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Le droit pénal face au dol

dans la conclusion du contrat


INTRODUCTION
• Contrat :

➢1101 du code civil ==> Accord de volonté entre deux ou plusieurs


personnes destiné à créer , modifier , transmettre ou éteindre des
obligations.

➢1128 du code civil ==> 3 conditions de validité:


- Consentement de la partie qui s’oblige
- Capacité des parties
- Contenu licite et certain
• Elément essentiel du contrat ==> Consentement

• Théorie des vices du consentement : 1130 du code civil ==> «L'erreur,


le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle
nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou
aurait contracté à des conditions substantiellement différentes.
Leur caractère déterminant s'apprécie eu égard aux personnes et aux
circonstances dans lesquelles le consentement a été donné.»
• Dol :

➢1137 du code civil ==> « Fait pour un contractant d'obtenir le


consentement de l'autre par des manœuvres ou des
mensonges. Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle
par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère
déterminant pour l'autre partie. Néanmoins, ne constitue pas un dol le
fait pour une partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de
la valeur de la prestation. »

➢Du grec « dolos », qui signifie l'« appât pour attirer le poisson » ==> Notion
de tromperie.

➢Au stade de la formation du contrat ==> Tromperie visant à conduire


l’autre partie à conclure le contrat sur une fausse conviction.
• Droit pénal :

➢Détermine les actes, comportements ou conduites antisociales qui


constituent des infractions.

➢Prévoit les sanctions qui leurs sont applicables.

❖Problématique : Comment le droit pénal appréhende-t-il la notion de


dol dans la conclusion du contrat ?
LES TROMPERIES
• Volet pénal du dol civil.

• Sanctionnent la déloyauté et la mauvaise foi dans le contrat.

• L. 441-1 du Code de la consommation ==> Incrimination

• L. 454-1 du Code de la consommation ==> Sanctions


A. La détermination du délit de tromperie
L. 441-1 du Code de la consommation
Il est interdit pour toute personne, partie ou non au contrat, de tromper ou tenter de tromper
le contractant, par quelque moyen ou procédé que ce soit, même par l'intermédiaire d'un
tiers :
1° Soit sur la nature, l'espèce, l'origine, les qualités substantielles, la composition ou la
teneur en principes utiles de toutes marchandises ;
2° Soit sur la quantité des choses livrées ou sur leur identité par la livraison d'une
marchandise autre que la chose déterminée qui a fait l'objet du contrat ;
3° Soit sur l'aptitude à l'emploi, les risques inhérents à l'utilisation du produit, les contrôles
effectués, les modes d'emploi ou les précautions à prendre.
Les dispositions du présent article sont également applicables aux prestations de services.
1) Le champ d'application du délit de tromperie
a. Le champ d'application tenant à la personne auteur
du délit
• Sur l'auteur du délit:

➢ « quiconque » ==> professionnel et particulier


➢ « partie ou non au contrat » ==> fait fi de l’éventuel lien contractuel entre l’auteur du délit
et la victime.

• Sur la victime :

➢ « contractant »

NB : La victime n'est pas limitée au seul consommateur. Ainsi, l’infraction de tromperie est applicable aux relations contractuelles entre professionnels, y
compris contractant dans leur domaine de compétence (Cass. crim., 4 nov. 2008, nº 07-88007).
b. Le cadre contractuel

• Lien contractuel entre la victime et l’auteur de l’infraction.

Il n'est pas nécessaire que le consommateur ait été trompé pour


que la répression puisse être mise en œuvre, la tentative étant
expressément prévue par la loi.
2) Les éléments constitutifs du délit de tromperie
a. L'élément matériel

• Comportement incriminé ==> tromper, par quelque moyen ou


procédé que ce soit.

• Objets de l'incrimination ==> marchandises, choses, produits,


services (L. 216-1 du Code de la consommation).

• Cas de tromperies ==> qualités substantielles, origine, quantité, etc...


• Sur l'acte de tromperie

➢Dol ==> Induire le cocontractant en erreur afin d’emporter son


consentement, par quelque moyen ou procédé que ce soit ».

NB: Le texte n’énumère pas les méthodes précises que doit mettre en
œuvre l’auteur de l’infraction car le législateur a souhaité une
application la plus large que possible.
• Sur l'objet de la tromperie

➢« marchandises » ==> Tout ce qui circule dans le commerce.


Ne pas confondre avec la notion de « biens » au sens du droit civil, le
concept de « marchandises » étant plus étroit.

➢« choses »
➢« produits »
NB : L’affaire du sang contaminé, non résolu sur le terrain de l’empoisonnement, le fut sur celui de la tromperie
(Cass. crim., 22 juin 1994, nº 93-83900 : Bull. crim., nº 248). Ainsi, la jurisprudence a pu décider que le sang
était un produit entrant dans le champ d’application de l’article L. 441-1.
La question des biens immobiliers et des biens incorporels

La Cour de cassation met en œuvre une appréciation étroite de la notion. Ainsi, la


jurisprudence exclus du champ d'application de la loi les immeubles (cette
solution d’exclusion s’applique, même si l’appartement est meublé : Cass. crim.,
13 janv. 2009, nº 08-84069 : Bull. Crim., nº 12) et les biens
incorporels (Cass. crim., 2 nov. 2005, nº 04-86592 : Bull. crim., nº 273).
La question des prestations de services

L’article L. 441-1 du Code de la consommation inclus :


▪ les prestations de services (Cass. Crim., 22 juin 1994, nº 93-83900 : Bull. crim., nº 248)
▪ les logiciels (Cass. crim., 2 nov. 2005, nº 04-86592 : Bull. crim., nº 273).
• Sur les cas de tromperie

Sur quoi la tromperie peut-elle porter?

