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Frédérique Boutin
SAR III, CHU de Bordeaux, Centre François Xavier Michelet
Introduction
La chirurgie ambulatoire (CA), activité de soins, réalisée en établissement de santé, est définie
comme une alternative à l’hospitalisation. Son développement répond à une demande
d’optimisation des ressources allouées qui doit garantir la qualité et la sécurité des soins.
Les objectifs de la CA sont notamment de réduire les délais de prise en charge, les probabilités de
survenue d’infections nosocomiales et les coûts d’hospitalisation.
Les pays anglo-saxons ont précédé la France sur la mise en place de la CA avec des taux de prise en
charge allant jusqu’à 95 %. En France, les taux de CA ont progressé de 32 % à 43 % de 2007 à 2012 en
sachant que les objectifs nationaux sont de 60 % en 2016 [1]. La progression est tirée par certains
gestes à fort volume particulièrement dynamiques, mais aussi par l’évolution des techniques comme
la chirurgie mini invasive et l’endoscopie.
La majorité des gestes réalisés en chirurgie ORL et chirurgie maxillo-faciale (CMF) sont courts et
éligibles à l’ambulatoire. La CA n’est pas une nouvelle technique ; l’acte opératoire est le même que
celui réalisé en chirurgie classique, mais il est réalisé dans des conditions d’organisation particulière.
Il s’agit d’une activité substitutive et qualifiée, effectuée dans une durée inférieure à 12 heures.
L’éligibilité du patient repose sur l’évaluation en tenant compte de l’analyse du rapport
bénéfice/risque pour chaque patient. Les actes éligibles sont décidés en fonction d’une liste
localement définie et dépendent du niveau de maturité de chaque structure, basée notamment sur
l’expérience de l’équipe et les ressources disponibles (triptyque : patient – acte – structure).
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Anesthésie en chirurgie ORL et maxillo-faciale : une indication privilégiée pour l’ambulatoire
D’autres peuvent l’être sous certaines conditions (tableau II) comme AM Cros l’avait déjà anticipé en
2001 [2].
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Anesthésie en chirurgie ORL et maxillo-faciale : une indication privilégiée pour l’ambulatoire
mâchoire reculée, un score de Mallampati stade 3 ou 4, une ouverture limitée de la bouche [1]. Les
critères ventilation difficile et/ou intubation difficile ne sont pas limitants dans la pratique de la CA en
France, et tout particulièrement en chirurgie ORL et CMF, sous couvert d’une prise en charge
adaptée. Les critères médicaux sont les statuts Asa 1, 2, 3 stabilisés. L’éligibilité n’est pas
arbitrairement limitée par l’âge, l’IMC, les comorbidités ou les risques anesthésiques. Elles se fondent
sur l’évaluation de l’état clinique du patient et de ces comorbidités.
Le Syndrome d’apnée obstructive du sommeil (SAOS) se caractérise par la survenue, durant le
sommeil, d’épisodes anormalement fréquents d’apnées ou de réduction significative de la ventilation
(hypopnée). Les patients diagnostiqués sont éligibles s’ils ont des comorbidités stables, s’ils sont
capables d’utiliser la ventilation nasale par pression positive continue ou par pression positive à deux
niveaux, et si l’intervention chirurgicale n’est pas douloureuse ou ne nécessite pas d’opioïdes
postopératoires. Les patients non diagnostiqués, ou en cas de suspicion, ne sont pas éligibles. Un
élément utile sur le plan pratique est le questionnaire STOP-BANG (tableau III) qui a une bonne
sensibilité et d’utilisation facile pour déterminer le risque de SAOS [1, 8, 9].
Tableau III : Principaux critères cliniques faisant évoquer un SAOS d’après le STOP-BANG
questionnaire. Si 3 réponses au moins sont positives, le diagnostic de SAOS est probable.
Snoring : Avez-vous un ronflement sonore (parole, porte close) ?
Tiredness : Êtes-vous fatigué, somnolent pendant la journée ?
Observed : A-t-on observé des pauses respiratoires pendant votre sommeil ?
Pressure : Avez-vous une HTA, traitée ou non ?
L’obésité, avec un IMC supérieur à 40 kg/m², sera un critère d’exclusion, sauf dans des cas
spécifiques après évaluation de chaque individu.
Les troubles des voies respiratoires (asthme, bronchite chronique obstructive) sont éligibles à la CA
s’ils sont asymptomatiques ou à distance des manifestations cliniques (30 jours après).
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2.3. La sédation
Dans les pays anglo-saxons, la sédation en complément de l’AL est la technique de référence pour la
chirurgie odontologique. Les techniques de sédation associée ou MAC (Monitored Anesthesia Care)
sont basées sur l’administration simultanée d’anesthésique local en infiltration ou par bloc
périphérique et d’agents sédatifs ou d’opiacés en IV [12]. La technique standard, en matière de MAC,
associe du midazolam (1 à 2 mg IV) à une administration continue de propofol en AIVOC (0,5 à
2,5 µg/ml-1).
