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DROIT DES OBLIGATIONS :

L’ACTE JURIDIQUE

1ère Année de Licence Droit IUA/ Mis à jour le 16 février 2024


Dr SAMY JUSTINE

Chapitre introductif :
La vie sociale donne naissance à un tissu de lien qui se manifeste par de
multiples exigences. La cohésion d’un groupement repose sur une multitude
d’obligations qui à l’évidence, ne relèvent pas toutes du domaine du droit.
La notion d’obligation doit être entendue dans un sens plus étroit. L’obligation est
un lien de droit entre un créancier et un débiteur en vertu duquel le créancier peut
exiger du débiteur l’exécution d’une prestation. On reconnait à l’obligation trois (3)
caractères essentiels : obligatoire, personnel et patrimonial :

I- Le caractère obligatoire ou lien de droit

Cela signifie que l’obligation a un caractère contraignant pour le débiteur car son
exécution n’est pas laissée au bon vouloir du débiteur. Si le débiteur ne s’exécute pas,
il sera contraint par un recours en justice. Cela permet de distinguer l’obligation civile
de l’obligation naturelle.
L’obligation est civile quand le lien entre le créancier et le débiteur est assez fort pour
que le premier puisse contraindre le deuxième à exécution. Exemple : Obligation
alimentaire entre parents et enfants (art. 48 de la loi sur le mariage). A l’inverse
l’obligation est naturelle quand le créancier ne peut contraindre le débiteur à exécution.
L’obligation naturelle peut être appréhendée comme un devoir de conscience, non
juridiquement sanctionnée. Exemple : Obligation alimentaire entre frère et sœur ;
l’engagement pris par un ex concubin de s’occuper des frais d’entretien des enfants
de son ex concubine qu’il n’a pas reconnu (Cour d’appel d’Abidjan, 28 mars 1975, arrêt
n° 131, RID 1976, 1-2, p. 42 et s.).
Toutefois si le débiteur de l’obligation naturelle s’acquitte volontairement de son
obligation, il ne peut en demander la répétition c’est-à –dire la restitution. L’obligation
naturelle est en effet une obligation juridique c'est-à-dire reconnue par le droit positif.

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Il est possible que l’obligation naturelle se transforme en obligation civile, soit parce
que le débiteur l’exécute volontairement soit parce qu’il s’est engagé à le faire (Civ.
1re, 14 février 1978, Bull. civ. I, N° 59 ; Civ., 11 mars 1936, DP 36.1.16 ; Civ. 1re, 6
janvier 2011, n° 09-71.243 ; Cour d’appel d’Abidjan, 28 mars 1975, arrêt n° 131, RID
1976, 1-2, p. 42 et s.). voir également l’Art. 1100 de l’ordonnance française de 2016 qui
dispose: « Les obligations naissent d'actes juridiques, de faits juridiques ou de l'autorité seule de
la loi. Elles peuvent naître de l'exécution volontaire ou de la promesse d'exécution d'un
devoir de conscience envers autrui ».
II- Le caractère personnel de l’obligation :

Cela signifie que l’obligation n’existe que dans les rapports du créancier et du débiteur.
Le droit du créancier n’est pas en principe opposable à des tiers. En cela, l’obligation
s’oppose au droit réel qui est opposable à tous.

III- Le caractère patrimonial de l’obligation

L’obligation a un caractère patrimonial en ce sens qu’elle est évaluable en argent.


L’obligation a donc une valeur et, à ce titre, elle constitue un élément du patrimoine.
Elle est à la fois un élément à l’actif du patrimoine du créancier et un élément passif
du patrimoine du débiteur.
En droit, l’obligation est un élément du patrimoine et est susceptible de diverses
classifications.

Section I : L’obligation : élément du patrimoine


Les attributs de la personnalité juridique encore appelés les attributs ou droits
des personnes physiques se caractérisent par leur diversité. Certains de ces droits
sont évaluables en argent, tandis que d’autres n’ont pas de valeur économique.
Les premiers sont les droits patrimoniaux qui représentent pour leur titulaire un
élément de richesse, c’est pourquoi on les appelle aussi biens. Les deuxièmes sont
les droits extrapatrimoniaux qui ne sont pas susceptibles d’évaluation pécuniaire. Dans
la catégorie des droits extrapatrimoniaux, nous pouvons citer les droits publics de la
personnalité ou droits de l’homme (le droit à la vie, les libertés physiques), et aussi les
droits privés de la personnalité tels que le droit à l’image, le droit au respect de la vie
privée etc.

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L’obligation, élément du patrimoine peut se définir comme un lien de droit ou
vinculum juris entre deux personnes en vertu duquel, l’une des personnes, le créancier
peut exiger de l’autre, le débiteur l’exécution d’une prestation.
Nous verrons la notion de patrimoine et les droits patrimoniaux.

§1 : La notion de patrimoine
En l’absence de définition légale, la définition du patrimoine a été l’œuvre de deux
auteurs français, les Prof. Aubry et Rau . Le patrimoine est l’ensemble des droits et
des obligations appartenant à une personne, et ayant une valeur pécuniaire à
l’exclusion des droits extrapatrimoniaux. Nous verr ons la composition et les
caractères du patrimoine.

A- La composition du patrimoine
Il comprend deux éléments : l’actif et le passif
1- L’actif :
C’est l’ensemble des biens corporels ou incorporels d’une même personne. L’actif ne
s’identifie pas à l’ensemble des biens que le patrimoine comporte à un moment donné.
L’actif s’étend et s’entend de tous les biens que le patrimoine est susceptible de
contenir dans l’avenir. Plutôt que le contenu c’est le contenant qui est pris en compte.
C’est pourquoi les droits du créancier ne portent pas sur la configuration du patrimoine
tel qu’il se présente au moment de la naissance de la créance.
Les droits du créancier embrassent aussi les biens à venir. C’est l’idée que le
code civil rend en son article 2092 du code civil quand il dispose que “le débiteur
s’acquitte de ses engagements sur ses biens présents et à venir”.

2- Le passif :
C’est l’ensemble de toutes les dettes et plus généralement de toutes les charges d’une
même personne. Le passif est indissolublement lié à l’actif. C’est pourquoi toute
transmission du patrimoine réalise à la fois transfert du passif et de l’actif. Exemple :
la transmission du patrimoine en cas de décès (succession).

B- Les caractères du patrimoine

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Ces caractères sont liés à la théorie selon laquelle le patrimoine est une émanation de
la personnalité, le lien entre la personne juridique et le patrimoine est un lien étroit.
Ainsi toute personne a nécessairement un patrimoine, toute personne ne peut avoir
qu’un seul patrimoine, le patrimoine forme une universalité.
1- Le caractère nécessaire du patrimoine :
La notion de patrimoine étant intimement liée à celle de personnalité juridique,
seule la personne juridique (physique ou morale) a un patrimoine, et toute personne a
un patrimoine même si elle ne possède aucun bien. Ainsi le nouveau-né dès lors qu’il
bénéfice de la personnalité juridique a un patrimoine. Il en est de même du chômeur
ou de l’élève, car le patrimoine comprend les biens présents mais aussi ceux à venir.
Toutefois, il n’y a pas que les personnes physiques qui puissent avoir un patrimoine,
les personnes morales peuvent en être également titulaires. Exemple : les sociétés
commerciales, les sociétés civiles.
Tant que la personnalité juridique n’est pas éteinte, le patrimoine persiste. Le
patrimoine est donc intransmissible entre vifs. Un individu peut céder tous ses biens
et ses dettes mais il garde toujours un patrimoine, tant que subsiste la possibilité
d’avoir de nouveaux droits et de nouvelles obligations. Par contre à la mort de
l’individu, il y a transmission intégrale du patrimoine à ses héritiers parce que l’individu
n’a plus de personnalité.

2- Le caractère unique du patrimoine :


A une personnalité juridique correspond un patrimoine quelles que soient ses
activités. C’est ainsi que le commerçant ne peut avoir deux patrimoines : un affecté à
l’exercice du commerce et un autre réservé à la vie civile et familiale. C’est la
prohibition du patrimoine d’affectation. Cependant aujourd’hui cette prohibition n’est
plus absolue avec l’Acte Uniforme relatif aux sociétés commerciales qui prévoit en son
article 5 que “la société commerciale peut également être créée par une seule
personne, dénommée associé unique’’.
Dans cette hypothèse une personne n’a pas à elle seule deux patrimoines
puisque la société unipersonnelle a la personnalité morale, mais l’unicité d’associé
rend artificielle la dualité des personnes. Si bien qu’en fin de compte la situation de
l’associé unique, est égale à celle d’une personne qui aurait deux patrimoines distincts.
De plus en droit français avec la nouvelle loi de 2010 relative à l’entrepreneur individuel
à responsabilité limitée (EIRL), le législateur français consacre le patrimoine
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d’affectation. En effet cette nouvelle loi permet à tout entrepreneur individuel d’affecter
une partie de ses biens à l’exercice de son activité (commerciale, artisanale, libérale
ou agricole) par une déclaration d’affectation. La conséquence de cette déclaration
d’affectation est de limiter le gage des créanciers professionnels aux biens ayant fait
l’objet d’affectation. On aboutit ainsi à la situation où une même personne juridique a
deux patrimoines sans avoir crée au préalable une deuxième personne juridique
(société ayant la personnalité morale notamment), comme cela a toujours été admis.

3- Le patrimoine forme une universalité :


Les biens qui entrent dans le patrimoine répondent des dettes qui existent. Aucun
élément de l’actif ni aucun élément du passif ne doit être envisagé séparément. C’est
cette notion d’universalité qui explique qu’au décès d’une personne, les héritiers ayant
accepté purement et simplement la succession, ont des droits sur les biens constituant
le patrimoine du défunt. Corrélativement à ces droits, ils doivent aussi répondre des
dettes contractées par le de cujus.

§ 2 : La détermination des droits patrimoniaux


Une distinction est faite entre les droits réels et les droits personnels.
A- Le droit réel
C’est un droit qui confère à son titulaire un pouvoir direct sur la chose. Le droit réel
comporte deux éléments : un sujet actif, le titulaire du droit et un objet : la chose sur
laquelle s’exerce le droit. Le droit de propriété en est une illustration. Ils se subdivisent
en droits réels principaux qui portent sur la chose elle-même (le droit de propriété et
ses démembrements) et en droit réels accessoires qui constituent l’accessoire d’un
droit de créance (ici il est question des sûretés réelles mobilières et immobilières).
Le droit réel puisqu’il s’exerce directement sur la chose est absolu, de sorte qu’il
peut être invoqué par son titulaire à l’égard de toutes autres personnes.
Le droit réel comporte un droit de suite permettant à son titulaire de suivre la chose
qui lui appartient, spécialement pour la revendiquer s’il est propriétaire.
Le droit réel comporte un droit de préférence qui permet au titulaire du droit réel d’être
payé avant tous les autres créanciers titulaires d’un droit personnel ou de créance.

B- Le droit personnel ou droit de créance


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Le droit de créance ou droit personnel est le droit qui permet à une personne
appelée créancier d’exiger d’une autre personne le débiteur, l’exécution d’une certaine
prestation. A la différence du droit réel, le droit de créance ou droit personnel ne porte
pas directement sur le bien, mais unit deux personnes. Le rapport juridique qui lie le
créancier et le débiteur est appelé obligation. Ainsi le contrat de vente par exemple fait
naître un droit personnel ou obligation entre l’acheteur et le vendeur. Il unit dans un
rapport d’obligation l’acheteur et le vendeur qui ont des qualités de créancier et
débiteur.
L’obligation ainsi conçue désigne le rapport tout entier, rapport obligatoire qui
existe entre le créancier et le débiteur, côté actif et côté passif. L’obligation est donc
un droit personnel car exercée contre une personne et elle seule. Ce droit personnel
ou droit de créance porte sur le patrimoine du débiteur : on dit que le créancier a un
droit de gage général sur le patrimoine du débiteur. Ce droit ne vise pas un bien
déterminé. Il embrasse tout le patrimoine du débiteur.
Ce droit de créance ne comporte pas de droit de suite c'est-à-dire que si le débiteur
cède un bien de son patrimoine, le créancier ne peut le reprendre dans les mains de
l’acquéreur pour le réintégrer dans le patrimoine du débiteur. Le droit de créance a un
caractère relatif c'est-à-dire qu’il n’établit de rapport qu’entre le créancier et le
débiteur : c’est seulement de ce dernier que le créancier peut exiger la prestation objet
du droit. Le droit personnel ne comporte pas de droit de préférence c'est-à-dire que le
créancier le plus ancien ne peut exiger d’être payé avant les créanciers les plus
récents. Ils concourent dans le patrimoine de leur débiteur commun.

Section 2 : la classification des obligations


§ 1 : La classification des obligations fondées sur l’objet
Classer les obligations selon leur objet revient à se fonder sur ce à quoi le débiteur est
tenu à l’égard du créancier. De ce point de vue, il y a une classification selon le code
civil et une classification proposée par la doctrine.

A- La classification du code civil :


L’article 1101 précise qu’il peut y avoir des obligations de donner, de faire et de ne pas
faire.
1- L’obligation de donner :

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C’est toujours une obligation de résultat. C’est celle qui est faite au débiteur de
transférer la propriété au créancier. Il importe peu que ce transfert soit à titre gratuit ou
onéreux. Cette obligation est plus évidente dans les contrats de vente de choses de
genre (riz). Le transfert de propriété ne se réalise pas à la conclusion du contrat mais
est retardé jusqu’à l’individualisation de la chose. Pour les corps certain, cette
obligation offre peu d’intérêt. Car le transfert de propriété est instantané et se réalise
du seul accord de volonté des parties (vente). Dans certains cas l’obligation de donner
prend une coloration particulière et s’appelle obligation pécuniaire et consiste pour le
débiteur à transférer au créancier une certaine quantité de monnaie, elle est soumise
à la dépréciation monétaire.

2- L’obligation de faire :
Ici le débiteur est astreint à un fait positif distinct du transfert de propriété. Ex :
l’obligation pour l’entrepreneur de bâtir une maison, obligation pour un peintre de
réaliser une œuvre d’art.

3- L’obligation de ne pas faire : (c’est toujours une obligation de résultat)


Le débiteur est tenu de s’abstenir de faire certains actes. Exemple : l’obligation de non
concurrence.

B- Les classifications proposées par la doctrine :

1- La distinction obligation de résultat- obligation de moyens


C’est Démogue qui le premier a proposé cette distinction. La jurisprudence l’a par la
suite entérinée.
a- l’obligation de résultat :
Le débiteur est tenu d’atteindre un résultat précis, quand ce résultat n’est pas atteint,
le créancier n’a pas besoin de prouver la faute du débiteur. La responsabilité de ce
dernier est engagée du seul fait que ce résultat n’est pas atteint. Le débiteur ne peut
se dégager qu’en prouvant que l’inexécution de son obligation provient d’une cause
étrangère comme un cas de force majeure. Ex : l’obligation de sécurité du transporteur
à l’égard du voyageur.

b- L’obligation de moyens :
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Le débiteur ici n’est pas tenu de garantir le résultat, il doit agir avec le maximum de
prudence et de diligence en mettant en œuvre tous les moyens pour atteindre ce
résultat. Si celui-ci n’est pas atteint le débiteur n’est pas responsable pour cette seule
raison. Le créancier de l’obligation doit démontrer sa faute c'est-à-dire qu’il n’a pas agit
avec la diligence requise.
Exemple : Obligation du médecin à l’égard du malade.
L’intérêt de cette distinction réside dans les conditions de mise en jeu de la
responsabilité du débiteur. Le créancier d’une obligation de résultat n’a pas à
démontrer la faute du débiteur, il lui suffit de démontrer que le résultat attendu n’a pas
été atteint, elle suffit à constituer le débiteur en faute.
Au contraire le créancier d’une obligation de moyens doit démontrer la faute du
débiteur pour engager sa responsabilité.

2- La distinction obligations en nature et obligations monétaires


Cette distinction est proposée par le doyen Jean Carbonnier. L’obligation d’accomplir
une prestation en nature (obligation de faire), obligation de ne pas faire, l’obligation de
donner un corps certain ou une chose de genre autre que la monnaie constituent les
obligations en nature. Elles se définissent comme étant toutes celles dont l’objet n’est
pas une somme d’argent.
L’obligation monétaire est celle de transférer la propriété d’une certaine quantité
d’argent, l’obligation de payer un certain prix. Elle soulève des problèmes propres du
fait de la particularité de son objet, la monnaie.

§ 2 : La classification des obligations fondée sur la source


Elle provient du code civil. Le critère qui sert à les distinguer c’est leur source, c'est-à-
dire le fait qu’il leur donne naissance.

A- Les obligations conventionnelles : (art 1101 du code civil)


Ce sont celles qui naissent d’une convention, c'est-à-dire d’un acte juridique résultant
de l’accord de volontés de deux ou plusieurs personnes tendant à produire un effet de
droit quelconque : soit faire naître des obligations, soit éteindre des obligations, soit
transférer des obligations ou les transformer. Le code civil définit le contrat à l’article
1101 comme une convention destinée à créer des obligations. Tout contrat est donc
une convention mais toute convention n’est pas un contrat. Toutefois en pratique les
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deux notions sont utilisées comme des synonymes car en lieu et place d’obligations
conventionnelles, on parle d’obligations contractuelles. C’est la raison pour laquelle,
l’ordonnance française de 2016 à l’article 1101 ne fait plus de distinction entre les deux
notions car elle définit désormais le contrat comme : « un accord de volontés entre deux
ou plusieurs personnes destiné à créer, modifier, transmettre ou éteindre des obligations. »
Par ailleurs, le code civil ivoirien est silencieux sur les actes juridiques qui naissent de
l’expression d’une seule volonté c'est-à-dire l’acte juridique unilatéral. Or ils constituent
aussi des sources d’obligations. Aujourd’hui la doctrine s’accorde à intégrer dans la
même catégorie les obligations naissant de l’expression d’une seule volonté et celles
qui découlent d’un accord de volonté : c’est la catégorie des actes juridiques.

B- Les obligations qui se forment sans convention :


Elles proviennent du code civil. Elles comprennent les obligations résultant de l’autorité
seule de la loi et les obligations qui naissent d’un fait personnel.

1- Les obligations résultant de l’autorité seule de la loi :


Elles trouvent leur source dans la loi, C’est elle qui les prévoit et les règlemente.
Exemple : les devoirs imposés aux propriétaires voisins. De même aussi les devoirs
imposés aux tuteurs et aux administrateurs.
2- les obligations naissant d’un fait personnel :
L’article 1370 al 4 énonce ces obligations. Ce sont les quasi-contrats, les délits et les
quasi-délits.
- Les quasi-contrats : Ce sont selon l’art. 1371 “des faits purement volontaires dont il
résulte un engagement quelconque envers un tiers et quelque fois un engagement
réciproque des deux parties”. Deux de ces quasi contrats sont réglementés par la loi :
la gestion d’affaires et la répétition de l’indu art. 1376 à 1381. Le troisième quasi-
contrat est d’origine jurisprudentiel : c’est l’enrichissement sans cause. Il se fonde
comme les autres sur le souci d’éviter que l’on s’enrichisse au dépend d’un tiers.
- Les délits : Ce sont des faits illicites intentionnels qui obligent leurs auteurs à
réparation quand ils sont dommageables pour autrui.
- Les quasi-délits : Ce sont des faits illicites non intentionnels qui obligent leurs auteurs
à réparation quand ils sont dommageables.

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La doctrine unanime admet la distinction obligation conventionnelle, obligation non
conventionnelle comme la distinction majeure : C’est la Summa Divisio. Le contrat est
la source essentielle des obligations.

 L’ESSENTIEL

L’obligation est un lien qui unit un créancier et un débiteur en vertu duquel le premier peut
exiger du second l’exécution d’une prestation. Elle revêt un certain nombre de caractères
notamment le caractère obligatoire, personnel et patrimonial.
Obligatoire, en ce sens que le créancier peut saisir les juridictions pour demander l’exécution
de la prestation qui lui est due. Personnel, cela suppose que ce droit du créancier n’est pas
opposable aux tiers. Enfin, le caractère patrimonial, vient du fait qu’elle est évaluable en
argent. L’obligation peut être classée selon plusieurs critères notamment selon l’objet, la
source

Bien que certains droits soient évaluable en argent, d’autres ne le sont pas. On appelle ces
 droits
derniers, extrapatrimoniaux, par opposition aux droits patrimoniaux.
BIBLIOGRAPHIE
 ASSIest
Le patrimoine ESSO Anne Marie,
l’ensemble des Droit
droitscivil les obligations,
et des obligations éditions IUBA,à une personne, et
appartenant
ayant une Abidjan, 2012.
valeur pécuniaire à l’exclusion des droits extrapatrimoniaux. Il comporte l’actif et le
passif. 
Le patrimoine
Bony Serges, est caractérisé par sa
Droit civil, droit nécessité
des c’estles
obligations, direéditions
toute personne
ABC, 2016a un patrimoine
même si elle ne possède aucun bien ; il est unique en ce sens qu’à une personnalité juridique
 François
correspond TERRE,
un patrimoine Yves
; le LEQUETTE,
patrimoine Philipe
est enfin uneSimler, Droit civil,
universalité puisque les biens qui
les obligations, Paris 2009
entrent répondent des dettes existantes.
Par ailleurs, une distinction est à opérer entre les droits patrimoniaux. erOn a tout d’abord, le
 MAZEAUD Jean et CHABAS François, Droit civil, tome 2,1 volume, édition
droit réel, c’est un droit qui confère à son titulaire un pouvoir direct sur la chose. Ensuite le
Montchrestien
droit personnel encore appelé droit de créance qui est le droit qui permet au créancier d’exiger
de son débiteur l’exécution d’une prestation.
S’agissant de la classification des obligations, il y’a celles fondées sur l’objet, c'est-à-dire ce
sur quoileExercices d’application
débiteur est tenu à l’égard du créancier, dans ce cas il faut se fier à la
classification proposée par le code civil et celle proposée par la doctrine. Mais aussi, il y’a
celles fondées sur de
Contrôle la connaissances
source, on fait référence au fait qui leur donne naissance, ici il ya les
obligations conventionnelles et celles qui se forment sans convention.

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 BIBLIOGRAPHIE

ASSI ESSO Anne Marie, Droit civil les obligations, éditions IUBA, Abidjan, 2012.
Bony Serges, Droit civil, droit des obligations, les éditions ABC, 2016
1) Définir la notion d’obligation. Quelles sont les composantes de l’obligation ?

2) Faites la classification des obligations en fonction de leur objet, en fonction de


leur source.

3) Quel est l’intérêt de la distinction des obligations de moyens et de résultat ?

4) Répondre par Vrai ou Faux et justifiez votre réponse


a) L’obligation de donner est toujours une obligation de résultat
b) L’obligation de faire est toujours une obligation de moyen
c) L’obligation naturelle est susceptible d’exécution forcée
d) L’obligation est un droit personnel
e) L’obligation a une valeur vénale

5) Expliquez le régime de l’obligation naturelle.


Fiche d’arrêt

LA COUR,
Sur le moyen unique pris en ses première et troisième branches :
Vu l’article 1147 du Code civil :
Attendu qu’un médecin est tenu, vis-à-vis de son patient, en matière d’infection
nosocomiale, d’une obligation de sécurité de résultat, dont il ne peut se libérer
qu’en rapportant la preuve d’une cause étrangère.
Attendu que M.Fr., qui exerçait une activité de médecin radiologiste dans des
locaux qu’il louait à une clinique dans des conditions exclusives de tout pouvoir
d’intervention ou d’organisation de cette dernière, y a pratiqué le 22 septembre
1987 sur la personne de M.F., une arthrographie d’un genou. Que quelques jours
après, M.F a souffert d’une arthrite sceptique consécutive à l’action de
staphylocoques dorés ayant pénétré dans son articulation lors de l’arthrographie.
Que l’arrêt attaqué a rejeté l’action en réparation de son préjudice engagée par M.F
contre M.F au motif que « dès lors que le médecin est tenu d’une obligation de
moyen et non pas de résultat et que, de la sorte sa faute ne peut se déduire de la
seule apparition du préjudice fut-il en relation de causalité avec l’acte médical
pratiqué .M.F ne peut qu’être débouté de ses demandes à défaut de de rapporter
la preuve d’une faute commise par le docteur Fr ».
Attendu qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé le texte susvisé,
Par ces motifs, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur la deuxième branche du moyen :
Casse et annule, en ce qu’il a rejeté l’action engagée par M.F contre M .Fr, l’arrêt
rendu le 18 septembre 1997,entre les parties par la Cour d’appel de Versailles
remet en conséquence quant à ce ,la cause et les parties dans l’état où elles se
trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d’appel
d’AMIENS.

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Première partie : L’ACTE JURIDIQUE : SOURCE D’OBLIGATIONS

L’acte juridique est une manifestation de volonté réalisé en vue de produire des effets
de droit. Le contrat est le prototype de l’acte juridique : c’est un acte juridique bilatéral.
En dehors du contrat, il ya les autres actes juridiques qui sont les actes juridiques
unilatéraux et l’acte collectif.
- L’acte juridique unilatéral :
C’est une manifestation de volonté par laquelle une personne agissant seule
détermine des effets de droit. Il existe sous plusieurs formes :
- des actes juridiques extra patrimoniaux : tels que la reconnaissance d’enfant naturel,
l’émancipation.
- Les actes juridiques patrimoniaux : tels que le testament, les renonciations (ce sont
les actes par lesquels le titulaire d’un droit décide de ne plus s’en prévaloir).
- L’acte juridique collectif : Ce sont des actes qui sont non seulement formés par
plusieurs personnes mais qui ont aussi vocation à s’appliquer à plusieurs personnes.
Ils se présentent sous deux formes principales :

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- Les actes unilatéraux collectifs : Ce sont des actes collectifs dans lesquels des
personnes manifestent individuellement des volontés concordantes et s’entendent
pour atteindre le même but. L’acte résulte donc d’un faisceau de déclaration unilatérale
de volonté.
Exemple : les actes constitutifs de personnes morales. Ce qui les caractérise, c’est
l’absence de conflit d’intérêt entre leurs auteurs.
- les conventions collectives : ce sont des actes collectifs conclus entre deux groupes
de personnes dont les intérêts sont antagonistes. Ces actes ont vocation à s’appliquer
à des parties qui n’y ont pas personnellement consenties. Exemple : la convention
collective du travail.
En dépit de l’existence des actes juridiques unilatéraux et collectifs, le code civil
accorde une part prépondérante au contrat. Ainsi les conditions de validité de tous les
actes juridiques et leurs effets obéissent aux règles qui gouvernent le contrat.
Autrement dit les conditions de formation du contrat ainsi que les effets du contrat sont
applicables à tous les autres actes juridiques. C’est la raison pour laquelle dans ce
cours le contrat sera le seul acte juridique que nous aborderons.

TITRE 1 : LES PROBLÈMES SOULEVÉS PAR LES CONTRATS

Le contrat est définit comme un accord de volonté entre deux ou plusieurs personnes
dans le but de faire naître des obligations. Il est cependant des accords de volonté qui
ne sont pas des contrats en ce sens que les intéressés n’ont pas voulu établir entre
eux un rapport juridique qui permette d’exiger l’exécution d’une obligation.
Il y a ainsi des promesses que nous faisons de bonne foi, et avec la volonté actuelle
de les accomplir, mais sans une intention d’accorder à celui à qui nous les faisons, le
droit d’en exiger l’accomplissement.
Cela peut résulter des circonstances ou des qualités de celui qui promet et de celui à
qui la promesse est faite. Par exemple lorsqu’un père promet à son fils, qui étudie en
droit de lui offrir un billet d’avion pour les USA s’il réussit à son examen, le père en
faisant cette promesse, n’entend pas contracter envers son fils un engagement
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proprement dit. De telles promesses peuvent être politiques ou découler de rapports
mondains. Exemple : promesses politiques, elles n’engagent pas leurs auteurs.
De même les actes de courtoisie : une invitation à dîner qui a été acceptée ne constitue
pas un contrat.

