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DISPOSITIFS INTRAPRENEURIAUX ET CRÉATIVITÉ

ORGANISATIONNELLE
Une conception tronquée ?

Véronique Bouchard, Céline Bos

Lavoisier | « Revue française de gestion »

2006/2 no 161 | pages 95 à 109


ISSN 0338-4551
DOI 10.3166/rfg.161.95-109
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-francaise-de-gestion-2006-2-page-95.htm
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I N N O VAT I O N
PAR VÉRONIQUE BOUCHARD,
CÉLINE BOS

Dispositifs
intrapreneuriaux
et créativité
organisationnelle
Une conception tronquée ?
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La poursuite d’une politique

D
ans le contexte actuel, l’aptitude des entreprises
d’innovation implique
à développer un avantage concurrentiel, et donc
souvent la mise en place
de systèmes destinés à
à assurer une rentabilité durable, dépend tou-
favoriser la créativité. jours plus étroitement de l’innovation (Drucker, 1993 ;
Parmi ceux-ci, on trouve les Cohendet et Llerena, 1993 ; Hamel, 2000).
dispositifs intrapreneuriaux Or à l’origine de l’innovation, il y a des idées et à l’ori-
dont la finalité est gine des idées, il y a la créativité. Amabile définit la
d’encourager et d’aider
créativité dans les organisations comme « la production
les employés à poursuivre
des initiatives originales.
d’idées nouvelles et utiles par un individu ou un groupe
Après une brève revue de d’individus travaillant ensemble » et l’innovation
la littérature consacrée à la comme « la mise en œuvre de ces idées » (Amabile,
créativité organisationnelle, 1988). Woodman, Sawyer et Griffin (1993) considèrent
l’article analyse le
la créativité organisationnelle comme un sous-ensemble
fonctionnement général
de ces dispositifs et montre
du champ de l’innovation qui, elle-même, constitue un
que leur échec répété sous-ensemble du changement organisationnel. Ford
dépend pour beaucoup (1996) souligne qu’à l’entrée « créativité » de l’index
de la conception tronquée des thèmes de l’Academy of Management Review on
que se font chercheurs peut lire « voir innovation ».
et praticiens de la créativité
Dans la pratique aussi il existe des liens étroits entre
organisationnelle.
innovation et créativité, la poursuite d’une politique
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d’innovation impliquant très souvent la processus et par conséquent l’échec répété


mise en place de systèmes destinés à favo- des dispositifs intrapreneuriaux, dépend en
riser la créativité. Parmi ces systèmes, on partie de la conception tronquée que se font
trouve les dispositifs intrapreneuriaux dont chercheurs et dirigeants de la créativité
la finalité est d’encourager et d’aider les organisationnelle. L’article débutera par
employés à poursuivre des initiatives origi- une revue de la littérature qui permettra de
nales. mettre en lumière cette conception tron-
De nombreuses entreprises sont en effet quée. Il se poursuivra par une description et
convaincues que dans des conditions de tur- une évaluation des dispositifs intrapreneu-
bulence croissante, l’incorporation d’une riaux en tant que dispositifs de créativité
dose d’entrepreneuriat peut les aider à inno- organisationnelle mettant en pratique cette
ver et à améliorer leur performance : c’est le conception. L’article se conclura par une
cas d’Eastman Kodak, Xerox Corporation, remise en cause de cette conception et par
Lucent Technologies aux États-Unis, de une proposition alternative.
SAS, Siemens Nixdorf en Europe et de
nombreuses entreprises moins connues. I. – LES TRAVAUX
Toutes ces entreprises ont, au cours des SUR LA CRÉATIVITÉ
trois dernières décennies, conçu et mis en ORGANISATIONNELLE
place des assemblages ad-hoc de res-
sources, d’outils et de processus destinés à La créativité au sens le plus large est un
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encourager la poursuite de projets entrepre- phénomène complexe qui concerne de
neuriaux par leurs employés. Or ces dispo- nombreux champs de recherche : art, philo-
sitifs génèrent des problèmes récurrents que sophie, psychologie, management… Au
la littérature a déjà repérés : apparition de milieu des années 1980, des travaux traitant
tensions et de conflits au sein de l’organisa- de la créativité au sein de l’organisation
tion (Fast, 1978 ; Burgelman et Sayles, sont apparus dans le champ du management
1986 ; Block et MacMillan, 1993 ; Kanter, stratégique (Amabile, 1988 ; Woodman et
North et al., 1990 ; Gompers et Lerner, Schoenfeldt, 1989). Par la suite, l’intérêt
2000 ; Chesbrough, 2000) mais surtout croissant des chercheurs de cette discipline
remise en cause du dispositif au bout de pour la créativité fait émerger le concept
quelques années d’existence (Fast, 1978 ; de créativité organisationnelle (Woodman
Kanter, North et al., 1990 ; Block et Mac- et al., 1993 ; Ford, 1996).
Millan, 1993), à tel point que Kanter, North Les recherches sur la créativité organisa-
et al. (1990) qualifient les dispositifs intra- tionnelle se sont initialement appuyées sur
preneuriaux de « formes organisationnelles des modèles issus de la psychologie et cen-
instables ». L’étude de Bouchard (2002) trés sur les individus avant de s’orienter
identifie le caractère par trop divergent des vers des modèles mobilisant plusieurs
processus instaurés par les dispositifs intra- niveaux (individus, groupes, organisation).
preneuriaux comme un de leurs « facteurs- Tous ces travaux, cependant, cherchent
clés d’insuccès ». implicitement une réponse à la question
Dans cet article, nous tenterons de démon- suivante : comment accroître la créativité
trer que le caractère trop divergent de ces des individus au sein de l’organisation ? Ils
Dispositifs intrapreneuriaux et créativité organisationnelle 97

