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L'ADOPTION DES PRATIQUES DE GESTION LEAN

Cas des entreprises industrielles françaises

Godefroy Beauvallet, Thomas Houy

Lavoisier | « Revue française de gestion »

2009/7 n° 197 | pages 83 à 106


ISSN 0338-4551
ISBN 9782746225503
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-francaise-de-gestion-2009-7-page-83.htm
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LOGISTIQUE
GODEFROY BEAUVALLET
THOMAS HOUY
Télécom ParisTech

L’adoption
des pratiques
de gestion lean
Cas des entreprises industrielles françaises1

L’objectif de cet article est d’évaluer l’ampleur de l’adoption


des pratiques de gestion lean au sein des entreprises
industrielles françaises. Les auteurs montrent, à l’aide d’une
enquête réalisée en mai 2006 auprès de 162 entreprises,
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qu’une majorité d’entreprises poursuivent des objectifs de
réduction de leurs stocks, d’amélioration de la qualité de leur
production et d’optimisation de leurs coûts de main-d’œuvre.
À cette fin elles privilégient des solutions reposant sur
l’amélioration de leurs systèmes de management et de
contrôle, et non sur l’amélioration directe des paramètres
opérationnels. Les auteurs observent cependant que les
entreprises de l’industrie automobile s’engagent davantage
dans la voie du lean management et montrent que le degré de
maturité lean des entreprises dépend fortement du niveau
d’exigence de leurs managers.

DOI:10.3166/RFG.197.83-106 © 2009 Lavoisier, Paris


1. Cette recherche a bénéficié du soutien de France Télécom R&D et Oracle France. Les auteurs tiennent à remer-
cier tout particulièrement Bertrand Le Bourgeois, responsable marketing industrie d’Oracle France, Ludovic Lebart,
directeur de recherches CNRS à Télécom ParisTech, David Bounie, maître de conférences à Télécom
ParisTech, ainsi que le rapporteur de la Revue française de gestion. Leurs commentaires nous ont été précieux dans
l’élaboration de cet article. Les vues développées dans cet article n’engagent que leurs auteurs.
84 Revue française de gestion – N° 197/2009

L
e 24 avril 2007, les trois plus De nombreux praticiens et de nombreux
grandes agences de presse interna- chercheurs ont essayé de clarifier les
tionales2 ont annoncé que Toyota concepts, les pratiques ainsi que les fonde-
était devenu le premier constructeur auto- ments cognitifs et sociaux sur lesquels le
mobile mondial en termes de nombre de TPS repose. Ils ont donné à ce système de
ventes de véhicules, place occupée par production et de management un nom géné-
General Motors (GM) depuis 76 ans. Ce rique, le lean management. Le lean mana-
résultat porte sur les ventes du premier tri- gement qualifie donc un ensemble de pra-
mestre 2007. De janvier à mars 2007, tiques très fortement inspirées par le TPS.
Toyota a vendu 2,348 millions de véhicules Ces pratiques reposent sur deux concepts
contre 2,260 millions pour l’américain GM. principaux (Ohno, 1986) : le juste-à-temps
Cette annonce n’a pas semblé surprendre les (JAT) et l’autonomation. Le JAT consiste à
analystes spécialisés et les journalistes. organiser son entreprise de telle sorte
Depuis plusieurs années, les agences de qu’elle puisse livrer exactement et au bon
notations Standard & Poor’s et Moody’s moment la quantité de biens souhaités par
attribuent à Toyota la note « AAA » et clas- ses clients. l’autonomation regroupe un
sent GM dans la catégorie des placements ensemble de procédures précises dont le but
dits spéculatifs. Quant aux journalistes, il est est d’inciter l’ensemble des employés d’une
intéressant de noter que le ton des articles de entreprise à améliorer ex ante la qualité des
presse ou des reportages qu’ils ont consacrés produits et des services vendus plutôt que
à ce changement de leadership dans le d’éliminer ex post les rebus.
monde de l’automobile ne fut pas à l’étonne- Le JAT et l’autonomation sont donc les
ment, certains ayant même choisi de titrer deux piliers du lean management. L’en-
sur la « chronique d’un succès annoncé »3. semble des procédures qui leur sont asso-
Le critère retenu pour attribuer à Toyota la ciées ont pour objectif de réduire les gas-
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première place dans la hiérarchie des pillages4 dans l’entreprise (Shingo, 1989).
constructeurs automobiles mondiaux doit Généralement, sept types de gaspillages
être discuté. Le nombre de ventes d’une sont répertoriés : les surproductions, les
entreprise traduit un succès commercial temps d’attentes, les transports ou manu-
mais ne donne pas nécessairement d’indica- tentions inutiles, les usinages inutiles, les
tion sur la performance de son système de stocks, les mouvements inutiles et les pro-
production et de management. Néanmoins, ductions défectueuses.
les commentaires qui ont suivi l’annonce du Si l’ensemble des travaux de recherche s’ac-
24 avril 2007, ont été principalement axés corde à la fois sur l’existence d’une filiation
sur le Toyota Production System (TPS). Le entre le lean management et le TPS, sur
TPS serait ainsi à l’origine de l’avantage l’objectif poursuivi par ce type de manage-
compétitif dont dispose Toyota sur ses ment (i.e. éliminer les gaspillages dans l’en-
concurrents. treprise) et sur les deux grands concepts à

2. Reuters, Associated Press et l’Agence France Presse.


3. Lexpansion.com, le 24/04/2007.
4. Un gaspillage est une action ou une situation non créatrice de valeur pour le client.
L’adoption des pratiques de gestion lean 85

mettre en œuvre dans l’entreprise pour sur le sujet. La définition de Jeffrey Liker se
atteindre cet objectif (i.e. le JAT et l’autono- décompose en quatorze principes. Nous
mation), tous ne lui attribuent pas exacte- pouvons reformuler ces quatorze principes
ment les mêmes caractéristiques (Beauvallet en « règles à suivre » pour l’entreprise selon
et Houy, 2006). Dans cet article, nous avons trois niveaux d’analyse. Le premier niveau
choisi d’appuyer notre définition du lean d’analyse concerne la valeur produite par
management sur celle exposée par Jeffrey une entreprise. Cette valeur doit être définie
Liker dans son ouvrage paru en 2004, The du point de vue du client et couler sans
Toyota Way. L’avantage de cette définition, interruption le long de la chaîne de valeur
depuis sa parution, est qu’elle réunit autour pour faire apparaître immédiatement les
d’elle un consensus aussi bien auprès des problèmes. Le deuxième niveau d’analyse
praticiens de la méthode que des chercheurs porte sur le schéma productif. L’entreprise

LES 14 PRINCIPES DU LEAN ÉNONCÉS PAR JEFFREY LIKER

Principe 1. Fonder ses décisions managériales sur une philosophie à long terme, et en accep-
ter les coûts à court terme.
Principe 2. Créer un flux continu dans ses processus pour faire apparaître les problèmes.
Principe 3. Tirer plutôt que pousser pour éviter la surproduction.
Principe 4. Lisser les activités.
Principe 5. Affirmer dans la culture de l’entreprise la volonté de tout arrêter si besoin pour
résoudre les problèmes au fur et à mesure qu’ils apparaissent, afin d’assurer un excellent
niveau de qualité dès le premier produit.
Principe 6. La standardisation du travail est la base de l’amélioration continue et de l’impli-
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cation du personnel.
Principe 7. Le management visuel permet de s’assurer que les défauts ne restent pas cachés.
Principe 8. N’utiliser que des technologies testées et éprouvées dans les processus de
fabrication.
Principe 9. Développer des leaders qui comprennent le travail dans le détail et qui incarnent
par leur attitude la philosophie de l’entreprise.
Principe 10. Recruter et former un personnel de qualité exceptionnelle, organisé en équipes
et qui suit la philosophie de l’entreprise.
Principe 11. Respecter le réseau étendu des partenaires et fournisseurs en les encourageant
à toujours mieux faire et en les aidant à s’améliorer.
Principe 12. Aller soi-même voir ce qui se passe sur le terrain afin de comprendre les situa-
tions pratiques.
Principe 13. Prendre les décisions lentement, par consensus, en considérant toutes les options.
Principe 14. Devenir une organisation apprenante par une réflexion au fil de l’eau (Hansei)
et par l’amélioration continue.