Afin de diminuer l’appréhension ou la douleur de l’AL dans ce protocole, on peut s’aider d’une
injection de sufentanil (bolus de 5 à 10 µg IV) ou d’un bolus de propofol (0,5 à 1 mg/kg-1). On insistera
sur la nécessité d’un bloc périphérique ou d’une infiltration par un anesthésique local efficace,
garantissant le moins d’effets secondaires possibles, tout en donnant une bonne analgésie
périopératoire.
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Pour la chirurgie dentaire, l’anesthésie du maxillaire supérieur est obtenue par infiltration du nerf
maxillaire supérieur V3 en région malaire pré-auriculaire, sous contrôle de la neurostimulation.
L’anesthésie du maxillaire inférieur utilise l’infiltration du nerf dentaire inférieur au niveau de la face
interne de la branche montante du maxillaire. Les anesthésiques locaux utilisés sont la lidocaïne et la
ropivacaïne, avec une préférence pour cette dernière en raison de sa longue durée d’action. Les
infiltrations des loges, après avulsion des troisièmes molaires avec un anesthésique local de longue
durée d’action, améliorent la prise en charge de la douleur postopératoire [6].
La chirurgie plastique et dermato-carcinologique connaît un développement important. C’est un
domaine d’application des blocs de la face et du cou qui permet de réaliser de nombreuses
interventions. La chirurgie de la face, comme beaucoup d’actes peu profonds, peut être effectuée
par de simples techniques d’infiltration. L’intérêt des blocs, par rapport aux infiltrations, est de
limiter la quantité de produit injecté, souvent sous-évaluée, de limiter la toxicité des anesthésiques
locaux et la dissémination de cellules cancéreuses.
Les principaux blocs [13] de la face et du cou sont :
- Le bloc du nerf frontal (branche du V1) permettant la chirurgie du front et des paupières
supérieures
- Le bloc du nerf nasal interne qui permet la chirurgie extra-osseuse du nez
- Le bloc du nerf infraorbitaire ou V2 qui permet la chirurgie de la région sous-orbitaire, de la lèvre
inférieure et de l’aile du nez
- Le bloc du V3, réalisé en neurostimulation, qui intéresse la région malaire, pré-auriculaire ou
labiale inférieure
- Le bloc du nerf mentonnier qui permet l’ablation de lésion de la pointe du menton
- Le bloc du nerf auriculo-temporal qui permet la chirurgie de la partie antérieure du pavillon de
l’oreille, du conduit auditif externe.
L’infiltration, qui est l’injection d’anesthésique local en sous-cutané ou dans une paroi musculo-
aponévrotique, peut être utilisée seule ou associée à une sédation ou bien comme technique
d’analgésie associée à une AG.
Les anesthésiques locaux utilisés sont principalement la lidocaïne 1 %, adrénalinée ou non, à la dose
maximale de 7 mg/kg-1 et la ropivacaïne 2 ou 5 % à la dose maximale de 3mg/kg-1 [14]. La résorption
des AL est augmentée au niveau de la face car il s’agit de zones très vascularisées et il est important
de respecter les doses maximales possibles surtout en infiltration.
Les effets des ALR ou des infiltrations s’inscrivent parfaitement dans l’approche multimodale de la
douleur en ambulatoire. La réduction des besoins en antalgiques, notamment en morphiniques en
postopératoire immédiat, est intéressante. Cet effet d’épargne morphinique diminue les effets
secondaires, notamment les NVPO qui peuvent retarder la sortie du patient.
2.5. L’hypnose
La place de l’hypnose, comme adjuvant non pharmacologique pour réduire la détresse émotionnelle,
associée à une procédure chirurgicale, ne se discute pas [15]. Elle se pratique à différents niveaux :
- L’hypnose conversationnelle intervient au moment de l’induction avec des suggestions de
confort, de lieu de sécurité
- L’hypnose formelle permet la réalisation de gestes invasifs sous hypnosédation. Elle est associée
à des techniques d’AL ou d’ALR.
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3. En pratique
L’ambulatoire en ORL et en CMF c’est :
- Harmoniser les critères d’éligibilité des patients à une prise en charge ambulatoire en
définissant un consensus local
- Formaliser le parcours patient. Il décrit tous les éléments du processus de prise en charge, il
améliore la qualité et la sécurité des soins, il permet de planifier et de standardiser une prise en
charge multifactorielle, il évolue en fonction du retour d’expérience. Il intègre l’appel de la veille,
la planification de la CA au bloc opératoire, le passage en salle de soins post-interventionnelle
(SSPI) avec les possibilités de « bypass » pour la chirurgie sous AL sans sédation, la
protocolisation de la sortie de l’unité de CA et l’appel du lendemain.