se concentrent par conséquent sur l’identifi- plus, on observe que leur influence varie en
cation des conditions favorables à la créati- fonction des étapes du processus créatif.
vité individuelle.
2. Les modèles multiniveaux
1. Le modèle componentiel d’Amabile Ces modèles reposent sur l’idée que la créa-
Dans son article de 1988 « A Model of tivité résulte de l’interaction entre différents
Creativity and Innovation in domaines sociaux. L’article « Individuals
Organizations », Amabile analyse les com- différences in creativity: an interactionist
posants de la créativité individuelle et iden- perspective » de Woodman et Schonfelt
tifie les conditions favorables à cette der- (1989) constitue l’écrit fondateur de ce cou-
nière. Les trois composants nécessaires à la rant. Les articles de Woodman, Sawyer et
créativité sont 1) les compétences liées au Griffin (1993), Ford (1996), Drazin, Glynn
domaine concerné (domain-relevant skills), et Kazanjian (1999) poursuivent dans cette
2) les compétences liées à la créativité voie.
(creativity-relevant skills) et 3) la motiva- Pour Woodman, Sawyer et Griffin (1993) la
tion intrinsèque (intrinsic task motivation). créativité s’inscrit dans un contexte social
Ces composants, qu’une étude qualitative spécifique et subit son influence. Ce
approfondie lui a permis de mettre en contexte social résulte des interactions
lumière, constituent un modèle componen- entre les différents niveaux de l’organisa-
tiel de créativité (cf. figure 1). Chacun de tion : c’est pourquoi leur modèle est qualifié
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ces composants est nécessaire, mais aucun d’« interactionniste » (cf. figure 2). Pour ces
n’est suffisant pour induire la créativité. De auteurs, la créativité organisationnelle peut-

Figure 1
UN MODÈLE COMPONENTIEL DE CRÉATIVITÉ DANS L’ORGANISATION

Motivation Compétences
Compétences
intrinsèque expertises
pour la
pour la réalisation du
créativité
de la tâche domaine

Sources ext. Rassemblement Production Validation Succès


d’informations d’idées ou (par rapport) Échec Fin
Sources int. et de ressources de produits aux critères Progrès

Source : Amabile (1988).


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Figure 2
LES FACTEURS INFLUENÇANT LA CRÉATIVITÉ
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Source : d’après Woodman, Sawyer et Griffin (1993).

