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LA FIN DE LA CURE

Alain Vanier

Érès | « Figures de la psychanalyse »

2010/2 n° 20 | pages 81 à 92
ISSN 1623-3883
ISBN 9782749213187
DOI 10.3917/fp.020.0081
Article disponible en ligne à l'adresse :
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La fin de la cure 1
• Alain Vanier •

Je propose quelques fragments de réflexion en suivant certains textes comme


autant de marques témoignant des questions que je me pose. Freud recomman-
dait de faire une analyse tous les cinq ans, et la question de la place de l’analyse
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personnelle de l’analyste, au cœur de ses échanges avec Ferenczi, sera diverse-
ment reprise. Mais Lacan est certainement celui qui a manifesté l’intérêt le plus
soutenu pour le problème de la fin de la cure, à entendre aussi comme finalité :
quels sont les buts du traitement et quel est son terme ? Cet enjeu devient avec
lui majeur, puisqu’il a mis l’accent, dans la formation, sur l’analyse du futur
analyste.

La position de Freud, bien sûr, ne se résume pas au quinquennat analytique.


Le rejet de la féminité, le roc de la castration, constitue une butée, qui pour
Ferenczi déjà est à franchir, un écueil au projet, très optimiste, de l’analyse totale,
absolue. Pour Lacan, quoiqu’on puisse en dire, il n’y a pas de Jugement dernier à
la fin de l’analyse.

Pour tout un courant postfreudien, la fin de l’analyse était l’assomption du


bon objet génital. Une autre version optimiste : chacun trouve ainsi sa chacune.
Il fallait être sourd à tout ce que l’analyste pouvait entendre toute la journée
pour soutenir une telle perspective. Le problème, en effet, est que les objets
partiels ne sont pas totalisables et qu’il ne s’agit là que de l’accomplissement du
vœu névrotique – à quand la rencontre ? À la fin de l’analyse ? On a là l’écueil
des plus communs de la cure comme rectification, quasi orthopédique, d’une
identification. Lacan a pu dire que le fantasme va au névrosé comme des guêtres
à un lapin. Le névrosé se tient toujours à distance de son fantasme, et, surtout, il
ne veut rien en savoir. C’est donc, à plus d’un titre, une voie sans issue, mais c’est
aussi la raison pour laquelle l’un des enjeux de la fin de la cure sera la pulsion et

1. Transcription non réécrite par l’auteur d’une communication au Séminaire des


membres d’Espace analytique, le 6 septembre 2009.
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son destin, remanié par le traitement. Or, le choix de la pulsion et son corollaire,
la demande, est celui que fait le névrosé au détriment du désir et du fantasme.
C’est ce qui l’oriente en quelque sorte. La notion d’une pulsion génitale va dans
ce sens. Le névrosé repère son fantasme comme imaginaire et il s’en tient pour-
tant à distance. C’est pour cela que la perversion fascine, elle réussit là où la
névrose échoue. Elle met en acte le fantasme et elle y investit quelque chose de
la jouissance. Donc l’idée de l’accomplissement pulsionnel, la solution du bon
objet génital, consiste à jouer la carte de la demande pour méconnaître le désir.

Lacan aura donné de nombreuses définitions de la fin de l’analyse suivant les


divers temps de son enseignement, mais elles ne sont jamais contradictoires avec
ce qu’il pourra dire ensuite. Il n’est, bien sûr, pas pensable d’être exhaustif dans
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ce cadre, encore une fois voici seulement quelques jalons. Je fais aussi référence
au remarquable exposé 2 de Gisèle Chaboudez, qui ne centrait pas son propos sur
le tout dernier Lacan uniquement. Elle montrait comment la question de la passe
et de la fin d’analyse se nouent à des questions précoces de son enseignement.

L’enjeu de la fin de l’analyse est bien le symptôme, qui est d’abord une parole
bâillonnée, et Lacan situe alors la terminaison de l’analyse dans le moment où la
satisfaction du sujet se réalise dans la satisfaction de chacun, « ceux qu’elle s’as-
socie dans une œuvre humaine ». Cette formule est-elle obsolète ? Certainement
pas, on y trouve la mention d’une limite nécessaire à la satisfaction – la jouis-
sance –, la possibilité d’inscription renouvelée, dans le lien social, de cet
« asocial » qu’est le névrosé. D’autres formulations suivront : procès de recon-
naissance du désir, repérage des modalités de construction de l’image narcissique
dans le schéma optique, avec la façon dont le sujet va pouvoir, dans une certaine
mesure, savoir quelque chose de son mode fondamental de méconnaissance dans
la capture imaginaire, etc.

