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ANNPLA-1331; No. of Pages 7

Annales de chirurgie plastique esthétique (2017) xxx, xxx—xxx

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ScienceDirect
www.sciencedirect.com

ARTICLE ORIGINAL

Marges d’exérèse des dermatofibrosarcomes


cervico-faciaux par technique de
Slow-Mohs : étude clinique rétrospective sur
20 cas
Dermatofibrosarcoma protuberans: Surgical margins using
Slow-Mohs micrographic surgery. A clinical retrospective study
about 20 cases

C. Verbruggen a,*, A.S. Ricard a, O. Cogrel b, M. Bondaz a,


S. Carrier a

a
Service de chirurgie maxillo-faciale, stomatologie et chirurgie orale, centre François-Xavier-Michelet,
groupe hospitalier Pellegrin, CHU de Bordeaux, place Amélie-Raba-Léon, 33000 Bordeaux, France
b
Service de dermatologie et dermatologie pédiatrique, groupe hospitalier Saint-André, CHU de Bordeaux, 1,
rue Jean-Burguet, 33000 Bordeaux, France

Reçu le 25 avril 2017 ; accepté le 21 juin 2017

MOTS CLÉS Résumé


Dermatofibrosarcome ; Objectifs. — L’objectif principal de cette étude est de déterminer les marges de résection
Slow-Mohs ; nécessaires pour réaliser une exérèse complète (R0) des dermatofibrosarcomes protuberans
Cervico-faciale ; (DFSP) cervico-faciaux par technique de Slow-Mohs en 1re intention. L’objectif secondaire est
Marges d’exérèse d’étudier le taux de récidive de ces tumeurs.
Matériel et méthodes. — La technique de Slow-Mohs en galette était utilisée sur les patients
inclus de 2005 à 2015 du CHU de Bordeaux. L’âge, le sexe, la localisation tumorale, les marges
initiales, les marges avant R0, la survenue d’une récidive locale, locorégionale, métastatique ou
de décès, la durée de suivi ont été étudiés. L’exérèse était réalisée sous anesthésie locale. La
reconstruction, par autogreffe de peau ou lambeau local, était réalisée lors un 2e temps
chirurgical.

* Auteur correspondant. 12, place Fernand-Lafargue, 33000 Bordeaux, France.


Adresse e-mail : charlie.verbruggen@gmail.com (C. Verbruggen).

http://dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2017.06.005
0294-1260/# 2017 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Pour citer cet article : Verbruggen C, et al. Marges d’exérèse des dermatofibrosarcomes cervico-faciaux par technique de Slow-Mohs : étude
clinique rétrospective sur 20 cas. Ann Chir Plast Esthet (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2017.06.005
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2 C. Verbruggen et al.

Résultats. — Vingt patients ont été inclus. Les marges initiales étaient de 10 mm (9 patients) et
15 mm (11 patients). L’exérèse était complète dès le premier temps chirurgical pour quinze
patients (75 %). Les marges d’exérèse moyennes permettant une résection R0 était de
15,25  5,7 mm (10—25). Aucun cas de récidive n’a été constaté. La durée de suivi moyenne
était de 38 mois.
Conclusion. — La technique de Slow-Mohs permet de réaliser une exérèse R0 dans 75 % des cas
pour le traitement des DFSP cervico-faciaux en 1re intention, avec des marges réduites de
12,75  2,55 mm. Elle permet, au prix d’un délai d’analyse histologique supérieur, un meilleur
contrôle au niveau local tout en réduisant les marges d’exérèse R0. Cette préservation des tissus
mous est un atout esthétique et fonctionnel majeur dans la chirurgie cervico-faciale.
# 2017 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Summary
KEYWORDS Objectives. — The main objective of this study is to determine the necessary surgical margins to
Dermatofibrosarcoma obtain a complete R0 resection for head and neck dermatofibrosarcoma protuberans (DFSP)
protuberans; using Slow-Mohs micrographic surgery. The secondary objective is to study the recurrence rate of
Slow-Mohs; these tumors.
Head and neck; Patients and methods. — Slow-Mohs micrographic surgery was used for patients included
Surgical margins between 2005 and 2015 at Bordeaux universitary hospital. For each patient the age, the sex
and death occurrence, the initial surgical margins, the surgical margins for complete R0
resection, the occurrence of local or general recurrence during follow-up were reported.
Surgery was realized under local anesthesia. The closure of the tumor site was realized
secondarily using a skin graft or local flap.
Results. — Twenty patients were included in the study. Initial surgical margins were 10 mm (9
patients) or 15 mm (11 patients). Complete resection was obtained from the first surgery for
fifteen patients (75%). The average surgical margin for a complete R0 resection was
15,25  5,7 mm (10—25). None of the patients presented recurrences during the entire fol-
low-up (38 months)
Conclusion. — A complete R0 resection of head and neck DFSP is obtained from the first surgery
in 75% of the cases, with minimum surgical margins (12,75  2,55 mm) using the Slow-Mohs
micrographic surgery. This allows a reduction of surgical margins and local recurrences. This
technique provides a preservation of soft-tissues, which plays a key role for head and neck
surgery.
# 2017 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Introduction temps opératoire. Cependant, elle requiert un plateau tech-


