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Mission
en temps de Crise
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Società delle missioni africane
Via della Nocetta, 111, Roma 00164, Italia
www.smainternational.info
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Table des matières
Éditorial 5
- S. I. Francis Rozario SMA
Nos Racines
Regards sur la Société des Missions Africaines pendant la
Deuxième Guerre Mondiale
- Jacob Schiméa Senou SMA 13
“Frères d’armes” (1939-1945)
- Roberta Grossi 23
Le Marxisme-Léninisme au Dahomey-Bénin : un défi
pour la Foi Chrétienne
- Michel Bonemaison SMA 29
La vocation missionnaire de Saint Charles de Foucauld
- Andreà Mandonico SMA 39
Colonisation et Cultures 53
- Pierre Saulnier SMA
Notre Vision
COVID-19 et Redécouverte du Ministère de Gardiennage
- François de Paul Houngue SMA 67
Résilience
- James Shimbala SMA 73
Attention aux confrères : Le rôle premier des supérieurs
d’entité
- François du Penhoat SMA 87
Prise en charge des membres
- Fabien Sognon SMA 117
Maison construite pour les tempêtes
- S. I. Francis Rozario SMA 125
Gros plan sur : Aujourd’hui
Mission-inculturation : le défi est renouvelé
- Waldemar Piotr Dziedzina SMA 145
Pendant la crise politique en Côte d’Ivoire en 2002
- Ramon Bernad SMA 157
Inondations aux Nigeria
- Anthony Chukwuemeka SMA 161
Mission au désert pendant la pandémie
- Éphrem Kway SMA 165
COVID -19 - Chemin de conversion
- Paulin Kouassi SMA 171
COVID 19 : Les Problèmes de santé spirituelle et mentale
- P. Maria Anthuvan Dominic SMA 173
La révolution numérique et la formation presbytérale
traditionnelle : défis et possibilités
- Jonathan Malong SMA 181
Où est Dieu dans le covid-19 ?
- Tim Cullinane SMA 195
Nos racines
Lorsque vous faites face à un nouveau défi comme réaliser des
opérations bancaires via un appareil mobile ou acheter votre premier
désinfectant, vous demandez conseil à quelqu’un qui l’a déjà fait. Notre
humanité a connu des crises majeures. Alors que nous traversons la
pandémie actuelle, nous examinons l’histoire pour voir comment les
gens ont vécu des moments difficiles et ce que nous pouvons apprendre
de leurs expériences.
La Seconde Guerre mondiale, dévastatrice, a profondément
remodelé le monde. Avec l’aide de la Dr Roberta Grossi, notre assistante
archiviste, nous avons repêché les écrits de nos confrères pendant la
guerre. Jacob Senou a parcouru les nombreux manuscrits, les a analysés
et a rédigé l’article « Un regard sur la Société des missions africaines pendant
la deuxième guerre mondiale ». Nous lisons le passé avec l’expérience du
présent pour un avenir meilleur. La méthodologie relie les archives à
Rome, le chercheur à Strasbourg et les lecteurs du monde entier. La
frustration des restrictions à la pandémie semble insignifiante quand
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Mission en temps de crise
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Éditorial
Notre vision
La section Notre vision contient cinq articles. François de Paul
Houngue, notre Vicaire Général fait passer un message au nom du
Conseil Général à toute la Société en temps de pandémie. En tant que
missionnaires, nous réalisons notre vocation de gardiens des mystères
de Dieu et de gardiens les uns des autres. Notre vulnérabilité nous aide
à réaliser que nous sommes des créatures et que nous devons être
rattachés à Dieu. Nous sommes également liés les uns aux autres et, par
conséquent, tout le monde doit se soucier du bien de tout le monde.
Nous témoignons de ce message à travers notre vocation missionnaire.
Suite à la décision du Conseil Plénier de 2020, nous avons organisé
la Formation Continue pour tous les Supérieurs d’Entités et leurs
Conseils en septembre 2020 et janvier 2021. Le module de septembre
portait sur « Attention aux confrères missionnaires » et celui de janvier
sur « Attention à la mission ». Trois présentations du module de
septembre sont faites dans cette section sous forme d’articles.
James Shimbala, le Coordinateur du Comité Exécutif de l’ICOF
(Formation Continue Intercongrégationnelle), est une personne
ressource très recherchée sur divers sujets, en particulier sur celui de la
Résilience. La pandémie nous frappe depuis plus d’un an et nous devons
comprendre la capacité humaine de résilience afin non seulement de
rester sains d’esprit, mais aussi de devenir plus forts grâce à ces
épreuves.
Tandis que James parle de « Soins de soi », François du Penhoat et
Fabien Sognon, deux Supérieurs provinciaux expliquent les détails
impliqués dans la prise en charge des membres confiés aux soins des
Supérieurs du point de vue spirituel, psychologique et administratif.
Leurs articles montrent l’évolution des styles de leadership au fil des ans
et les nouveaux domaines émergents où les dirigeants doivent accorder
plus d’attention. Les supérieurs exercent leur leadership et leur
fraternité en même temps. Les principes expliqués ici sont précieux pour
tout le monde puisque nous sommes tous les gardiens les uns des autres.
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Mission en temps de crise
Gros plan
Dans la troisième section Gros plan, les personnes partagent leur
expérience et leurs réflexions sur diverses crises en relation avec la
mission.
Waldemar parle du rôle de l’inculturation dans la mission et nous
guide à travers divers défis du monde moderne et différentes manières
de comprendre l’inculturation. Il est intéressant de noter l’accent mis sur
le dialogue et la rencontre des cultures dans un véritable respect mutuel
sans aucun complexe puisque la recherche de la vérité reste la
motivation commune.
Ramon Bernad partage l’expérience de la guerre civile en Côte
d’Ivoire ; Anthony Chukwuemeka partage l’expérience des inondations
au Nigeria ; ensuite Éphrem Kway et Paulin Kouassi partagent
l’expérience de la pandémie actuelle, respectivement dans la mission
désertique de Lodwar et en Égypte.
Dominic Anthuvan écrit sur les problèmes de santé spirituelle et
mentale dus à et pendant la pandémie. En tant que missionnaires, nous
vivons les mêmes défis que tout le monde, et en même temps nous
accompagnons et soutenons les autres. L’article nous invite à être plus
conscients de ce qui se passe et à faire preuve de plus d’ingéniosité pour
devenir plus résilients et afin de trouver des moyens d’atteindre les
nouveaux « plus abandonnés » d’aujourd’hui.
Jonathan Malong, un formateur au Ghana écrit sur la révolution
digitale dans le contexte de la formation. Jonathan met en lumière les
nouveaux types de défis auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui,
il nous invite à être ouverts aux avantages de la vie digitale et en même
temps à être vigilants pour ne pas compromettre nos valeurs essentielles.
Nous avons donné les derniers mots à la plume d’un sage - Tim
Cullinane. Tim pose la question : « Où est Dieu dans la COVID-19 ? ». Il
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Éditorial
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Nos Racines
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Regard sur la Société des Missions
Africaines pendant la Deuxième
Guerre Mondiale
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Mission en temps de crise
être humain » (Cf. Sg 12, 19). Comme si cet exemple qu’il donna ne
suffisait pas, il finit par envoyer son Fils qui s’incarne afin de montrer
aux hommes comment devenir « image et ressemblance de Dieu »,
divinisation à travers l’humanisation.
Nous n’allons cependant pas ici retracer l’histoire de cette mission
d’humanisation. Ayant reconnu que la deuxième guerre mondiale est
une crise qui s’y est insérée et qui a affecté son cours normal, notre
réflexion dans les lignes qui suivent consistera à placer d’abord le décor,
ensuite à analyser par une traversée des écrits que nous ont laissés les
confrères qui ont vécu cette crise, les défis qui leur ont été posés par la
situation. Puisque la personne humaine a une grande capacité
d’adaptation, nous relèverons les diverses réponses et adaptations qui
étaient les leurs. Après cette démarche, on pourrait pourtant encore se
demander à quoi revisiter cette histoire nous servirait-il ? C’est là la
raison de tout cet exercice : partir de l’histoire pour nous faire repenser
les réponses missionnaires que nous donnons aujourd’hui à la crise
occasionnée par la Covid-19.
1. Contexte
La seconde guerre mondiale ne nécessite pas ici une élaboration de
son contexte dont nous sommes tous plus ou moins informés.
Cependant, par souci de temporalité, nous nous rappelons une limite qui
s’étend de 1939-1945. Cette ignominie qu’a connu l’humanité a plongé le
monde entier dans un désastre indescriptible dont les témoins
n’aimeraient plus la répétition. Les mots de certains de nos confrères
nous le disent. Voilà le témoignage que nous laisse le P. Baron Pierre :
« le 16 Septembre 1943, par quelles angoisses n’ai-je pas passé ! Je me
suis trouvé en plein sous le bombardement et je vous assure que ce n’est
pas gai ! a [sic] <à> dix mètres de moi les deux vicaires de la paroisse ont
été tués dans leur presbytère. Affreux le spectacle que nous donnait
quand ce fut fini, notre quartier ! » 1. Le tableau de la condition générale
de vie tout au moins dans certains pays de l’Europe nous est ainsi peint
à travers cette expérience partagée de Pierre Baron, membre de la SMA.
Pendant la période donnée, la SMA comptait environ 1041
membres 2 en 1939 et environ 1203 membres 3 en 1948 (période au-delà de
notre limite d’étude). Ces membres étaient en mission dans au moins 7
14
La SMA pendant la deuxième guerre mondiale
2. Défis
Les difficultés posées par l’irruption de la guerre à la gestion de la
Société des Missions Africaines ont été de grande ampleur et aussi de
tous ordres. Elles se sont montrées du coeur du généralat jusqu’aux
missions en passant par la formation qui en a beaucoup souffert. C’est
aussi dans cet ordre que nous allons les examiner.
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Mission en temps de crise
2.2 La Formation
La formation demeure un aspect indéniablement important pour la
survie de toute institution qui plus est un institut de vie apostolique ou
une congrégation religieuse. La période que nous évaluons n’est pas
celle dotée de la quiétude nécessaire d’abord pour la formation des
jeunes missionnaires, ni non plus pour la formation des séminaristes qui
étaient dans les séminaires ouverts dans les terres de mission. Le cas du
Dahomey nous le fera comprendre. Cependant puisque le flux de
missionnaires de cette période venait du continent européen qui était
gravement affecté par la guerre, nous allons commencer par nous y
attarder.
Le premier élément qui était un défi à la formation des
missionnaires était la mobilisation. Cette expression était sur toutes les
lèvres comme celle du confinement dans notre crise actuelle. En France,
particulièrement pour la Province de Strasbourg dont nous prenons
l’exemple, remarquable, à cause de sa proximité avec l’Allemagne, la
situation était des moins désirables. Notre témoin principal ici est le
P. Brediger, supérieur provincial qui déplore les conditions dans
lesquelles il est obligé de gérer la province. Il exprime sa tristesse de ne
pouvoir disposer librement des bâtiments qui servaient pour ses
confrères et pour les étudiants puisque la grande partie des locaux est
occupée : le château du Zinswald par les réfugiés, Saint Pierre par des
malades et Haguenau sous le poids des militaires. Cela n’est pas la fin
de ses misères. Il fait une liste de tous les confrères qui sont mobilisés de
Haguenau, de Vigneulles, de Chanly, du Togo et finit par cette phrase
5 L. PARISOT, Lettre au Supérieur Général, 14 Juillet 1944, AMA 12/ 802.02, n° 22809.
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La SMA pendant la deuxième guerre mondiale
2.3 La Mission
Dans une réflexion sur les défis lancés par la crise humanitaire aux
missions, il est presque impossible de faire passer quelque point avant
celui du manque de personnel. Presque tous les chefs de mission en
avaient l’expérience. Ceux qui n’en avaient pas, le redoutaient. Les
missionnaires n’étaient même pas suffisants au début pour les
nombreuses tâches pastorales qu’ils avaient à accomplir.
Malheureusement, ils ont vu ces activités missionnaires
considérablement réduites à cause de la mobilisation de certains
confrères pour la cause de la guerre. Les missions de l’ancienne AOF
(Afrique-Occidentale Française) semblaient être les plus affectées par
cette situation. Sans les citer à nouveau, les statistiques de Mgr Parisot
22791.
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Mission en temps de crise
9 IDEM, Lettre au Supérieur Général, 14 Juillet 1944, AMA 12/ 802.02, n° 22809.
10 S. HARRINGTON, Letter to Father Slattery, 22 February 1942, AMA 14/1, n° 12848.
« Les transactions monétaires sont maintenant très occultées en ce qui concerne
l’étranger […] même pour des buts missionnaires. À ce regard j’ai dû appeler le
ministère des finances tôt cette année pour faire des arrangements spéciaux pour
le Libéria. Le compte du Dr. Collins à Cork a été gelé et il n’était pas autorisé à
recevoir de l’argent d’Irelande » (Traduction personnelle).
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La SMA pendant la deuxième guerre mondiale
3. Réponses et Adaptations
Il est important de mettre ici en exergue quelques points des
réponses qui ont été ceux apportés à la crise que nous venons de
présenter. Le premier, nous l’avions déjà susmentionné est celui de la
délégation en ce qui concerne la gestion de la crise dans l’administration
6.
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n° 29040.
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La SMA pendant la deuxième guerre mondiale
laquelle participent les hommes. Elle semble ne pas être à tous les
rendez-vous, mais, elle apparaît l’une des solutions privilégiées par les
confrères qui ont vécu cette crise.
Le père Aupiais, dans un article intitulé « l’exemple des mobilisés »,
nommait cette détermination la force d’âme. Il relève l’annihilation de
l’individualité et de l’individuation qu’a subi le confrère mobilisé dans
cet espace où il n’est qu’identifié à un "on" commun 14. Pourtant ils ont su
là où ils étaient, revêtir le manteau de l’incarnation missionnaire qui leur
permit malgré leur rang de s’adapter sans plainte à leur condition de vie.
Ils ont appris à garder la foi dans un effacement du "moi" qui ne peut
que nous faire penser au mouvement d’abaissement du Christ lui-même
loué par l’hymne de Ph 2, 6-11. Cet esprit de sacrifice ne peut que nous
projeter dans la crise contemporaine que nous vivons et qui est liée au
virus de la Covid-19.
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Mission en temps de crise
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“Frères d’armes” (1939-1945)
Roberta Grossi
Un temps de crise
Quel lien entre la Seconde Guerre mondiale et la pandémie que,
dans ces derniers mois, traverse le monde ? Apparemment aucun lien.
Cependant, on peut réfléchir sur la manière dont la SMA a vécu et vit
ces moments à partir du concept de "crise".
Ce regard nous rapproche de la pensée de Michel de Certeau selon
laquelle une lecture du passé est guidée par une lecture du présent 1 et
notre présent est un temps de crise. Du grec krino : séparer, choisir, ce
concept renvoie à une dimension définitive des décisions. En effet, dans
le domaine de la médicine il est lié à l'issue finale d'une maladie, au
moment de suspension entre la vie et la mort. Dans le Nouveau
Testament sa signification semble s'étendre pour englober toutes les
situations de prise de décision, soit de la vie de l'individu, soit la
communauté. Avec les Lumières le terme enregistre une nuance
supplémentaire, liée à la philosophie de l'histoire. On parle donc de
l'histoire comme d'une crise permanente ou du dépassement d'un seuil
temporel. Si bien dans la sphère chrétienne qu'en dehors, une pression
temporelle croissante semble sous-tendre, c'est-à-dire une avance du
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Frères d’armes (1939-1945)
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Le Marxisme-Léninisme au Dahomey-
Bénin : un défi pour la Foi Chrétienne
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Le Marxisme-Léninisme au Dahomey-Bénin
1° À Bembérékè, 1969-1976
Une attitude présidentielle anachronique. La dernière tournée du
Président en exercice semble être de s’assurer le soutien de toutes les
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Mission en temps de crise
forces militaires de la Nation car peu après son passage chacun de nous,
dans toutes les missions du Nord-Est, nous recevons la visite et du
commandant de gendarmerie et du commandant du camp militaire,
venus confidentiellement, chacun à son tour, nous assurer de la
protection indéfectible des forces de sécurité nationales.