Selon Octave Mannoni, il y a deux piliers sur lesquels la psychanalyse s’est


construite : la Traumdeutung, d’un côté, et les Trois essais, de l’autre. Deux piliers
distincts selon lui, or l’un de nos enjeux cruciaux est dans le mode d’articulation
de ces deux versants, qui ne sont que les deux versants du symptôme. Le symp-
tôme comme parole bâillonnée, et le symptôme comme jouissance liée à un
élément qui ne tient pas à la parole, bien qu’il en soit un effet, un élément qui

2. G. Chaboudez, Intervention aux Journées d’Espace analytique, On forme des


analystes, Paris le 14 mars 2009. Repris dans ce numéro dans l’article « Il n’y a qu’une
psychanalyse », p. 19.
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n’est pas signifiant. La jouissance du symptôme est précisément dans le défaut de


l’Autre comme lieu du langage. Elle est dans cette faille de l’Autre, interrogeable
par le moyen de l’objet. Mais cet objet-là n’est pas sans rapport avec toute la
problématique de l’objet telle qu’elle s’est déployée dans l’histoire de la psycha-
nalyse depuis Melanie Klein jusqu’à Lacan. L’articulation du signifiant et de l’ob-
jet va permettre de franchir ce hiatus. Or, dans la névrose, l’Autre n’est pas réel,
et le névrosé a comme tâche – c’est le ressort du transfert – de le faire exister. Le
faire exister, c’est lui remettre l’objet, l’agalma dont il est question dans le
commentaire du Banquet, et attendre qu’il y ait – espoir et optimisme encore –
une possibilité de nouer cet objet au savoir. Le sacrifice permanent et insu du
névrosé consiste à remettre cet objet à l’Autre. L’une des manières de le faire,
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c’est de l’aimer. C’est pour cela qu’on aime Dieu.

Or, cet objet ne peut pas être dit puisqu’il ne peut pas être nommé, il n’y a
pas de signifiant adéquat, pas de signifiant qui lui convienne. Dès lors, Lacan va
mettre l’accent sur le fantasme qui, bien qu’imaginaire, ne s’y réduit pas puisqu’il
loge l’objet. C’est ce qu’il a de réel, et c’est la raison pour laquelle le névrosé s’en
tient à distance, car ce qu’il ne sait pas, il n’est pas sans le savoir. Pour Lacan, cet
objet, l’objet a, supplée à l’absence du rapport sexuel. Il radicalisera cette
approche dans les formules de la sexuation : ce à quoi nous avons affaire dans le
partenaire – c’est une version pour le coup pessimiste de la relation sexuelle et
de la relation au bon objet génital – se réduit à l’objet a ; le véritable partenaire
du sujet, c’est l’objet, dans la sexualité. Mais la face imaginaire – puisque c’est
ainsi que l’objet s’y intègre – sert de bouchon et a comme fonction de tampon-
ner toute rencontre avec la jouissance, donc jugule l’angoisse.

En 1967, Lacan propose la passe comme séparation de l’analysant d’avec cet


objet. L’émergence de cet objet tient à la position de l’analyste, au désir de l’ana-
lyste, dont la fonction est de viser la différence absolue, que masquent les idéaux
par rapport à la jouissance ou à l’objet. L’idéal de pureté, par exemple, masque
ce qui tient à l’analité. Le désir de l’analyste vient renouveler quelque chose de
fondamental chez le névrosé, une différence singulière, particulière, qui est la
façon dont il s’est trouvé pris dans sa première inscription dans le langage. Il
s’agit de séparer effectivement cette dimension de l’Idéal, grand I, et le petit a,
qui est en l’occurrence incarné par l’analyste. On pourrait dire que la question de
l’articulation du sujet supposé savoir et du petit a tient précisément à ce nouage
ou à ce recouvrement entre l’Idéal et l’objet. La disjonction entre le sujet et l’ob-
jet, c’est-à-dire le fait que quelque chose va se disjoindre entre l’objet et le sujet,
est permise par le quart de tour du discours analytique. Cette différence singu-
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lière, en effet, est la première inscription du sujet dans le champ signifiant. Avec
les quatre discours, elle devient absolue, précisément à cause du passage au
discours analytique, et leur possible écriture.

