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Martin Pénet
2004/1 n° 17 | pages 51 à 66
ISSN 1262-2966
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-societes-et-representations-2004-1-page-51.htm
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LA CHANSON DE LA SEINE
51
A
VEC L’ESSOR DE L’INDUSTRIE DU SPECTACLE, dans la seconde moitié du
XIXe siècle, la production française de la chanson s’est concentrée dans la capitale.
Paris est donc devenu le cadre naturel des intrigues déployées par les paroliers,
au point de favoriser le développement d’un genre propice à l’étude des imaginaires
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1. Dans la préface de l’ouvrage Paris, ses poètes, ses chansons, Paris, Seghers, 1973, p. 5.
2. « L’air de Paris » (paroles : Francis Lemarque – musique : Marc Heyral) 1957.
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LA CHANSON DE LA SEINE
Cent vingt-trois chansons inspirées par la Seine, éditées à Paris de 1860 à nos jours,
sont analysées ici.
Dix-huit portent sur le fleuve en général, dix-neuf sur les abords de Paris (amont et
aval), dix sur les crues, quatre sur les bains, treize sur le trafic (transports, bateaux-
mouches, métiers de l’eau), vingt et une sur les lieux et monuments remarquables, vingt
sur les ponts, dix-huit sur les quais. Quant aux rythmes des chansons, le tiers d’entre elles
utilisent les mesures à deux temps (marches, one-step, fox-trot…), alors que près de
quatre-vingt déploient les mesures à trois temps (quelques javas, mais surtout beaucoup
de valses). À écouter les musiciens, le rythme très entraînant de la valse épouse sans doute
52 mieux les pensées inspirées aux paroliers et poètes par les mouvements du fleuve.
L’attraction du fleuve
Y a la Seine
À n’importe quelle heure
Elle a ses visiteurs
Qui la regardent dans les yeux
Ce sont ses amoureux
À la Seine3
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IMAGINAIRES PARISIENS
C’est également la femme confidente d’un jour, comme dans cette romance d’Anne
Sylvestre, toute empreinte de sensibilité, qui présente une Seine salvatrice :
Quand je trouvais la ville trop noire
Tu dorais des plages pour moi
Tu mettais ton manteau de soie
Et pour moi qui ne voulais plus croire
Et pour moi, pour pas que je me noie
Tu faisais d’un chagrin une histoire, une joie 6
Sous le miroir que tend le fleuve à celui qui s’y regarde d’en haut et croit pouvoir lui confier
sa souffrance, gisent dans l’oubli ou l’indifférence des secrets en abondance. Insondable
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Elle figure enfin l’ultime refuge, la délivrance des âmes en peine. Assez rarement
évoqué dans les chansons sur la Seine, le suicide est pourtant un des ressorts classiques
de la chanson réaliste :
Un soir elle se j’ta dans l’eau
Morte elle était encore jolie
Elle avait fait le dernier dodo
Dans le lit de la Seine son amie 9
LA CHANSON DE LA SEINE
Miroir commun des amoureux qui l’ont choisie comme témoin de leurs effusions,
mais aussi sépulture commune de ceux qui lui ont demandé d’engloutir leurs derniers
instants, la Seine accompagne la vie des Parisiens dans une mesure du temps indéfinie.
Néanmoins, tout inscrite qu’elle soit dans une très longue durée, superbe jusqu’à
l’indifférence, la Seine a sa vie propre. Il lui arrive d’être sujette à des colères subites, diffi-
ciles à juguler, qui rappellent à Paris la présence de la nature. Jusqu’à ce que son cours soit
régulé en amont (et encore, pour combien de temps ?), les crues la font souvent déborder.