être définie comme une fonction complexe d’arbitrages individuels qu’il est impossible
de la créativité des individus et des groupes, de généraliser. La recherche doit donc
elles-mêmes tributaires des caractéristiques s’orienter vers l’observation des arbitrages
de l’organisation. création-routine par des acteurs spécifiques
Ford (1996), pour sa part, décrit la créati- dans des contextes spécifiques.
vité organisationnelle comme un processus On notera que ces deux modèles, en dépit de
évolutionniste de variation, sélection et leur volonté d’intégrer la dimension organi-
rétention alimenté par l’engagement des sationnelle, restent centrés sur la créativité
individus. Dans l’organisation, les indivi- individuelle et présentent de fortes simili-
dus sont amenés à exercer des arbitrages tudes avec le modèle d’Amabile. Les trois
entre action routinière et action créative. modèles se focalisent en effet sur l’identifi-
Leur calcul est influencé par 1) le sens cation des conditions organisationnelles de
qu’ils attribuent à leurs actions (attentes et la créativité individuelle ou de groupe.
intentions), 2) la nature de leur motivation
et 3) leurs connaissances et compétences. 3. Les conditions organisationnelles
Ce calcul complexe intègre une multitude de la créativité dans la littérature
de facteurs de niveaux et de nature diffé- Les travaux de la créativité organisation-
rents et ne peut donc être aisément modé- nelle soulignent le rôle central de l’indi-
lisé. La créativité organisationnelle dépend vidu et du groupe dans le processus créatif
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et par conséquent la nécessité pour une tâche, cette réaction pouvant être ressentie
entreprise souhaitant accroître sa créativité comme de l’intérêt, de l’engagement, de la
d’agir à ces niveaux. Pour certains auteurs, curiosité, de la satisfaction, ou un chal-
la créativité est d’abord et avant tout une lenge positif » (Amabile, 1996, p. 115).
aptitude cognitive individuelle (Guilford, A contrario, on parlera de motivation
1950). Le comportement créatif individuel extrinsèque dès lors qu’un individu ne
a beaucoup été étudié (Amabile, 1988, poursuit pas la tâche pour elle-même, mais
1996) et la plupart des modèles de créati- pour en retirer un bénéfice ou pour éviter
vité organisationnelle donnent la primauté quelque chose de déplaisant au terme de
à l’individu (Woodman, Sawyer et Griffin, celle-ci. Elle amende son principe de la
1993 ; Ford, 1996). Le groupe a fait l’objet motivation intrinsèque qui devient : « La
de recherche dans le domaine de la résolu- motivation intrinsèque conduit à la créati-
tion de problème (problem solving) qui vité ; une motivation extrinsèque « contrô-
présente de fortes similitudes avec le pro- lante » est défavorable à la créativité, par
cessus créatif. Amabile (1988) définit le contre une motivation extrinsèque infor-
groupe comme un ensemble d’individus melle ou « facilitante » peut conduire à la
travaillant ensemble, sans lui attribuer de créativité, surtout lorsque le niveau de
spécificité par rapport à l’individu. Pour motivation intrinsèque initial est élevé »
Woodman, Sawyer et Griffin (1993) la (Amabile, 1996, p. 119).
créativité du groupe est une fonction de la Parmi les leviers mis en avant par les
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créativité des individus qui le composent chercheurs, les ressources tiennent aussi
mais dépend aussi de facteurs spécifiques à une place significative. Dans son article de
ce niveau comme les normes du groupe, sa 1988, Amabile situe la créativité et l’inno-
cohésion, sa taille, son hétérogénéité et son vation à l’intersection des ressources, de la
mode de fonctionnement. motivation et des techniques (cf. figure 3).
Pour agir, l’entreprise dispose de plusieurs Au niveau individuel, les ressources
leviers. La littérature accorde une place incluent les compétences liées au domaine
particulière à 1) la motivation et 2) aux ainsi que celles liées à la créativité. Au
ressources. Comme nous l’avons vu, la niveau de l’organisation, les ressources
motivation constitue un des trois compo- incluent les financements, les matériels, les
sants de base du modèle d’Amabile. Dans systèmes, les personnes et les informations
son article de 1988, Amabile affirme que que celle-ci met à disposition. Woodman,
« l’état de motivation intrinsèque conduit à Sawyer et Griffin (1993), quant à eux, sou-
la créativité, alors que celui de motivation lignent l’impact des ressources, au côté
extrinsèque l’inhibe » (Amabile, 1983). d’autres caractéristiques de l’organisation,
Consciente de certaines ambiguïtés, elle sur le contexte et le comportement créatifs.
revient sur ce point fondamental en 1996. Les entreprises désireuses de favoriser la
Elle clarifie la notion de motivation intrin- créativité disposent donc d’un choix de
sèque : « Nous définissons comme intrin- niveaux d’intervention et de leviers qu’elles
sèque toute motivation qui émerge d’une peuvent mobiliser, combiner et faire évo-
réaction positive d’un individu face à une luer dans le temps.
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Figure 3
LES COMPOSANTS DE L’INNOVATION ORGANISATIONNELLE

Techniques Motivation

Ressources

Source : selon Amabile (1988).


