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CHAPITRE II : LE DROIT¸ ENVISAGE COMME UN ENSEMBLE DE PREROGATIVES : LES DROITS

SUBJECTIFS

Si le droit objectif représente l’ensemble des règles régissant les rapports entre
les personnes vivant en société et sanctionnés par une contrainte dont l’autorité
publique est compétente, certaines de ces règles ont plutôt pour objet de
reconnaître des privilèges aux individus.

Ces pouvoirs d’action constituent les droits subjectifs. Du fait de leur diversité, il
convient de prime abord d’en esquisser une classification (section 1), avant
d’étudier les modes d’acquisition des droits subjectifs (section 2) et les règles
relatives à leur preuve en cas de contestation (3)

SECTION 1 : LA CLASSIFICATION DES DROITS SUBJECTIFS

Les droits subjectifs dont une personne peut être titulaire sont de divers ordres.
Plusieurs critères permettent de les classer mais le principal étant celui qui
permet de distinguer les droits pouvant être évalués en argent et ceux pour
lesquels cette évaluation n’est pas possible. Les premiers constituant des droits
patrimoniaux (I) et les seconds, des droits non patrimoniaux (II)
 
I- LES DROITS PATRIMONIAUX
Les droits patrimoniaux sont ceux qui sont susceptibles d’appréciation en argent
et qui, par conséquent, rentrent dans le patrimoine d’un individu. Le patrimoine
est l’ensemble de biens et de dettes d’une personne. Il est composé d’un actif
(droits patrimoniaux) et d’un passif (ensemble de dettes et d’obligations). Les
droits patrimoniaux qui forment l’actif du patrimoine sont, soit des droits réels
(A), soit des droits personnels (B), soit encore des droits intellectuels (C).

A- LES DROITS PATRIMONIAUX

Le droit réel se définit comme le pouvoir exercé directement par une personne sur une chose.
(Exemple : le droit de propriété qui est le droit d’user et de disposer de la chose de la manière la plus
absolue, sous réserve des restrictions légales et réglementaires.) Il existe des droits réels principaux
(1) et des droits réels accessoires (2)

1- Les droits réels principaux


Ils assurent à leur titulaire la maîtrise directe de la chose. Cette maitrise est variable car elle peut être
complète ou partielle. Ainsi la propriété est le droit réel par excellence en ce qu’il donne des
prérogatives d’usage (usus), d’exploitation (fructus) et de disposition ou d’aliénation (abusus)
A côté, il est des droits réels dits démembrés, parce qu’il leur manque une ou plusieurs des
prérogatives que confère le droit de propriété. Ainsi l’usufruit ne confère à l’usufruitier que l’usage et
l’exploitation du bien sans lui donner le pouvoir de l’aliéner, le nu-propriétaire seul pouvant disposer
du bien.
2- Les droits réels accessoires
Ces droits sont dits accessoires parce qu’ils accompagnent une créance et ont pour objet d’en garantir
le paiement. Il en est ainsi de l’hypothèque (droit réel accessoire sur un immeuble), et du gage (droit
réel accessoire sur un meuble).
Il convient de préciser que les droits réels, qu’ils soient principaux ou accessoires, portent sur des
biens meubles (c'est-à-dire ceux qui sont susceptibles de déplacement) ou des biens immeubles
(c'est-à-dire des biens ayant une situation fixe ou qui sont immuables dans l’espace).

B- LES DROITS PERSONNELS

Encore appelés droits de créance, les droits personnels sont des pouvoirs reconnus à une
personne appelée créancier, d’exiger d’une autre personne appelée débiteur, d’accomplir une
prestation quelconque consistant soit à donner, soit à faire ou à ne pas faire quelque chose.

Pour mieux comprendre le droit personnel, il convient de le distinguer du droit réel. Si ce


dernier donne à son titulaire le pouvoir sur une chose, le droit personnel confère, quant à lui,
en quelque sorte, à une personne le pouvoir sur une autre personne.

- Les droits intellectuels

Les droits intellectuels sont l’ensemble des droits qui confèrent à leur titulaire un monopole
d’exploitation, soit sur une œuvre de l’esprit (propriété littéraire et artistique, propriété
industrielle), soit sur des clientèles (fonds de commerce, clientèles civiles …).
 

II- LES DROITS EXTRAPATRIMONIAUX

Les droits non patrimoniaux sont l’ensemble des prérogatives reconnues aux
sujets de droit et qui ne représentent pas en eux-mêmes une valeur pécuniaire.
Cela signifie que ces droits ne sont pas appréciables en argent.

Cependant leur violation peut donner lieu à une condamnation au paiement de


dommages et intérêts à verser par l’auteur au titulaire-victime. Ces droits se
distinguent aussi des droits patrimoniaux par leurs caractères (A) et font l’objet
de classification (B).