De même la question s’est posée de savoir si l’automobiliste était tenu sur le terrain
contractuel en cas d’accident survenu au cours de transport bénévole ?
La jurisprudence a toujours refusé de voir en cette prestation de services gratuits un
contrat : il s’agit d’un acte de complaisance (cass. Civ. 27 mars 1928, G.P, N°202, voir
arrêt ivoirien CAA 22 Mars 1974).
Plus controversée a été la question de l’acte d’assistance. Le sauveteur conclut-il avec
celui auquel il porte secours une convention ?
De nombreuses décisions retiennent l’existence d’une convention d’assistance.
Les problèmes soulevés par les contrats ont trait à leur classification et au principe de
l’autonomie de la volonté.

CHAPITRE I : LA CLASSIFICATION DES CONTRATS

La classification des contrats a pour but essentiel de faire apparaître non seulement
les caractères communs à une même catégorie de contrats, mais aussi les différences
qui se dégagent entre ces différents groupes de contrats. Ces classifications peuvent
se fonder sur :
- les conditions de formation des contrats
- le but poursuivi par les parties
- les effets produits par les contrats
- la durée d’exécution des contrats
Avant d’étudier ces différentes catégories nous évoquerons les contrats nommés et
les contrats innommés. Ils proviennent du code civil : le contrat est dit nommé quand
c’est un contrat usuel et pour cela réglementé par le code civil et d’autres lois. Le
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contrat est innommé quand il n’a pas de dénomination et est soumis pour cela à un
régime différent.

Section I : les classifications fondées sur les conditions de formation des contrats
Nous verrons trois groupes de contrats :

§1 : La distinction contrat consensuel, contrat solennel et contrat réel


- Le contrat est consensuel quand il se forme par le seul accord de volonté des parties
peu importe leur manière d’exprimer leur consentement.
Exemple : la vente : type de contrat consensuel (article 1583 du code civil).
La vente n’est pas le seul contrat consensuel. En matière contractuelle, le
consensualisme est le principe et le formalisme l’exception.
- les contrats solennels ou formels : nécessitent que l’échange des consentements
s’accomplisse selon certaines formalités, certains rites sous peine de nullité de l’acte.
Ces formalités et rites ont pour but de mettre les parties en garde contre la gravité de
l’acte. Quelles sont ces formalités ?
* La forme notariée : Ex : vente d’immeuble
*l’acte sous-seing privé. Exemple : art 1907 du code civil exige un tel acte pour
constater les taux d’intérêts conventionnels.
- les contrats réels : ce sont des contrats qui ne se forment que par la remise de la
chose au contractant. Ex : le prêt, le gage avec dépossession, le dépôt.
Une partie de la doctrine critique cette distinction. Cependant, maintenant la
jurisprudence a consacré cette qualification.
Exemple : pour le prêt : civil 1ère, chambre, 20/07/1981, Gazette du palais 1982, I,
Panorama p. 93

§ 2 : les contrats de gré à gré et les contrats d’adhésion


Ils sont apparus après le code civil et se sont développés au 19 e siècle. Le contrat de
gré à gré est un contrat dans lequel les parties discutent librement et à égalité juridique
et économique. Dans les contrats d’adhésion l’une des parties impose à l’autre un acte
dont elle établit elle-même le texte et les stipulations. Dans ces contrats il s’agit moins
de consentir que d’adhérer. Ex : les contrats d’abonnement d’eau ou d’électricité en
Côte d’Ivoire, le contrat d’assurance.

15
Du fait de cette rigidité, les juristes classiques se sont demandé si les contrats
d’adhésion étaient vraiment des contrats. En effet dans l’analyse classique adhérer
n’est pas consentir. Sur le plan pratique ces deux contrats sont soumis aux mêmes
règles et régimes. Plusieurs moyens ont été recherchés pour mettre sur un pied
d’égalité les parties au contrat d’adhésion. Ainsi la loi a prévu des règles impératives.
Exemple : dans le contrat de travail, on impose à l’employeur le respect d’un congé
annuel au profit de l’employé.

Section II : Les classifications fondées sur le but poursuivi par les parties

Elles proviennent du code civil. Nous verrons deux groupes :


§ I : La distinction contrats commutatifs-contrats aléatoires (art. 1104)
Le contrat est commutatif quand l’une des parties reçoit de l’autre une prestation
connue et déterminée dès l’origine, en contrepartie du sacrifice qu’elle consent.
Exemple : le contrat de vente, le contrat de bail.
Les prestations réciproques doivent être équivalentes.
Le contrat est aléatoire quand l’existence ou l’étendue des obligations de l’une des
parties dépend du hasard. Exemple : le jeu et le pari, le contrat d’assurance.
- l’intérêt de la distinction : dans les contrats commutatifs la lésion est admise alors
qu’elle est exclue dans les contrats aléatoires. De plus, le code civil se montre très
prudent à l’égard des contrats aléatoires. Ainsi l’article 1965 du code civil n’accorde
pas d’action pour le paiement des dettes de jeu ou de pari.

§ 2 : La distinction des contrats à titre onéreux et des contrats à titre gratuit (contrats
de bienfaisance)
Selon l’article 1105 le contrat est à titre gratuit (contrat de bienfaisance) quand l’une
des parties procure à l’autre un avantage sans contrepartie. Au contraire l’article 1106
définit le contrat à titre onéreux comme un contrat dans lequel chacune des parties est
assujettie à une obligation de donner ou de faire quelque chose.
Intérêt de la distinction : Dans les contrats à titre gratuit l’intuitu personae est très
marquée. On y admet donc plus facilement la nullité pour erreur sur la personne. Par
ailleurs le code civil se montre moins rigoureux à l’égard des débiteurs dans les
contrats gratuits qu’envers les débiteurs des contrats à titre onéreux.
SECTION III : La classification fondée sur les effets produits par le contrat
16
Certains de ces contrats proviennent du code civil mais d’autres lui sont postérieurs.
§1 : Les contrats synallagmatiques et les contrats unilatéraux
Selon l’article 1102 le contrat synallagmatique ou bilatéral est celui dans lequel les
contractants s’obligent réciproquement les uns envers les autres. Ex : contrat de vente.
Selon l’article 1103 le contrat est unilatéral quand une seule des parties est soumise à
obligation, l’autre y échappe. Ex : donation, le contrat de dépôt, contrat de prêt, le
gage.
Il ne faut pas confondre contrat unilatéral et acte unilatéral. Dans le premier il y a
accord de volonté des deux parties mais une seule s’oblige. Dans le deuxième, une
seule personne manifeste sa volonté pour déterminer des effets de droit, exple : le
testament.
- Les intérêts de la distinction : Ils se situent à deux niveaux :
* au niveau de la preuve préconstituée. Dans les contrats synallagmatiques, il y a
autant d’actes constatant l’accord de volonté qu’il y a de parties ayant un intérêt
distinct : c’est la formalité du double original (article 1325).
* Au niveau de l’exécution des deux sortes de contrats : dans les contrats
synallagmatiques, si l’une des parties n’exécute pas son obligation, l’autre a deux
moyens :- l’exception d’inexécution : on dit aussi exception non adimpliti contractus qui
permet au créancier de l’obligation inexécutée de retarder l’exécution de son obligation
jusqu’à ce que l’autre exécute la sienne. Le deuxième moyen :- la résolution du contrat
(article 1184 du code civil)). Le créancier de l’obligation inexécutée du fait de la
mauvaise foi du débiteur peut demander la résolution judiciaire du contrat. Ces moyens
existent pour les contrats synallagmatiques et non pour les contrats unilatéraux.

§ 2 : les contrats individuels - les contrats collectifs


Ils sont postérieurs au code civil. Le contrat est dit individuel quand il ne produit
d’effets qu’à l’égard des parties aux contrats. Il est collectif quand il produit des effets
à l’égard des parties autres que les parties signataires. Ex : la convention collective du
travail.

Section 4 : les classifications fondées sur la durée d’exécution des contrats


Ici le critère c’est le temps pendant lequel ces contrats sont exécutés.
-Contrats instantanés :

17
Le contrat est instantané quand il s’exécute en un trait de temps. Ex : le contrat de
vente.
-Contrats à exécution successive :
Dans ce type de contrat, l’accomplissement des prestations des parties s’échelonne
dans le temps. Ex : contrat de bail, contrat de travail.
L’intérêt majeur de cette distinction se situe au niveau de l’annulation ou de la
résolution des contrats. Dans les contrats à exécution instantanée, l’annulation est
rétroactive, c'est-à-dire que le contrat est anéanti aussi bien pour l’avenir que pour le
passé. En conséquence, les prestations réciproques sont restituées.
Dans les contrats à exécution successive, l’anéantissement de l’acte ne produit pas
d’effet rétroactif. L’annulation opère pour le présent et l’avenir. On dit qu’il y a résiliation
et les prestations réciproques effectuées ne sont pas susceptibles d’être restituées.
Ex : le contrat de travail et de bail.

Conclusion
Les différentes classifications de contrats énoncées peuvent se regrouper et un même
contrat peut relever de plusieurs catégories à la fois. Par ailleurs, la liste proposée
n’est pas exhaustive et pourrait être complétée par une série de contrats issus de la
pratique et qui correspond à de nouvelles figures contractuelles, qui répondent aux
besoins sans cesse changeant de la vie économique et sociale et au progrès de la
technologie.
Ainsi aux contrats traditionnels dans lesquels le consentement s’extériorise par les
méthodes traditionnelles (signature, paroles échangées, etc.), on oppose les contrats
électroniques dans lesquels le consentement s’exprime au travers d’impulsions
électroniques. D’autres contrats correspondent à de nouvelles structures complexes
différentes de celles connues jusque-là :
- contrat complexe – groupe de contrats (la chaîne de contrat, le sous contrat,
l’ensemble contractuel).
- Contrat de consommation : conclu entre professionnels et consommateurs.(
voir la Loi ivoirienne n°2016‐412 du 15 juin 2016 relative
à la consommation : les articles 1 et 2)
- Contrat égalitaire : conclu entre professionnels ou entre particuliers.
Dans les contrats conclus entre professionnels nous avons une autre classification :
contrat de dépendance – contrat égalitaire.
18
 L’essentiel

L’acte juridique est une manifestation de volonté réalisée en vue de produire des effets de droit.
Il peut être unilatéral, bilatéral ou multilatéral. Le contrat est un acte juridique bilatéral définit par
l’article 1101 Code Civil, comme « une convention par laquelle une ou plusieurs personnes
s’obligent, envers une ou plusieurs autres, à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose ».
Le contrat, même s’il n’est pas le seul, est la convention par excellence qui elle résulte de l’accord
de volontés de deux ou plusieurs personnes tendant à produire un effet de droit quelconque.
Il est impérieux de procéder à une classification des contrats afin d’établir les éléments similaires
et les différences entre les différents types de contrats. Plusieurs critères dont la liste n’est pas
limitative peuvent être utilisés notamment : les conditions de formation des contrats, le but
poursuivi par les parties, les effets produits par les contrats, la durée d’exécution des contrats.
S’agissant, des classifications fondées sur les conditions de formation des contrats, on a la
distinction contrat consensuel, contrat solennel et contrat réel ; les contrats de gré à gré et les
contrats d’adhésion.
Pour les classifications fondées sur le but poursuivi par les parties, il faut distinguer les contrats
commutatifs et les contrats aléatoires ; les contrats à titre onéreux et les contrats à titre gratuits.
19
Par ailleurs, la classification fondée sur les effets produits par le contrat, on fait référence ici aux
contrats synallagmatiques et aux contrats unilatéraux ; contrats individuels et contrats collectifs.
CHAPITRE II-LE PRINCIPE DE L’AUTONOMIE DE LA VOLONTÉ

Ce principe est né d’une doctrine de philosophie juridique du XVIIIe siècle. Ses


partisans les plus connus sont Kant et Rousseau. Pour cette doctrine, les hommes
naissent libres et égaux, on ne peut donc leur imposer d’obligations que s’ils les ont
voulu. La volonté est donc la source et la mesure des obligations de l’homme. Ainsi
les individus peuvent par leur volonté se donner une loi, selon Fouillée, qui dit
contractuel dit juste.
Section I/ le contenu et les fondements de ce principe
§ I : le contenu de ce principe
Ce principe se manifeste à deux niveaux : au niveau de la formation du contrat et de
ses effets.
A- Au niveau de la formation du contrat
Dans la phase de la conclusion du contrat, l’autonomie de la volonté se manifeste
au niveau de l’expression du consentement et de la liberté contractuelle.
- Au niveau de l’expression du consentement : Les parties ne sont tenues que si elles
l’ont voulu et indépendamment de la forme du consentement. C’est le Principe du
consensualisme. Selon ce principe, la volonté est toute suffisante pour donner
naissance au contrat, qu’importe la forme d’expression du consentement. La volonté
est la seule source d’existence du contrat et le contrat ne peut naître d’aucun rite.
- Au niveau de la liberté contractuelle : elle s’exprime par 3 libertés :
La liberté de contracter ou de ne pas contracter : les personnes sont libres de
passer un contrat ou de ne pas le conclure.

20
La liberté de choisir son cocontractant : les personnes sont libres de choisir leur
cocontractant
La liberté de déterminer le contenu du contrat : les parties choisissent librement
l’étendue de leurs obligations. Elles en choisissent le genre et le nombre. De ce point
de vue, les règles du code civil ne sont que supplétives de la volonté. Elles ne
s’imposent pas aux parties qui peuvent innover ou s’y conformer. Il en découle
l’obligation pour le juge de ne tenir compte que de la volonté des parties pour apprécier
la validité du contrat.

B- Au niveau des effets du contrat


Ce principe se traduit ici par deux principes :
- le principe de la force obligatoire du contrat entre les parties : l’article 1134
dispose que « les conventions légalement formées tiennent lieu de lois à ceux
qui les ont faites ». Les obligations extérieures aux parties ne sont pas légitimes
mais celles-ci sont tenues par les obligations que leur volonté créée et les
parties sont tenues de la même manière qu’elles le seraient à l’égard d’une loi.
Du caractère obligatoire du contrat l’article 1156 tire une autre règle : les juges
doivent rechercher la volonté des parties c'est-à-dire leur commune intention
quand il interprète les contrats. Le juge ne saurait réviser des clauses
contractuelles quand des circonstances économiques bouleversent l’économie du
contrat (c’est le problème de l’imprévision).
- Le principe de l’effet relatif du contrat :
Selon l’article 1165 du code civil, le contrat lie les parties mais ne peut profiter ni
nuire aux tiers. Celui qui n’a pas consenti ne saurait être lié. Ce principe veut donc
dire que le contrat ne produit d’effets qu’entre les parties il n’en produit pas à l’égard
des tiers.
§ 2 : les fondements de ce principe
Nous en verrons deux sortes :
A/ les fondements de philosophie politique :
La croyance en l’idée que l’homme ne peut se voir imposer d’obligation en dehors
de sa volonté, repose sur une doctrine de philosophie politique datant du XVIII
siècle. Cette doctrine repose sur ce postulat : l’homme naît naturellement libre. Il
en découle que cette liberté ne peut être aliénée que s’il y consent. L’homme doit
se voir reconnaître les droits les plus étendus seulement s’il consent à se lier, cette
obligation s’impose à lui.

21
Cette doctrine se retrouve aussi dans les rapports de l’homme avec la société. Si
l’homme naît naturellement libre comment expliquer que la société lui impose des
règles ? L’on répond que c’est l’homme lui-même qui a eu le besoin de créer la
société c'est-à-dire d’adopter la vie sociale. Il lui fallait donc donner à sa création
les moyens de son fonctionnent normal. C’est pourquoi l’homme accepte que la
société crée des règles indispensables au maintien de la vie sociale.
En dernière analyse c’est la volonté humaine qui crée les contraintes sociales. Il y
a donc un pacte, un contrat social c'est-à-dire une adhésion de l’homme aux
contraintes de la société.
B/ les fondements économiques
A ce niveau l’autonomie de la volonté repose sur la doctrine du libéralisme
économique. Cette doctrine est née dès avant le XVIIIe siècle. Selon cette doctrine
l’Etat doit laisser faire et laisser passer c'est-à-dire que les hommes doivent librement
aménager leurs rapports économiques. Cette liberté est perçue comme un moyen de
réaliser au plan individuel l’intérêt des particuliers et au plan social l’intérêt général. Le
libéralisme économique établit une équation entre le contractuel et le juste. Du fait de
la liberté de l’homme il ne peut signer un contrat qui lui soit défavorable. Et ce qui naît
d’un engagement contractuel est forcement juste. Autrement les parties n’auraient pas
consenti.
Le libéralisme économique et son corollaire la liberté contractuelle permettent de
sauvegarder des intérêts particuliers en assurant la justice dans les rapports
économiques. Au plan plus général de la société, le libéralisme économique permet
de réaliser l’intérêt général. En effet, si tous les rapports économiques individuels sont
justes, l’ensemble de ces relations, par le jeu des automatismes économiques ne peut
être que juste. L’intérêt général est perçu comme la somme des intérêts particuliers.
Si les uns sont justes, les autres ne peuvent que l’être.

Section II: les atteintes au principe de l’autonomie de la volonté.


Certaines atteintes sont prévues par le code civil et d’autres y sont postérieures.
§1 : Les atteintes prévues par le code civil
Selon l’article 6 “on ne peut déroger par des conventions aux lois qui intéressent l’ordre
public et les bonnes mœurs“.

A/ L’ordre public
22
L’ordre public est constitué de valeurs considérées comme indispensables au
développement harmonieux de la communauté et qui s’expriment par un certain
nombre de règles sociales impératives. L’examen du contenu de l’ordre public est
révélateur sur cette notion. D’abord on peut se demander quelle est la source de l’ordre
public ? Si on s’en tient à l’article 6, elle serait législative mais il y a aussi un ordre
public d’origine judiciaire. Quel est le contenu de l’ordre public ? Il y a plusieurs ordres
publics : un ordre public politique, familial, social et économique.
- L’ordre public politique : concerne la défense de l’Etat c'est-à-dire il est interdit
de porter atteinte à l’organisation de l’Etat et des services publics. Il comprend
des lois constitutionnelles, administratives et des lois pénales. Ainsi, il est
interdit à l’assuré de prendre une assurance pour garantir les paiements de ses
condamnations pénales.
- L’ordre public social : découle d’un certain nombre de règles applicables au
travailleur en général. Ces règles sont instituées dans leur intérêt. Exemple : les
règles de sécurité dans le travail (obligation du port du casque et des lunettes).
- L’ordre public familial : il comporte un ensemble de règles jugées comme
fondamentales au maintien de la famille. Il vise à protéger le statut familial et le
patrimoine de la famille. Il est interdit de déroger par convention particulière à
tout ce qui relève de la filiation, du mariage, du divorce, et de la puissance
paternelle.
- L’ordre public économique : ensemble de règles impératives édictées pour
éviter ou pour entraîner par le jeu des contrats certains résultats d’ordre
économique. Il peut être vu de manière plus générale et englober l’ordre public
social. Maintenant l’ordre public économique cherche à limiter l’exercice de la
liberté contractuelle pour mieux diriger l’économie.

B/ Les bonnes mœurs


Les bonnes mœurs, c’est l’ensemble des valeurs morales communément
admises quand les juges les acceptent.
De l’analyse de la jurisprudence, on peut dégager des valeurs générales défendues
par les juges :
* Les bonnes mœurs préconisent la moralité en interdisant les gains immoraux. Ex :
En droit pénal on interdit le proxénétisme. En droit civil, la justice interdit le courtage
matrimonial avec pourcentage sur la dot.
23
* Les bonnes mœurs défendent la morale sexuelle : le concubinage était considéré
comme immoral, par conséquent l’on annulait les libéralités entre concubins quand
celles-ci visaient à créer ou à maintenir ou à reprendre les relations concubinaires. (Il
ya eu un revirement jurisprudentiel du juge français sur la question, donc il ne
considère plus le concubinage comme immoral).
§ 2 : Les atteintes postérieures au code civil
Elles proviennent de la législation contemporaine. On peut les classer en 4 axes
principaux :
1) Le droit porte atteinte à la liberté de contracter ou de ne pas contracter.
Ex : l’imposition des contrats d’assurance automobile.
2) Le législateur moderne porte atteinte à l’autonomie de la volonté en
limitant la liberté de choisir son cocontractant. Ex : les consommateurs
sont obligés de contracter avec la CIE et la SODECI pour
l’approvisionnement en eau et en électricité.
3) Le droit porte atteinte à la liberté des parties de déterminer le contenu de
leur contrat. Cette situation se rencontre dans les contrats d’adhésion.
Ex : en matière d’assurance et dans le domaine du travail la loi impose
des stipulations obligatoires pour protéger l’assuré et le travailleur.
4) Concernant la forme du consentement, la loi impose de plus en plus le
respect d’un formalisme pour la validité du contrat. Ex : les contrats de
vente portant sur les immeubles doivent être passés par acte notarié
sous peine de nullité ; il en est de même des contrats de donation (loi
ivoirienne de 1960 sur les donations et les testaments).
5) Le législateur porte atteinte à l’autonomie de la volonté en atteignant le
principe de la force obligatoire des contrats entre les parties. Ex : le
législateur accorde aux débiteurs des délais pour le paiement de leurs
dettes : c’est le délai de grâce. Ainsi le pouvoir est accordé au juge de
permettre à un débiteur de disposer d’un délai supplémentaire pour
exécuter sa prestation (art. 1244, alinéa 2 c. civ.).
En outre, lorsqu’une loi impérative nouvelle entre en vigueur, elle
s’applique immédiatement aux effets futurs des contrats conclus avant
son entrée en vigueur. Par conséquent, elle modifie le contenu des
contrats concernés. C’est le cas en matière de contrats de travail,
d’assurance etc.
24
Par ailleurs, des lois spéciales accordent à certains contractants un droit
de repentir ou de rétractation qui leur permet de revenir sur leur
consentement de manière unilatérale après la conclusion du contrat.
Ex : le Code des assurances (Code CIMA) accorde un droit de repentir
au souscripteur personne physique d’une assurance-vie pendant un
délai de 30 jours.
Un tel droit est accordé de manière générale aux consommateurs par la
loi ivoirienne de 2016 relative à la consommation (articles 6, 11,16)
Conclusion partielle
Dans toutes les hypothèses précédentes, des atteintes sont portées au principe de
l’autonomie de la volonté. L’évolution de la législation dans plusieurs domaines laisse
apparaitre un nombre grandissant de dispositions impératives consacrant la nécessité
d’un formalisme rigoureux pour la validité d’un certain nombre d’actes. Ce qui a fait
dire à certains auteurs qu’il ne reste plus rien du principe de l’autonomie de la volonté.
Les exceptions ne cessant de s’accroître, pour eux il serait plus réaliste de parler du
principe de l’autonomie comme d’une exception dans les cas où la loi est muette. Si
cette conclusion peut s’avérer vrai dans une certaine mesure, elle ne fait qu’exprimer
le fait que le principe de la liberté contractuelle n’est plus un principe absolu, cependant
il demeure encore la règle.

25
 L’ESSENTIEL

La liberté contractuelle qui découle du principe de l’autonomie de la volonté, postule que


tout individu doit, pour être lié, donner son consentement. Autrement dit l’individu peut
décider de donner ou non son accord pour entrer en relation contractuelle. L’autonomie
de la volonté est donc un principe majeur en droit des contrats, c’est une théorie juridique
qui érige la volonté en source créatrice de droits et d’obligations. Cette théorie a un
fondement économique et philosophique.
Ce principe se perçoit tant au niveau de la formation du contrat qu’au niveau des effets.
Au niveau de la formation du contrat, au fond, les parties sont libres de contracter ou non,
de choisir leur contractant, mais bien plus de déterminer le contenu de leur contrat.
L’expression du consentement est libre et est dominé par le principe du consensualisme.
Par ailleurs, au niveau des effets, ce principe suppose que les parties sont définitivement
liées par l’objet de leur accord. Elles doivent donc exécuter le contrat de bonne foi, on fait
allusion ici à la force obligatoire du contrat, confirmée par l’article 1134 du Code Civil. De
même, c’est la liberté contractuelle qui justifie que le contrat n’ait d’effet qu’entre les
parties consentantes : article 1165 du code civil.
Même si ce principe à des origines lointaines, il n’en demeure pas moins qu’il a des
tempéraments. Ces atteintes sont le fait du législateur lui-même, à travers le Code Civil
en son article 6 qui dispose que : « On ne peut déroger par des conventions aux lois qui
intéressent l’ordre public et les bonnes mœurs ». En outre la législation contemporaine
porte atteinte, elle aussi, de plus en plus, au principe de l’autonomie de la volonté, en
restreignant la liberté de choisir son cocontractant, de déterminer le contenu du contrat,
la forme du contrat et parfois même en assouplissant le principe de la force obligatoire
des contrats.

 BIBLIOGRAPHIE
26

- ASSI ESSO Anne Marie, Droit civil les obligations, éditions IUBA,
Abidjan, 2012.
- Bony Serges, Droit civil, droit des obligations, les éditions ABC, 2016
Exercice d’application

Dissertation : Un contrat est-il l’œuvre exclusive de la volonté des parties ?

27
Titre 2 : LA FORMATION DU CONTRAT
Le code civil a prévu un certain nombre de conditions générales pour la validité de
toute convention (chapitre 1). Par conséquent tout accord qui ne remplit pas ces
conditions de formation encourt la nullité (chapitre 2).

Chapitre 1 : LES CONDITIONS DE FORMATION DU CONTRAT


Deux articles du code civil en parlent : les articles 6 et 1108. Ils prévoient 4 conditions :
le consentement de la partie qui s’oblige, la capacité de la partie qui contracte, un objet
certain sur quoi porte la matière de l’engagement, une cause licite dans l’obligation.

Section 1: Le consentement des parties


Le consentement c’est l’accord de volonté des parties au contrat. Réglementé aux
articles 1109 à 1122, le consentement des parties doit s’extérioriser. Mais ces parties
doivent donner leur consentement en toute connaissance de cause et librement d’où
le problème de l’intégrité du consentement.
En principe, la forme du consentement importe peu eu égard au principe du
consensualisme selon lequel le contrat est valablement formé dès que le
consentement a été exprimé.
Toutefois, dans certains cas, la loi exige que le consentement s’exprime selon une
forme particulière sous peine de nullité absolue du contrat. Ces contrats sont les
contrats solennels ou formels. Ex : le contrat de vente d’immeuble nécessite pour sa
validité la forme notariée (voir l’article 8 de la loi n°70-209 du 10 mars 1970 portant
interdiction de tous actes sous-seing privé en matière immobilière).

S/Section 1: L’existence du consentement


Le consentement existe quand les parties l’ont manifesté extérieurement. Les parties
peuvent manifester leur consentement en personne mais elles peuvent recourir à la
technique de la représentation. Cette manifestation extérieure du consentement ne
s’appréhende pas de la même manière pour toutes les parties au contrat. Pour
l’initiateur du contrat, elle s’exprime par l’offre ; pour le destinataire de l’offre, par
l’acceptation. La rencontre de l’offre et de l’acceptation peut poser problème dans les
contrats entre absents. Parfois le contrat sera précédé d’une longue négociation, la
conclusion du contrat sera précédée d’une série d’accords qui se rapproche plus ou
moins du contrat définitif.
28
§1 : La représentation :
Elle peut être définit comme le mécanisme par lequel, une personne appelée
représentée donne le pouvoir à une autre appelée représentant d’agir en son nom et
pour son compte. Le représentant doit donc avoir un pouvoir pour agir ou procuration.
Ce pouvoir a plusieurs sources mais il engendre les mêmes effets.
I- Les sources du pouvoir de représentation
A- Conventionnelle : elle résulte d’un mandat général ou spécial. Dans le premier cas, le
pouvoir est donné au représentant ou mandataire d’accomplir tous les actes juridiques
relatifs à sa mission. Exemple : mandat général donné à un avocat ou huissier par un
client. Dans le second cas, le pouvoir porte sur un acte déterminé.
B- Légale : elle découle de la loi. Ex : les père et mère sont désignés par la loi comme les
représentants légaux de leurs enfants mineurs non émancipés.
C- Judiciaire : ici c’est le juge qui désigne le représentant et lui confert le pouvoir. Ex : en
matière d’absence etc.
II- Les effets de la représentation :

Il faut distinguer selon qu’elle est parfaite ou non.