Source : Jeffrey Liker, Le modèle Toyota, Village Mondial, 2006 (traduction française de The Toyota Way).
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doit tirer sa production en fonction de la vités de l’entreprise et permettent d’avoir


demande et s’appuyer sur des processus de un aperçu clair du type de management pré-
production standardisés. La standardisation sent dans chaque entreprise.
des tâches productives est un prérequis à Concernant la planification de la production,
l’amélioration continue de l’ensemble des une entreprise lean agit en flux tirés. Autre-
processus de l’entreprise par suppression ment dit, elle tire sa production par la
des opérations non créatrices de valeur. demande. Cependant, il est utile de préciser
Enfin, le troisième niveau d’analyse a trait à que les entreprises sont généralement
l’attitude des managers. Ils doivent aider les contraintes de respecter des délais de livrai-
opérateurs à trouver des solutions rapide- son imposés par (ou négociés avec) leurs
ment lorsqu’un problème survient. Leur rôle clients. Par conséquent, les entreprises lean
est d’inciter chaque opérateur à identifier les ne peuvent pas attendre que la demande
problèmes, à y réfléchir et à proposer des s’exprime pour commencer à produire. Elles
contre-mesures pour améliorer le système doivent donc nécessairement produire pour
productif. Par conséquent, le management stocks l’ensemble ou une partie des compo-
doit se faire au plus près des opérateurs car sants du produit à livrer en attendant/antici-
seule l’expérience directe des situations de pant les commandes fermes de leurs clients.
crise permet un diagnostic efficace. Lorsque les commandes fermes de leurs
Tels qu’ils sont exposés originellement clients seront exprimées, l’entreprise pourra
dans le livre de Jeffrey Liker où tels que alors assembler les composants du produit
nous venons de les reformuler, les principes demandé et satisfaire les demandes de leurs
sur lesquels repose le lean management clients dans les temps. Ce type de planifica-
peuvent apparaître peu précis parce qu’ils tion intègre donc, nécessairement et séquen-
sont d’ordre trop général. Par souci de tiellement, une production pour stocks, pilo-
clarté et parce que nous souhaitons attribuer tée par les prévisions de l’entreprise sur sa
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au lean management une définition claire, demande future, et une production à la com-
nous nous proposons de prolonger la défini- mande pilotée par les commandes fermes
tion donnée par Jeffrey Liker en approchant des clients (Giard et Mendy, 2007a). Dans le
le lean management du point de vue des contexte de la production d’un bien modu-
comportements de l’entreprise pour cha- laire, le passage de la production pour stocks
cune de ses activités. Autrement dit, nous à la production à la commande dépend du
traduisons les principes formulés par Jeffrey point de pénétration des commandes (PPC)
Liker en termes d’implications sur les com- et du point de différenciation (PD) du bien
portements de l’entreprise concernant huit produit (Giard et Mendy, 2007b). Afin de
thèmes : la planification de la production, le limiter la présence de stocks inutiles et amé-
suivi des stocks, le suivi de la qualité, les liorer leur réactivité, les entreprises lean
standards de travail, la gestion des alertes, vont, d’une part, planifier leur production en
les relations fournisseurs, les relations essayant de faire remonter le PPC5 vers les
clients et le développement de produits. Ces processus amont tout en intégrant dans leur
huit thèmes traversent l’ensemble des acti- calcul le PD du bien produit, et d’autre part,
5. Pour bien comprendre les enjeux (avantages et risques) liés au déplacement du PPC, nous renvoyons le lecteur à
l’article de Giard et Mendy (2007, p. 65-88).
L’adoption des pratiques de gestion lean 87

lisser leur production par des actions de veau processus soient observés et comparés
mixage-fractionnement. Le mixage-fraction- aux anciens résultats. Cette méthode a été
nement consiste à organiser les files d’attente instaurée par les praticiens du lean pour
pour optimiser les flux des différents pro- obliger les rapporteurs à réfléchir longue-
duits utilisant les mêmes ressources. Il s’agit ment sur les failles des processus existants
de lisser d’une part, la demande réelle du et sur la manière de les améliorer.
client afin que la journée de production de Concernant les standards de travail, une
demain soit le plus proche possible d’au- entreprise lean se doit, d’une part, de définir
jourd’hui et, d’autre part, de mixer les ses standards de travail sur la meilleure pra-
volumes de production jusqu’au pièce à tique répertoriée et, d’autre part, de mettre en
pièce sur la chaîne de production. place un système d’amélioration de ces stan-
Pour ce qui concerne le suivi des stocks, la dards ayant pour objet de faire remonter les
démarche lean impose à l’entreprise de suggestions des opérateurs sur leurs pra-
suivre ses stocks en temps réel et de régler tiques. Ce système de suggestion s’intègre
son rythme de production sur le takt time. dans une démarche plus générale d’améliora-
Le takt time correspond au rythme de pro- tion graduelle et permanente de l’ensemble
duction qui permet de produire exactement des processus de l’entreprise, connue au sein
le niveau de biens demandé par les clients des entreprises lean sous un nom générique:
de l’entreprise. l’amélioration continue (ou Kaizen en japo-
Au niveau du suivi de la qualité, il est nais). Le caractère fondateur et fondamental
nécessaire, d’un point de vue lean, que l’en- de ces pratiques d’améliorations régulières et
treprise mette en place une politique, parta- sans fin, portant sur les détails du travail et sa
gée avec les opérateurs, de recherche des standardisation, a notamment été souligné
causes profondes des défaillances lors- par Maasaki Imai (1986, 1997). Cette
qu’elles surviennent. Au sein des usines démarche ne se restreint pas à la mise en
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Toyota, les managers utilisent un document place d’un système de suggestion dans l’en-
largement codifié pour faire remonter les treprise (Kaizen individuel) mais touche tous
informations de dysfonctionnements des les niveaux de l’entreprise (Kaizen de groupe
processus constatés par les opérateurs sur le ou Kaizen managérial). Quel que soit le
terrain. Lorsqu’un membre de l’entreprise niveau de l’entreprise, ces démarches d’amé-
observe des inefficacités sur une procédure, lioration continue incluent trois phases essen-
les managers lui demandent d’établir un tielles, séquentielles et ordonnées: le contrôle
rapport précis sur une feuille de format A3 de l’environnement de travail, l’élimination
(297 x 420 mm). Ce rapport est pensé de des gaspillages et la standardisation.
telle sorte que 1) le processus défaillant soit Pour ce qui concerne la gestion des alertes
analysé minutieusement, 2) les causes de en production, une entreprise lean dispose
l’inefficacité soient établies, 3) des contre- d’un système d’alerte suivi en temps réel
mesures soient proposées 4), des indica- par le management pour toutes les étapes de
tions sur la façon dont l’entreprise pourra la production et de la logistique. Au sein des
mesurer les gains associés à la mise en usines Toyota, une corde d’alerte, située
place du nouveau processus soient données, généralement au-dessus de chaque opéra-
et enfin 5) il faut que les résultats du nou- teur, permet d’envoyer un signal visuel
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et/ou sonore aux superviseurs pour les aver- ments industriels, Pratt & Whitney dans le
tir de la présence d’un problème sur la secteur aéronautique, Wiremold dans le
chaîne de production. Cette méthode de secteur de la fabrication de câbles informa-
signalement des problèmes est au cœur de tiques, Cedar Works dans l’industrie des
la démarche de résolution des problèmes. biens de consommation, Tesco dans le sec-
Lorsque la corde d’alerte se déclenche sur teur de la grande distribution, Jefferson
initiative de l’opérateur, le superviseur doit Pilot Financial dans le domaine des assu-
trouver une contre-mesure pour traiter la rances ou encore Fujitsu Services dans le
défaillance. S’il ne le fait pas, la ligne de domaine de l’informatique sont autant
production s’arrête au prochain point fixe. d’exemples documentés d’entreprises qui
Au niveau des relations fournisseurs et des ont expérimenté la démarche lean aux
relations clients, une entreprise est d’autant États-Unis ou en Europe (Emiliani et al.,
plus lean qu’elle agit en flux tendu avec ses 2003, Fiume, 2004, Liker 1998, 2004, Parry
fournisseurs et ses clients. L’application des et al., 2005, Scaffede, 2002, Sohal, 1996,
principes du JAT ne se restreint donc pas Swank, 2003, Womack et Jones, 2005a).
aux limites juridiques de l’entreprise. La En France peu de cas sont documentés. Tou-
mise en place d’un flux tendu avec ses tefois, plusieurs indications permettent de
clients et ses fournisseurs permettra en croire que la méthode de management lean
outre à l’entreprise de limiter ses stocks de se développe. D’abord, lorsque la société
produits finis et de matières premières. Toyota Motor Company s’implante dans un
Enfin, pour ce qui concerne le développe- pays6, l’expérience montre qu’elle interagit
ment de produits et/ou la gestion de projet, la fortement avec ses fournisseurs locaux et
démarche lean préconise que les entreprises qu’il se produit par ce biais une diffusion des
mettent en place des méthodes itératives de pratiques lean de gestion qui, par un méca-
développement avec des time boxes fixes. nisme d’externalités positives fondées sur le
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La littérature en économie/gestion nous mimétisme industriel, va au-delà des four-
propose de nombreuses études de cas sur nisseurs en contrat avec Toyota (Lieberman
l’implantation du lean management en et Demeester, 1999). Ensuite, notre position
entreprise. Toyota et Porsche dans le secteur d’observateurs des pratiques lean, en tant
des constructeurs automobiles, Donnely que membres du Projet Lean Entreprise7,
Corporation, Trico Australia, Delphi et nous permet de constater une participation
Freudenberg-NOK dans le secteur des équi- croissante des industriels aux événements
pementiers automobiles, Lantech et Trim organisés8 autour du lean management.
Master dans le secteur des biens d’équipe- Enfin, les visites d’usine que nous réalisons

