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JOURNÉES FRANÇAISES DE RADIOLOGIE 2007 F O R M A T I O N M É D I C A L E C O N T I N U E N° 26

IRM fonctionnelle de la prostate


F CORNUD

✔ Le cancer de la prostate, est une des tumeurs malignes ✔ L’IRM fonctionnelle étudie plusieurs paramètres :
qui nécessite une preuve histologique, contrairement • la perfusion du tissu prostatique par l’étude de la ciné-
au cancer du rein par exemple, avant d’envisager une tique des produits de contraste paramagnétiques (ché-
quelconque prise en charge. Les biopsies écho-guidées lates de Gadolinium), à travers la membrane des
restent donc une étape incontournable pour avoir la vaisseaux (perméabilité) et dans l’interstitium ;
preuve histologique avant tout traitement. Néan-
• la diffusion de protons dans le tissu interstitiel avec une
moins, les biopsies écho-guidées, même quand la pré-
séquence pondérée en diffusion qui crée des gradients
somption de carcinome est élevée, peuvent manquer
le long desquels l’importance de la diffusion est fonc-
le cancer, compte tenu de l’absence de spécificité des
tion de la densité cellulaire du tissu ;
images prostatiques hypoéchogènes et de la fréquence
des cancers isoéchogènes. Les biopsies en sextant avec • la spectroscopie des métabolites du tissu prostatique
un protocole étendu à 10 ou 12 biopsies ont augmenté (choline et citrate).
d’environ 15 % la détection du cancer [1], mais au prix ✔ Les objectifs de l’IRM fonctionnelle sont :
d’une augmentation spectaculaire du nombre de biop-
sies négatives. La persistance d’une suspicion biologi- • de localiser le cancer avec une fiabilité supérieure à
que de cancer après une première série de biopsies celle de l’imagerie T2 en écho de spin ;
négatives a également conduit à répéter les biopsies, • d’estimer le volume de la tumeur en complément des
jusqu’à 6 séries [2] en montrant que le taux de détec- biopsies écho-guidées pour participer au choix théra-
tion devenait de plus en plus faible à chaque série sup- peutique d’une tumeur cliniquement localisée.
plémentaire. Pour améliorer le taux de détection sans
répéter les séries de prélèvements, la tendance est
désormais de réaliser des biopsies de saturation
comportant un minimum de 30 prélèvements [3]. Les
conséquences ont été d’augmenter la morbidité de IRM dynamique après injection
l’examen [4] et de détecter les cancers latents dont le intraveineuse de Gadolinium
traitement radical est contesté [5].
✔ L’idée de se servir de l’imagerie pour détecter le ou (IRM de perfusion)
les sextants suspects pour cibler les biopsies et détec-
ter des tumeurs de volume significatif est donc très légi-
time. En dehors de l’échographie de contraste [6, 7], ■ Technique
seule l’IRM, compte tenu de la bonne résolution en
contraste de l’imagerie pondérée en T2, pouvait
DÉLAI APRÈS UNE BIOPSIE
prétendre à une meilleure caractérisation tissulaire.
Cependant, l’imagerie T2 en écho de spin rapide a
L’IRM fonctionnelle est autant dégradée que l’imagerie
des limites pour localiser le cancer de prostate. Les
T2 par les artefacts de biopsie. Trois semaines après la
hyposignaux de la zone périphérique ne sont en effet
biopsie, ils sont encore présents dans la moitié des cas et
pas spécifiques de cancer et peuvent correspondre
gênent l’imagerie fonctionnelle dans 20 % des cas [9]. Huit
dans plus de la moitié des cas à des nodules bénins
semaines après, délai très difficile à faire respecter en
[8]. De plus, l’hyperplasie bénigne de la prostate France, les artefacts ne sont plus gênants que dans 8 % des
développée dans la zone de transition a souvent un cas [9]. Un compromis consiste à laisser s’écouler 4 ou
aspect nodulaire et/ou hétérogène physiologique 5 semaines pour obtenir une imagerie fonctionnelle avec un
[7]. Pour éviter les mêmes écueils que ceux de minimum d’artefacts suffisamment gênants pour compro-
l’échographie, il était nécessaire de développer une mettre l’interprétation.
imagerie qui permette d’améliorer la caractérisation
tissulaire pour différencier le cancer de l’hyperplasie
et de la prostate normale. C’est l’objectif de l’IRM LE CHOIX DE L’ANTENNE
fonctionnelle.
Il est controversé.
Hôpital Cochin
Radiologie B ✔ Si le bilan d’extension du cancer [10] est à faire,
Paris l’antenne endorectale reste indispensable avec un

