Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Claus-Dieter Rath
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
Article disponible en ligne à l'adresse :
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
https://www.cairn.info/revue-figures-de-la-psy-2010-2-page-123.htm
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les
limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la
licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie,
sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de
l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage
dans une base de données est également interdit.
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
Le texte « Analyse de contrôle » a été rédigé par Helene Deutsch en 1927 à la
demande de la Commission Internationale d’Enseignement de l’IPA. C’est un texte
programmatique. C’est pourquoi je rappellerai quelques éléments du contexte
historique.
Ce texte a été présenté par Deutsch en 1927, et une deuxième fois en 1935,
quelques mois avant son émigration aux États-Unis, cette fois-ci lu en l’absence
de l’auteur par Anna Freud.
C’est à ce texte, entre autres, que se réfère Balint dans sa remarque critique,
selon laquelle les questions de la formation psychanalytique ne sont guère discu-
tées dans la littérature psychanalytique, voire que des documents – à quelques
rares exceptions près (Eitingon, Kovács) – n’ont même pas été publiés. Sur ce
point, les psychanalystes ont fui les éclaircissements.
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
trouvaille est le texte de 1935 – donc la deuxième version, qui contient sans
doute quelques ajouts (par exemple, concernant le contrôle en groupe). On peut
considérer comme une troisième version sa traduction anglaise, qui comporte des
petites modifications tenant compte de quelques expériences aux États-Unis.
De toute façon, cette trouvaille nous invite à une réflexion renouvelée sur le
contrôle dans plusieurs sens du mot et sur l’histoire de la transmission de la
psychanalyse.
Le titre de la traduction parue dans Ornicar nous confronte avec une question
centrale du débat : Analyse sous contrôle, tout comme le titre anglais, On Super-
vised Analysis, ce qui a justement été rectifié par l’éditeur Roazen en Control
Analysis, puisque le titre de l’original allemand est bien Kontrollanalyse, donc
« Analyse de contrôle ».
Sándor Radó, dans son rapport sur les activités de la première décennie de
l’Institut et de la Policlinique Berlinois, donne une description de la formation du
« cursus pratique » :
« Deux nécessités ont été avant tout décisives à propos de l’aménagement interne du
stage. Le directeur de la policlinique, qui est le premier responsable de l’Institution,
devait inévitablement avoir la possibilité de prendre connaissance du travail des débu-
tants et de les surveiller de façon efficace.
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
Cette exigence d’organisation correspondait tout à fait aux intérêts didactiques des
stagiaires qui ne pouvaient pas se sentir à l’aise dans l’isolement, exigé par la technique,
de leur travail thérapeutique. Le candidat acquiert la connaissance pratique de la tech-
nique au cours de l’analyse didactique, puis doit l’appliquer dans une nouvelle situation
qui le fait passer du rôle passif de l’analysant au rôle actif de l’analyste. Ce changement
est relié à des difficultés sur lesquelles Eitingon s’est prononcé ailleurs en détail 5. Le
jeune analyste doit adapter la démarche dont il a fait l’expérience sur lui-même dans
l’analyse didactique aux conditions individuelles de ses cas ; il y dépend dans une large
mesure du conseil et de l’assistance d’un praticien expérimenté. Comme l’analyse n’ad-
met sous une forme directe aucune surveillance et aucune aide, on a usé d’un procédé
indirect qui satisfait les deux besoins en un seul. Les stagiaires doivent, à de courts inter-
valles, faire un rapport au directeur de la policlinique sur le déroulement de leurs trai-
tements et celui-ci les conseille alors à propos de toutes les questions qui s’y rapportent.
Ces discussions ont lieu généralement en l’absence du malade, mais, au besoin, des
synthèses sont organisées en y incluant le malade. Cette institution est solidement
passée dans l’usage sous la désignation d’“analyse de contrôle” et s’est révélée être la
meilleure forme réalisable de l’enseignement pratique. L’augmentation des stagiaires a
rendu vite nécessaire, pour soulager le directeur de l’Institut, de charger progressive-
ment plusieurs autres enseignants de la fonction d’analyste contrôleur.