6. Toyota a ouvert une usine en France, à Onnaing (Nord Pas de Calais), en 1998.
7. Développé depuis 2003 à Télécom Paris et en liaison avec le Lean Enterprise Institute (USA) et la Lean Enter-
prise Academy (UK), le Projet Lean Entreprise a pour but de contribuer à fédérer la recherche et les expériences
pratiques dans le domaine du lean en France.
8. Depuis le 5 mars 2004, le Projet Lean Entreprise a organisé 12 séminaires sur le lean avec une scansion trimes-
trielle. Les demandes d’inscriptions à ces séminaires, notamment celles en provenance d’industriels, ont augmenté
régulièrement dans le temps. Le nombre moyen de demandes d’inscriptions sur l’année 2005 était de 31, sur l’an-
née 2006 de 127 et sur l’année 2007 de 182. Le nombre d’abonné à la lettre d’information du Projet Lean Entre-
prise atteint aujourd’hui 1 290 personnes (85 % d’augmentation annuelle en moyenne).
L’adoption des pratiques de gestion lean 89

et les échanges que nous avons avec les tion des pratiques lean dans les entreprises
industriels, nous laissent penser que le lean américaines et, d’autre part, une contribu-
management occupe une place de plus en tion significativement positive de l’applica-
plus grande dans le discours des industriels. tion de la démarche lean sur le taux de
Ces constatations représentent un faisceau croissance des États-Unis (Sanidas, 2004).
d’information qui semble montrer un déve- Nick Bloom et John Van Reenen ont, quant
loppement des pratiques lean dans les entre- à eux, mené en 2005 une enquête sur l’état
prises industrielles françaises. Cependant, du management dans les entreprises aux
aucune étude statistique à ce jour n’a eu pour États-Unis, en Allemagne, en France et en
objectif d’évaluer le degré de maturité lean Grande Bretagne (Bloom et Van Reenen,
des entreprises françaises. L’objectif de cet 2005). Leurs résultats montrent que les
article est donc de proposer les premiers managers français sont les plus avancés
résultats d’une enquête consacrée à l’évalua- dans l’adoption des pratiques managériales
tion du niveau d’avancement lean des entre- modernes devant les Américains, les
prises industrielles françaises. Anglais, puis les Allemands. Ce résultat est
Si notre travail constitue une première intéressant puisque les auteurs définissent
contribution en France sur ce sujet, plu- la modernité d’une pratique managériale
sieurs chercheurs, notamment aux États- par le fait d’adopter plusieurs principes
Unis, ont déjà entrepris d’évaluer la diffu- associés au lean management9.
sion du lean dans leur économie. James Le reste de l’article est organisé comme suit.
P. Womack et Daniel T. Jones ont tenté Dans une première partie, nous présentons
d’évaluer l’ampleur de la diffusion des pra- notre base de données. Dans une deuxième
tiques lean au sein de l’économie améri- partie, nous présentons la méthodologie que
caine (chapitre XIV, 2e édition de Système nous avons retenue pour répondre à notre
Lean). Ils ont choisi de retenir la rotation question de recherche. Dans une troisième
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des stocks comme un indicateur macro-éco- partie, nous décrivons les pratiques managé-
nomique révélant le degré d’avancement riales des entreprises de notre panel et nous
lean d’une économie. Cette étude les amène identifions les différences entre ces pra-
à estimer que le lean progresse significati- tiques observées et la méthode de manage-
vement depuis le milieu des années 1990 ment lean telle qu’elle est définie dans la lit-
aux États-Unis. La méthode adoptée par ces térature en gestion industrielle. Dans une
auteurs est discutable dans la mesure où, à quatrième partie, nous mettons en évidence
l’échelle de la nation, la relation entre la plusieurs propriétés concernant la manière
rotation des stocks et la diffusion du lean dont les pratiques de gestion lean se diffu-
est sans doute moins directe que ce qu’ils sent dans l’industrie française. La conclu-
prétendent. La proposition de James sion de cet article est l’occasion de résumer
P. Womack et Daniel T. Jones concorde brièvement les principaux résultats de notre
néanmoins avec celle d’Elias Sanidas, qui étude et d’ouvrir une piste de recherche pour
met en évidence, d’une part, une augmenta- le futur.

9. L’étude de N. Bloom et J. Van Reenen ne traite pas précisément du lean management. Aussi, les auteurs ne retien-
nent pas, dans leur étude, l’ensemble des principes qui définissent et caractérisent le lean management.
90 Revue française de gestion – N° 197/2009

I – BASE DE DONNÉES 16 % appartiennent au secteur de l’industrie


automobile, 12 % appartiennent au secteur
Notre étude s’appuie sur une enquête lancée
de l’industrie agricole et agroalimentaire et
par Oracle France et Télécom Paris en
mai 2006 auprès de 162 entreprises indus- 9 % appartiennent au secteur de l’industrie
trielles françaises. Les entreprises de notre des biens de consommation. Notre panel
base de données sont réparties sur l’en- d’entreprise n’est donc pas strictement
semble du territoire français (voir figure 1 et représentatif de l’ensemble des entreprises
tableaux 1 et 2). Il s’agit principalement industrielles françaises. Notre échantillon
d’entreprises de grande taille. Le chiffre présente en effet une surreprésentation des
d’affaires moyen des entreprises sondées est secteurs de l’industrie des biens intermé-
de 395 millions d’euros. Le nombre moyen diaires, de l’industrie des biens d’équipe-
d’employé dans les établissements interro- ments et de l’industrie automobile. Inverse-
gés est de 629 personnes. Toutes les entre- ment, notre base de données sous représente
prises appartiennent au secteur de l’indus- l’industrie agricole et agroalimentaire et
trie. Plus précisément, 34 % des entreprises l’industrie des biens de consommation10.
ayant répondu à notre enquête appartien- Tous les résultats exposés dans cet article
nent au secteur de l’industrie des biens proviennent du traitement statistique des
intermédiaires, 29 % appartiennent au sec- réponses données par le panel d’entreprises
teur de l’industrie des biens d’équipement, interrogées dont nous venons de souligner

Figure 1 – Localisation géographique de l’ensemble des entreprises interrogées


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Note : Les entreprises interrogées sont marquées par un point rouge sur la carte de France.

10. Un échantillon représentatif (en nombre d’entreprise) du secteur de l’industrie devrait compter 30,7 % d’entre-
prises provenant du secteur de l’industrie agricole et agroalimentaire, 26,5 % provenant du secteur de l’industrie des
biens intermédiaires, 22,8 % provenant du secteur de l’industrie des biens de consommation, 11,7 % provenant du
secteur de l’industrie des biens d’équipements et 8,3 % de l’industrie automobile (constructeurs et équipementiers).
L’adoption des pratiques de gestion lean 91

la limite de représentativité. Nos interpréta- donc des informations sur les pratiques
tions doivent donc être comprises à la managériales des entreprises concernant
lumière de ces informations sur le secteur ces huit thèmes.
d’activité des entreprises interrogées. Compte tenu des informations dont nous
Le questionnaire téléphonique auquel nous avions besoin pour mener à bien notre
soumettions nos interlocuteurs au sein des étude, nous avons souhaité interroger, au
entreprises interrogées s’organisait autour sein des entreprises de notre panel, des per-
de huit thèmes : la planification de la pro- sonnes occupant une fonction leur permet-
duction, le suivi des stocks, le suivi de la tant d’avoir une vue transversale sur l’en-
qualité, les standards de travail, la gestion semble des pratiques de gestion internes de
des alertes, les relations fournisseurs, les l’entreprise. Pour cette raison, nous deman-
relations clients et le développement de dions à être mis en contact prioritairement
produits. Notre base de données comporte avec le directeur de l’établissement