Est-ce la fin de l’analyse ? Deux perspectives possibles se présentent. On peut


lire les dernières élaborations de Lacan comme une idéalisation de la passe,
nouveau mirage de l’analyse totale, et souligner qu’il n’a pas proposé de répon-
dant institutionnel à un autre temps éventuel de la cure. Ou bien, ce qu’éclairait
Gisèle Chaboudez – et je m’inscris tout à fait dans cette perspective – que la passe
et la fin d’analyse ne sont pas la même chose. Et il me semble que cette perspec-
tive est évidente chez Lacan. Un exemple clinique très simple. Ce jeune analyste,
dans ce temps de son analyse va jusqu’à s’engager dans la procédure. Un peu plus
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tard, jeune AE de son association, les effets de mutation qu’a produits son analyse
ont des retentissements conjugaux, et font vaciller l’agencement dans lequel il
avait trouvé son assiette jusque-là : la dame qui partageait sa vie depuis long-
temps s’en va et c’est un effondrement véritable. On retrouve une des questions
que Freud soulève dans Analyse finie, analyse infinie : ce qui ne se présente pas
dans la cure, parce que colmaté par quelque chose à ce moment, ne sera pas
analysé, ne peut pas être analysé. Il y a là débat avec Ferenczi qui pensait qu’on
pouvait provoquer l’émergence de ce symptôme pour qu’il puisse être analysé.
Dans le cas évoqué, c’est le symptôme qui s’en va. Quelques années plus tard, la
fin sera possible, au delà de la passe.

Pour soutenir l’idée de la distinction entre la passe et la fin de la cure, je


voudrais mettre, très rapidement, deux textes en parallèle. D’une part, le texte
de la Proposition de 1967, dans ses deux versions, et, de l’autre, un passage de
L’étourdit, écrit cinq ans plus tard. Dans les deux versions de la Proposition de
1967, Lacan souligne la destitution subjective du côté de l’analysant, quand le
sujet « voit chavirer l’assurance qu’il prenait de ce fantasme où se constitue pour
chacun sa fenêtre sur le Réel 3 ». Destitution subjective du côté de l’analysant,
désêtre – dans l’Autre – pour l’analyste, avec ce paradoxe que ceci intervient au
temps du passage à l’analyste pour l’analysant, d’où la question de savoir si ce
désêtre, il en veut, d’une certaine façon. Or, il me semble qu’il y a un pas, voire
même un temps logique, constitué par l’écart entre ces deux dimensions de la

3. J. Lacan, « Proposition sur le psychanalyste de l’école » (1967), dans Autres écrits,


Paris, Le Seuil, 2001, p. 254.
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destitution et du désêtre. On peut penser ici à ce que Gustave Guillaume propose


dans Temps et verbe, à savoir la notion de temps opératif, comme écart irréduc-
tible entre ce qui pourrait se présenter du réel, dans l’objet par exemple, et la
question de la représentation.

Ce que ne sait pas l’analysant, dit Lacan, c’est qu’il est l’agalma du procès
analytique. C’est un temps de séparation, au sens du se parere, de se parer de
cette agalma. Gisèle Chaboudez a souligné que l’analysant peut s’en emparer en
s’en parant, et que c’est une identification. Lacan évoque Balint à propos de l’as-
pect hypomaniaque de l’identification, puis la position dépressive. On peut très
bien saisir l’enjeu et la variation de la présentation clinique de ce moment de la
cure. La passe comme moment maniaco-dépressif. On pense au destin de l’objet
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dans Deuil et mélancolie. Être cet objet, suivant la valence phallique qu’il peut
avoir, c’est le versant plutôt maniaque, l’exaltation, à quoi l’on attribue par abus
beaucoup de succès thérapeutiques. Sur l’autre versant, la position dépressive. La
valeur de l’être dans le désir se livre au psychanalysant comme pur manque en
tant que – ϕ dans le complexe de castration, ou pur objet qui le bouche en tant
que objet (a) de la relation prégénitale.

Mais si la signification du sujet dans ce moment-là ne dépasse pas l’avène-


ment du désir, ce n’est que la « fin apparente » de la cure. Le pas suivant suppose
quelque chose qui interroge la question de l’objet au-delà. On n’en reste pas à
cet avènement du désir, ni à ce temps de destitution.