A- Si la représentation est parfaite :

C’est l’hypothèse dans laquelle le représentant révèle sa qualité de représentant


aux tiers. Dans ce cas, seul le représenté est engagé à l’égard du tiers. Les droits et
obligations résultant du contrat, naissent directement sur la tête du représenté qui est
alors partie au contrat. Le représentant demeure tiers au contrat.
Toutefois, le représentant n’engage le représenté que s’il ne dépasse pas ses
pouvoirs. Dans le cas contraire, l’acte accompli est inopposable au représenté et
produira ses effets sur la tête du représentant.
Néanmoins, si les tiers notamment les cocontractants du représentant ont pu
légitimement croire que le représentant agissait toujours dans le cadre de son mandat,
alors le représenté peut être tenu par application de la théorie de l’apparence.
En outre, le représenté sera tenu s’il ratifie l’acte passé par son représentant qui a
dépassé ses pouvoirs.
B- Si la représentation est imparfaite :

Ici le représentant ne déclare pas agir comme mandataire. Dans cette hypothèse, lui
seul est engagé et partie au contrat. Pour que le représenté soit engagé, il doit lui
transférer les droits.

29
§2 : Les éléments du consentement
I- : L’offre ou pollicitation
A- la notion et les caractères de l’offre
L’offre est la manifestation de volonté par laquelle l’offrant fait connaître son intention
de se tenir pour lier, si l’autre partie accepte sa proposition aux conditions qu’elle
détermine. Une telle offre n’est valable que si elle remplit certains caractères :
1- La précision de l’offre : c’est-à-dire que l’offre doit comporter une description des
éléments essentiels du contrat projeté, de sorte qu’un seul oui du destinataire suffise
à le conclure. Exemple : pour le contrat de vente l’art. 1583 du code civil exige des
précisions sur la chose et sur le prix.
2-La fermeté de l’offre : l’offrant doit manifester une volonté résolue de conclure le
contrat. Cette volonté doit en principe s’exprimer sans réserve. Les réserves sont des
restrictions que l’offrant met à sa volonté de contracter. Ex : l’auteur de la proposition
se réserve la possibilité d’agréer son cocontractant.
Toutefois l’offre n’est pas incompatible avec les réserves. Mais dans ce cas, la validité
de l’offre va dépendre de la nature de la réserve.
Pour certains auteurs, il faut distinguer selon que la réserve est subjective ou objective.
Lorsque la réserve permet à l’offrant de choisir de manière discrétionnaire son
cocontractant, alors elle est une réserve subjective. Dans cette hypothèse, la
proposition ainsi faite ne vaut pas offre mais c’est une simple invitation à entrer en
pourparlers.
Dans la négative, elle est une réserve objective et il y aurait offre véritable. Ex : l’offre
faite “jusqu’à épuisement du stock” demeure une véritable offre.
La réserve subjective peut être expresse ou tacite. Elle est expresse quand par
exemple l’auteur de la proposition se réserve la possibilité d’agréer son cocontractant
par une stipulation expresse.
Elle peut être implicite ou tacite quand elle résulte de la nature même de la convention
proposée. C’est le cas lorsqu’elle présente un caractère intuitu personae, c'est-à-dire
où la considération de la personne est déterminante. La réserve subjective a pour
conséquence de disqualifier la proposition en une simple invitation à entrer en
pourparlers. Exemple : offre de bail d’immeuble, offre d’emploi.

De tout ce qui précède, il faut conclure que l’offre en soi même n’est pas incompatible
avec des réserves. Cependant l’offre assortie de réserve n’est une offre véritable que
30
si l’acceptation pure et simple de l’acceptant suffit à conclure le contrat, autrement dit
même si elle contient une réserve objective. Au contraire quand en plus de
l’acceptation de l’acceptant, l’offrant se réserve le dernier mot (réserve subjective),
alors la proposition ainsi faite n’est pas une offre valable.

B- Manifestation et valeur juridique de l’offre


1- La manifestation de l’offre :
La conclusion du contrat suppose l’accord de volonté des parties. L’acceptant doit être
informé de la volonté de conclure de l’offrant. La manifestation de volonté de l’offrant
pose deux problèmes : - comment l’offre va-t-elle s’extérioriser ?
- à qui l’offre est-elle adressée ?

a- La manière de manifester l’offre :


L’offrant choisit librement le mode d’expression de sa volonté. Elle peut être expresse
ou tacite.
 Expresse quand elle est exprimée expressément soit dans un écrit soit
oralement : menu affiché ou en ligne sur internet ; lettre ; annonce ; catalogue ;
oralement en criant dans un marché
 Tacite : se déduit d’une attitude purement matérielle :
Exemple : art 1738 du code civil : offre tacite de renouvellement du bail par le locataire
qui se maintien dans les lieux loués après l’expiration du bail ; Le fait pour une
personne de lever la main pour héler un taxi s’interprète comme une offre de conclure
un contrat de transport ; l’exposition en vitrine d’un objet avec son prix ; stationnement
des véhicules de transports communaux communément appelés « woro-woro » dans
des emplacements réservés, portières ouvertes etc.

b- Le problème de la destination de l’offre :


L’offre peut être faite au public ou à une personne déterminée. A une personne
déterminée quand l’offrant désigne individuellement le ou les destinataires. Au public
quand elle est adressée à tout le monde. Elle n’est pas adressée à une personne
individuellement. Dans tous ces cas d’offre, l’on considère que la survenance de
l’acceptation réalise la conclusion du contrat.
2- La valeur juridique de l’offre
31
Le problème est de savoir quel est le sort de l’offre entre le moment où elle est émise
par l’offrant et celui où elle est refusée ou acceptée par l’acceptant. L’offrant est-il en
droit de retirer l’offre à tout moment ? Par ailleurs des évènements ultérieurs peuvent-
ils rendre l’offre inopérante ?

a- la révocation de l’offre
*La position de la doctrine : elle admet traditionnellement que l’offre est librement
révocable par son auteur même si celui-ci l’a assorti d’un délai. L’on se fonde pour
cela sur l’idée qu’une manifestation unilatérale de volonté ne peut engager son auteur.
Mais une telle position présente un inconvénient : elle expose l’acceptant à l’insécurité
surtout lorsqu’il a engagé des frais pour étudier la proposition.

* La position de la jurisprudence
En raison de ces inconvénients, la jurisprudence a opté pour le maintien de l’offre
pendant un certain temps, que l’offrant ait prévu un délai ou non (social 22 Mars 1972,
Dalloz 1972, p468). Si l’offrant prévoit un délai, il doit maintenir l’offre pendant ce délai ;
mais ce délai passé, l’éventuel acceptant ne peut plus rien exiger. Si l’offrant ne prévoit
aucun délai la jurisprudence admet que l’offre doit –être quand même maintenue
pendant un délai raisonnable : délai moral. Il varie selon les circonstances et est
librement apprécié par le juge. L’obligation de maintenir l’offre pendant un délai existe,
que l’offre ait été faite au public ou à une personne dénommée (civil 3 e ch. 28 Nov.
1968, Bulletin civil 1968, 3e Partie N°507 p389)
b- La caducité de l’offre :
Sans révocation par son auteur, une offre peut-elle devenir inopérante ?
 Il est admis que l’écoulement d’un certain temps peut faire tomber l’offre.
C’est le cas quand l’offre est assortie d’un délai qui s’est entièrement écoulé
(civil 1ere ch. 5Fev. 1962 au bulletin civil 1962 1ere partie N°80).
 Quand l’offre n’est pas assortie de délai, elle demeure indéfiniment tant
qu’elle n’est pas acceptée et toute acceptation ultérieure conclut le contrat
 Il est admis aussi que le décès de l’offrant ou son incapacité survenue
ultérieurement rend l’offre caduque. Le fondement de cette solution réside
dans le fait qu’en cas de décès l’offrant ne peut plus manifester sa volonté
et en cas d’incapacité il ne peut manifester une volonté valable. (civil 3e ch.
10 Mai 1990 au Dalloz Sirey 1990 p365).
32
II- : l’acceptation
A- la notion d’acceptation :
C’est l’acte de volonté par lequel le destinataire de l’offre accepte la proposition de
l’offrant et conclu le contrat aux conditions prévues par ce dernier. Ce consentement
n’est juridiquement valable que s’il consiste à un agrément pur et simple de l’offre. Il
faut donc que l’acceptation soit identique à l’offre. Si l’acceptation n’est pas strictement
conforme à l’offre, il n’y a pas acceptation. C’est le cas quand l’acceptant émet des
réserves sur les conditions de l’offre initiale. La jurisprudence considère une telle
acceptation comme une contreproposition assimilable à une nouvelle offre. Cette
nouvelle offre transforme l’offrant initial en acceptant et l’acceptant initial en offrant.
Cependant il n’y a de véritable contre-proposition qu’en cas de défaut réel d’agrément
de l’offre. C’est le cas quand la contre-proposition concerne un élément essentiel du
contrat tel que le prix ou la chose vendue. Si le désaccord ne porte pas sur un élément
important du contrat, alors il y a acceptation valable concluant le contrat. Ainsi la
jurisprudence a admis que si l’acceptant se contente d’apporter une précision sur l’état
de l’immeuble qui lui ai proposé, il ne fait pas de contre -proposition : Il y a acceptation
valable. (Civil 1ère chambre, 27 Mai 1961, bulletin civil 1961, 1ere partie, N°271). Dans
tous les cas l’acceptation ne vaut acceptation que si elle porte sur les conditions
définitives du contrat.

B- La manifestation de l’acceptation
L’acceptation doit être extériorisée pour la conclusion du contrat. Cette manifestation
peut être expresse ou tacite. Dans le premier cas c’est quand elle est écrite ou verbale.
Exemple : acceptation donnée dans un acte sous seing privé ou authentique par
signature, par mail, télégramme, par téléphone etc.
Dans le deuxième cas, elle se déduit d’un comportement ou de gestes accomplis.
Ainsi le fait pour une personne d’ouvrir la portière d’un taxi, arrêté à une tête de
stationnement et de s’y installer vaut acceptation de l’offre de conclure un contrat de
transport faite par le chauffeur ; le fait pour un client d’un super marché de remplir son
chariot de produits et autres articles etc.
Une autre question se pose :
En dehors de l’acceptation expresse ou tacite peut-il exister un autre mode
d’acceptation ? En d’autres termes le silence peut-il valoir acceptation ?
33
La question reçoit une réponse négative mais connaît des exceptions.
1- Le principe :
Le silence ne vaut pas acceptation. Il y a silence quand le destinataire de l’offre ne dit
rien ni par écrit ni verbalement et adopte une attitude passive de laquelle on ne peut
déduire aucune réponse tacite. La jurisprudence considère dans ce cas suivant qu’il
n’ya pas d’acceptation. Un banquier avait écrit à son client pour l’avertir que sauf ordre
contraire il le portait sur la liste des souscripteurs d’actions émises par une société.
(Civil 27 Mai 1870, au Sirez 1870, 1ère partie p. 341).
La même solution a été adoptée dans une autre espèce. Un journal avait offert pendant
un certain temps un service gratuit à une personne, puis l’a fait prévenir qu’à la fin de
la période, il la considérera comme abonnée si elle ne manifeste pas un désir
contraire. Le juge a eu à considérer que la personne concernée n’était pas liée
contractuellement (tribunal civil de la Seine, 19 Avril 1893, à la Gazette du palais 1893,
2ème partie, p162).
 fondement du principe
Il repose sur la liberté contractuelle. L’individu ne peut être lié s’il n’ya pas consenti.
Ce consentement doit être clairement manifesté. Or le silence est équivoque et ne peut
donc valoir consentement.
2- Les exceptions au principe
Dans certaines circonstances exceptionnelles, le silence peut valoir acceptation : on
parle de silence circonstancié.
a) les parties peuvent convenir que dans leurs rapports le silence vaudra
acceptation (civil 1ère ch., 12janvier 1988, 4è partie, p108, à la Revue
Trimestrielle de Droit Civil, 1988, p521.)
b) les exceptions légales :
 “Le bailleur qui ne donne pas congés au locataire resté dans les lieux loués
à l’expiration du bail, est considéré comme ayant accepté l’offre tacite de
reconduction du bail faite par le locataire“ : article 1738 du code civil
 Il y a l’article 6 du code CIMA : “l’assureur qui pendant un délai de 15 jours
garde le silence sur la proposition de l’assuré de renouveler ou de prolonger
le contrat d’assurance, ou de remettre en vigueur un contrat suspendu est
sensé avoir accepté cette offre“.
c) Les exceptions jurisprudentielles
Dans trois hypothèses la jurisprudence donne une valeur positive au silence :
34
 Le silence vaut acceptation quand les usages professionnels le requièrent.
Ici ce sont les habitudes générales propres à une activité professionnelle qui
donnent valeur au silence (commercial 9 Janvier 1956, bulletin civil 1956,
3ème partie, n°17).
 Le silence vaut aussi acceptation quand il y a des relations d’affaires
antérieures entre les parties. Dans cette hypothèse ce sont les habitudes
propres aux parties qui justifient le sens donné au silence. C’est le cas quand
une offre qui est faite périodiquement a été jusque -là acceptée. Il doit s’agir
du même type de contrat c'est-à-dire de la même quantité et qualité de
marchandises, du même prix (ex : 13 Août 1870, au Dalloz 1877 5ème partie,
p456). La cour de cassation reconnaît au juge du fond une liberté
d’appréciation des circonstances.
 Quand l’offre est faite dans l’intérêt exclusif du destinataire. Le fondement
est que le destinataire n’a aucune raison de refuser l’offre.
Ex : un créancier avait fait à son débiteur une remise partielle de dettes. Mais
celui-ci garda le silence et le créancier a par la suite voulu se rétracter. Le juge
a considéré que l’offre de remise partielle était acceptée (chambre des
requêtes, 29 mars 1938, au Dalloz 1939, 1ère partie, P5). Ex : convention
d’assistance dans laquelle l’assisté (blessé) est supposé accepter l’offre
d’assistance de l’assistant (celui qui lui porte secours) par son silence.

L’acceptation pour former le contrat doit respecter certaines conditions :


 L’acceptation doit être intervenue pendant que l’offre subsiste. Si elle
intervient après révocation ou caducité de l’offre, il n’y a pas contrat.
 La formation du contrat suppose aussi que l’acceptant doit prendre en
compte toutes les conditions de l’offrant. Les parties doivent avoir eu en vue
le même contrat, les mêmes objets et les mêmes clauses. Deux cas peuvent
se présenter :
-Si l’offre est complète c'est-à-dire couvre les éléments essentiels et même
les éléments accessoires (modalités de paiement, garantie de paiement
etc.), il n’y a formation du contrat que si l’acceptation couvre toutes ces
conditions. Une acceptation limitée aux seuls éléments essentiels ne peut

35
former le contrat dans cette hypothèse (civil 1ere ch. 19 Février 1958 au
bulletin civil 1ere partie, N° 108).
-Si l’offre est limitée aux seuls éléments essentiels alors l’acceptation est
elle-même limitée à ces éléments et réalise la conclusion du contrat. Pour le
reste les parties sont condamnées à s’entendre.

§3: La négociation contractuelle et les avant- contrats


La conclusion du contrat peut être précédée d’une longue période de négociation,
pendant laquelle peut intervenir la conclusion d’accords préparatoires. Par ailleurs, il
peut se produire différents accords de volonté qui portent sur des aspects du contrat
final qui sont appelés avant- contrats, parce qu’ils préparent le contrat final.
I- La négociation contractuelle
Le contrat ne se forme pas toujours en un trait de temps. En effet il arrive qu’en raison
de l’importance des intérêts en jeu, la conclusion du contrat soit précédée d’une longue
période de négociations. Dans cette période les parties échangent, discutent, font des
propositions afin de déterminer les termes du contrat qui sera conclu, toutefois rien ne
garanti que le contrat sera effectivement conclu.
La jurisprudence a apporté un minimum de réglementation à cette période pré-
contractuelle. Ainsi cette période est régie par deux principes auxquels la
jurisprudence apporte une limite :
A- Les principes de liberté et de bonne foi :
Chacun est libre dans les pourparlers de comparer diverses propositions, de mener
des pourparlers parallèles, de choisir la proposition qui lui semble la plus avantageuse
et par conséquent de mettre fin aux pourparlers. Cette liberté n’exclut pas que les
parties doivent négocier loyalement.
B- La limite :
En principe si les parties aux négociations sont libres d’interrompre les pourparlers,
elles engagent chacune leur responsabilité délictuelle si la rupture est abusive. Dans
cette hypothèse l’auteur de la rupture peut être animé par l’intention de nuire à son
partenaire, ou être de mauvaise foi. La faute peut consister aussi à, prendre l’initiative
de la négociation sans intention sérieuse de contracter, dans l’intention de créer un
préjudice à l’autre, ou à rompre sans raison légitime, brutalement et unilatéralement
des pourparlers avancés.

36
La jurisprudence exige une faute patente, indiscutable. La réparation à laquelle peut
prétendre la victime ne peut pas être une réparation en nature (conclusion forcée du
contrat projeté), mais l’allocation de dommages et intérêts qui compensent les pertes
subies ou la perte de chance de conclure le contrat projeté.

Par ailleurs afin de faciliter les négociations, les parties peuvent conclure des accords :
accord préparatoire, contrat temporaire, contrat de négociation etc. qui ont pour but
d’en organiser le déroulement. Ces différents accords font naître des obligations
contractuelles à la charge des parties : obligation de nouer la négociation (c’est une
obligation de résultat) et obligation de la mener de bonne foi (c’est une obligation de
moyen). La méconnaissance de ces obligations ne peut conduire qu’à l’octroie de
dommages et intérêts. Ces contrats préparatoires peuvent contenir certaines clauses
particulières telles que : la clause d’exclusivité de la négociation, la clause de
confidentialité etc.
En pratique le seuil qui sépare les pourparlers de la conclusion du contrat n’est pas
toujours aussi net et évident, surtout en cas d’existence d’un accord de principe.
L’accord de principe dresse un bilan des points sur lesquels les parties sont déjà
d’accord. Dans ces conditions à quel moment pourrait –on considérer que le contrat a
été conclu ?
Selon la jurisprudence le contrat est réputé formé dès qu’il y a accord sur les éléments
essentiels du contrat, à moins que les parties n’aient voulues subordonner la
conclusion de leur contrat, à un accord préalable sur tel ou tel élément accessoire. Cet
élément accessoire devient essentiel par la seule volonté des parties.

II- Les avant- contrats


La conclusion du contrat peut être précédée de celle d’avant- contrats qui sont de
véritables contrats, qui se rapprochent plus du contrat définitif : le pacte de préférence,
la promesse unilatérale de contracter, la promesse synallagmatique de contracter.
A- La promesse unilatérale de contracter
C’est la convention par laquelle un individu, le promettant, s’engage envers un autre
qui l’accepte, le bénéficiaire, à conclure un contrat dont les conditions sont dès à
présent déterminées si celui-ci le lui demande dans un délai prévu. Contrairement au
promettant qui s’engage à conclure le contrat, le bénéficiaire lui ne s’engage pas à le
conclure mais prend acte de l’engagement du promettant. Il dispose d’une période
37
d’option pour accepter ou refuser de conclure le contrat. Ex : la promesse unilatérale
de vente en matière immobilière.
1) La nature juridique de la promesse unilatérale de contracter
Il faut la distinguer de l’offre et du contrat définitif.
a) Distinction de la promesse unilatérale et de l’offre
Alors que l’offre est une manifestation unilatérale de volonté, la promesse est une
convention, parfaite, supposant un accord de volontés. La situation du bénéficiaire de
la promesse est plus solide que celle du destinataire de l’offre sur deux points :
- L’offre est en principe révocable, or la promesse crée une véritable obligation à la
charge du promettant qui est obligé de respecter sa promesse.
- le décès ou l’incapacité du pollicitant entraine la caducité de l’offre, contrairement à
la promesse qui demeure valable. Ainsi les héritiers ou le représentant du promettant
doivent exécuter la promesse qu’il a contracté au cas où le bénéficiaire déciderait de
lever l’option.
b) distinction de la promesse unilatérale et du contrat définitif
La promesse unilatérale se distingue du contrat définitif. En effet la promesse
unilatérale est un contrat unilatéral, une seule partie est soumise à obligation : le
promettant (dans le cas de la promesse unilatérale consentie à titre gratuit). Ce dernier
doit immobiliser le bien jusqu’à la levée de l’option par le bénéficiaire. Le promettant
donne un consentement actuel et irrévocable à un contrat dont la formation dépend de
la seule volonté du bénéficiaire.
2) Le régime juridique de la promesse unilatérale
a) Les conditions de validité de la promesse unilatérale
- Les conditions de fond :
C’est au moment de la promesse que s’analyse la capacité et le consentement du
promettant, alors que ceux du bénéficiaire s’apprécient au moment de la levée de
l’option, à moins qu’une indemnité d’immobilisation n’ait été stipulée dans la
promesse (promesse à titre onéreux). Quant aux conditions tenant à la cause et à
l’objet, elles s’apprécient au moment de la levée de l’option. De plus, il faut que le
contenu du contrat projeté soit défini dans la promesse avec une précision
suffisante.
- Les conditions de forme :

38
Le principe en la matière c’est le consensualisme. Toutefois il est admis que la
promesse de conclure un contrat solennel, doit obéir aux mêmes formes que celui-
ci. Ex : la promesse de vente d’un immeuble doit revêtir la forme notariée.
b) Les effets de la promesse unilatérale
- Avant la levée de l’option :
Le bénéficiaire est titulaire d’un droit personnel, d’un droit de créance, qui lui donne
le pouvoir de conclure le contrat définitif. Cette obligation est transmissible entre
vifs et à cause de mort, à moins qu’elle n’ait été accordée intuitu personae.
Si le promettant vend le bien à une autre personne, il engage sa responsabilité
contractuelle. Le tiers acquéreur qui a acquis le bien en connaissance de la
promesse, est de mauvaise foi et les juges peuvent décider que son acte est
inopposable au bénéficiaire à qui on pourra attribuer le bien s’il lève l’option.
Toutefois le droit du bénéficiaire n’existe que pendant la période d’option, passé le
délai, la promesse devient caduque. A défaut d’un tel délai la promesse devient
caduque au bout de 30 ans.
- Après la levée de l’option :
Le contrat est définitivement formé. Lorsque la promesse a pour objet la vente d’un
bien, alors le bénéficiaire devient désormais titulaire d’un droit réel. Le contrat
définitif ne prend effet qu’à la levée de l’option.

B- La promesse synallagmatique de contracter


Il ya promesse synallagmatique de contracter lorsque deux personnes s’engagent
l’une envers l’autre à passer plus tard tel ou tel contrat. Elles donnent leur
consentement au contrat définitif, c’est- à – dire s’entendent sur les éléments
essentiels du contrat, mais elles prévoient qu’une formalité supplémentaire doit être
accomplie dans l’avenir (acte notarié etc.). A la différence de la promesse
unilatérale, les deux parties ont consenti au contrat définitif.
Lorsqu’il s’agit de la promesse synallagmatique d’un contrat consensuel il est
difficile de distinguer cet avant- contrat du contrat définitif, puisque l’accord des
volontés sur les éléments essentiels suffit à former le contrat, et la réitération du
consentement n’apparait que comme une simple modalité d’exécution du contrat.
D’ailleurs l’article 1589 du code civil, semble assimiler les deux moments en
disposant que : « la promesse de vente vaut vente, lorsqu’il ya consentement

39
réciproque des deux parties sur la chose et sur le prix ». La jurisprudence étend
cette solution à d’autres contrats.
Lorsqu’il s’agit d’un contrat dont la conclusion nécessite outre l’accord des
volontés, l’accomplissement d’une certaine formalité, alors la distinction entre la
promesse synallagmatique et le contrat définitif devient plus réelle. Ainsi l’accord
des volontés ne donne pas naissance au contrat définitif, mais à une obligation de
faire : accomplir les formalités requises. L’accomplissement de celles-ci forme le
contrat définitif.
Lorsque le contrat définitif est un contrat réel, la promesse de contrat réel est plus
distincte. En effet dans cette hypothèse, la promesse de contrat réel est
consensuelle et le contrat définitif ne se forme que par la remise de la chose. Cette
promesse est valable et donne naissance à une obligation de faire, qui se résoudra
en dommages- intérêts en cas d’inexécution.
Le plus souvent la formule du « compromis » est utilisée par les parties qui
subordonnent ainsi la conclusion du contrat définitif à la réalisation d’un
évènement : obtention d’un financement, d’une autorisation administrative, d’un
permis de construire etc. Dans cette hypothèse, la promesse synallagmatique de
vente s’analyse en une vente sous condition suspensive. Juridiquement la vente
est déjà formée, mais elle ne produira ses effets que si la condition se réalise. Dans
ce cas elle sera réputée conclue au jour de la promesse. Si la condition ne se
réalise pas, le contrat sera rétroactivement anéanti.

C- Le pacte de préférence
C’est le contrat par lequel une personne s’engage envers une autre, qui accepte,
à ne pas conclure avec des tiers un contrat déterminé avant de lui en avoir proposé
la conclusion aux mêmes conditions.
Ex : un associé promet à un autre de ses associés de lui proposer en priorité la
vente de ses parts sociales, au cas où il se déciderait à les vendre.
Le pacte de préférence apparait ainsi moins contraignant que les promesses
unilatérale et synallagmatique. Ainsi le promettant ne s’engage qu’à proposer la
conclusion du contrat prévu au bénéficiaire, au cas où il se déciderait à conclure.
Le bénéficiaire ne jouit que d’un droit de priorité ou droit de préemption d’origine
conventionnelle. Tant que le promettant n’a pas décidé de vendre, la droit de
préférence du bénéficiaire est maintenu.
40
Pour que le pacte de préférence soit valide, il suffit que soit précisé l’objet du contrat
éventuel, et que cet objet soit licite.
Si le promettant conclut le contrat projeté avec un tiers sans l’avoir proposé au
préalable au bénéficiaire, il engage sa responsabilité contractuelle et doit verser
des dommages et intérêts au bénéficiaire. Les juges annulent souvent le contrat
conclu avec le tiers, s’il est établi que ce tiers connaissait l’existence du pacte ainsi
que l’intention du bénéficiaire d’exercer le droit de préférence dont il est titulaire.
Mais on ne peut contraindre le promettant à conclure le contrat avec le bénéficiaire.

.
§4 : Le problème de la rencontre des volontés dans les contrats conclus entre
absents
La plupart du temps, les contrats sont conclus entre personnes présentes. Mais il peut
arriver que les parties au contrat ne soient pas en face l’une de l’autre. On parle alors
de contrat entre absents. Ils posent deux problèmes juridiques :
a) En quel lieu et à quel moment ce contrat s’est –il formé ? C’est l’hypothèse des
contrats par correspondance.
b) Quand les contrats sont conclus par téléphone se pose le problème du lieu de
formation du contrat.

A- Les intérêts liés à la localisation des contrats :


Il faut distinguer selon qu’il s’agit de déterminer la date ou le lieu du contrat.

1- Les intérêts liés à la détermination de la date de formation du contrat.