Tableau 1 – Dispersion du chiffre d’affaires des entreprises interrogées

Variable Mean p50 Max min Sd p25 p75


CA (en euro) 3.95e + 08 1.91e + 08 4.12e + 09 42734 5.91e + 08 7.99e + 07 5.30e + 08

Tableau 2 – Dispersion du nombre d’employés des entreprises interrogées

Variable Mean p50 Max min Sd p25 p75


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Effectif 628.7236 300 14000 38 1591.976 157 662

Tableau 3 – Dispersion des postes et des services occupés par nos interlocuteurs

Postes et services des personnes interrogées Pourcentages


Responsable qualité 68
Responsable logistique 9
Responsable production 8
Responsable amélioration continue 6
Top management 6
Autres 1
Responsable méthodes 1
Responsable R&D 1
92 Revue française de gestion – N° 197/2009

interrogé. Et, si nous n’arrivions pas à obte- Les réponses données par nos interlo-
nir un rendez-vous téléphonique avec le cuteurs pour chacun des thèmes abordés ont
directeur de l’établissement, nous deman- fait l’objet d’une analyse ex post pour éva-
dions à être mis en relation avec le respon- luer leur degré de maturité lean. Nous
sable qualité. Finalement, la grande majorité avons donc établi une grille d’analyse pour
(68 %) de nos interlocuteurs en entreprise classer le comportement des entreprises par
fut des responsables qualité (voir le tableau catégorie et selon un ordre. Les notes attri-
3 pour la répartition des postes). La capacité buées aux comportements des entreprises
des responsables qualité à répondre seuls au pour chacun des thèmes abordés vont de 1 à
nom de l’entreprise à des questions qui 5 (voir la grille d’analyse du tableau 4).
n’entrent pas dans leurs profils de poste peut Plus la note se rapproche de 5, plus l’entre-
être légitimement discutée. Il est néanmoins prise adopte une attitude lean.
utile de préciser que lorsque notre interlo- Il est utile de préciser que cette méthode
cuteur ne souhaitait/pouvait pas répondre à d’évaluation du comportement des entre-
l’une de nos questions, pour des raisons de prises reste subjective pour deux raisons.
confidentialité ou par manque d’informa- D’abord, nous avons classé les entreprises
tion, il avait naturellement la possibilité de par catégorie de pratiques à la suite d’une
ne pas y répondre. En outre, les réponses interprétation des réponses données à une
hypothétiques ou équivoques de la part de série de questions pour chacun des thèmes.
nos interlocuteurs ont été traitées comme Or, par définition, toute interprétation pré-
des non-réponses. sente un caractère subjectif. Ensuite, la
grille d’analyse établie pour ordonner les
catégories de pratiques selon un critère de
II – MÉTHODOLOGIE
maturité lean peut également être contestée.
Pour évaluer les pratiques managériales des Conscient des limites de cette méthode
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entreprises de notre panel, nous les avons d’évaluation, nous avons utilisé deux procé-
interrogées par téléphone en leur soumet- dés. Premièrement, nous avons eu recours à
tant un questionnaire oral. Les discussions une double évaluation non concertée des
ont été intégralement enregistrées et le trai- pratiques des entreprises. Autrement dit,
tement des réponses données s’est fait sur deux évaluateurs, membres du Projet Lean
la base de ces enregistrements. Entreprise, se chargeaient de classer les
Notre questionnaire s’organisait autour des entreprises11 selon notre grille d’analyse.
huit thèmes évoqués précédemment : plani- Deuxièmement, pour ce qui concerne la
fication de la production, suivi des stocks, grille d’analyse qui ordonne les pratiques
suivi de la qualité, standards de travail, ges- des entreprises selon un critère lean, elle
tion des alertes, relations fournisseurs, rela- fût, quant à elle, validée par un praticien
tions clients et développement de produits. expert du lean manufacturing.
Pour chacun de ces thèmes, nous avons Dans la suite de cet article, nous exposons
posé une série de questions ouvertes et fer- plusieurs résultats statistiques. Certains
mées à l’entreprise. sont des statistiques descriptives sur les

11. Le nom des entreprises évaluées n’était naturellement pas visible par les évaluateurs.
L’adoption des pratiques de gestion lean 93

réponses apportées par nos interlocuteurs qu’elle pourrait avoir des principes de ges-
aux questions fermées que nous leur avons tion lean.
posés. D’autres proviennent du traitement
par notre grille d’analyse des réponses don- III – LEAN OBSERVÉ VERSUS
nées par les entreprises. LEAN THÉORIQUE
Si notre méthode d’évaluation des compor-
tements des entreprises comporte des fai- Dans cette section, nous nous proposons,
blesses, elle permet d’éviter plusieurs d’une part, de décrire les pratiques de
écueils. D’abord, cette méthode ne conduit management des entreprises de notre panel
pas à identifier de manière binaire les et, d’autre part, de mettre au jour les diffé-
entreprises lean et celles qui ne le sont pas. rences entre ces pratiques observées et la
Le fait de classer sur une échelle de 1 à 5 méthode de management lean telle qu’elle
les pratiques managériales des entreprises est définie dans la littérature en gestion
nous permet d’approcher avec une certaine industrielle.
finesse le comportement des entreprises. Le tableau 4 a pour objectif de rendre
Qualifier de manière manichéenne une compte des pratiques managériales enga-
entreprise de « lean » ou de « non lean » gées par les entreprises de notre panel pour
n’apparaît pas pertinent. En effet, si plu- chacun des thèmes abordés par notre ques-
sieurs entreprises industrielles françaises tionnaire. Il permet d’avoir une représenta-
s’engagent aujourd’hui dans la voie d’une tion générale du comportement des entre-
production lean, aucune ne peut se préva- prises interrogées.
loir d’être complètement lean. Notre Ce tableau contient de nombreuses infor-
méthode d’évaluation permet également de mations et il peut être lu de différentes
ne pas adopter une entrée « outil » pour sta- manières en fonction des observations sur
tuer sur le degré de maturité lean d’une lesquelles nous souhaitons porter notre
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entreprise. En effet, nous n’avons pas attention. Dans le cadre de notre étude,
classé les entreprises en fonction des outils nous nous proposons de lire ce tableau avec
dont elles disposent mais des pratiques un prisme lean afin d’identifier d’éven-
qu’elles engagent. Ce choix se justifie car tuelles divergences entre les pratiques des
la présence dans une entreprise d’un outil entreprises industrielles françaises et les
assimilé à la démarche lean ne révèle en pratiques de gestion prescrites par la
rien son niveau d’engagement dans la méthode de management lean.
démarche lean. La détention d’un outil Compte tenu du large spectre d’entreprises
lean n’est, en effet, ni une condition suffi- interrogées, ce tableau doit également être
sante ni une condition nécessaire à l’adop- lu avec une certaine prudence. Il regroupe
tion d’une démarche lean. Enfin, la un ensemble d’entreprises hétérogènes
méthode d’évaluation retenue dans cet compte tenu de leur taille, de leur chiffre
article porte sur le comportement des d’affaires et surtout des contraintes secto-
entreprises et non sur leurs connaissances. rielles qui peuvent peser sur elles. Les pro-
Il aurait été certainement infructueux positions générales que nous avançons à sa
d’évaluer le degré de maturité lean d’une lecture doivent donc faire l’objet d’une véri-
entreprise à la lumière de la connaissance fication/discussion sur leurs périmètres de
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Tableau 4 – Panorama des pratiques managériales des entreprises interrogées 94

Sujets abordés Pratiques managériales des entreprises


Classification lean 1 2 3 4 5
Planification de la prod. Production poussée : Production sur prévision : Production sur commandes : Flux tirés : Lissage :
(Observations – 154) 31 % 11 % 22 % 32 % 4%
Entreprise insatisfaite du
Entreprise insatisfaite du Entreprise insatisfaite du Entreprise insatisfaite du niveau de ses stocks / A mis
Comportement Entreprise satisfaite du niveau niveau de ses stocks / niveau de ses stocks / Après niveau de ses stocks / En en place une politique de
face aux stocks de ses stocks : Envisage de les réduire des efforts pour les réduire train de mettre en place des réduction permanente du
(Observations – 138) 44 % dans quelques temps : ça va mieux : mesures pour les réduire : niveau de ses stocks :
14 % 6% 22 % 14 %
Analyses des réclamations Audits + Associations des Audits + Recherches
Suivi de la qualité Aucun suivi de la qualité : clients ou contrôle final : Audits ou Assurance qualité : opérateurs et des autres systématiques des causes
(Observations – 162) 0% 11 % 18 % directions : racines :
62 % 9%
Aucune vérification sur le
respect des standards de Audits fréquents
Il n’existe pas de standards de travail par les employés Audits peu fréquents pour ou
travail dans l’entreprise : ou s’assurer du respect des standards de travail définis
Standards de travail 3% Les standards de travail ne standards de travail : sur la bonne pratique :
30 %
Revue française de gestion – N° 197/2009