L’objet a est ce qui à la fois symbolise le manque central dans la castration et


en même temps, ce qui masque ce manque, ce qui fait bouchon. La psychanalyse
lui restitue sa fonction séparatrice, au sens radical du terme. C’est pourquoi Lacan
considère que ce qu’il y a à savoir dans la passe est si, dans la destitution subjec-
tive, le désir advient qui permette d’occuper la place du désêtre, à quoi la cure a
réduit l’analyste. Avec la destitution subjective, s’ouvre une fenêtre vers la posi-
tion que le sujet aura à tenir s’il s’y engage, mais il reste la question d’un désir,
celui qui est en jeu dans l’analyse même.

Ensuite, Lacan propose, en rapport avec ce passage, trois points de fuite, l’ho-
rizon où la psychanalyse en extension se noue à la psychanalyse en intension. Ce
ne sont pas trois points qui permettraient à la psychanalyse de se lier à la culture,
ni les interrogations vives sur lesquelles le psychanalyste en honnête homme
devrait faire porter sa question, mais trois questions qui sont un nouage. Car il
n’y a pas d’analyste sans association, ou sans école, ou sans regroupement d’ana-
lystes ; pas d’analyste seul, ce qui ouvre la question du groupe analytique et, au-
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delà, de la civilisation. Le premier de ces trois repères essentiels est, dans le


symbolique, le « mythe œdipien ». L’œdipe est le moment fondateur, non pas
parce que Lacan se gargarise du Père ou veut le rasseoir sur son trône, très vieillis-
sant, d’où la culture moderne le fait un peu glisser, mais afin d’ouvrir la question
œdipienne, pour la dialectiser, pour l’analyser. Il interprète la tombée en désué-
tude de la question de l’œdipe et du Père, dans le mouvement analytique,
comme un refoulement ou un rejet, précisément destiné à préserver la figure de
Freud comme Père idéal. On ne traite plus de l’œdipe pour ne pas interroger la
dimension de Freud comme Père idéal, et d’ailleurs pour cette raison, on ne lit
plus Freud au moment où Lacan écrit ceci.

Cette figure du Père idéal soutient « l’imaginaire de l’unité », puisque c’est en


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lui qu’elle se fait. Lacan indique l’IPA comme figure de l’unité du mouvement analy-
tique, dont on sait que, déjà à l’époque, elle était éclatée entre des théories contra-
dictoires. L’unité ne tenait que de l’association. Le groupe – Lacan fait référence
très explicitement à Massenpsychologie de Freud –, au nom de cette quête de
l’unité et de cette érection du Père idéal, obéit inévitablement à la psychologie des
masses. Est-elle absente des nôtres ? Nous ne pouvons pas nous exonérer de cette
question en la reléguant simplement à l’Association internationale.

Enfin, le Réel du camp de concentration est relié par Lacan à l’effet d’univer-
salisation dû à la science et au phénomène de ségrégation qu’elle produit, et
n’est pas sans rapport avec une certaine marginalisation de la dimension
œdipienne dans la cure. Il voit, dans la façon dont Freud a pensé son institution,
dans l’organisation des groupes psychanalytiques, il faut bien le dire, et peut-être
jusqu’à nous, une façon de penser ce qu’il appelle une « flottabilité universelle ».
C’est-à-dire qu’au fond, l’association psychanalytique s’est assez bien adaptée à
tout cela : ce qu’a créé Freud montrait une sorte de préadaptation puisqu’en
somme, le mouvement analytique n’a perdu aucun de ses membres dans les
camps. Ce n’est pas tout à fait juste.

Les coordonnées de la cure sont comptables de ces trois repères. Les versants
maniaco-dépressifs de la passe, cinq ans plus tard, s’énoncent : « L’analysant ne
termine qu’à faire de l’objet (a) le représentant de la représentation de son
analyste. C’est donc autant que son deuil dure de l’objet (a) auquel il l’a enfin
réduit, que le psychanalyste persiste à causer son désir : plutôt maniaco-dépressi-
vement. » Lacan considérait le moment de la passe, comme relevant de la phase
dépressive de Melanie Klein. Il poursuit : « C’est l’état d’exultation que Balint, à
le prendre à côté, n’en décrit pas moins bien : plus d’un “succès thérapeutique”
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trouve là sa raison, et substantielle éventuellement 4. » Je l’ai déjà évoqué. Il