À l’analyse de contrôle s’est ajouté, après quelques années, le “séminaire technique”,
en tant que deuxième institution régulière du cursus pratique 6. »
Je dirai seulement qu’il est tout à fait d’accord avec ce qui a été avancé de
façon critique en 1924 par Sándor Ferenczi et Otto Rank dans leur livre Perspec-
tives de la psychanalyse (sur l’interdépendance de la théorie et de la pratique 7).
Ils écrivent que, dans la Lehranalyse – la didactique –, il y a trop de Lehren – acti-
vité enseignante – et pas assez d’« Analyse ». Pour eux, l’analyse est surtout
quelque chose de vécu et ils soutiennent que de l’expérience propre de l’analyse
résulterait un « plus-de-savoir de l’analyste », qui le rendrait apte à se nouer au
matériel provenant du patient avec justesse. Mais, dans le discours d’Eitingon en
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
1925, un accent sera modifié : ce « plus-de-savoir » semble se transformer en un
« en plus » par le biais d’un « travail sous instruction » (Arbeit unter Anleitung).
Ferenczi et Rank insistent sur un savoir sur soi de l’analyste, Eitingon, par contre,
sur un savoir-traiter, à acquérir sous une instruction pratique.
La notion de « contrôle »
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
stéréotype de la Prusse bureaucrate. C’est ainsi que Bernfeld remarque rétros-
pectivement en 1952 : « Les motifs irrationnels de la xénophobie et de la culpa-
bilité ont donné un trait mélancolique à notre formation. Ceci s’accorde avec
l’esprit prussien, auquel les fondateurs de l’institut berlinois étaient plus ou
moins attachés. »
quelques uns – plusieurs étaient viennois, comme Otto Fenichel, Wilhelm Reich,
Theodor Reik, Hanns Sachs, ou hongrois, comme Franz Alexander et Sándor Radò ;
Siegfried Bernfeld était né en Galicie, Ernst Simmel à Breslau (Pologne), et Max
Eitingon, le directeur, à Moguilev (ou Mahiliow) en Russie – pourtant parmi les
enseignants il n’y avait pas d’anglais, pas d’américain et même aucun français.
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
1. une étude commandée par la Commission Internationale d’Enseignement de
l’IPA (IUK), qui a été présentée en 1927 dans un petit cercle – c’est-à-dire non pas
devant tous les membres de l’IPA ;
L’arrière-plan historique
« À cette époque, alors que la formation analytique n’était pas encore organisée, les
analyses de contrôle commençaient tout juste à être obligatoires. J’étais moi-même
contrôlée par Freud. Ainsi, il était simultanément mon formateur et mon contrôleur.
9. J’en parle dans mon texte « Les Olympiades 1936. Lacan, Berlin et la passion de
l’ignorance », dans Psychanalyse 3, Toulouse, érès, 2005, p. 111-123. Histoire qui a
affaire aussi avec la « cervelle fraîche » et la rencontre Kris-Lacan à Marienbad.
10. Helene Deutsch, Autobiographie (1973), Traduction française, Paris, Mercure de
France, coll. « 1001 Femmes », 1986, p. 168.
L’APPORT D’HELENE DEUTSCH AUX QUESTIONS FONDAMENTALES SUR L’ANALYSE 129
En 1923, elle passa environ un an à Berlin, où elle fit des expériences auprès
de l’Institut et entreprit une analyse avec Karl Abraham. En s’appuyant sur le
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
modèle berlinois, elle proposa la fondation d’un Institut viennois, dont elle fut la
directrice jusqu’à son émigration à l’automne 1935.
Deutsch indique qu’en 1927, dans le débat sur la formation, l’avis était que
« l’analyse de contrôle constitue la base sur laquelle repose l’essentiel de l’ensei-
gnement clinique en psychanalyse 12 ». Elle attribue deux tâches au contrôleur :
D’où le fait qu’on s’accorde à Vienne pour penser que le contrôle ne devrait
pas être pris en charge par le propre analyste, contrairement à Budapest, où on
s’en tient – comme elle l’écrit – à « la préférence de Ferenczi pour le choix du
didacticien comme contrôleur – spécialement pour les premiers cas ».