➢ La nature, l’espèce, l’origine, les qualités substantielles, la


composition ou la teneur en principes utiles de toutes marchandises;

➢ La quantité des choses livrées ou leur identité par la livraison d’une


marchandise autre que la chose déterminée qui a fait l’objet du contrat;

➢ L’aptitude à l’emploi, les risques inhérents à l’utilisation du produit,


les contrôles effectués, les modes d’emploi ou les précautions à
prendre.
b. L’élément moral

• Infraction intentionnelle ==> démontrer la volonté délictueuse du


professionnel.

• Jurisprudence sévère en la matière du fait de la qualité de


professionnel de l'auteur.

NB : Le fait pour le professionnel de respecter les exigences légales ne le garde


pas de toutes poursuites.
B. Les sanctions

• Loi du 17 mars 2014 ==> Durcissement de la répression en matière de


tromperies.

➢Avant ==> 2 ans d'emprisonnement et/ou 37 500 euros d'amende.

➢Maintenant : L. 454-1 du Code de la consommation ==> 2 ans


d'emprisonnement et 300 000 euros d'amende.

➢Mise en relation avec la peine encourue dans le cadre des pratiques


commerciales trompeuses.
• L. 454-4 du Code de la consommation ==> Possibilité de moduler le
montant de l'amende encourue.

• Usage de 131-38 du Code pénal pour les personnes morales responsables


de tromperies ==> Amende X 5.

• L. 454-2 et L. 454-3 du Code de la consommation ==> Circonstances


aggravantes.

• L. 454-5 du Code de la consommation ==> Peines complémentaires.

• 131-39 du Code pénal ==> Peines complémentaires pour les personnes


morales.
Remarque
Les allégations, indications et présentations du professionnel
doivent être fausses ou de nature à induire en erreur le consommateur afin de
permettre l'application de sanctions pénales. De cette constatation, il est
possible d'en déduire deux conclusions :

➢Il existe plusieurs degrés au niveau de l'atteinte portée au consentement


donné par le consommateur ==> les présentations fausses sont plus graves
que celles de nature à induire en erreur.

➢Ces différents degrés d'atteinte sont réprimés exactement de


la même manière.
Réflexions tenant à la peine

• Cas d'une fausse déclaration ==> Proposer une peine plus importante : 5
ans d'emprisonnement et 375 000 euros d'amende.

• Cas d'une déclaration véridique de nature à induire en erreur le


consommateur ==> 1 an d'emprisonnement et 150 000 euros d'amende. En
revanche, si le parquet arrivait à apporter la preuve que cette
inintelligibilité des informations transmises a été accomplie de manière
délibérée ==> 5 ans d'emprisonnement et 375 000 euros d'amende.
L'ESCROQUERIE
313-1 du code pénal ==> « Le fait, soit par l'usage d'un faux nom ou
d'une fausse qualité, soit par l'abus d'une qualité vraie, soit par l'emploi
de manœuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou
morale et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d'un
tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir
un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge.

L'escroquerie est punie de 5 ans d'emprisonnement et de 375 000


euros d’amende. »
1) Les manœuvres frauduleuses
• Procédé classique de l’escroquerie

• Absence de définition législative ==> définition jurisprudentielle :


➢ + qu'une omission
➢ + qu'un mensonge
➢ Nécessité d'un comportement positif, d’une action.
NB: Elles peuvent résulter d’un mensonge ou d’une omission si ces derniers sont complétés
par des actes positifs.

• Protéiformes (intervention d'un tiers, mises en scène etc...)


Sur l'intervention d'un tiers
L’intervention d’un tiers pour donner du crédit aux sollicitations de l’escroc,
notamment lorsqu’il se prévaut d’une qualité vraie, constitue une manœuvre
frauduleuse. Si le tiers est de mauvaise foi il sera poursuivi pour complicité
d’escroquerie (Crim. 14 juin 1977, Bull. crim n°215).

La participation du tiers n’implique pas nécessairement un comportement actif.


Elle peut résulter de sa seule présence passive aux côtés de l’escroc qui utilise la
caution ou le crédit moral qu’elle représente aux yeux de la victime (Crim. 2 juin 1986,
Bull. crim n ° 186).

Le tiers peut aussi ne pas exister réellement, mais seulement dans l’esprit de l’escroc
qui l’invente pour les besoins de la cause.
2) Le caractère trompeur de l’escroquerie

• 313-1 du code pénal ==> Objet de l’escroquerie : « tromper une


personne physique ou morale ».

• Plusieurs formes de tromperie dégagées par la jurisprudence. Le


caractère trompeur est établi lorsque les faits ont pour but de faire
croire à :
➢ une fausse entreprise
➢ un pouvoir ou un crédit imaginaire
➢ la survenance d’un évènement chimérique.
3) L’intention frauduleuse
• Infraction intentionnelle ==> Intention de tromper.

• Non constituée en cas de négligence ou d'imprudence.

• La preuve de l’intention coupable découlera souvent des moyens mis


en œuvre par l’escroc. Toutefois, la question de l’intention est
laissé à l’appréciation souveraine des juges du fond.
4) La sanction

• Sanction principale : 5 ans d’emprisonnement et 375 000 euros


d'amende.

• 313-2 du code pénal ==> Circonstances aggravantes.


CONCLUSION
En somme, tout comme en droit civil, le dol en droit pénal est considéré comme un
délit.

En outre, à situation comparable, l'on remarque que le champ d'application du


droit pénal se trouve davantage étendu que celui du droit civil; toutefois, il est
possible de considérer que la tromperie unifie étroitement les deux matières.

Enfin, l'élargissement des champs d'application des infractions précédemment vues


par le législateur, ainsi que la sévérité de la jurisprudence en la matière, témoignent
d'une volonté commune de protéger autant que possible les relations
contractuelles.

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