Celle de janvier 1910, qui a envahi une grande partie du centre de la capitale a été l’objet
54 d’une dizaine de chansons d’actualité, certaines vendues au profit des sinistrés, écrites avec
le ton grandiloquent des complaintes de naguère sur des airs connus du moment :
Ah ! quel affreux malheur
Ô ! Paris, orgueilleux de la Seine
Elle sème l’horreur
La ruine, la détresse et la peine
Le fleuve a débordé
En jetant partout l’âpre misère
Que d’enfants, que de mères
N’auront plus qu’à pleurer ! 10
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La première ligne de bateaux à hélice, reliant Paris à Saint-Cloud, fut créée sur la Seine
en 1826. La coque métallique fit son apparition dans les années 1850, permettant d’aug-
10. « Aux victimes de l’inondation » (p: Valentin Pannetier) sur l’air « Laisse-moi pleurer » (m: Vercolier) 1910.
11. Comme l’a montré Isabelle Backouche dans son ouvrage La Trace du fleuve : la Seine et Paris (1750-
1850), Paris, EHESS, 2000.
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IMAGINAIRES PARISIENS
12. Voir Christian Dupavillon, Paris côté Seine, Paris, 2001, Le Seuil, pp. 154-157.
13. « Tout le long de la Seine » (p : René Pourrière – m : Edmond Brunswick) 1914.
14. « L’affaire du bateau-mouche » (p : Paul Gilson – m : Henri-Jacques Dupuy) ca 1957.
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LA CHANSON DE LA SEINE
Malgré l’évolution du trafic, la circulation sur la Seine n’a jamais cessé. Durant
l’entre-deux-guerres, des bateaux-mouches plus modestes disputent leur territoire aux
péniches et remorqueurs. Les ports de la capitale abritent une flottille d’embarcations qui
a aussi ses héros : les marins parisiens. Le fleuve est le théâtre d’un trafic parfois intense :
56 « Sur la Seine par les gros temps / il y a des tangages inquiétants »16, qui donnent aussi
l’occasion de décrire un capitaine de bateau-mouche flambard et vantard, pour qui tous
les ponts sont des écueils : « C’est moi le capitaine / d’Ivry jusqu’à Suresnes / je suis le
maître à bord / et dois braver le sort ! »17
Avec les ponts pour tout récif, le marin parisien pourrait dessiner une carte du tendre.
Même lorsqu’elle décrit la réalité ou devient témoignage sur l’évolution de la vie
matérielle, la chanson emprunte fréquemment le chemin des sentiments : l’imaginaire
amoureux s’impose au registre du quotidien.
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IMAGINAIRES PARISIENS
Marie Laurencin est devenu le symbole de leur rupture, « la chanson triste de cette longue
liaison brisée »20. Écrit en 1912, et publié l’année suivante dans le recueil Alcools, ce poème
adopte la forme d’une chanson, avec quatre strophes et un refrain : « Vienne la nuit sonne
l’heure / les jours s’en vont je demeure ». Enregistré par son auteur avec un ton empha-
tique21, il a été mis en musique pour la première fois en 1952 par Léo Ferré22, qui en a fait
un des chefs d’œuvres de la chanson française. Le rythme de valse lente qu’il a choisi
souligne l’aspect méditatif et mélancolique du texte où le monument devient un témoin
d’un bonheur révolu et l’eau le symbole de la fuite du temps, de la précarité des amours :
Passent les jours et passent les semaines 57
Ni temps passé
Ni les amours reviennent
Sous le pont Mirabeau coule la Seine.