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aimant d’1,5 Tesla et même avec un aimant de 3 Tesla hyperplasique et du cancer [15], dont le rehaussement et le
[11]. lavage sont différents.
✔ S’il ne s’agit que de localiser le carcinome sans recourir
à la spectroscopie, quelques auteurs [12-14] suggèrent IMAGERIE DE PERFUSION
que l’antenne pelvienne suffit pour faire une séquence SEMI-QUANTITATIVE
de perfusion.
✔ L’antenne endorectale reste en revanche indispen- Une approche semi-quantitative consiste à apprécier le
sable pour réaliser une séquence de spectroscopie pic du contraste (wash-in) et son lavage (wash-out) sur une
prostatique. courbe calculée à partir d’une mesure dans une région
d’intérêt (ROI). Les résultats sont exprimés en pourcen-
tage par rapport au temps 0, avec trois types de courbe
LA SÉQUENCE PONDÉRÉE T2
(Fig 2, 3). Tous les aimants du marché sont équipés du logi-
ciel qui permet l’obtention de ces courbes. Plusieurs auteurs
L’examen commence par une séquence axiale en écho
ont rapporté leur expérience [12, 13, 16-23]. Les résultats
de spin rapide pondérée en T2. Vingt coupes jointives de
montrent dans tous les cas une augmentation de la sensibi-
3,5 mm couvrent la totalité de la prostate et des vési-
lité par rapport à l’imagerie T2 pour détecter les cancers de
cules séminales (champ d’exploration : 16 cm, matrice de
la zone périphérique de volume > 0,2 cm3. Les chiffres sont
256 x 256, TR : 5740, TE : 111).
cependant très variables allant de 60 à 97 %. La spécificité
est en moyenne de 80 %. Cette variabilité est probablement
LA SÉQUENCE DE PERFUSION liée au fait que le paramètre utilisé pour prédire le plus fidè-
lement le cancer varie d’une étude à l’autre. Dans une étude
C’est une séquence 3D en écho de gradient avec un [13], c’est le wash-in (défini comme la pente d’ascension du
volume d’acquisition calqué sur la pile de coupes T2 pour contraste) qui est utilisé. Dans une autre étude [18], c’est
comparer des niveaux de coupe identiques. La séquence le pic de rehaussement qui est retenu. Dans trois études [12,
commence par un masque non injecté en haute résolution 17, 23], l’appréciation est visuelle en comparant, sans utili-
(matrice 256 x 256) pour détecter les artefacts de biopsie ser les courbes des régions d’intérêt, le rehaussement des
(Fig 1) et pour opérer une fusion des images injectées sur le zones suspectes à celui du reste de la prostate. Dans la zone
masque, ce qui augmente la résolution spatiale de l’examen. de transition, deux études [13, 20] concluent à la difficulté
L’injection de chélates de Gadolinium est réalisée par un de détecter le cancer en trouvant une spécificité du rehaus-
injecteur automatique (0,1 mmol/kg de poids), débit : 3 ml/s, sement qui ne dépasse pas 50 % et viennent contredire les
suivie d’un flush de 15 ml de sérum salé. La résolution tem- chiffres de 80-90 % trouvés par d’autres [21, 23].
porelle est de 9 s et les acquisitions sont poursuivies pendant
5 min (33 acquisitions).
IMAGERIE DE PERFUSION QUANTITATIVE

L’approche quantitative de la cinétique du Gadolinium


■ Résultats dans la prostate utilise un modèle mathématique. En dehors
de quelques exceptions, le modèle de Tofts [15] et ses déri-
L’IRM de perfusion étudie la cinétique du chélate de vés sont le plus souvent utilisés. Il étudie, en les quantifiant,
Gadolinium à travers la membrane vasculaire et dans le sec- les échanges entre le compartiment vasculaire (perméabilité
teur extravasculaire extracellulaire de la prostate normale, vasculaire ou Ktrans) et l’espace extravasculaire extracellulaire

Fig 1 •

A B
Fig 1 • Artefacts de biopsie. Hypersignal diffus de la zone périphérique (flèches) sur la séquence en T1 (A) traduisant des artefacts
de biopsie massifs responsables d’un hyposignal diffus sur la séquence en T2 (astérisque) (B). La détection du cancer n’est pas
possible et l’imagerie fonctionnelle est également fortement perturbée dans cette situation.

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Fig 2 •

A B C
Fig 2 • Imagerie de perfusion semi-quantitative de la prostate normale (A) et hyperplasique (B). A : Aspect homogène isointense de la ZP sur la séquence
en T2. B, C : Faible rehaussement avec courbe ascendante du wash-out (type 1) de la ZP normale (courbes rouges et jaunes). Pic de rehaussement physiologique
de la zone de transition (courbe verte) avec lavage en plateau du contraste (type 2).

Fig 3 •

A B C
Fig 3 • Imagerie de perfusion de l’hyperplasie bénigne de la prostate (HBP). A : Aspect hétérogène de l’HBP sur la séquence en T2 avec un nodule hypo-
intense bien limité (astérisque). B, C : Quatre régions d’intérêt (ROI) avec un pic de rehaussement d’intensité variable et un lavage décroissant du contraste
(type 3), simulant, en particulier dans le nodule (courbe rouge), un cancer de prostate (C).

A B C
Fig 4 • Imagerie de perfusion semi-quantitative et hyposignaux de la zone périphérique. A : Le cancer est à gauche sur la séquence en T2 (flèche).
B, C : La courbe de rehaussement est de type 3 (courbe verte) (B). La cinétique du Gadolinium (courbe rouge) dans l’hyposignal apical droit (tête de
flèche) (A) est typiquement bénigne.