(Observations – 154) sont pas connus des employés: 45 %


22 %
Il n’existe pas de programme de suggestion dans l’entreprise : Il existe un programme de suggestion dans l’entreprise :
16 % 84 %
L’opérateur appelle oralement Système d’alerte visuel Système d’alerte visuel Système d’alerte systéma-
Gestion des alertes Aucun système d’alerte : sur les postes pour les généralisé pour la tique pour toutes les étapes de
43 % le superviseur :
(Observations – 152) 25 % problèmes graves : production : production et de la logistique :
17 % 14 % 1%
Association pour les achats
Relations fournisseurs Aucune association : et/ou la conception des (+) Association sur la qualité (+) Flux tendus avec ses
(Observations – 145) 30 % produits uniquement : des produits reçus : fournisseurs :
21 % 34 % 15 %
Association pour la (+) Association sur la qualité (+) Flux tendus
Relations clients Aucune association : conception des produits (+) Enquêtes clients
23 % régulières : des produits : avec les clients :
(Observations – 149) uniquement : 25 % 2%
23 % 27 %
Pas itérative / Pas de reporting sur le respect Reporting sur le respect des fontionnalités, Reporting + Méthode de développement
Méthode de développement des fontionnalités, des coûts et des délais : des coûts et des délais : de produit itérative :
de produits 10 % 33 % 57 %
(Observations – 149) L’entreprise ne fait pas de l’analyse d’échec : L’entreprise fait de l’analyse d’échec :
36 % 64 %
Notation : (+) signifie « + ou pas ». Exemple : une entreprise qui associe ses fournisseurs pour la conception des produits et agit en flux tendus avec ses derniers appar-
tiendra à la 5e colonne du tableau. Une entreprise qui agit seulement en flux tendus avec ses fournisseurs appartiendra également à la 5e colonne.
Ce tableau ne contient pas l’ensemble des informations obtenues lors des entretiens. Les auteurs tiennent à la disposition du lecteur les statistiques descriptives sur l’en-
semble des questions posées aux interlocuteurs. Leur base de données comprend des informations sur les outils utilisés par l’entreprise pour appuyer chacune de ses pra-
tiques managériales.

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L’adoption des pratiques de gestion lean 95

validité. Par conséquent, nous procédons à production et de stocks, plutôt qu’en rédui-
la fin de cette section à un contrôle sur la sant la taille de leurs lots.
portée de ces propositions.
2. Les entreprises sont très soucieuses
1. Les entreprises diminuent le niveau de qualité mais cela ne repose pas
de leurs stocks plus qu’elles ne réduisent sur une réactivité accrue
la taille de leurs lots Les pressions concurrentielles qui s’exercent
56 % des entreprises interrogées affirment sur les entreprises du panel les conduisent à
mettre en place des politiques de réduction vouloir améliorer la qualité de leur produc-
des stocks. Réciproquement, 44 % des tion12. 100 % des entreprises interrogées
entreprises interrogées indiquent ne pas déclarent suivre la qualité de leur production,
mener de politique de réduction des stocks. 82 % disposent d’un outil de travail coopéra-
Ce chiffre montre que la majorité des entre- tif autour de la qualité, 90 % d’entre elles
prises se sont déjà engagées dans un pro- mettent en place un reporting sur le respect
cessus de réduction des stocks. Par exten- des fonctionnalités, des coûts et des délais
sion, nous pouvons affirmer que la dans la phase de développement des pro-
réduction du niveau de ses stocks est deve- duits, et, dans 62 % des cas, les entreprises
nue un objectif stratégique pour la majorité associent les opérateurs ou les services sup-
des entreprises interrogées. ports à la résolution des problèmes. La pro-
Les politiques menées par les entreprises portion des entreprises ayant installé au cœur
pour réduire leurs niveaux de stocks peu- de leur organisation des procédures qualité
vent être de nature différente. Dans 6,8 % est donc importante. Il apparaît donc assez
des cas seulement, l’entreprise agit exclusi- clairement que la plupart des entreprises
vement sur la taille de ses lots. Dans 68,2 % poursuivent un objectif d’amélioration de la
des cas, les dispositions prises par les entre- qualité de leur production.
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prises pour réduire leurs niveaux de stock Cependant, le fait de mettre en place des
se traduisent par une action sur la qualité de actions qualité n’implique pas nécessaire-
leurs prévisions. Ces chiffres sur la manière ment que les entreprises soient réactives au
dont les entreprises apportent des solutions moment de la détection d’une non-qualité.
à leurs préoccupations sur le niveau de leurs En effet, 43 % des entreprises du panel ne
stocks montrent donc assez clairement que disposent pas de système d’alerte pour
les entreprises préfèrent améliorer leurs signaler la présence d’un problème en pro-
prévisions de demande, de production et de duction. Seules 15 % des entreprises placent
stocks, plutôt que flexibiliser leur produc- un système d’alerte à chaque étape de la
tion en réduisant leurs tailles de lot. production pour signaler la présence d’une
Proposition 1. La plupart des entreprises défaillance. Il semble donc que les entre-
cherchent à réduire leur niveau de stocks en prises sont peu réactives au moment de la
améliorant leurs prévisions de demande, de détention d’une non-qualité en production.

12. Lors des entretiens, aucune question ne portait sur les raisons qui poussent les entreprises à mettre en place des
systèmes qualité dans leur entreprise. Toutefois, les discussions engagées avec les entreprises ont montré que la
pression concurrentielle en était la raison principale pour la plupart de ces entreprises.
96 Revue française de gestion – N° 197/2009

Proposition 2. La plupart des entreprises 4. Beaucoup d’entreprises retiennent


mettent en place des systèmes qualité plutôt une version réductrice du Toyota
qu’elles n’accroissent la réactivité de leurs Production System
ateliers face à chaque pièce mauvaise. Les propositions 1, 2 et 3 nous permettent
de croire que beaucoup d’entreprises indus-
3. Les entreprises pratiquent
trielles françaises s’engagent dans un pro-
le « Kaizen individuel »
cessus lean en retenant de cette méthode de
mais standardisent moins
production le triptyque vulgarisé « zéro
leurs processus de travail
défaut, zéro stock, kaizen ». En revanche,
Les entreprises de notre panel incitent leurs elles ne pratiquent pas les disciplines qui
employés à participer à l’amélioration des expliqueraient le succès durable du Toyota
processus de l’entreprise. 84 % d’entre elles Production System (Ballé et al., 2006), à
disposent en effet de systèmes permettant savoir le triptyque complémentaire « réac-
de recueillir les suggestions des opérateurs. tion au premier défaut, lissage par mixage
Par ailleurs, nous rappelons que 62 % des fractionnement, standards de travail ».
entreprises associent les opérateurs ou les Une explication13 peut être avancée pour
services supports à la résolution des pro- justifier ce comportement des firmes indus-
blèmes survenus. Autrement dit, les entre- trielles françaises. Alors qu’il apparaît rela-
prises pratiquent l’amélioration continue tivement simple de mettre en place des
(Kaizen individuel) au sens où elles encou- actions qualité, des politiques de réduction
ragent les remontées d’information des des stocks, et des chantiers d’amélioration
employés sur les opportunités d’améliora- de la productivité, il devient en revanche
tion de la performance de l’entreprise. plus difficile de les combiner à une réacti-
Néanmoins, si la plupart des entreprises vité forte des ateliers face à chaque pièce
assignent à leur main-d’œuvre des respon- mauvaise, à des techniques de mixage frac-
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sabilités sur l’amélioration des processus de tionnement en agissant sur la taille de lot et
production, elles ne semblent pas toujours à une standardisation rigoureuses du travail
standardiser au préalable leurs opérations sur les meilleures pratiques. La réactivité
de production sur la meilleure pratique des opérateurs en production, les opérations
répertoriée. Seules 45 % des entreprises de mixage fractionnement et le respect des
définissent leurs standards de travail par une standards de travail nécessitent une impli-
analyse des pratiques sur le terrain. cation forte des superviseurs. Autrement
Proposition 3. La plupart des entreprises dit, le passage du triptyque « zéro défaut,
conduisent des chantiers d’amélioration de la zéro stock, kaizen » au triptyque « réaction
productivité plutôt qu’elles ne standardisent au premier défaut, lissage, standards de tra-
rigoureusement leurs standards de travail. vail » n’est possible qu’à la condition d’une