nique conséquent, une implication conjointe et simultanée
Le dermatofibrosarcome de Darier-Ferrand ou dermatofibro- des équipes chirurgicales et anatomopathologiques et
sarcome protuberans (DFSP) est le plus fréquent des sarco- présente une rémunération insuffisante de ses actes en
mes cutanés, représentant 2 à 6 % de l’ensemble des France [8]. La technique modifiée de Slow-Mohs utilise les
sarcomes des tissus mous [1]. Il atteint le tronc dans 50 à mêmes méthodes d’histologie 3D, mais avec un délai d’ana-
60 % des cas, le membre supérieur dans 25 % des cas et la lyse conventionnel (entre deux et sept jours en fonction des
région cervico-faciale dans 10 à 15 % des cas [1]. centres) et une couverture du site de tumorectomie à dis-
La chirurgie est le traitement de référence. tance. Par ailleurs elle utilise une analyse sur tissu fixé
Les limites tumorales cliniques de cette tumeur sont adaptée à une recherche immunohistochimique de l’expres-
difficiles à déterminer en raison de son extension irrégulière, sion du CD34 [9].
à la fois horizontale et verticale au niveau microscopique [2]. Cette technique micrographique de Slow-Mohs est désor-
Ceci explique la difficulté de réaliser une exérèse R0 par mais reconnue dans l’exérèse chirurgicale des DFSP, per-
technique dite classique [3] (marges recommandées de mettant de réduire les marges d’exérèse mais aussi de mieux
50 mm), et ainsi le taux élevé de récidive tumorale. Il est en contrôler le risque de récidive locale. Cependant, la prise en
effet de 0 à 21 % au niveau du tronc, et bien plus élevé au niveau charge spécifique des DFSP de la région cervico-faciale par
de la région cervico-faciale, de l’ordre de 50 à 75 % [4—6]. cette technique n’a que peu été évaluée [10].
La chirurgie micrographique de Mohs utilise un contrôle L’objectif principal de cette étude est de déterminer
peropératoire anatomopathologique tridimensionnel sur quelles sont les marges minimales initiales de résection
tissu congelé (histologie 3D) de la totalité des berges nécessaires pour réaliser une exérèse R0 des DFSP de la
d’exérèse [7]. Elle permet un sacrifice minimal des tissus tête et du cou par technique de Slow-Mohs. Nous avons
sains, une confirmation immédiate de l’éradication tumorale également étudié le taux de récidive ainsi que la mortalité
et une couverture de la perte de substance dans le même de ces tumeurs.

Pour citer cet article : Verbruggen C, et al. Marges d’exérèse des dermatofibrosarcomes cervico-faciaux par technique de Slow-Mohs : étude
clinique rétrospective sur 20 cas. Ann Chir Plast Esthet (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2017.06.005
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Marges d’exérèse des dermatofibrosarcomes cervico-faciaux 3