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II. – LE DISPOSITIF et le contrôle des ressources, ces deux der-
INTRAPRENEURIAL COMME niers ayant été identifiés comme critiques
DISPOSITIF DE CRÉATIVITÉ par les travaux de créativité organisation-
ORGANISATIONNELLE nelle (Amabile, 1988 ; Woodman, Sawyer
et Griffin, 1993 ; Ford, 1996).
Dans leurs principes de conception et de
Au cours des trois dernières décennies, de
fonctionnement, les dispositifs intrapreneu-
nombreux dirigeants ont tenté de réintro-
riaux présentent des liens étroits avec les
duire un peu de l’« esprit d’entreprendre »
modèles de créativité organisationnelle
au sein de leur organisation. Des entreprises
décrits précédemment. En effet, la finalité
aussi connues qu’Eastman Kodak, Xerox
de ces dispositifs est la génération de nou-
Corporation et Lucent Technologies aux
veaux flux de revenus à travers la stimu-
États-Unis, SAS, Siemens Nixdorf en
lation et l’exploitation de la créativité des
Europe ainsi que d’autres moins connues
employés. Ces dispositifs se préoccupent de
ont, au cours de leur histoire récente, mis en
mettre en place des conditions favorables à
place des dispositifs intrapreneuriaux –
la créativité et à l’innovation. Dans ce des-
assemblages ad-hoc de ressources, outils et
sein, ils interviennent essentiellement au
processus managériaux – destinés à encou-
niveau des « individus » et des « petits
rager et à faciliter la poursuite de projets
groupes » (Woodman, Sawyer et Griffin,
entrepreneuriaux par leurs employés.
1993 ; Ford, 1996) et s’appuient, comme
D’un point de vue théorique, la mise en
nous le verrons, sur trois leviers princi-
place d’un dispositif intrapreneurial par le
paux : l’autonomie, l’engagement personnel
Dispositifs intrapreneuriaux et créativité organisationnelle 101

management d’une organisation établie (Bird, 1988 ; Katz et Gartner, 1988). De fait,
peut être considérée comme une tentative l’autonomie individuelle, dimension pre-
de réponse aux exigences simultanées et mière de l’« orientation entrepreneuriale »
contradictoires d’exploitation et d’explora- selon Lumpkin et Dess (1996), constitue le
tion auxquelles celle-ci est soumise (March, cœur des dispositifs intrapreneuriaux analy-
1991). Cette réponse consiste à laisser l’or- sés. En pratique, le degré d’autonomie indi-
ganisation en place en charge de ce qu’elle viduelle prévu par les dispositifs intrapre-
sait le mieux faire – gérer l’existant – et à neuriaux est très variable. Certains
confier à des individus ou à des petits dispositifs accordent une autonomie quasi-
groupes la tâche d’identifier et d’exploiter complète aux intrapreneurs qui sont physi-
de nouvelles opportunités. Les individus et quement, hiérarchiquement et culturelle-
les petits groupes sont en effet considérés ment séparés du reste de l’organisation. Ils
comme plus aptes à remplir cette tâche en sont alors libres de se focaliser entièrement
raison de leur créativité, flexibilité et capa- sur leur projet et, entre les évaluations pério-
cité d’apprentissage inhérentes dès lors diques auxquelles ils sont soumis, de dispo-
qu’ils sont libérés des contraintes de l’orga- ser d’eux-mêmes et de ressources propres.
nisation. Malgré des configurations en À l’autre extrême, les intrapreneurs conti-
apparence très variées qui tiennent à l’his- nuent d’appartenir à l’organisation existante
toire de l’entreprise mais également aux et à y accomplir leurs tâches habituelles
priorités des décideurs, les dispositifs intra- même s’ils ne dépendent pas de leur super-
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preneuriaux reposent en fait sur quelques viseur direct pour ce qui touche à leur pro-
principes communs qu’une étude récente jet. La poursuite de leur projet s’effectue en
(Bouchard, 2002) a mis en lumière. temps masqué jusqu’à ce que l’intérêt de
S’appuyant sur l’analyse de dix cas publiés celui-ci soit reconnu : ils se voient alors
et de deux cas originaux, représentatifs allouer des ressources financières et tech-
d’industries et de zones géographiques niques et peuvent officiellement consacrer
variées (cf. tableau 1), cette étude identifie une partie de leur temps de travail à leur
trois « briques de base » sur lesquelles s’ap- projet.
puient l’ensemble des dispositifs intrapre-
neuriaux analysés. Ces briques de base peu- L’engagement personnel
vent être conçues comme des leviers mais Tous les dispositifs analysés misent sur
également comme des principes de concep- cette dimension importante de l’orientation
tion qui conditionnent en profondeur le entrepreneuriale. Celle-ci est en effet aussi
fonctionnement de ces dispositifs. indispensable à la réussite que l’autonomie
car elle permet aux porteurs de projet de
1. Les « briques de base » des dispositifs surmonter les obstacles qui surgissent dès
intrapreneuriaux lors qu’ils tentent de s’écarter des sentiers
battus. Par ailleurs, la présence d’individus
L’autonomie individuelle
fortement engagés au sein de l’entreprise
Les rapports étroits entre autodétermination, peut contribuer à stimuler l’ensemble du
innovation et processus entrepreneurial ont personnel rendant cette dimension spéciale-
été maintes fois évoqués dans la littérature ment précieuse aux yeux de la direction.
102 Revue française de gestion – N° 161/2006