A- LES CARACTERES DES DROITS EXTRAPATRIMONIAUX
Les droits non patrimoniaux revêtent trois principaux caractères : l’intransmissibilité (1),
l’insaisissabilité (2) et l’imprescriptibilité (3).

1- Le caractère intransmissible
Contrairement aux droits patrimoniaux qui peuvent être transmis d’une personne à une autre, les
droits extrapatrimoniaux sont incessibles, c'est-à-dire qu’ils ne peuvent être cédés ni à titre gratuit, ni
à titre onéreux, ni entre vifs, ni à cause de mort.

2- Le caractère insaisissable
Les droits patrimoniaux ne peuvent pas être saisis par les créanciers de leurs titulaires. Cela s’explique
par le fait qu’ils ne sont pas évaluables en argent.

3- Le caractère imprescriptible
Ce caractère signifie que les droits extrapatrimoniaux ne s’éteignent par l’effet du temps ou par le non
usage (prescription extinctive). Corrélativement, ils ne s’acquièrent pas par l’écoulement du temps
(prescription acquisitive).


B- LA CLASSIFICATION DES DROITS PATRIMONIAUX


L’on peut sommairement indiquer les deux grandes catégories de droits
extrapatrimoniaux que sont les droits de la personnalité et les droits
familiaux. (Leur étude sera menée dans la seconde partie du cours).


SECTION 2: L’ACQUISITION DES DROITS SUBJECTIFS

I- LES ACTES JURIDIQUES

Les actes juridiques sont des manifestations de volonté destinées à produire des effets
de droit. (Exemple : le consentement des deux parties, l’une qui achète, et l’autre qui
vend la chose, va entraîner le transfert de propriété de la chose.)
Il existe une diversité d’actes juridiques, ce qui appelle une classification (A), mais aussi
une présentation des conditions de validité des différents actes juridiques (B).

A- LA CLASSIFICATION DES ACTES JURIDIQUES

Plusieurs distinctions sont possibles. Nous retiendrons les principales que sont la
classification entre les actes unilatéraux et les actes conventionnels (1), la distinction
entre les actes à titre gratuit et les actes à titre onéreux (2), celle entre les actes
conservatoires, les actes d’administration et les actes de disposition (3) et la distinction
entre les actes entre vifs et les actes à cause de mort (4).
1- La distinction entre les actes unilatéraux et les actes conventionnels

Par acte unilatéral, l’on entend l’œuvre d’une seule volonté qui, se suffisant à elle-même, va
produire des effets de droit (Exemple : le testament)

L’acte conventionnel, en revanche, est le fait d’un accord entre deux ou plusieurs volontés.
L’exemple type en est le contrat qui est la convention, c'est-à-dire l’accord de volonté, ayant
pour effet de créer des obligations. Lorsque ces obligations sont réciproques, c'est-à-dire
lorsqu’elles sont à la charge de chacune des parties, on dit que le contrat est Synallagmatique
(ex : la vente). Par contre, lorsque les obligations ne sont créées qu’à la charge d’une seule
partie, le contrat est dit unilatéral (ex : la donation).

2- La distinction entre les actes à titre gratuit et les actes à titre onéreux
Les actes à titre gratuit sont ceux par lesquels une personne consent volontairement un
avantage à une autre sans réciprocité. On les appelle aussi des libéralités. Quant aux actes à
titre onéreux, ils comportent des avantages réciproques pour chaque partenaire.
2- La distinction entre les actes conservatoires, les actes d’administration et les
actes de disposition
L’acte conservatoire est un acte destiné à conserver en l’état les droits des parties dans
l’attente d’un évènement futur. (Exemple : l’apposition de scellés, l’inscription d’une
hypothèque…)

L’acte d’administration s’en distingue car il consiste en une opération de gestion normale du
patrimoine, c'est-à-dire qu’il correspond à un acte ordinaire d’exploitation ou de mise en
valeur du patrimoine (exemple : la mise en location d’un immeuble.

Il est donc plus dynamique que l’acte conservatoire mais prête moins à conséquence que
l’acte de disposition. Ce dernier, en effet est un acte qui a pour effet de sortir un bien du
patrimoine de son auteur (ex : la vente). Relèvent également de cette catégorie, des actes
qui, bien que n’aliénant pas un bien, font néanmoins peser sur lui des charges suffisamment
lourdes qui engagent son avenir (ex : bail de longue durée, constitution d’hypothèque.