ajoute : « Puis le deuil s’achève. » C’est là la phrase importante. Entre le moment
de la passe et la fin de l’analyse, c’est le temps d’un deuil. « Reste le stable de la
mise à plat du phallus, soit de la bande, où l’analyste trouve sa fin, celle qui
assure son sujet supposé du savoir. » S’ouvrent alors trois perspectives. Première-
ment : du savoir « … que le dialogue d’un sexe à l’autre étant interdit de ce
qu’un discours, quel qu’il soit, se fonde d’exclure ce que le langage y apporte
d’impossible, à savoir le rapport sexuel, il en résulte pour le dialogue à l’intérieur
de chaque (sexe) quelque inconvénient ». Rien de plus à commenter ici, venons-
en au second point : « … que rien ne saurait se dire “sérieusement” (soit pour
former de série limite) qu’à prendre sens de l’ordre comique, – à quoi pas de
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sublime (voir Dante là encore) qui ne fasse révérence ». Sérieusement, c’est la
série, et il faut une limite. Cette limite est du côté du comique ; on sait l’usage du
comique – la Divine Comédie –, voire du grotesque, dans l’Enfer justement, les
formes de la poésie comique à l’époque – la tristesse comme péché, « faute
morale » – nouées à la question du sublime. Le comique comme mise à plat du
phallus, rien d’autre que ce qui fait rire au cinéma quand Charlot tombe. Quand
Charlot tombe, on rit, parce que le rire est la disjonction d’une identification dans
laquelle on était pris à suivre ce personnage. Quand il perd la position érigée, la
dimension phallique qui fait tenir son corps debout, on rit. Donc, pas de sublime
qui fasse référence. La limite est essentielle au sérieux, à la série, limite à « la
production de vérité » – « des vérités, j’en ai à la pelle » – vers le hors sens,
qu’ouvre la mise à plat du phallus.

Troisième point : « … et puis que l’insulte, si elle s’avère par l’επος être du
dialogue le premier mot comme le dernier (conféromère), le jugement de même,
jusqu’au “dernier”, reste fantasme, et pour le dire, ne touche au réel qu’à perdre
toute signification ». Pas de jugement ultime à la fin de l’analyse, pas de dernier
mot, au fond rien d’ultime dans le moment qu’on peut considérer comme la fin
de l’analyse. En ce sens, elle est à la fois finie et infinie. L’insulte qui vise le réel
dans l’Autre, par exemple, cet innommable, reste aussi fantasme, puisqu’elle ne
touche au réel qu’à travers lui. Et elle ne touche au réel que si elle perd toute la
signification phallique.

Ainsi, « de tout cela, il [le psychanalysant passé au psychanalyste] saura se faire


une conduite ». Il y en a plus d’une, il y a de multiples manières de finir son analyse,

4. J. Lacan, « L’étourdit » (1972), dans Autres écrits, Paris, Le Seuil, 2001, p. 487.
88 • FIGURES DE LA PSYCHANALYSE 20 •

de nombreuses possibilités d’inventions sur la manière de faire son analyse. « Il y


en a plus d’une, même des tas, à convenir aux trois dit-mensions de l’impossible :
telles qu’elles se déploient dans le sexe, dans le sens et dans la signification 5. »

On peut se permettre un petit forçage, en s’autorisant du fait que ce texte


paraît quelques mois après que Lacan ait, pour la première fois dans son ensei-
gnement, fait mention du nœud borroméen, on peut le lire rétroactivement avec
le nœud borroméen tel qu’indiqué dans la Troisième. Le sexe, le sens et la signi-
fication ne correspondent plus exactement aux trois registres Réel, Symbolique et
Imaginaire du texte de 1967, mais plutôt aux points de recouvrement du nœud
borroméen, sexe, sens et signification. Ce petit décalage d’avec 1967 me paraît
tout à fait essentiel pour ouvrir précisément à la question de l’identification au
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symptôme, qui me semble être le point ultérieur avec lequel on peut comprendre
et articuler ce qui se développera dès lors.

En novembre 1976, Lacan revient à la question de la fin d’analyse et reprend


toujours cette thèse contre laquelle il n’a cessé de penser pendant des années :
« Il résulterait de certains propos qui ont été avancés que la fin d’analyse serait
de s’identifier à l’analyste. Pour moi, je ne le pense pas. Mais enfin, c’est ce que
soutient quand même Balint, et c’est très surprenant. » Dans la transcription qui
circule de ce séminaire, on a enlevé « quand même », ce qui gome ainsi l’idée que
Lacan est surpris et étonné de trouver ça chez Balint. En enlevant le « quand
même », c’est un petit peu plus désagréable à l’égard de Balint, on enlève le
« même », or Lacan aimait bien Balint, comme en témoigne sa correspondance,
et l’importance de sa venue à Paris à l’invitation de Ginette Raimbault à l’Hôpi-
tal Necker.