Intermezzo hongrois
Dans la formation analytique, ce deuxième temps est représenté par l’analyse dite
“sous contrôle”. L’élève se voit confier quelques analyses ; il travaille seul, mais pério-
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
diquement va rendre compte de son travail à son formateur, qui peut attirer son atten-
tion sur d’éventuelles erreurs techniques, le conseiller quant à la façon de mener la
cure. Le contrôle est poursuivi jusqu’au moment où l’élève est capable de travailler seul.
Pendant cette période de compagnonnage, il doit également acquérir un savoir théo-
rique, par la lecture des ouvrages où Freud et ses disciples ont consigné les résultats
déjà obtenus 14. »
Le seul exposé écrit qui nous soit parvenu de la conception de Budapest est le
texte de Vilma Kovács paru immédiatement après la mort de Ferenczi, en 1933 15.
Dans la deuxième partie de son texte 16, Kovács s’intéresse à des problèmes
particuliers, qui seraient résolus en différents lieux de façon différente, dont le
plus important serait l’analyse de contrôle.
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
analystes didacticiens, ce qui permettait au candidat d’apprendre différentes
méthodes 17. » Mais elle ne se contente pas de cette procédure, telle qu’elle avait
été proposée par Eitingon en 1925. « Étant donné qu’il peut apparaitre alors que
le candidat a déjà commencé à traiter des patients, que le temps n’est pas encore
venu pour terminer son analyse, il serait plus juste, à mon avis, que l’analyse sous
contrôle soit conduite tout le temps par l’analyste didacticien du candidat 18. »
Kovács soulève un point de vue nouveau et spécifique qui est sans doute
influencé par Ferenczi : le désir de guérir quelqu’un. Ainsi, elle introduit ce
critère : on peut confier les premiers patients au candidat dès qu’il est arrivé dans
son analyse au point où son désir de guérir (qn.) « ne signifie plus identification
à l’analyste didacticien 19 ». Pourtant, l’expression « vouloir guérir » (Heilenwol-
len) a été traduite par « son désir d’être normal », suivant la traduction anglaise
de l’International Journal « his desire to be normal 20 ».
16. V. Kovacs, « Analyse didactique, analyse sous contrôle », op. cit. à partir de la
page 98.
17. Ibid., p. 99.
18. Ibid., p. 99.
19. Ibid., p. 99. En allemand : « daß das Heilenwollen nicht mehr die Identifizierung mit
dem Lehranalytiker bedeutet ».
20. V. Kovacs, « Training analysis and control analysis », op. cit., p. 346-354.
21. V. Kovacs, « Analyse didactique, analyse sous contrôle », op. cit., p. 99.
132 • FIGURES DE LA PSYCHANALYSE 20 •
Être averti du fait « que son inconscient réagit infailliblement de telle ou telle
façon […], lui permet de surveiller ses sentiments et, donc, de maintenir une atti-
tude invariablement objective ».
De là, on peut inférer que ce n’est pas la réunion en une seule personne de
l’analyste didacticien et de l’analyste contrôleur qui forme le noyau du conflit
entre deux lignes, mais la question de savoir combien comporte d’analyse une
analyse de contrôle, ou dans quelle mesure elle est supposée être une analyse.
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
Le raisonnement de Vilma Kovács n’est pas explicitement pris en considéra-
tion par Deutsch en 1935. Nous ne savons pas jusqu’à aujourd’hui si, et dans
quelle mesure, l’une des auteurs avait connaissance du travail de l’autre. C’est
très probable, mais il faut tenir compte du fait que l’original hongrois de Kovács
est paru en 1933 et sa version allemande seulement en 1935 ; rappelons que le
premier exposé de Deutsch est daté de 1927. De toute façon, aucune des deux
femmes ne mentionne le nom de l’autre, ne serait-ce qu’une fois.
Helene Deutsch soutient que le candidat pourra choisir librement son ou ses
contrôleur(s) – mais seulement dans le cercle « des personnes désignées pour
cette fonction par l’Institut ».
devant de cette tendance ; ils estimaient devoir offrir à l’apprenti quelque chose,
« que nous ne possédons pas dans la technique analytique et probablement ne
pouvons jamais posséder : une sorte d’exhaustivité qui pourrait s’apprendre au
moyen d’exercices approfondis et réguliers 25 » (ceci pourrait viser Wilhelm Reich
avec lequel Deutsch travaillait dans l’institut viennois).