4- La distinction entre les actes entre vifs et les actes à cause de mort
Les premiers sont destinés à produire leurs effets du vivant de leurs auteurs (ex : donation).
Les seconds ne produisent leurs effets qu’au décès de l’une des parties (ex : le legs).
-
B LES CONDITION GENERALES DE VALIDITE DES ACTES JURIDIQUES

Un certain nombre de condition sont prévues pour la validité des actes juridiques (1) et leur non
observation entraîne la nullité de ceux-ci.
• Les conditions générales de validité des actes juridiques
Pour être valable un acte juridique doit réunir les conditions de capacité, de consentement, de forme,
d’objet et de cause.
- La capacité : c’est la faculté reconnue à une personne de s’engager elle-même. Elle se distingue du
pouvoir qui est la prérogative reconnue à une personne de pouvoir engager autrui.
- - Le consentement : c’est le fait de vouloir un acte dans toutes ses conséquences. Le consentement
doit être libre et éclairé, c'est-à-dire exempt de vices. Les vices de consentement sont l’erreur, la
violence et le dol.
• - La forme : en principe, les conventions sont parfaitement formées par le seul consentement des
parties, peu importe la forme dans laquelle il est exprimé : c’est le principe du consensualisme.
Cependant, certains actes ne sont valables que s’ils revêtent certaines formes (ex : la vente
d’immeuble).
• - L’objet : c’est le résultat juridique voulu par les parties, c'est-à-dire le but recherché par les parties
en consentant à l’acte. Il doit être certain, c'est-à-dire déterminé ou déterminable, il doit être
possible, c'est-à-dire réalisable, car « à l’impossible nul n’est tenu ». Il doit enfin être licite, c'est-à-
dire conforme à l’ordre public et aux bonnes mœurs. - La cause : c’est la raison ou les motifs pour
lesquels l’acte est consenti. Elle doit aussi être conforme à l’ordre public et aux bonnes mœurs, sous
peine de nullité de l’acte.

2- La sanction de l’inobservation des conditions de validité des actes juridiques: la nullité

La nullité est l’anéantissement rétroactif de l’acte, c'est-à-dire que l’acte


annulé est censé n’avoir jamais existé et les parties sont, de ce fait, replacées
dans leur situation initiale (statu quo ante).

Il existe deux formes de nullité : - La nullité relative qui sanctionne


l’inobservation d’une règle de protection.
Seul celui que la loi entendait protéger peut demander une telle nullité. (Ex:
celui dont le consentement a été vicié).

La nullité absolue qui frappe un acte lorsqu’il n’est pas conforme à l’ordre
public et aux bonnes mœurs. Elle peut être demandée par toute personne
ayant intérêt ou même être prononcée d’office par le juge.

II- LES FAITS JURIDIQUES
Les faits juridiques sont des agissements ou des évènements auxquels la loi attache des
conséquences juridiques. En d’autres termes, les effets ne sont pas voulus par les personnes
qui en bénéficieront ou qui les subiront. Au contraire, c’est la loi qui prévoit lesdites
conséquences. L’on distingue principalement deux types de faits pouvant créer des droits et
des obligations : les faits de la nature (A) et les faits de l’homme (B)

A- LES FAITS DE LA NATURE


La survenance d’un évènement imprévisible, irrésistible et imprévisible, appelé force majeure,
peut donner lieu à des conséquences juridiques, telles que l’extinction de la responsabilité.
De même l’écoulement du temps peut, soit donner naissance à des droits (prescription
acquisitive), soit en éteindre d’autres (prescription extinctive)

B- LES FAITS DE L’HOMME


Les faits de l’homme supposent l’action de celui-ci sur les évènements. Cette action peut être
néfaste (c’est le cas des délits et quasi-délits) (1) ou bénéfique (c’est le cas des quasi-contrats)
(2)

1- Les délits et quasi-délits
Les délits sont des faits volontaires de l’homme qui causent à autrui un dommage ou
préjudice.
• Les quasi-délits, quant à eux, sont des faits involontaires de l’homme qui causent à
autrui un préjudice.
• La commission de ces faits donne lieu à la responsabilité civile de l’auteur car « tout
fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la
faute duquel il est arrivé à le réparer » (article 1382 du code civil).

2- Les quasi- contrats


Ils sont des faits qui procurent à autrui un avantage auquel il n’a pas droit. Ils donnent
donc aussi lieu à des obligations à la charge de celui qui en a tiré profit. On peut citer
comme quasi-délits : la gestion d’affaire, le paiement de l’indu et l’enrichissement sans
cause.