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ne sont pas exprimées avec précision. Chaque étude procure


Fig 5 • une ou plusieurs informations utilisables en pratique cou-
rante. De l’étude de Turnbull et al. [26], on retient que la
constante Ktrans du cancer est plus élevée que celle de
l’HBP conjonctivo-musculaire et glandulaire. Dans l’étude
de Padhani et al. [14], le Ktrans, l’EVF et l’AUC sont signi-
ficativement plus élevés dans le cancer de la zone périphéri-
que, mais pas dans la zone de transition ou les valeurs se
superposent. L’imagerie T2 reste très importante dans la
A B détection d’un cancer de la ZT (Fig 8). En l’absence d’hypo-
Fig 5 • Cinétique du Gadolinium dans les tumeurs. A : Faible perméabi- signal homogène, le diagnostic de cancer de la ZT ne peut
lité (PERM ou Ktrans) et large espace extravasculaire (EVF) dans les lésions être retenu sur la seule base de l’IRM de perfusion. De
bénignes et le tissu normal. B : Ktrans élevé et EVF bas dans les tumeurs. l’étude de Kiessling et al. [21], qui compare les paramètres
semi-quantitatifs et quantitatifs, on retient que les seconds
n’améliorent pas le score des premiers. Des études du
(EVF ou ExtraVascular Fraction) (Fig 5). Le cancer à une groupe de Nijmegen [25, 28], on retient qu’un score d’IRM
perméabilité vasculaire élevée et un EVF plutôt bas si l’on de perfusion à partir des valeurs de Ktrans, l’EVF et l’AUC
admet que l’espace extracellulaire est en quantité réduite si (calcul non fourni) peut être utilisé pour optimiser la détec-
la densité cellulaire est élevée. Le rapport Ktrans/EVF définit un tion du cancer. Dans l’étude de Kozlowski et al. [29], un
paramètre appelé Kep qui reflète la cinétique du Gadolinium tableau chiffre les valeurs des paramètres quantitatifs dans
lors de son retour au plasma. Les paramètres sont indépen- le cancer et les différents composants du tissu prostatique.
dants du temps de relaxation T1 du patient. Par rapport à L’article montre également qu’il n’y a pas de différence signi-
l’approche semi-quantitative, les résultats sont donc expri- ficative de la valeur de l’EVF, contrairement à ce qui était
més en valeur absolue. Ils sont en principe reproductibles attendu, dans le cancer et le tissu bénin et hyperplasique.
d’un patient à l’autre et ne dépendent plus de l’équipement Ce dernier article est un de ceux qui mettent le plus en
utilisé. Des dérivés du modèle de Tofts ont été développés relief que la très grande sensibilité de l’IRM de perfusion
dans des centres de recherche par des physiciens [24, 25] (> 90-95 %) se fait au détriment d’une spécificité qui atteint
et ne sont utilisables que par les praticiens qui l’ont déve- difficilement 70 %. Cette limite vient des courbes de
loppé. Ce n’est que récemment que l’un d’entre eux a été rehaussement du tissu bénin ou inflammatoire, dans des
mis sur le marché (CAD sciences, New York) (Fig 6). Un sextants volontiers en isosignal ou à peine hétérogène qui
codage couleur est utilisé pour exprimer le rehaussement et simulent celles du cancer (Fig 10). Le caractère diffus, la
le lavage. Le rehaussement (wash-in) est codé par l’inten- valeur modérée de l’AUC et de la constante Kep, les ano-
sité d’une couleur donnée (codage clair ou sombre) et le malies de signal sur l’imagerie T2 sont les facteurs qui per-
lavage (wash-out) par une couleur spécifique (rouge, vert mettent d’orienter vers une vascularisation bénigne ou
ou bleu), correspondant aux trois types de courbes semi- maligne. Une situation complexe est celle où le carcinome
quantitatives (Fig 6A-D). Un algorithme complexe, basé sur coïncide avec la prostatite. Sans recours à une séquence
le modèle de Tofts, sert à créer une cartographie couleur d’imagerie fonctionnelle complémentaire, les problèmes
qui code sur un graphique à deux axes le wash-in et le wash- peuvent être insolubles.
out (Ktrans sur l’axe des abscisses et EVF sur l’axe des
ordonnées) en se servant des trois couleurs et de leur
intensité (Fig 6H). Les valeurs affichées délimitent des aires
de projections qui permettent de différencier le cancer des
autres composants du tissu prostatique. L’importance du IRM et spectroscopie prostatique
wash-in peut également être mesurée (en mmol/l) par le
calcul de l’aire sous la courbe (AUC) après une minute de
(spectro-IRM)
perfusion (Fig 6F).

LOCALISATION DE LA TUMEUR
■ Principe
Plusieurs études ont montré que la localisation du cancer Les signaux des protons d’hydrogène ont des fréquences
à l’intérieur de la zone périphérique (Fig 7) pouvait être faite de résonance en fonction de la molécule dont ils font partie.
de façon fiable par l’IRM de perfusion quantitative [14, 21, Cette propriété est appelée le déplacement chimique. La
24-29]. Les résultats sont moins bons pour la zone de tran- spectro-IRM exploite ce déplacement pour produire une
sition (ZT) où l’hypervascularisation physiologique des cartographie de l’intensité des signaux recueillis et de leur
nodules d’HBP (Fig 8) gêne la détection des cancers déve- fréquence de résonance. Le résultat est un spectre méta-
loppés dans la ZT (Fig 9). Les résultats sont cependant dif- bolique spécifique. L’axe des « x » d’un voxel donné repré-
ficiles à comparer car les protocoles de séquence varient sente la fréquence. L’axe des « y » représente l’intensité.
beaucoup d’une étude à l’autre. Les valeurs absolues des dif- Par convention, la fréquence est exprimée en parts par mil-
férents paramètres de modélisation (Ktrans, EVF, Kep et AUC) lion. Les pics des métabolites prostatiques sont ceux de la