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
Chez un jeune analyste en contrôle, il y aurait deux difficultés principales :
qu’il répète simplement avec ses patients ce qu’il a vécu passivement auprès de
son propre analyste, et qu’il transforme un sujet qui souffre en un « agglomérat
de complexes, phases d’organisation de la libido, de fixations, de symboles 28 »,
conception qui correspond à celle prônée par Eitingon en 1925. Pour faire face à
ces difficultés, selon Deutsch, il fallait que le contrôleur ne se limite pas à donner
des conseils, mais « il lui faut réellement participer à l’analyse du patient invi-
sible 29 ». Pour sa part, elle trouve important d’avoir vu ou parlé au patient au
moins une fois. Ceci se réfère évidemment aux conditions d’une policlinique.
L’image d’un « œil contrôleur de l’enseignant » est l’une des multiples méta-
phores optiques du texte de Deutsch. Deux exemples : un problème spécifique de
l’analyse de contrôle consiste pour elle dans le fait que ce qui est reproduit par
le candidat est vu par un intermédiaire, « à travers un milieu qui devrait être
transparent mais qui est souvent chargé d’un sédiment trouble qu’il faut enlever
pour voir le patient 31 ». La couche gênante serait un dernier dépôt analytique
des complexes chez le candidat ; « le démasquer et l’éliminer à chaque fois ne
présente pas de grandes difficultés. Il y a cependant des candidats en contrôle
chez lesquels ce dernier sédiment post-analytique est si épais que, tôt ou tard, le
travail parait impossible. Dans ces cas, il est toujours nécessaire de renvoyer le
candidat à sa propre analyse [c’est-à-dire chez le didacticien ; CDR], ou bien de
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
remettre en cause son aptitude pour ce métier ».
Selon une autre image visuelle il s’agit « de voir réellement dans l’inconscient
du patient, par-dessus l’épaule du jeune analyste 32 ». L’inconscient est ici
quelque chose qu’on peut connaître, seulement si le regard ou les lunettes sont
assez forts et si les résistances du patient sont assez éliminées.
Leur lieu serait plutôt les séminaires. Elle est rigoureusement contre un ensei-
gnement théorique dans le cadre du contrôle, puisque la « théorie grise » « fait
obstacle à l’observation des faits psychiques 35 ».
Ici, aussi, Deutsch exige au nom d’un maximum d’observation directe « l’éli-
mination de tout problème théorique et de tout débat théorique ».
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
Pourquoi Helene Deutsch s’intéresse-t-elle à l’analyse de contrôle et aux ques-
tions de formation ?
Illustrations cliniques
Elle lance un autre défi dans son exposé « À propos de certaines formes de
résistance » lors du congrès de Marienbad en 1936 (pour lequel elle était rentrée
de Boston) : beaucoup de personnes atteintes d’une légère paranoïa avaient l’in-
tention de travailler comme psychanalystes, en raison de leur intérêt pour la vie
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
psychique. Elles se distinguaient par un « don prononcé pour la “perception
interne” » et elles donnaient l’impression d’une aptitude particulière pour la
profession de l’analyste. Mais, « Dans la première phase de l’analyse, ce type de
patient fournit un travail excellent. Il voit et comprend des choses qui sont d’ha-
bitude inconscientes et il anticipe toutes les interventions possibles de l’analyste.
Cette activité crispée sur la vie intérieure […] se révèle peu à peu une auto-obser-
vation renforcée dont le but est de se défendre contre des dangers intérieurs –
comme quand on écoute avec angoisse dans le noir et qu’on perçoit les bruits
plus nettement 40. »
39. Cf. H. Deutsch, « Okkulte Vorgänge in der Analyse » (1926), Imago, 12, p. 418-433.
40. H. Deutsch, « À propos de certaines formes de résistance », dans Les « comme si » et
autres textes (1933-1970), op. cit., p. 114.
L’APPORT D’HELENE DEUTSCH AUX QUESTIONS FONDAMENTALES SUR L’ANALYSE 137
Freud a mis à plusieurs reprises l’accent sur le fait que la perception de l’ana-
lyste devrait être en éveil, prête à tout accueillir (l’attention flottante), que ses
organes de perception ne devraient pas s’encroûter dans un savoir, ni se colorer
d’attentes déterminées, mais devraient toujours être ouverts à la surprise. Cela va
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
à l’encontre du réflexe de protection que chacun de nous s’est créé et aménagé.