Si l’acceptant manifeste son acceptation par une lettre à quel moment le contrat est-il
conclu ? Au moment du départ de la lettre de chez l’acceptant ou l’arrivée de celle-ci
chez l’offrant ?
- Si l’on considère que c’est au départ de la lettre que le contrat se forme. Dès le
départ, le contrat s’est formé, l’offrant ne peut plus révoquer son offre et
l’acceptant ne peut plus se rétracter. La mort ou l’incapacité ultérieure de
l’offrant ne rend pas l’offre caduque.

41
- Dans les contrats qui opèrent transfert de propriété les risques de pertes par
cas fortuit de la chose vendue sont à la charge de l’acheteur puisque le contrat
est considéré comme formé.

- La perte en cours d’acheminement de la lettre d’acceptation n’empêche pas la


formation du contrat.
Si l’on considère que c’est à l’arrivée de cette lettre d’acceptation que le contrat
se forme, ce sont les solutions inverses des précédentes qu’il faut retenir.
2- Les intérêts attachés à la détermination du lieu de formation du contrat
Le problème se pose comme précédemment. Les solutions varient selon que l’on
prend en compte le lieu de départ ou d’arrivée de la lettre d’acceptation.
L’ un des intérêt de la détermination en droit ivoirien du lieu de formation du contrat se
situe en droit international privé. Parce que les conditions de forme des contrats sont
régies par la loi de son lieu de formation. Parce que dans certaines hypothèses, on
soumet même les conditions de fond du contrat à la loi de leur lieu de formation.

B- Les systèmes de localisation des contrats entre absents


Par quel moyen peut-on localiser les contrats en passant dans le temps et l’espace ?
Les réponses sont doctrinales et jurisprudentielles

1- Les systèmes doctrinaux


La doctrine classique a considéré que les deux problèmes de localisation dans le
temps et dans l’espace sont liés. Elle propose des systèmes qui bien que
contradictoires s’accordent sur cette nécessité initiale. Fondamentalement deux
systèmes sont proposés :
-Le système de l’émission
- Le système de la réception
a) Le système de l’émission ou de l’expédition :
Il y a en fait dans ce système deux éléments. Dans les deux cas l’idée qu’il faut retenir
est qu’il suffit que les volontés des deux parties au contrat aient coexistées dans le
temps et dans l’espace pour que le contrat soit formé. Il a deux variantes :
*Le système de la déclaration :

42
C’est une variante du système de l’émission. Ici le contrat est considéré comme formé
du jour où le destinataire de l’offre prend dans son fort intérieur la décision d’accepter.
Mais comme l’existence d’une telle volonté ne peut être vérifiée, l’on admet que celle-
ci doit être extériorisée. C’est ce qui se passe quand l’acceptation est déclarée dans
une lettre. D’où le nom du système : système de la déclaration. Ce système présente
de gros inconvénients. En effet une telle acceptation est trop précaire car non
seulement on ne peut prouver quand la lettre a été écrite mais surtout l’acceptant peut
lui-même détruire sa lettre sans que l’on puisse l’en empêcher.
*Le système de l’émission :
Ici, le contrat n’est conclu que quand l’acceptant se dessaisit de sa lettre d’acceptation.
C’est le cas en pratique lorsqu’il l’expédie à la poste. Le cachet postal faisant foi de la
date et du lieu de l’acceptation.
b) Le système de la réception :
Ici encore, il y a en fait deux éléments :
* le système de la réception proprement dit
* le système de l’information
Dans ces deux systèmes, il n’est pas suffisant que les volontés des parties coexistent
dans l’espace. Il faut que celles-ci se soient effectivement rencontrées. C'est-à-dire
que chacune des parties doit avoir une connaissance du consentement de l’autre.
*Le système de l’information :
Ici le contrat n’est formé que si l’offrant a eu connaissance de l’acceptation.
L’inconvénient ici est que tant que l’offrant n’ouvre pas son courrier le contrat n’est pas
formé. Or l’offrant peut retarder la formation du contrat en ouvrant le courrier le plus
tard possible, il peut même empêcher sa formation en n’ouvrant jamais le courrier.
* Le système de la réception proprement dite
Pour surmonter cet inconvénient l’on adopte la théorie de la réception. Pour que le
contrat soit formé il n’est pas nécessaire que l’offrant ait eu connaissance effective de
l’acceptation. Il suffit que l’offrant ait reçu la lettre d’acceptation.
2- La position de la jurisprudence
L’analyse de la jurisprudence révèle que les solutions des juges sont diverses et non
homogènes. Cependant, la chambre des requêtes de la Cour de Cassation a
considéré que les problèmes de la date et du lieu de formation des contrats entre
absents relevaient d’une question de droit qu’il fallait régler sur le fondement de la
théorie de l’émission (requête 21 Mars 1932 au Dalloz 1933, 1ere partie p65)
43
Depuis des arrêts ultérieurs prennent position pour soit la théorie de l’émission ou soit
celle de la réception. De plus la doctrine donne de ces arrêts une interprétation non
homogène et diverse.
Toutefois, en pratique et par souci d’uniformisation, on a voulu voir dans un arrêt de la
ch. Commerciale de la Cour de Cassation, la solution de principe au double problème
du lieu et du moment de formation des contrats entre absents.
Dans l’espèce qui date du 7 Janvier 1981, un litige sur l’existence du contrat opposait
la société l’aigle distributrice de carburant à la société Comez son fournisseur. Pour
condamner la première à payer à la deuxième des dommages et intérêts sur une base
contractuelle, la Cour de Cassation avait soutenu que : « faute de stipulation contraire,
l’acte du 6 Juin 1975 était destiné à devenir parfait non pas par la réception, par la
société l’aigle de l’acceptation de la société Comez mais par l’émission par celle-ci de
cette acceptation, que le moyen qui soutient le contraire est dépourvue de
fondement ».
On en déduit que le problème de la date et du moment de formation des contrats entre
absents est réglé par la théorie de l’émission.
(Commercial 7 Janv. 1981 au Bulletin civil 1981, 4e partie, p14, La Revue Trimestrielle
de Droit Civil, 3e partie, N°290). Cette solution n’a pas été consacrée par l’ordonnance
française de 2016 qui reforme le droit des obligations en France. Elle a plutôt retenue
la théorie de la réception : article 1121 de l’ordonnance de 2016.
NB : en matière de vente commerciale l’Acte Uniforme relatif au droit commercial
général, a opté pour la théorie de la réception. C’est la même solution qui est retenue
par la loi ivoirienne de 2013 sur les transactions électroniques concernant les contrats
conclus par voie électronique.

 L’ESSENTIEL

L’article 1108 Du Code civil évoque en premier le consentement comme l’un des
quatre éléments pour la validité de toute convention. Autant dire que l’importance
indubitable que renferme cette notion. Le consentement est l’accord de volonté des
parties au contrat. Il doit s’extérioriser.
En effet, les parties peuvent manifester leur consentement ayant recours à plusieurs
44
techniques telles que la représentation par exemple. La représentation est un
mécanisme par lequel une personne appelée représentée donne le pouvoir à une
autre appelée représentant d’agir en son nom et pour son compte. Elle peut être
Parfois également, certains accords peuvent intervenir en vue de préparer le contrat
final, on parle d’avant-contrat. Ce sont de véritables contrats mais qui préparent la
conclusion du contrat final, c’est le cas de du pacte de préférence, la promesse
unilatérale ou synallagmatique de contracter.
En sus de cela, un problème est celui de la rencontre de volontés entre absents. Il
s’agit de savoir le lieu et le moment de la formation du contrat. Pour résoudre la
question, deux théories ont été admises : la théorie de l’émission et la théorie de la
45
réception.
 EXERCICES D’APPLICATION

Contrôle de connaissance

1) Quels sont les grands principes qui gouvernent les pourparlers contractuels ?

46
2) Une partie peut-elle voir sa responsabilité civile engagée du fait de la rupture
des pourparlers ? justifiez votre réponse.
3) La promesse unilatérale de vente vaut vente : vrai ou faux, justifiez votre
réponse.
4) Distinguez l’offre de la promesse unilatérale de contracter.
5) L’offre est-elle compatible avec des réserves ?
6) L’offre et l’acceptation engagent-t-elles les héritiers du pollicitant ou de
l’acceptant ?
7) Dans quelles hypothèses le silence peut-il valoir acceptation ?
8) A quel moment est formé le contrat électronique ?

S /Section 2 : L’intégrité du consentement


Exiger que le consentement donné soit intègre c’est exiger qu’il soit éclairé et libre. Le
consentement est éclairé quand son auteur le donne en toute connaissance de cause.
Libre quand son auteur le donne sans pression. L’analyse classique limitait la

47
protection du consentement uniquement aux vices du consentement qui apparaissent
comme des moyens curatifs ou répressifs. Plusieurs s’accordent à montrer les limites
de ces mécanismes, et soutiennent qu’il serait préférable de développer une politique
d’information des parties.
Ainsi la tendance actuelle est de doubler la théorie des vices du consentement, par
des mesures préventives qui ont pour but de favoriser l’information et la réflexion des
contractants. Alors que la plupart du temps les législateurs se sont contenté d’imposer
des obligations spéciales d’information dans les rapports entre professionnels et
consommateurs( article 3 de la loi 91- 1000 du 27 décembre 1991 portant interdiction
et répression de la publicité mensongère ou trompeuse en côte d’ivoire ; décret n° 92-
50 du 29 janvier 1992 portant réglementation de la concurrence et des prix en côte
d’ivoire ; article 6 du code CIMA etc.), la jurisprudence française se fondant sur le
principe de bonne foi, a crée une obligation générale d’information.
Cette obligation précontractuelle d’information a été consacrée par la loi ivoirienne de
2016 relative à la consommation. En effet l’article 3 de ladite loi impose au
professionnel vendeur ou fournisseur de services, de communiquer au consommateur
de manière lisible et compréhensible, avant la conclusion du contrat, les informations
portant notamment sur : le prix du bien ou du service ; les principales caractéristiques
du bien ou du service, quel que soit le support de communication utilisé etc. L’
l’obligation précontractuelle d’information vise à mettre à la disposition du
consommateur, toutes les informations utiles et nécessaires pour éclairer son
consentement. Son inobservation peut être sanctionnée par la nullité du contrat en
invoquant une réticence dolosive ou par l’octroi de dommages et intérêts au
consommateur ayant subi un préjudice par application de la responsabilité délictuelle
(article 1382 du code civil).
En dehors de l’obligation d’information, la loi sur la consommation accorde un droit de
repentir ou de rétractation au consommateur pour les contrats de vente à distance et
hors établissement (article 10 à 12), les démarchages et vente à domicile ou dans les
lieux de travail (article 13 à 16). Le consommateur dispose en principe d’un délai de
10 jours à partir de la livraison de sa commande, pour faire retour du produit au
vendeur pour échange ou remboursement. Ce délai peut être prorogé dans certaines
hypothèses (article 12, alinéa 2).
Quant aux vices du consentement on en distingue 3 : l’erreur, le dol, la violence.

48
§1 : L’erreur
Le code civil ne définit pas l’erreur. C’est la doctrine qui la définie comme une méprise
de l’un des contractants sur les conditions de son engagement. C’est donc une fausse
appréciation de la réalité qui consiste à croire vrai ce qui est faux et inversement.

I- Les cas particuliers d’erreurs


Ces cas n’ont pas tous le même régime juridique.
A- Les erreurs obstacles
C’est une notion essentiellement doctrinale. Dans ce genre d’erreur l’un des
contractants se trompe fondamentalement sur un aspect fondamental du contrat à tel
point que la convention ne peut même pas se former. C’est la gravité de l’erreur qui
rend la formation du contrat inconcevable. C’est ce qui explique le nom d’erreur
obstacle. On en distingue essentiellement deux sortes :

1- L’erreur sur la nature du contrat :


Ici il y a erreur parce que les deux parties se sont trompées sur la nature du contrat
qu’elles ont signé. Exemple : Si l’une des parties souhaite devenir propriétaire d’une
maison et se met en relation avec une autre partie qui elle ne veut que louer la maison,
il y a méprise des deux parties, car il y a une erreur obstacle sur la nature du contrat.
L’une des parties songeait à une vente et l’autre à une location.

2-l’erreur sur l’objet du contrat


 Ce peut être une erreur sur l’identité de la chose objet du contrat. Ici les parties
s’entendent sur la nature du contrat mais se trompent gravement sur l’objet du
contrat. Si x veut acheter un château tandis que y lui vend un appartement dans
une tour, il n’y a pas de contrat de vente car il y a une erreur obstacle sur
l’identité de la chose, objet du contrat (Paris 8 juillet 1966, à la gazette du palais
1967, 1ère partie p33, la Revue Trimestrielle de Droit Civil 1967, p382).
 Ce peut être une erreur sur le prix. Les parties se sont entendues sur le prix,
mais l’une a entendu 5000 FCFA et l’autre 5000 euro. Ou bien ce peut être à
cause d’une erreur typographique : l’acheteur croyait acheter l’article à 1 200
FCFA prix qui était affiché à cause d’une erreur, alors qu’en réalité il était vendu
à 12 000 FCFA.

49
Quand à la sanction d’une telle erreur la jurisprudence classique y voyait une cause
de nullité relative, se fondant sur l’existence d’une erreur sur la substance. La majorité
de la jurisprudence et la doctrine contemporaine y voient une cause de nullité
absolue.

B/ Les erreurs indifférentes


Ce sont celles qui bien que commises n’entraînent pas la nullité du contrat. C’est une
catégorie résiduelle c'est-à-dire dans laquelle on trouve des erreurs qui ne sont ni des
erreurs obstacles ni des erreurs vices du consentement :

1- article 1110 du code civil : l’erreur sur la personne dans les contrats où l’intuitu
personae n’est pas pris en compte.
2- L’erreur sur la qualité non substantielle de la chose. : Une telle erreur n’annule
pas le contrat. C’est le cas de l’erreur sur la substance matérielle de la chose, objet du
contrat quand celle-ci n’a pas été déterminante.
3- L’erreur sur la valeur des prestations : c’est une erreur sur la valeur économique
réelle du bien ou du service
Ex : Le propriétaire d’une œuvre d’art sculptée valant réellement huit millions la vend
seulement à six ou sept millions parce qu’il l’a mal estimé. Une telle erreur qui est sur
la prestation, n’entraîne pas la nullité du contrat car la lésion n’est pas une cause
systématique d’annulation des contrats.
Cependant seule l’erreur directe sur la valeur des prestations est indifférente. Il y a
erreur directe sur la valeur, quand l’appréciation de la victime de l’erreur est effectuée
à partir des données économiques exactes.
Au contraire, en cas d’erreur indirecte sur la valeur, il y a nullité du contrat. Il y a erreur
indirecte sur la valeur, quand l’erreur sur la valeur est la conséquence d’une erreur
initiale sur la qualité substantielle de la chose.
Ex : Le propriétaire d’un terrain à bâtir valant huit millions le vend à quatre millions
seulement parce qu’il croyait le terrain inconstructible, compte tenu des règlements
d’urbanisme. Or au moment de la vente, ces règlements avaient changés et le terrain
était redevenu constructible. La vente est annulable pour erreur indirecte sur la valeur.
Dans une telle hypothèse, l’appréciation erronée de la valeur est la conséquence d’une
erreur initiale sur une qualité substantielle de la chose(le caractère constructible du

50
terrain). Donc il y a erreur indirecte sur la valeur, dans un tel cas, le contrat est
annulable.
4- L’erreur sur les motifs déterminants
Quand ces motifs sont étrangers aux qualités que le contractant recherchait dans la
chose, objet du contrat ou de la personne de son contractant. Ex : Un fonctionnaire
lors du redéploiement des effectifs de la fonction publique achète une maison à
Bouaké, en croyant qu’il y serait affecté. Par la suite, il est maintenu à Abidjan. Il ne
pourra pas obtenir l’annulation du contrat de vente pour erreur sur le motif déterminant
car ce motif, son éventuelle affectation à Bouaké est complètement étranger à l’objet
de la vente de la maison, et en tout cas n’est pas entré dans le champ contractuel. (Cf.
cour d’appel d’Abidjan chambre civile et commerciale, 27 octobre 1972, RID 1974,
3ème et 4ème partie, p5).

Conclusion : Certaines erreurs sont particulières car elles empêchent purement et


simplement la formation du contrat : ce sont les erreurs obstacles.
D’autres sont indifférentes à la validité du contrat. C’est dans cette catégorie qu’il faut
ranger l’erreur sur la valeur et celle sur le motif déterminant quand celles-ci sont
complètement étrangères à la qualité de la chose objet du contrat.

II - Les erreurs sanctionnées par la loi :


Il y a deux sortes d’erreurs sanctionnées par la loi: L’erreur sur la substance et l’erreur
sur la personne dans les contrats conclus intuitu personae. Ces deux types d’erreurs
sont vices du consentement car susceptibles d’entraîner la nullité du contrat à
certaines conditions.
A- Les erreurs vices du consentement :
1) L’erreur sur la substance

Aux termes de l’article 1110 alinéa 1 du code civil : “l’erreur n’est une cause de nullité
que si elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l’objet“.
a) La notion de substance :

En se fondant sur cette définition deux interprétations possibles peuvent être


données de la substance :

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 Dans une interprétation objective la substance c’est la matière dont la chose est
faite. Ex : Un meuble en bois ou une bague en or.
 Dans une interprétation subjective, la substance est la qualité substantielle
c'est-à-dire la qualité de la chose que les parties ont eue principalement en vue.
C’est la qualité qui a déterminé leur consentement, c’est celle qui a déterminé
le consentement de la partie qui s’est trompée.
C’est la conception subjective que la jurisprudence adopte et selon la Cour de
Cassation : “l’erreur doit être considérée comme portant sur la substance même de
la chose lorsqu’elle est de telle nature que sans elle la partie n’aurait pas
contractée’’ (civil 28 Janvier 1913, au Sirez de 1913, 1ère partie, p487).
Dans l’interprétation du caractère subjectif la jurisprudence adopte une conception
extensive. Le juge considère que selon l’article 1110 du code civil, la chose peut
être aussi bien un bien corporel qu’un bien incorporel. Le terme de substance
recouvre différentes réalités. Ce peut être la substance matérielle ou encore la
qualité artistique de la chose, ou encore la conformité de la chose à sa destination.

b) L’origine et genre de l’erreur

Peu importe l’origine ou le genre de l’erreur commise. En ce qui concerne l’origine,


l’erreur peut porter aussi bien sur la prestation reçue, erreur commise par l’acheteur
ou sur la prestation fournie, elle est alors commise par le vendeur.
Peu importe aussi le genre de l’erreur. Ce peut être aussi bien une erreur de fait
ou de droit. Dans ce dernier cas, la victime se trompe sur l’existence, la nature ou
l’étendue des droits ayant fait l’objet du contrat. Dans tous ces cas, l’erreur est prise
en compte si elle a porté sur une qualité substantielle de la chose objet du contrat.

c) La preuve de l’erreur

C’est au demandeur de prouver non seulement qu’il y a eu erreur mais que cette
erreur a déterminé son consentement. Pour cette preuve, le demandeur doit
prouver qu’il a cru faussement en l’existence d’une qualité qu’il recherchait dans la
chose. Dans le deuxième cas, il lui revient de prouver que sans l’erreur il n’aurait
pas contracté. Cette double preuve est une question de fait, librement appréciée
par les juges du fond (civil 20 février 1947, au JCP 1974, 4ème partie p125). Le juge

52
apprécie ces circonstances in concreto c'est-à-dire compte tenu de la situation
particulière de la victime de l’erreur. Dans tous les cas, à défaut de ces preuves la
nullité n’est pas prononcée (C.A. Abidjan ch. civile et commerciale 27 Octobre
1972, RID 1974, 3ème et 4ème partie, p5). La nullité encourue est une nullité relative
et elle se prescrit pour 10 ans à compter de la découverte de l’erreur.

2- L’erreur sur la personne :

Cette erreur est un cas d’erreur de gravité suffisante pour que le consentement soit
vicié et que le contrat soit annulé. Mais selon l’article 1110 alinéa 2, une telle erreur
n’est opérante que si la considération de la personne est la cause principale de la
convention. On parle dans ce genre de cas de contrat conclu intuitu personae. Ex :
contrats gratuits, le mandat, contrat médical, le contrat de travail, de bail, contrat
de mariage.
Différentes sortes d’erreurs sur la personne peuvent être prises en compte. En
matière contractuelle, l’erreur peut porter sur l’identité physique ou civile de la
personne du cocontractant, ou sur une qualité essentielle de la personne. En droit
ivoirien de la famille, seules les erreurs sur l’identité physique et civile de la
personne était cause de nullité du mariage à l’exclusion de l’erreur sur les qualités
essentielles. Toutefois, cette solution a été assouplie par la loi de 2019 relative au
mariage qui consacre une telle nullité en cas d’erreur sur l’incapacité physique de
consommer le mariage ou de procréer d’un époux qui a manqué d’informer l’autre
sur son état dont il était lui-même informé.

Par ailleurs, il ne suffit pas que l’erreur soit vice du consentement pour que le contrat
soit annulé. Il faut la réunion d’autres conditions. Quelles sont les conditions pour
aboutir à une telle annulation ?
B- Les conditions de sanction de l’erreur

La jurisprudence exige que :


-l’erreur soit excusable
-l’erreur soit déterminante et entrée dans le champs contractuel

53
1) l’erreur doit être excusable

Pour obtenir la nullité du contrat la victime doit aussi démontrer que l’erreur qu’elle
a subie est excusable, c'est-à-dire qu’en fait elle est pardonnable à l’avoir
commise. Au contraire quand l’erreur est grossière, la victime de l’erreur n’est ni
pardonnable, ni excusable. Dans une telle hypothèse, il n y a pas nullité même si
l’erreur porte sur une qualité substantielle. Le droit ne protège pas les naïfs, le
caractère excusable de l’erreur est apprécié in concreto c'est-à-dire on prend en
compte la personne de la victime de l’erreur : son âge, son degré d’expérience et
sa fonction. Il en résulte que des erreurs commises par des professionnels dans
leurs spécialités ne sont pas excusables (comm. 4 juillet 1973, au Dalloz, 1974
p530). Le fondement d’une telle solution repose sur des considérations morales.
La victime se trompe mais moralement ne mérite pas d’être protégée.

2) L’erreur doit être déterminante et entrée dans le champ contractuel

L’erreur doit être déterminante signifie que la victime de l’erreur doit démontrer que
sans l’erreur elle n’aurait pas contracté.
L’erreur est entrée dans le champs contractuel signifie que le contractant non
victime de l’erreur ait su que l’autre partie considérait comme essentielle, la qualité
sur laquelle elle s’est méprise.
Il n’est pas nécessaire pour qu’il y ait nullité que les deux parties se soient
trompées, il suffit que l’autre partie ait eu connaissance de ce qui était désiré par
le contractant qui évoque l’erreur.
§2 : Le dol
C’est l’article 1116 du code civil qui règlemente le dol. Il ne le définit pas. En droit
on le définit comme une tromperie ayant pour objet d’induire une personne en
erreur pour l’inciter à conclure un contrat désavantageux. Au plan psychologique
le dol produit le même effet que l’erreur. L’une des parties conclut en se faisant une
fausse représentation de la réalité. Mais le dol se distingue de l’erreur d’un triple
point de vue : *En tant que fait extérieur à l’individu, il est plus facile à prouver.
*Certaines erreurs inopérantes en tant qu’erreurs spontanées telle que l’erreur sur
la valeur, provoquent la nullité quand elles proviennent d’un dol.

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* Le dol impliquant toujours une faute de celui qui l’a commis, la victime du dol
pourra obtenir, outre la nullité, des dommages- intérêts pour le préjudice subi. Dans
l’hypothèse de l’erreur, la preuve d’une faute est toujours difficile à rapporter, par
conséquent l’octroie de dommages- intérêts est plus délicat.

I- Les éléments constitutifs du dol.


La constitution du dol suppose deux éléments : Un élément matériel et un élément
intentionnel.

A/L’élément matériel
L’article 1116 du code civil parle de manœuvres pratiquées par l’une des parties.
En plus de ces manœuvres l’on prend en compte aussi le mensonge et la réticence.
1- En ce qui concerne les manœuvres, elles supposent une mise en scène ou
au moins des artifices de la part de l’auteur du dol.
2- Le mensonge : La jurisprudence considère que le simple mensonge même s’il
ne s’appuie pas sur un fait extérieur peut constituer l’élément matériel du dol.
C’est le cas quand l’auteur du mensonge ment délibérément dans l’intention
de tromper l’autre. Mais un tel mensonge pour être efficace doit avoir une
certaine gravité. C’est pourquoi on distingue entre le bon dol et le mauvais dol.
Seul le dernier est pris en compte comme cause de nullité.
Le mensonge est un bon dol (Dolus Bonus) quand il correspond aux vanteries
normales qu’un vendeur fait de ses produits. Au contraire, le mensonge est un
mauvais dol (Malus Bonus) quand il dépasse nettement l’habilité normale permise
à tout vendeur. (Paris 16 Décembre 1924, au Dalloz hebdo, 1925, p125).
3 - La réticence : Le fait pour une partie de ne pas renseigner l’autre peut-il
constituer un dol ? Aujourd’hui, aussi bien la loi que les juges admettent la réticence
comme un dol. Ainsi, le code CIMA oblige l’assuré à déclarer toutes circonstances de
nature à permettre à l’assureur d’apprécier le risque qu’il prend en charge. A défaut
d’un tel renseignement, le contrat est nul pour réticence dolosive (article 18, al.1 du
code CIMA).
La réticence dolosive est aussi admise lorsqu’il ya manquement à une obligation
précontractuelle d’information ou de renseignement. C’est le cas de l’article 3 de la loi
de 2016 relative à la consommation qui impose une telle obligation d’information au
professionnel à l’égard du consommateur.
55
Le juge considère qu’il y a aussi réticence dolosive quand l’un des contractants omet
de révéler à l’autre des faits dont il lui était impossible par lui-même d’avoir
connaissance. Maintenant la réticence est une forme de dol, et la Cour de Cassation
reconnaît au juge du fond un pouvoir souverain d’appréciation de l’existence de la
réticence (civil 1ere ch. 27 Oct. 1970, au JCP 1971, 2e Partie N°16710). Le juge ivoirien
a eu sur ce point à se prononcer (Cour d’Appel Abidjan, 21 Février. 1969 RID 1970,
1ere Partie, p45).

B- L’élément intentionnel
La manœuvre, le mensonge, la réticence doivent avoir été accomplis par l’auteur dans
l’intention de tromper l’autre partie. A l’origine du dol, il y a donc l’intention de tromper
et en absence d’une telle intention il n’y a pas dol. En effet dans le dol l’on ne trompe
pas en se trompant. C’est dans ce sens que la Cour d’Appel de Paris a eu à décider
qu’il n’y avait pas dol si par simple négligence un contractant fournit à l’autre des
renseignements erronés (civil 30 Décembre 1934, au Sirez 1935, 2e partie, p190).
L’intention de tromper doit être prouvée par le demandeur en nullité. Cette preuve se
fait par tout moyen. Elle peut résulter de la seule existence de l’élément matériel. A
défaut de cette preuve, la nullité n’est pas prononcée.
II- Les caractères du dol opérant

Le dol doit revêtir deux caractères pour entraîner la nullité :


-il doit être déterminant
- provenir de l’autre partie du contrat

A- Le caractère déterminant du dol


L’article 1116 du code civil exige cette condition. Le dol est déterminant quand sans
les manœuvres, la réticence ou le mensonge de l’une des parties l’autre partie n’aurait
pas contracté. Dans un tel cas, le dol est appelé dol principal. Le caractère déterminant
du dol est apprécié in concreto.
Au contraire le dol est dit dol incident quand il n’a pas déterminé le consentement de
la victime du dol, c'est-à-dire que sans le dol la victime aurait quand même contracté.
Mais elle aurait contracté à des conditions plus avantageuses pour elle.
Dans ce dernier cas le contrat n’est pas nul, et la victime du dol ne peut qu’obtenir
des dommages et intérêts.
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Le dol déterminant présente l’avantage de pouvoir entraîner la nullité dans les
conditions où l’erreur aurait été insuffisante. C’est le cas quand le dol provoque une
erreur sur la valeur ou une erreur sur les motifs quand cette erreur est inopérante. Il
arrive cependant que le juge retienne comme vice du consentement un dol
déterminant même s’il n’a pas induit la victime en erreur. Cette décision reste
cependant une décision isolée et la jurisprudence continue d’exiger que le dol ait
provoqué une erreur pour être cause de nullité.