- Suivre des indicateurs de pilotage. Ils sont organisationnels et médicaux : taux d’annulation à J0,
taux de transfert en hospitalisation conventionnelle, taux de réhospitalisation, indice de
satisfaction du patient, scores de douleurs postopératoires et de NVPO.
- Former les personnels médicaux et non médicaux aux spécificités de la prise en charge.
Conclusion
La CA améliore la qualité de la prise en charge des patients, elle invite au recours à des techniques
opératoires et à une organisation des soins plus innovante, dont les effets peuvent se diffuser à la
chirurgie conventionnelle. Instruction DGOS du 27 décembre 2010 : « Ce mode de prise en charge
devant être étendu à l’ensemble des patients éligibles à la chirurgie ambulatoire et à l’ensemble de
l’activité, la chirurgie ambulatoire devenant la référence ».
Références
1. HAS-ANAP 2014 « Ensemble pour le développement de la chirurgie ambulatoire » Rapport
d’évaluation technologique.
2. Cros AM, Chopin F, Sztark F. L’opéré ambulatoire en ORL. Perspectives et techniques d’anesthésie. JEPU
2001.
3. Lechot A. Étude de faisabilité des septoplasties et des septorhinoplasties en chirurgie ambulatoire. Thèse
d’exercice n°3094. Université Bordeaux Segalen 2011.
4. Société Française d’Oto-Rhino-Laryngologie et Chirurgie de la Face et du Cou. Consensus Formalisé.
Recommandations sur la prise en charge en ambulatoire des interventions : méatotomie moyenne par
endoscopie, septoplastie, réduction de fracture de l’os nasal par abord direct, réduction de fracture des os
propres du nez, technique fermée.
5. Société française d’Oto-Rhino-Laryngologie et de Chirurgie de la Face et du Cou, Association Française de
Chirurgie Ambulatoire, Société Française d’Anesthésie et de Réanimation. Amygdalectomie de l’enfant.
Recommandations pour la Pratique Clinique. Paris: SFORL; 2010.
http://www.orlfrance.org/interventions/amygdalectomie_ enfant.pdf.
6. Bourgain JL. Anesthésie-réanimation en stomatologie et chirurgie maxillofaciale. EMC-Anesthésie
Réanimation 2004; 1 : 2-24.
7. Société Française d’Anesthésie et de Réanimation. Prise en charge anesthésique des patients en
hospitalisation ambulatoire. Texte long. Paris: SFAR; 2009. http://www.sfar.org/_docs/articles/207-
rfe_ambulatoire2009.pdf.
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Anesthésie en chirurgie ORL et maxillo-faciale : une indication privilégiée pour l’ambulatoire
8. Society for Ambulatory Anesthesia, Joshi GP, Ankichetty SP, Gan TJ, Chung F. Society for ambulatory
anesthesia consensus statement on preoperative selection of adult patients with obstructive sleep apnea
scheduled for ambulatory surgery. Anesth Analg 2012; 115: 1060-8.
9. Chung F, Subramanyam R, Liao P, et al. High STOP Bang score indicates a high probability of obstructive
sleep apnoea. Br J Anaesth 2012; 108: 768-75.
10. Gupta A, Stierer T, Zuckerman R, et al. Comparison of recovery profile after ambulatory anesthesia with
propofol, isoflurane, sevoflurane and desflurane: a systematic review. Anesth Analg 2004; 98: 632-4.
11. Bourgain JL. Anesthésie-réanimation en oto-rhino-laryngologie (adulte). EMC-Anesthésie Réanimation
2004; 1: 323–55.
12. Rego M, Watcha MF, White PF. The changing role of monitored anesthesia care in the ambulatory setting.
Anesth Analg 1997; 85: 1020-36.
13. Deleuze A, Gentili ME, Bonnet F. Anesthésie locorégionale pour la chirurgie esthétique de la face et du cou.
Ann Fr Anesth Reanim 2009; 28: 818-23.
14. Ackerman B, Hellberg IB, Trossvik C. Primary evaluation of the local anesthetic properties of theamino
amide agent Ropivacaine LEA-103. Acta Scand Anaesthesiol 1988; 32: 571–8.
15. Schnur JB, Kafer I, Marcus C, et al. Hypnosis to manage distress related to medical procedures: a meta-
analysis. Contemp Hypn 2008; 25: 114-28.
16. Société Française d’Anesthésie et de Réanimation. Prise en charge des nausées et vomissements
postopératoires. Conférence d’experts. Texte court. Paris: SFAR; 2007.
http://www.sfar.org/_docs/articles/cexp_nvpo.pdf.
17. Société Française d’Anesthésie et de Réanimation. Recommandations formalisées d’experts 2008. Prise en
charge de la douleur postopératoire chez l’adulte et l’enfant. Ann Fr Anesth Reanim 2008; 27: 1035-41.
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