Prenons en considération la comparaison que fait Freud (en 1937) entre l’ef-
fet de l’analyse sur l’analyste et celui des rayons Roentgen sur le médecin :
« Il semble ainsi que nombre d’analystes apprennent à utiliser des mécanismes de
défense qui leur permettent de détourner de leur propre personne des conséquences
et exigences de l’analyse, probablement en les dirigeant sur d’autres, si bien qu’ils
restent eux-mêmes comme ils sont, et peuvent se soustraire à l’influence critique et
correctrice de l’analyse. […] De temps à autre s’impose, à qui s’efforce de comprendre,
l’analogie déplaisante avec l’effet des rayons Roentgen, lorsqu’on les manie sans
précautions particulières. »
Freud en concluait :
« Chaque analyste devrait périodiquement, par exemple tous les cinq ans, se constituer
à nouveau objet de l’analyse, sans avoir honte de cette démarche. Cela signifierait donc
que l’analyse personnelle, elle aussi, et pas seulement l’analyse thérapeutique prati-
quée sur le malade, cesserait d’être une tâche ayant une fin pour devenir une tâche
sans fin 41. »
Ceci pourrait être la fonction d’une analyse de contrôle qui dépasse les buts
de la formation.
41. S. Freud, « Die endliche und die unendliche Analyse » (1937), GW 16, p 95-96.
138 • FIGURES DE LA PSYCHANALYSE 20 •
RÉSUMÉ
À partir de 1920, dans la Policlinique Psychanalytique de Berlin, de nombreux citoyens ont
été traités par des débutants. En raison de la responsabilité envers les patients ainsi que
dans le but de former et de corriger les analystes débutants, une « analyse de contrôle » fut
introduite par le directeur Eitingon. Depuis, elle est un élément principal de la formation
de l’analyste, et il en existe des conceptions divergentes, concernant la question de savoir
qui ou quoi contrôler, de quelle façon, et sur quoi l’analyste contrôleur devrait porter son
attention. Le texte examine l’exposé présenté par Helene Deutsch (Vienne) au Congrès
d’Innsbruck en 1927 et de nouveau au « Vierländertagung » en 1935 dans le contexte des
positions prononcées par Max Eitingon (Berlin) et Vilma Kovács (Budapest). Il discute la
relation entre analyse didactique et analyse de contrôle ainsi que la différence entre
« analyse de contrôle » et « contrôle d’analyse » ou « analyse sous contrôle ». L’analyse de
contrôle en tant que partie de la formation se distingue de l’analyse de contrôle en tant
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
© Érès | Téléchargé le 29/04/2022 sur www.cairn.info via Bibliothèque nationale de France (BnF) (IP: 194.199.3.13)
que formation constante de l’analyste.
MOTS-CLÉS
Max Eitingon, Sándor Ferenczi, Helene Deutsch, Vilma Kovács, Policlinique psychanalytique
de Berlin, formation de l’analyste, analyse didactique, analyse de contrôle, analyse sous
contrôle.
SUMMARY
From 1920 on, in the Berlin Psychoanalytic Polyclinic many persons received psychoanalytic
treatment by novices. Out of responsibility towards patients and in order to train and to
correct beginning analysts, the procedure of “control analysis” was introduced. It has
remained a central element of analytical training since, although there have been different
ideas, as to who was to exercise control and how and for which purpose it should be done.
This paper examines Helene Deutsch’s Viennese contribution, first presented at the 1927
Congress in Innsbruck and again at the first Four Countries Meeting in 1935, as compared
to the positions brought forward by Max Eitingon (Berlin) and Vilma Kovács (Budapest). It
highlights both the relation between training and control analysis and the difference
between “control analysis” and “control of analysis“. Control analysis as part of analytical
training is to be distinguished from control analysis as part of the analyst’s continuous
formation during his or her whole working life.
KEY-WORDS
Max Eitingon, Sándor Ferenczi, Helene Deutsch, Vilma Kovács, Berlin Psychoanalytic Poly-
clinic, psychoanalytic formation, psychoanalytical training, training analysis, control
analysis.