec des signes d’insuffisance
respiratoire chronique : PAO2<60mmhg ou
des singes cliniques d’HTAP

Tableau 1-classification spirométrique de la BPCO selon les recommandations GOLD 2007

La gazométrie artérielle permet d’évaluer les échanges gazeux, est indiquée pour le stade III
et IV de la BPCO : elle montre une hypoxémie avec normocapnie puis une hypercapnie.

L’index de BODE :Pour évaluer le pronostic de la maladie BPCO, l’équipe de Celli et al ont
mis en place un indice multidimensionnel, le score de BODE composé de : l’indice de masse
corporelle, le VEMS post bronchodilatateur exprimé en pourcentage des valeurs théoriques,
le score de dyspnée mesuré par l’échelle modifiée de(MRC) et la distance exprimée en
mètres parcourue lors d’une épreuve de marche de 6mn. (Tableau2)

Score 0 1 2 3

VEMS(%) ≥65 50-64 36-49 ≤35

T6M(m) ≥350 250-349 150-249 ≤149

Score dyspnée 0-1 2 3 4

IMC (kg/m2) ›21 ≤21


Tableau 2 :L’index de BODE

Le diagnostic différentiel

*L’asthme bronchique : début des symptômes est précoce (l’enfance), présence d’un terrain
d’atopie et l’obstruction bronchique est réversible.

*Les bronchectasies ; notion de bronchorrhée, épisodes infectieux bronchiques et la


radiographie standard confirme le diagnostic

VII-L’évolution, les complications :

La BPCO évolue à bas bruit vers un déclin de la fonction respiratoire, une altération de la
qualité de vie des patients et la survenue de complications.

1-Les exacerbations de BPCO : Ce sont des épisodes aigus d’aggravation de la maladie


survenant au cours de l’évolution. Elles touchent tous les stades de sévérité de la BPCO à
une fréquence variable. Elles ont un impact négatif sur la fonction respiratoire, la qualité de
vie des patients et augmentent le taux de mortalité et les couts de santé.

Il n’existe pas de définition universelle malgré plusieurs tentatives de consensus .Les


définitions varient selon les recommandations des sociétés savantes ou les critères pris en
compte. De façon consensuelle, l’exacerbation est définie par une exagération de la dyspnée
préexistante, associée à une toux et/ou une expectoration chez un patient atteint de BPCO
et nécessitant une modification thérapeutique (GOLD 2006).

Les critères de gravité d’une exacerbation sur le plan clinique sont l’intensité de la dyspnée,
l’augmentation de la FR, FC, les signes d’hypercapnie, les troubles de vigilance, la fatigue
musculaire et l’utilisation de muscles respiratoires accessoires et des troubles gazométriques

Les étiologies des exacerbations de BPCO sont représentées principalement par les
infections trachéo-bronchique (virales et bactérienne), la persistance du tabagisme, la
pollution atmosphérique et la survenue d’une embolie pulmonaire ou d’une pneumonie
2-L’insuffisance respiratoire chronique.

3-Les facteurs de comorbidités : La BPCO est une pathologie inflammatoire à tropisme


systémique avec un point de départ respiratoire .En effet, les pathologies chroniques dont la
BPCO surviennent rarement de façon isolée. Les patients souffrants de BPCO sont
fréquemment atteints d’autres maladies extrarespiratoires telles que les maladies cardio-
vasculaires, HTA, diabéte, ostéoporose, dénutrition….

VIII-Le traitement

1/Buts : -ralentir le déclin du VEMS

-Améliorer l’intolérance à l’effort et la qualité de vie

-Prévenir la survenue d’exacerbations.

2/Les moyens

*Le sevrage tabagique est le seul moyen efficace permettant de réduire le déclin du VEMS

*Le traitement pharmacologique

-Les bronchodilatateurs

a/les béta 2 mimétiques de courte durée d’action (salbutamol-terbutaline).

b/Les béta 2 mimétiques de longue durée d’action (12H) formotérol-salméterol

C/Les anti cholinergiques (ipratropium ; tiotropium)

D/La théophylline

-Les corticoïdes inhalés indiqués pour réduire la fréquence des exacerbations

- La vaccination antigrippale annuelle et anti- pneumococcique tous les 5 ans

*La chirurgie de l’emphysème : l’exérèse d’une bulle unique, la transplantation pulmonaire


et la chirurgie de réduction de volume.

*L'oxygénothérapie de longue durée (OLD) est recommandée chez les patients atteints de
BPCO présentant une hypoxémie avec PaO 2 < 55 mmHg et chez certains patients avec une
PaO 2entre 56 et 59 mmHg . C'est la seule intervention thérapeutique ayant fait la preuve de
son efficacité pour améliorer la survie.

*La prise en charge des comorbidités

3/-Les indications
*BPCO stable

-Bronchodilatateurs et ou des anti cholinergiques

-Les corticoïdes sont indiqués pour les stades sévères de la BPCO (III et IV).

-Vaccination antigrippale à tous les stades de BPCO.

*BPCO instable

-Lors des exacerbations légères à modérées; bronchodilatateurs avec un drainage


bronchique.

L’exacerbation compliquée d’une acidose respiratoire ; intubation, bronchodilatateurs,


corticoïdes injectables, antibiothérapie et des anticoagulants pour prévenir les accidents
thromboemboliques.

*La réhabilitation respiratoire ; c’est une prise en charge multidisciplinaire comportant un


réentrainement à l’effort des membres inférieurs, une kinésithérapie d’éducation à la
ventilation, une prise en charge nutritionnelle et psychologique .Elle est efficace sur la
dyspnée, la tolérance à l’effort et la qualité de vie. Elle est indiquée à partir du stade II GOLD
de la maladie.

La bibliographie

1-Global initiative for chronic obstructive lung disease.Gloabal initiative for COPD:a global strategy
for the diagnosis,management and prevention of COPD 2016.

2-Sociéte de pneumologie de langue française.Recommandations pour la prise en charge de la


BPCO.Rev Mal Respir ;2004,20

3-R.Rodriguez-Roisin Toward a consensus definition for COPDexacerbations Chest 2000,117 ;3985-


4015.

4-H.Ouksel,Y.Le guen,JL.Racineux.Principes de la prise en charge de la BPCO.Rev Pratic :2004 ;54.

5-.N.Roche,F.Dalmay,T.Perez etal.Impactof chronic airflow obstruction in working population.Eur


Respir J 2008 ;31 :1227-33

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