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Fig 6 •

A B

C D

E F

G H
Fig 6 • Imagerie fonctionnelle mixte : quantitative et semi-quantitative. A : Aspect discrètement hétérogène non spécifique
de la ZP sur la séquence en T2. B : Concentration de Gadolinium dans l’aire sous la courbe pendant la première minute de perfusion
(AUC) : faible vascularisation de la ZP et hypervascularisation multifocale focale dans la ZT (flèches, B). C : Perméabilité vasculaire
(Ktrans) élevée dans la ZT (flèches, C) et faible dans la ZP. D : Rapport entre la perméabilité et l’espace extracellulaire (EVF) défi-
nissant la constante Kep, élevée dans la ZT et basse dans la ZP normale. E, F : Affichage des valeurs absolues des paramètres
quantitatifs et de la courbe de rehaussement semi-quantitative dans la ZT. ROI dans la ZT (E) : concentration focale élevée de
Gadolinium dans la ZT (22 mmol/l) dans l’aire sous la courbe de rehaussement (F), affichée de façon semi-quantitatiave (% de
rehaussement pendant les 33 acquisitions) (F). Calcul de la constante Kep (Ktrans/EVF), modérément élevée dans le ROI sélec-
tionné (G) et projection des valeurs séparées de Ktrans et de EVF sur un graphe à deux axes (H) : perméabilité ou Ktrans en abscisses
et EVF en ordonnées.

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A C D
Fig 7 •

B E F
Fig 7 • Imagerie quantitative et cancer de prostate de la ZP. A : Nodules hypointenses peu spécifiques bilatéraux dans la ZP sur la séquence en T2 (flèches),
avec (B) Kep visuellement élevé surtout à gauche. C : ROI dans le nodule gauche : l’AUC est élevée (35 mM), le pourcentage de rehaussement est important
sur la courbe semi-quantitative (D). Le Ktrans est élevé (4,78), l’EVF inhabituellement élevé pour un cancer avec comme conséquence un Kep (E, F) modérément
élevé (5,62). Le cancer est bilatéral avec deux foyers distincts chez cet homme avec biopsies positives des deux côtés (score de Gleason 6).

A C E
Fig 8 •

B D F
Fig 8 • Imagerie de perfusion et nodules d’HBP. Trois nodules d’HBP finement cerclés sur la séquence en T2 (A) exprimant visuellement tous les trois un Kep élevé
(B). AUC élevée (18 mM) avec courbe de type 3 (E) dans un des deux nodules gauches (C). Perméabilité (Ktrans) élevée du tissu hyperplasique (F) et valeur élevée (10.87)
de Kep similaire à celle d’un cancer de prostate (D). Noter l’extrême importance de l’aspect de la ZT en T2 pour rapporter l’imagerie fonctionnelle à sa cause.

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IRM fonctionnelle de la prostate
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A D E
Fig 9 •

B C F
Fig 9 • Cancer de la zone de transition. Patient de 66 ans. PSA : 22 ng/ml. Hyposignal mal limité dans la ZT antérieure gauche sur la séquence en T2 (flèches,
A), Kep et Ktrans élevés, avec anomalies de la perfusion visibles très en avant jusqu’au stroma fibromusculaire antérieur (B, C). Pièce de prostatectomie avec
le cancer antérieur gauche (flèches, D). Valeurs semi-quantitatives et quantitatives du rehaussement et du lavage (E, F).

A B C
Fig 10 •

D E F
Fig 10 • Limites de l’imagerie de perfusion. Patient de 46 ans. PSA passé de 2 à 3 ng/ml. ATCD de cancer familial. Aspect hétérogène de la ZT apicale sans
nodule hypointense (A), AUC élevée (flèche, B) et courbe de rehaussement de type 2 (C). Le Kep est élevé, conséquence d’un Ktrans élevé et d’un EVF à 0,5
(D-F). Sur les 26 prélèvements effectués, pas de carcinome. Le diagnostic de prostatite purement biologique a été retenu.

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choline, de la créatine et du citrate. Leurs valeurs sont res- ment. Compte tenu de l’absence de valeur absolue de
pectivement de 3.2, 3.0 et 2.6 parts par million. L’axe des l’intensité, les valeurs s’expriment par un rapport choline
« y » n’a pas de valeur absolue. Une grille est utilisée pour + créatine/citrate (CC/Ci). Les pics de choline et de créa-
superposer les informations spectrales sur les territoires tine sont le plus souvent indissociables (fréquences de réso-
anatomiques correspondants de la séquence en FSE-T2. nance trop proches avec un aimant de 1,5 T) (Fig 12).
L’inconvénient est mineur, car le pic de créatine est consi-
déré comme identique dans tous les composants du tissu
■ Technique prostatique et dans le cancer [30].

L’antenne endorectale est indispensable pour réaliser la


séquence, compte tenu de l’insuffisance du rapport signal/bruit
■ Résultats
des antennes pelviennes. La préparation de la séquence
nécessite la saturation de l’eau et de la graisse périprostati- LE TISSU PROSTATIQUE NORMAL
que compte tenu de la valeur élevée de leur pic qui mas-
quent les pics des métabolites (Fig 11). La spectro-IRM se La valeur du rapport (Fig 12) a été étudiée dans plusieurs
lit en cartographie couleur pour détecter les pics anormaux études nord-américaines et européennes (Fig 13). Une
et en cartographie spectrale pour les analyser individuelle- étude a proposé une simplification des valeurs [31], que nous

Fig 11 •

A B
Fig 11 • Très faible amplitude des pics des métabolites sans saturation de l’eau (A). Après saturation, l’amplitude respective des
différents pics devient analysable (B).