13. Cette explication/hypothèse est soutenue d’une part, par les observations faites par plusieurs membres du
Projet Lean Entreprise lors des nombreuses visites d’unités opérationnelles réalisées au cours des années 2004,
2005, 2006 et 2007 et d’autre part, par plusieurs retours d’expériences présentés par des praticiens du lean lors du
cycle de séminaires « Lean en France » organisés par Télécom Paris.
L’adoption des pratiques de gestion lean 97

implication forte des superviseurs pour sera de caractériser les entreprises qui
atteindre ces objectifs de stocks, de qualité contreviennent à ces propositions. Autre-
et d’amélioration continue. Le manque ment dit, nous identifions, à l’aide d’une
d’implication des superviseurs peut donc analyse en composantes multiples (ACM),
être une des raisons qui expliquerait le les caractéristiques partagées par les entre-
décalage entre les pratiques observées dans prises qui adoptent une version non dégéné-
les entreprises de notre panel et les pra- rée du TPS.
tiques lean telles qu’elles sont définies dans La proposition 1 porte sur les procédés uti-
la littérature en gestion industrielle. lisés par les entreprises pour réduire leur
niveau de stocks. La grande majorité des
5. Quelles caractéristiques partagent les entreprises qui déclarent vouloir diminuer
entreprises qui retiennent une version leur niveau de stocks en consentant des
réductrice du Toyota Production efforts importants pour réduire la taille de
System ? leur lot appartient au secteur de l’automo-
Comme nous l’indiquions au début de cette bile. Celles qui déclarent réduire leur niveau
section, les entreprises interrogées forment de stock en améliorant la qualité de leurs
un ensemble d’agents économiques hétéro- prévisions sont dispersées de manière quasi
gènes. Les statistiques agrégées du uniforme entre les autres secteurs d’activité.
tableau 4 portent en effet sur des entreprises Autrement dit, le périmètre de validité de la
appartenant à des secteurs d’activité diffé- proposition 1 s’étend à l’ensemble des
rents, recourant à des modes de planifica- entreprises, à la seule exception des entre-
tion de la production divers, avec des prises du secteur automobile pour qui le
chiffres d’affaires et un nombre d’employés mixage fractionnement est un moyen effi-
fortement variables. Par conséquent, les cace de se séparer de leurs stocks excessifs.
propositions 1, 2 et 3 peuvent s’avérer Le tableau 5 permet de discuter de la portée
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contestables pour certaines classes d’entre- des propositions 2 et 3 en fonction du sec-
prises. L’objectif de cette sous-section est teur d’activité, du mode de planification de
d’identifier le périmètre de validité des trois la production, de la taille et du secteur d’ac-
résultats avancés dans cette partie. tivité des entreprises.
Afin d’apprécier la portée des propositions Il met en évidence deux résultats princi-
1, 2 et 3, nous procédons en deux étapes. paux. D’abord, quels que soient le secteur
D’abord, nous contrôlons la robustesse de d’activité, le mode de planification de la
ces trois propositions en fonction des prin- production et la taille des entreprises, le
cipales variables qui sont à l’origine de nombre d’entreprise qui mettent en place
l’hétérogénéité constatée dans notre panel des procédures qualité rigoureuses en étant
d’entreprises (i.e. le secteur d’activité, le réactives est inférieur au nombre d’entre-
mode de planification de la production, l’ef- prises qui mettent en place des procédures
fectif et le chiffres d’affaires des entre- qualité rigoureuses sans y associer de la
prises). Ensuite, pour compléter notre ana- réactivité. Autrement dit, le périmètre de
lyse sur le périmètre de validité des validité de la proposition 2, selon laquelle
propositions 1, 2 et 3, nous menons égale- les entreprises sont très soucieuses de qua-
ment une étude complémentaire dont le but lité sans que cette préoccupation ne s’ac-
98 Revue française de gestion – N° 197/2009

Tableau 5 – Périmètre de validité des propositions 2 et 3 en fonction du secteur d’activité,


du mode de planification de la production, de l’effectif et du CA des entreprises

Nombre d’entreprises qui Nombre d’entreprises qui


mettent en place des pratiquent le Kaizen en
procédures qualité rigoureuses standardisant rigoureusement
en étant réactives par leur processus de travail par
rapport à celles qui mettent rapport à celles qui pratiquent
en place des procédures le Kaizen sans standardiser
qualité rigoureuses sans rigoureusement leur processus
y associer de la réactivité de travail
(contrôle sur la proposition 2) (contrôle sur la proposition 3)
Ensemble des entreprises 36/76 61/37
Biens intermédiaires 11/25 16/14
Biens d’équipement 8/24 21/12
Automobile 7/13 15/2
Agricole et agroalimentaire 6/9 7/6
Biens de consommation 3/5 3/3
Flux tirés 13/26 20/9
Production poussée 7/23 16/9
Commandes 4/17 14/13
Prévisions 5/7 6/4
Lissage 3/3 3/1
Effectif ≤ 100 3/13 7/6
100 < Effectif ≤ 200 3/16 7/10
200 < Effectif ≤ 400 7/12 16/8
400 < Effectif ≤ 900 5/16 16/0
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900 < Effectif 4/6 5/7
CA (en M.€) ≤ 50 1/9 8/3
50 < CA (en M.€) ≤ 200 13/24 24/13
200 < CA (en M.€) ≤ 500 2/14 9/6
500 < CA (en M.€) ≤ 800 4/17 8/6
800 < CA (en M.€) 7/3 7/2

compagne d’une réactivité accrue semble entreprises appartenant au décile supérieur


s’étendre à tous les secteurs d’activité, à de notre panel (pour ce qui concerne leur
toutes les tailles d’entreprise et cela quel que CA) ne valident pas la proposition 2.
soit leur mode de planification de la produc- Ensuite, quels que soient le secteur d’acti-
tion. La proposition 2 est également valide vité, le mode de planification de la produc-
pour les entreprises qui réalisent un CA tion de l’entreprise et son CA, le nombre
inférieur à 800 millions d’euros. Seules les d’entreprises qui pratiquent le Kaizen indi-
L’adoption des pratiques de gestion lean 99

viduel en standardisant rigoureusement leur ayant instauré dans leur établissement une
processus de travail est supérieur à celles qui politique de réduction permanente de leur
pratiquent le Kaizen individuel sans standar- niveau de stocks, associant leurs clients sur
diser rigoureusement leur processus de tra- la qualité des produits vendus et agissant en
vail. Autrement dit, la proposition 3, si elle flux tendus avec leurs fournisseurs. Une
reste vraie pour beaucoup d’entreprises deuxième classe d’entreprise est composée
(38 % des entreprises), doit être nuancée en par les entreprises du secteur des biens
fonction des caractéristiques de l’entreprise. intermédiaires ayant un système d’alerte
Ces résultats peuvent être complétés par pour signaler les problèmes les plus graves
une analyse ayant pour objectif d’établir en production.
une typologie des entreprises qui semblent Les entreprises qui contreviennent à la pro-
contrevenir aux propositions 1, 2 et 3. position 3 présentent également plusieurs
Autrement dit, nous pouvons capturer, au points communs. Deux classes homogènes
moyen d’une analyse en composantes mul- d’entreprise se distinguent. Une première
tiples, les caractéristiques communes aux classe d’entreprise est composée par les
entreprises qui adoptent une version non entreprises du secteur des biens d’équipe-
dégénérée du Toyota Production System. ment qui poussent leur production, asso-
De manière directe (i.e. sans traitement cient leurs clients sur la qualité des biens
statistique) et logique par rapport aux pro- vendus, réalisent des analyses d’échec en
pos tenus précédemment, nous pouvons phase de développement de produit et enga-
affirmer que la principale caractéristique gent des politiques de réduction perma-
commune aux entreprises qui contrevien- nente du niveau de leurs stocks. Une
nent à la proposition 1 est d’appartenir au deuxième classe d’entreprises se compose
secteur de l’industrie automobile. Compte des entreprises de petite taille qui agissent à
tenu du faible nombre d’entreprises qui la commande. Le fait d’agir à la commande
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affirment réduire leur stock en agissant sur ou de pousser sa production et le fait d’être
la taille de leur lot, il serait statistiquement une entreprise de petite taille ne semble
contestable d’opérer une ACM sur ce petit donc pas être pénalisant lorsqu’il s’agit de
nombre d’entreprises afin d’identifier mettre en place conjointement des procé-
d’éventuels autres points communs entre dures d’amélioration continue et des stan-
ces entreprises. Une lecture simple de notre dards de travail stricts dans l’entreprise.
base de données nous montre que les entre- Dans cette section, nous nous sommes inté-
prises qui déclarent réduire leur niveau de ressés aux comportements des entreprises
stocks par un travail sur la taille de leur lot de notre panel en isolant successivement
appartiennent pour la grande majorité au leurs pratiques de réduction de stocks, de
secteur automobile. suivi de la qualité, de gestion des alertes,
Les entreprises qui contreviennent à la pro- d’amélioration continue et de standardisa-
position 2 présentent plusieurs points com- tion du travail. Les premières propositions
muns (voir tableau 6). Deux classes homo- (1, 2 et 3) proviennent ainsi d’une analyse
gènes d’entreprise se distinguent. Une unidimensionnelle ou bidimensionnelle sur
première classe d’entreprise est composée les pratiques des entreprises de notre panel.
par les entreprises du secteur automobile Pour répondre à notre question de recherche
100 Revue française de gestion – N° 197/2009