Puis sur le chemin du retour Monsieur le Président et son épouse
s’arrêtent à la maison pour une visite de courtoisie et un moment
d’amitié fraternelle autour « d’une bonne bière fraiche ». Mais il y
convoque aussi Monsieur le Sous-Préfet qui, devant moi, reçoit un
abattage qui me sidère ! et dans la foulée, sont amenés manu militari les
« deux étudiants » de la sous-préfecture Marc en médecine et Roger en
histoire … Après leur départ je me permets de souligner, à notre Ami,
combien je suis consterné par les propos anachroniques qu’il vient de
tenir à la génération montante et je lui dévoile mon amertume à l’égard
des sanctions injustes qu’il leur inflige. Madame abonde dans ce sens :
« Écoute ce que dit le Père ».
Marc s’exile au Togo pour poursuivre en paix ses études de
médecine. Roger n’ira pas en France pour son doctorat. Quelques
semaines plus tard le gouvernement tombe. Il y avait vraiment anguille
sous roche ! Roger devient l’un des grands du nouveau pouvoir qui
bascule, peu après, dans le Marxisme-Léninisme pour libérer le pays
d’un certain nombre d’archaïsmes politiques. Par bonheur nous gardons
d’excellentes relations avec Marc et Roger.
La délation. Le nouveau régime s’installe franchement dans la
dictature, le mensonge, la culture de la haine, et évidemment la délation.
Souvent, entre confrères, nous partageons sur l’influence anti-
pédagogique que ces éléments peuvent avoir sur les enfants et les jeunes.
Et moi-même j’essaye vainement d’attirer l’attention sur un élément, ô
combien néfaste ! de la délation qui déforme tellement les jeunes
consciences. Plusieurs cas de disparition de papa ou de maman m’ont
été signalés à la suite de propos innocents arrachés à leurs jeunes
enfants : interpellation nocturne, et disparition pure et simple. Des
confrères me disent que je galège, j’aimerais tant qu’ils aient raison.
Les homélies. Figurez-vous que nous sommes surveillés, nous
prêtres ! espionnés nous expatriés ! Chacun réagit à sa manière, selon
son tempérament. Mais nous devons être très prudents. L’un de nous
avait l’habitude de se confier tout simplement à un ami avec qui il vivait
un service social merveilleux dans le domaine de la santé (c’est trop
lourd pour cet ami qui, un jour sans le vouloir, a trahi !) Un autre
confrère, des plus minutieux, écrivait mot à mot chacune de ses homélies
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Le Marxisme-Léninisme au Dahomey-Bénin
et ne s’en éloignait jamais d’un iota (il y a des iota aussi en français !).
Quant à moi me sachant épié, je ne donnais mon opinion et n’esquissais
des conseils qu’en langue locale, ou alors avec beaucoup de courtoisie.
C’est ainsi qu’un jour après l’homélie un monsieur, notre postier, vient
me trouver et me dit : « vraiment si je dénonce ce que tu viens de dire je
serai pris pour un imbécile » et moi de lui rétorquer « dénonce vite, car
l’autre espion a déjà communiqué mon prêche en haut lieu, ne sois pas
en reste ». L’Évangile du jour venait de m’offrir l’opportunité de
remercier la Révolution d’inviter des anciens chrétiens à revenir à
l’Église les mandatant pour écouter et répercuter nos dires par des
rapports circonstanciés.
L’alphabétisation. L’un de nos moyens d’approche du peuple est un
service inédit au Borgou : depuis la colonisation, la scolarisation des
enfants semble avoir rencontré un milieu récalcitrant ; la mission n’a
guère connu plus de succès. Par contre l’alphabétisation des adultes en
langue locale suscite tout de suite beaucoup d’intérêt à tel point que la
Révolution Marxiste s’adjuge le droit de nous interdire de nous en
soucier car elle est assez grande pour prendre le relais, ce qu’elle fait
d’ailleurs fort bien.
Sur l’ensemble du territoire l’Église est spoliée de toutes ses écoles
primaires et de la plupart de ses collèges. Au Nord il nous reste
l’alphabétisation des adultes. La Révolution apprécie avec pertinence
pensant qu’elle est encore un lieu de grande influence, humaine, voire
spirituelle. Elle s’en octroie la propriété ! Mais elle agit sans penser à la
réaction des animateurs-répétiteurs qui, chaque jour ou presque,
continuent de venir apprendre leur leçon auprès de nous les initiateurs,
en toute discrétion. Les apparences sont sauves, l’instruction et
l’éducation suivent leur cours.
Quelles lectures offrir à un peuple qui commence de savoir lire et
écrire, et qui aime ce nouveau moyen de communication ? Grâce au
savoir-faire de la commission nationale de linguistique les nouveaux
alphabétisés peuvent lire un mensuel appelé « Kparo – le héraut », aussi,
avides de lecture, nombreux sont ceux qui maintenant lisent
quotidiennement la Parole de Dieu qui est à leur service par le Nouveau
Testament de Père Léonard ou par la Bible de l’Église Évangélique. Nous
en profitons pour distribuer dans nos communautés des commentaires
des textes liturgiques de chaque dimanche. Les ronéos tournent à fond
dans chaque paroisse ! L’évangélisation prend un nouveau visage. Merci
à Dieu et à la Révolution Marxiste-Léniniste.
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Mission en temps de crise
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Le Marxisme-Léninisme au Dahomey-Bénin
3° À Wenu 1980-1983
Après un temps de retrait j’accueille avec joie la proposition de mon
évêque de venir comme pasteur à Wenu-Kpakeru. Comme tous les
confrères je suis vraiment limité dans mes déplacements pour la visite
des villages éparpillés sur plus de 2000 km². La population est des plus
accueillantes, mais je dois être prudent. Le « camarade chef de district »
(sous-préfet), ne se prive pas à l’occasion de me rappeler les restrictions
imposées par le régime. Comment relever le défi et continuer de visiter
ceux que le Seigneur nous confie et qui, frustrés par les limites imposées
par l’idéologie, aperçoivent un plan de salut à l’écoute de l’éternelle
nouveauté qu’est l’Évangile ?
Une aubaine se présente : le directeur du collège d’État qui s’ouvre
sur le territoire paroissial n’a que deux professeurs ; N’Dali, quoique
carrefour commercial, est encore un petit village peu convoité comme
lieu de travail par les fonctionnaires. Me voilà salarié de l’académie
comme enseignant de français au service d’une classe de 120 élèves de
sixièmes (40 x 3). Mon évêque accepte que je vive une telle forme de
présence auprès de la jeunesse ; considéré comme leur doyen par les
directeurs des petites écoles villageoises, je suis invité à visiter chacun
de leurs établissements ; j’en profite pour me rapprocher des paroissiens.
L’honneur est sauf pour tout le monde ! Je sais que dans le pays d’autres
ont vécu de tels engagements par exemple Jean pour enseigner la
philosophie.
Quarante ans plus tard on retrouve plusieurs de ces jeunes en
responsabilité dans différentes instances civiques et ecclésiales du pays.
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Le Marxisme-Léninisme au Dahomey-Bénin
4/I, 182.
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La vocation missionnaire de Saint
Charles de Foucauld
39
Mission en temps de crise
Istituto internazionale di ricerca sul volto di Cristo (ed.), Il volto dei volti di Cristo,
Ed. Velar 2002, vol. XVI, 181-191.
3 En fait preuve la lettre du 7 mars 1902 à son ami Gabriel Tourdes et celle à Mgr
Caron du 8 avril 1905 ou encore celle du 22 novembre 1907 à l’abbé Huvelin, son
directeur spirituel. Ce qui fait difficulté, à mon avis, ce n’est pas son intention
mais la nécessité de trouver dans la pastorale la place de Nazareth. Alors, durant
des années, il se dit « moine », « missionnaire », « missionnaire isolé », « moine-
missionnaire ». Il l’écrit au P. Antonin, trappiste, le 13 mai 1911 ; à H. de Castries
le 14 août 1901 ; à son Préfet Apostolique, Mgr Guérin, le 10 juin 1903 et encore
le 2 juillet 1907 ; à sa cousine, Mme de Bondy, le 16 septembre 1905 ; sans oublier
la lettre à Mgr Bonnet, évêque de Viviers, le 28 mai 1904.
4 C. DE FOUCAULD, Huvelin, 205.
40
St Charles de Foucauld
8 IDEM, 17.
41
Mission en temps de crise
9 Dans l’Article XXVIII du Directoire qu’il écrit pour ses futurs disciples, il fait la
liste des « Moyens généraux et particuliers pour la conversion des âmes éloignées de Jésus,
et spécialement des infidèles ». Pour la conversion des âmes et spécialement pour celle
des infidèles, les frères et sœurs emploieront surtout les dix moyens suivants :
« 1° le Saint Sacrifice de la Messe, en accroissant le nombre des Messes célébrées chez
les infidèles, en faisant appliquer des Messes pour leur conversion, et en priant
dévotement pour cette conversion pendant le Saint Sacrifice ;
2° le Très Saint-Sacrement, en accroissant le nombre des Tabernacles chez les
infidèles, en développant en pays infidèle le culte de la Sainte Eucharistie, et en priant
dévotement devant le Très Saint Sacrement pour la conversion des infidèles ;
3° la sanctification personnelle, car l’âme fait du bien dans la mesure de sa propre
sainteté ;
4° la prière ;
5° la pénitence, c'est-à-dire le sacrifice, l'acceptation des croix envoyées par Dieu et
les actes de mortification volontaire autorisés par le directeur spirituel ;
6° le bon exemple, en étant des modèles de vie évangélique, en faisant voir l'Évangile
dans leur vie, en étant des Évangiles vivants, tels qu’en les voyant on sache ce
qu'est la vie chrétienne, ce qu'est l'Évangile, ce qu'est Jésus ;
7° la bonté, pour se faire aimer et faire aimer tout ce qui est d'eux, leur religion et
Jésus leur Maître ;
8° l'établissement de rapports d'amitié avec les personnes, avec le soin constant
de faire du bien à leurs âmes, allant à ceux qu'on veut convertir et
particulièrement aux infidèles, se mêlant à eux et se liant étroitement d'amitié
avec eux ;
9° l'aide prêtée aux prêtres, religieux et religieuses qui travaillent au salut des
âmes dans le lieu où l'on est, et particulièrement à ceux qui y travaillent à la
conversion des infidèles ;
10° l'aide prêtée aux prêtres, religieux et religieuses qui travaillent au salut des
âmes hors du lieu où l'on est, et particulièrement à ceux qui travaillent à la
conversion des infidèles » C. DE FOUCAULD, Règlements et Directoire (Tome XI et XII
de l'édition intégrale) : (de 1896 jusqu'en 1916), M. BOUVIER (éd.), Nouvelle Cité
1995, 591-592.
42
St Charles de Foucauld
car « en vivant sous une règle et conduisant une vie orientée à la perfection, ils
sont les plus aptes à parcourir le monde et y prêcher l’Evangile ‘verbo et
exemplo‘ ».
12 Aujourd’hui PISAI avec son siège à Rome, toujours confié aux Pères Blancs.
43
Mission en temps de crise
442.
44
St Charles de Foucauld
Cette préparation silencieuse pour accueillir Jésus CDF l’a faite par
le « bon exemple », c’est-à-dire, selon ce qu’il écrivait dans le Directoire
pour ses frères, en cherchant d’être toujours « des modèles de vie
évangélique, en faisant voir l'Évangile dans leur vie, en étant des Évangiles
vivants, tels qu’en les voyant on sache ce qu'est la vie chrétienne, ce qu'est
l'Évangile, ce qu'est Jésus » 16.
Ce n’est pas un bon exemple moral mais plutôt un bon exemple
christologique : « Être modèle de vie évangélique, c’est-à-dire de Jésus »
car « le prêtre est un ostensoir, son rôle est de montrer JÉSUS ; il doit
disparaitre et faire voir JÉSUS » 17. Tout de suite après, pour ne pas rester
dans le vague, il ajoute : « M’efforcer de laisser un bon souvenir dans
l’âme de tous ceux qui viennent à moi » 18.
16 Ivi, note 9.
17 C. DE FOUCAULD, Carnets de Tamanrasset, 188.
18 Ibidem.
45
Mission en temps de crise
21 IDEM, 443.
22 C. DE FOUCAULD, Règlements et Directoire, 77.
23 IDEM, 228.
46
St Charles de Foucauld
b) Prière
Fr. Charles se sentait appelé à imiter Jésus dans sa vie à Nazareth,
là où Jésus avait vécu pendant 30 ans. Il a été, quand-même, Sauveur
dans une manière cachée, c’est-à-dire pas visible aux yeux humains,
mais réellement efficace et divine : la prière a une fécondité apostolique
et elle est une vraie forme d’apostolat, un véritable apostolat. Il écrivait
à Louis Massignon :
« Pensez beaucoup aux autres, priez beaucoup pour les autres.
Vous dévouer au salut du prochain par les moyens en votre pouvoir,
prière, bonté, exemple, etc.… c'est le meilleur moyen de prouver à
l'Époux divin que vous l'aimez : « tout ce que vous faites à un de ces
petits, c'est à moi que vous le faites » ... l'aumône matérielle qu'on fait à
un pauvre, c'est au créateur de l'Univers qu'on l’a fait, le bien qu'on fait
à l’âme d'un pécheur, c'est à la pureté incréée qu'on le fait... » 25.
À ceux qui demandaient comment œuvrer au milieu des Touaregs,
il témoignait :
« C'est l'évangélisation, non par la parole, mais par la présence
du Très Saint Sacrement, l'offrande du divin Sacrifice, la prière, la
pénitence, la pratique des vertus évangéliques, la charité - une charité
fraternelle et universelle partageant jusqu'à la dernière bouchée de
pain avec tout pauvre, tout hôte, tout inconnu se présentant et
recevant tout humain comme un frère bien-aimé » 26
47
Mission en temps de crise
27 Dans un premier moment il la juge une langue facile, mais au fur et à mesure
qu’il l’étudie, il s’aperçoit de ses difficultés et de sa richesse ; alors, bien conscient
de son importance, il fait appel à des spécialistes et il profitera de toutes les
occasions pour recueillir les poèmes et les contes. Il mettra par écrit des textes
jusque là transmis uniquement par oral et les traduira en français. Il recueillera
aussi 6000 poésies et tout cela lui permettra de composer un dictionnaire touareg
de 4 volumes « œuvre linguistique jugée insurpassable par les berbérologues »
(Hugues D., Petite vie de CDF, 119) et qui fait encore autorité aujourd’hui. Il
travaillera onze heures par jour pendant onze ans et dans des conditions telles
pour faire de son travail une vraie œuvre ascétique. Cf. A. CHATELARD, "CDF
linguista, uno scienziato suo malgrado" Études et documents berbères, 13 (1985)
145-176.
28 Cf. C. DE FOUCAULD, Correspondances Sahariennes, 758-759.
explorateur du Maroc.
48
St Charles de Foucauld
49
Mission en temps de crise
50
St Charles de Foucauld
51
Colonisation et Cultures
1. La colonisation moderne
« La liberté commence où l’ignorance finit. » V. Hugo
Nous distinguons ici les divers aspects, souvent imbriqués les uns
dans les autres, de la colonisation qui n’est pas une invention des
derniers siècles mais existe depuis des millénaires.