SECTION 3: LA PREUVE DES DROITS SUBJECTIFS
Les preuves sont des procédés techniques ou logiques à l’aide desquels le titulaire
d’un droit subjectif peut établir l’existence de celui-ci. Le plan de l’étude de cette
partie est commandé par un certain nombre de questions :

-par quels moyens la preuve peut-elle être faite ? C’est la question des modes ou des
moyens de preuve (I) -quels moyens de preuves doivent être utilisés pour établir tel
ou tel fait ? C’est la question de l’admissibilité des modes de preuve (II) -qui doit faire
la preuve ? C’est la question de la charge de la preuve (III)

I- LES MODES DE PREUVE


Les modes de preuve, encore appelés procédés ou moyens de preuve sont variés et
évoluent en fonction des progrès de la science et de la technologie. Ces divers modes
de preuve rentrent néanmoins, soit dans la catégorie des preuves parfaites (A), soit
dans celle des preuves imparfaites (B).


A- LES PREUVES PARFAITES

Par preuves parfaites, l’on entend, tous les modes de preuve que l’on peut utiliser pour établir tout
type de faits ou tout type d’actes et qui lient le juge. En d’autres termes, le juge est tenu de faire droit
à la prétention de celui qui apporte une preuve parfaite. Dans cette catégorie l’on range :

• La preuve littérale ou preuve par écrit :


L’écrit peut être un acte authentique ou un acte sous-seing privé *l’acte authentique est un acte dressé
et signé par un officier public assermenté (huissier, notaire, Officier d’état-civil …). Ce dernier s’assure
de la véracité des mentions contenues dans l’acte, ce qui confère à un tel acte une force probante
supérieure ; il vaut jusqu’à inscription de faux. *l’acte sous-seing privé est un acte rédigé par les parties
elles-mêmes ou par un tiers convenu et contenant la signature des parties. Il fait foi jusqu’à preuve
contraire.

- L’aveu :
C’est la déclaration par laquelle un plaideur reconnaît l’exactitude d’un fait allégué contre lui. L’aveu
est extrajudiciaire lorsqu’il est fait hors de la présence d’un juge. Il est judiciaire lorsqu’il est fait par
une partie au cours d’un procès. Seul l’aveu judiciaire lie le juge.

- Le serment décisoire :
Le serment est une affirmation solennelle orale ou écrite par laquelle une personne atteste, en jurant,
la véracité d’une déclaration. Il est dit décisoire lorsqu’il est déféré à une partie par son adversaire,
tandis qu’il est dit supplétoire lorsqu’il est déféré à une partie par le juge.
B- LES PREUVES IMPARFAITES
Ce sont des procédés de preuve qui ne lient pas le juge et lui laissent donc un large pouvoir d’appréciation.
Il s’agit de :

- La preuve testimoniale qui se fait, soit par un témoignage (c'est-à-dire une déclaration faite sous
serment par une personne sur des faits dont elle a personnellement eu connaissance, les ayant vus ou
entendus), soit par la commune renommée ou des « on dit » ou des rumeurs.
-
- Les présomptions de faits ou indices : ce sont des conséquences que le magistrat tire d’un fait connu à
un fait inconnu. Il s’agit généralement d’indices matériels (ex : partant des traces de freinage laissés par
un automobiliste au lieu de l’accident, le juge peut établir l’allure à laquelle il conduisait le véhicule).
-
- Les écrits non signés : il s’agit des papiers domestiques, des copies des actes authentiques ou des actes
sous-seing privé.
-
- L’aveu extrajudiciaire : il constitue un aveu en dehors de la procédure ou devant un juge autre que celui
dont on veut emporter la conviction.
-
- Le serment supplétoire : c’est une forme de serment qui, déféré par le juge, et non par la partie adverse,
ne lie pas ledit juge.

II- L’ADMISSIBILITE DES MODES DE PREUVE

L’admissibilité des modes de preuve dépend tout d’abord de la matière en cause. Ainsi,
en droit pénal et en droit public en général, la preuve est libre. Ce principe de la libre
admissibilité des modes de preuve signifie que tous les moyens de preuve peuvent être
utilisés pour établir tout type de faits ou d’actes.
De même, en droit commercial, la preuve se fait par tout moyen à l’égard du
commerçant (article 5 de l’Acte uniforme OHADA sur le droit commercial)
En droit civil, en revanche, l’admissibilité des preuves est différente selon qu’elle porte
sur les actes (A) ou sur les faits juridiques (B).
 
A- L’ADMISSIBILITE DE LA PREUVE DES ACTES JURIDIQUES
La preuve des actes juridiques se fait, en principe, par écrit (cf. article 1341 du code
civil). Ce principe qui s’applique à des actes juridiques portant sur une somme
supérieure ou égale à 5000 francs CFA connaît, néanmoins, des exceptions.
Primo, les actes juridiques, quel que soit leur montant, peuvent être prouvés grâce aux
autres modes de preuve parfaite.