Fig 12 •

A B
Fig 12 • Rapport Choline + Créatine/Citrate (CC/Ci) dans un voxel de la zone périphérique normale. Le voxel (carré bleu, A) se
superpose à l’imagerie T2. Le spectre (B) est de bonne qualité : les pics sont fins (rapport signal/bruit > 4), le bruit de fond très
modéré. Les pics de Choline (Chol) et de Créatine (Cr) sont confondus. Le rapport Chol + Cr/Ci est celui des intégrales (I) sous la
courbe. L’amplitude ne compte pas. Ici le rapport est de 0,849 + 0,112/4,93 = 0,19, soit une valeur très évocatrice de tissu bénin.

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IRM fonctionnelle de la prostate
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Fig 13 •

Fig 13 • Tableau des valeurs du rapport Chol + Cr/Ci dans le tissu normal de la ZP et de la ZT (d’après Füt-
terer et al. [25]). Noter que les valeurs sont un peu plus élevées dans la ZT. Le cancer devient probable (valeurs
4 et 5 dans l’échelle) dans la ZP à partir de 0.72 et de 0.80 dans la ZT.

Fig 14 •

A B
Fig 14 • Concentration élevée de Choline autour des canaux éjaculateurs. A : Leur lumière est visible (flèches). B : Le rapport CC/Ci
est élevé (1,07 + 1,95/2,25 = 1,34) dans le voxel. Les canaux sont entourés de la zone centrale (ZC) en hyposignal, comme le cancer. Si la
tumeur de la ZP vient au contact de la ZC, il est difficile de faire la part de la tumeur et du tissu sain en imagerie T2. Compte tenu du
rapport Chol + Cr/Ci élevé dans cette région, la spectroscopie n’améliore pas les choses. ZT : zone de transition. ZP : zone périphérique.

avons adoptée : absence de carcinome en cas de rapport peuvent quand même être contaminés par l’activité
< 0,6 ; carcinome certain en cas de rapport > 1 et pas de métabolique des graisses périprostatiques. Le rapport
diagnostic entre 0,6 et 1. Les seuils dans la zone périphéri- signal sur bruit peut également être trop faible pour
que sont cependant légèrement plus bas que ceux de la zone analyser le pic d’un ou plusieurs voxels. Le codage cou-
de transition (Fig 13). Des rapports élevés physiologiques leur est à ce titre trompeur, quand il code des voxels
sont trouvés dans les glandes péri-urétrales et autour des avec un rapport CC/Ci élevé, alors que l’étude spec-
canaux éjaculateurs [32] (Fig 14). trale montre un spectre artefacté. Ces artefacts font
que la spectro-IRM n’est pas exploitable chez environ
25 % des patients. Cependant, les artefacts de biopsie
RAPPORT CC/CI
sont absents dans un contexte de détection, car l’IRM
Le cancer de la zone périphérique est caractérisé par un est le plus souvent réalisée en moyenne 3 mois après
la première série de prélèvements négative.
rapport CC/Ci élevé qui différencie les cancers des hypo-
signaux bénins [32]. En cas de sextant isointense, un cancer ✔ La spectro-IRM est également limitée par son taux de
peut être détecté, mais la spécificité de la spectro-IRM est faux positifs. En dehors des sextants en isosignal dans
cependant faible en l’absence d’hyposignal, estimée à 35- la zone périphérique (voir plus haut), une activité
44 % [32, 33]. En fonction des résultats de l’imagerie T2 et métabolique de cancer peut être observée en cas de
de la valeur du rapport CC/Ci choisie, la fiabilité de la prostatite chronique [35] (Fig 16). De plus, l’activité
métabolique de la zone de transition bénigne peut simu-
spectro-IRM varie beaucoup. La meilleure fiabilité est obte-
ler le cancer (Fig 17). Zakian et al. [36] ont montré qu’un
nue en cas d’hyposignal T2 et de seuil de rapport CC/Ci
seuil de rapport CC/Ci fiable ne pouvait être déterminé
> 0,75, moins restrictif que celui de 0,86 [32] (Fig 15).
pour différencier le cancer de l’HBP conjonctive. Cette
dernière contient moins de citrate que son homologue
LIMITES DE LA SPECTRO-IRM glandulaire et élève donc le rapport CC/Ci sans pouvoir
évoquer un carcinome antérieur [36]. Pour pallier cet
✔ Des artefacts sont souvent observés [34]. Malgré un inconvénient, il est indispensable de coupler la spectro-
placement optimal des bandes de saturation, les voxels IRM avec l’imagerie T2 (Fig 17).

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Fig 15 •

A B C
Fig 15 • Spectro-IRM et détection d’un cancer de la zone périphérique. Patient de 69 ans. PSA en hausse (dernier taux 7,6 ng/ml). Une série de 12 biopsies
postérieures négatives. A : Cartographie couleur de la spectroscopie seuillée à 0,6 : seul apparaît en couleur ce qui est suspect (voxels avec rapport CC/Ci > 0,6).
B : Cartographie spectrale avec deux voxels avec pics de bonne qualité (boîte jaune) confirmant la suspicion de la cartographie couleur. C : Détail d’un des
spectres avec rapport CC/Ci : 0,80. Nouvelle série de biopsies en se servant de la projection du voxel dans les trois plans de l’espace (C) : 2 biopsies dirigées
sur 6 positives, 7 mm de cancer, score 7 de Gleason.