Tableau 6 – Résultats de l’analyse en composantes multiples (ACM)


Le tableau indique les tests de différentiation des entreprises qui combinent leur programme de
suggestion (kaizen individuel) avec une standardisation rigoureuse de leur processus de production
(note 4 pour le thème « Standards de travail »). N’ont été conservées dans ce tableau que les
caractéristiques qui sont statistiquement significatives.

Class 1 (size = 32) testv prob Class 2 (size = 20) testv prob
Analyse d’échec 3.586 .000 Production sur commande 4.799 .000
Association des clients
3.379 .000 0 < Effectif < 100 3.571 .000
sur la qualité
Pas de reporting pour
Production poussée 3.082 .001 2.354 .009
le développement de projet
Biens d’équipement 2.451 .007 Pas d’analyse d’échec 2.228 0.13
Association des fournisseurs Association des clients
2.370 .009 2.008 .022
sur la qualité pour la conception
Politique de réduction
permanente du niveau 2.364 .009 Agricole et agroalimentaire 1.839 .033
des stocks
Flux tirés 2.214 .013
Automobile 1.952 .025
50 < CA < 200
1.827 .034
(en millions d’euros)

Le tableau indique les tests de différentiation des entreprises qui combinent leur souci de qualité (notes
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4 et 5 pour le thème « Suivi de la qualité ») à une réactivité forte de l’entreprise face aux problèmes
(notes 3, 4 et 5 pour le thème « Gestion des alertes »). N’ont été conservées dans ce tableau que les
caractéristiques qui sont statistiquement significatives.

Class 1 (size = 27) testv prob Class 2 (size = 7) testv prob


Alertes visuelles Politique de réduction
pour les problèmes 2.147 .016 permanente du niveau 3.687 .000
les plus graves des stocks

Biens intermédiaires 1.863 .031 Flux tendus avec


3.406 .000
ses fournisseurs
Aucune association avec Association des clients
1.685 .046 3.377 .000
les fournisseurs sur la qualité
Automobile 3.033 .001
L’adoption des pratiques de gestion lean 101

sur le degré d’avancement lean des entre- les autres secteurs sont plus marquées pour
prises industrielles françaises, nous nous ce qui concerne les pratiques de Right
proposons maintenant d’adopter une First Time14. Les entreprises du secteur
approche complémentaire et multidimen- automobile semblent engager de réelles
sionnelle sur l’ensemble des pratiques des politiques de réflexion sur la recherche des
entreprises. causes des défaillances en travaillant de
manière coopérative avec les opérateurs et
les services supports. Par ailleurs elles
IV – TROIS PROPRIÉTÉS SUR
combinent leurs systèmes qualité à une
L’ADOPTION DU LEAN EN FRANCE
réactivité importante face aux problèmes.
Dans cette partie, nous mettons en évidence 38 % des entreprises du secteur automo-
plusieurs propriétés concernant la manière bile disposent d’un système d’alerte visuel
dont les pratiques de gestion lean se diffu- généralisé. Les autres secteurs sont bien en
sent dans l’industrie française. D’abord, deçà de ce chiffre. En effet, à l’exception
nous identifions quelques différences inter- du seul secteur agricole et agroalimen-
sectorielles et tentons de les justifier. taire, les entreprises des autres secteurs
Ensuite, nous montrons que le comporte- d’activité sont moins de 10 % à généraliser
ment des managers discrimine fortement le les procédures d’alertes immédiates en
degré de maturité lean d’une entreprise. production.
Proposition 4. Le secteur automobile dis-
1. Le secteur automobile n° 1 devant pose d’un degré de maturité lean supérieur
le secteur agricole et agroalimentaire aux autres secteurs d’activité.
26 entreprises de notre panel appartiennent La proposition 4 ne constitue pas une sur-
au secteur automobile (équipementiers ou prise. Au-delà des enseignements de notre
constructeurs). 10 d’entre elles sont parmi enquête nous pouvons donner plusieurs
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les 13 entreprises ayant, selon notre évalua- explications au développement du lean
tion, les pratiques de gestion les plus lean. dans l’automobile. D’abord, le lean mana-
Le secteur automobile est donc, de loin, le gement est symbolisé et est porté par
secteur d’activité où les méthodes lean de Toyota, constructeur automobile dont les
gestion sont les plus implantées. résultats remarquables des dernières années
Le traitement des réponses données par ont incité de nombreux industriels (équipe-
l’ensemble des entreprises interrogées mentiers ou constructeurs concurrents) à
nous permet d’identifier les raisons de s’inspirer du Toyota Production System. De
l’avance prise par le secteur automobile plus, au-delà des incitations qui peuvent
sur les autres secteurs d’activité du point exister à copier des techniques de produc-
de vue des pratiques lean. Les différences tion qui s’avèrent performantes, les équipe-
observées entre le secteur automobile et mentiers automobiles français ont souvent

14. Le Right First Time (littéralement « Bon du premier coup ») regroupe l’ensemble des techniques visant à
construire la qualité de ses produits plutôt qu’à éliminer ses rebuts. Il s’agit d’un ensemble de systèmes de détec-
tion des non-conformités et de résolution des problèmes.
102 Revue française de gestion – N° 197/2009

été contraints d’appliquer les méthodes du méthode d’évaluation du comportement des


constructeur japonais dans le but de passer entreprises. Ce résultat peut ainsi être com-
contrat avec lui. pris comme une donnée de cadrage ou un
Si la proposition 4 est intuitive, il est utile élément de vérification partielle de notre
de préciser qu’elle représente néanmoins un méthode d’évaluation du comportement des
élément de validation partielle de notre entreprises.

Tableau 7 – Corrélations entre l’attitude face aux stocks et plusieurs principes lean

Thèmes
Suivre en Suivre
Standards temps Relation Relation en temps
de travail réel ses fournisseurs clients réel
stocks les alertes
Exigence pour baisser 0,3424*** 0,3101*** 0,3325*** 0,1948*** 0,2035***
son niveau de stocks (0,0001) (0,0006) (0,001) (0,027) (0,023)
0.0487 0.2465** 0.1157 0.1321 0.1669*
Intermédiaires
(0.7567) (0.1303) (0.4544) (0.3869) (0.2790)
0.2901*** 0.3044*** 0.3410*** 0.0791 0.0006
Secteur d’activité

Équipement
(0.0694) (0.0669) (0.0389) (0.6367) (0.9975)
0.4576*** 0.4408*** 0.2983** 0.0888 0.2748
Automobile
(0.0425) (0.0401) (0.1667) (0.7095) (0.2280)
Agricole et 0.2662 0.0000 0.2286 0.3224* 0.2794
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agroalimentaire (0.3376) (1.0000) (0.4124) (0.2413) (0.3334)
0.7081*** 0.1786 0.4960** 0.3413 0.4994**
Consommation
(0.0147) (0.6215) (0.1744) (0.3345) (0.1417)
0.2569** 0.3554*** 0.2932*** 0.2623** 0.1409
Flux tirés
(0.1050) (0.0286) (0.0595) (0.1020) (0.3860)
Méthode de planification