B- l’auteur du dol
Il y a un principe et des exceptions

1- Le principe :
Il est posé par l’art 1116 : le dol pour entraîner la nullité doit provenir du contractant,
de la victime du dol. Il en résulte que le dol d’un tiers n’entraîne pas la nullité du contrat.
Cette règle a un fondement moral. Le dol est une faute dont la sanction doit être
supportée par l’auteur. Imposer la nullité pour dol d’un tiers à un contractant revient à
le sanctionner injustement. Le dol d’un tiers ne donne droit qu’à des dommages et
intérêts contre le tiers auteur du dol.

2- Les exceptions
Le dol d’un tiers entraîne la nullité d’un contrat dans certains cas :
- En cas d’actes unilatéraux : l’explication c’est que dans ce genre d’acte, il n’y a qu’une
seule partie et le dol ne peut provenir fatalement que d’un tiers, exclure ici la nullité
pour dol revient à exclure ce genre d’actes du domaine des nullités.
- Quand le tiers est mandataire c'est-à-dire représentant de l’une des parties au
contrat.
- Quand le tiers est complice de l’une des parties au contrat
- Dans le cas de donation (contrat unilatéral)
Ici l’on privilégie l’intérêt du donateur par rapport à celui du donataire. Ce dernier ne
perd qu’un avantage.
Le demandeur en nullité doit établir l’existence de toutes ces conditions par tous
moyens car le dol est un fait juridique.
La nullité est prononcée quand ces conditions sont réunies. C’est une nullité relative
qui se prescrit par 10 ans à compter de la découverte du dol. Par ailleurs la victime
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du dol peut demander des dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait de la
faute de son contractant, ou même en démontrant qu’elle a subi un préjudice du fait
de l’annulation. Elle peut même se borner si elle le désire à ne demander que des
dommages et intérêts.

§3 : La violence (art 1111 à 1115 du code civil)

I- La notion de violence
Selon l’article 1112 du code civil « il y a violence quand l’acte est de nature à faire
impression sur une personne raisonnable et qu’elle peut lui inspirer la crainte d’exposer
sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent ».
Il résulte de cette définition que la violence est une contrainte consistant en une
menace d’infliger un mal considérable, contrainte exercée sur la volonté d’une
personne pour la forcer à conclure. C’est donc la crainte qui résulte de la violence qui
vicie le consentement. La victime perd donc sa liberté de choisir de conclure ou de ne
pas conclure. La violence comporte un élément matériel et psychologique. La question
de son origine se pose.
A- L’élément matériel de la violence :

L’acte matériel peut s’exercer sur la volonté ou sur le corps de la personne. Dans le
premier cas on parle de violence morale et dans le deuxième cas de violence physique.
a- La violence morale : elle pèse sur la volonté de la victime et prend la forme d’un
chantage. Cette dernière signe le contrat pour échapper au mal qui la menace. Ce mal
peut être physique (menace de coups, ou de tout autre acte de tortures, séquestration
etc ) ou moral (la perte de sa fortune ou d’un être cher etc).
b- La violence physique : c’est celle qui pèse sur le corps et consiste à annihiler la volonté
de la victime. Elle n’est pas prise en compte comme vice du consentement, car il n’y
a même pas consentement donc il n’y a pas contrat.

Ex : l’on administre de la drogue à la victime de la violence ou encore on lui saisi la


main pour l’obliger à signer.
B- L’élément psychologique :

La contrainte exercée dans la violence a pour but de susciter la crainte afin que la
partie donne son consentement. Cette crainte doit être assez grave pour inspirer la
peur chez la victime d’exposer sa vie, ses biens ou un être cher.

58
C- La question de l’origine de la violence :

La question s’est posée en droit de savoir si toute forme de violence pourrait être prise
en compte. En effet, le code civil semble limiter l’origine de la violence au fait de
l’homme. Alors qu’en est-il lorsque la violence n’est pas le fait d’un homme mais résulte
d’évènements extérieurs à l’homme tout en exerçant une pression, une contrainte sur
sa volonté ? On s’est demandé si la contrainte résultant des évènements pouvait être
assimilée à la violence. C’est le problème de l’état de nécessité.
La question s’est posée en matière d’assistance maritime. Le capitaine d’un navire
sauveteur pouvait imposer au capitaine d’un navire en péril les conditions de la
convention d’assistance sans que ce dernier puisse en discuter librement, doit- on
annuler leur contrat pour violence ? La cour de cassation Française a admis
formellement une telle violence (requête 27 Avril 1887, au Dalloz, 1888, 1ère partie,
p327).
La cour de cassation a par la suite étendue cette solution à d’autres domaines. Elle
annule un contrat de travail désavantageux conclu par un employé pressé par des
besoins d’argent, besoin dû à la maladie de son enfant. (Social 5 juillet 1965, au
Bulletin Civil 1965, 4ème partie, n°545).
On peut pourtant souhaiter que l’assimilation de l’état de nécessité à la violence soit
posée comme une règle générale, toutes les fois où le contractant a profité des
circonstances pour imposer à la partie contrainte, la signature d’un contrat lui
procurant des avantages abusifs. Une telle solution se justifierait par des
considérations morales et psychologiques (ex : nullité des contrats conclus par les
Israéliens pendant la 2ème guerre mondiale en se fondant sur la violence découlant de
l’état de nécessité : les acheteurs avaient abusé de la persécution que subissait les
israéliens pour payer des prix anormalement bas).

II- Les caractères de la violence opérante


L’un des caractères a un fondement moral : la violence doit être illégitime. L’autre
caractère a un fondement psychologique : la violence doit être déterminante.

A- La violence doit être déterminante

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La violence est déterminante quand sans elle la victime n’aurait pas contracté ; cette
condition est remplie quand la crainte résultant de la menace présente une certaine
intensité et gravité. C’est ce que veut dire l’article 1112 du code civil quand il précise
que « la violence doit être de nature à impressionner une personne raisonnable, et
pouvoir lui inspirer la crainte d’exposer sa personne, ou sa fortune a un mal
considérable et présent ». Selon cet article pour que la violence soit considérée
comme déterminante, il faut certaines conditions :
- Il est nécessaire que la peur de voir le mal se réaliser soit présente donc concomitante
à la signature du contrat.
- Il est aussi nécessaire que cette crainte soit considérable, c'est-à-dire en fait, assez
grave pour déterminer le consentement. La gravité de la crainte inspirée par la
menace est appréciée in concréto : C’est ce que semble souligner le même article
1112 quand il prescrit d’avoir égard à l’âge, au sexe et à la condition sociale des
personnes concernées. C’est l’appréciation in concréto que la jurisprudence retient.
(Requête 17 Juin 1877, au Dalloz 1870,1ère partie, p60).

-Il importe peu que cependant le mal redouté soit dirigé contre la personne ou la
fortune de la victime de la violence. Par ailleurs, les personnes menacées peuvent être
des proches du contractant, (Art 1113) c'est-à-dire le conjoint, les descendants ou
ascendants. Cette énumération n’est pas limitative et d’autres êtres chers : amis,
fiancé, maîtresse ou amants peuvent être pris en compte.
B/ Le caractère illégitime ou injuste de la violence
Pour causer la nullité la violence doit être injuste ou illégitime c'est-à-dire non fondée
en droit. C’est le cas quand la violence emprunte la forme d’une voie de fait. Quand la
violence prend la forme d’une voie de droit elle est légitime. Deux cas peuvent se
présenter :
1- l’article 1114 du code civil dispose : “ la seule crainte révérencielle envers le
père, la mère ou un autre ascendant ne suffit point pour annuler le contrat“. En
d’autres termes, le souci des enfants de ne pas déplaire à leurs parents, aux
grands parents ne peut entraîner la nullité du contrat même quand ce souci à
déterminé leur consentement. Cette solution se justifie par l’idée que l’influence
des parents sur les enfants résulte de l’exercice légitime d’une autorité morale.
Mais la crainte révérencielle n’est une violence légitime que si elle est la seule
cause ayant déterminée le consentement. Cependant si elle s’accompagne de
60
violence ou menaces caractérisées alors la nullité peut être prononcée. Cette
solution ressort expressément de l’article 1114 du code civil.
2- Les tribunaux décident que la menace d’exercer une voie de droit est légitime
(social 1960, au bulletin civil 1960, 4ème partie, n°442). Dans l’espèce, le juge
admet que le fait pour l’employeur de menacer son employé indélicat de
poursuites correctionnelles pour l’obliger à démissionner est légitime.
Cependant la légitimité de l’exercice d’une voie de droit suppose certaines
conditions :
a) les moyens utilisés doivent être corrects. Un créancier titulaire d’une créance
légalement établie ne peut user de coups et violences contre son débiteur pour
obtenir paiement. De même, la mise en œuvre d’une procédure judiciaire peut
constituer une violence illégitime si son initiateur agit de manière vexatoire ou
dans le seul souci d’intimider le débiteur.
b) La menace d’utiliser une voie de droit n’est légitime que si l’avantage
recherché est en rapport direct avec le droit que l’on exerce ou menace
d’exercer. Ex : quand un créancier hypothécaire menace son débiteur d’opérer
une saisie si la dette échue n’est pas payée, elle est légitime. Au contraire
l’utilisation d’une voie de droit est illégitime quand celui qui agit recherche un
avantage autre que celui que son droit consacre. (Criminel 21 juillet 1933, au
Sirez 1935 ,1ère partie p36).
Quand ces conditions sont remplies la nullité du contrat conclu est prononcée. Peu
importe cependant l’auteur de la violence car l’article 1111 du code civil précise
expressément que la nullité peut être obtenue même si la violence émane d’un
tiers. Cette solution est justifiée pour la victime de la violence mais elle paraît injuste
pour le contractant qui est sanctionné sans l’avoir mérité.

C/ La preuve et la sanction de la violence


La réunion des conditions de la violence efficace entraine la nullité du contrat,
mais le demandeur doit prouver l’existence de la violence.
Cette preuve se fait par tous moyens, la violence étant un fait juridique (Cour Appel
Abidjan, 17 Juillet 1977, à la RID 1978, 3ème et 4ème, p44). Un autre arrêt de la même
Cour a eu à décider « que c’est au moment de la signature de l’acte qu’il faut se
placer pour apprécier la violence ». La sanction est la nullité relative, elle se prescrit
par 10 ans, à compter du jour où la violence a cessé. La nullité du contrat peut être
61
accompagnée d’une condamnation à des dommages- intérêts, l’auteur de la
violence ayant commis une faute.

 L’ESSENTIEL

Le consentement donné par chacune des parties doit être donné en toute connaissance
de cause. Ainsi dans le but de protéger les contractants, des moyens ont été mis en place.
Ce sont tantôt des mesures préventives telle que l’obligation générale d’information, tantôt
ce sont des moyens curatifs, on parle de vices du consentement.
Lorsqu’on évoque les vices du consentement, on fait référence à l’erreur, au dol et à la 62

violence.
L’erreur n’est pas définie par le Code Civil, la définition est donc l’œuvre de la doctrine.
Enfin, l’on peut évoquer comme dernier vice du consentement la violence dont la
définition est donnée par l’article 112 du Code Civil « « il y a violence quand l’acte
est de nature à faire impression sur une personne raisonnable et qu’elle peut lui
inspirer la crainte d’exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et
présent ». La violence suppose un élément matériel et un élément psychologique.
De même que le dol, la violence suppose deux caractères : La violence doit être
déterminante, illégitime. 63

 BIBLIOGRAPHIE
EXERCICE D’APPLICATION

Contrôle de connaissance

64
Répondez vrai ou faux et justifiez.
1- L’erreur sur la valeur n’est point une cause de nullité du contrat.
2- L’erreur sur la personne n’est pas une erreur viciant le consentement.
3- La valeur artistique d’un objet ne peut être vue comme une erreur sur la
substance.
4- Le dol implique toujours une faute de celui qui l’a commis.
5- La menace d’exercer un droit que l’on détient de la loi n’est pas illégitime.

Cas pratique

M. Lagrinta, un particulier, fait face à une situation financière très difficile, situation
connue par toute la ville où il réside. Contraint, il doit vendre ses meubles de collection.
Pour sa commande ancienne, il prend contact avec un antiquaire dans sa rue. Ce
dernier remarque un indice témoignant de la grande valeur du meuble mais il ne dit
rien et l’achète auprès de M. Lagrinta pour 3.000.000 FCFA, somme bien inférieure à
la valeur réelle du meuble. Deux ans plus tard, après avoir rétablie une situation
financière plus favorable, M. Lagrinta est persuadé d’avoir été floué lors de cette vente.

Relevez le ou les problèmes de droit et traitez.

Dissertation

Sujet : l’erreur et le dol.

65
SECTION 2 : LA CAPACITÉ DES PARTIES
L’article 1108 du code civil exige en second lieu pour la validité des contrats que les
parties soient capables. La capacité est réglementée par les articles 1123 à 1125 du
code civil. Pratiquement le contrat est annulable si l’une des parties est incapable.
I - les généralités
Pour conclure un contrat, il faut être capable c'est-à-dire avoir 18 ans révolus et jouir
de toutes ses facultés mentales. C’est pourquoi les mineurs et les incapables majeurs
ne peuvent contracter. Leur âge ou l’altération de leurs facultés mentales ( ou
corporelles, leur infirmité, ou l’affaiblissement dû à l’âge ou au retard anormal de son
développement) conduit à penser qu’ils n’ont pas un consentement suffisamment
éclairé pour contracter. L’incapacité se présente sous deux formes:
*Les incapacités de jouissance : c’est quand une personne est déclarée
inapte à avoir des droits et à être soumise à obligations. Elle est donc privée
du droit de conclure les actes juridiques. Une telle incapacité ne peut être
générale car cela reviendrait à priver l’individu de la personnalité juridique.
*Les incapacités d’exercice : Quand l’individu est apte à avoir des
obligations et des droits mais il ne peut les mettre en œuvre. Ce genre
d’incapacité est fréquent et est une mesure de protection de l’incapable.
C’est celle-ci qui frappe les incapables en droit ivoirien.
L’incapacité d’exercice peut être générale ou spéciale, dans le premier cas elle couvre
en principe tous les actes de la vie civile sauf exception légale ou judiciaire. Dans le
second cas elle ne concerne que quelques actes de la vie juridique. L’individu demeure
capable pour tous les autres actes.
Les personnes frappées d’incapacité d’exercice sont protégées de deux manières :
elles peuvent être représentées ou assistées.
La représentation est la mesure de protection utilisée pour les personnes frappées
d’une incapacité générale d’exercice. Ces personnes sont en principe juridiquement
inaptes à exercer leurs droits. En pratique, elles ne peuvent donc conclure seules des
actes juridiques sauf hypothèse exceptionnelle.
L’assistance est une mesure de protection utilisée pour les personnes frappées
d’incapacité spéciale d’exercice. Dans ce cas, la personne protégée est capable en
principe de faire les actes de la vie civile sauf les actes que la loi lui interdit
spécialement.
Ces deux modes de protections sont le régime des incapacités contractuelles.
66
II - Le régime des incapacités contractuelles
L’article 1123 du code civil prévoit que toute personne peut contracter si elle n’en est
pas déclarée incapable. On peut classer les incapables en deux groupes : les mineurs
et les majeurs incapables.

§1 : La situation des mineurs


Selon l’article 1er de la loi du 26 juin 2019 sur la minorité, le mineur est l’individu de
l’un ou l’autre sexe qui n’a pas atteint l’âge de 18 ans accomplis. Il faut distinguer le
mineur non émancipé, du mineur émancipé.
A- Le mineur non émancipé
Lorsqu’il est soumis à l’autorité parentale ou celle d’un tuteur, le mineur est non
émancipé. Pour le protéger le mineur non émancipé est frappé par la loi d’une
incapacité générale d’exercice. Mais cette incapacité comporte des exceptions.
1)Le principe de l’incapacité générale d’exercice du mineur non émancipé

Les articles 32 et 33 de la même loi disposent que le mineur non émancipé est
incapable de contracter. Il a nécessairement besoin d’un représentant pour tous les
actes de la vie civile. Lorsque la représentation est exercée par les père et mère, on
parle d’autorité parentale (article 3 et svts de la loi de 2019), à défaut, elle est exercée
par le tuteur : article 53 et svts de ladite loi.
L’article 37 de la loi prévoit que l’acte que le mineur conclut seul n’est pas nul pour ce
seul fait, son sort dépend de sa nature. Si l’acte conclut est de ceux que le représentant
légal aurait pu faire seul, alors l’acte peut être valable : ce peut être un acte
d’administration c'est-à-dire un simple acte de gestion courante du patrimoine, qui ne
peut en diminuer la valeur parce que n’opérant pas transmission de droits. Un tel acte
n’est annulable que si le mineur subit une lésion quelque soit l’importance.
Si l’acte conclu est de ceux que le représentant légal n’aurait pas pu faire seul alors,
l’article 37 prévoit qu’un tel acte est nul de plein droit ou nul dans la forme : ce sont les
actes de disposition. Ils ont pour effet de diminuer la valeur du patrimoine parce qu’ils
entraînent la transmission d’un droit. Ex : la vente d’un bien du mineur.
2) Les exceptions à ce principe :

67
a- Selon l’article 34 de la loi sur la minorité, le mineur peut conclure seul les actes
conservatoires (actes dont le but est de préserver la substance du patrimoine
du mineur). Ex : contrat d’assurance de dommage, renouvellement d’une
inscription hypothécaire etc
b- Les actes d’administration : il est admis que le mineur peut les faire seul
puisque son représentant légal peut le faire seul. Ex : conclusion d’un
contrat de bail
c- L’article 35 de la même loi prévoit que le mineur de 16 ans peut conclure et
rompre un contrat de travail avec l’assistance de son représentant légal.
d- Il est d’usage d’admettre que le mineur non émancipé peut conclure seul
les actes de la vie courante.
L’acte irrégulier conclu par le mineur est frappé de nullité relative. Cette nullité est
invocable par le mineur à sa majorité dans un délai de 5 ans ou par le représentant
légal pendant sa minorité (article 40 de la loi) sauf si le mineur a ratifié l’acte à sa
majorité ou à son émancipation (article 39 de la loi).
Selon l’article 40 l’action en nullité pour minorité se prescrit pour cinq ans à compter
de la majorité ou de l’émancipation. Si la nullité est prononcée et celle-ci doit l’être
même en cas de déclaration frauduleuse de majorité, le mineur ne restitue que ce qui
a tourné à son profit (article 41 de la loi sur la minorité.)

B- Le mineur émancipé:
L’émancipation est l’acte par lequel un mineur acquiert la pleine capacité d’exercice
par son affranchissement de l’autorité parentale ou de la tutelle. Il devient capable
d’accomplir tous las actes de la vie civile et se trouve de ce fait assimilé à un majeur :
article 119. Cependant, pour l’exercice du commerce et son adoption, il faut
l’autorisation des père et mère ou celui qui exerce l’autorité parentale ou le conseil de
famille : article 125 à 126.
Depuis la réforme de 2019, l’émancipation par le mariage n’existe plus. Aujourd’hui,
l’émancipation est exclusivement volontaire. Elle résulte de la déclaration conjointe
des père et mère ou de l’un d’eux en cas de désaccord, à condition que le mineur ait
atteint 16 ans révolus. Cette déclaration est reçue par le juge des tutelles qui recueille
le consentement du mineur et prononce l’émancipation si elle satisfait aux intérêts du
mineur et s’il ya de justes motifs : article 120. L’émancipation des mineurs sous tutelle
ou non placés sous tutelle est régie par les articles 121 et 122 de la loi sur la minorité.

68
§2 : Les majeurs incapables
Leur condition juridique a beaucoup évolué avec la loi ivoirienne du 22 mai 2023
relative aux majeurs protégés par la loi. Cette loi a abrogé les différents régimes
de protection qui étaient prévus par le code civil français de 1804 et qui étaient
encore applicables en Côte d’Ivoire, malgré leur inadaptation et leurs
insuffisances. Il faut envisager la situation du majeur non protégé d’une part et
celle du majeur protégé d’autre part.
A- Le majeur non protégé :
Selon l’article 1er de la loi de 2023 relative aux majeurs protégés, le majeur est la
personne âgée de 18 ans accomplis. Il est capable d’accomplir tous les actes de la
vie civile. Par conséquent il est capable de contracter et les actes juridiques passés
par lui sont en principe valables.
Toutefois, l’article 6 dispose que pour faire un acte valable, il faut être sain
d’esprit. Il appartient à ceux qui agissent en nullité pour cette cause de prouver
l’existence d’un trouble mental au moment de l’acte. Du vivant de la personne,
l’action en nullité ne peut être intentée que par elle-même ou par son mandataire.
L’action se prescrit par 5 ans. Après sa mort, les actes ne peuvent être attaqués
que dans les cas suivants :
- Si l’acte porte en lui-même la preuve d’un trouble mental
- Si une action avait été introduite avant le décès aux fins d’ouvrir la tutelle
ou la curatelle
B- Le majeur protégé
Lorsque l’état ou la situation de la personne majeure l’exigent, elle peut recevoir
une protection spéciale de sa personne et de ses biens selon les modalités prévues
par la loi. La mesure de protection n’est ordonnée par le juge des tutelles qu’en
cas de nécessité et lorsqu’il ne peut être suffisamment pourvu aux intérêts de la
personne par l’application des règles du droit commun de la représentation, de
celles relatives aux droits et devoirs des époux et des règles des régimes
69
matrimoniaux, ou par une autre mesure de protection judiciaire moins
contraignante. La demande d’ouverture de la mesure de protection peut être faite
par le majeur qu’il ya lieu de protéger, ses père et mère, ses descendants, ses frères
et sœurs, son conjoint, le procureur de la république pour la personne se trouvant
dans les situations suivantes :
- Le majeur qui est dans l’impossibilité de pourvoir seul à ses intérêts en raison de
l’altération de ses facultés mentales ou corporelles, de son infirmité, de son
affaiblissement dû à l’âge ou du retard anormal de son développement. Dans cette
hypothèse, l’altération des facultés mentales ou corporelles et le retard anormal du
développement doivent être de nature à vicier ou à empêcher l’expression de la
volonté. Ils doivent être médicalement établis.
- Le majeur qui par sa prodigalité ou son intempérance, s’expose à tomber dans le
dénuement ou compromet l’exécution de ses obligations familiales.
La loi de 2023 relative aux majeurs protégés prévoit 3 régimes de protection des
majeurs incapables : la sauvegarde de justice, la tutelle et la curatelle. Les majeurs
sous tutelle sont des incapables représentés et les majeurs sous sauvegarde de justice
et en curatelle sont des incapables assistés.

1- Les majeurs sous sauvegarde de justice


Le juge de tutelle peut placer sous sauvegarde de justice la personne, qui pour
l’une des causes prévues à l’article 3 a besoin d’une protection juridique
temporaire consistant soit à l’assister, soit à la représenter pour l’accomplissement
de certains actes déterminés. La durée de la sauvegarde de justice est de 3 mois,
renouvelable une fois par ordonnance du juge des tutelles : article 20 de ladite loi.
La personne placée sous sauvegarde de justice conserve l’exercice de ses droits,
toutefois, elle ne peut faire, à peine de nullité, un acte pour lequel un mandataire
spécial a été désigné.

2- Les majeurs en curatelle

70
Selon l’article 47 de la loi relative aux majeurs protégés, lorsqu’un majeur, pour
l’une des causes prévues à l’article 3, sans être hors d’état d’agir lui-même, a
besoin d’être assisté ou contrôlé dans certains actes de la vie civile, il peut être
placé sous le régime de la curatelle par le juge des tutelles qui lui désigne un
curateur.
Le majeur en curateur ne peut, sans l’assistance de son curateur, faire aucun acte
qui, sous le régime de la tutelle des majeurs, requerrait une autorisation du conseil
de famille. Il ne peut, non plus, sans cette assistance, recevoir des capitaux, ni en
faire emploi. Si le majeur en curatelle a fait, seul, un acte, pour lequel l’assistance
du curateur était requise, lui-même ou le curateur peuvent en demander
l’annulation dans un délai de 5 ans à compter de l’accomplissement de l’acte :
article 52 de ladite loi. La nullité encourue est donc une nullité relative.
3- Les majeurs sous tutelle
La tutelle est ouverte quand un majeur, pour l’une des causes prévues à l’article
3, a besoin d’être représenté d’une manière continue dans les actes de la vie civile.
Le juge des tutelles ne peut prononcer l’ouverture de la tutelle que si l’altération
des facultés mentales ou corporelles du malade a été constatée par deux médecins
spécialistes choisis sur une liste des experts agrées auprès des juridictions.
Tous les actes passés par la personne protégée, postérieurement à la publication
de la décision d’ouverture de la tutelle, sont nuls de droit. Toutefois, le juge, sur
avis du médecin traitant peut énumérer certains actes que la personne protégée a
la capacité de faire seule, soit avec l’assistance de son tuteur.
Les actes antérieurs peuvent être annulés si la cause qui a déterminé l’ouverture
de la tutelle existait notoirement à l’époque où ils ont été faits. L’action en nullité
se prescrit par 5 ans à compter de la décision d’ouverture de la tutelle.
Le mariage d’un majeur en tutelle n’est permis qu’avec l’autorisation du conseil
de famille spécialement convoqué pour délibérer, à moins que les père et mère du
majeur protégé ou l’un d’eux, si l’autre est prédécédé, n’est donné leur
autorisation au mariage. Dans tous les cas, l’avis du médecin traitant est requis.
71
L’ESSENTIEL
A la lecture de l’article 1108 du Code Civil, on peut affirmer que pour conclure un
contrat, il faut avoir la capacité. C’est fort de cela que les mineurs et les majeurs
incapables ne peuvent valablement conclure des contrats : ils sont donc frappés
d’incapacité d’exercice.
Le mineur non émancipé est frappé d’une incapacité générale d’exercice.
Cependant ce principe connait des tempéraments, il s’agira donc d’analyser si le
contrat conclu est de l’ordre des actes conservatoires, des actes d’administration
ou encore les actes de la vie courante ou des actes de disposition.
Pour les majeurs, la capacité est le principe sauf lorsqu’ils sont placés sous l’un
des régimes de protection. Ainsi soit ils sont protégés par le mécanisme de
l’assistance lorsqu’ils sont sous sauvegarde de justice ou en curatelle : dans ces
hypothèses, ils conservent l’exercice de leurs droits mais pour les actes énumérés
ils ne peuvent agir sans l’assistance de leur mandataire spécial ou de leur curateur
sous peine de nullité des actes passés; soit ils sont protégés par la représentation
lorsqu’ils sont sous tutelle. Dans cette hypothèse, ils sont dessaisis de l’exercice
de leurs droits sauf exception admise par le juge pour certains actes qu’il aura
énuméré dans sa décision. Pour le principe, le tuteur agira au nom et pour le
compte du majeur protégé.