Patients et méthodes équivalentes en fonction de la taille tumorale. Une recoupe


de la base était également réalisée (Fig. 1). L’objectif était
Méthodes d’obtenir des marges d’exérèse de 10 à 15 mm en périphérie
par rapport aux limites de la lésion (en incluant les 2 mm de
la galette latérale), suivant les recommandations nationales.
Nous avons réalisé une étude rétrospective monocentrique
Les pièces étaient fixées au formol et envoyées en anato-
au sein du service de chirurgie maxillo-faciale et de l’unité
mopathologie. La durée moyenne d’intervention était
de dermatologie chirurgicale du CHU de Bordeaux sur des
comprise entre 30 et 45 min selon la taille et la topographie
patients opérés entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre
des lésions (Fig. 2).
2015.
Aucun geste de couverture du site de tumorectomie
Les critères d’inclusion étaient les DFSP de la tête et du
n’était réalisé lors du temps d’exérèse. Un pansement à
cou histologiquement confirmés, traités en 1re intention par
base d’alginates de calcium était réalisé en fin d’interven-
technique chirurgicale micrographique de Slow-Mohs. Les
tion, le site opératoire étant alors en cicatrisation dirigée
critères d’exclusion étaient les patients traités par une autre
jusqu’à obtention du résultat anatomopathologique. La
technique chirurgicale et le DFSP récidivé.
réfection du pansement était réalisée tous les jours au
Les critères étudiés étaient l’âge, le sexe, la survenue
domicile. Notre équipe d’anatomopathologistes obtenait
d’un décès et la durée de suivi. Pour les données chirurgi-
un résultat au bout de 7 jours.
cales, nous avons recueilli la localisation tumorale, les mar-
ges initiales, les marges avant R0. Nous avons évalué le taux
de récidive locale, locorégionale ou métastatique. Suivi
Les patients étaient revus au bout de 7 à 10 jours en post-
Technique chirurgicale opératoire. En cas d’envahissement des berges, une reprise
Tous les patients ont été opérés en chirurgie ambulatoire et chirurgicale était réalisée selon le même protocole, avec un
sous anesthésie locale. Cinq opérateurs seniors différents de complément d’exérèse de 10 mm pour chaque cadran
niveau de compétence équivalent (3 chirurgiens et 2 dermato- envahi. Une fois l’absence d’envahissement confirmée sur
logues spécialisés en chirurgie des cancers cutanés de la face) l’ensemble des berges, une réparation de la perte de sub-
sont intervenus dans l’étude. La technique utilisée était la stance par suture directe, autogreffe de peau totale ou
technique de Slow-Mohs dite en galette, permettant une ana- lambeau cutané locorégional était réalisée, avec consulta-
lyse de la totalité des berges d’exérèse [11]. Le dessin des tion de contrôle à j7 postopératoire. Une reconstruction par
marges a été réalisé au bloc opératoire, avant infiltration de lambeau était réalisée si nécessaire, selon les techniques
l’anesthésique local, pour ne pas modifier les volumes. chirurgicales communément admises en fonction de la topo-
L’infiltration de l’anesthésique était réalisée à la lido- graphie et de la taille de la perte de substance. Une auto-
caïne adrénalinée 1 % de manière circonférentielle. Le pre- greffe de peau totale était préférée chez les patient(e)s
mier temps de dénoyautage consistait en une exérèse présentant un état général précaire, pour lesquels une chi-
monobloc de la pièce tumorale avec, en profondeur, exérèse rurgie plus complexe n’était pas bénéficiable.
du fascia. Elle était orientée par un fil repère. Après exérèse Un suivi clinique était effectué tous les 3 mois pendant
tumorale, une bande périphérique de 2 mm d’épaisseur était 2 ans puis tous les 6 mois pendant 5 ans pour dépistage d’une
prélevée sur toute la circonférence du site de tumorectomie, éventuelle récidive locale ou locorégionale. Des examens
et orientée suivant le modèle du cadran horaire. Cette complémentaires étaient demandés au cas par cas sur point
recoupe était ensuite divisée en deux, quatre ou six portions d’appel clinique.

Figure 1 Technique de chirurgie micrographique de Slow-Mohs en galette.

Pour citer cet article : Verbruggen C, et al. Marges d’exérèse des dermatofibrosarcomes cervico-faciaux par technique de Slow-Mohs : étude
clinique rétrospective sur 20 cas. Ann Chir Plast Esthet (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2017.06.005
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4 C. Verbruggen et al.

15 mm dans 55 % des cas (11 patients) et 10 mm dans 45 %


des cas (9 patients).
L’exérèse était complète dès le premier temps chirurgical
pour 15 patients (75 %). Chez 5 patients (25 %), les marges
d’exérèse étaient envahies lors du 1er geste et un
complément d’exérèse a été nécessaire. Chez ces patients,
aucun facteur prédictif d’extension plus invasive n’a été
détecté. Il s’agissait de patients ayant bénéficié de marges
initiales de 15 mm dans 4 cas et de 10 mm dans 1 cas. Chez
ces 5 patients, 3 présentaient une localisation tumorale
cervicale, 1 patient présentait une atteinte du scalp et
enfin 1 patient présentait une atteinte jugale.
Aucun patient n’a dû bénéficier d’un troisième temps
d’exérèse chirurgicale. En moyenne, le nombre de gestes
d’exérèse afin d’atteindre des marges saines R0 était de
1,4  1,1 sur l’ensemble des vingt patients (Tableau 1).
Pour les 20 patients, la moyenne des marges d’exérèse
avant R0 était de 15,25  5,7 mm (10—25).