Les ponts inspirent aussi des idylles construites sur leurs noms, comme celle-ci,
chantée par les Frères Jacques, qui se décline en balade poétique le long du fleuve :
Viaduc d’Auteuil, il lui fit de l’œil
Sur le Pont Marie, elle lui a souri
Il ne l’accosta que sur l’pont d’l’Alma
L’avait l’air d’un œuf jusque sur l’Pont Neuf 23
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En somme, comme le constate Monique Marty : « Les ponts de Paris font partie du
décor. Si brusquement on les effaçait, la Seine semblerait nue. Et pourtant nous les
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empruntons sans y porter attention. »25 Parmi les quelque trente-six ponts que comporte
actuellement Paris, celui des Arts – passerelle voulue par Napoléon pour relier le Louvre
à l’Institut – a été le plus chanté, sans doute à cause de sa situation centrale au cœur artis-
tique de la ville, de son architecture de fer paradoxale parmi les ouvrages de pierre et aussi
parce qu’il est réservé aux piétons :
Sur le pont des Arts,
Avec mille grâces, on peut voir
Le cœur de Paris
58 Qui s’ouvre au baiser de la nuit 26
Peu après, Georges Brassens fait le choix d’un tout autre ton en situant au même
endroit l’intrigue de sa chanson « Le vent » :
Si par hasard, sur l’pont des Arts
Tu croises le vent, le vent fripon
Prudence, prends garde à ton jupon 27
Son voisin, le Pont-Neuf – en fait le plus ancien de la capitale, car il fut le premier
construit en pierre – a retenu davantage l’attention à la fin du XIXe siècle. On se souve-
nait alors de la vie intense qu’il avait connue depuis son inauguration en 1604, abritant
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De même qu’on cherche à lire le fond du fleuve sous sa surface, on va et vient entre
les deux étages du pont. Sa partie supérieure, le tablier, est le lieu du passage, de la
rencontre fortuite ou du rendez-vous galant, donc un lieu de l’imaginaire poétique. Mais
sous ses arches, se joue une « comédie humaine » plus noire ; la voûte est l’obscur refuge
d’une population (bohème, miséreux, « petits métiers » d’autrefois) qui ne côtoie guère
les passants « d’en haut », ceux de la surface parisienne. À des niveaux et des horaires
différents, le pont est le symbole d’une société à plusieurs vitesses :
25. Monique Marty, Mini Saga des ponts de Paris, Port autonome de Paris, Paris, 1979, p. 13.
26. « Le pont des arts » (p : Jean Lambertie – m : Pierre Avray) 1951.
27. « Le vent » (p & m : Brassens) 1952.
28. « Le pochard du Pont-Neuf » (p : Villemer et Delormel – m : Auguste Teste) 1889.
29. « Le mendiant du Pont-Neuf » (p : Delormel et Garnier – m : Émile Spencer) 1894.
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IMAGINAIRES PARISIENS
Dans une couleur plus estivale, Mistinguett joue sur cet effet de contraste entre les
riches qui vont sur la côte normande et les pauvres qui restent à Paris mais savent y
prendre du bon temps :
Du Point du Jour à Charenton
Sous les ponts
Il y fait frais, il y fait bon
Sous les ponts
Le soir, c’est positif,
On y fait la belote
Et comme apéritif,
On a toujours d’la flotte 33
Après la guerre, le dessous du pont disparaîtra progressivement du décor des chansons,
au profit du seul niveau supérieur, le lieu de la poésie intemporelle, le prolongement du quai.
LA CHANSON DE LA SEINE
Les quais
Au-dessus de la surface de l’eau, qui forme une sorte de premier gradin, les quais
parisiens se décomposent en deux niveaux, que décrit Alexandre Arnoux : « Un gradin
plus haut, le bas port spacieux, planté de peupliers, d’érables, de platanes à sa limite la
plus extérieure, au pied du quai proprement dit. Voilà ce qui rend unique, à Paris, les
berges de la Seine ; […] Au plus haut gradin, penchés sur leurs inférieurs, des arbres
encore, et des mêmes espèces ; leurs enfourchures dépassent le sommet de ceux du
premier degré. »34 Ces deux files indiennes d’arbres superposées laissent filtrer un arrière-
60 plan architectural ; comme une avenue bordée de façades qui sont autant de monuments,
la Seine met en valeur l’harmonie des constructions qui se font face et invite le prome-
neur à les admirer, tel Léon-Paul Fargue : « Chef-d’œuvre poétique de Paris, les quais ont
enchanté la plupart des poètes, touristes, photographes et flâneurs du monde. »35
La Seine offre en effet à ceux qui savent prendre le temps de regarder un spectacle
sans cesse renouvelé. Le titi de Paris en attend beaucoup de mouvement : « Je me paye à
l’œil un fauteuil / […] / En m’battant les flancs / pieds ballants / j’vois passer les
chalands. […] / Jamais on n’verra d’opéra / ayant plus d’mise en scène »36. Le lettré, lui,
est en quête de tranquillité :
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Ce spectacle mouvant peut aussi suggérer des envies d’ailleurs. Mais le voyage,
lorsqu’il se réalise, est souvent ressenti comme un exil : « J’ai le mal de la Seine / qui
écoute mes peines / et je regrette tant / les quais doux aux amants. »38
Car peu de capitales, Budapest ou Prague peut-être, offrent au flâneur une aussi belle
promenade, zone de contact privilégiée entre l’élément liquide et l’élément minéral.