Tableau 1
LES DISPOSITIFS INTRAPRENEURIAUX ANALYSÉS
Industrie Période Source Auteurs

Raytheon Électronique 1969-1989 Journal of Business Kanter, North et al.


militaire Venturing

Scandinavian Compagnie 1983-1985 Harvard Business Kao et Blome


Airlines aérienne School
System

Eastman Matériel 1983-1989 Journal of Business Kanter, Richardson


Kodak photographique Venturing et al.

Ohio Bell Télécom 1985-1990 Journal of Business Kanter et


Venturing Richardson

Xerox Photocopieuses 1990-1995 Harvard Business Lerner et Hunt


Corporation. School

3M Abrasifs et adhésifs 1992 Harvard Business Bartlett et


School Mohammed
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Siemens- Systèmes 1994 Harvard Business Kanter, McGuire
Nixdorf informatiques School et al.

Procter & Produits de grande 1996 Harvard Business Amabile et Whitney.


Gamble. consommation School

Lucent Télécom 1996-2001 Harvard Business Kanter et Heskett. ;


Technologies. School Chesbrough et al.

Nokia Téléphones et 1998-today McKinsey Quarterly Day, Mang et al.


réseaux de
téléphonie mobile

Barilla Produits Années 1980 – Bouchard


alimentaires

“Tau Group” Matériel électrique 1998-2002 – Bouchard

Le fort niveau d’engagement de l’entrepre- plexe, par exemple – et à des facteurs extrin-
neur est lié à des facteurs intrinsèques – le sèques, comme la perspective d’enrichisse-
plaisir et la satisfaction qu’il retire de l’ac- ment ou d’amélioration du statut social en
complissement d’une tâche originale et com- cas de réussite (Hornsby, Naffziger et
Dispositifs intrapreneuriaux et créativité organisationnelle 103

Kuratko, 1994). Les dispositifs intrapreneu- permet à l’entreprise et aux intrapreneurs de


riaux reprennent ces deux sources de moduler leur niveau d’engagement en
motivation et les combinent dans diverses tenant compte des perspectives plus ou
proportions : certains dispositifs misent moins encourageantes qui se dessinent dans
exclusivement sur les facteurs intrinsèques le temps. Ce processus transforme en fait
tandis que d’autres promettent des récom- les projets en « options réelles » (Courtney,
penses financières très significatives ou Kirkland et Viguerie, 1997 ; McGrath,
encore des marques officielles de reconnais- 1999) que l’entreprise peut choisir d’exer-
sance aux intrapreneurs couronnés de succès. cer ou non le moment venu. Généralement,
Le niveau d’engagement personnel d’un au caractère conditionnel du financement
individu dépend clairement du degré de des projets s’ajoute le fait que les res-
compétence qu’il s’attribue. La plupart des sources sont allouées avec beaucoup de par-
dispositifs intrapreneuriaux prennent cette cimonie, ce qui conduit les intrapreneurs à
observation en compte et fournissent une se montrer très inventifs dans l’identifi-
aide et des encouragements aux employés cation et l’utilisation de celles-ci.
hésitants. Différents moyens vont être mis
en œuvre à cette fin : discours mobilisateurs 2. Le fonctionnement des dispositifs
en provenance de la haute direction, forma- intrapreneuriaux
lisation et communication de méthodes et De même qu’ils reposent sur des principes de
de processus de développement de projet, conception communs, les dispositifs intrapre-
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explicitation des critères de sélection, mise neuriaux ont tous un mode de fonctionnement
à disposition de données, d’experts et de assez similaire. Ce fonctionnement en enton-
tuteurs ou stages de formation ad-hoc. noir (cf. figure 5) table initialement sur un
grand nombre de participants et offre à ceux-
Le contrôle par les ressources ci toute latitude quant aux idées proposées.
Les entrepreneurs sont autonomes, engagés L’amont du processus est donc constitué de
dans leur projet mais également disciplinés mécanismes de stimulation (communication
par d’inflexibles contraintes de marché et de l’existence du dispositif et de son ouver-
de ressources : la contrôle par les res- ture à tous, encouragements) et de méca-
sources constitue donc la troisième et der- nismes de capture grâce auxquels les projets
nière « brique de base » mise en évidence et leurs porteurs sont formellement identifiés.
par l’étude. L’entonnoir très ouvert à l’entrée se rétrécit
La plupart des dispositifs étudiés soumet- progressivement. Divers mécanismes de
tent les intrapreneurs à de fortes contraintes sélection – les évaluations auxquelles sont
de ressources. Un processus de financement soumis les projets, mais également la sélec-
étape par étape et conditionnel est en effet tion « naturelle » résultant des nombreux obs-
au cœur de la plupart des dispositifs intra- tacles rencontrés ou du découragement –
preneuriaux : il offre à l’entreprise la possi- vont progressivement éliminer ou transfor-
bilité de contrôler périodiquement l’état mer la plupart des projets et ce, en dépit de
d’avancement, la faisabilité et l’attractivité l’aide formellement consentie par le disposi-
des projets en cours. Il constitue ainsi un tif. Au bout de l’entonnoir, on constate un
contrepoids à l’autonomie individuelle et assez faible taux de réussite. Parmi ces réus-
104 Revue française de gestion – N° 161/2006