Figure 2 Exemple d’un DFSP prenant l’aspect d’une plaque Récidives


angiomateuse, de localisation sous-auriculaire gauche. Aucun cas de récidive locale après chirurgie de Slow-Mohs n’a
été constaté dans cette étude. Nous n’avons observé aucun
Résultats cas de diffusion métastatique ni de transformation sarco-
mateuse. Le délai moyen de suivi était de 38 mois.
Données démographiques
Vingt patients ont été inclus dans l’étude entre le 1er janvier
2005 et le 31 décembre 2015. La population était composée Discussion
de 8 hommes et 12 femmes. La moyenne d’âge était de
53,2  14,3 ans (min—max : 22—78). La durée moyenne de Le DFSP, de part son extension infra-clinique, représente un
suivi était de 38  25 mois (3—83). Les régions atteintes défi chirurgical en termes de marges d’exérèse et de risque
étaient le cou (10 cas), la clavicule (4 cas), le scalp de récidive locale. Dans cette étude, une réduction des
(3 cas), la joue (3 cas) (Tableau 1). marges de résection permet de réaliser une exérèse
R0 dans 75 % des cas pour les DFSP de la région cervico-faciale
Étude des marges d’exérèse par technique de Slow-Mohs. En cas d’envahissement tumoral
Les marges d’exérèse initiales par technique de Slow-Mohs au niveau des berges d’exérèse lors du premier geste, une
étaient en moyenne de 12,75  2,55 mm (10—15). Pour le 1er reprise chirurgicale avec des marges de résection à 10 mm
temps chirurgical, les marges d’exérèse proposées en permet une exérèse R0 dans 100 % des cas. Elle retrouve
réunion de concertation pluridisciplinaire étaient de également un bon contrôle au niveau local avec une absence
de récidive sur l’ensemble du suivi pour les 20 patients.
Le traitement chirurgical représente le traitement de
Tableau 1 Caractéristiques démographiques et chirurgica- choix des DFSP. Les données de la littérature retrouvent
les de la population d’étude. un contrôle aléatoire de ces tumeurs au niveau local par la
Caractéristiques Population de l’étude technique chirurgicale conventionnelle. L’examen anatomo-
(n = 20) pathologique traditionnel, qui utilise une analyse unique sur
une tranche de section verticale, permet d’étudier moins de
Sexe 1 % de la pièce d’exérèse.
Homme 8 (40 %) Le taux de récidive locale chez les patients bénéficiant
Femme 12 (60 %) d’une chirurgie d’exérèse première de DFSP du tronc avec
Localisation tumorale marges étendues de 30 à 50 mm est classiquement de 0 à 21 %
Cou 10 (50 %) [4,12—16] (Tableau 2). Une exérèse élargie conventionnelle
Clavicule 4 (20 %) de 50 mm permet donc un contrôle satisfaisant des DFSP au
Scalp 3 (15 %) niveau local, comme validé dans une vaste série de Arnaud
Joue 3 (15 %) [16].
Des taux de récidive supérieurs sont observés au niveau de
Marges initiales d’exérèse
la région cervico-faciale. Les résultats de l’étude de Haas
10 mm 9 (45 %)
[5], puis de Sondak [6], retrouvent des taux de récidive locale
15 mm 11 (55 %)
allant de 50 à 75 %. En effet, les chirurgiens minimiseraient
Nombre de chirurgie(s) avant R0 les marges d’exérèse cervico-faciales, augmentant ainsi le
1 temps 15 (75 %) risque de laisser des cellules tumorales sur site [17]. De telles
2 temps 5 (25 %) marges étendues ne sont pas applicables dans la chirurgie du
3 temps 0 visage en raison des conséquences esthétiques et fonction-
nelles qu’elles entraînent [18].

