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HLP-1 : question de réflexion (ou essai) philosophique.

DM pour vendredi 17/12 (jusqu’au 20 à 11h)


Texte support :
George Dandin, paysan fortuné, a épousé la fille d’une famille noble et désargentée. Son épouse lui est infidèle et ses
beaux-parents, Monsieur et Madame de Sotenville, le méprisent.

GEORGE DANDIN. Puisqu’il faut parler catégoriquement, je vous dirai, Monsieur de Sotenville, que j’ai lieu de…

M. DE SOTENVILLE. Doucement, mon gendre. Apprenez qu’il n’est pas respectueux d’appeler les gens par leur nom,
et qu’à ceux qui sont au-dessus de nous il faut dire Monsieur tout court.

GEORGE DANDIN. Hé bien, Monsieur tout court, et non plus Monsieur de Sotenville, j’ai à vous dire que ma femme
me donne…

M. DE SOTENVILLE. Tout beau. Apprenez que vous ne devez pas dire ma femme, quand vous parlez de notre fille.

GEORGE DANDIN. J’enrage. Comment, ma femme n’est pas ma femme ?

MME DE SOTENVILLE. Oui, notre gendre, elle est votre femme, mais il ne vous est pas permis de l’appeler ainsi, et
c’est tout ce que vous pourriez faire, si vous aviez épousé l’une de vos pareilles.

GEORGE DANDIN. Ah ! George Dandin, où t’es-tu fourré ? Et de grâce, mettez pour un moment votre
gentilhommerie à côté et souffrez que je vous parle maintenant comme je pourrai. Au diantre soit la tyrannie de toutes
ces histoires-là. Je vous dis donc que je suis mal satisfait de mon mariage.

M. DE SOTENVILLE. Et la raison, mon gendre ?

MME DE SOTENVILLE. Quoi, parler ainsi d’une chose dont vous avez tiré si grand avantage ?

GEORGE DANDIN. Et quels avantages, Madame, puisque Madame y a ? L’aventure n’a pas été mauvaise pour vous,
car sans moi, vos affaires, avec votre permission, étaient fort délabrées, et mon argent a servi à reboucher d’assez bons
trous ; mais moi de quoi y ai-je profité, que d’un allongement de nom, et au lieu de George Dandin, d’avoir reçu par
vous le titre de Monsieur de la Dandinière ?

MOLIÈRE, George Dandin ou le Mari confondu, acte I, scène 4, 1668.

[Pour information, voici la  Question d’interprétation littéraire  (déjà vue en français et à laquelle il ne vous est pas
demandé de répondre dans cet exercice) : Selon vous, qui domine dans le dialogue ci-dessus ?]

→ Question de réflexion philosophique (à faire en 1 heure à l’examen) : La parole


peut-elle être une arme sociale ? Pour construire votre réponse, vous vous
référerez au texte ci-dessus, ainsi qu’aux lectures et connaissances, tant
littéraires que philosophiques, acquises durant l’année.

→ Aide méthodologique : manuel Nathan HLP 1ere (p. 292 et 183).

→ Vous pouvez également utiliser pour ce 1er exercice, la fiche de guidage (ci-
dessous)
Fiche de guidage (aide à la rédaction : essai philosophique)

1) Au brouillon :

a) Analyser les mots-clés  du sujet :


→ la parole : le sujet vise-t-il plutôt ici l’écrit ou le langage parlé (l’oral) ? Une arme : sens propre ou figuré ? Moyen
destiné ici à convaincre ou à vaincre ? A communiquer ou à dominer ? Quel serait alors ce combat « social » dans lequel
la parole serait une arme ? Les personnages de Molière appartiennent-ils au même monde ? Cette « guerre » sociale qui
aurait besoin d’armes, opposerait quel(s) groupe(s) à quel(s) autre(s) : à l’époque de Molière / aujourd’hui ?

b) Rechercher des matériaux :