Elle est d’abord de peuplement, telle la migration des Européens en
Amérique qui soumettent les populations autochtones, font sécession
d’avec leur mère patrie, et, importent des esclaves quand la main
d’œuvre locale fait défaut ; l’Afrique en est alors le principal
pourvoyeur. Ou encore l’Algérie à partir de 1830.
53
Mission en temps de crise
des larmes.
3 N. BANCEL
54
Colonisation et Cultures
4 Ibidem, 70.
5 F. AUPIAIS, La civilisation et les excès de la Colonisation, SMA Sankofa 2018, vol. 8.
55
Mission en temps de crise
2. Anthropologie et cultures
« Il n’y a rien de plus naturel que le culturel ».
Définitions
Dans son acception française, l’anthropologie se définit comme
l’étude et la présentation des lois qui gouvernent les personnes
humaines, qui régissent leurs différentes sociétés, qui vivent ces lois
dans leurs cultures respectives.
Certains recherchent une théodicée, une sagesse universelle ; au
risque de paraître relativiste, disons que c’est prendre une voie sans
issue ! Chaque culture a sa vision de Dieu, depuis sa négation pour les
athées, jusqu’à son incarnation pour les chrétiens, elle a sa morale, sa
philosophie, sa sagesse.
À côté de l’anthropologie, on trouve la sociologie ; elle étudie l’être
humain dans sa dimension sociale, qui nait dans une famille insérée
dans un groupe ; toute recherche, a ainsi un aspect social. L’objet de leur
étude étant le même, il peut parfois être difficile de les distinguer.
56
Colonisation et Cultures
57
Mission en temps de crise
58
Colonisation et Cultures
59
Mission en temps de crise
3. Christianisme et Inculturation
Le Christianisme ne fait pas exception à ces règles culturelles. Avant
de parler de l’époque contemporaine, nous présentons la manière dont
le Christ et l’Église primitive se sont situés face à la culture juive et aux
nations. Les auteurs du Nouveau Testament vivaient dans cette culture,
avec leur vision du monde visible et invisible, et leur expérience
personnelle du Christ ; chacun en donne un aspect véridique et
complémentaire.
60
Colonisation et Cultures
61
Mission en temps de crise
1985, 89.
62
Colonisation et Cultures
pour étoffer les émissions religieuses qu’il animait à la radio. Ces émissions
étaient très suivies par les Bariba et les touchaient profondément » 9.
« C’est à sa suite que les confrères sma ont continué à organiser les
sessions de griots… sur les thèmes de la naissance de Jésus, ses paraboles, ses
miracles, la passion et la résurrection … Nous suivions sa méthode pour
expliquer l’Évangile. Nous allions dans (des) villages faire une veillée sur le
thème travaillé. C’étaient des moments intenses d’évangélisation où les gens
semblaient communier pleinement, car c’était dans leur culture et dans leur
langue ».
Excellent exemple d’inculturation de méthode catéchétique, initiée
par un Africain, adoptée par des Européens, pour le bonheur des
auditeurs, qui mémorisent le texte, le méditent, le ruminent, diraient
certains.
Comme sujets de catéchèse, notons les très importants rapports
sociaux : se considérer comme frères (et sœurs), quelle que soit la race,
l’origine. Cela débouche au Bénin sur la création d’associations de
réflexion et d’action comme le CPVCM (Chrétiens pour changer le
monde), fondé à Cotonou par Albert Gandonou, ou de centres de soins
de santé mentale, comme l’Association Saint Camille de Grégoire
Ahongbonon.
Et encore, l’eschatologie et la connaissance de Dieu, du Christ et de
l’au-delà. Parmi les noms de naissance en langue gun à Porto-Novo
(Bénin), j’ai trouvé le nom Mêyisêxue qui signifie « Qui est allé à la maison
de Dieu ? », pour dire que personne n’en est revenu après son décès pour
nous le décrire. Pour moi, cela fait écho à cette déclaration du Christ à
Nicodème (Jn 8, 13) :
Nul n’est monté au ciel
hormis celui qui est descendu du ciel,
le Fils de l’homme qui est au ciel.
C’est là que nous connaitrons Dieu totalement dans un face à face
éternel. Quant à une sagesse universelle, il faut se référer à Saint Paul (1
Cor 1, 17-25).
63
Mission en temps de crise
64
Notre
65
COVID-19 et Redécouverte du
Ministère de Gardiennage
67
Mission en temps de crise
S’il est vrai qu’il parait trop tôt pour tirer les conséquences de cette
pandémie, il n’en demeure pas moins que nous réfléchissions pour tirer
quelques leçons. Toute crise, fut-elle une pandémie, même si elle est
dangereuse, ouvre toujours un vaste champ d’opportunités. COVID-19
n’est pas une exception. De notre point de vue, on peut saisir cette
situation pour revivre deux dimensions essentielles de notre ministère
en tant que missionnaires.
68
Redécouverte du Ministère de Gardiennage
abandonné ce qui alimente, soutient et donne force à notre vie ainsi qu’à
notre communaut » 1.
Alors que nous reste-t-il sinon la seule certitude qui vaille, Dieu.
Que nous reste-t-il sinon crier vers Celui qui peut tout ? « Maitre, nous
périssons ; cela ne te fait rien ? » Tel est le cri que les apôtres laissent
jaillir de leur cœur vers Jésus qui est dans la même barque qu’eux,
dormant á l’arrière. Pris dans la tempête alors qu’ils passaient á l’autre
rive, les disciples de Jésus, fins connaisseurs de la mer, pensent s’en
sortir seuls. Mais leurs connaissances seules les emmènent tout droit
dans le gouffre de la mer et ils le savent. Ils vont périr. Un seul recours
leur reste : crier vers le Maitre. Ce qu’ils font lorsqu’ils se rendent compte
de leurs limites.
Comme la tempête, cette pandémie nous met à nu et le constat amer
mais salutaire se fait : l’homme n’est pas la mesure de toute chose.
« L’homme n’est pas un absolu, comme si le moi pouvait s’isoler et se
comporter selon sa propre volonté. Nous sommes des créatures et donc
dépendants du Créateur » 2. Il nous reste à faire un retour et un recours á
notre source. Cette source d’énergie qui nous alimente et nous revigore
n’est autre que le Dieu de Jésus-Christ. Il est plus que jamais nécessaire
que, les messagers de Dieu que nous sommes, nous soyons á l’avant-
garde du mouvement de reconnexion sur cette source d’énergie
intarissable. La crise de la pandémie donne cette opportunité.
2020.
69
Mission en temps de crise
70
Redécouverte du Ministère de Gardiennage
4 Ibidem.
5 PAPE FRANÇOIS, Lettre Apostolique Patris corde (8 Décembre 2020), n. 5.
71
Mission en temps de crise
72
Résilience
I. Le phénomène de la résilience
Cet article porte sur la résistance, la capacité à rebondir après avoir
traversé des difficultés qui auraient pu briser une personne. Il est
également question de s'épanouir, non seulement en dépit des difficultés
que nous rencontrons, mais aussi et surtout grâce à elles.
Si vous jetez un œuf au sol, il se cassera ; mais si vous lancez une
balle de tennis sur le même sol, elle rebondit ; plus fort vous la lancez,
plus haut elle rebondira. La balle de tennis est un symbole de la
résilience : les hommes rebondissent à la vie et se portent bien, ou même
s'épanouissent après avoir vécu des événements traumatisants.
Un exemple de personne résiliente est Sainte Joséphine Bakhita.
Elle a vécu de nombreux événements potentiellement traumatisants
comme le fait d'être enlevée de chez elle par des étrangers, d'être
violemment battue et d’être délibérément scarifiée (elle avait 114
incisions délibérément faites par sa maîtresse). Compte tenu des
événements traumatisants qu'elle a vécus, certains psychologues
estimaient que Bakhita aurait dû être psychologiquement effondrée.
Mais au contraire, Bakhita était non seulement bien portante, elle a
apporté le réconfort et la guérison à de nombreuses personnes grâce à sa
présence attentive.
73
Mission en temps de crise
74
Résilience
fortes qui nous dépassent, lorsque nous devons faire face à une tâche
pour laquelle nous sentons nos compétences et nos ressources
insuffisantes.
Une vision négative de la situation ou même du stress lui-même
tend à en aggraver les signes et les symptômes.
2. L'épuisement professionnel.
L'épuisement est symbolisé par une pile qui s'est déchargée et donc
inutilisable. Il se caractérise par une fatigue constante, le découragement,
la déception, l’amenuisement de la motivation. Il existe souvent des
maladies physiques causées par la tension émotionnelle, les problèmes
de sommeil, la frustration, la confusion, le cynisme, l'apathie, les piètres
performances et le sentiment de manque d'accomplissement. Les
missionnaires exténués peuvent se sentir malades de la mission.
75
Mission en temps de crise
76
Résilience
menace pour notre ennemi et qu'il peut nous laisser tranquilles puisque nous ne
bougeons pas. Rester figé peut également nous aider à nous engourdir ou même
à nous évanouir émotionnellement, afin que nous ne ressentions pas la douleur
émotionnelle de l'événement traumatisant. Dans ce cas, nous pouvons continuer
à survivre, ou même à sauver d'autres personnes. De nombreuses personnes qui
restent figées émotionnellement ne semblent pas être affectées par des émotions
qui affecteraient la plupart des autres personnes. Par exemple, une personne
torturée peut avoir le visage vide et sans expression.
3 Il s'agit d'une série d'exercices que l'on peut faire à la maison. Ils sont
spécifiquement conçus pour libérer les tensions qui peuvent avoir été
emprisonnées dans le corps à la suite d'un traumatisme. Il permet de traiter un
traumatisme sans même avoir à en parler. Bien qu'il soit possible de le faire seul
à la maison, il est conseillé de suivre au moins une formation avec une personne
qui sait comment le faciliter. Vous pourrez ensuite le faire vous-même plus tard,
Cf GLOBAL LEADERSHIP TEAM, Tension & Trauma Releasing Exercises,
https://traumaprevention.com/ (Page consultée le 2 Mars 2021).
4 P. DAL GUM, Capacitar international,
77
Mission en temps de crise
3.2.1. Signification
Une icône de la résilience par le discernement du sens de la vie ou
de la souffrance est Victor Frankl, un survivant des camps de
concentration. D'après sa propre expérience et en observant les autres, il
a découvert que les gens étaient plus résistants, même aux traitements
https://www.youtube.com/watch?v=_92rfEmXKjA
(Page consultée le 2 Mars 2021).
7 L. CHAMBERLAIN, Capacitar. Emergency tool kit training,
https://www.youtube.com/watch?v=nYepPQwtFds&t=57s
(Page consultée le 2 Mars 2021) ; un document PDF peut être téléchargé de
https://capacitar.org/wp-content/uploads/2020/06/English-EmKit.pdf
8 P. DAL GUM, Capacitar international. Tai chi,
https://www.youtube.com/watch?v=r8QgW7-xXxg (
Page consultée le 2 Mars 2021).
9 HUMAN PERFORMANCE RESOURCES, https://www.hprc-online.org/social-
fitness/family-optimization/progressive-muscle-relaxation-mind-body-
performance-strategy (Page consultée le 2 Mars 2021).
78
Résilience
les plus durs, s'ils avaient une raison de continuer à vivre, un sens à leur
vie. Pour cette raison, Victor avait lui-même un manuscrit qu'il
souhaitait voir publier.
Le sens qu’apporte la résilience doit être plus grand que notre moi
individuel, il doit être positif (pas contre, mais pour, lui). Le sens le plus
grand de la vie se trouve en Dieu et dans son Royaume. Saint Ignace
nous dit que nous sommes créés pour louer, vénérer et honorer Dieu.
Des personnes comme Paul et Jésus définissent même leur identité et
leur but dans la vie en termes de faire la volonté de Dieu. Paul dit que
pour lui, vivre ou mourir, c'est le Christ.
Victor dit que lorsque nous rencontrons la souffrance, nous devons
lui donner un sens : "D'une certaine manière, la souffrance cesse d'être
une souffrance au moment où elle trouve un sens, comme la signification
d'un sacrifice". Il exprime cela par une image : « Ce qui doit donner de
la lumière doit supporter la consumation » Nous voyons souvent cela
chez les martyrs. Ils donnent à leur injuste torture un sens de « martyre »
ou de « témoignage d'amour et de foi en Dieu », et donc ils le supportent
assez bien.
3.2.2. Méditer / contempler consciemment.
Être présent dans l'immédiat, ici et maintenant, corps et esprit,
apporte le calme. Les prières spirituelles et religieuses offrent de bonnes
occasions de se concentrer sur Dieu et sur sa Parole.
3.2.3. Rituels et sacrements
Lorsqu'ils sont célébrés avec foi, les rituels et les sacrements nous
prouvent qu'un état souhaité a été atteint. La confession soulage les
sentiments de culpabilité qui sont courants dans le deuil dû à une perte.
Le sacrement des malades apporte la guérison et la résilience.
3.2.4. Ancrage sur une base plus profonde et solide.
Jésus nous dit que si nous construisons notre vie sur le fondement
le plus profond qu’est sa parole, alors nous serons solidement stables
même lorsque les vents et les tempêtes du traumatisme se déchaîneront
contre nous.
3.2.5. Embrasser la croix
Job a accepté la condition humaine selon laquelle il est né et mourra
nu, et il n'exigera donc pas d’être toujours riche et en bonne santé. Cette
acceptation du potentiel humain face à la pauvreté, la maladie, la
douleur... l'a rendu résiliant. Lorsque nous embrasserons notre croix,
nous n'aurons qu'une seule douleur à supporter, celle qui est inévitable
et qui provient de la condition humaine, comme le deuil. Lorsque nous
refusons la croix, nous souffrons de deux choses : le ressentiment à
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Mission en temps de crise
80
Résilience
81
Mission en temps de crise
ses pensées, ses actes, son imagination, ses souvenirs, ses styles
relationnels, ses effets sur la santé... à propos de la perte. Lorsque nous
prêtons attention à une expérience particulière de deuil, et que nous
l'exprimons de manière appropriée, cela change, faisant avancer le
processus de deuil, jusqu'à ce qu'il atteigne un point où il ne nous
empêche plus de fonctionner plus ou moins normalement.
Les moyens les plus courants de créer du temps pour le deuil
consistent à dire au revoir aux personnes dont nous nous séparons, à
demander ou à accorder le pardon, à exprimer sa gratitude, à exprimer
son amour, à assister aux funérailles ou à d'autres rituels liés au
processus de perte, à se rendre sur la tombe, à raconter l'histoire et à
exprimer ses sentiments face à la perte.
82
Résilience
11 Outre les catastrophes, une liste d'autres pensées malsaines peut être obtenue
à l'adresse suivante : Checklist of cognitive distortions,
https://arfamiliesfirst.com/wp-content/uploads/2013/05/Cognitive-
Distortions.pdf
(Page consultée le 2 Mars 2021).
12 Ibidem.
83
Mission en temps de crise
www.getprepared.gc.ca; Cfr.
https://www.getprepared.gc.ca/cnt/rsrcs/pblctns/yprprdnssgd/yprprdnssgd-
eng.pdf
(Page consultée le 2 Mars 2021).
84
Résilience
Conclusion
La vie est douce, mais elle est souvent épicée par des expériences
amères et aigres. Nous savourons le goût riche de la vie lorsque nous la
prenons avec toutes ses saveurs. Lorsque nous rencontrons les
inévitables épices amères de la vie, nous devons être résilients, pour
pouvoir rebondir dans une vie plus pleine et meilleure, car "ce qui ne te
tue pas te rend fort". Pour être résilient, nous devons prendre soin de nos
pensées, de nos sentiments, de notre corps, de notre esprit et de nos
relations sociales.
Les missionnaires doivent être résilients non seulement pour eux-
mêmes, mais aussi pour mieux servir les personnes avec lesquelles ils
vivent et qu'ils servent.