34. Alexandre Arnoux, Paris ma grand’ville, Paris, Flammarion, 1949, pp. 31-32.
35. Léon-Paul Fargue, Le Piéton de Paris, Paris, Gallimard, 1939 (rééd. 1993, p. 72).
36. « Les quais » (p : Victor Meusy – m : Georges Marietti), créée par Eugénie Buffet en 1894.
37. « Près des rives de la Seine » (p & m : Charlys), créée par Jean Cyrano en 1932.
38. « Le mal de Paris » (p : Mouloudji – m : Pierre Arimi), créée par Mouloudji en 1951.
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IMAGINAIRES PARISIENS
Léon-Paul Fargue précise ce caractère unique : « Rien n’est plus de Paris qu’un quai de
Seine, rien n’est plus à sa place, dans son décor. »39 Contrairement à d’autres villes
comme Rome et Londres, où le fleuve qui les traverse constitue une sorte de frontière et
d’espace sans âme, la Seine semble irriguer Paris et assurer sa cohésion.
Traversant la capitale
Lentement au fil de l’eau
La promenade idéale 61
Que l’on fait sur un bateau
Ah ! les superbes images
Défilant devant nos yeux.40
LA CHANSON DE LA SEINE
Entre les deux rives, sur l’île de la Cité, le marché aux fleurs semble être quant à lui
un lieu hors du temps dédié aux rencontres amoureuses :
En passant sur le quai fleuri de Paris
Tous les jours c’est le printemps qui me sourit
[…] Tendres bouquets, parfums discrets
Pour quelques francs c’est l’hiver qui disparaît 44
La chanson des quais repose sur peu de personnages et s’incarne dans un espace
restreint. À l’est de Paris, zone assez déshéritée longtemps livrée aux bâtiments indus-
triels, « Là où le fleuve est gris comme une veine »46, les rives de la Seine n’ont pas inspiré
beaucoup de chansons. Bercy a abrité plusieurs siècles durant les entrepôts de vin et…
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On se souvient à peine d’un marchand de frites qui avait sa clientèle d’amoureux quai
de la Rapée :
Avec les beaux jours qui reviennent
Le long des quais, on se promène
En grignotant, le long de la Seine
Un cornet de frites. 48
44. « En passant sur le quai fleuri » (p: François Llenas – m: Roger Lucchesi), créée par André Claveau en 1944.
45. « Voilà la Seine » (p : Jacques Mareuil – m : Jacques Mareuil et Daniel White) ca 1950.
46. « Quai de Bercy » (p : Henri Gougaud – m : José Cana), créée par Henri Gougaud vers 1965.
47. « Quai de Bercy » (p : Maurice Chevalier – m : Alstone), créée par Maurice Chevalier en 1946.
48. « Cornet de frites » (p : Francis Lemarque – m : Bob Astor), créée par Yves Montand en 1950.
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IMAGINAIRES PARISIENS
L’Île Saint-Louis, aux allures de ville de province posée au beau milieu de la capitale,
a nourri les rêves de grands paroliers des années cinquante, comme Henri Contet :
63
Moi je dors près de la Seine
Près de la Seine à Paris
Sous le mât de misaine
Du bateau fleuri de l’Île Saint-Louis 50
LA CHANSON DE LA SEINE
Les monuments que l’on peut admirer sur ce parcours, véritables « monstres sacrés »,
ne manquent pas, mais notre but ici n’est pas de les évoquer. La chanson des cent
cinquante dernières années ne s’est d’ailleurs attachée qu’à quelques uns d’entre eux.