0.3695*** 0.0831 0.4407*** – 0.1164 0.1836*


Production poussée
(0.0174) (0.6200) (0.0044) (0.4686) (0.2697)
0.1061 0.0721 0.2180 0.5380*** 0.1531
Commandes
(0.6219) (0.7498) (0.3061) (0.0067) (0.4856)
0.3419** 0.1523 – 0.0482 – 0.1321 – 0.0585
Prévisions
(0.1949) (0.6194) (0.8647) (0.6257) (0.8360)
1.0000 0.5922* 0.8783*** 0.6944** 0.6547**
Lissage
(1.0000) (0.2156) (0.0213) (0.1258) (0.1583)
Note : ce tableau donne les coefficients de corrélation partielle entre les pratiques prises deux à deux. Le chiffre
entre parenthèses indique le résultat du test de nullité du coefficient de corrélation.
*** : corrélation significative au seuil de 10 % ; ** : corrélation significative au seuil de 20 % ; * : corrélation signi-
ficative au seuil de 30 %.
L’adoption des pratiques de gestion lean 103

Le secteur agricole et agroalimentaire Ces corrélations apparaissent relativement


arrive selon notre évaluation en deuxième naturelles. Pour maintenir un niveau de
position. Ce résultat n’est également pas stock faible, l’entreprise doit maîtriser par-
surprenant. Pour des raisons structurelles, faitement ses processus de travail (par le
le secteur agricole et agroalimentaire a biais d’une meilleure standardisation des
adopté, depuis de nombreuses années, des tâches de production et d’un traitement
méthodes de production en juste-à-temps. immédiat des défaillances signalées) afin de
Le caractère souvent périssable des biens limiter les variations imprévues de sa pro-
produits par cette industrie impose de facto duction. Elle doit également limiter ses
une limite sur le temps de stockage. Par stocks d’entrée et ses stocks de produits
ailleurs, les pouvoirs publics15 imposent finis en agissant en juste à temps avec ses
aux entreprises de ce secteur des contraintes fournisseurs et ses clients.
fortes sur la qualité de leurs produits. Les Proposition 5. Le niveau d’attention de
entreprises du secteur agricole et agroali- l’entreprise à l’égard de son niveau de stock
mentaire sont donc forcées de mettre en est une caractéristique discriminante du
place des procédures qualité pour respecter degré de maturité lean d’une entreprise.
les normes qui leur sont imposées.
3. Le gemba16 au cœur de la démarche
2. L’exigence des managers à l’égard lean
de leur niveau de stocks déclenche Les entreprises ayant mis en place des sys-
les bonnes pratiques tèmes d’alerte en production adoptent très
Les entreprises interrogées s’engagent souvent des pratiques lean de gestion. Le
d’autant plus dans une démarche lean tableau 8 nous indique en effet que lorsque
qu’elles déclarent développer une attention le manager d’une entreprise suit en temps
particulière et permanente à l’égard du réel les alertes données en production, il
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niveau de leurs stocks. mène par ailleurs une politique de réduction
Le tableau 7 permet en effet de constater ferme du niveau de ses stocks, assure la
qu’une entreprise ayant développé une exi- qualité de sa production par des techniques
gence forte à l’égard de son niveau de stock de RFT et met en place des standards de tra-
va davantage suivre son niveau de stock vail fermes et généralisés sur la meilleure
(effet direct et intuitif), davantage standar- pratique répertoriée.
diser ses processus de travail, davantage Proposition 6. La présence d’un système
agir en flux tendu avec ses fournisseurs et d’alerte immédiat en production est une
ses clients et davantage suivre en temps réel caractéristique discriminante du degré de
les alertes en production. maturité lean d’une entreprise.

15. L’Union européenne et le gouvernement français fixent des normes de qualité strictes sur les produits agricoles
et agroalimentaires.
16. Terme japonais signifiant « le terrain ». Ce mot est souvent employé pour dire que le management se doit d’al-
ler là où se crée la valeur (i.e. sur le terrain) pour acquérir une expérience concrète des situations.
104 Revue française de gestion – N° 197/2009

Tableau 8 – Corrélation entre la gestion des alertes et plusieurs principes lean

Thèmes
Exigence au niveau
Suivi de la qualité Standards de travail
des stocks
Suivre en temps 0,2035*** 0,2864*** 0,2646***
réel les alertes (0,023) (0,0005) (0,0016)
0.1669* 0.3222*** – 0.1897*
Intermédiaires
(0.2790) (0.0255) (0.2068)
0.0006 0.2697** 0.1690
Secteur d’activité

Équipement
(0.9975) (0.1015) (0.3038)
0.2748* 0.0769 0.1618
Automobile
(0.2280) (0.7338) (0.5082)
Agricole et 0.2794 – 0.0487 0.0359
agroalimentaire (0.3334) (0.8431) (0.8840)
0.4994** 0.1463 0.5750***
Consommation
(0.1417) (0.6501) (0.0643)
0.1409 0.1148 0.3855**
Flux tirés
(0.3860) (0.4582) (0.0117)
Méthode de planification

0.1836* 0.2225** 0.2315**


Production poussée
(0.2697) (0.1676) (0.1562)

Commandes 0.1531 0.3498** – 0.0801


(0.4856) (0.0537) (0.6738)
– 0.0585 0.3973** – 0.3948**
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Prévisions
(0.8360) (0.1426) (0.1453)

Lissage 0.6547** 0.7276** 0.6124*


(0.1583) (0.1012) (0.2722)

Puisque le management sur le terrain avons déjà souligné l’importance dans la


(Gemba), qui se traduit en termes de com- section précédente de cet article apparaît
portement du manager par une présence au donc une nouvelle fois cruciale dans
plus près des opérateurs en production (et l’adoption des principes de gestion lean.
donc un suivi en temps réel de la produc-
tion), est une caractéristique qui révèle le V – CONCLUSION
degré de maturité lean d’une entreprise,
nous pouvons en déduire que le lean mana- L’ensemble des propositions exposées dans
gement est une démarche portée par les cet article permet d’apporter des éléments
managers. Le rôle des managers dont nous de réponses à la question de recherche qui a
L’adoption des pratiques de gestion lean 105

motivé la réalisation de notre enquête. Cet méthodologie dont nous avons souligné les
article permet en effet d’identifier plusieurs avantages et les limites tout au long du
caractéristiques majeures concernant texte. L’absence d’études statistiques
l’adoption du lean management dans l’in- convaincantes sur l’adoption ou la diffusion
dustrie en France. D’abord, les entreprises du lean management nous a en effet
semblent ne retenir qu’une version simpli- contraint à adopter une méthode d’évalua-
fiée et surtout réductrice du Toyota Produc- tion originale pour apprécier le degré de
tion System. En effet, les entreprises rédui- maturité lean des entreprises de notre panel.
sent leurs stocks plus qu’elles n’agissent L’un des intérêts périphériques à cet article
sur la taille de leurs lots, elles mettent en est donc de proposer une méthode nouvelle,
place des procédures qualité sans les com- contestable sur certains aspects mais satis-
biner à une réelle réactivité et elles prati- faisante à plusieurs égards, pour apprécier
quent l’amélioration continue de leur pro- l’ampleur de l’adoption du lean manage-
cessus de travail sans les avoir toujours ment dans une économie.
rigoureusement standardisés au préalable. Le travail statistique engagé à l’occasion de
Ensuite, les entreprises de l’industrie auto- cet article nous a permis d’identifier des
mobile et, dans une moindre mesure, celles firmes dont les pratiques de gestion étaient
de l’industrie agricole et agroalimentaire, très proches du modèle lean. Un deuxième
semblent davantage s’engager dans la voie travail de recherche, complémentaire à cet
du lean management que les entreprises de article, pourrait alors avoir pour objectif de
l’industrie des biens intermédiaires, des tester économétriquement la relation entre
biens d’équipements et des biens de le lean management et la performance des
consommation. Enfin, le degré d’adoption firmes. Dans cette perspective, et parce que
du lean management semble dépendre for- l’Enquête annuelle d’entreprise17 2006 ren-
tement du niveau d’exigence de ses mana- dra accessible des données fines sur la per-
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gers (obsession sur le niveau des stocks et formance des entreprises interrogées à l’oc-
présence sur le terrain). casion de notre enquête, nous proposerons
Les résultats de cet article ont été obtenus prochainement une extension aux résultats
au moyen d’une base de données et d’une exposés dans cet article.

17. L’enquête annuelle d’entreprise sur l’année 2006 sera vraisemblablement disponible dans le courant de l’année
2008. Elle recueille les principales données structurelles sur l’ensemble des entreprises de plus de vingt salariés en
France. Les thèmes du questionnaire sont : le chiffre d’affaires, la production, les stocks, la valeur ajoutée, l’emploi,
l’investissement, les exportations, les importations, l’équipement commercial, les fournisseurs, les clients, et la ven-
tilation détaillée du chiffre d’affaires par gamme de produit.
106 Revue française de gestion – N° 197/2009

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