85
Attention aux confrères : Le rôle
premier des supérieurs d’entité
1 Rapport confidentiel sur la Société des Missions africaines, présenté à S.E. Cardinal
87
Mission en temps de crise
2 PAPE FRANÇOIS, Lettre Encyclique Fratelli tutti (03 Octobre 2020) 3, 106 :
« réaliser combien vaut un être humain, combien vaut une personne, toujours et
en toute circonstances. »
88
Attention aux confrères : Le rôle premier des supérieurs
89
Mission en temps de crise
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Attention aux confrères : Le rôle premier des supérieurs
Lanceurs de processus
Le pape François insiste sur le fait que les Instituts religieux doivent
être des « lanceurs de processus » 6, des gens qui entraînent les autres
dans un grand mouvement. Il regrette souvent que nous ayons la
tentation de vouloir couvrir tout un territoire en le dominant, croyant
l’avoir ainsi évangélisé comme au temps de la « chrétienté ».
Nous devons vivre au milieu des gens, qu’ils soient interpellés et
qu’un certain nombre, comme par contagion, rentrent dans notre
manière de faire ou inventent et démarrent autre chose mais toujours
dans le sens de l’Évangile. Ceci amène - 1) d’abord à être tournés vers
l’avenir et - 2) ensuite être attentifs à voir la présence de l’Esprit dans les
autres.
Lancer des processus, c’est aussi savoir se limiter dans le travail
et privilégier les aspects où nous pourrons le mieux possible rendre ce
Royaume présent. C’est aussi être attentifs à ce que font les autres pour
nous situer en complémentarité avec eux.
Le rôle des supérieurs dans ce système c’est d’encourager chacun à
se donner dans le sens et les limites de ce projet…
6 PAPE FRANÇOIS, Visite pastorale du Pape François. Rencontre avec les prêtres et les
religieux (25 Mars 2017),
http://www.vatican.va/content/francesco/fr/speeches/2017/march/documents/p
apa-francesco_20170325_milano-sacerdoti.html
91
Mission en temps de crise
92
Attention aux confrères : Le rôle premier des supérieurs
y ait une différence de statut entre les confrères d’origine qui peuvent se
voir instinctivement « propriétaires » de la Mission et de l’entité et ceux
qui viennent d’ailleurs comme « étrangers ». Il y a là un défi énorme
pour les supérieurs d’entité : faire que chacun soit chez lui, que l’on soit
du pays ou non, et que l’on profite de la synergie inhérente à ce système.
On n’apportera jamais assez de soins à réunir tous les confrères
ensemble, à revisiter ensemble le plan d’action de l’entité pour que ça
devienne un projet de tous. C’est un élément fondamental pour que
chacun donne le meilleur de lui-même et pour dépasser des clivages
sous-jacents dans notre inconscient où les uns peuvent se sentir
« propriétaires » de la mission et les autres « étrangers ».
L’interculturalité pour nous devient un signe particulièrement
parlant et un témoignage dans un monde qui établit des frontières. Cette
relation continuelle à la culture de l’autre, du frère qui annonce
l’Évangile avec moi nous permet d’être davantage attentifs à la culture
du peuple au milieu duquel nous nous trouvons : d’une certaine
manière ce sont nos regards croisés sur une culture donnée qui nous aide
à la connaître. Après la connaissance, vient la familiarité et enfin l’amour
de cette culture qui nous la fait regarder avec des yeux d’un membre de
la famille.
Dépasser nos différences de culture ou d’origine touche notre vie
quotidienne et nous oblige à valoriser les autres. Les supérieurs doivent
voir concrètement que les préjugés et les a priori ainsi que les
regroupements par affinité soient dépassés. Cela suppose un travail à la
base pour que les équipes vivent cette internationalité et interculturalité
comme une chance et non un poids et que nous soyons ensuite au service
d’une inculturation vraie.
93
Mission en temps de crise
temps, ça nous donne une grande force pour construire des projets qui
nous dépassent et vont se prolonger après nous.
Cette manière de penser n’est pas naturelle à l’humain, la tentation
est grande de vouloir lancer « son œuvre » en ne pensant pas à l’avenir
mais à sa propre gloire. Le rôle des supérieurs est d’essayer de dépasser
les limites de temps pour nous remettre, avec le Christ, devant un avenir
qui ne nous appartient pas.
94
Attention aux confrères : Le rôle premier des supérieurs
95
Mission en temps de crise
l’a souligné le P. Michael O’Shea. Une chose leur rendait ceci plus facile,
c’est qu’ils étaient portés par la mentalité et la spiritualité du temps,
comme un surfeur sur la vague et quand le missionnaire avait pris le
bateau, il était plus ou moins condamné à vivre son engagement ! En
même temps, les premiers missionnaires ont vu comment l’Évangile
changeait la vie des gens et comment les nouveaux convertis se sentaient
renouvelés par la Parole de Dieu.
Aujourd’hui, plusieurs facteurs nous amènent à revoir notre
spiritualité toute en l’appuyant sur cette tradition : nous devons être
ouverts à l’Esprit Saint qui nous guide pour discerner ces lieux de
Mission où nous devons être et agir, nous devons aussi redire un oui
périodique à notre engagement missionnaire : notre vocation repose
beaucoup plus sur un renouvellement continu de notre engagement et
un exercice de la volonté pour aller de l’avant, dans la durée.
Notre spiritualité est celle des disciples de Jésus, nous le suivons
dans son annonce de l’Évangile et nous vivons dans son intimité à cause
du travail de Règne de Dieu ; d’une certaine manière, nous sommes
attachés à lui par le même joug. Le compagnonnage dans l’annonce du
Royaume et avec Jésus est créateur de fraternité. Comme Sma, cette
fraternité vécue au jour le jour se réalise à la frontière des cultures :
« Quand un peuple a inculturé l’Évangile, dans son processus de transmission
culturelle, il transmet aussi la foi de manière toujours nouvelle ; d’où
l’importance de l’évangélisation comprise comme inculturation » 9.
Notre spiritualité se vit dans la relation proche aux autres cultures,
elle suppose de laisser des choses qui nous tiennent à cœur : notre amour
propre, l’orgueil de notre culture ou de notre état clérical, etc. En fin de
compte, là aussi notre spiritualité missionnaire doit être celle de
l’hymne aux philippiens : l’abaissement pour être solidaire et pour
être vrai…
Les responsables sma développent une spiritualité de service et il
est à souhaiter que le fait d’exercer un mandat de supérieur aide à faire
grandir cette dimension. Jésus en est le grand modèle. Nous nous
sanctifions dans le service de nos confrères (1 Co 13, 4-7). Notre lieu de
service, c’est avant tout nos confrères, nous sommes « touchés » quand
l’un ou l’autre est en difficulté, quand nous sommes attaqués sur notre
manière de faire… Mais c’est ainsi que nous vivons un ministère incarné.
Et tout cela, nous le confions au Seigneur qui marche avec nous.
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Attention aux confrères : Le rôle premier des supérieurs
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Attention aux confrères : Le rôle premier des supérieurs
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Attention aux confrères : Le rôle premier des supérieurs
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Mission en temps de crise
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Attention aux confrères : Le rôle premier des supérieurs
est aussi vrai avec les différents mouvements d’Église. Soyons des
servants de l’unité.
Dans la pratique, je n’ai pas de recette miracle et je sais que chacun
d’entre nous passe du temps à faire l’unité à l’intérieur de l’équipe, mais
n’était-ce pas déjà comme cela du temps de Jésus où celui-ci a dû
remettre à leur place les fils de Zébédée ou ceux qui voulaient être les
plus grands.
Bien identifier la racine de ces divisions est le premier pas pour
voir comment agir ; écouter et essayer de mettre la paix viennent
ensuite. Séparer l’équipe est le remède ultime mais qui sera souvent vécu
comme un échec même si l’intéressé ou les intéressés vont essayer de
justifier cet échec d’une autre manière.
Le pape François nous dit que « la communauté qui préserve les
petits détails de l’amour, où les membres se protègent les uns les autres
et créent un lieu ouvert et d’évangélisation est le lieu de la présence du
Ressuscité qui la sanctifie selon le projet du Père » 11. Que notre entente,
notre capacité à s’écouter et à demander pardon soient de vrais signes
du Royaume !
Faire l’unité
103
Mission en temps de crise
104
Attention aux confrères : Le rôle premier des supérieurs
· 35-50 ans
C’est une époque de créativité pastorale. On se donne facilement
une image de celui qui « réalise des choses », mais c’est aussi une époque
où on peut être facilement frustré si on ne reconnaît pas son travail ou se
sentir brimé pour une raison ou une autre.
105
Mission en temps de crise
· 50-65 ans
On travaille, on allie capacité de travail et expérience, mais on
théorise facilement, donnant des conseils sans s’engager soi-même… On
peut vivre en roue libre, on peut aussi être un petit dictateur…
L’important est de vivre avec une bonne dose d’humilité pour ne pas
écraser les autres. Il faut aussi aider ces confrères à garder leur
dynamisme et leur créativité dans la vie missionnaire.
· 65-80 ans
Il faut se rendre à l’évidence, on ne peut plus avoir un rôle de
premier plan ; il faut laisser l’initiative aux autres. C’est l’époque où on
se bat avec la technique pour essayer de rester dans le coup.
On peut être d’une grande utilité, « à côté » des jeunes mais il faut
trouver sa place…
· Après 80 ans
C’est l’époque où la dépendance se fait sentir. Les confrères âgés
peuvent facilement paraître exigeants. L’âge fait qu’on a besoin de
sécurité et on demande les choses immédiatement. Les supérieurs
doivent donner aux confrères le sentiment qu’ils sont pris en charge,
qu’ils n’ont pas à se préoccuper de l’avenir. Le sentiment d’inquiétude
et d’incertitude des confrères âgés, s’il n’est pas traité, peut amener un
mauvais climat dans l’entité.
Il y a aussi un accompagnement des confrères âgés à faire pour
qu’ils aient un travail utile selon leurs forces et ensuite une attention
spéciale à leur donner quand ils tombent dans la dépendance qui peut
être totale.
· Au fil du temps
À continuation, je voudrais énumérer les « temps spéciaux » où les
confrères ont besoin d’une attention plus particulière. Mais avant, il faut
dire quelque chose du « temps ordinaire », de ce temps où le confrère
106
Attention aux confrères : Le rôle premier des supérieurs
fait son travail sans faire de bruit et il ne fait pas la « une » des conseils
provinciaux.
Il peut être bon de se donner un objectif de visite régulière des
confrères et d’essayer de s’obliger à le respecter même s’il n’y a rien de
spécial à traiter, ceci pour deux raisons : - 1) ces visites permettent
d’avoir une familiarité avec les confrères sur le terrain, de connaître leur
situation et éventuellement leur difficulté mais aussi, - 2) si quelqu’un
tout à coup crie SOS parce qu’il y a un pépin de santé ou de pastorale ou
de relation avec l’évêque ou bien encore une crise de burn-out, le
supérieur n’est pas un extra-terrestre qui débarque pour cela.
Temps spéciaux
Je vais énumérer plusieurs types de temps spéciaux dans la vie des
confrères, qui méritent une attention spéciale. Mais, le plus important,
c’est que, à chaque fois, on transforme une épreuve en un temps de
croissance pour l’intéressé.
· Années sabbatiques
Nous, les hommes d’Église avons ce privilège que d’aucuns nous
envient : nous pouvons prendre un temps sabbatique et même, on nous
le recommande ! Nos textes (CP 2019) disent que ce temps peut être
demandé par le confrère ou par ses supérieurs.
Dans l’année sabbatique, il y a un aspect de « grande liberté », je fais
un peu ce que je veux… Je prends du temps pour moi, pour voyager, je
vais suivre quelques cours, une retraite, suivre la session ICOF 12, etc.
L’important est d’arrêter, pour un temps, d’être quelqu’un « qui fait »
pour « être » tout simplement ; pour se retrouver avec soi-même, pour
être capable de reprendre un nouveau style de relations avec les autres.
On peut ainsi repartir dans la vie et être assez disponible pour
redécouvrir la présence du Christ à mes côtés qui m’accompagne.
D’une certaine manière, c’est aussi le temps pour « redécouvrir le
monde d’une manière différente » parce que les choses ont évolué
depuis dix ou douze ans et moi j’étais le nez dans le guidon et n’ai pas
vu les changements, mais aussi, parce que moi aussi, j’ai évolué et ma
vie spirituelle doit se remettre au jour…
Le rôle du Supérieur de l’entité est d’aider chaque confrère à
profiter au maximum de ce temps, de l’accompagner discrètement et
surtout de prendre le temps d’être à son écoute pour que ce qui mûrit
107
Mission en temps de crise
· Santé et maladies
Avant de parler de maladie, je voudrais dire un mot sur la
prévention. Dans les jeunes entités, un nombre grandissant de confrères
ont franchi la cinquantaine. Peut-être faut-il que les supérieurs d’entités
organisent un bilan santé régulier pour ces confrères…. Prendre les
choses à temps peut économiser beaucoup de douleur, de travail et
d’argent.
En cas de maladie, il y a plusieurs aspects dont il faut tenir compte
pour donner un confort moral au malade :
Consulter les personnes compétentes pour évaluer la gravité de la
maladie et voir, selon les moyens dont on dispose, où et comment il sera
le mieux soigné. Bien entendu, tenir au courant l’évêque et le Supérieur
de l’entité d’origine. Penser au temps de récupération, après, pour que
le confrère puisse reprendre des forces avant de retourner à son poste.
Veiller à ce que le travail et ce qui tient à cœur au confrère puisse
continuer et faire en sorte que les confrères de la communauté
apostoliques suppléent au vide créé par la maladie ; ainsi on peut dire
au confrère malade : ne t’en fais pas, ne te tracasse pas, tu es en bonnes
mains, ton travail est couvert par d’autres et tu retrouveras tout quand
tu seras guéri.
L’accompagner, l’écouter, etc. Ce sont des moments privilégiés où
on se fait plus proche des confrères.
Ensuite, il faut tirer parti de la maladie pour en faire un temps de
croissance humaine et spirituelle. On sent sa pauvreté et on est plus vrai
quand on est malade. On a besoin d’être encouragé pour continuer à se
battre pour aller de l’avant mais à partir de notre pauvreté. Proposer au
confrère le Sacrement des malades s’inscrit là-dedans.
Si quelqu’un vit bien un temps de maladie, ce peut être très
bénéfique pour lui et pour tous les confrères et les gens qui vivent autour
de lui : une chose est d’accompagner les malades, autre chose est de se
retrouver de l’autre côté de la barrière…
108
Attention aux confrères : Le rôle premier des supérieurs
Crises
Il y a beaucoup de types de crises qui arrivent et pour lesquelles les
supérieurs doivent agir avec compétence et diligence. Si, dans l’entité et
le diocèse, il y a une bonne ambiance et que les confrères sont suivis, on
peut imaginer qu’on aura moins de crises mais il ne faut pas se croire au-
dessus de ces problèmes.
· Burn out
Ça peut arriver à n’importe qui et souvent à des confrères qu’on
croyait très forts. Tout d’un coup, le confrère « craque », veut tout laisser
tomber et ne sait pas trop où il se trouve.
Le rôle du supérieur est de ne pas s’alarmer, juger la situation, voir
s’il faut un accompagnement spécialisé et surtout « laisser du temps au
temps » tout en étant proche du confrère.
· Tomber amoureux
Ça aussi peut arriver à n’importe qui et à n’importe quel âge ! Ça
peut être un confrère qui se sent mal à l’aise dans son travail ou sa
vocation et qu’une paroissienne veut « aider et consoler » ou bien au
contraire une veuve ou femme éplorée que l’on console.
Comme prévention, les supérieurs doivent rappeler de « faire
attention ». La solidarité entre confrères est importante, parfois par
pudeur ou peur de parler on a laissé un confrère s’enfoncer.