Pour citer cet article : Verbruggen C, et al. Marges d’exérèse des dermatofibrosarcomes cervico-faciaux par technique de Slow-Mohs : étude
clinique rétrospective sur 20 cas. Ann Chir Plast Esthet (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2017.06.005
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Marges d’exérèse des dermatofibrosarcomes cervico-faciaux 5

Tableau 2 Données de la littérature concernant l’exérèse des DFSP par technique chirurgicale conventionnelle (études portant
sur le corps entier).

Auteurs/Études Effectif Marges d’exérèse avant R0 (mm) Taux de récidive locale (%) Suivi (mois)
Bowne et al. [4] 159 NC 21 57
Chang et al. [12] 60 > 30 16,7 59
Dubay et al. [13] 43 NC 0 48,4
Monnier et al. [14] 66 > 30 27 115,2
Paradisi et al. [15] 38 20 > 50 13,2 57,6
Arnaud et al. [16] 117 50 0 61

Les techniques de Mohs et Slow-Mohs, permettant un l’évolution indolente des DFSP font de la micrographie
contrôle histologique de l’ensemble des marges d’exérèse, Slow-Mohs une technique particulièrement adaptée à
permettent d’apporter un bien meilleur contrôle carcinolo- l’exérèse chirurgicale de ces lésions. L’analyse microgra-
gique des DFSP, limitant considérablement le taux de réci- phique de Slow-Mohs utilise une technique de lecture hori-
dive au niveau local. zontale systématique sur l’ensemble des recoupes, aussi
Sur l’ensemble de la durée de l’étude, nous ne rapportons bien périphériques qu’en profondeur. Elle permet ainsi
aucun cas de récidive locale après chirurgie d’exérèse des une analyse de 100 % de la pièce tumorale [22,23]. La
DFSP de la région tête et cou par technique de Slow-Mohs. technique de Mohs permet également une réduction majeure
Ces résultats sont concordants avec ceux retrouvés dans la des marges d’exérèse [10,18,24—27] (Tableau 3).
littérature sur le reste du corps (Tableau 3). Nos marges initiales de 12,75 mm permettent d’obtenir
Ces résultats s’appuient également sur différentes revues une exérèse R0 dans 75 % des cas dès le premier temps
de la littérature comparatives qui retrouvent une nette chirurgical. Les marges d’exérèse nécessaire avant exérèse
supériorité des techniques chirurgicales micrographiques R0 sont de 15,25  5,7 mm (10—25). Ces résultats sont
par rapport à la technique dite conventionnelle dans le concordants avec ceux rapportés pour le corps entier dans
contrôle local des DFSP. Au niveau local, nous ne retrouvons de récentes séries utilisant ce procédé [17,25—27].
aucune récidive durant le suivi. En 2012, l’étude de Foroozan Cependant, ils diffèrent de la seule autre étude portant
[19] retrouve, au travers 19 études non randomisées (niveau sur les marges de résection nécessaires en Slow-Mohs au
de preuve B), un taux de récurrence plus faible des DFSP après niveau de la région cervico-faciale. En 2003, Tom et al. [28]
chirurgie micrographique de Slow-Mohs (1,11 %) par rapport à publient une série de 9 patients. Aucun cas de récidive
la chirurgie avec marges étendues (6,32 %). Gloster [20], en locale n’est rapporté. Leurs marges d’exérèse moyennes
1996, retrouve un taux de récidive locale des DFSP de 6,6 % avant R0 sont de 37 mm (25—60), avec des marges de
après Slow-Mohs, contre 12,8 % pour la chirurgie conventio- résection initiales systématiques de 25 mm. Ceci peut
nelle, sur des durées respectives de suivi de 40 et 36 mois. En s’expliquer par une analyse histologique réalisée sur tissu
2008, l’étude de Paradisi [15] retrouve sur 79 patients inclus, congelé (technique de Mohs) et non fixé, rendant la dif-
un taux de récidive locale de 13,2 % après chirurgie avec férenciation entre tissu sain et tissu tumoral plus délicate.
marges étendues, et une absence de récidive après Mohs, avec Leurs patients incluent également 25 % de cas en 2e ligne
des durées de suivie respectives de 4,8 et 5,4 ans. Sur une thérapeutique. Cette étude diffère donc dans sa prise en
revue de la littérature incluant 1857 patients, ils retrouvent charge initiale.
1,3 % après chirurgie micrographique contre 20,7 % après Nous retrouvons une réduction significative des marges
chirurgie avec marges étendues. En 2016, l’étude de Lowe d’exérèse avant R0. Il est donc possible de réduire drasti-
[21] compare rétrospectivement les taux de récidive locale de quement les marges, tout en contrôlant carcinologiquement
158 patients, avec des durées moyennes de suivi respectives les DFSP.
de 4, 8 ans et 5,7 ans. Les résultats retrouvent un taux de Nous ne rapportons aucune métastase à distance. Le DFS
récidive locale dix fois supérieur en chirurgie conventionnelle. est une pathologie avec un important risque de récidive
L’extension infra-clinique, le taux élevé de récidive locale, mais faible taux de métastase à distance, de l’ordre
locale, le faible risque de diffusion métastatique et la de 0,5 % [29].