Notre corpus ne contient qu’une seule citation du Louvre ; pas de traces des Invalides, de
l’Institut, etc. Sans doute ces hauts lieux de l’architecture et de la culture sont-ils peu à
même de nourrir l’imagerie populaire. Le passé royal est-il aboli depuis l’incendie des
Tuileries que l’on retrouve évoqués plutôt par les refrains de la Commune ? Dans les
chansons, la description du Paris monumental est dissociée des représentations de la
Seine et se fixe davantage sur les « hauteurs » du centre : la « tour pointue » du quai des
64 Orfèvres, la tour Saint-Jacques, le souvenir de la tour de Nesle… L’obélisque de la place
de la Concorde, plus fréquemment cité, est parfois rapproché de la Tour Eiffel53,
qu’Apollinaire surnommait « la bergère des ponts ». Mais cette dernière se détache du
fleuve pour constituer un emblème de la cité à elle toute seule. De sorte que le nombre
abondant de chansons qui la concernent mériterait une étude distincte, incluant les
expositions universelles. De même pour Notre-Dame, qui, précédant la Tour Eiffel,
symbolise la ville, presque indépendamment du fleuve.
La chanson des trois décennies suivantes semble bouder la vieille bâtisse et il faut
attendre les années cinquante (la cathédrale a joué un rôle central en août 1944) pour
trouver en nombre des chansons sur Notre-Dame, traitée sous l’angle du symbole :
53. Sur le mode satirique dans « Sur l’obélisque » (p : René Dorin – m : A. Renaud) 1932, ou sur le mode
grivois dans « Ça ne vaut pas la tour Eiffel ! » (p : Richard O’Monroy – m : Désiré Dihau) 1900.
54. « Notre-Dame de Paris » (p : Paul Burani et Alfred Isch-Wall – m : Francis Chassaigne) ca 1870.
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IMAGINAIRES PARISIENS
Le nom de Notre-Dame fait écho dans tout le pays. Lieu majeur de l’identité natio-
nale, elle est aussi devenue, avec l’étoile à huit branches, astre de métal jaune incrusté au
revêtement du parvis, le point zéro des routes de France.
L’obélisque, quant à lui, est utilisé comme lieu de rendez-vous dans des intrigues
65
d’opérettes56, et les Frères Jacques, interprétant une ode légère et surréaliste de Jean
Tardieu, situent place de la Concorde le point de rencontre improbable dans un Paris
désert de deux Parisiens du sexe opposé habitant l’un sur la rive droite (Montmartre) et
l’autre sur la rive gauche (Montsouris) :
Du sud au nord, du nord au sud
De beau matin ils sont partis
Sur la place de la Concorde
Ils se sont rencontrés à midi. 57
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C’est d’ailleurs l’ensemble des berges voisines qui aspire à la même transformation.
À l’opposé de ce qu’avait imposé Georges Pompidou quand, en 1964, il faisait construire
la première voie express et en imaginait une autre. Après l’ère du tout automobile
s’annonce celle de la reconquête des berges par le piéton et le touriste.
55. « Notre-Dame de Paris » (p : Eddy Marnay – m : Marc Heyral), créée par Edith Piaf en 1952.
56. « Va m’attendre autour de l’obélisque » (p : Léo Marchès et Georges Lignereux – m : Philippe Parès et
Georges Van Parys) de l’opérette « La petite dame du train bleu » (1927), puis « Attends-moi sous l’obé-
lisque » (p : François Llenas et M. Vandal – m : Guy Lafarge) de l’opérette « Bel amour » (1944).
57. « Place de la Concorde » (p : Jean Tardieu – m : Maurice Thiriet) 1954.
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LA CHANSON DE LA SEINE
58. « Les bords de Seine » (p : Étienne Daho et Astrud Gilberto – m : Arnold Turboust et Bally) 1996.