→ dans le texte de Molière (attention, il ne s’agit pas d’en faire un commentaire philosophique), quelle réponse trouve-
t-on à notre question (car il faudra mobiliser aussi ce texte dans votre essai) ?  Quel(s) exemple(s) précis de ce texte,
pourra-t-on utiliser dans l’essai ? Voyez-vous des exemples plus contemporains  ou le langage instaurerait un rapport de
force et de domination : dans les médias ? Dans le monde du travail ? À l’école ? Par exemple, dans certains milieux, il
est de bon ton d’employer de nombreuses expressions anglaises à la mode (qui ne sont pas comprises par tout le
monde). Est-ce une nouvelle façon de faire taire les nouveaux George Dandin ? Voyez-vous d’autres « codes » destinés
à exclure un groupe social de la conversation ?
→ Voyez-vous dans votre cours (y compris dans le cours de lettres), d’autres auteurs qui auraient des choses à dire sur
cette question ? Le discours de Victor Hugo « détruire la misère » que nous avons lu en classe (+ vidéo de Clément
Viktorovitch :https://www.ted.com/talks/clement_viktorovitch_les_pouvoirs_de_la_rhetorique_decryptes/transcript?
language=fr ) peut-il être également considéré comme une arme sociale ? Dans ces deux textes (Molière/Hugo), la
parole est-elle au service des faibles ou des puissants ? Lire également votre manuel p. 59 (la rhétorique comme arme de
combat, rappelons que c’est Gorgias lui même qui compare la rhétorique à « un art de combat »).
→ Dans une démocratie (à l’époque de Gorgias comme aujourd’hui, et contrairement à l’époque de Molière),
« l’arme » du langage est-elle seulement destinée à faire taire (à vaincre) la partie adverse ou s’agit-il de persuader (ou
de convaincre) l’opinion publique ? Du coup, est-ce dans le même sens qu’on parlera « d’arme sociale », selon qu’elle
cherche à convaincre ou à museler ? Selon qu’elle est au service de la justice (V. Hugo) ou de l’injustice (comme chez
Molière) ? Ces différents sens seront à prendre en compte dans vos différentes réponses.
→ Dans votre cours « La rhétorique est une technique », nous avons lu un texte d’Aristote (« les trois genres de l’art
oratoire » manuel p. 27), puis nous avons distingué avec un texte d’Olivier Reboul les 3 genres d’arguments distingués
par Aristote (le logos, le pathos, l’éthos). Quels discours (le délibératif ? L’épidictique  ? Etc.) et avec quels arguments
(pathos, logos, etc.) fournissent des armes efficaces ? Pensez là aussi à mobiliser l’exemple de Gorgias.

c) Construire votre plan ou cheminement de pensée (l’auteur d’un essai écrit à la 1ere personne et dit « je ») :
→ Cherchez à vous situer par rapport à ces différentes réponses. Identifiez et hiérarchisez les 2 ou 3 réponses qui vous
semblent les plus importantes (on ne vous demande pas de chercher à être exhaustif. Ne cherchez donc pas à tout
dire!). En plaçant ces réponses de la plus banale (la plus évidente) vers la plus pertinente (celle qu’on découvre toujours
après coup… après réflexion), commencez à construire un plan. On pourrait avoir un plan ne développant qu’une seule
thèse (contrairement à la dissertation de philo), sur le mode : « la parole est une arme sociale parce que ceci... mais
aussi ceci... et surtout cela... » ou inversement « la parole n’est pas une arme sociale, parce que… mais aussi… et
surtout... ». Pensez aussi au plan en « oui/mais non » (ou « non/ mais oui ») : « la parole n’est pas une arme sociale
parce que… mais à bien y regarder, elle en est une au contraire, car… ». Faites votre choix !
→ Vous pouvez désormais préciser ET la progression logique du plan ET son contenu, avec autant de §§ que d’idées,
c’est à dire de réponses (2 ou 3). Cherchez pour chaque § : un exemple (ou 2) illustrant votre idée directrice, une
« citation » éventuelle (associée à son auteur et si possible au titre de l’œuvre qu’il faudra souligner) ainsi qu’un
argument (raisonnement) justifiant votre idée. N’oubliez pas de mobiliser (au moins une fois) le texte de Molière.
Soignez la transition logique au début de chaque § (connecteur logique) et rappelez en fin de § la conclusion d’étape
( = réponse provisoire au sujet) à laquelle vous ont conduit vos exemples et arguments.

d) Rédiger (intégralement) votre introduction : amorce (exemple illustrant le sujet) + sujet + analyse succincte des
mots-clés du sujet (plutôt qu’annonce du plan, qui ne sera pas indispensable ici). Contrairement à la dissertation de
philosophie, on ne vous demande pas de formuler un problème (une contradiction, un paradoxe), car un essai a le
droit de ne défendre qu’une seule thèse (comme on vient de le voir). Le plan thèse/antithèse n’a donc rien d’obligatoire.

2) Rédigez directement au propre, sans perdre du temps à rédiger intégralement au brouillon la copie (à l’exception de
l’intro et de la conclusion). Distinguez bien les différents §§ (bloc de 10 à 15 lignes selon votre écriture, au sein
desquels on ne va pas à la ligne). En 1h, un petit recto verso sera un format raisonnable.

3) attendre le dernier 1/4 heure pour rédiger votre conclusion (au brouillon, puis au propre) : bilan rapide de votre
cheminement intellectuel + réponse claire à la question.

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