Ensuite, si un confrère tombe amoureux, il n’y a pas de recette
miracle sinon de l’écouter et de l’aider à se sortir au mieux de cette
situation… L’important, sur le long terme, est de l’aider jusqu’à ce qu’il
retrouve la sérénité. Si la crise est temporaire, lui laisser le temps long
dont il a besoin pour se refaire. S’il pense qu’il est mieux pour lui de
quitter la SMA, l’accompagner…
Le déplacer ne suffit pas souvent à résoudre un problème de cet
ordre…
· Crise de ministère
Ça semble être quelque chose de l’époque post conciliaire mais ça
peut arriver encore. Tout d’un coup, un confrère veut arrêter le ministère
pour une raison ou une autre ; il y a toujours un mal être derrière et, se
séculariser est parfois la meilleure manière ou la seule de réconcilier et
réunifier sa vie. Pour les supérieurs, il y a tout un processus
d’accompagnement à faire.
109
Mission en temps de crise
· Pédo-criminalité
J’écoutais, d’une manière distante, ce qui se passait dans d’autres
pays, et, il y a 3 ans la France a été touchée par des scandales à
répétitions. Au niveau de la Conférence des religieux, il y a eu des
journées de formation. J’ai été impressionné, un jour après avoir écouté
l’expérience d’une femme violée par un prêtre au cours d’un repas. Je
comprends mieux la souffrance profonde des victimes maintenant. Mais
j’ai été aussi touché par le récit de provinciaux, dans un groupe de
travail, qui ont eu à accompagner des confrères accusés : c’est un long
chemin de croix que le Supérieur vit au côté de celui qui a commis de
tels faits ; l’accompagnement prend énormément de temps et d’énergie
au provincial.
· La prière personnelle
Tous, nous savons qu’il est important que nous ayons tous les jours,
un temps de rencontre personnelle avec le Seigneur. Dans la SMA, il n’y
a rien de stipulé d’une manière précise et chacun le fait comme il le pense
le mieux mais je me demande, si par pudeur ou discrétion, on n’oublie
pas souvent de rappeler aux confrères, très occupés dans le ministère, de
ne pas délaisser cet aspect pour leur bien propre et celui du ministère
lui-même.
· La prière en commun
Il est très facile de laisser la prière en commun… Nos constitutions 13
nous demandent de prier laudes et vêpres en commun dans les
communautés apostoliques.
110
Attention aux confrères : Le rôle premier des supérieurs
· La lecture spirituelle
C’est un vieux point d’appui dans notre vie spirituelle qu’on oublie
trop souvent, soit parce qu’on estime ne pas avoir de livre à disposition,
soit parce qu’on n’a pas le temps, soit parce qu’on a, tout simplement,
perdu l’habitude de lire. Et pourtant, c’est un moyen de nous retrouver
et suivre la vie ou la pensée d’un aîné ou un modèle dans la foi qui peut
nous aider à aller de l’avant.
· La confession
Nous sommes tous pécheurs ! L’Église catholique nous offre ce
moyen de nous retrouver nous-mêmes en toute humilité et de relire le
fil rouge de nos fragilités… Profitons-en.
· Temps de reprises
Nous avons beaucoup de possibilités que nous n’exploitons pas
assez : temps de retraite plus ou moins régulière au monastère, session
de l’ICOF, retraite ignacienne, etc. N’hésitons pas à proposer aux
confrères de prendre des temps en dehors de leur ministère pour
pouvoir garder un équilibre de vie.
· La direction spirituelle
On oublie souvent cela quand on est en mission ou bien on ne le
prend pas assez au sérieux. Sainte Thérèse d’Avila disait qu’il est très
difficile d’avoir un bon directeur spirituel ! On peut souvent rappeler à
nos confrères cette nécessité en espérant qu’ils en profiteront pour le voir
vraiment comme un besoin.
· Attention à la chasteté
On la réduit souvent au célibat mais c’est tout l’équilibre de nos
relations qui est en jeu ainsi que notre manière de nous donner aux
autres. Souvent, nous avons beaucoup de relations mais superficielles.
Parfois, c’est un manque de vraie fraternité entre nous ou des soupçons
sur les autres qui nous font nous rentrer en nous-mêmes.
Chasteté et interculturalité sont des dimensions de notre vie qui
touchent notre spiritualité, notre capacité d’entrer en relation avec les
autres et les aspects les plus souterrains et instinctifs de notre personne :
le spirituel et l’humain, dans ce qu’il a de plus basique, se retrouvent
ensemble dans la rencontre avec l’autre différent, de l’autre sexe ou de
l’autre culture. Nous pouvons devenir une personne qui aide les autres
à se sentir mieux ou une personne prisonnière de ses sentiments qui a
peur et se renferme en elle-même…
111
Mission en temps de crise
112
Attention aux confrères : Le rôle premier des supérieurs
· Le discernement
On l’a déjà vu, contempler la réalité dans laquelle nous vivons, voir
les lieux où le Démon agit avec une certaine facilité pour confondre nos
esprits, reconnaître l’action de l’Esprit dans le monde, tout cela demande
une vigilance et un esprit en veille comme le souligne plusieurs fois Jésus
dans l’Évangile ; mais c’est, pour nous, le premier pas pour savoir où
nous situer et comment agir. 15 C’est tout particulièrement vrai pour des
zones que l’on croit, « christianisées », et où ressortent des expressions
très fortes de paganisme, ou bien en Occident (et dans l’idéologie de la
mondialisation) où on fait passer une idéologie pour le bien naturel et
suprême.
Choisir fait partie du travail des supérieurs. Pouvoir le faire avec
une certaine indépendance d’esprit et dans la prière nous permet de faire
un choix avec le sentiment assez fort qu’on va dans le sens de Dieu ; ceci
nous aide à faire que la liberté intérieure soit une liberté d’action. Dieu
nous laisse une grande liberté dans notre action et qu’il appuie les
options que nous prenons, continuellement, il va nous aider à sortir le
bien d’une erreur.
Personne n’a l’Esprit tout seul ! C’est aussi en consultant des
spécialistes pour les domaines que nous ne connaissons pas, et en
réfléchissant ensemble à l’intérieur du Conseil qu’on arrive à faire
quelque chose.
Ceci est particulièrement vrai pour des tas de questions matérielles
ou financières qui sont devenues très compliquées et dépassent nos
compétences, dans la plupart des cas. Savoir s’entourer est tout un art :
un bon chrétien dévoué n’est pas toujours un bon technicien !
· L’humilité
Dans la SMA, beaucoup de choses poussent le supérieur à
l’humilité : la franchise virile avec laquelle les confrères disent leur
opinion ou leur désaccord ; la courte durée d’un mandat pour faire
113
Mission en temps de crise
quelque chose (pour ne pas parler de la courte durée de notre vie !) ; nos
propres limites …
Et pourtant, la tentation est grande de vouloir faire le « chef », de
montrer notre autorité et croire que nous sommes détenteurs d’un
« pouvoir » … La tentation est forte de vouloir éviter tout ce qui nous
rabaisse.
Bien souvent le Démon nous fait nous croire importants et nous
pousse à manifester cette importance par des signes extérieurs, par notre
manière de parler ou d’agir. Il nous invite à croire que nous sommes plus
clairvoyants que beaucoup et nous égare ainsi. Parfois cet égarement à
regarder les autres de haut, à adopter des postures de juge impitoyable
nous conduit à une certaine violence envers nos confrères.
Humilité et vérité vont ensemble : si nous vivons une humilité
réelle, nous mettrons un climat de vérité dans notre entité et nous
grandirons en humanité, nous-mêmes. L’humilité va avec la croix et on
doit apprendre à se familiariser avec elle : c’est une manière d’être qu’on
apprend petit à petit et dont l’apprentissage durera jusqu’à la tombe.
· La persévérance
Lequel d’entre nous n’a pas eu, un jour ou l’autre d’envie de baisser
les bras, de donner sa démission, ou de partir prendre un autre poste
parce qu’un confrère nous a dit que ce que nous faisions n’avait pas de
sens ou que n’avions pas bien fait quelque chose… Et pourtant, c’est
dans la persévérance que nous servons le Règne de Dieu.
Nous avons le modèle de la persévérance dans le P. Planque : 50
ans de luttes incessantes au service de la SMA pour qu’elle continue et
ne soit pas absorbée par quelque ambitieux, ou ne soit pas le jouet d’un
parti à l’intérieur de la congrégation.
La persévérance c’est d’abord ce combat avec nous-mêmes, nos
faiblesses et nos péchés mais aussi contre le Démon qui veut entraver la
progression du Règne de Dieu. Le Pape François l’explique bien quand
il insiste que le pouvoir du Malin est parmi nous et pour cela a une telle
force destructrice 16. Mais c’est surtout le combat avec le Christ pour que
le Règne de Dieu soit présent.
114
Attention aux confrères : Le rôle premier des supérieurs
115
Prise en charge des membres
117
Mission en temps de crise
Bureaucratique Spirituel
Pièces d’immigration Retraite
Santé Recollections
Nourriture et boisson Direction Spirituelle
Tyrocinium Livres Spirituels
Vacances Unité Fraternelle
Retraite (cf. AG 19 nos. 53.2-56.2)
Deuil
Crise et Traumatisme
2. Santé
La santé est très importante. Les supérieurs ont un grand rôle à
jouer aussi bien dans les soins préventifs que curatifs.
Les soins préventifs sont : les contrôles réguliers ; chaque membre
doit être attentif et connaître sa santé ; ce qu’il peut prendre et qui ne va
pas lui nuire, et ce qu’il aime mais qu’il ne peut pas prendre. Un rappel
particulier à ceux qui ont des problèmes de tension, de cœur, de diabète,
et autres conditions spéciales de santé. Éduquer également les membres
118
Prise en charge des membres
3. Nourriture et boisson
La nourriture et la boisson sont importantes pour notre survie. Les
membres doivent manger équilibré et être en forme. Il revient aux
supérieurs de s’assurer que les dispositions suivantes sont en place :
Que la communauté offre une bonne nourriture aux membres et,
les supérieurs doivent se renseigner sur l’alimentation quand ils visitent
les communautés et les paroisses. Un repas décent doit être toujours
offert non seulement quand le supérieur est là.
Une évaluation régulière du menu (programme alimentaire) dans
chaque communauté.
Lorsque les supérieurs visitent les communautés, ils peuvent offrir
des stocks alimentaires qui ne sont pas facilement trouvables dans les
milieux ruraux. Ils peuvent également donner du bon vin pour les
célébrations de Noël et de Pâque, comme certains supérieurs l’ont
toujours fait dont je préfère taire les noms ici.
119
Mission en temps de crise
5. Les vacances
Quand les membres sont en vacances, les supérieurs ont le devoir
paternel de les accueillir. Les membres aussi planifient leur séjour en
collaboration avec les supérieurs. L’allocation est également donnée à
ceux qui sont bénéficiaires.
6. La Retraite
Pour l’heure, nous qui sommes des jeunes entités n’avons pas des
membres à la retraite. Mon partage à ce niveau sera sur l’activation des
plans préparatifs. Notre plan à présent est d’établir un plan progressif
d’exécution pour ceux qui se retrouvent dans ce contexte ; mettre sur
pied des structures adéquates à la vieillesse. Nous pourrons établir un
plan. C’est mieux d’y penser maintenant car la vieillesse est toute
proche. Le secret pour lui faire face avec sérénité, c’est une bonne
planification ; mettre sur pied quelque chose et même faire des projets
sur les 20 années à venir.
120
Prise en charge des membres
7. Deuil
C’est un moment délicat pour les membres, alors ils doivent sentir
l’Amour de la famille SMA. C’est un moment où les supérieurs doivent
être proches du membre éploré.
Quand les membres perdent leurs parents biologiques, un soutien
financier est accordé à la personne selon les coutumes africaines.
· Organiser les confrères pour qu’ils participent aux obsèques
des familles éplorées des membres
· Si possible soutenir les membres de diverses manières. J’ai
personnellement eu à participer aux funérailles des parents
de confrères où je devais présider la messe d’enterrement, et
aux rites d’adieu.
· Si c’est un confrère, prendre les dispositions au plus vite.
· Informer l’évêque du lieu si nécessaire, Faire les démarches
administratives
· Cibler les cimetières au cas où rien n’est défini d’avance.
8. Crise et traumatisme
Les membres peuvent traverser des moments de difficulté
émotionnelle et psychologique dans la mission. Certaines de ces
expériences peuvent êtres dues à la guerre, aux attaques physiques, au
vol à main armée ou, dans des cas extrêmes, à la vie communautaire.
Nous traversons différentes crises de temps en temps. Il y a des
difficultés qui peuvent devenir plus sérieuses et peuvent mettre en
danger notre capacité d’aimer et d’agir. Les responsables ainsi que les
confrères informés doivent donc être proches de l’intéressé pour
l’épauler, le comprendre, anticiper les actions et le rassurer.
121
Mission en temps de crise
122
Prise en charge des membres
arrive. Parfois, les frais des problèmes peuvent coûter plus chers que les
problèmes de santé habituels, et nous devons être prêts à bien faire face
à cela et à le surmonter.
Les leaders sont invités à apporter ce type de soin (exercer cette
responsabilité) dans un amour fraternel. Cela voudrait dire qu’ils ne
doivent pas utiliser ces opportunités pour faire sentir au confrère qui a
été sauvé d’une situation difficile qu’il a une dette morale envers le
supérieur en tant qu’individu. Une situation pareille, si elle n’est pas
bien suivie pourrait conduire à la dépendance.
123
Maison construite pour les tempêtes
125
Mission en temps de crise
1987), 276.
126
Maison construite pour les tempêtes
127
Mission en temps de crise
vous donc très forts pour garder et accomplir tout ce qui est écrit dans le livre
de la Loi de Moïse, [...] 7sans vous mêler à ces populations qui subsistent encore
à côté de vous. Vous ne prononcerez pas le nom de leurs dieux, vous ne les
invoquerez pas dans vos serments, vous ne les servirez pas et vous ne vous
prosternerez pas devant eux, [...] 12Mais s'il vous arrive de vous détourner [...]
13alors sachez bien que Yahvé votre Dieu cessera de déposséder devant vous ces
populations (…) jusqu'à ce que vous ayez disparu de ce bon sol que vous a donné
Yahvé votre Dieu. » (Josué 23, 3-13)
Décrivons les convictions :
« Notre » dieu protège « notre » peuple. Il n'a rien à voir avec les
« autres » peuples qui ont « leurs » dieux.
Lorsque nous allons en guerre, notre dieu vient avec nous, il se bat
pour nous contre les « autres ». Épargner un ennemi de guerre est une
trahison à dieu qui a assumé sa part de la bataille.
Lorsque nous vainquons, cela montre la grandeur de notre dieu par
rapport aux dieux des autres peuples.
Nous perdons soit parce que les autres dieux étaient plus forts, soit
parce que notre dieu n'est pas venu avec nous. Nous avons dû faire la
guerre seul, sans notre dieu qui s'est fâché contre nous pour une raison
ou une autre. Le plus souvent, cela est dû au fait que certaines personnes
admiraient et suivaient d'autres dieux.
Aussi longtemps que je servirai mon dieu, il se battra pour moi et
je ne souffrirai pas.
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Maison construite pour les tempêtes
Afrique
De nombreuses cultures africaines aiment profondément la vie
dans sa plénitude et croient que seules les choses bonnes et agréables
sont naturelles et que les choses désagréables sont provoquées par de
mauvaises intentions. Cette conviction dévoile une merveilleuse vérité.
La bonté peut exister par elle-même. Le mal n'est pas nécessaire à la vie.
Le mal lui-même n'a pas d'existence indépendante ; il n'est rien d'autre
que l'absence de bien.