Secundo, en présence d’un commencement de preuve par écrit, c'est-à-dire, d’un écrit provenant de
celui contre lequel la demande est formée et rendant vraisemblable le fait allégué, l’on peut utiliser
des preuves imparfaites pour établir un acte.

Bien plus, en cas d’impossibilité de se procurer un écrit ou d’impossibilité de produire un écrit, l’on
peut établir l’existence d’un acte juridique par des moyens autres que l’écrit. L’impossibilité peut être
matérielle (ex : en cas de dépôt nécessaire fait en cas d’incendie) ou morale (ex : contrats entre
parents ou entre époux.).

B- L’ADMISSIBILITE DE LA PREUVE DES FAITS JURIDIQUES


Les évènements auxquels la loi attache des effets juridiques sont, en principe, prouvé librement. Le
principe ici est donc celui de la liberté des preuves. Cependant il est des faits juridiques pour la preuve
desquels l’on exige la production d’écrits, c’est le cas des faits concernant l’état des personnes
(naissance, mariage, décès). Les actes de naissance, actes de mariage et certificats de décès, qui sont
des actes authentiques, sont donc les seuls moyens de preuve admissibles pour établir ces différents
faits.
 
III- LA CHARGE DE LA PREUVE

La question ici est de savoir qui doit apporter la preuve, ou bien, à qui incombe le fardeau de la
preuve.

En principe c’est au demandeur qu’il incombe de prouver le fait qu’il invoque ; le défendeur pouvant
se contenter de la nier. Toutefois, si le défendeur ne veut pas se borner à nier le fait allégué et attaque
plutôt à son tour en alléguant un fait contraire, il devient lui-même demandeur et doit par conséquent
supporter la charge de la preuve.
Ex : le créancier prétend que le débiteur lui doit une certaine somme. Sans se borner à nier l’existence
de la dette, ce dernier prétend l’avoir déjà réglée en tout ou en partie. C’est lui qui devra désormais
apporter la preuve du prétendu paiement total ou partiel.

Une autre exception à la règle selon laquelle la preuve incombe au demandeur est le fait des
présomptions légales. Celles-ci sont des conséquences que la loi tire d’un fait connu à un fait inconnu.
(Ex : la présomption de paternité légitime selon laquelle l’enfant conçu a pour père le mari de sa mère
(article 312 du code civil).

Ces présomptions ont pour effet de déplacer la charge de la preuve au profit du bénéficiaire de la
présomption. Lorsque l’adversaire peut néanmoins apporter la preuve contraire, on parle de
présomption simple. Dans le cas où la preuve contraire n’est pas admise, on parle de présomption
irréfragable.


IIème PARTIE : LE DROIT CIVIL

Le droit civil est l’ensemble des règles qui régissent la vie civile des
sujets de droit. Cette partie se bornera à l’étude des règles relatives aux
personnes en tant que telles (chapitre1) et celles qui régissent leurs
rapports dans le cadre familial (chapitre 2).

CHAPITRE 1 : LE DROIT DES PERSONNES

Le droit des personnes est constitué des règles qui organisent le statut juridique des
personnes. En droit, le terme « personne » renvoie aussi bien à tous les êtres
humains, êtres de chairs et d’esprit, qu’à tous les êtres fictifs auxquels le droit
reconnaît des droits et des obligations. Ces deux catégories de personnes que sont
les personnes physiques (section 1) et les personnes morales (section 2), feront
l’objet d’une étude séparée.
 
SECTION 1 : LES PERSONNES PHYSIQUES
Par personnes physiques, l’on entend les êtres humains, hommes et femmes. Pour
qu’elles soient considérées comme des sujets de droit, les personnes physiques
doivent exister (III) et être individualisées (II). Etant reconnues comme sujets de
droit, elles jouissent d’une protection assurée le droit objectif (III)
 

I- L’EXISTENCE DE LA PERSONNALITE JURIDIQUE
La personnalité juridique est la faculté reconnue à une personne d’être titulaire de droits et d’obligations. Elle
s’acquiert (A) et peut se perdre (B).

A- L’ACQUISITION DE LA PERSONNALITE JURIDIQUE


La personnalité juridique étant reconnue à tout être humain, elle s’acquiert, en principe, à la naissance. Deux
conditions supplémentaires sont toutefois exigées pour une reconnaissance parfaite de la personnalité juridique :
il faut que l’enfant naisse vivant et viable (c'est-à-dire doté des organes nécessaires).
Exceptionnellement, le début de la personnalité juridique est situé avant la naissance ; la personnalité juridique
commence parfois à la conception. Ainsi, l’enfant conçu est considéré comme né chaque fois que cela lui profite. Il
peut par exemple hériter des biens laissés par ses parents décédés dans les 300 jours qui précèdent sa naissance.
  