Il questionne : « À quoi donc s’identifie-t-on à la fin de l’analyse ? S’identifie-


rait-on à son inconscient ? C’est ce que je ne crois pas. Je ne le crois pas, parce
que l’inconscient reste – je dis reste, je ne dis pas “reste éternellement”, parce
qu’il n’y a aucune éternité – reste l’Autre 6. » C’est une vraie question pour nous,
concernant le statut de l’Autre à la fin de l’analyse, il y a quelque chose qui se
produit à un moment donné et quelque chose qui se maintient. On l’aime car il
manque. Mais s’identifier à l’Autre c’est ce qui a lieu avant (idéalisation). « Je ne
vois pas qu’on puisse donner un sens à l’inconscient, si ce n’est de le situer dans
cet Autre, porteur des signifiants, qui tire les ficelles de ce qu’on appelle impru-

5.Ibid.
6. J. Lacan, L’insu que sait de l’une bévue…, séminaire inédit, le 16 novembre 1976.
L A FIN DE LA CURE 89

demment le sujet, imprudemment parce que c’est là que se soulève la question


de ce qu’est ce sujet dès lors qu’il dépend si entièrement de l’Autre 7. »

Lacan est en train non pas d’abandonner mais de déplacer la question du


sujet. On pourrait ici développer la question du parlêtre. Mais ce qu’il évoque,
c’est la surdétermination. On ne s’identifie donc pas à son inconscient. Il s’agit
d’une rectification de la notion d’identification et même de la modalité d’identi-
fication qu’il avait proposée. L’identification, depuis le séminaire du même nom
est une identification au signifiant, et le signifiant de l’identification aliène
fondamentalement le sujet. Or, la psychanalyse, comme a pu le dire Octave
Mannoni, est un processus de désidentification. C’est un enjeu très important,
encore plus important aujourd’hui, avec tout ce fatras sur la notion d’identité.
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Il n’y a pas de bonne identification pour le sujet. « Alors en quoi consiste ce
repérage qu’est l’analyse ? Est-ce que ce ne serait ou non, s’identifier, tout en
prenant ses garanties d’une espèce de distance, à son symptôme ? 8 » Pour que
cette identification soit possible, il ne s’agit pas du symptôme du début, et là-dessus
il serait intéressant de reprendre le nœud de la Troisième. Il y a une réduction des
symptômes, certes, mais il y a un reste irréductible, un reste remanié mais inélimi-
nable qui particularise le sujet. Ce symptôme, ce ne sont pas les symptômes : il y a
un reste. Ce versant du symptôme est réel. Ce qu’il a de particulier : c’est un symp-
tôme qui ne fait pas appel à l’Autre en tant que tel, il n’est pas adressé.

Donc, la fin de la psychanalyse implique une identification inédite chez Freud.


Le symptôme a changé, à ceci près qu’il est toujours lié à ce reste de jouissance.
Ce symptôme est celui qui demeure après que le fantasme ait chaviré et ne fasse
plus écran au réel comme avant. Il a un enjeu de savoir.

Je reviens un peu en arrière : jusqu’à un certain point, le symptôme est un


compromis qui vient à la place de l’énigme du désir de l’Autre. Il est cette
réponse que le sujet donne à la question de savoir ce qu’il est pour l’Autre. C’est
une question qui porte sur l’identité, une question essentielle concernant l’iden-
tité : qui suis-je ? Le symptôme est un problème d’identification, cela qui fait la
demande d’analyse. C’est un point essentiel dans les enjeux d’une cure analy-
tique et dans les enjeux des psychothérapies en général, une croisée des
chemins : soit nous allons vers une rectification des identifications – « Oui, tu le
peux », « Travaille plus », « Tu seras cet homme-là, mon fils », etc. –, soit au
contraire vers un processus qui va défaire ce parasitage de l’identité. À cette