Figure 4
LE FONCTIONNEMENT DES DISPOSITIFS INTRAPRENEURIAUX.
UN PROCESSUS EN ENTONNOIR
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sites, un certain nombre devront être externa- Kanter, North et al. (1990) n’hésitent pas à
lisées en raison de leur manque d’alignement qualifier les dispositifs intrapreneuriaux de
stratégique. La toute dernière étape consis- « formes organisationnelles instables ».
tera à intégrer les projets aboutis destinés à L’étude de Bouchard (2002) confirme ces
rester au sein de l’organisation. observations et constate que les dispositifs
intrapreneuriaux, après une première
3. Un constat d’échec période souvent très féconde, ont du mal à
La littérature consacrée aux dispositifs générer un flux constant d’idées et de pro-
intrapreneuriaux fait généralement le jets nouveaux et donc à stimuler durable-
constat de leur échec. En effet, ces disposi- ment la créativité organisationnelle.
tifs tendent à générer des tensions au sein La plupart des dispositifs intrapreneuriaux
de l’organisation quand il ne s’agit pas de affrontent une période de crise après seule-
conflits (Fast, 1978 ; Burgelman et Sayles, ment quelques années d’existence. Celle-ci
1986 ; Block et MacMillan, 1993 ; Kanter, résulte d’une multitude de facteurs qui peu-
North et al., 1990 ; Gompers et Lerner, vent dépendre de circonstances défavo-
2000 ; Chesbrough, 2000). Il semble que rables telles qu’un changement de direction
très peu de ces dispositifs sont considérés ou un retournement de conjoncture mais
comme des réussites et que la plupart sont aussi de problèmes plus fondamentaux liés
démantelés au bout de quelques années. à l’écart souvent considérable entre les
Dispositifs intrapreneuriaux et créativité organisationnelle 105