B-LA PERTE DE LA PERSONNALITE JURIDIQUE
La personnalité juridique dure autant qu’une personne est en vie. Le seul évènement qui fait perdre la
personnalité juridique est la mort. Toutefois, certains évènements peuvent donner lieu à des incertitudes quant à
l’existence d’une personne et conduire plus tard à la perte de la personnalité juridique : c’est le cas de l’absence et
de la disparition.
- L’absence est la situation d’une personne dont on n’a pas de nouvelle depuis et dont on ne sait pas si elle est
vivante ou morte.
- la disparition quant à elle est la situation d’une personne qui est partie dans des circonstances qui font penser
qu’elle serait morte.

II- L’INDIVIDUALISATION DE LA PERSONNE PHYSIQUE

Plusieurs moyens permettent de distinguer une personne physique d’une autre. Il s’agit de sa désignation (A), de
sa localisation (B) et des actes de l’état civil (C).
 
A- LA DESIGNATION DES PERSONNES PHYSIQUES
Le nom est l’élément qui permet d’individualiser une personne. Il est constitué d’un ou de plusieurs éléments : le
patronyme, le prénom voire le pseudonyme.
- le patronyme ou nom patronymique : il est souvent commun aux membres d’une même famille. Le principe
en matière d’attribution du patronyme est toutefois la liberté. Mais le nom donné à l’enfant ne doit être ni
inconvenant, ni manifestement ridicule. Le cas échéant, une procédure de changement de nom peut être
entreprise.
- le prénom : c’est un élément de désignation de la personne qui permet surtout d’individualiser des personnes
portant un même patronyme. Il est généralement emprunté aux grandes personnalités de l’histoire ou aux
saints.
- Les pseudonymes : comme le prénom, les pseudonymes sont attribués de manière facultative. Il s’agit d’un
élément de désignation qui est censé refléter un trait physique ou un trait de caractère d’une personne.
L’usage d’un pseudonyme est réglementé au Cameroun et est réservé pour des besoins littéraires,
artistiques ou scientifiques. Il est surtout conditionné à une autorisation préalable (article 11 de la loi n°
69/LF/3 du 14 juin 1969).


B-LA LOCALISATION DE LA PERSONNE PHYSIQUE

La localisation d’une personne physique se fait à travers son domicile. Le domicile est défini
par l’article 102 du code civil comme le lieu du principal établissement d’une personne.
Il se distingue de la résidence, qui est le lieu où la personne vit habituellement, et de
l’habitation qui a un caractère essentiellement passager. Le domicile obéit à un certain
nombre de principes :

-la nécessité du domicile qui signifie qu’une personne dispose nécessairement d’un domicile,

-l’unicité du domicile qui signifie qu’une personne ne peut avoir qu’un seul domicile à la fois.
Exceptionnellement, une personne peut avoir un domicile d’élection, en dehors de son
véritable domicile.

-la fixité du domicile (cf. infra)



C- LES ACTES DE L’ETAT CIVIL
Les actes de l’état civil sont des documents qui contiennent des informations permettant
de distinguer une personne d’une autre.

Ces actes sont établis par le personnel préposé au service de l’état civil et qui comprend
des Officiers d’état civil (Délégués du gouvernement, les maires et leurs adjoints ainsi que
les Chefs de mission diplomatiques et consulaires, pour les actes établis à l’étranger).
Les Officiers sont souvent assistés, en cas de besoin, par des secrétaires d’état civil.

Tout ce personnel doit prêter serment avant l’exercice des fonctions devant le TPI du siège
du centre d’état civil.

Il existe à ce propos deux types de centres : les centres principaux qui sont institués au
niveau des communes et auprès de chaque mission diplomatique et consulaire du
Cameroun à l’étranger, et les centres secondaires, que l’on peut créer dans des villages
éloignés du chef-lieu des communes, dans le souci de rapprocher le service de l’état civil
des administrés.
II- LA PROTECTION DE LA PERSONNALITE JURIDIQUE

La personnalité juridique, une fois qu’elle reconnue à un sujet de droit et tant qu’elle n’est pas perdue, mérite
la protection à l’égard des atteintes qui peuvent lui être portées émanant soit de l’Etat, soit des autres
personnes. Cette protection porte sur les libertés individuelles (A) et sur la vie privée (B)

A- LES LIBERTES INDIVIDUELLES


On distingue les libertés physiques et les libertés morales.

1- Comme libertés physiques, l’on a :


• La liberté de se mouvoir (ou liberté d’aller et venir)
• La liberté de faire ou de ne pas faire
• La liberté de s’enfermer chez soi (ou liberté de se clore)

2- Quant aux libertés morales, elles comprennent :


• La liberté de conscience
• La liberté d’expression …
 

B- LE RESPECT DE LA VIE PRIVEE

La vie privée est protégée en ce qui concerne le domicile qui est inviolable,
c'est-à-dire qu’il ne peut pas faire l’objet d’immixtion de la part ni des
particuliers, ni même de l’Etat.