7. Ibid.
8. Ibid.
90 • FIGURES DE LA PSYCHANALYSE 20 •

question du « Qui suis-je ? », le sujet construit ses réponses à travers son symp-
tôme. Ces questions s’ordonnent dans la névrose autour d’un savoir sur le
manque imputé à l’Autre, manque à être du sujet d’un côté et manque dans
l’Autre. Ce manque est à relier à la question du phallus maternel. Le sujet ne veut
pas que l’Autre soit dépourvu de réponse à sa question, donc il va le nourrir de
cette présomption. La part du manque du côté du sujet est celle qui s’inscrit dans
le symptôme, elle est une signification, une métaphore : je suis comme ça parce
que l’Autre le veut. D’ailleurs, et on le voit lorsqu’on pratique depuis longtemps,
la diffusion du discours analytique dans la culture fait qu’aujourd’hui les gens
viennent expliquer à l’analyste qu’ils sont comme ça parce que leurs parents
étaient comme ça, ils le disent d’emblée.
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Pour désigner et nouer cette dernière catégorie, ce symptôme réduit, qu’il
nomme sinthome et qu’il fait équivaloir dans la névrose au Père, au Père qui
nomme – une des vraies questions du quatrième rond introduit dans RSI –, Lacan
dit que c’est un trou. Il est réduit à sa fonction de nomination, point de l’énon-
ciation. Le psychanalyste, c’est son énonciation, disait-il. Il y a un paradoxe dans
l’idée de faire de ce rond un trou – et c’est pour ça peut-être qu’entre le nœud
borroméen à quatre et le nœud borroméen à trois avec la place de l’objet a au
centre, il y a quelque chose à penser topologiquement qui n’est pas nécessaire-
ment une figure contradictoire ou un progrès par rapport à ce qu’ont été les
propositions de Lacan.

Le problème du névrosé, c’est qu’il a un père. Le père est plutôt une impasse,
car ce père qui parle est un imposteur. C’est pour cela que la métaphore pater-
nelle ou l’Œdipe s’accomplit toujours de façon imparfaite, car ce n’est pas le père
qui parle, c’est le langage en tant que tel. Or, ce père a, pour le névrosé, une
dimension réelle. Dès lors, le sujet – qu’on regarde l’Homme aux rats ou Dora,
etc. – se construit sur le désir et la jouissance du père. Toute la vie est organisée
autour, c’est la dimension de l’impossible du rapport sexuel, de ce qui se
conjugue mal, par définition, entre le père et la mère. C’est pourquoi je soutiens
que le dernier Lacan revient à Klein, certes pour l’interpréter, en considérant que
la psychose témoigne de la forme généralisée de la structure, dont la névrose
n’est plus qu’un cas particulier, une solution. D’une certaine façon, le névrosé
délire – voir Dora –, il fait parler un point réel, le père.

Donc, le symptôme à la fin n’est pas le même que celui des débuts de l’ensei-
gnement de Lacan. Il y a une réduction du père, qui a à voir avec la nomination,
l’énonciation même, et l’identification au symptôme n’est évidemment pas
l’identification au père réalisée, telle qu’elle peut être demandée au début.
L A FIN DE LA CURE 91

Dans RSI, Lacan interroge ce qui de l’inconscient peut se traduire en lettre,


c’est-à-dire la lettre comme marque de jouissance, et non pas seulement comme
matérialité du signifiant. Or, le symptôme est une écriture. Sur ce plan, il n’aura
pas beaucoup varié. La psychanalyse opère un déchiffrage, et le reste du symp-
tôme est cette lettre comme marque de jouissance, sans signification, ni sens.
C’est pour cela qu’il ne faut pas nourrir de sens nos analyses. Et c’est pourquoi
nommer le symptôme, la face objectale du symptôme, a à voir avec la pulsion. Le
symptôme n’est plus à ce moment-là une formation de l’inconscient appréhen-
dée à partir de la vérité, mais à partir de la jouissance articulée à la question de
la pulsion. Ce noyau du symptôme est la jouissance non résorbée, où la dimen-
sion pulsionnelle persiste évidemment à la fin de l’analyse, avec la prévalence
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d’un objet pour cette jouissance. Pour la psychanalyse, il n’y a pas de vie pulsion-
nelle sans symptôme. La pulsion – qui renvoie à la question du plus-de-jouir – est
ce qui se repère à la fin de l’analyse comme le lien précis du vivant et du langage,
du langage qui a pris fonction d’organe pour le névrosé.