De nombreuses cultures africaines célèbrent la vie et nient
explicitement le fait que la maladie et la mort puissent être naturelles ou
129
Mission en temps de crise
normales. Malgré ce déni, nous n'avons pas d'autre choix que d'affronter
la maladie, les problèmes et la mort jour après jour.
130
Maison construite pour les tempêtes
4. Prenez le nombre de vies que vous voulez et payez pour vos actions
Cet état d'esprit rend les gens carrément responsables de leurs actes
et les oblige à rendre des comptes. Les vertus se concrétisent et les
mauvaises actions se retournent contre eux. La mort n'est pas la fin de la
vie, mais seulement la fin d'un de ses nombreux cycles.
Cette conviction favorise une vie vertueuse, mais on peut se sentir
suffisant et mépriser les autres. Je suis en bonne santé et riche, grâce à ce
que j'ai fait dans ma vie précédente. Vous êtes misérable et pauvre à
131
Mission en temps de crise
cause de votre malheur dans la dernière vie. Il n'y a pas de place pour la
compassion.
Elle tolère l'injustice et le trop de misère trop longtemps. Pourquoi
rendre la vie des autres meilleure puisque la nature elle-même
équilibrera les choses avec le temps ?
Absolument aucune place pour le pardon ! La vie fonctionne
comme une machine et elle ne connaît pas d'exceptions. On récolte ce
que l'on sème.
Événements
Accidents et calamités : Les journaux et les chaînes de télévision ne
cessent de rendre compte des accidents et des décès. Jésus aussi reçoit
132
Maison construite pour les tempêtes
des nouvelles très inquiétantes de diverses sources. Les gens lui parlent
de Galiléens tués par Pilate, très probablement dans le temple. Il est
certain que les gens ont interprété l'événement de bien des façons. Jésus
réfute une interprétation cachée et demande aux gens : « Pensez-vous que,
pour avoir subi pareil sort, ces Galiléens fussent de plus grands pécheurs que
tous les autres Galiléens ? » (Lc 13, 2) Jésus parle des victimes comme des
personnes qui ont « souffert » et non comme des individus qui ont été
« punis pour leurs péchés » ou qui ont été « abandonnés par Dieu ».
Certains ont pu penser que Dieu n'était pas intervenu pour les sauver de
la cruauté de Pilate parce qu'ils venaient de Galilée (le nord) et non de
Judée où se trouve Jérusalem.
Jésus fait référence à une autre calamité qui semble s'être produite
à Jérusalem même : la chute de la tour de Siloé, tuant dix-huit personnes.
La mention de cette calamité neutralise la supériorité de Jérusalem sur
la Galilée. Ensuite, dans l'interprétation, Jésus répète qu'ils n'étaient pas
plus pécheurs que les autres.
Remarquez ici une nuance importante. Jésus ne nie pas la croyance
générale selon laquelle les péchés apportent la souffrance mais, en même
temps, refuse de mépriser les victimes, refuse de conclure qu'elles ont
souffert parce qu'elles sont de pires pécheurs ; il nie catégoriquement le
crédit que les gens s'attribuent pour ne pas souffrir comme les autres.
Ceux qui n'ont pas été tués par Pilate ou par la chute de la tour de Siloé
n'ont absolument aucune raison de se féliciter ou de se considérer
comme vertueux.
La maladie : Examinons deux exemples qui montrent l'attitude de
Jésus et de son entourage face à la maladie.
Premièrement, la guérison de l’aveugle-né. Les disciples
demandent à Jésus : « Rabbi, qui a péché, cet homme ou ses parents, pour qu'il
soit né aveugle ? » (Jn 9, 2) Cette question affirme que le péché de
quelqu'un a causé la cécité de l'homme et ne cherche qu'une précision -
à qui appartient le péché. En réponse, Jésus déclare que « ni cet homme ni
ses parents n'ont péché ».
Deuxièmement, la guérison d'un paralytique. Tout en le guérissant,
Jésus lui dit, à la surprise des pharisiens et des scribes, « Tes péchés sont
pardonnés » (Lc 5, 20-24) avant de lui ordonner de se lever et de rentrer
chez lui. Jésus montre un lien réel entre le péché et sa condition. Le
pardon et la guérison deviennent synonymes dans la question que Jésus
pose aux scribes et aux pharisiens : « Qu'est-ce qui est le plus facile, de dire :
« Tes péchés te sont pardonnés » ou de dire : "Lève-toi et marche ? » (Lc 5, 23).
133
Mission en temps de crise
L’autre endroit où Jésus dit : « Tes péchés sont pardonnés », c'est à la femme
repentante qui a oint ses pieds » (Lc 7, 48).
Jésus ne considère pas la souffrance comme une punition méritée
par un pécheur, qui peut amener à mépriser la personne qui souffre et à
apaiser sa propre conscience de n'avoir offert aucun soutien. C'est
comme dire : « Il est juste et équitable que tu souffres, parce que tu payes
pour tes péchés. Je veillerai à ne pas devenir comme toi. Merci de m'avoir
donné une leçon ». Jésus voit la souffrance « causée » par une vie de
péché. Cette petite nuance fait toute la différence. Lorsqu'une personne
pécheresse réalise à quel point elle souffre à cause de sa vie de pécheur,
elle désire un changement. La conversion du mode de vie devient non
seulement une possibilité d'espoir, mais aussi l'option la plus pratique et
la plus sensée. Le pardon devient une libération. Tout péché mène à
l'esclavage et à la souffrance, mais toute souffrance ne vient pas de ses
propres péchés.
Dans les cas ci-dessus, Jésus libère le paralytique et la femme de la
souffrance et du péché en offrant son pardon. L'aveugle-né a, lui aussi,
connu beaucoup de souffrances et Jésus ne les relie à aucun péché. Jésus
a aussi de la compassion pour l'aveugle, il entre en action et lui offre une
vie meilleure.
La mort : Les Écritures nous donnent un aperçu de la réaction de
Jésus face à la réalité de la mort dans deux cas - le fils de la veuve de
Naïm et Lazare. Dans le premier cas, ni le mort ni sa mère ne sont
nommés. Il est probable que Jésus ne les connaissait pas
personnellement. Le second est un ami cher à Jésus. Nous connaissons
le nom du défunt et celui de ses sœurs. Le fils anonyme et l'ami cher sont
tous deux confrontés à la même réalité : la mort. Dans les deux cas, Jésus
est profondément ému de compassion ! Regardez cette réponse
émotionnelle de Jésus. Il est ébranlé. Dans le cas de la mort de Lazare,
Jésus savait déjà ce qu'il allait faire et c'est pourquoi il a tardé à monter
à Béthanie (Jn 11, 4-6). Malgré cela, lorsqu'il voit les gens pleurer, il est
profondément troublé et pleure.
Dans ces deux occasions, nous ne voyons pas Jésus accuser les
morts ou les autres de leur mort. Il fait face à la réalité, partage la douleur
des personnes en deuil et est profondément ému par la compassion.
La vie du Christ : Regardez la vie personnelle du Christ lui-même,
il n'entre pas dans la catégorie des personnes bénies et privilégiées selon
l'ancienne conception. Il ne possédait pas beaucoup de richesses ni
d'animaux. Il n'avait pas une grande maison. Il menait la vie très
ordinaire de la majorité. Dans la société où les veuves se trouvaient au
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Maison construite pour les tempêtes
Enseignements
Nous avons vu la réponse de Jésus à diverses situations - accidents,
maladie et mort. Certaines de ses réactions choquent les uns et
scandalisent les autres. Elles ébranlent naturellement les convictions
conventionnelles fondamentales. Examinons maintenant ses
enseignements, dans lesquels il établit clairement un paradigme
différent dans son ensemble.
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Mission en temps de crise
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Maison construite pour les tempêtes
Cadre de vie
Pour ceux qui considéraient la mort comme une perte ultime, Jésus
enseigne de ne pas avoir peur de ceux qui ne peuvent que tuer le corps
(Mt 10, 28) ! Cet enseignement minimisait la peur de la mort et mettait
l'accent sur la vie éternelle. En évoquant cela, Jésus se faisait l'écho non
pas de la pensée des livres écrits pendant la période de la conquête, mais
de ceux écrits pendant les moments d'exil et de persécution comme les
livres de Daniel et de Maccabées.
Nous voyons la vie comme une réalité éternelle, la mort comme une
porte et l'acceptation de la souffrance comme une expression de courage
et de fidélité. Ces paramètres restent inchangés, même lorsqu'il n'y a pas
de persécution d'une nation par une autre et même lorsque nous
réalisons que nous formons tous une famille.
En plus d'entendre les enseignements de Jésus, les disciples ont fait
l'expérience du Christ glorieux ressuscité et de la présence fortifiante du
Saint-Esprit dans leur vie.
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Mission en temps de crise
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Maison construite pour les tempêtes
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Mission en temps de crise
Pas d'impunité
Le péché mène à la souffrance et à la mort. Par exemple, la
gloutonnerie conduit à l'obésité et aux crises cardiaques. Outre ces
conséquences naturelles, les péchés attirent la souffrance du système
juridique car ils enfreignent les contrats sociaux. Celui qui vole, perd son
emploi, va en prison et doit faire face à plusieurs conséquences qui ont
un impact sur sa vie quotidienne. Certaines personnes réussissent à
esquiver le système juridique !
Dieu intervient-il pour punir les péchés et quand cela se produit-
il ? Comment comprenons-nous la justice à partir des enseignements du
Christ ?
Jésus parle clairement de responsabilité pour notre vie et il n'y a
certainement aucune notion d'impunité pour qui que ce soit. Ceux qui
ont reçu plus rendront davantage de comptes. Jésus parle du Père céleste
qui récompense ceux qui prient et font l'aumône en secret, enseigne sur
le roi qui récompense ses serviteurs qui ont bien géré ce qui leur a été
confié. Dans la même ligne, Jésus parle de pleurs et de grincements de
dents pour ceux qui n'ont pas su gérer ce qui leur a été confié. Par
conséquent, les bonnes et les mauvaises actions ont des conséquences
agréables et désagréables venant de Dieu.
Les vertus et les vices, même ceux qui sont invisibles aux yeux de
la société, ont leurs conséquences dans le cadre plus large de la vie y
compris la vie après la mort. Bien que la peur du châtiment soit un piètre
facteur de motivation pour faire le bien, le concept d'impunité a un
énorme potentiel pour le mal.
3. L'endurance et la providence
L'une des rencontres pastorales les plus courantes et les plus
stimulantes est celle qui a lieu avec une personne malade. Certains des
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Maison construite pour les tempêtes
141
Mission en temps de crise
Conclusion
La vérité !
La toute simple vérité.
Les douleurs et les tempêtes rythment la vie.
Vous êtes mandaté mais vous n'êtes pas un ayant droit.
Affrontez la vie et rendez-la meilleure pour tout le monde.
Nous formons une famille inclusive et non un club exclusif.
Dieu est avec nous comme un père, un coach et un soignant.
La vie continue même bien après la mort.
Les vertus et les vices importent.
La prière fonctionne.
Amen.
142
Gros plan sur : Mission en
temps de crise aujourd’hui
143
Mission-inculturation :
le défi est renouvelé
Comprendre l'inculturation
Le concept même d'inculturation n'est pas facile à définir, chacun
peut le comprendre de différentes façons, par conséquent, par souci de
clarté, nous voulons retenir ce que l'encyclique Redemptoris Missio dit au
n°52 :
“l'inculturation « signifie une intime transformation des authentiques
valeurs culturelles par leur intégration dans le christianisme, et l'enracinement
du christianisme dans les diverses cultures humaines ». C'est donc un processus
profond et global qui engage le message chrétien de même que la réflexion et la
pratique de l'Église. Mais c'est aussi un processus difficile, car il ne doit en
aucune manière compromettre la spécificité et l'intégrité de la foi chrétienne.”
Nous pouvons nous référer également à l'exhortation post-
synodale Ecclesia in Africa de saint Jean-Paul II, qui est extrêmement
importante pour nous missionnaires ; le Pape dit que l'inculturation a
deux dimensions : « d’une part "une intime transformation des authentiques
valeurs culturelles par leur intégration dans le christianisme" et, d’autre part,
"l’enracinement du christianisme dans les diverses cultures" » (EA 59).
145
Mission en temps de crise
Double caractère
L'inculturation commence par l'écoute, mais elle s'applique aux
deux parties prenantes du processus. De cette écoute naît le dialogue. Il
doit être caractérisé par une ouverture mutuelle, une preuve de
dépassement des préjugés, de l'intolérance, des malentendus, des
146
Mission-inculturation
Adaptation
L'inculturation est un processus d'incorporation de la vie
chrétienne et du message dans un espace culturel donné. Si ce processus
n’aboutit pas aux changements de la culture donnée alors on ne peut pas
parler d'inculturation, mais seulement d'une adaptation superficielle.
C'est l'une des difficultés et des menaces qui pèsent sur le processus
d'inculturation.
Souvent, quand on parle d'inculturation, on parle vraiment
d'adaptation. Pour que ce processus se déroule correctement, il ne doit
pas s'arrêter à l’adaptation mais il doit aller plus loin et plus
profondément. Il doit toucher les personnes et les communautés sujettes
à l'inculturation. Par conséquent, il doit inclure tous les membres d'une
communauté donnée. Il ne peut exclure personne de ce processus.
L'Incarnation de la Parole de Dieu consistait à devenir membre
d'une communauté concrète, une communauté existant dans le temps et
147
Mission en temps de crise
Laïcisme
Suivant l’enseignement du pape Benoît XVI, le laïcisme ou la
sécularisation et avec eux le relativisme, sont une menace non seulement
pour l'inculturation, mais pour la foi en général. Il est à noter que le
relativisme dérive du laïcisme et le suit. Ces deux tendances sont décrites
par le Pape comme dangereuses. En tant qu'idéologie, le laïcisme
cherche à séculariser la vérité, les valeurs et les principes chrétiens. Ce
courant tente de détacher ces valeurs du fondement qui est la révélation
de Dieu. Son but est de séparer Dieu, qui s'est révélé en Jésus, des valeurs
dont il est le fondement. Ce courant cherche un soutien dans la raison,
148
Mission-inculturation
149
Mission en temps de crise
contre lequel la police met en garde depuis un certain temps. C'est une
menace pour les personnes qui utilisent WhatsApp. FLAMING (ardent,
flamboyant), un phénomène lié au discours de haine et de trollage. Il s'agit
de déclencher délibérément la discussion afin de susciter des émotions
fortes et négatives chez les autres utilisateurs. Ce ne sont que quelques
exemples parmi tant d’autres.
De nombreux phénomènes négatifs du monde virtuel sont devenus
un défi pour l'inculturation. Le pape Benoît XVI a décrit tous ces sites de
réseaux sociaux comme un continent numérique, tandis que Le pape
François a clarifié ce concept en ces termes : « Le grand continent
numérique n'est pas seulement technologie, mais il est formé d’hommes et des
femmes concrets qui portent avec eux ce qu’ils ont au fond d’eux-mêmes, leurs
espérances, leurs souffrances, leurs angoisses, la recherche de ce qui est vrai,
beau et bon » . Par conséquent, nous pouvons conclure que les réseaux
sociaux sont des espaces d'échange de pensées, de préférences et de
points de vue. L'enseignement des Papes montre un glissement de la
compréhension du continent numérique comme outil à sa vision comme
espace. Ce changement de compréhension est également devenu, en
s’ajoutant aux nombreux dangers, un défi pour entrer dans cet espace
avec l'Évangile.
Émigration
L'émigration n'est pas mauvaise en soi. Dans la Bible nous trouvons
des arguments pour et contre. Dieu, choisissant Abraham, l'a appelé à
sortir de son pays. C'est un appel spécifique non tellement à bouger d’un
lieu mais un appel au bien et à la liberté. La sortie des Israelites d'Égypte
peut également être considéré comme une émigration vers la libération.