✔ La spectro-IRM est également handicapée par son taux chute du signal sera proportionnelle à la densité cellulaire. Si
de faux négatifs (Fig 18). Dans notre expérience, cette plusieurs gradients sont utilisés (B50, B300, B500, B800 ou
limite représente une contre-indication à utiliser la 1000), il est possible de calculer une carte du coefficient de dif-
spectro-IRM seule pour détecter un cancer non dia- fusion apparent (carte d’ADC) entre les différentes séquen-
gnostiqué sur une première série de biopsies. L’explica- ces. La séquence pondérée en diffusion est courte (< 5 min)
tion a été fournie dans la littérature qui a montré que et robuste, et représente actuellement le complément le plus
56 % des cancers sans grade élevé (4 ou 5) se manifes- séduisant à la perfusion pour donner à l’IRM fonctionnelle une
taient par des spectres normaux [37]. Une autre étude bonne fiabilité [29] (Fig 19).
avait montré que dans 10 % des cas l’activité métaboli-
que se révélait normale en cas de cancer évident sur
l’imagerie T2 corrélée avec la pièce de prostatectomie ■ Résultats
radicale [31]. Le manque de résolution spatiale de la
spectro-IRM ne suffit pas pour expliquer cette sensibi-
✔ La littérature comporte plusieurs études sur la sensibi-
lité limitée, car un voxel de 0,5 cm3 devrait détecter de lité et la spécificité de la technique pour localiser le can-
façon quasi-constante un cancer trois ou quatre fois cer de prostate. La majorité de ces études concerne le
plus volumineux, ce qui n’est pas le cas [31] (Fig 18). Il cancer de la zone périphérique. Dans l’une d’entre elles
faut donc en déduire qu’avec un aimant de 1,5 Tesla, la [39], la sensibilité, la spécificité et la fiabilité de la détec-
spectro-IRM n’a pas une sensibilité suffisante pour tion du cancer, calculées après corrélation avec le
détecter d’autres métabolites spécifiques du cancer, résultat des biopsies, sont comparées sur la séquence
comme les polyamines [38] dont le spectre est confondu en T2 et sur la séquence pondérée en diffusion. La sen-
avec celui de la créatine et de la choline. Seul un aimant sibilité passe de 73 à 84 %, la spécificité de 54 à 85 %
de 3 Tesla serait susceptible de faire de la spectro-IRM et la fiabilité de 71 à 90 %. Deux autres études [40, 41]
un outil fiable de détection du cancer [30]. montrent que le coefficient apparent de diffusion
(ADC) est abaissé dans les nodules hypointenses
tumoraux de la zone périphérique par rapport à la zone
périphérique isointense bénigne et la zone de transi-
Imagerie de diffusion tion. Un seuil d’ADC de 1,2 sépare la malignité de la
bénignité avec une sensibilité de 73 % et une spécificité
de 74 %. Avec un seuil à 1,6, les valeurs passent à
87 et 72 %. La déviation standard importante des
■ Principe valeurs rapportées montre que des chevauchements
existent entre tissu bénin et tumoral. Notre expérience
Les mouvements aléatoires ou browniens des molécules (Cornud et al., données non publiées) nous montre
d’eau définissent la diffusion des molécules d’eau. Celle-ci est qu’il faut un ADC inférieur à 1,1 pour évoquer une forte
libre dans un milieu liquidien et entravée dans les tissus pro- présomption de cancer et que la tumeur devient très
portionnellement au nombre d’obstacles (membrane cellu- improbable si l’ADC est supérieur à 1,6. Entre ces deux
laire, etc.) que rencontrent les molécules d’eau. Une séquence valeurs, l’utilisation de la diffusion seule ne procure pas
en diffusion entraîne un déphasage puis un rephasage des pro- une fiabilité suffisante.
tons. Après application du gradient de déphasage, les protons ✔ Pour améliorer la fiabilité de l’IRM fonctionnelle, la lit-
mobiles seront imparfaitement rephasés. Ce rephasage impar- térature montre clairement qu’il faut utiliser les résul-
fait entraîne une chute du signal qui est fonction des mouve- tats de deux types de séquence différents (Fig 19). Peu
ments des molécules d’eau dans le tissu. En cas de tumeur, la d’études sont encore disponibles.

278
IRM fonctionnelle de la prostate
F. CORNUD

Fig 16 •

A B

C D

E F

G H
Fig 16 • Limites de la spectroscopie : la prostatite chronique. Patient de 63 ans. PSA en hausse, dernier taux à 9 ng/ml.
Deux séries de biopsies négatives, l’une d’entre elles avec prélèvements dans la ZT. A : Hyposignal nodulaire apical gauche
(flèche) avec (B) activité métabolique suspecte (CC/Ci : 0,297/0,490 = 0,6). Courbe de rehaussement (D) asymétrique sur
l’IRM de perfusion (courbe rouge), mais sans pic ou lavage précoce évocateur de cancer. E, F : Base gauche en hyposignal
(voxel bleu), sans nodule (même patient que 16A) avec (G) activité spectrale suspecte (CC/Ci > 0,6). H : Aspect plat des
courbes de rehaussement de la ZP (courbes jaunes et rouges). 26 prélèvements sont réalisés : plusieurs foyers de prostatite
interstitielle sans tumeur.