« J’ai avancé que le symptôme, ça peut être – c’est monnayable, c’est


courant – le partenaire sexuel. C’est dans la ligne de ce que j’ai proféré – proféré
sans que ça vous fasse pousser des cris d’orfraie – c’est un fait, j’ai proféré que le
symptôme pris dans ce sens c’est, pour employer le terme de connaître, c’est ce
qu’on connaît, c’est même ce qu’on connaît le mieux, sans que ça aille très loin.
Connaître n’a strictement que ce sens. C’est la seule forme de connaissance prise
au sens où on l’a avancé, qu’il suffirait qu’un homme couche avec une femme
pour qu’on puisse dire qu’il la connaît, voire inversement. Comme malgré que je
m’y efforce, c’est un fait que je ne suis pas femme, je ne sais pas ce qu’il en est
de ce qu’une femme connaît d’un homme. Il est très possible que ça aille très loin.
Mais ça ne peut tout de même pas aller jusqu’à ce que la femme crée l’homme,
même quand il s’agit des enfants. […] Alors qu’est-ce que ça veut dire connaître ?
Connaître veut dire savoir faire avec ce symptôme, savoir le débrouiller, savoir le
manipuler. Ce que l’homme fait avec son image correspond par quelque côté à
cela et permet d’imaginer la façon dont on se débrouille avec le symptôme. Il
s’agit du narcissisme secondaire, qui est le narcissisme radical, le narcissisme
qu’on appelle primaire étant en l’occasion exclu. Savoir y faire avec son symp-
tôme, c’est là la fin de l’analyse. Il faut reconnaître que c’est court 9. »

Ainsi, le symptôme apparaît comme un nouvel appareillage de jouissance qui


remplace celui d’avant et, d’une certaine façon, n’est plus le lieu d’une souf-

9. Ibid.
92 • FIGURES DE LA PSYCHANALYSE 20 •

france. Quelque chose en souffrance a été libérée. L’Autre n’existe plus, c’est l’ef-
fet même de l’orientation temporelle de la cure, la régression. Il y a une certaine
libération des possibilités de jouissance – pulsionnelle – sans le cadre obligé du
fantasme. Et, plus tard, il avancera que l’analyse ne consiste pas à ce qu’on soit
libéré de ses symptômes, mais à ce qu’on sache pourquoi on est empêtré.

Quelques remarques terminales. Cette conception conduit à situer la passe


comme une condition, comme un élément nécessaire, puisque à ce temps de la
cure correspond un dispositif qui le rend authentifiable – que nous n’avons pas
repris à Espace, mais qui néanmoins existe dans l’histoire et la vie du mouvement
analytique. Mais, en même temps, la passe en tant que telle n’est pas suffisante ;
elle est nécessaire pour qu’il puisse y avoir quelque chose qui fonctionne comme
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garantie dans la communauté au titre de la formation, mais elle n’est pas suffi-
sante parce que, à ce qui serait la fin de l’analyse, à distinguer de la passe, ne
correspond aucun dispositif. Lacan n’en a proposé aucun. Il y a là quelque chose
qui ne rentre pas dans le champ même de la communauté, qui n’est pas traitable
ou transmissible sur le versant de la communauté analytique. Nos jurys n’en repè-
rent que des traces, comme l’archéologue, comme le pisteur qui suivrait les traces
de ce qui a pu advenir, difficilement repérables.

Cette mise en commun impossible laisse ouverte la question de l’association,


question indispensable, et qui reste à traiter inlassablement si l’on ne veut pas
que les effets du groupe viennent recouvrir ce avec quoi nous ne pouvons pas
cesser de travailler, à savoir, selon l’expression connue, que les psychanalystes
sont les savants d’un savoir dont ils ne peuvent s’entretenir. On ne peut pas s’en
entretenir, mais on en parle beaucoup.

RÉSUMÉ
L’analyse de l’analyste a pris, avec Lacan, une place décisive dans la « formation » du
psychanalyste. Une lecture de quelques moments de son enseignement tente de suivre le
fil de ce qui, dans son mouvement, se dégage quant à la question cruciale de la fin de la
cure et de ses enjeux.
MOTS-CLÉS
Fin de l’analyse, formation psychanalytique, Lacan, passe, symptôme.
SUMMARY
The analysis of the analyst became, with Lacan, conclusive in the psychoanalytic training. A
reading of some points of his teaching will try to follow the trails of the decisive question
of the end and the aim of the psychoanalytic treatment.
KEY-WORDS
Aim of psychoanalysis, end of the treatment, Lacan, psychoanalytic training, symptom.

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