72
SECTION III : l’objet du contrat

C’est l’une des conditions qu’exige l’article 1108 pour que le contrat soit valable. Cet
article précise que le contrat doit avoir un objet valable qui forme la matière de
l’engagement. Les termes “objet du contrat” font l’objet d’une controverse en doctrine.
Pour certains, il faut distinguer l’objet du contrat et l’objet de l’obligation contractuelle.
Le premier désignerait l’opération juridique que les parties entendent réaliser c'est-à-
dire l’intérêt que la convention présente pour les parties. Le deuxième désigne les
prestations prévues par les parties au contrat. Pour d’autres auteurs les termes “objet
du contrat” sont impropre car un contrat n’a pas d’objet mais crée seulement des
obligations qui elles ont des objets.
Les termes “objet du contrat” sont un raccourci de langage utilisé pour désigner l’objet
de l’obligation. C’est pourquoi ces derniers auteurs préfèrent s’en tenir à l’esprit de
code civil : l’objet du contrat c’est ce à quoi le débiteur est tenu à l’égard du créancier.

§ I : Les caractères requis de l’objet


La validité du contrat suppose que l’objet soit déterminé, possible, licite et existe.

A- L’objet doit être déterminé


C'est-à-dire que les parties au contrat doivent savoir à quoi elles s’engagent
réciproquement c'est-à-dire en fait l’étendue de leurs obligations. Cette précision
dépend de la nature de l’obligation souscrite par le débiteur. En cas d’obligation de
faire ou de ne pas faire, celle-ci doit être précisément décrite pour que le débiteur
sache en quoi elle consiste. Si c’est une obligation de donner, elle peut porter sur un
corps certain ou une chose de genre. Quand elle porte sur un corps certain il doit être
individualisé. Quand elle porte sur une chose de genre, celle-ci doit être précisée dans
son espèce ou dans sa quantité. On admet qu’à défaut d’être déterminé au moment
de la conclusion du contrat, l’objet doit être déterminable au moment de l’exécution du
contrat.
Exemple : contrat de fourniture d’eau et de courant

73
B- L’objet doit être possible
C'est-à-dire que l’objet doit être réalisable matériellement. Si l’objet est impossible à
réaliser le contrat est nul. Mais toute sorte d’impossibilité de l’objet n’aboutit pas à
l’annulation du contrat. Il n’est nul qu’en cas d’impossibilité absolue c'est-à-dire une
impossibilité à laquelle se heurterait n’importe quel débiteur placé dans les mêmes
conditions. Au contraire en cas d’impossibilité relative, c'est-à-dire en cas
d’impossibilité due à une inaptitude personnelle du débiteur, le contrat n’est pas nul.
Mais le débiteur engage sa responsabilité contractuelle pour inexécution ou mauvaise
exécution de son obligation. Il devra alors des dommages et intérêts au créancier. Ces
données générales s’appliquent quelque soit la nature de l’obligation : de donner, de
faire ou de ne pas faire. Quand c’est une obligation de donner portant sur un corps
certain, l’impossibilité absolue suppose que ce corps n’existe pas. Quand il s’agit d’une
chose de genre, l’impossibilité absolue de l’objet suppose que la chose n’existe nulle
part.

C- L’objet du contrat doit exister


En principe l’objet doit exister au moment de la conclusion du contrat. Toutefois il est
admis que la prestation due peut être une chose qui n’existe pas au moment de la
conclusion du contrat. L’exigence d’une chose possible n’exclut pas que le contrat
puisse porter sur une chose future (art 1130, al 1du code civil). Ainsi l’on peut vendre
une récolte à venir ou une maison à bâtir. Un tel contrat peut-être conditionnel ou pur
et simple. Ce principe de l’art 1130, al 1 comporte cependant des exceptions. Ainsi,
l’article 1130, al 2 interdit des pactes sur une succession future c'est-à-dire les
conventions relatives à la succession de personnes encore vivantes.

D- La licéité de l’objet
C'est-à-dire que la prestation prévue au contrat doit pouvoir faire l’objet d’une
convention. En d’autres termes l’objet prévu au contrat doit être dans le commerce. En
effet l’article 1128 du code civil interdit que le contrat puisse porter sur une chose hors
du commerce. Sont donc licites les choses dont la vente est permise. A l’inverse celles
dont la vente est interdite sont illicites. Aux choses illicites, il faut ajouter les choses
immorales. C’est ainsi qu’il est interdit de vendre des substances vénéneuses ou
encore des animaux atteints de maladies contagieuses, les organes ou substances
74
d’origine humaine (le sang, les ovocytes etc.) les armes, la drogue etc. Sont nuls les
contrats dans lesquels une personne promet de commettre un crime contre paiement.

§II : le défaut d’équivalence entre les objets prévus au contrat : le


problème de la lésion

La lésion c’est le préjudice résultant pour l’une des parties du défaut d’équivalence
entre les prestations au moment de la conclusion du contrat. La lésion est un vice qui
se situe au moment de la conclusion du contrat, c’est-à-dire un vice originel. Par
conséquent si le déséquilibre survenait après la conclusion du contrat, alors on serait
en présence non d’une lésion mais de l’imprévision. La lésion n’est pas prise en
compte dans les contrats à titre gratuit (ici le déséquilibre est voulu) et dans les contrats
aléatoires : les parties elles même décident de faire dépendre l’existence ou l’étendue
de la prestation d’une des parties d’un évènement incertain : cela empêche d’apprécier
en principe si les prestations sont équilibrées ou non. On dit que l’aléa chasse la lésion.
A : le domaine de la lésion
1- Le principe
L’article 1118 du code civil dispose que la lésion n’est pas une cause de nullité des
contrats ce qui veut dire qu’en principe un contrat lésionnaire n’est pas rescindable.
Ce principe négatif se justifie par deux idées :
- le principe de l’autonomie de la volonté
C’est l’idée selon laquelle tout ce qui est contractuel c'est-à-dire tout ce qui est consenti
dans un contrat est juste. Il en résulte que la lésion ne devrait pas exister. On ne peut
donc la sanctionner.
- la sécurité juridique : admettre la nullité pour lésion reviendrait à introduire dans
la matière une insécurité juridique qui risquerait de décourager l’esprit d’initiative et
de spéculation, moteur du libéralisme économique.

2- Les exceptions au principe :

a-Les exceptions légales


Selon l’article 1118 du code civil, la lésion ne vicie les conventions que dans certains
contrats et à l’égard de certaines personnes. En ce qui concerne les
personnes :*l’article 33 de la loi sur la minorité prévoit que l’acte d’administration
75
conclu par le mineur tout seul est rescindable s’il est lésionnaire quelque soit
l’importance de la lésion subie. Pour ce qui est des contrats il faut distinguer différentes
hypothèses :
* L’article 887 du code civil dispose que le partage est rescindable pour lésion si l’un
des copartageant subit une lésion de plus du quart. La pratique judiciaire ivoirienne
admet la lésion dans les cas de partage que le bien soit mobilier ou immobilier.
* La loi du 8 juillet 1907 modifiée par celle du 10 mars 1937 autorise la rescision pour
lésion du plus du quart du prix dans les contrats de vente d’engrais et de semence (ici
on révise le prix à la hausse).
* L’article 37 de la loi du 11 Mars 1957 permet au propriétaire d’une œuvre littéraire
qui cède son droit moyennant une rémunération forfaitaire d’obtenir la révision du
contrat s’il subit un préjudice de plus des 7/12 du fait d’une lésion ou du fait d’une
prévision insuffisante des produits de cette œuvre.
* Traditionnellement on admet que dans les contrats de vente d’immeuble dans
lesquels le vendeur subit une lésion de plus des 7/12 du prix que le contrat soit
annulable pour lésion.

b- Les exceptions jurisprudentielles


Tout en affirmant l’article 1118 du code civil, la jurisprudence par des moyens
détournés s’efforce de corriger certaines lésions :
* Elle admet que l’on réduise les salaires et les honoraires des mandataires. Il faut
entendre par mandataires certains membres des professions libérales tels que les
avocats, médecins, agents d’affaires (C. Civile 29 Janv. 1967 au Dalloz 1867 1ere
partie p53. Rennes 17 Avril 1969 à la cazette du palais 1971 1ere partie sommaire)
* On admet la rescision pour lésion dans certains contrats aléatoires malgré l’obstacle
de l’aléa. Il faut cependant nuancer cette position car dans la plupart des cas, il s’agit
de vente d’immeuble moyennant rente viagère dans lesquelles en fait compte tenu de
certaines circonstances l’aléa a disparu. (Civil 6 nov. 1969, au JCP 1970, 2 e partie, N°
16.502)
B : Les sanctions de la lésion
Deux sanctions essentielles peuvent être citées : la rescision et la révision
- La rescision : forme de nullité relative du contrat lésionnaire, l’action en nullité
appartient au contractant lésé. Celui-ci peut cependant confirmer l’acte lésionnaire. Si
la nullité est prononcée, il s’agit d’une nullité relative. Elle a un effet rétroactif et la
76
victime a 10 ans pour agir à moins qu’un délai légal plus bref soit prévu. Pour éviter
la rescision il est permis aux parties de procéder à un rééquilibrage des prestations :
on dit qu’il y a rachat du contrat lésionnaire. Cette possibilité est prévue dans les
contrats de partage et de vente d’immeuble.
- La révision : La loi elle-même impose dans certains cas la révision du contrat. Ce qui
revient en pratique à une révision du prix lésionnaire à la hausse. Ce sont les cas
prévus par les lois des 8 juillet 1907 à propos de la vente d’engrais, et 11 mars 1957
relative à la cession des droits d’exploitation des auteurs.

 L’ESSENTIEL
77
Tout contrat suppose un objet. Cependant il faut distinguer l’objet du contrat, qui est
l’opération juridique que les parties entendent réaliser et l’objet de l’obligation
contractuelle, faisant référence aux prestations prévues au contrat.
EXERCICE D’APPLICATION
78
Contrôle de connaissance

Répondez vrai ou faux. Justifiez

1- Le contrat n’est valablement formé que si la chose existe au moment de sa


conclusion
2- Un corps est dit certain lorsqu’on est sûr de son existence au moment de la
conclusion
3- S’agissant d’une chose de genre ; la détermination est établie par cela seul que
l’objet est désigné
4- Tenu de fournir 15 tonnes de riz, je suis libéré si je fourni 15 tonnes de riz.
5- La lésion est une cause de rescision pour lésion

Cas pratique

Lagrinta a reçu la succession de son père de très nombreux biens, dont un terrain
situé à Marcory, qu’il décide de vendre le terrain à 5000000 FCFA. Peticouto ; un
habitant du quartier se porte acquéreur au prix fixé. Dans la foulée, il le revend à
50000000 FCFA. Une semaine après la transaction, Lagrinta est informé par un
expert immobilier que la villa vendue coute en en réalité 35000000 FCFA.

Lagrinta voudrait dénoncer le contrat, que peut-il invoquer ?

79
SECTION IV : LA CAUSE DANS LES OBLIGATIONS CONTRACTUELLES

C’est la 4e condition exigée par l’article 1108 du code civil ; en pratique ce sont les
articles 1131 à 1133 qui réglementent la cause. Ces articles invalident les obligations
sans cause, celles qui sont fondées sur une cause illicite ou sur une fausse cause.
Sont illicites les causes contraires à la loi, à l’ordre public et aux bonnes mœurs.

I : La notion de cause
Au sens général, la cause c’est la raison pour laquelle l’on contracte. Le but que les
parties visaient en concluant le contrat. De telles raisons sont par essence très
variables. Déjà en droit romain l’on distinguait deux sortes de cause :
- La cause du contrat : c’est la raison, les mobiles lointains qui ont déterminés les
parties à conclure le contrat : c’est la cause moderne
- La cause de l’obligation contractuelle : La raison pour laquelle le contractant assume
son obligation : c’est la cause classique. Ex : si l’acheteur paye le prix c’est pour avoir
la propriété de la chose achetée. Si le vendeur s’oblige à transférer la propriété c’est
pour recevoir le prix.
Les juristes du 18e et 19e siècle, imbus d’individualisme et de liberté n’ont pas voulu
permettre au juge de scruter la psychologie des contractants. Ils ont donc refusé de
prendre en compte la cause du contrat, c'est-à-dire les mobiles lointains qui ont
motivés les parties et ils ne retiennent que la cause de l’obligation. Cependant la
doctrine et la jurisprudence moderne ont peu à peu réintroduit la notion de cause du
contrat car elle leur paraissait utile. Maintenant le droit positif fait coexister les deux
notions de cause c'est-à-dire la cause classique et la cause moderne.

§ 1 : La notion classique de cause : la cause objective

La cause classique c’est la raison pour laquelle les parties assument leurs obligations
contractuelles. Ce but immédiat (causa proxima) s’oppose aux raisons lointaines, aux
motifs lointains qui ont poussés les parties à contracter. Ces motifs s’appellent causae
remotae. Cette cause classique qui est immédiate est aussi appelée cause objective
car elle se distingue des motivations individuelles des parties. Cette cause s’impose
80
aux contractants car liée aux différents types de contrats conclus. Cette cause est dite
objective car elle est la même pour un même type de contrat donné. Ainsi dans les
contrats synallagmatiques la cause de l’obligation de l’une des parties est l’obligation
assumée par l’autre partie. Ex : Si l’acheteur paye c’est pour avoir le bien. Si le vendeur
cède son bien c’est pour avoir de l’argent.
Dans tous les contrats de vente cette cause est la même pour toutes les parties
(acheteurs et vendeurs).
Ex : Dans les contrats réels la cause de l’obligation assumée par l’une des parties est
l’obligation assumée l’autre. Ainsi dans le contrat de dépôt si le dépositaire a
l’obligation de restituer le bien déposé c’est parce que le déposant lui a antérieurement
remis cette chose. Dans tous les contrats de dépôts, cette obligation est la même pour
tous les déposants et tous les dépositaires.
Dans les contrats à titre gratuit, la cause de l’obligation de la partie qui consent les
sacrifices sans contrepartie réside dans sa volonté de gratifier c'est-à-dire son intention
libérale.

Cette notion classique de cause doit s’entendre de la contrepartie que toute personne
qui assume une obligation, est en droit d’attendre. C’est dans ce sens que le juge
moderne l’utilise.

§ 2 : La notion moderne de cause


La cause moderne, ce sont les raisons personnelles, les motifs individuels qui ont incité
les parties à conclure. Ces mobiles lointains sont ainsi appelés car ils viennent après
la cause immédiate, dite encore cause classique. Cette cause moderne est aussi
appelée cause subjective car elle varie d’un type de contrat à l’autre et d’un contractant
à l’autre. Ainsi, dans un même contrat synallagmatique comme la vente, il y a pour une
même personne, plusieurs causes modernes possibles : le vendeur vend pour avoir
de l’argent, c’est la cause classique. Mais que va-t-il faire de cet argent ? Le placer
pour spéculer, acheter une maison ou payer un tueur à gage ? Toutes ces différentes
raisons sont des causes modernes possibles.
L’acheteur achète pour avoir la propriété de la chose, c’est la cause classique. Que
va-t-il faire de cette chose ? La revendre pour spéculer, l’utiliser pour son propre
compte ou la donner à un tiers ? Ces différentes hypothèses sont des causes
81
modernes possibles. La doctrine a donné plusieurs noms à la cause moderne. Elle est
appelée tantôt par certains auteurs cause du contrat, par opposition à la cause de
l’obligation. D’autres l’appellent cause subjective. Elle est aussi appelée mobil ou motif
lointain. La jurisprudence désigne la cause moderne sous le nom de cause impulsive
et déterminante.

II : Le régime juridique de la cause


Les deux notions de cause sont utilisées en droit positif. La cause classique est un
moyen de protection de l’intérêt particulier des contractants, tandis que la cause
moderne est un moyen de protéger l’intérêt général.

§ 1 : La cause classique, moyen de protection des intérêts particuliers


A- La fonction de la cause classique dans la jurisprudence
Le juge utilise la cause classique comme un moyen de justice commutative. Elle
permet de protéger l’intérêt des parties au contrat. Ainsi le vendeur n’accepte de céder
sa chose que parce que l’acheteur lui versera un prix compensant cette perte.
L’acheteur n’accepte de se départir de son argent que parce que le vendeur lui
remettra une chose de valeur équivalente. Il s’introduit dans le débat l’idée
d’équivalence des prestations. L’obligation assumée par une partie contractante n’est
vraiment causée que si l’obligation assumée par l’autre compense de manière
satisfaisante la première. L’existence d’un déséquilibre sérieux entre les prestations
revient pour la partie victime de ce déséquilibre à consentir une obligation sans cause,
c'est-à-dire en fait sans contrepartie et le juge moderne annule la convention pour
absence de cause. (Civil 20 Fev. 1973, au Dalloz 1974, p37). (Civil 18 Avril 1953, au
Dalloz, 1953, p403). La nullité encourue est une nullité relative.
B- La preuve de l’existence de la cause
Il faut distinguer deux hypothèses : Les cas généraux et les cas de billets non causés
1- Les cas généraux :
- Pour les contrats à titre gratuit la cause de l’obligation de celui qui donne réside
dans son intention libérale. Cette cause se confond donc avec son consentement.
Prouver le consentement revient à prouver l’existence de la cause.
- Pour les contrats synallagmatiques, les différentes causes sont apparentes car les
obligations de chaque partie se servent mutuellement de cause. C’est donc à celui qui
malgré cette apparence veut prouver l’absence de cause d’établir cette preuve.
82
- Dans les actes unilatéraux constatés par écrit et mentionnant la cause, l’écrit vaut
preuve de l’existence de la cause de l’obligation. C’est donc au débiteur qui conteste
cet écrit de prouver qu’en réalité la cause de l’obligation n’existe pas.
Dans toutes ces hypothèses, c’est au moment de la formation du contrat qu’il faut se
placer pour apprécier l’existence de la cause. (Commercial 30Juin 1987, au bulletin
civil, 4e partie, N°163). Cette preuve doit se faire par écrit. Car en vertu de l’article 1341
du code civil, l’on ne peut prouver outre et contre un écrit que par écrit.

2- Les cas de billets non causés


Ce sont des titres qui n’indiquent pas leur cause.
Exemple : reconnaissance de dette.
Dans ce cas la solution vient de l’article 1132 du code civil : « la convention n’en est
pas moins valable quoique la cause majeure n’en soit pas exprimée. » Cet article se
fonde sur l’existence de l’acte écrit pour présumer l’existence de la cause. C’est donc
au débiteur qui conteste l’existence de cette obligation de démontrer que sa cause
n’existe pas (civil, 1er Octobre 1986, au bulletin civil 1986, 1ere partie, N°230). Cette
preuve peut se faire par tous moyens.

§ 2 : La cause moderne : moyen de protection de l’intérêt général

A- Le rôle de la cause moderne dans la jurisprudence


Les mobiles lointains, les motifs individuels et subjectifs jouent un rôle précis dans la
jurisprudence moderne. Ils assurent la protection de l’intérêt général et permettent au
juge de vérifier la moralité et la licité des contrats, but que la cause classique ne permet
pas d’atteindre. Quand la cause d’un contrat est contraire à la loi, à la morale et à
l’ordre public, la cause moderne permet au juge appliquant l’article 1131 du code civil
d’annuler le contrat. Le contrat est annulé pour cause illicite ou pour cause immorale.

B- La preuve du caractère illicite et immoral de la cause


On entend par cause illicite et immorale non seulement les causes contraires à la loi,
mais aussi celles contraires à la morale et à l’ordre public. Le demandeur en nullité
doit démontrer :
- Qu’il a été déterminé par un motif illicite ou immoral
- ce motif illicite ou immoral doit-il être connu de l’autre partie ?
83
1- La preuve du caractère illicite ou immoral du motif
Avant de prouver le caractère illicite ou immoral de la cause, il faut démontrer que ce
mobile a été déterminant. Pour le juge est déterminant le motif sans lequel les parties
n’auraient pas contracté : c’est la cause impulsive et déterminante du contrat. Elle
s’apprécie au moment de la conclusion du contrat.
En ce qui concerne la preuve du caractère illicite ou immoral de la cause, initialement
le juge avait adopté le système de la preuve intrinsèque c'est-à-dire que le caractère
illicite ou immoral de la cause doit transparaître dans le contrat sauf pour les contrats
à titre gratuit. Une telle exigence ne protège pas l’intérêt général car les parties ne
songeraient pas à révéler dans leur contrat l’immoralité de leurs intentions. C’est ce
qui explique le revirement de jurisprudence ultérieur. En effet, la Cour de Cassation
admet le système de la preuve extrinsèque, système dans lequel l’illicéité ou
l’immoralité peut être établie par tous moyens notamment, par présomption ou
témoignage. (Civil 2 janv. 1907, au Dalloz, 1907, p137)

2- Le mobile illicite ou immoral doit-il être connu de l’autre partie ?


Il faut faire une distinction :
- Quand le contrat attaqué est un contrat à titre gratuit, la doctrine majoritaire
considère que la nullité doit être acquise même quand l’autre partie a ignoré le motif
illicite. La raison d’une telle solution est que la partie innocente ne subit pas une perte
mais un simple manque à gagner
- quand le contrat est à titre onéreux, la jurisprudence et la doctrine refusaient la
nullité quand l’une des parties a ignoré la fin immorale ou illicite de l’autre partie. (Civil,
4 janv. 1956 au JCP 1956 2e partie N°10008). Mais aujourd’hui, cette solution n’est
plus admise par la jurisprudence, qui a décidé dans un arrêt du 07 Octobre 1998(cass.
1ère civ. 7 Oct. 1998, D. 1998. 563 ; JCP 1998.II. 10202) qu’un contrat peut être annulé
pour cause illicite ou immorale même lorsque le motif qui a déterminé l’une des parties
à conclure ce contrat, n’a pas été connu de l’autre. La solution présente l’avantage
d’être protectrice de l’intérêt général.

 L’ESSENTIEL

84
La cause est la raison pour laquelle les parties contractent. On distingue deux
types de cause : La cause classique ou cause objective et la cause moderne.
La cause classique, c’est la raison pour laquelle les parties assument leurs
EXERCICE D’APPLICATION
85
Contrôle de connaissance

1- Quelles sont les différentes conceptions de la cause ?


2- Quel est l’intérêt en droit positif de la notion de cause dans les obligations
contractuelles
3- Expliquez l’adage « Nemo auditur ».

86
CHAPITRE 2 : LES SANCTIONS DES CONDITIONS DE FORMATION DES
CONTRATS : LES NULLITÉS

La sanction des irrégularités commises dans la formation des contrats est une sanction
répressive car le contrôle se fait à posteriori. Cette sanction répressive s’appelle la
nullité.

Section 1 : Cas de nullité et condition de mise en œuvre


§ 1 : Les généralités : la notion de nullité
La nullité peut se définir comme l’anéantissement rétroactif du contrat c'est-à-dire son
effacement pour le passé, le présent et l’avenir pour non-respect des conditions (fond
et forme) de formation de ce contrat. Le contrat nul est considéré comme n’ayant
jamais existé et la cause de la nullité doit être concomitante à la formation du contrat.
La nullité doit être distinguée de certaines notions voisines :
- Elle se distingue de la résolution : dans les 2 cas il y a anéantissement rétroactif du
contrat mais dans la nullité, l’irrégularité doit être concomitante à la formation du
contrat, dans la résolution l’irrégularité est postérieure à la formation du contrat
(inexécution des obligations contractuelles notamment). La résiliation se rapproche de
la résolution : dans les deux cas l’irrégularité est postérieure à la formation du contrat,
mais la résiliation n’intéresse que les contrats à exécution successive et anéantie le
contrat seulement pour l’avenir.
- Elle se distingue de l’inopposabilité : Dans les deux cas l’irrégularité est
concomitante à la formation du contrat mais dans la nullité, le contrat est anéanti à
l’égard de tous, alors que dans l’inopposabilité, le contrat n’est valable qu’entre les
parties il n’a aucun effet à l’égard des tiers. L’inopposabilité sanctionne l’inobservation
d’une condition protectrice des intérêts des tiers. Ex : formalités de publicité.
- la nullité se distingue de la caducité : dans la nullité le vice se situe au moment de la
formation du contrat, dans la caducité un acte valablement formé est rendu inefficace
par un évènement extérieur, postérieur à la conclusion du contrat, évènement

87
indépendant de la volonté de l’auteur de l’acte. Ex : le prédécès du légataire rend le
legs caduc.
* La nullité peut être textuelle ou virtuelle.
Elle est textuelle quand elle est prévue expressément par un texte.
Au contraire elle est virtuelle quand elle ne résulte d’aucune disposition expresse de
la loi. C’est le juge qui la prononce pour sanctionner une irrégularité jugée importante.
*Il faut distinguer nullité absolue et nullité relative. Avant, le critère de distinction
résidait dans l’importance de la cause de nullité.
Ainsi on considérait qu’il y a nullité absolue quand la cause de nullité est tellement
importante que la formation du contrat est inconcevable. La nullité était relative quand
l’existence de l’irrégularité ne peut pas faire obstacle à la formation du contrat.
Aujourd’hui, ce critère est dépassé et un autre critère est utilisé : la finalité poursuivie
par la règle violée. Ainsi il y a nullité relative quand la condition violée assure la
protection d’un intérêt particulier ou privé, et il y a nullité absolue quand la règle violée
est protectrice de l’intérêt général.

§ 2: Les conditions de mise en œuvre de la nullité


Cette étude pose deux problèmes :
- les moyens de mise en œuvre et la détermination du titulaire du droit d’agir
- l’extinction du droit d’agir

A : Les moyens et les titulaires du droit d’invoquer la nullité


Ces deux problèmes n’ont pas la même importance.
1- les moyens pour invoquer la nullité :
Il faut distinguer la voie d’action et la voie d’exception.
- Il y a voie d’action quand le demandeur prend l’initiative d’agir en nullité avant que
l’exécution de l’obligation ne lui soit demandée. Ici le demandeur agit à titre préventif.
- Il peut agir par voie d’exception : Ici il attend que le créancier lui demande d’exécuter
l’obligation dont il est tenu. Il invoquera alors la nullité comme moyen de défense pour
justifier son refus d’exécuter.
2- Le problème du titulaire du droit d’agir en nullité :
La réponse dépend du point de savoir s’il s’agit d’une nullité absolue ou relative.
a) Les personnes pouvant invoquer la nullité absolue :
Deux groupes peuvent s’en prévaloir :
88
- toutes les personnes intéressées
- certains agents de l’autorité publique

 Les personnes intéressées :


Le droit d’agir en nullité absolue n’est attribué qu’au seul demandeur intéressé. Le
demandeur est intéressé quand le contrat litigieux peut avoir un effet quelconque à
son égard. C’est le cas pour les parties et les personnes auxquelles elles sont
assimilées (ayants cause universel et à titre universel : ce sont ceux qui acquièrent
tout le patrimoine ou une partie du patrimoine de leur auteur (défunt) c.à.d. les
héritiers), les ayants cause à titre particulier (ils acquièrent un bien ou un droit de leur
auteur : l’acheteur est l’actp du vendeur ; le donataire est l’actp du donateur), les
créanciers chirographaires si le contrat leur porte préjudice. Les tiers complètement
étrangers au contrat (pénitus extranéi) ne peuvent être considérés comme personnes
intéressées.

 Les agents de l’autorité publique


En vertu de l’article 2 du code de procédure civile, le Ministère Public peut invoquer
la nullité absolue quand l’ordre public est intéressé. Le droit d’invoquer cette nullité
appartient aussi au juge dans tous les cas où la règle privée tend à violer l’ordre public
ou l’intérêt général.

b) Les personnes pouvant invoquer la nullité relative


Le droit d’agir appartient au seul contractant dont la nullité protège l’intérêt. En matière
contractuelle c’est par exemple la personne dont le consentement est vicié qui peut
se prévaloir de la nullité. Ce droit appartient indirectement à d’autres personnes. La
nullité pour minorité peut être invoquée par le représentant légal du mineur ; la nullité
pour insanité d’esprit, par le représentant de l’incapable majeur Les ayants cause
universels ou à titre universels ou à titre particulier peuvent bénéficier du droit d’agir.