279
JFR 2007 FORMATION MÉDICALE CONTINUE

Fig 17 •

A B C
Fig 17 • Limites de la spectroscopie : l’activité métabolique de l’hyperplasie conjonctivo-musculaire (sans composante glandulaire) simule le cancer. Patient
de 64 ans, PSA à 12 ng/ml depuis plusieurs années. Ascension récente à 16 ng/ml. Volume prostatique connu (75 ml). IRM avant biopsie. A : Zone périphérique
(ZP) homogène (A) sans activité métabolique suspecte (C) sur la cartographie spectrale : CC/Ci < 0,6. ZT homogène en hyposignal. Tous les voxels de la boîte
jaune (A), affichée avec transparence des couleurs à 100 %, ont des rapports Chol + Cr/Ci > 0,6, plusieurs d’entre eux compris entre 1,73 et 2,20. B : Détail de
l’un des spectres (B) avec rapport à 1,21. Biopsies de saturation de la ZT (30 prélèvements) sans cancer. Noter le caractère discrètement hétérogène de la ZT
avec images nodulaires bien limitées sans image évocatrice de cancer.

Fig 18 •

A B

C D
Fig 18 • Limites de la spectroscopie : la détection des cancers de bas grade. Patient de 62 ans. PSA en hausse (dernier taux : 11 ng/ml).
IRM avant biopsie. A, B : Activité métabolique subnormale (CC/Ci : 0,63-0,75) dans la ZT antérieure droite : cartographie couleur
(A) et boîte jaune(B). Hyposignal de la ZP droite avec spectres normaux : flèches (A) et boîte verte (B). C, D : Rehaussement typique
de carcinome dans l’hyposignal de la ZP droite : courbe rouge (D), score 6 de Gleason à la biopsie.

• La combinaison des résultats de la diffusion et de la per- En combinant à l’IRM de perfusion, la sensibilité aug-
fusion procure une sensibilité de 95 % et une fiabilité de mente (86 %), mais la spécificité baisse (74 %).
86 % au détriment d’une chute de la spécificité qui est • La combinaison des résultats de la diffusion avec ceux
de 74 % [39]. Dans l’étude de Kozolwski et al. [29], la de la spectroscopie procure une sensibilité de 100 % et
spécificité de l’ADC est de 100 %, la sensibilité de 54 %. une spécificité de 90 % si l’on ne tient compte que des

280
IRM fonctionnelle de la prostate
F. CORNUD

Fig 19 •

A C

B D
Fig 19 • Combinaison de l’IRM de diffusion et de perfusion : prostatite et cancer. Patient de 67 ans avec envahissement des
3 sextants droits par un cancer score 7 de Gleason (3 + 4). Biopsies gauches négatives. IRM avant traitement. A : Hyposignal (flèche
blanche) atteignant les 3 sextants droits sur la séquence en T2. ZP gauche hétérogène (astérisque). B, C : Ktrans et Kep élevés dans
les deux lobes (élévation modérée à gauche) faisant suspecter une tumeur étendue aux deux lobes. D : IRM de diffusion : chute
du coefficient de diffusion dans le territoire du cancer (ADC : 0,9 dans la ROI, flèches, D) et diffusion normale du côté gauche
(astérisque, D) suggérant très fortement l’absence de tumeur de volume significatif de ce côté. Stade pT2a (cancer ne touchant
qu’un lobe) sur la pièce de prostatectomie.

voxels significatifs, c’est-à-dire contenant au moins visuelle et se doit probablement de la conforter par le
70 % de tumeur [42]. Les résultats ne portent que sur calcul des paramètres très simples que le logiciel met à
la zone périphérique. la disposition des radiologistes.
✔ La combinaison de deux séquences d’IRM fonctionnelle • Dans tous les cas, la corrélation avec l’imagerie T2
impose de faire un choix, obligatoire si l’on veut obtenir reste un outil très précieux en particulier pour la détec-
une fiabilité suffisante, mais sans prolonger de façon tion des cancers de la zone de transition.
inconsidérée le temps de l’examen. La complexité de la
réalisation de la séquence de spectro-IRM et les données
contradictoires de ses résultats avec un aimant de
1,5 Tesla [33, 43, 44] incitent naturellement à se tourner,
en attendant un accès plus facile aux aimants de 3 Tesla, Indications de l’IRM fonctionnelle
vers le couple IRM de perfusion et de diffusion. Le débat
entre approche semi-quantitative et quantitative de l’IRM
de perfusion sera probablement rapidement clos par le Il en existe deux : localiser un sextant suspect après une
succès à prévoir de la commercialisation d’un ou plusieurs première série de biopsies négative et apprécier le volume
modèles quantitatifs à deux compartiments qui permet- d’un cancer nouvellement diagnostiqué, en complément
tront de combiner les deux approches. des biopsies avant le choix du traitement.

• L’approche quantitative a besoin de sélectionner les


paramètres nécessaires pour une détection optimale et ■ Localiser un sextant suspect
surtout des seuils de valeurs que la littérature n’a pas
encore clairement fournies. Pour détecter le carcinome, le moment où doit être interca-
• L’approche semi-quantitative, si elle doit garder sa lée l’IRM ne fait pas encore l’objet d’un consensus. Les biopsies
place, aura du mal à se contenter d’une appréciation sont en effet volontiers répétées une ou deux fois avant de

281
JFR 2007 FORMATION MÉDICALE CONTINUE

Fig 20 •

Fig 20 • IRM de perfusion et microcancer sur les biopsies.


Patient de 67 ans, PSA 7,65 ng/ml, 2 mm de cancer sur une seule
biopsie de la base gauche. Cancer latent ou tumeur de volume
significatif. A : Aspect hétérogène de la ZP aux trois étages de
la prostate (A-C), avec aspect en plage plus net aux bases (asté-
risque, C). Courbes de rehaussement de la ZP (rouge et jaune)
plates à l’apex et à la partie moyenne et franchement patholo-
giques aux deux bases (C), avec pic de rehaussement et lavage
de type 2-3. D : Pièce de prostatectomie : cancer de volume
significatif aux deux bases (coupes 4-6, flèches), intracapsu-
laire, bilatéral avec deux tumeurs distinctes, comme l’avait
suggéré l’IRM.