Le commandement de Jésus : allez dans le monde entier et proclamez
l'Évangile à chaque créature (Mc 16, 15), invite à partir. Être missionnaire
inclut en quelque sorte le fait d'être un migrant. L'émigration peut aussi
être l'exil, le bannissement. Pendant des siècles, la peine d'exil était
considérée presque comme une peine égale à la mort. L'émigration peut
causer des souffrances et cela se voit dans l'exemple de l'exil, de la
déportation ou du soi-disant « nettoyage ethnique » de toute sorte.
Une immigration excessive crée de graves problèmes pour un pays
donné avec l'admission et l'intégration des nouveaux arrivants. Le
monde contemporain devient de plus en plus petit, l'émigration laissée
150
Mission-inculturation
Multiculturalisme
La définition même du terme signifie un ensemble de doctrines qui
répondent au défi de la diversité. Leur objectif est d'instaurer un ordre
social fondé sur la reconnaissance et la séparation des droits des groupes
minoritaires. Cela signifie des exceptions légales pour divers groupes
(par exemple le droit à l'abattage rituel des animaux pour les
représentants d'une minorité musulmane ou juive), le droit à une
autonomie limitée, le soutien de l'État à l'éducation organisée par les
minorités et enfin aucune politique d'assimilation forcée.
Il y a une différence entre le multiculturalisme et le
pluriculturalisme. Ce dernier est une excellente occasion de voir la
dignité de la personne humaine et permet d’aboutir à un accord au
niveau international. Pour qu'une communauté existe, il faut connaître
les différences entre nous afin de pouvoir se respecter les uns les autres.
Si nous ne voyons pas ces différences, il n'y aura aucun respect. Dans le
multiculturalisme, la différence est floue. Il y a un énorme impact du
151
Mission en temps de crise
152
Mission-inculturation
L'indifférentisme
L'indifférence religieuse et le développement de la religiosité
individualisée défient l'Église plus que l'athéisme avec son déni de
l'existence de Dieu. Contrairement à l'athéisme théorique, qui contient
une certaine pensée et un certain concept de moralité, l'indifférentisme
s'exprime comme une indifférence totale à tous les principes et valeurs
objectifs. Il les relativise et tente de faire sombrer les questions
métaphysiques inhérentes à l'âme et à la conscience humaine. Il traite la
religion comme quelque chose de peu d'importance, de superstition ou
de luxe. Une telle attitude gagne de plus en plus de partisans avec
lesquels le dialogue est presque impossible.
Malheureusement, on insiste beaucoup sur la nécessité d'annoncer
la Bonne Nouvelle à ceux qui n'ont pas eu l'occasion de connaître Jésus,
au détriment de ceux qui sont devenus indifférents. Les difficultés pour
la communication en sont probablement la cause. Cependant, le
processus d'inculturation doit également inclure ces personnes afin
d’être complet et crédible. C'est un grand défi des temps modernes.
Il est sans doute beaucoup plus facile d'évangéliser ceux qui
cherchent Dieu et sont ouverts à son action que ceux qui ne s'en soucient
pas. La première façon d'atteindre ces personnes avec le message de
l'Évangile est de les remarquer et d'essayer d'établir des relations
personnelles. Le dialogue évangélisateur avec une personne indifférente
doit tenir compte de son bien et de la vérité qui le concerne.
Au début, ce dialogue ne doit pas être une activité pastorale. Lors
des premiers contacts avec des personnes indifférentes, la surexposition
de la dimension religieuse peut provoquer leur fermeture complète et
même leur hostilité. Dans ce cas, l'inculturation prend donc un caractère
quelque peu individuel. Cardinal Joseph Ratzinger souligne que :
L’évangélisation n'est pas simplement une forme de parole,
mais une forme de vie : vivre dans l'écoute et la voix du Père...
Cette forme d'évangélisation de forme christologique et
pneumatologique est aussi, en même temps, ecclésiologique : le
Seigneur et l'Esprit construit l'Église, communique à travers
153
Mission en temps de crise
En guise de conclusion
Je propose comme conclusion la prière tirée de l’encyclique du Pape
François « Fratelli tutti » (287). Que ses paroles nous encouragent dans
nos efforts, malgré les difficultés, pour l'implantation de l'Évangile dans
des nouveaux milieux de vie.
Seigneur et Père de l’humanité,
toi qui as créé tous les êtres humains avec la même dignité,
insuffle en nos cœurs un esprit fraternel.
Inspire-nous un rêve de rencontre, de dialogue, de justice et de paix.
Aide-nous à créer des sociétés plus saines
et un monde plus digne,
154
Mission-inculturation
155
Pendant la crise politique
en Côte d’Ivoire en 2002
La crise de 2002
Mon expérience se situe à partir du 17 Septembre 2002, au moment
où éclate le soulèvement politico-militaire en Côte d´ivoire. Le pays reste
coupé en deux. Pendant les premières semaines il n´y a pas de
communications, pas de nouvelles, pas de transport de personnes ni de
commerce entre les deux zones. On a perdu le contact avec les diocèses,
les confrères, les paroisses et avec la population de Bouaké, Katiola,
Korhogo, Odienné, ainsi qu’une partie de Daloa, Man et Bondoukou. On
voit arriver à Abidjan des milliers de déplacés de ces zones qui racontent
les atrocités subies ; les familles d´Abidjan les accueillent à bras ouverts.
Dans mon bureau, bien installé comme curé de Sainte Bernadette à
Marcory, je vois arriver des anciens paroissiens qui me racontent dans
quelles conditions dramatiques et tragiques ils ont dû tout laisser à
Bouaké : maisons, véhicules, et marcher à pied sur 120 kms jusqu`à
Yamoussoukro, j´ai vu leurs pieds enflés avec des blessures et j’ai
entendu le récit de leur marche à travers les broussailles, traqués par les
rebelles.
J´ai senti la peur et la misère de ce peuple et j´ai été ému. Au fond
de moi j´ai entendu comme une voix qui m´interpelait à faire quelque
chose, à venir en aide à ces frères et sœurs dans le besoin. Avec quelques
membres de notre CARITAS paroissiale on a organisé deux petits
convois jusqu’à Yamoussoukro où se trouvaient, sous des tentes, des
milliers de déplacés. On avait loué le minibus de notre Séminaire SMA
157
Mission en temps de crise
Les inspirations
Ces voyages ont servi à adoucir les visages durs des deux
belligérants qui nous voyaient aller et revenir sains et saufs. Cela a servi
aussi à rehausser l´image de l´Église engagée dans la CARITAS et à
générer un mouvement de solidarité des paroisses du Sud envers les
diocèses du Nord ravagés par le passage des rebelles.
Au début du conflit l´Église a pensé à un conflit religieux du Nord
musulman et du Sud chrétien, nos constats ont servi à l´identifier comme
un conflit politico-militaire. On a désamorcé la bombe inter-religieuse.
Cette action a été l´occasion de lancer l´idée de créer des équipes
mobiles de missionnaires. Que ceux-ci soient déployés dans des zones à
risque, de conflit pour aider et remplacer des confrères qui vivent des
situations d´angoisse, de peur et de danger le temps pour ceux-ci de se
refaire une santé physique et morale, avant de retourner à leurs anciens
postes. Ce serait une équipe de missionnaires volontaires, capables de
vivre dans des zones à risque et pour une durée bien déterminée.
La crise de COVID - 19
L´actuelle situation de Corona Virus nous a interpellé aussi. À la
maison provinciale d´Abobo-Doumé on a vu la possibilité d´aider les
158
Pendant la crise politique en Côte d’Ivoire
Conclusion
Devant ces différentes situations de détresse, L´Église doit rester
toujours en état d´alerte, ne pas regarder à côté, voir la réalité en face, ne
pas se dérober, ne pas rester indifférent, ne pas avoir peur de se lancer
sur des chemins inconnus. Le Seigneur sera notre guide et notre soutien.
159
Inondations aux Nigeria
161
Mission en temps de crise
162
Inondations aux Nigeria
163
Mission au désert pendant la
pandemie
Activités économiques
En raison de la nature du climat, la plupart des gens sont des
bergers et ils élèvent des animaux comme les moutons, les chèvres, les
chameaux et les ânes. Quelques personnes se livrent à une agriculture
modeste, cultivant principalement du sorgho et du mil.
Pour survivre, nous dépendons des secours alimentaires de Caritas
Lodwar, du gouvernement du comté, des ONG et d’autres bienfaiteurs.
Ce type d’aide n’arrive que de temps en temps, généralement tous les
trois à quatre mois pour être précis.
165
Mission en temps de crise
166
Mission au desert pendant la pandemie
167
Mission en temps de crise
Leçons de coronavirus
Il est vrai que le coronavirus nous a pris à l’improviste. Les églises
ont été fermées de façon inattendue. Il a été très difficile de gérer notre
paroisse pendant cette période, mais nous avons tiré quelques leçons de
cette expérience ;
1. Il est toujours bon d’avoir des économies sur le compte de la
paroisse, même minime, car cela peut aider dans une situation comme
celle-ci afin de continuer à gérer la paroisse.
2. En tant que prêtre missionnaire, je me devais d’essayer d’être
plus mobile et toucher les gens de tous les coins de la paroisse afin de
leur donner un message d’espoir.
3. J’ai essayé d’approfondir ma foi et de faire plus confiance à
Dieu afin d’être comme cette maison qui a été bâtie sur le roc. Aucune
force naturelle n’a pu la secouer.
4. Il est bon de prier davantage et d'augmenter mon temps avec
le Seigneur dans la méditation, la lectio divina, l'adoration et la lecture
des Écritures.
168
Mission au desert pendant la pandemie
169
COVID -19 - Chemin de conversion
171
Mission en temps de crise
172
COVID 19 : Les Problèmes de santé
spirituelle et mentale
« Vous dire l’effet de ce double coup de foudre sur mon âme c’est
impossible. L’épidémie d’ailleurs, la plus forte dont on ait souvenance
depuis 27 ans, n’est pas passée et presque tous les Européens
succombent. Un de ces jours on enterrait l’évêque protestant. En ce
moment, j’ai un des frères malade. Il n’est donc pas impossible que
M. Reymond et moi suivions de près ceux que nous pleurons et la
mission de Sierra Leone sera alors aussitôt finie que commencée (…).
Quoi qu’il en soit, priez pour que la sainte volonté de Dieu s’accomplisse
en nous et par nous, comme en dehors de nous. À Dieu ».
La mort des deux prêtres a vraiment été un choc pour Mgr Marion
De Brésillac. Il ne savait pas quoi en faire ni quoi faire ensuite. Il était
perplexe quant à la nouvelle mission. Sa seule source d'espérance était
de s'appuyer sur la Providence de Dieu. L'histoire se répète. Le monde
entier a connu la pire pandémie de tous les temps. Jusqu'à présent, le
nombre de personnes décédées à cause du coronavirus est bien
supérieur à 1 620 654 dans le monde et 72 735 019 ont été touchées
jusqu'à présent (Worldometer, 14 décembre 2020). Dans la SMA, 35
membres ont perdu la vie à cause de cette pandémie.
Alors que nous vivons tous dans l'anxiété, la dépression et avec un
comportement agoraphobe, nous pouvons dire que la présence du
coronavirus et les changements qu'il a provoqués dans notre vie
quotidienne sont particulièrement difficiles à gérer. Nous nous
retrouvons avec un ensemble de questions à savoir : quand est-ce que
173
Mission en temps de crise
174
Les Problèmes de santé spirituelle et mentale
175
Mission en temps de crise
176
Les Problèmes de santé spirituelle et mentale
177
Mission en temps de crise
leur rappeler que Dieu marche avec eux et parmi eux et qu’ils ne sont
pas abandonnés. Pourtant, les questions suivantes posent un réel défi à
notre mission :
• Quel est l’impact des activités religieuses virtuelles sur la santé
mentale et sont-elles aussi efficaces que leurs homologues en direct ?
• Quel rôle la prière et les autres pratiques religieuses jouent dans
la gestion du COVID-19 et quelle est l’efficacité de cette stratégie ?
• Dans quelle mesure les pandémies comme le COVID-19,
intensifient ou diminuent les croyances religieuses ?
4. Facteurs de protection et
ressources de bien-être spirituel
Il est très important et crucial que nous trouvions des ressources
saines, protectrices et spirituelles pour combattre le COVID-19. Il est
évident que les interventions religieuses et spirituelles jouent un rôle
crucial dans cette crise de santé publique. L'Église a découvert des
manières novatrices et les plus modernes de se connecter spirituellement
aux fidèles. Aux personnes qui ont perdu les membres de leur famille et
leurs amis, l'Église fournit des conseils, un refuge, de l'espoir et un
rajeunissement à ceux qui en ont besoin. La crise du COVID-19 nous
appelle tous à comprendre, tirer des leçons, réfléchir et redéfinir la
priorité de tous les aspects de notre vie - le physique, le mental et le
spirituel. En créant plus de groupes de soutien et en créant une prise de
conscience, nous devons aider les gens à être plus résistants. L'Église doit
ouvrir sa porte à son peuple afin de véhiculer des informations plus
appropriées, pertinentes et justes pour lutter contre la pandémie. Nous
devons lui apporter un soutien afin de faire face aux symptômes
psychosomatiques, émotionnels et comportementaux. Nos confrères qui
sont dans les régions du monde les plus touchées par le COVID-19
doivent recevoir un soutien en ligne qui les aide à vivre cette période de
difficultés.
178
Les Problèmes de santé spirituelle et mentale
179
Mission en temps de crise
Conclusion
Le Pape François dans sa récente Lettre encyclique, intitulée Fratelli
Tutti, parle de la pandémie. Il écrit : « Certes, une tragédie mondiale
comme la pandémie de Covid-19 a réveillé un moment la conscience que
nous constituons une communauté mondiale qui navigue dans le même
bateau, où le mal de l’un porte préjudice à tout le monde. Nous nous
sommes rappelés que personne ne se sauve tout seul, qu’il n’est possible
de se sauver qu’ensemble. C’est pourquoi j’ai affirmé que « la tempête
démasque notre vulnérabilité et révèle ces sécurités, fausses et
superflues, avec lesquelles nous avons construit nos agendas, nos
projets, nos habitudes et priorités. […] À la faveur de la tempête, est
tombé le maquillage des stéréotypes avec lequel nous cachions nos ego
toujours préoccupés de leur image ; et reste manifeste, encore une fois,
cette [heureuse] appartenance commune […], à laquelle nous ne
pouvons pas nous soustraire : le fait d’être frères ». Le pape François vise
à promouvoir une aspiration universelle à la fraternité et à l'amitié
sociale. La pandémie de Covid-19, révèle le Pape, « a éclaté de façon
inattendue ». Mais l'urgence sanitaire mondiale a permis de démontrer
que « personne ne peut affronter la vie de manière isolée » et que le
moment est vraiment venu de « rêver, alors, en tant que famille humaine
unique » dans laquelle nous sommes « tous frères et sœurs ». Nous
pouvons combattre cette pandémie comme une seule famille humaine.
Notre rétablissement en tant que société de Covid-19 nécessite la
promotion d'une culture authentique et positive d'amour, de guérison,
de prise de conscience, de compréhension et de respect.
180
La révolution numérique et la formation presbyterale
La révolution numérique et la
formation presbytérale
traditionnelle : défis et possibilités
181
Mission en temps de crise
fois, nous ne pouvions pas nous considérer simplement comme des êtres
humains ou des frères et sœurs, mais comme des porteurs potentiels
d’un virus mortel. Un simple geste de poignée de main, une salutation
SMA avec la tête, etc. ont disparu.