Tableau 3 Données de la littérature concernant l’exérèse des DFSP par technique micrographique de Mohs ou Slow-Mohs (études
portant sur le corps entier).

Étude Effectif Marges Technique Exérèse R0 au Taux de Suivi


initiales (mm) utilisée 1er geste (%) récidive (%) (mois)
Nouri et al., 2002 [10] 20 NR Mohs NR 0 56
Ah-Weng et al., 2002 [18] 21 10 Slow-Mohs 71 0 47
Sei et al., 2004 [25] 10 13 Slow-Mohs 70 0 26
Wacker et al., 2004 [26] 22 10—20 Slow-Mohs 45 0 54
Tan et al., 2011 [27] 35 NR Slow-Mohs 50 0 29,5
Chaput et al., 2014 [24] 35 17 Slow-Mohs 72 0 46

Pour citer cet article : Verbruggen C, et al. Marges d’exérèse des dermatofibrosarcomes cervico-faciaux par technique de Slow-Mohs : étude
clinique rétrospective sur 20 cas. Ann Chir Plast Esthet (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2017.06.005
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6 C. Verbruggen et al.

La technique de Slow-Mohs est une technique chirurgicale [4] Bowne WB, et al. Dermatofibrosarcoma protuberans: a clinico-
simple et rapide. Elle permet un meilleur contrôle au niveau pathologic analysis of patients treated and followed at a single
local, une réduction importante des marges d’exérèse et institution. Cancer 2000;88:2711—20.
ainsi une préservation des tissus mous dans la prise en charge [5] Haas AF, Sykes JM. Multispecialty approach to complex derma-
tofibrosarcoma protuberans of the forehead. Arch Otolaryngol
des DFSP.
Head Neck Surg 1998;124:324—7.
Ses inconvénients sont un coût supérieur à celui de la [6] Sondak VK, Cimmino VM, Lowe LM, Dubay DA, Johnson TM.
technique classique, une analyse histologique chronophage Dermatofibrosarcoma protuberans: what is the best surgical
rendant certaines équipes anatomopathologistes réticentes approach? Surg Oncol 1999;8:183—9.
à sa réalisation en milieu hospitalier (surcharge de travail, [7] Moehrle M, Breuninger H, Taïeb A, de Mascarel A, Vergier B. [3D
rémunération insuffisante) [30], et expliquant ainsi sa réali- Histology: a protocol of micrographic surgery well fitted for
sation encore rare au sein des différents centres français. French dermatologists and pathologists]. Ann Pathol 2007;27:
Notre équipe demandait un délai de 7 jours pour valider 163—71.
l’analyse. Il est néanmoins faisable techniquement de rac- [8] Petit F, Betcher KE, Petit T. La chirurgie micrographique de
Mohs : pourquoi ? Pourquoi pas ? Ann Chir Plast Esthet 2012;57:
courcir ce délai jusqu’à 72 h. Ceci est fortement lié aux
164—8.
contraintes locales de chaque équipe. Le délai de cicatrisa-
[9] Thway K, Noujaim J, Jones RL, Fisher C. Dermatofibrosarcoma
tion dirigée peut entraîner une rétraction des tissus mous au protuberans: pathology, genetics, and potential therapeutic
niveau du site de tumorectomie, perturbant le geste de strategies. Ann Diagn Pathol 2016;25:64—71.
reconstruction. Cette technique est ainsi inadaptée à la [10] Nouri K, Lodha R, Jimenez G, Robins P. Mohs micrographic
reconstruction de zones péri-orificielles telles que les pau- surgery for dermatofibrosarcoma protuberans: University of
pières. Enfin, elle nécessite au minimum deux temps opéra- Miami and NYU experience. Dermatol 2002;28:1060—4.
toires rendant son acceptation plus difficile par certain(e)s [11] Ly A, et al. [Micrographic surgery: indications and practical
patient(e)s. applications in the dermatologist’s office]. Ann Dermatol Vene-
Les limites de notre étude sont son effectif réduit de reol 2013;140:647—55.
[12] Chang CK, Jacobs IA, Salti GI. Outcomes of surgery for derma-
20 patients et le faible recul (38 mois en moyenne). Le DFS
tofibrosarcoma protuberans. Eur J Surg Oncol J Eur Soc Surg