B : l’extinction du droit d’invoquer la nullité


Ce droit peut s’éteindre par confirmation ou par prescription

1- La confirmation

89
C’est l’acte par lequel une personne titulaire du droit d’invoquer la nullité renonce à
s’en prévaloir. Trois conditions cumulatives sont nécessaires pour la validité d’un tel
acte :
- Le confirmant doit avoir connaissance de la cause de nullité entachant l’acte
- II doit avoir l’intention de réparer ce vice
- La confirmation doit être exempte de vice
La confirmation peut être expresse ou tacite. Elle est expresse lorsqu’elle résulte d’un
acte établi en ce sens (art 1338 du code civil), tacite quand elle résulte de tout
comportement révélant l’intention du confirmant de renoncer à son droit d’agir. La
confirmation n’est pas possible dans tous les cas de nullité. Elle est admise pour les
cas de nullité relative. Il est normal que la personne protégée puisse renoncer à la
protection qui lui est accordée. La confirmation est exclue en principe en cas de
violation d’une règle protégeant l’intérêt général. La raison est que le droit d’agir en
nullité absolue est indisponible.
Il découle de l’article 1338 du code civil qu’entre les parties au contrat la confirmation
empêche le confirmant de se prévaloir ultérieurement de la nullité. L’acte nul est donc
rétroactivement validé. La confirmation n’est pas opposable aux tiers car l’article 1338
précise que la confirmation ne peut nuire aux tiers.

2- la prescription
L’écoulement d’un certain délai peut éteindre l’action en nullité absolue et relative.

a- En ce qui concerne les actions en nullité :


- la nullité absolue : à l’origine l’on avait considéré qu’elle était imprescriptible. Mais
aujourd’hui, on considère qu’une telle action est prescriptible. Ce délai est de 30 ans
(requête, 5 Mai 1879, au Dalloz 1880, 1ere partie, p145).
- la nullité relative : l’article 1304 du code civil dispose que le délai de prescription est
de 10 ans sauf brefs délais légaux.
Ainsi l’article 1676 du code civil enferme l’action en rescision pour lésion en cas de
vente d’immeuble dans un délai de deux ans. Ce délai court à compter de la signature
de l’acte. La loi peut elle-même retarder le point de départ du délai. Ainsi en cas de
violence, le délai court du jour de la cessation de la violence.
En cas d’erreur ou de dol, le délai court du jour où ces vices sont découverts.

90
Pour les actes faits par les interdits et les mineurs, le délai court pour le mineur du
jour de la majorité et pour l’interdit du jour où l’interdiction est levée.
L’on admet que l’action en nullité se prescrit parce que l’on veut consolider certaines
situations de fait. Car au bout d’un certain temps, il devient au plan social beaucoup
plus difficile de discuter de la régularité d’un acte que de maintenir l’acte irrégulier.

b- L’exception de nullité : le droit de se prévaloir de l’exception de nullité absolue ou


relative est imprescriptible (requête ,21 juin, 1880, au Dalloz 1881 1ere partie, p108)

Section 2 : Les effets de la nullité


La nullité qu’elle soit relative ou absolue entraîne la destruction rétroactive du contrat.
Cette destruction peut être partielle ou totale et engager la responsabilité de l’un des
cocontractants.
§ 1 : l’anéantissement rétroactif du contrat
A : La situation entre les parties
1- le principe
L’effet normal de la nullité est de priver le contrat de tout effet juridique. Cet effet est
dit rétroactif car il opère à la fois pour le passé, le présent et pour l’avenir.
Tout se passe alors comme si le contrat n’avait jamais existé. Il faut rétablir les parties
dans leur situation antérieure à la conclusion du contrat. C’est ce qui se produit quand
les parties ont eu à exécuter le contrat.
En cas d’annulation précédant toute exécution, il faut maintenir les choses en leur état,
le contrat n’a plus à être exécuté.
Dans le cas où le contrat a été exécuté, l’annulation rétroactive conduit les parties à
restituer réciproquement les prestations effectuées. Quand cette restitution en nature
est impossible la restitution a lieu pour tout ou partie en valeur. (Cassation
commerciale 29 Fév. 1972 au Dalloz 1972 p623).
Par ailleurs s’il y a des impenses c'est-à-dire des dépenses effectuées pour conserver
le bien vendu, celles-ci sont intégralement restituées si elles ont été nécessaires. Elles
ne sont restituées que dans la mesure de la plus-value si elles ont été utiles. En fait
elles ne sont pas remboursées si elles ont été somptuaires.
2- Les limites du principe
Dans certains cas le droit à restitution des parties en cas d’annulation est exclu ou
simplement réduit.
91
a- Cas où la restitution est réduite
L’article 1312 du code civil réduit l’obligation de restitution pesant sur les incapables.
Ceux-ci ne restituent que la part de prestation qui a tournée à leur profit c.à.d. qui leur
procure un enrichissement, qu’ils ont conservé. Ex : le mineur a utilisé les fonds pour
éponger une dette, pour ouvrir un compte bancaire, une affaire etc.

b- Cas où la restitution est exclue


- Dans certains cas l’obligation de restitution est purement et simplement supprimée.
Ainsi la jurisprudence considère que l’acquéreur d’une chose perdue par cas fortuit
peut se voir restituer le prix sans avoir à rendre la chose. L’on considère que par le fait
de l’annulation le vendeur est resté propriétaire de la chose. (Civil 1 er Déc. 1967 au
Bulletin civil 1967 1ere partie N° 358).
- Dans les contrats immoraux l’on exclu aussi la répétition des prestations au nom de
l’adage nemo auditur. Cette règle ne joue cependant que pour les seuls contrats
immoraux à l’exclusion des contrats illicites. En réalité seule l’action en répétition est
exclue, la règle nemo auditur ne fait pas obstacle au droit des parties au contrat
immoral d’invoquer la nullité. Cette règle ne concerne que les contrats à titre onéreux
à l’exclusion des libéralités.
- Dans les contrats successifs, la restitution est impossible en pratique en raison de la
nature même des prestations qui s’échelonnent dans le temps : contrat de travail, de
bail. Après un certain temps on ne peut pas effacer le passé. Dans ce cas l’annulation
opère sans rétroactivité. Une indemnité compensatrice est due à celui qui a exécuté
la prestation non restituable. Son montant est librement fixé par le juge.
- l’article 549 du code civil permet au possesseur de conserver les fruits du bien qui
doit être restitué, s’il est de bonne foi c.à.d. s’il a ignoré le vice qui a motivé l’annulation
de l’acte. Ex : le possesseur d’un terrain peut conserver les récoltes faites,

B : La situation à l’égard des tiers


1- Le principe
L’annulation rétroactive peut produire aussi effet à l’égard des tiers au contrat s’il y a
eu exécution au préalable. Ainsi le sous -acquéreur d’un bien dont le vendeur a été lui-
même acquéreur dans un contrat initial, peut subir les effets de l’annulation rétroactive
de ce contrat initial. Cela aura pour conséquence de faire tomber le contrat liant le
92
sous- acquéreur à l’acquéreur initial. Son contrat d’achat tombe parce que son vendeur
est sensé avoir vendu quelque chose dont il n’était pas propriétaire.
2- Les limites du principe
-Certaines règles générales du droit font échec à l’effet rétroactif du contrat à l’égard
des tiers.
Ex : l’obligation de garantie : Celui qui doit garantie à un tiers ne peut par son action
évincer ce tiers dans le droit transmis. L’obligation de garantie qu’il doit à ce dernier
s’y oppose.
-Des soucis de sécurité juridique aboutissent aussi à faire échec à l’effet rétroactif de
l’annulation à l’égard des tiers. Il est admis que les droits consentis aux tiers en vertu
d’actes d’administration sont maintenus. Ainsi le vendeur d’un immeuble dont le
contrat de vente est annulé devra respecter les contrats de location conclus par son
acheteur.
- en matière mobilière l’article 2279 du code civil protège le tiers possesseur de bonne
foi et paralyse la restitution.
- en matière d’acquisition d’immeuble, l’acquéreur de l’immeuble peut se fonder sur la
propriété apparente (fondée sur sa bonne foi et la théorie de l’apparence) pour refuser
de restituer l’immeuble.

§ 2 : L’étendue de la nullité du contrat et la responsabilité pour annulation du contrat


A- L’étendue de la nullité du contrat
Quand l’annulation du contrat est admise elle produit un effet rétroactif. Le
problème est de savoir quand cette annulation est totale ou seulement partielle. La
question est facile pour certaines causes de nullité : consentement, incapacité,
objet et cause. Ainsi en cas de nullité pour minorité, c’est le contrat tout entier qui
est annulé. Il y a par contre problème quand la nullité n’affecte que l’une des
clauses du contrat. Ce genre de nullité peut être partielle ou totale. . Ainsi l’article
7 de la loi ivoirienne sur les donations entre vifs et les testaments prévoit que dans
les actes à titre gratuits les conditions impossibles contraires aux lois ou à l’ordre
public sont réputées non écrites. Elles seules sont donc annulées. Au contraire
l’article 1172 du code civil prévoit que dans les actes à titre onéreux toute condition
impossible contraire aux bonnes mœurs et à l’ordre public est nulle et rend nul le
contrat.
93
-. Si les parties entendaient faire de la clause un élément important du contrat, le
contrat est annulé dans son entier car la clause est considérée comme la cause
impulsive et déterminante du contrat.
(Requête, 3 juin 1863, au Dalloz 1863, 1ere partie, p421- au Sirez 1864, 1ere partie,
p269).
Si la clause n’a pas été la cause impulsive et déterminante du contrat, elle seule est
annulée et le contrat subsiste pour le reste. (Civil, 3e ch 6 juin 1972, au Dalloz 1373,
p151). Maintenant le juge se reconnaît le droit d’apprécier la réalité de l’affirmation
faite par les parties. Et c’est en définitive sa conviction qui l’emporte.

B : La responsabilité pour annulation du contrat


Le Problème : l’annulation du contrat porte préjudice au défendeur à l’action en nullité.
Il y a d’une part un manque à gagner concernant le profit qu’il escomptait en tirer et
d’autre part il peut avoir exposé des frais pour préparer la conclusion du contrat. Peut-
il obtenir réparation de ce manque à gagner et de cette perte ?
Aujourd’hui le principe de cette réparation est admis et l’on se fonde pour cela sur une
faute délictuelle du demandeur. Celui- ci aurait violé l’article 1382 du code civil. Pour
obtenir réparation il faut prouver la faute du demandeur en nullité. Celle-ci qui consiste
non pas à avoir agit en nullité, mais à avoir conclu le contrat alors que l’on connaissait
la cause de la nullité quand l’autre partie ne le pouvait pas.

94
EXERCICE D’APPLICATION

Contrôle de connaissance

1- Quelles différences établissez-vous entre les notions suivantes : Nullité, résolution,


résiliation ; Nullité de droit et nullité facultative.

Répondez par vrai ou faux et justifiez.


2- Le juge ne peut soulever d’office la nullité.
3- La distinction entre la nullité absolue et la nullité relative repose sur la gravité du vice
dont le contrat est atteint.
4- La rétroactivité de la nullité ne s’applique pas de plein droit.

Cas pratique

M. Coutofia décide d'acheter un immeuble dans une petite ville de province,


officiellement en raison des avantages fiscaux que cela va lui procurer, officieusement
il a l'intention d'installer dans l'un des deux appartements non loués de l'immeuble un
atelier de fausse monnaie.
La vente est conclue avec M. Lagrinta, qui reçoit pour son immeuble un prix de 30
millions FCFA.
Peu de temps après, Édouard apprend de son avocat qu'il ne pourra pas bénéficier
des avantages fiscaux envisagés par l'achat de l'immeuble.

Cependant, son atelier de fausse monnaie fonctionne à merveille et les loyers pour la
location de six appartements de son immeuble qu'il perçoit, lui permettent de vivre
sans problème, bien qu'ils ne soient pas suffisants pour permettre à Coutofia
d'entretenir l'immeuble, qui au fil des années se dégrade.
D'autre part, Lagrinta, engagé en politique est devenu maire de la ville et c'est avec
stupeur qu'il a appris que Coutofia avait fait de son ancien immeuble un atelier de
fausse monnaie, ainsi il souhaite engager des poursuites contre lui et obtenir nullité de
la vente pour récupérer l'immeuble et en faire des logements sociaux.

95
TITRE III : LES EFFETS DU CONTRAT
Les effets du contrat sont régis par un double principe : entre les parties c’est la
force obligatoire du contrat. Le contrat est sans effet à l’égard des tiers : c’est le
principe de l’effet relatif du contrat.

CHAPITRE I : La force obligatoire du contrat


La force obligatoire du contrat implique que les parties respectent le lien
contractuel. En effet sa violation est sanctionnée par la loi. Il convient d’analyser
d’une part le principe et les sanctions en cas de violation de la force obligatoire
d’autre part.
Section 1 : les principes de la force obligatoire et de l’irrévocabilité du contrat
L’application de ces principes pose un certain nombre de problèmes qu’il
convient d’analyser après celle du principe.
§ 1 : L’analyse des principes de la force obligatoire et de l’irrévocabilité du
contrat
I- Le principe de la force obligatoire du contrat :

Selon l’article 1134 al.1 du code civil : « les conventions légalement formées
tiennent lieu de lois à ceux qui les ont faites ». Cet article met sur le même pied
la loi et la convention si celle-ci est faite dans la légalité. Cet article pose le
principe de l’effet obligatoire du contrat entre les parties. Ce principe signifie que
non seulement les parties au contrat doivent exécuter les obligations qui leur
incombent mais aussi, qu’elles peuvent y être contraintes par l’autorité publique.
Ce principe veut aussi dire que toutes les obligations nées du contrat et seulement
elles doivent être exécutées par les parties. La volonté est donc à la fois la source
et la mesure de l’obligation contractuelle.

96
Selon l’article 1134 du code civil, les conventions doivent être exécutées de bonne
foi par les parties. Le juge en déduit qu’il pèse sur les parties un devoir de loyauté,
et même parfois un devoir de coopération dans l’exécution du contrat.
III- Le principe de l’irrévocabilité du contrat

A- La position du principe
L’article 1134, al 2 du code civil prévoit que les conventions ne peuvent être
révoquées que du consentement mutuel des parties et pour les causes que la loi
autorise. Il résulte de l’article précité que les parties ne peuvent mettre fin au
contrat que de leur consentement mutuel et seulement si la loi le permet. En dehors
de ces deux possibilités, les parties n’ont pas le droit de mettre fin au contrat
conclu. Ce principe de l’irrévocabilité des contrats est un corollaire du principe
de la force obligatoire du contrat qui lui-même est une conséquence du principe
de l’autonomie de la volonté.

B- Les exceptions au principe de l’irrévocabilité des contrats


L’article 1134 du code civil prévoit deux groupes d’exceptions :
- La révocation par le consentement mutuel des parties
- Les cas d’une révocation autorisée par la loi.
1- La révocation par le consentement mutuel des parties
Cette possibilité résulte de l’article 1134 précité. C’est la volonté conjointe des
parties de se délier réciproquement de l’obligation d’exécuter le contrat conclu.
2- Les causes de révocation autorisées par la loi
L’article 1134 dispose aussi que les conventions sont révocables pour les causes
que la loi autorise :
- dans les contrats synallagmatiques, la loi prévoit la résolution ; C’est en fait
la possibilité qui est laissée à la partie créancière d’une obligation inexécutée de
demander la résolution judiciaire du contrat.

97
- De même il est reconnu aux parties à certains contrats, la faculté de rupture
unilatérale : c’est le cas des contrats à durée indéterminée (contrats de travail),
des contrats à durée déterminée dans lesquels joue l’intuitu personae : si la
confiance ne règne plus entre les parties, il est normal de permettre à l’une
d’elles de prendre l’initiative de la rupture (contrat de mandat par exemple).
- les parties peuvent prévoir elles même dans le contrat une rupture unilatérale
du contrat, mais ce droit n’est pas totalement discrétionnaire.

§ 2: les problèmes liés à l’application du principe de la force obligatoire du


contrat

Nous avons deux problèmes :


- La réalité des clauses contractuelles : c’est le problème de la simulation et
de l’interprétation des contrats
- La révision des contrats

I- Les problèmes de la simulation et de l’interprétation des contrats

Ici la question est de savoir si la volonté exprimée par les parties correspond à leur
volonté réelle. Dans le cas de la simulation c’est volontairement que les parties
dissimulent leur volonté réelle derrière une apparence trompeuse. Dans
l’interprétation des contrats les difficultés quant à la réalité des clauses
contractuelles ne sont pas connues par les parties.

A) La simulation
1) Définition et présentation

Il y a simulation quand les parties à un contrat dissimulent leur volonté derrière


une fausse apparence. 2 actes sont alors conclus : l’un est visible par tous :
c’est l’acte apparent ou acte ostensible. L’autre n’est connu que des parties au
contrat : c’est l’acte secret ou encore contre-lettre. Par la contre-lettre les
parties entendent faire échec aux effets de l’acte apparent. La simulation peut
revêtir plusieurs formes :
 La convention apparente peut être complètement fictive. Dans ce cas l’acte
secret détruit entièrement l’acte apparent. Ex : Les parties peuvent
consentir dans l’acte apparent une vente alors que dans l’acte secret le
vendeur et l’acheteur conviennent que le premier reste propriétaire.
98
En fait les parties font semblant de faire sortir le bien vendu du patrimoine du
vendeur alors qu’il y reste.
 Il peut y avoir aussi un déguisement c’est-à-dire que les parties créent
réellement une nouvelle situation juridique dans l’acte secret. Ex : la
donation.
Dans un acte apparent elles feignent de conclure une vente. Le déguisement
est le plus souvent motivé par le souci de frauder le fisc dans ce premier genre
de déguisement ou par le déguisement total car il porte sur la nature du contrat.
Ce déguisement peut être partiel, dans ce cas il porte sur une clause du contrat.
Le plus souvent ce sont des clauses pécuniaires.
 La simulation peut être réalisée par interposition de personnes. Dans ce cas
les parties au contrat s’arrangent pour déplacer les effets d’un contrat du
patrimoine d’une personne à celui d’une autre personne. Ex : l’article de la
loi ivoirienne sur la minorité interdit au tuteur de se porter acquéreur des
biens du mineur. Le tuteur peut dans un acte ostensible simuler la vente du
bien à une tierce personne tandis que dans un acte secret c’est en fait lui-
même qui achète et c’est donc dans son patrimoine que le bien vendu va
produire ses effets ; le tiers n’était qu’une personne interposée.

2-Le régime juridique de la simulation.


a. Dans les rapports entre les parties
En principe la simulation n’est pas par elle-même une cause de nullité des
conventions. L’opération juridique réalisée n’est donc pas anéantie pour le fait de
la simulation. La fidélité au principe du consensualisme impose cette
conséquence et l’art. 1321CC la consacre : « les contre-lettres ne peuvent avoir
leurs effets qu’entre les parties contractantes. Elles n’ont point d’effet contre les
1/3 ».
Le fondement d’un tel principe est que la contre lettre reflète le véritable accord
de volonté des parties. Cependant même entre les parties les contre lettres ne sont
pas toujours efficaces. Elles ne le sont que si elles remplissent les conditions de
validité du genre de contrat qui a été conclu. Ex : en cas de vente d’un immeuble
par contre lettre, il faut que l’acte de vente soit notarié. Exceptionnellement
certaines contre lettres peuvent être annulées même dans les rapports entre parties
au contrat. C’est le cas prévu en droit français par l’article1840du code général
des impôts. Cet article annule toute contre- lettre majorant le prix de cession
99
consenti dans l’acte apparent de biens, tels que le fonds de commerce, les
immeubles.
La preuve de la simulation : en pratique quand les parties se prévalent d’une
contre- lettre valable ou attaquent une contre- lettre nulle, elles révèlent
publiquement l’existence d’une simulation. C’est donc au demandeur de l’action
en déclaration de simulation de faire la preuve de cette situation. C’est sur lui que
pèse la charge de la preuve. Cette preuve se fait selon les règles de code civil,
c’est à dire qu’elle se fait par écrit quand l’intérêt en litige dépasse 2500fcfa (art
1341 cc.) De même il faut aussi un écrit si l’acte apparent a été constaté par écrit.
En effet il s’agirait de prouver contre un écrit et cela n’est juridiquement possible
que par écrit. Par exception à ce principe de l’exigence d’un écrit, le demandeur
peut faire la preuve de la simulation par tout moyen dans certains cas : quand il
y a un commencement de preuve par écrit. Quand il y a une impossibilité physique
ou morale de se procurer un écrit. Selon la jurisprudence, quand les simulateurs
ont pour but d’éluder une règle d’ordre public ou de réaliser une fraude.

b) à l’égard des tiers :

L’art 1321 précité dispose que les contre-lettres n’ont pas d’effets contre les 1/3.
Ce texte ne signifie pas que les contres -lettres sont inexistantes pour les 1/3 mais
que les contre -lettres ne nuisent pas aux 1/3, c'est-à-dire qu’elles ne leur sont pas
opposables. Par contre les 1/3 peuvent invoquer une contre- lettre qui leur est
favorable et s’en prévaloir. En pratique un choix est laissé aux 1/3. Ils peuvent
agir selon leurs intérêts : soit ils se prévalent de la situation apparente qui les
arrange en invoquant l’acte ostensible. Soit ils décident de combattre la situation
apparente et favorable en se prévalent de l’acte secret.
La situation du demandeur n’est pas toujours la même au plan procédural. Les
tiers qui se prévalent de l’acte apparent n’ont aucune preuve à fournir. Cet acte
existe matériellement et publiquement, il leur suffit de le produire pour s’en
100
prévaloir. Les tiers qui au contraire se prévalent de l’acte secret doivent combattre
la situation apparente créée par l’acte ostensible. Ils doivent agir en déclaration de
simulation et en tant que tiers, ils peuvent en établir l’existence par tout moyen.
(cvl 3ème ch, 6 nov 1973, au Dalloz 1974, p29, information rapide).

B- l’interprétation des contrats


Ici les parties sans l’avoir voulu conclu un contrat qui est obscur et ambiguë, il
faut après tout en déterminer le sens et les obligations qui en découlent. Cette
opération s’appelle l’interprétation.

1- les règles d’interprétation


Elles sont prévues par les art 1156 à 1164 cc. Le texte de base est l’art 1156cc.
Le principe qu’il prévoit est que l’interprète doit rechercher ce que la volonté des
parties a voulu consacrer, c'est-à-dire leur commune intention. Exemple : dans un
contrat d’assurance les juges s’étaient contentés de rechercher ce qu’avait voulu
l’assuré. Ils avaient ignoré la volonté de l’assureur. La décision a été cassée :
violation de l’art 1156cc. (cvl, 1ère ch, 20 janvier 1970, au Dalloz 1970, Sommaire
p121).
Les art 1157 à 1164 cc apportent des compléments de recettes à la règle posée
par l’art 1156. Ainsi l’art 1157 dispose que quand une clause peut avoir deux
sens dont l’un annule et l’autre valide le contrat, c’est le sens validant le contrat
qu’il faut retenir.
L’art 1158 complète l’art précédent : entre deux sens d’une clause ambiguë
donnant tous les deux effets au contrat, c’est le sens qui convient le plus à la
matière du contrat qu’il faut retenir.
L’art 1159 préconise d’interpréter le contrat en tenant compte de l’usage du pays
dans lequel il est conclu.
L’art 1160 préconise d’intégrer dans les contrats qui ne les mentionnent pas
expressément les clauses qui sont d’usage. Ainsi certaines clauses de styles sont
101
sous-entendu dans les contrats même quand ceux-ci ne les prévoient pas
expressément.
L’art 1161 prévoit que toutes les clauses des conventions s’interprètent les unes
par rapport aux autres. Le sens donné à chaque clause doit tenir compte du sens
général et de l’esprit de l’acte entier.
L’art 1162 prévoit une règle de bon sens. Si malgré tout ce qui précède l’interprète
n’arrive pas à rétablir le sens d’une clause ambiguë et obscure il faut interpréter
le contrat contre le créancier et en faveur du débiteur.
L’art 1163 lui dispose que quand le contrat est rédigé en termes généraux il doit
être interprété de manière restrictive. Ce qu’il faut éviter c’est que dans le doute
une personne soit engagée au-delà de ce qu’elle a voulu. La volonté doit rester la
seule mesure de l’obligation contractuelle.
L’art 1164 pose que si dans la convention les parties ont donné un exemple, il ne
faut pas l’interpréter comme une restriction des engagements.
Dans l’application des arts 1156 et suivants, le juge doit faire preuve de
discernement.
Dans la réalité le principe de la recherche de l’intention commune des parties n’est
pas toujours strictement appliqué par le juge. Celui-ci par souci d’équité
détermine très souvent la fin avant de trouver les moyens de l’atteindre.
Cela se fait parfois au mépris de l’intention commune des parties. Ainsi les juges
ont trouvé dans les contrats de transport des personnes une obligation de sécurité
pesant sur le transporteur au bénéfice du voyageur. En réalité il est peu probable
que les parties aient réellement pensé à une telle obligation (cvl 21 novembre
1911, et 27 janvier 1913, et 21 avril 1913, au Dalloz 1913, 1ère partie, p 249).

2- les pouvoirs des juges dans l’interprétation des contrats


Deux règles importantes sont à retenir dans ce domaine :
- L’interprétation des contrats relève de l’appréciation souveraine des juges
du fond
102
- La Cour de cassation censure les cas de dénaturation
a- l’interprétation des contrats : question de fait
Fondamentalement interpréter le contrat ce n’est pas appliquer une règle
juridique. L’interprétation est une question de fait et ce sont les juges du fond qui
apprécient ces faits. Leur appréciation est souveraine (cvl 2 février 1808, à la
revue trimestrielle de droit cvl, 1972, p249, n° 3).
b- le contrôle de la Cour de cassation
La liberté d’interpréter accordée au juge du fond se limite au seul contrat dont les
clauses sont ambiguës et obscures. Les juges du fond ne peuvent sous prétexte
d’interprétation dénaturer un contrat dont les clauses sont claires et précises. Ils
doivent faire preuve d’honnêteté intellectuelle dans l’application des clauses
contractuelles. Ils doivent donc éviter de porter sur ceux-ci des jugements de
valeur (civil 3ème ch ,27 novembre 1969, à la revue trimestrielle de droit civil
1970, p762). (Commercial 12 mai 1969, au bulletin civil 1969 4 ème partie,
p162).

II: la révision des contrats : la question de l’imprévision


Deux contractants signent un contrat dont l’exécution s’échelonne dans le temps :
c’est un contrat successif. Et les prestations des parties sont fixées compte tenu
des circonstances économiques qui prévalaient au moment de la conclusion du
contrat. Par suite de l’évolution ultérieure de ces circonstances économiques,
l’économie du contrat s’en trouve bouleversée et l’exécution par l’une des parties
de sa prestation, ou l’exécution du contrat devient si onéreuse, qu’à la longue la
partie concernée pourrait être ruinée. La question est alors la suivante : le
contractant défavorisé par les circonstances imprévues peut-il obtenir que soit
révisées les clauses contractuelles ? Il convient de déterminer la notion
d’imprévision, avant d’analyser les réponses de la jurisprudence et de la loi, ainsi
que les aménagements qui peuvent être prévus par les parties.
A- La notion d’imprévision
103
Il y a imprévision lorsque pendant le contrat, les circonstances changent par suite
d’évènements imprévus (guerre, inflation, dévaluation) et bouleversent
l’économie du contrat, et rendent l’exécution du contrat plus onéreuse pour l’un
des contractants. Elle suppose la réunion de plusieurs éléments :
- l’intervention de circonstances postérieures à la conclusion du contrat : c’est un
critère de distinction de l’imprévision et de la lésion. Dans les deux cas il y a
déséquilibre des prestations, mais dans l’imprévision le déséquilibre est postérieur
à la conclusion du contrat et dans la lésion le déséquilibre est concomitant à la
formation du contrat.
- l’exécution plus onéreuse du contrat pour une partie : elle suppose* l’existence
d’un déséquilibre économique provoqué par l’intervention des circonstances
extérieures. Ce déséquilibre doit rendre *l’exécution du contrat plus onéreuse. Si
l’exécution du contrat est rendue impossible et non plus onéreuse, dans ce cas il
n’y a pas imprévision mais cas de force majeure.