attentes des acteurs-clés et les résultats principe finit souvent par avoir des consé-
obtenus. quences négatives pour les intrapreneurs et
Cet écart souvent fatal pour le dispositif pour le dispositif dans son ensemble. En
peut être causé par des erreurs de concep- effet, la légitimité de projets sans lien straté-
tion : celles-ci sont fréquentes dans la gique avec l’entreprise est beaucoup plus
mesure où il s’agit de dispositifs expéri- difficile à établir ce qui rend les projets ainsi
mentaux et « faits maison ». Mais il est que leurs porteurs plus vulnérables aux
aussi dû, selon nous, à des problèmes plus attaques et critiques auxquelles ils ne man-
fondamentaux liés aux principes mêmes sur queront pas d’être exposés dans le temps.
lesquels reposent les dispositifs. Alors que l’alignement stratégique est rare-
ment évoqué en tant que critère d’évaluation
4. Un processus trop divergent dans la phase initiale, il devient de plus en
Les dispositifs intrapreneuriaux, qui consti- plus important à mesure que le temps passe
tuent à maints égards d’ambitieuses tenta- et que les résistances au dispositif se renfor-
tives d’application des concepts de la créa- cent ou que la situation économique se dété-
tivité organisationnelle, ont dans les faits le riore. Dans un contexte tendu le fait que des
statut peu enviable de « forme organisation- ressources rares et de valeur (les intrapre-
nelle instable ». Les raisons de cette fai- neurs engagés) se dédient à des tâches sans
blesse sont multiples, mais semblent lien aucun avec les activités de l’entreprise,
dépendre pour une bonne part du caractère et qu’en plus ces ressources risquent de quit-
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excessivement divergent de leur fonction- ter celle-ci en cas de succès, devient très dif-
nement. Cette divergence se traduit par un ficile à justifier.
faible alignement stratégique des projets
développés, avec pour conséquence une Divergence des individus
vulnérabilité accrue de ces projets et du dis- Comment se fait-il qu’un dispositif établi
positif dans son ensemble à moyen terme. depuis plusieurs années, ayant porté des
Elle se traduit également par une atomisa- fruits concrets en termes d’innovation et
tion des acteurs concernés, peu enclins à d’apprentissage et auquel participent de
s’organiser pour valoriser leurs réalisations près ou de loin parfois des centaines d’indi-
et leurs compétences et ainsi assurer la vidus ne puisse assurer sa pérennité ? Outre
pérennité du dispositif intrapreneurial. les problèmes évoqués précédemment, il
Le fonctionnement trop divergent des dis- nous semble que cette faiblesse dérive en
positifs intrapreneuriaux se manifeste donc partie du niveau d’intervention que ce dis-
à deux niveaux, celui des projets et celui positif privilégie : le niveau de l’individu.
des individus. Comme la plupart des innovateurs, les
intrapreneurs sont « orientés résultats » et
Divergence des projets se préoccupent peu de l’approbation de
La plupart des dispositifs observés affichent leurs supérieurs ou d’une légitimité qui ne
une volonté d’offrir toute latitude aux parti- soit strictement reliée à leur performance.
cipants en ce qui concerne le contenu de leur Cette orientation est renforcée par d’autres
projet à condition que celui-ci soit viable et traits tels que l’indépendance qui n’encou-
rentable. Malheureusement cette position de rage pas les intrapreneurs à mobiliser des
106 Revue française de gestion – N° 161/2006

processus sociaux pour atteindre leurs ressources sont allouées en fonction de la


objectifs. Par conséquent, les acteurs impli- motivation personnelle des porteurs de pro-
qués dans les dispositifs intrapreneuriaux jet et de la valeur intrinsèque des projets.
comptent avant tout sur la légitimité du suc- Au vu de ces problèmes, il nous semble
cès pour arriver à leur fin et pérenniser le qu’une remise en cause s’impose.
dispositif dans son ensemble. Or le succès
n’est pas toujours au rendez-vous, c’est 1. De la divergence à la convergence
même plutôt l’exception : la légitimité des Dans l’esprit de nombreux spécialistes de la
dispositifs intrapraneuriaux doit par consé- créativité, les termes « divergent » et « créa-
quent reposer sur d’autres bases et nécessite tif » sont pour ainsi dire synonymes. En
que les individus impliqués se mobilisent et effet est-il possible d’être créatif sans auto-
s’organisent à cette fin… nomie, sans s’éloigner délibérément des
acquis, des recettes et des modèles en
vigueur ? L’équivalence créativité-diver-
III. – VERS UNE AUTRE
gence est clairement établie par De Bono
CONCEPTION DE LA CRÉATIVITÉ
(1971, 1991, 1993). Cook (1998) renchérit
ORGANISATIONNELLE
sur ce point précisant les conditions favo-
La section précédente nous a permis de rables à la pensée divergente :
constater l’échec fréquent des dispositifs – ne pas juger, rester ouvert à toutes les
intrapreneuriaux, échec s’expliquant en idées même si la première est excellente ;
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partie par le caractère excessivement diver- – la quantité l’emporte sur la qualité, dans
gent des processus enclenchés par ces dis- un premier temps prendre toutes les idées
positifs. Nous avons vu que cette diver- sans penser à leur application ;
gence résultait de la grande liberté – ne pas critiquer une idée mais construire à
consentie aux intrapreneurs quant au partir d’une idée ;
contenu de leur projet et d’une focalisation – favoriser l’incubation des idées, leur lais-
quasi-exclusive sur les individus au détri- ser un espace pour se développer.
ment d’autres niveaux d’intervention. Les dispositifs intrapreneuriaux dont l’am-
Pour revenir au modèle de créativité orga- bition est de susciter un large vivier d’idées
nisationnelle proposée par Amabile et ses « nouvelles, utiles et valorisables » stimu-
successeurs, force est de constater que, dans lent la créativité en encourageant la diver-
un cadre concret comme celui des disposi- gence. Cependant cette divergence pose des
tifs intrapreneuriaux, la mobilisation, au problèmes à l’organisation. Pour Midler
niveau individuel, des composants-clés de (2002), le défi principal que l’innovation
la créativité contribue à accentuer la diver- intensive pose aux organisations est en effet
gence du processus créatif. En effet, la celui de « la maîtrise et de la coordination
motivation des participants découle de des divergences ». Défi qui n’est autre que
perspectives de réussite personnelle, les celui d’assurer un équilibre entre diver-
techniques se focalisent sur la valeur intrin- gence et convergence et qui, pratiquement,
sèque des projets qu’il s’agisse de l’ac- implique de comprendre sur quoi, quand et
croître ou de la mesurer et, finalement, les comment faire converger acteurs et projets.
Dispositifs intrapreneuriaux et créativité organisationnelle 107