282
IRM fonctionnelle de la prostate
F. CORNUD

poser l’indication de l’examen. La littérature donne des chiffres calcul précis du volume n’est pas possible, mais le nombre de
contradictoires dans cette situation, car les résultats ne sont sextants envahis ou le nombre de millimètres de cancer pré-
pas exprimés en fonction du nombre de séries négatives pré- sents sur les prélèvements (histologie quantitative) donne une
cédant l’IRM. Ce nombre varie de 2 à 5 et on ne dispose estimation du volume et donc du risque d’extension extrapros-
que du taux global de cancers détectés qui est d’environ 30 % tatique. Le critère le plus robuste est le pourcentage de biopsies
[33, 43, 44]. À la 5e série de biopsies, le taux de cancers détec- positives À partir de trois sextants contigus envahis ou de 50 %
tés est très certainement très inférieur à 30 %. Il paraît souhai- de biopsies positives, le risque de stade pT3 augmente substan-
table que l’IRM soit intercalée avant la deuxième série de tiellement [45, 46]. À 50 %, on définit un risque intermédiaire.
biopsies, surtout si on envisage des prélèvements antérieurs Au-delà de 50 %, le risque devient élevé. La fiabilité des biop-
pour détecter un cancer de la zone de transition. Si l’examen sies est en revanche moindre chez les patients à faible risque
est négatif, la valeur prédictive négative d’une IRM fonction- (nombre de biopsies positives < 50 %), car l’étendue intrapros-
nelle normale reste à déterminer pour décider si la nouvelle tatique de la tumeur peut être sous-estimée [47]. Les patients
série peut être décalée. Cette démarche représenterait une avec une seule biopsie positive et un microfoyer (< 3 mm) sans
alternative séduisante aux biopsies de saturation, car une IRM grade élevé sur le prélèvement sont un exemple classique. Plu-
fonctionnelle négative laisse probablement très peu de place sieurs études ont montré que ce résultat pouvait traduire un
pour une tumeur de volume significatif (Cornud et al., données cancer latent de volume < 0,2 cm3 ou au contraire un cancer
non publiées), alors qu’une biopsie de saturation risque de de bien plus gros volume [4, 48, 49]. L’absence de spécificité
détecter une tumeur latente dont le traitement par surveillance des hyposignaux T2 ne permet pas de faire la différence.
active est de plus en plus recommandé [4].
L’IRM fonctionnelle joue un rôle de premier ordre dans cette
situation quand elle révèle une tumeur beaucoup plus étendue
■ Apprécier le volume du cancer que ne le laissait prévoir le résultat de la biopsie [23] (Fig 20).
À l’inverse, l’IRM fonctionnelle est appelée à jouer un rôle de
L’estimation du volume d’un cancer de prostate nouvelle- plus en plus important pour porter le diagnostic de cancer latent
ment diagnostiqué est possible par les biopsies de prostate. Le (Fig 21) chez des patients à qui pourrait être proposée une

Fig 21 •

A D

B C
Fig 21 • IRM fonctionnelle et microcancer sur les biopsies. Patient de 69 ans. PSA 6,5 ng/ml. Volume prostatique : 65 ml. A :
Hyposignal non spécifique de 6 mm de diamètre dans la ZP gauche (flèche). B, C : Ktrans et Kep élevés dans l’hyposignal suggérant
un carcinome de volume non significatif (< 0,5 cc) (B, C). D : Séquence pondérée en diffusion : chute significative (ADC < 1) dans
l’hyposignal. Biopsies dirigées (en plus du mapping postérieur standard) : microfoyer de 3 mm unique. Cancer latent très probable :
on propose au patient une surveillance vigilante pour n’envisager un traitement que si la lésion progresse.

283
JFR 2007 FORMATION MÉDICALE CONTINUE

surveillance active par PSA et IRM itératifs à la recherche de dans certains cas. La spectroscopie manque à la fois de sensi-
signes de progression ou au contraire de stabilité d’un cancer bilité pour détecter les cancers de bas grade et de spécificité,
latent [5]. l’activité métabolique de la prostatite chronique et de l’hyper-
plasie conjonctivo-musculaire de la zone de transition pouvant
simuler celle du cancer. La diffusion est en cours d’évaluation
C ONCLUSION et apparaît comme le complément le plus séduisant à l’IRM de
L’imagerie fonctionnelle de la prostate complète l’imagerie perfusion, compte tenu de sa spécificité supérieure et de la
pondérée en T2. Elle comprend l’imagerie de perfusion après simplicité de la séquence. L’imagerie fonctionnelle a pour
injection IV de chélates de Gadolinium, l’imagerie spectrosco- objectifs de localiser le cancer de prostate manqué sur les
pique et l’imagerie de diffusion. L’imagerie de perfusion a une biopsies et d’estimer le volume d’un cancer nouvellement diag-
grande sensibilité et une spécificité modérée, même utilisée nostiqué et cliniquement localisé pour orienter le choix théra-
de façon quantitative, car la cinétique du chélate de Gadoli- peutique. Ses applications futures pour le guidage de
nium de certaines prostatites de la zone périphérique et de thérapeutiques ciblées sur la tumeur sont pour l’instant du
l’hyperplasie bénigne de la zone de transition simule le cancer domaine de la recherche.

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