est une tumeur rare d’évolution lente, et les National
Oncol Br Assoc Surg Oncol 2004;30:341—5.
Comprehensive Cancer Network guidelines recommandent [13] DuBay D, Cimmino V, Lowe L, Johnson TM, Sondak VK. Low
une durée de suivi minimum de 36 mois. Dans notre service, recurrence rate after surgery for dermatofibrosarcoma protu-
comme dans la plupart des équipes, le suivi de ces tumeurs berans: a multidisciplinary approach from a single institution.
est poursuivi pendant 5 ans postopératoires. Des études Cancer 2004;100:1008—16.
multicentriques pourraient augmenter le nombre de cas, [14] Monnier D, et al. Dermatofibrosarcoma protuberans: a popula-
chaque centre de référence en chirurgie cutanée maxillo- tion-based cancer registry descriptive study of 66 consecutive
faciale n’en recrutant que peu. cases diagnosed between 1982 and 2002. J Eur Acad Dermatol
Venereol 2006;20:1237—42.
[15] Paradisi A, et al. Dermatofibrosarcoma protuberans: wide local
Conclusion excision vs Mohs micrographic surgery. Cancer Treat Rev
2008;34:728—36.
Une réduction des marges initiales de résection dans la [16] Arnaud EJ, et al. Surgical treatment of dermatofibrosarcoma
chirurgie d’exérèse des DFSP de la région cervico-faciale protuberans. Plast Reconstr Surg 1997;4:1032—52.
par Slow-Mohs peut être réalisée carcinologiquement. Des [17] Fields RC, et al. Dermatofibrosarcoma protuberans (DFSP):
marges initiales de 13 mm permettent une exérèse R0 dans predictors of recurrence and the use of systemic therapy.
Ann Surg Oncol 2011;18:328—36.
75 % des cas dès le 1er temps chirurgical, sans aucune
[18] Ah-Weng A, Marsden JR, Sanders DSA, Waters R. Dermatofibro-
majoration du taux de récidive locale. sarcoma protuberans treated by micrographic surgery. Br J
Nous conservons ainsi un maximum de tissu sain, ce qui Cancer 2002;87:1386—9.
représente un challenge dans la chirurgie tête et cou, afin de [19] Foroozan M, Sei J-F, Amini M, Beauchet A, Saiag P. Efficacy of
limiter le retentissement fonctionnel et esthétique. Mohs micrographic surgery for the treatment of dermatofibro-
sarcoma protuberans: systematic review. Arch Dermatol
2012;148:1055—63.
Déclaration de liens d’intérêts
[20] Gloster HM, Harris KR, Roenigk RK. A comparison between Mohs
micrographic surgery and wide surgical excision for the treat-
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. ment of dermatofibrosarcoma protuberans. J Am Acad Derma-
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[21] Lowe GC, et al. A comparison of Mohs micrographic surgery and
Références wide local excision for treatment of dermatofibrosarcoma
protuberans with long-term follow-up: the mayo clinic expe-
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on 29 patients treated by Mohs micrographic surgery with reduction using slow-Mohs micrographic surgery. Expe-
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Pour citer cet article : Verbruggen C, et al. Marges d’exérèse des dermatofibrosarcomes cervico-faciaux par technique de Slow-Mohs : étude
clinique rétrospective sur 20 cas. Ann Chir Plast Esthet (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2017.06.005
+ Models
ANNPLA-1331; No. of Pages 7

Marges d’exérèse des dermatofibrosarcomes cervico-faciaux 7

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Pour citer cet article : Verbruggen C, et al. Marges d’exérèse des dermatofibrosarcomes cervico-faciaux par technique de Slow-Mohs : étude
clinique rétrospective sur 20 cas. Ann Chir Plast Esthet (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2017.06.005

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