De même, l’individu a droit au respect de son nom qui ne peut être usurpé,
c'est-à-dire utilisé frauduleusement par les tiers. L’individu a également
droit au respect de son image qui ne doit pas être publiée ou fixée sur un
support quelconque sans son autorisation.

SECTION 2: LES PERSONNES MORALES
Les personnes morales sont des êtres fictifs auxquels le droit objectif reconnaît
la personnalité juridique. Il existe une large variété de personnes morales (II)
qui bénéficient cependant toutes d’un régime juridique (II).

I- LA DIVERSITE DES PERSONNES MORALES
On peut distinguer les personnes morales de droit public (A), les personnes
morales de droit privé (B) et les personnes morales de droit mixte (C).

A- LES PERSONNES MORALES DE DROIT PUBLIC
L’Etat est la principale personne morale de droit public. Rentrent également
dans cette catégorie, les collectivités territoriales décentralisées que sont les
Communes et les Régions. De même, les établissements publics bénéficiant de
l’autonomie financière et de gestion sont des personnes morales (ex :
l’Université).
B- LES PERSONNES MORALES DE DROIT PRIVE
Il s’agit des groupements de personnes privées et de masse de biens poursuivant des
buts d’intérêt privé auxquels est reconnue la personnalité juridique. L’on peut citer
dans ce cadre les sociétés (c'est-à-dire des groupements à but lucratif) et les
associations, les syndicats et fondations qui sont des groupements à but non lucratif ;
agissant dans un but désintéressé.

C- LES PERSONNES MORALES DE DROIT MIXTE
Il s’agit des personnes qui empruntent à la fois au droit public et au droit privé.
Certains groupements sont en effet crées par l’Etat en vue de participer à l’activité
économique (société d’économie mixte, établissements publics industriels et
commerciaux). Inversement, certains groupements de personnes privées poursuivent
des buts d’utilité publique tels que les ordres professionnels (ordre des avocats, ordre
des architectes).

II- LE REGIME DE LA PERSONNALITE JURIDIQUE

Le régime juridique applicable aux personnes morales comprend des règles relatives à
leur constitution(A), à leur fonctionnement(B) ainsi qu’à leur dissolution(C).

• A- La constitution des personnes morales

La constitution est à la personne morale ce qu’est la naissance à la personne physique :


c’est le moment d’acquisition de la personnalité juridique. Cependant l’Etat assure un
contrôle quant à la reconnaissance de cette personnalité qu’elle subordonne au respect
de conditions variables. L’octroi de la personnalité juridique aux personnes morales
nécessite :
- Soit la publicité : les groupements devant accomplir les formalités de publicité auprès
des autorités administratives ;
- Soit l’immatriculation, les sociétés commerciales devant satisfaire cette condition en
s’inscrivant au registre de commerce et de crédit immobilier (RCCM) ;
- Soit la reconnaissance d’utilité publique. Elle se fait par décret et permet à la
personne morale, aux associations particulièrement d’accéder à la pleine personnalité
c'est-à-dire à la faculté de recevoir des dons et legs.
• B- LE FONCTIONNEMENT DES PERSONNES MORALES
Les personnes morales fonctionnent sur le principe de l’autonomie patrimoniale. Cela signifie qu’elles
disposent d’un patrimoine propre distinct de celui de leurs membres.
Bien plus, elles jouissent d’une capacité de jouissance c'est-à-dire la capacité d’acquérir des droits et
une capacité d’exercice qui est la capacité de mettre en œuvre leurs droits par le biais de leurs
représentants.

• C- LA DISSOLUTION DES PERSONNES MORALES
C’est en quelque sorte la mort de la personne morale. Il existe plusieurs causes de dissolution des
personnes morales :
- La volonté des membres d’un groupe ;
- Une décision judiciaire ou administrative ;
- La survenance de certains évènements qui entraînent une dissolution de plein droit (Ex : la mort
ou l’incapacité d’un associé dans une communauté de personnes).


CHAPITRE 2: LE DROIT DE LA FAMILLE
Le droit de la famille s’entend de l’ensemble des droits ayant pour objet les rapports de
famille. La famille dont il est question est celle qui est constituée par le couple marié. Le
mariage sera donc étudié sur le triple plan de sa formation (Section 1), les effets (Section 2)
et sa dissolution (Section 3).
.
SECTION 1 : LA FORMATION DU MARIAGE
Le mariage peut être défini comme un acte juridique solennel par lequel l’homme et la
femme établissent une union organisée par la loi civile et dont la rupture ne peut être
obtenue que dans des conditions déterminées. Le principe directeur en matière de
formation du mariage est celui de la liberté matrimoniale. Cette liberté n’est toutefois pas
absolue dans la mesure où la loi fixe des conditions(S1) et des sanctions en cas
d’inobservation de celles-ci (S2).