Bien que sous le même toit, nous étions loin les uns des autres car
tout contact physique devenait dangereux. Les nouvelles des médias
conventionnels et des médias sociaux n’ont fait qu'accroître la peur et la
suspicion qui règnent. Les « réunions en ligne », les « conférences en
ligne », ou les « achats en ligne », rarement entendus, sont devenus la
norme du jour au lendemain. Doit-on renvoyer les séminaristes chez eux
pour continuer leur formation en ligne ? C’était à la fois une option dont
on pouvait rire et qu’on pouvait considérer inimaginable étant donné
que nous n’étions pas préparés à la nouvelle réalité.
Bien que la vie ait connu une certaine forme d’évolution depuis
l’antiquité, l’avènement de la vie numérique façonne les vies, les cultures
et les valeurs avec une rapidité jamais connue auparavant dans l’histoire
de l’humanité. Nous assistons probablement à une réalité encore en
cours.
Cet article se propose d’examiner l’impact de la révolution
numérique (dans le contexte de la crise actuelle) sur la formation
sacerdotale.
À la lumière de la crise actuelle, qui inaugure une nouvelle
normalité de « vie en ligne », dans quelle mesure affecte-t-elle la
formation des jeunes gens à la prêtrise ou quelles bénédictions apporte-
t-elle à la préparation des futurs prêtres missionnaires ?
Nous proposons d’aborder cette étude en utilisant partiellement la
méthode pastorale. Il y aura un aperçu descriptif de l'évolution
historique de la formation sacerdotale pendant certaines périodes
importantes de crise dans l’Église, y compris la crise actuelle. Nous
tenterons également d'analyser certains moments « répugnants ». Enfin,
à partir de notre longue enquête et analyse, nous suggérerons quelques
pistes pour vivre la « nouvelle normalité » en coopération avec Dieu
dans l’accompagnement et la préparation des futurs ouvriers à sa vigne.
182
La révolution numérique et la formation presbyterale
183
Mission en temps de crise
avec lui. Les disciples ont aussi eu des crises mais ils savaient exactement
où se trouvait la solution (cf. Marc 4, 35-41).
Les Apôtres de Jésus auraient à leur tour leurs propres disciples.
Les épîtres du NT nous fournissent de nombreux exemples
d’instructions données à de tels disciples (cf. 1 Pierre 5, 1-4). Le
Catéchisme de l’Église catholique l’appelle à juste titre « succession
apostolique » - la transmission non seulement de l’autorité
ecclésiastique, mais aussi d’un modèle et d’un mode de formation
sacerdotale.
184
La révolution numérique et la formation presbyterale
185
Mission en temps de crise
186
La révolution numérique et la formation presbyterale
Trente ait été d’assurer une formation plus structurée et holistique des
candidats à la prêtrise.
En effet, les crises sont parfois des Kairos. Une approche et une
attitude rigoureuses à l’égard de la formation du clergé au niveau
universel ont sans doute commencé avec le Concile de Trente.
Entre autres, le Concile a pris des décisions importantes concernant
les séminaires 9 :
Chaque cathédrale et église métropolitaine était obligée d’avoir son
propre séminaire.
Les séminaires régionaux étaient encouragés dans les petits
diocèses ou les diocèses pauvres.
Le Concile a défini un programme répondant aux besoins de son
temps, comme la littérature, les sciences humaines, les Écritures, la
dogmatique, la morale, la pastorale, … etc.
Les efforts consentis par Trente étaient sous peu remis en cause par
l’ingérence de l’État au cours des deux siècles qui suivront. Les
monarques européens devinrent puissants et, influencés par l’ambiance
du nationalisme, voulurent la formation du clergé avec quelques
règlements d’État. Dans certains cas, ils ont insisté sur la formation des
prêtres tant dans les séminaires que dans les universités, système qui a
duré jusqu’au XXe siècle dans certains endroits.
De ce bref aperçu historique, nous pouvons constater qu'il n’y a
jamais eu de temps dans l’histoire où la formation des prêtres s’est
déroulée sans défi ni sans crise. Comme vu ci-dessus, certaines crises ont
été des kairos lorsque des réformes rigoureuses et des initiatives
individuelles ont sauvé la situation. Nous l’avons vu avec saint Jean
Chrysostome à l’époque patristique, avec les scolastiques à l’époque
médiévale, pour l’Église universelle à Trente et avec d’autres initiatives
audacieuses de pieux chrétiens comme Pierre de Bérulle.
Aujourd’hui, nous sommes à l’aube d’une grave crise d’une autre
nature, sans précédent dans l’histoire. Comment pouvons-nous y
répondre à la lumière de l’expérience passée et qu’est-ce que
l’ingéniosité d’aujourd’hui peut offrir ; voilà nos principales
préoccupations exprimées dans la seconde partie de cet article.
187
Mission en temps de crise
188
La révolution numérique et la formation presbyterale
12 Ibidem.
189
Mission en temps de crise
13 Ibidem.
190
La révolution numérique et la formation presbyterale
191
Mission en temps de crise
15 Cf. J. MALONG, Keys to the Sacred: Explaining Some Ancient Christian Symbols,
Magic Print 2014, 2.
16 Conference organized by the editior-in-chief of the Remnant, M. MATT,
https://www.cfnews.org.uk/christ-or-chaos-challenging-the-new-world-order/
(Accessed on March 2, 2021).
17 Cf. R. SARA, God or Nothing: A Conversation on Faith with Nicola Diat, Ignatius
Press 2015.
192
La révolution numérique et la formation presbyterale
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Mission en temps de crise
194
Où est dieu dans le covid-19 ?
195
Mission en temps de crise
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Où est dieu dans le covid-19 ?
197
Mission en temps de crise
Effets positifs
Cependant, tout n'a pas été négatif. L'impact du virus nous a
rendus, ou du moins certains d'entre nous, plus conscients de nos limites
et de notre mortalité. Un petit virus qui tient le monde à sa merci a
dissipé l'illusion que nous sommes maîtres de nos vies et que par nos
propres efforts nous pouvons nous rendre invulnérables.
Nous recevons la même leçon que celle que nous avons reçue lors
de l'effondrement des tours jumelles le 11 septembre 2001. En étant
témoins de cet incident, nous sommes passés du sentiment de sécurité et
d'invulnérabilité à la certitude que nous ne sommes pas capables, malgré
tout ce que nous avons accompli, d'assurer notre propre sécurité et celle
de nos proches.
Nous avons eu le temps de remettre en question les hypothèses qui
sous-tendaient notre ancien mode de vie et de reconsidérer notre propre
foi et notre pratique spirituelle. Beaucoup ont connu un rythme de vie
plus lent et ont eu le temps de discerner ce qui est important et ce qui ne
l'est pas dans leur ancien mode de vie. Nous en sommes réduits à nous
demander si nous avons besoin de tous ces voyages internationaux, de
cette vie urbaine à forte densité, de ces achats habituels et de ces longs
trajets. Pour beaucoup, c'est une chance inespérée de redécouvrir des
valeurs et des modes de vie différents. Beaucoup parlent d'un sens
renouvelé de la famille, d'une appréciation du pouvoir du contact avec
les autres et des choses simples de la vie, comme la beauté de la nature.
Le verrouillage a mis les églises dans une situation sans précédent
dans les temps modernes. Dans tout le pays, les lieux de culte ont été
fermés pendant des semaines, parfois même pour des prières privées.
Un sondage a été réalisé en Irlande par l'Institut Iona peu après le
verrouillage total du pays, le 28 mars. Un millier de personnes ont été
198
Où est dieu dans le covid-19 ?
199
Mission en temps de crise
L'exemple de Jésus
En écrivant sur Jésus et la souffrance, le diplomate et poète français
Paul Claudel a dit : « Jésus n'est pas venu pour expliquer la souffrance. Jésus
n'est pas venu pour enlever la souffrance. Il y avait de la souffrance dans le
monde avant que Jésus ne vienne et après qu'il était parti. Ce qu'il a fait, c'est
d'être avec nous dans notre souffrance. » Dans son ministère public, Jésus a
continuellement cherché à trouver ceux qui étaient malades. Quand
Jésus voyait une personne dans le besoin, les évangiles nous disent que
son cœur était ému de pitié et qu'il faisait de son mieux pour l'aider. Il est
un modèle pour la façon dont nous devons prendre soin des autres
200
Où est dieu dans le covid-19 ?
pendant cette crise : avec des cœurs émus par la pitié. En tant que
chrétiens, en période de pandémie, nous pouvons trouver du réconfort
dans le fait de savoir que lorsque nous prions Jésus, qui est très proche
de nous, nous prions quelqu'un qui nous comprend non seulement parce
qu'il est divin et qu'il sait tout, mais aussi parce qu'il est humain et qu'il
a fait l'expérience de toutes choses.
201
Mission en temps de crise
calme et qui n'est pas affecté par les troubles de son monde. Ce n'est pas
l'image que l'on trouve dans la Bible. Dieu a été affligé jusqu'au plus
profond de son cœur, déclare la Genèse, à cause de la méchanceté
violente de ses créatures humaines. Il a été dévasté lorsque sa propre
épouse, le peuple d'Israël, s'est détournée de lui. Saint Paul parle de
l'Esprit Saint gémissant en nous, comme nous gémissons nous-mêmes
dans la douleur de toute la création.
« En tant que chrétiens, dit Wright, nous ne nous lamentons pas très
bien. » Quand je suis en deuil, Jésus est en deuil en moi et le Saint-Esprit
est en deuil en moi (cf. Romains 8). Face à la pandémie, ce que j'essaie de
faire, c'est de penser et de ressentir la situation des gens que je connais
dans le monde entier : soit des amis à moi, soit des gens que j'ai vus à la
télévision, qui sont en phase terminale, des camps de réfugiés sordides,
et je prie avec les psaumes de lamentation en essayant de les embrasser
dans l'amour de Dieu. Cela ne fait donc pas partie de la vocation
chrétienne de pouvoir expliquer ce qui se passe et pourquoi. En fait, cela
fait partie de la vocation chrétienne de ne pas être capable d'expliquer -
et de se lamenter à la place, d'où émerge une nouvelle sagesse.
En réponse à Wright, Andy Davis du Southern Baptist Theological
seminary à Durham, aux États-Unis, adopte un point de vue différent. Il
affirme que Wright soutient que la Bible n'a pas de réponse ultime à ce
virus et que plutôt que d'essayer de trouver une réponse dans la Bible,
nous devrions suivre les psalmistes dans une lamentation sans espoir.
« Wright cite T. S. Eliot : « Le seul conseil est d'attendre sans espoir, parce que
nous espérons la mauvaise chose." Mais la Bible, écrit Andy Davis, a été écrite
pour nous donner de l'espoir. L'espoir chrétien brille le plus quand tous les
espoirs terrestres vacillent et s'éteignent. Mieux qu'Eliot, les chrétiens ont
l'Écriture, qui leur enseigne ce qu'il faut espérer. Les espoirs terrestres sont
souvent anéantis parce qu'ils ne sont pas ancrés dans des informations réelles
sur l'avenir, mais seulement dans des bons vœux et de beaux rêves. Les chrétiens
savent exactement ce qu'il faut espérer. Nous avons été clairement instruits par
la Parole prophétique de Dieu, et nous devrions donc être rayonnants d'espoir -
une conviction inébranlable que l'avenir est indescriptiblement brillant. »
« Le Christ est parmi vous, lui, l’espérance de la gloire ! » ( Col 1, 27).
Davis a raison de dire qu'en tant que chrétiens, nous devrions être
rayonnants d'espoir, mais il est injuste envers Wright et le Psalmiste. Les
psaumes de lamentation peuvent commencer par la lamentation mais ils
se terminent généralement par la louange et l'espérance, bien que le
Psaume 87 soit une exception car une personne crie avec foi vers un Dieu
qui semble être sourd à sa supplication. Prenez par exemple le psaume
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Où est dieu dans le covid-19 ?
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Mission en temps de crise
Dans les soins d'un médecin qui vit un ministère d'espoir. Dans les mots
des écritures sacrées proclamés dans la foi, au chevet d'un malade, pour la
dernière fois.
Dans le parent qui a peur de l'incertitude de l'avenir de son enfant. Dans
la douleur d'un foyer pour sans-abri et des personnes qui nous montrent le sens
de la confiance dans la providence.
Dans le cœur des personnes qui se sont tenues sur leur porche à Pâques
pour applaudir une minute en soutien à tous les travailleurs de la santé du
monde entier.
Dans la peur d'un résident isolé d'une maison de retraite. Dans le chant
des oiseaux qui annoncent chaque jour nouveau,
Et dans la majestueuse primevère violette qui jaillit du sol. Dieu est très
certainement ici.
Un Dieu qui voyage, guérit et nous aime tendrement. Amen
(Alex Garvey).
Pensées et sentiments
Le virus suscite en chacun de nous une variété de pensées et de
sentiments : peur, anxiété, inquiétude, tristesse, joie, gratitude, espoir,
désespoir, repli sur soi-même, ouverture aux autres, sentiment d'être
seul, isolé, déprimé. Nous devons remettre en question toutes ces
pensées et tous ces sentiments. Certains de ces sentiments viennent de
Dieu, par exemple la joie du retour d'un frère après des semaines passées
dans l'unité de soins intensifs.
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Où est dieu dans le covid-19 ?
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Les écrits des confrères SMA
J. BONFILS, Être avec Lui. Le prêtre, consacré et Pasteur, Parole et silence
2020
B. BOUCHEIX, Monseigneur Boucheix, Créer 2021
D. CORRIGAN, Dromantine through the year. Its seasonal beauty
photographed, SMA Publications 2020
D. DISSOU, L’auto conscience de soi et la responsabilité de l’être-dans-le-
monde chez J. de Finance. Thèse de Licence en Philosophie, Université
Pontificale Grégorienne, Rome 2020
M. GUETOU, The divine plan of salvation and human response. Thèse de
Licence en Écriture Sainte at the Institut Pontifical Biblique, Rome 2020
J.-M. GUILLAUME, Bernard Bardouillet sma, 2020
J.-M. GUILLAUME, La SMA en Inde, 2020
J.-M. GUILLAUME, Les Actes des Apôtres. Introduction et commentaire,
2020
J.-M. GUILLAUME, Marc, Paulines 2020
R. MANDIROLA, La gioia di seguirti. Lettura meditata della Lettera ai
Filippesi, EDB 2020
A. MANDONICO, Mio Dio come sei buono. La vita e il messaggio di
Charles de Foucauld, LEV 2020
P. MCCAWILLE, Leaving a legacy in Lagos, OLREC 2021
P. SAULNIER, 60 ans de vie missionnaire, SMA publications 2020
B. SEMPLICIO, À l’écoute d’une retraite, Erga 2020
B. SEMPLICIO, Mgr de Marion Brésillac fondateur “de fait” de la SMA,
2020
SMA (IRLANDE), The life of M. de Marion Brésillac, SMA 2020
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Ressources SMA
Beaucoup de gens se demandent où trouver diverses ressources SMA.
Ici, nous les donnons tous en un seul endroit :
SMAnetFamily :
• Vous pouvez y trouver les bases de données SMA, y compris l'ÉTAT
et le nécrologe en ligne. Vous pouvez également voir la liste des
personnes qui sont passées par chaque adresse SMA.
• SMAnetFamily héberge des documents SMA officiels qui ne sont pas
disponibles dans le domaine public comme des divers directoires.
• Nous organisons des élections en ligne via cette plateforme.
• Les membres SMA temporaires et permanents ont reçu leurs noms
d'utilisateur et mots de passe pour accéder à ce cyberespace. Chaque
Entité est responsable de tenir à jour les détails concernant l'Entité.
Quiconque a besoin d'aide peut contacter les responsables de l’Entité
concernés et les responsables peuvent contacter le Centre Médias.
SMA Publications :
Écrits de et sur notre fondateur :
Au format PDF : Tous les écrits du Fondateur et un bon nombre
d'écrits sur lui sont disponibles en téléchargement sur notre site Web.
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