2. Des conditions aux objets individuelle mais aussi de leur participation


de la créativité organisationnelle à un dessein commun. Les techniques utili-
La divergence inhérente à la créativité indi- sées mettront l’accent sur l’alignement stra-
viduelle doit être donc maîtrisée et mise au tégique et les synergies autant que sur la
service de fins communes. Ceci passe, entre valeur intrinsèques des projets. Finalement,
autres, par la désignation d’objets communs l’allocation des ressources reflétera tout
auxquels appliquer les idées et les actions autant la contribution à la collectivité et à
créatives au sein de l’organisation. Sans ces ses objectifs que la valeur intrinsèque des
« attracteurs », l’énergie créative est dissi- projets et de leur porteurs.
pée et donc gaspillée du point de vue de
l’organisation. Toujours du point de vue de CONCLUSION
l’organisation, il apparaît qu’une focalisa-
Nous avons montré que la focalisation sur
tion exclusive sur les conditions de la créa-
les conditions favorables à la créativité
tivité tende à aboutir à des résultats indési-
conduit à des processus divergents et que la
rables et qu’il est nécessaire de spécifier les
maîtrise de ces processus passe par la dési-
objets de la créativité. En faisant converger
gnation d’objets communs. À la lumière de
les initiatives individuelles, ces thèmes
ces observations, il nous semble que la
communs vont favoriser l’apparition de
conception de la créativité qui émane des
synergies et les apprentissages collectifs. La
travaux de la créativité organisationnelle est
spécification d’objets de la créativité ne doit
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incomplète. Que ce soit à des fins théo-
évidemment pas interdire toute divergence
riques ou pratiques, la nouvelle conception
mais seulement contribuer à la réduire.
devra mieux prendre en compte les dimen-
Dans le cas des dispositifs intrapreneuriaux
sions collective et convergente de la créati-
dont la finalité est la génération de nou-
vité organisationnelle. Cette exigence nous
veaux flux de liquidités, les objets com-
oriente vers une conception duale donnant
muns peuvent être des clientèles, des tech-
une importance équivalente aux conditions
nologies ou des familles de produits à
et aux objets de la créativité organisation-
privilégier dans l’exercice de la créativité et
nelle. Ainsi, par exemple, le repérage empi-
le déploiement des efforts individuels. Les
rique de la créativité organisationnelle
objets communs sur lesquels exercer la
devra s’appuyer sur deux ensembles d’indi-
créativité peuvent aussi être les processus-
cateurs : 1) un ensemble d’indicateurs
clés de la firme, qu’il s’agisse de processus
visant à établir l’existence de conditions
tournés vers le marché ou de processus
favorables à la créativité individuelle et de
exclusivement internes, son organisation ou
groupe et 2) un ensemble d’indicateurs
même sa stratégie…
visant à vérifier l’existence d’objets com-
L’introduction de convergence, à travers la
muns auxquels s’applique cette créativité,
définition d’un objet à la créativité organi-
qu’il s’agisse de cibles stratégiques ou de
sationnelle, aura nécessairement un impact
tâches collectives. Cette conception duale
sur les composants de la créativité organi-
doit maintenant être corroborée par l’obser-
sationnelle. La motivation des participants
vation du comportement et des orientations
dépendra de leur perspective de réussite
des firmes réputées créatives.
108 Revue française de gestion – N° 161/2006

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