I- LES CONDITIONS DE FORMATION DU MARIAGE
• Deux séries de conditions sont posées par la loi pour la formation du mariage. Certaines
conditions sont relatives au fond c'est-à-dire à la personne même des époux (A) d’autres
sont liées aux formalités à accomplir(B).
A- LES CONDITIONS DE FOND

Les conditions de fond sont celles qui ont trait soit à la physiologie (1) soit à la
psychologie des époux (2), d’autres sont d’ordre sociologiques (3).

1- Les conditions physiologiques
Il s’agit des conditions relatives à la différence de sexe (a) et à l’âge des époux (b)

a- La différence de sexe
Le mariage est une union entre deux personnes de sexes différents c'est-à-dire un
homme et une femme. Aux termes de l’article 53 (3) de l’ordonnance du 29 juin
1981, aucun mariage ne peut être célébré si les futurs époux sont de même sexe.
Cette condition se justifie par le fait que le mariage a pour principal but la
procréation.

b- L’ AGE DES ÉPOUX

Étant donné que le mariage a pour but principal la procréation, le législateur


a posé une condition d’âge pour la validité du mariage qui varie donc en
fonction du sexe en cause.

Ainsi, la jeune fille doit être âgée de 15 ans au moins et le jeune homme d’au
moins 18 ans le jour de la célébration du mariage. Il faut noter cependant
qu’un tel mariage n’est valable qu’avec le consentement des parents car l’âge
normal auquel l’on peut se marier est celui de la majorité civile c'est-à-dire 21
ans.

Exceptionnellement, le président de la République peut pour motifs graves


accorder des dispenses d’âge lorsqu’il est avéré que la fille de moins de 15
ans et le garçon de moins de 18 ans sont aptes à procréer.

2- LES CONDITIONS D’ORDRE PSYCHOLOGIQUE: LE CONSENTEMENT

Le consentement des époux est exigé (a) et il est protégé (b).



a- L’exigence du consentement des époux

Le mot consentement a deux sens. Il désigne d’une part la manifestation de volonté de chaque futur
époux et d’autre part la rencontre des volontés des époux. L’article 52 de l’ordonnance du 29 juin
1981 envisage ces deux sens du terme consentement en disposant qu’aucun mariage ne peut être
célébré si les époux n’y consentent pas.
La manifestation de volonté de chaque époux se concrétise par le « oui » solennel prononcé devant
l’officier d’état civil, tandis que la rencontre des volontés est l’accord sur projet matrimonial.

b- La protection du consentement
Comme dans tout acte juridique, le consentement ne doit pas être vicié. Les vices de consentement
tels que l’erreur et la violence sont donc sanctionnés à l’exception du dol car comme le dit un adage
« en mariage, il trompe qui peut ». La violence peut être physique ou morale. L’erreur quant à elle
n’est un vice de consentement que lorsqu’elle porte sur la personne (Ex : erreur sur l’identité du
futur conjoint).

3- LES CONDITIONS D’ORDRE SOCIOLOGIQUE

Elles sont nombreuses mais on peut en retenir 3 : la prohibition de la bigamie (a), la prohibition de l’inceste (b)
et le respect d’un certain délai de validité.

a- Prohibition de la bigamie
La bigamie est la situation d’un monogame qui contracte un second mariage avant la dissolution du premier.
Est également bigame, le polygame qui contracte un autre mariage de forme monogamique. L’ordonnance du
29 juin 1981 interdit la formation de tels mariages.

b- Prohibition de l’inceste
Le mariage est prohibé entre certaines personnes parentes ou alliées à un degré qui, au Cameroun varie selon
la coutume des intéressés. Le fondement de cette prohibition est la crainte que les enfants issus de ce mariage
incestueux soient atteints de tares. D’autres raisons de l’interdiction sont d’ordre sociologique ou de moralité.

c- Le respect du délai de viduité


Le délai de viduité est un délai que la veuve ou la femme divorcée doit laisser s’écouler avant de contracter un
nouveau mariage. Il est fixé à 180 jours au Cameroun et à 300 jours en droit français, ce qui correspond au
délai maximum de la durée d’une grossesse. Ce délai d’attente est justifié par le souci d’éviter une confusion
d’enfants. Cela explique qu’en cas d’accouchement ou de certificat de non grossesse, un mariage soit possible
avant l’écoulement du délai.

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