B- le problème de la révision des contrats dans la jurisprudence, les textes, et les


clauses contractuelles
1- la position du juge
Sur le problème de la révision, le juge administratif et le juge judiciaire n’ont pas
la même position. La position du juge judiciaire résulte d’un arrêt célèbre ayant
la valeur d’arrêt de principe : arrêt canal de Craponne. Le propriétaire du canal
qui alimentait en eau la plaine d’Arles avait accepté que les riverains du canal s’y
alimentent en eau, moyennant une redevance annuelle de trois soldes. Ce contrat
a été signé au XVIe siècle. Au XIXe siècle les héritiers du propriétaire du canal
se sont rendu compte de la modicité de la redevance et avaient demandé que
celle-ci soit relevée.
Le tribunal et la Cour d’Appel lui ont donné raison mais la cour de cassation a
cassé l’arrêt d’appel au motif que l’on ne peut modifier les clauses contractuelles
pour des raisons d’imprévision (civil 6 mars 1876, au Dalloz 1876, 1ère partie
104
p193). Le juge administratif n’a pas retenu la même solution. Le Conseil d’Etat
contrairement à la solution de la cour de cassation Française a admis la révision
des contrats administratifs. Il consacre ainsi la théorie de l’imprévision en droit
administratif. L’arrêt de principe en la matière est l’arrêt Gaz de Bordeaux. (C E
20 Mars 1916, au Sirey 1916, 3ème partie, p7).

a) Les fondements des positions jurisprudentielles


On avait d’abord suggéré de se fonder sur l’article 1148 du code civil pour
expliquer la révision des contrats. Selon cet article, le débiteur d’une opération
contractuelle victime d’un évènement de force majeure, est libéré de son
obligation à condition que l’évènement ait été imprévisible, insurmontable et
extérieur aux parties. Or ici l’imprévision si elle est extérieure n’est ni
imprévisible, ni insurmontable, le juge a rejeté ce fondement. (Civil 17 novembre
1925, au Dalloz Hebdo. 1926, p35).
Ensuite l’on a suggéré de se fonder dans tous les contrats sur l’existence
d’une clause qui serait tacite et sous entendue. C’est la clause Rebus sic standibus.
Selon cette clause, dans tous les contrats de longue durée, les prestations des
parties ne devraient s’exécuter normalement que si les circonstances de fait qui
ont prévalu au moment de la signature du contrat persistent. Si celles-ci changent
le contrat devrait être révisé. Il semble que ce fondement ait été celui invoqué par
le juge du fond dans l’affaire canal de Craponne. Mais la cour de cassation a rejeté
cette argumentation.
Finalement quelles sont les raisons qui justifient la position respective du
juge administratif et du juge judiciaire ? Dans l’affaire du canal de Craponne le
juge judiciaire, s’est fondé sur l’idée que la révision par le juge des contrats pour
imprévision est économiquement dangereuse, même si elle est moralement
justifiée. Le juge judiciaire redoutait une inflation de révision qui n’aurait pas
manqué de déséquilibrer l’économie. Le juge est un juriste et non un économiste,

105
il se refuse donc de déclencher par une décision juridique un phénomène dont il
ne maîtrise pas les conséquences économiques. Il laisse ce soin au législateur.
Le juge administratif admet la révision au nom du principe de la continuité
du service public.
2/ Le problème de la révision dans les textes
C’est l’article 1134 du code civil qui a posé le principe de la force obligatoire du
contrat. Le contrat est la loi des parties, le juge judiciaire refuse donc de porter
atteinte à ce principe de l’intangibilité des contrats, il considère que l’article 1134
est un principe légal qui suppose des exceptions légales. Cette vision a été
entérinée par le législateur qui d’autorité a modifié certaines clauses
contractuelles. Certaines de ces modifications sont justifiées par le principe de
l’imprévision. D’autres par contre s’expliquent par le souci du législateur de
réorienter l’économie.
Ex : Le législateur est intervenu dans les relations contractuelles des parties en
accordant aux débiteurs des délais de paiement pour se libérer de leurs
obligations : article 1244 du code civil.
Ex : Certaines lois modifient d’autorité le contenu même du contrat. Ex : lois
sociales instituant le repos hebdomadaire. Ces lois ont modifié d’autorité le
contenu des contrats conclus avant leur mise en vigueur.
En France, la position du législateur a évolué dans l’ordonnance de 2016 qui
dispose : Art. 1195 : Si un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du
contrat rend l'exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n'avait pas accepté d'en
assumer le risque, celle-ci peut demander une renégociation du contrat à son cocontractant. Elle
continue à exécuter ses obligations durant la renégociation.
« En cas de refus ou d'échec de la renégociation, les parties peuvent convenir de la résolution du
contrat, à la date et aux conditions qu'elles déterminent, ou demander d'un commun accord au
juge de procéder à son adaptation. A défaut d'accord dans un délai raisonnable, le juge peut, à la
demande d'une partie, réviser le contrat ou y mettre fin, à la date et aux conditions qu'il fixe.

3) les aménagements contractuels

106
Les parties peuvent prévoir par des clauses la révision automatique des
stipulations contractuelles, si un changement de circonstances économiques
survient en cours d’exécution :
- la clause d’échelle mobile ou clause d’indexation : elle permet la variation
automatique de l’obligation de somme d’argent en fonction d’une variation
d’indices qui peuvent être le prix d’un produit ou d’un service.
- Les clauses de révision : elles permettent à toute partie contractante de
demander soit à tout moment, soit à la fin d’une période fixée, la révision
du contrat en cas de changement des circonstances économiques. Le contrat
prévoit les critères de révision ainsi que les organes qui pourront être
sollicités.

CE QU’IL FAUT RETENIR :

Lorsque les conditions de validité du contrat sont remplies, il y a lieu de l’exécuter


conformément aux différentes volontés exprimées. Cette exécution s’impose aux parties car
l’un des effets du contrat est sa force obligatoire dont le fondement est l’art 1134 cc. Mais la
conséquence logique la force obligatoire, est l’irrévocabilité du contrat. A l’analyse de ces
principes sacrosaints du droit des contrats, il existe des problèmes liés à leur application.

De prime abord, il faut relever que le principe de la force obligatoire signifie simplement que
dès lors que le contrat a été valablement conclu, les parties sont tenues de les exécuter car à
défaut, on peut contraindre la partie défaillante à le faire par le recours à la force publique.
Quant au principe d’irrévocabilité, il signifie que les parties ne peuvent révoquer ce qu’elles
ont-elles mêmes voulu. Toutefois, cette règle est assortie d’exception car il est admis que dans
certains cas il puisse avoir révocation du contrat par le consentement des deux parties ou encore
pour les causes que la loi autorise telles que la résolution judiciaire dans les contrats
synallagmatiques. Mais dans certains contrats, la loi autorise des cas de rupture unilatérale.

Mais dans l’application de ce principe, il existe des difficultés qui sont fonctions de la réalité
de la clause contractuelle d’une part, et d’autre part il y a la question de la révision des contrats.

Relativement au premier obstacle, il peut arriver que les parties aient conclu une convention
qui est celle-là qu’elles entendent passer réellement (la contre-lettre), mais vont la dissimuler
pour ne présenter qu’une autre (acte ostensible) qui n’est qu’une façade : il s’agit de la
simulation. Etant en présence de deux contrats, l’une cachée et l’autre dévoilée à tous, quelle
sera alors le contrat qui va régir la relation des parties. Dans une telle situation entre les parties,
107
il est de principe que c’est la contre-lettre qui régit les parties, sauf dans certains cas prévus par
la loi. A l’égard des tiers, c’est l’acte ostensible qui est valable, mais s’ils pensent tirer profit de
la contre-lettre, alors ils peuvent valablement s’en prévaloir. Ils bénéficient d’une option. Mais
le problème peut également apparaitre lorsque les parties ont conclu un contrat avec des clauses
obscures, ambiguës. Face à ce cas, le juge est invité à interpréter le contrat des parties.
L’interprétation des contrats est régie par les art 1156 à 1164 cc. En la matière, il est de principe
que le juge doit rechercher la commune intention des parties, c’est-à-dire la véritable volonté
des parties exprimée dans le contrat. Ce rôle d’interprétation est l’apanage des juges du fond.
Ainsi, ils ne doivent interpréter que ce qui est obscure afin d’éviter la dénaturation du contrat.
Cependant, si cela arrive, ce sont les juges de la cour de cassation qui doivent censurer cette
dénaturation.

Le second obstacle résulte de la révision du contrat. Aborder la question de la révision infère


qu’on traite de l’imprévision. En effet, lorsque l’exécution du contrat devient plus onéreuse
pour l’une des parties en raison des circonstances imprévues, il s’agit de l’imprévision. L’idée
de réviser le contrat s’impose car on veut chercher à réequilibrer les prestations, ce qui nécessite
une modification des termes du contrat initial. Toutefois, la révision du contrat par le juge pour
cause d’imprévision est interdite en droit des contrats et le fondement de cette règle est l’arrêt
canal de Craponne. Si une révision du contrat il doit y avoir, elle ne peut qu’émaner de la
volonté des parties. De ce fait, elles peuvent prévoir des clauses d’échelle mobile dans leur
contrat ou encore des clauses de révision.

EXERCICES D’APPLICATION :

I- CONTRÔLE DE CONNAISSANCES

1) Un ayant cause universel peut-il être tenu d’une dette contractée par son auteur ? Est-il
également tenu de poursuivre le contrat conclu par son auteur ?

2) Qu’entend-t-on par interprétation du contrat ?

3) Qu’est-ce que l’imprévision et quelle est la position du juge face à l’imprévision ?

4) Distinguez l’imprévision de la force majeure.

II- EXERCICES PRATIQUES

Fiche d’arrêt et plan détaillé

Arrêt de la Cour de Cassation, 6 mars 1876 (Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix, 31
décembre 1873)

Sur le premier moyen du pourvoi :

Vu l'article 1134 du Code civil ;


108
Attendu que la disposition de cet article n'étant que la reproduction des anciens principes
constamment suivis en matière d'obligations conventionnelles, la circonstance que les contrats
dont l'exécution donne lieu au litige sont antérieurs à la promulgation du Code civil ne saurait
être, dans l'espèce, un obstacle à l'application dudit article ;

Attendu que la règle qu'il consacre est générale, absolue et régit les contrats dont l'exécution
s'étend à des époques successives de même qu'à ceux de toute autre nature ;

Que, dans aucun cas, il n'appartient aux tribunaux, quelque équitable que puisse apparaître leur
décision, de prendre en considération le temps et les circonstances pour modifier les
conventions des parties et substituer des clauses nouvelles à celles qui ont été librement
acceptées par les contractants ;

Qu'en décidant le contraire et en élevant à 30 centimes de 1834 à 1874, puis à 60 centimes à


partir de 1874, la redevance d'arrosage, fixée à 3 sols par les conventions de 1560 et 1567, sous
prétexte que cette redevance n'était plus en rapport avec les frais d'entretien du canal de
Craponne, l'arrêt attaqué a formellement violé l'article 1134 ci-dessus visé ;

Par ces motifs, casse, dans la disposition relative à l'augmentation du prix de la redevance
d'arrosage, l'arrêt rendu entre les parties par la Cour d'appel d'Aix le 31 décembre.

Les références bibliographiques


- ASSI ESSO Anne Marie, Droit civil les obligations, éditions IUBA, Abidjan,
2012.
- Bony Serges, Droit civil, droit des obligations, les éditions ABC, 2016

- François TERRE, Yves LEQUETTE, Philipe Simler, Droit civil,


les obligations, Paris 2009
- MAZEAUD Jean et CHABAS François, Droit civil, tome 2,1 er volume, édition
Montchrestien

109
Section 2 : Les sanctions en cas de violation de la force obligatoire du contrat

Nous avons plusieurs sanctions que nous pouvons classer en deux groupes : les sanctions
communes à tous les contrats et les sanctions spécifiques aux contrats synallagmatiques.

Sous -section1- Les sanctions communes à tous les contrats :

Le créancier d’une obligation inexécutée peut demander par une action en justice que le
débiteur soit condamné à exécuter sa prestation, c'est-à-dire sa promesse : c’est l’exécution
forcée ou en nature.

Mais comme il est souvent difficile de contraindre le débiteur à exécuter son obligation en
nature, le créancier ne pourra recevoir satisfaction que par équivalent : c’est la responsabilité
contractuelle.

§ 1: l’exécution forcée ou en nature

Elle tend à procurer au créancier, la prestation qui lui était due. Elle peut être directe ou
indirecte.

A : L’exécution forcée directe

Elle n’est pas toujours possible selon que l’on se trouve devant une obligation de donner, de
faire ou de ne pas faire.

Elle a pour objet l’exécution de la prestation qui est prévue. Lorsque l’obligation porte sur une
somme d’argent, son exécution forcée directe est toujours possible et elle est la seule possible
car il ne peut y avoir d’autre équivalent de l’argent que l’argent.
Le procédé habituel d’exécution forcée des obligations de somme d’argent est la saisie des biens
du débiteur, suivie de la vente forcée de ces mêmes biens, sur le prix desquels le créancier
obtiendra paiement. On a ainsi la saisie vente des biens meubles, la saisie immobilière pour les
immeubles, la saisie attribution entre les mains d’un tiers : voir en ce sens, l’Acte Uniforme
portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement des créances et des voies
d’exécution de 1998. L’étude de ces moyens relève du cours portant sur les voies d’exécution.
Lorsque l’obligation est en nature et qu’elle est de donner, l’exécution forcée est toujours
possible car le transfert de propriété est bien souvent déjà réalisé et il ne reste que l’obligation
de livraison, de passer l’acte authentique (on peut y remédier par la constatation judiciaire de
la vente), de payer le prix etc qui sont des obligations de faire dont l’exécution forcée demeure
possible.
En effet, on sait qu’en principe l’exécution forcée d’une obligation de faire ou de ne pas faire
est impossible (article 1142 du code civil) à cause du respect de la nature humaine (l’ouvrier
qui doit accomplir un travail, l’artiste qui doit faire un tableau etc). Toutefois, selon la
jurisprudence, l’exécution forcée est possible si la prestation n’implique pas les qualités
individuelles du débiteur (livraison de la chose, réparation d’un bien, destruction des
constructions ou aménagements faits en violation d’une obligation : article 1143 du code civil
etc). On pourrait ainsi se passer de l’intervention du débiteur, menacer son patrimoine en cas
d’inaction en le condamnant à une astreinte. Il est même possible, lorsque la loi le permet de

110
recourir à des contraintes physiques : exple : expulsion d’un locataire des lieux loués à certaines
conditions.

B: L’exécution forcée indirecte : l’astreinte :

Elle peut être définit comme la condamnation du débiteur à payer au créancier, à titre de peine
privée, telle somme d’argent fixée par le juge, de manière globale, ou le plus fréquemment,
par jour de retard, s’il s’agit d’une obligation de faire, ou par infraction constatée, s’il s’agit
d’une obligation de ne pas faire. C’est donc une mesure licite d’intimidation pour amener le
débiteur récalcitrant à s’exécuter volontairement.

§ 2 : L’exécution par équivalent : la responsabilité contractuelle

Dans les articles 1146 à 1155 du code civil, le législateur détermine à quelle condition l’on
peut accorder des dommages intérêts au créancier de l’obligation inexécutée. Accessoirement,
il a réglementé la mise en œuvre de l’action en responsabilité contractuelle.

I : Les conditions de la responsabilité contractuelle

On peut les subdiviser en 2 groupes. Les conditions positives, c'est-à-dire le créancier doit
établir les éléments de la responsabilité contractuelles, et les conditions négatives, c'est-à-dire
le débiteur ne doit opposer au créancier une cause d’exonération.

A- Les conditions positives

Elles sont au nombre de 3 :

1) La faute contractuelle

On peut la définir comme le manquement aux obligations contractuelles. Selon l’art.1147,


cette faute peut être due à l’inexécution de l’obligation ou au retard dans l’exécution de
l’obligation.

Le défaut d’exécution peut être total ou partiel. Au défaut d’exécution, on assimile l’exécution
défectueuse. Pour qu’il yait faute, il faut identifier les obligations dont les parties étaient
tenues.

En principe, ce sont les parties qui déterminent elles-mêmes les obligations qui leur
incombent en vertu du contrat. Mais il y a des atténuations.

En effet, pour un bon nombre de contrat, ce sont les textes qui déterminent les obligations. Par
ailleurs, l’on constate que la jurisprudence joue en ce domaine un rôle créateur important. Les
textes déterminent les obligations des contrats les plus usuels et en décrivent les règles
communes.

Toutefois, le plus souvent, les textes ne sont pas impératifs. Les parties peuvent alléger ou
aggraver leurs obligations nées du contrat. La jurisprudence française a également joué un
rôle créateur très important dans le domaine contractuel. Elle a admis dans un certain nombre
de contrats l’existence d’obligations qui n’avaient pas été prévues par les parties, ni par les

111
textes. Les exemples les plus connus concernent l’obligation de sécurité1 et l’obligation de
renseignement2.

Comment faire la preuve de la faute contractuelle ? La preuve de la faute dépend de sa


nature. A cet égard, la doctrine a proposé la distinction des obligations de résultat et des
obligations de moyen.

La faute est présumée dans les obligations de résultat alors qu’elle doit être prouvée dans les
obligations de moyen.

Toute les fois que l’obligation inexécutée est une obligation de résultat, la faute contractuelle
est impliquée dans le seul fait matériel de l’inexécution (art.1147 C. Civil). Le créancier n’a
pas à la prouver distinctement, il lui suffit d’établir que le contrat contenait tel engagement à
son profit et que cet engagement n’a pas été exécuté. Il s’agit d’une présomption de faute,
mais cette présomption n’est pas irréfragable. Le débiteur pourra se libérer en prouvant que
l’inexécution est due au fait d’une cause étrangère qui ne lui est pas imputable. Ex : force
majeure, fait du créancier, fait du tiers.

n revanche, lorsque l’obligation inexécutée est une obligation de moyen (art.1137), la faute
ne se déduit plus de la seule absence de résultat. Il est nécessaire de prouver la faute en
portant un jugement sur la conduite du débiteur et de comparer ce qu’il a fait à ce qu’il aurait
dû faire.

L’obligation de donner est une obligation de résultat de même que l’obligation de ne pas faire.
C’est pour les obligations de faire que les difficultés apparaissent. Certaines obligations de
faire sont des obligations de moyens (obligation du médecin), d’autres sont des obligations de
résultat (obligation du transporteur).

La faute contractuelle est susceptible de dégré en se fondant sur sa gravité. On dénombre à ce


titre 3 sortes de fautes contractuelles : la faute ordinaire ou faute non intentionnelle, la faute
dolosive et la faute lourde.

Le dol dans l’inexécution du contrat est tout acte intentionnel et illicite par lequel le débiteur
refuse d’exécuter son obligation. C’est la malhonnêteté du débiteur qui délibérément se

1
L’obligation de sécurité met à la charge d’une partie l’obligation d’indemniser l’autre pour toutes les atteintes
112
physiques que pourrait subir le contractant. Ainsi en matière de contrat de transport, la Cour de Cassation décida
que le transporteur est tenu de l’obligation de conduire le passager sain et sauf à destination (21 Novembre 1911,
Dalloz périodique 1913, I, 249). Par la suite, la jurisprudence a découvert l’obligation de sécurité dans d’autres
types de contrats, notamment dans les contrats dont l’objet est de fournir des soins, mais également dans certains
contrats de services. Ex : contrat d’hôtellerie, contrat entre le restaurateur et son client.

2
Dans un grand nombre de contrat, la jurisprudence fait peser sur l’une des parties une obligation de
renseignement. Le plus souvent, cette obligation est l’accessoire des obligations de service. Ce sont surtout les
professions libérales (notaires, médecins, architectes etc.), qui dans les contrats qu’elles passent sont tenues de
l’obligation de renseignement. Mais cette obligation peut être également l’accessoire du contrat portant sur les
transferts de droits. Ex : Dans les contrats de vente de produits dangereux, la jurisprudence estime que le
vendeur a une obligation de mise en garde. L’idée générale est que l’obligation de renseignement est destinée à
compenser l’inégalité des compétences entre les contractants, ce qui explique qu’elle profite essentiellement aux
consommateurs.
soustrait à ses engagements même si ce refus n’est pas dicté par son intention de nuire. Le
débiteur qui a commis une faute dolosive ne peut se prévaloir d’une clause de non
responsabilité ni d’une clause d’exonération.

La faute ordinaire ou faute non intentionnelle est une faute de négligence ou d’imprudence.
La faute lourde se caractérise par sa gravité, son énormité. Il s’agit d’une faute grossière du
débiteur qui témoigne de son inaptitude à accomplir la mission dont il est chargé. La faute
lourde ne peut être couverte par une clause de non responsabilité ni une clause limitative.

2) Le dommage

Le second élément de la responsabilité contractuelle est le dommage ou préjudice. Si


l’inexécution n’entraîne pas de dommage pour le créancier, il n’aura pas droit à des
dommages intérêts.

C’est l’atteinte subit par la victime. Cette atteinte doit avoir sa source dans l’inexécution du
contrat. L’inexécution est entendue dans un sens large : le défaut d’exécution (total ou
partiel), le retard dans l’exécution, l’exécution défectueuse. Le créancier doit faire la preuve
du dommage qu’il a subi, sauf s’il s’agit d’une créance monétaire où le préjudice résultant du
retard est présumé (art.1153 al.2).

a) Les différents types de dommages

En matière contractuelle, le plus souvent, le dommage dont on demande réparation est un


dommage matériel c'est-à-dire qu’il atteint le créancier dans son patrimoine. On répare la
perte éprouvée mais également le gain manqué. Il peut arriver qu’indépendamment du
dommage matériel, le créancier subisse un préjudice moral. Il y a préjudice moral lorsqu’il y a
atteinte aux sentiments et plus généralement à la personnalité. La réparation du préjudice
moral est admise depuis le début du 19e siècle.

b) L’exigence du caractère prévisible du dommage

La règle est prévue par l’art.1150 du code civil qui pose que la réparation qui incombe au
débiteur est limitée aux dommages prévisibles. Cette règle est justifiée par le fait qu’en
matière contractuelle le débiteur doit pouvoir évaluer lors de la conclusion du contrat le risque
qu’il prend. Ex : Une personne expédie un colis par la poste et ce paquet se perd. Le
propriétaire se retourne contre le transporteur c'est-à-dire la poste pour indemnisation et
prétend que le paquet contenait de l’or et du diamant. Cependant, comme le transporteur n’a
pas été informé de la valeur du contenu du colis lors de la conclusion du contrat, il n’est pas
tenu de répondre de la perte des objets de valeurs. Il s’agit d’un dommage imprévisible. S’il
en avait été informé, il n’aurait peut être pas contracté. Il est seulement tenu de répondre de
la perte du colis (dommage prévisible) et sa responsabilité se limitera à ce qu’il est d’usage
de transporter dans ces bagages ou d’expédier par voie postale (lettres, photos, objets
d’usage).

On retiendra qu’un dommage n’est indemnisable que s’il rentre dans le champ contractuel. Le
juge apprécie le caractère prévisible ou imprévisible du dommage selon les circonstances de
l’espèce. Toutefois, cette règle connaît une exception. En cas de faute dolosive et de faute
lourde, tous les dommages c'est-à-dire prévisibles comme imprévisibles sont réparés.

113
3) Le lien de causalité

C’est la 3e condition nécessaire pour la mise en oeuvre de la responsabilité contractuelle. La


nécessité du lien de causalité c'est-à-dire du lien de cause à effet entre l’inexécution par le
débiteur de son obligation et le dommage dont le créancier demande, réclame réparation,
s’impose quelque soit la nature de la responsabilité.

Concernant la responsabilité contractuelle, l’art.1151 dispose que les dommages intérêts ne


doivent comprendre que ce qui est une suite immédiate et directe de l’inexécution de la
convention. Cet article affirme la relation causale, directe qui doit exister entre le dommage et
l’inexécution du contrat. Cette relation causale directe doit être prouvée.

On sait toutefois qu’en cas de violation d’une obligation contractuelle de résultat, la faute est
présumée du seul fait que le débiteur n’a pas apporté au créancier le résultat promis. Cette
présomption se double d’une présomption de causalité, le débiteur devant pour s’exonérer,
démontrer que la cause du dommage résulte d’une cause étrangère valant force majeure.

La causalité peut également être plurale c'est-à-dire on peut avoir plusieurs causes et mettre en
jeu la responsabilité de plusieurs débiteurs. Dans ce cas il y aura partage de responsabilité. La
victime dispose de l’action in solidum contre les différents débiteurs. Il y aura donc
condamnation des différents débiteurs qui bien que tenus par des contrats différents, ont
participés à la réalisation du dommage.

B- Les conditions négatives : l’absence de cause d’exonération

Selon l’art.1147, le débiteur est libéré quand il justifie d’une cause étrangère qui ne lui est pas
imputable. L’art.1148 fait référence seulement à la force majeure ou au cas fortuit. La
jurisprudence y ajoute le fait du créancier et le fait du tiers.

1) La force majeure ou cas fortuit

L’art.1148 dispose : « il n’y a lieu à aucun dommage intérêts lorsque par suite d’une force
majeure ou d’un cas fortuit le débiteur a été empêché de donner ou de faire ce à quoi il était
obligé ou a fait ce qui lui était interdit ». Les forces majeures par excellence sont les forces de
la nature(foudre, inondation, tremblement de terre etc), mais certains évènements tenant à
l’action humaine peuvent entrer dans la définition (émeutes, grèves, guerre etc.). Dans tous les
cas, un évènement ne constitue une force majeure que s’il présente 3 caractères.

a- L’irrésistibilité

L’évènement doit être irrésistible c'est-à-dire empêcher toute exécution du contrat.


L’impossibilité d’exécuter est appréciée in abstracto et la jurisprudence se montre assez

114
sévère. On a égard qu’à l’impossibilité absolue et non pas à l’impossibilité relative découlant
des faibles moyens dont dispose personnellement le débiteur. Il n’y a pas non plus force
majeure si l’inexécution était rendue plus difficile ou plus onéreuse.

b- L’imprévisibilité

Il n’y a de force majeure que lorsque l’obstacle échappait lors de la conclusion du contrat à
toutes les prévisions humaines, car s’il était prévisible, le débiteur devait prendre toutes les
précautions qu’il faut pour l’éviter. En revanche si un débiteur a pris toutes les précautions
nécessaires et qu’un évènement imprévisible s’est produit, alors on estime que l’évènement
revêt le caractère d’imprévisibilité pour lui.

c- L’extériorité

L’évènement doit se produire en dehors de la sphère dont le débiteur doit répondre. Ainsi, la
défaillance du matériel ou du personnel qu’un contractant emploie à l’exécution du contrat
peut bien être irrésistible et imprévisible pour lui, mais comme elle est survenue à l’intérieur
de son entreprise, il ne peut s’en prévaloir comme une force majeure.

Si ces trois conditions sont réunies, il y a cas de force majeure. La force majeure entraîne
libération du débiteur. Son obligation est éteinte et le créancier ne pourra pas obtenir des
dommages intérêts du fait de l’inexécution du contrat.

2) Les autres causes d’exonération

a- Le fait du créancier

Le créancier ne peut se plaindre si c’est par son propre fait que le contrat n’a pas été exécuté.
Le fait du créancier revêtira le plus souvent les caractères d’une faute, mais il peut être
exonératoire pour le débiteur même s’il n’est pas fautif. Le fait non fautif du créancier n’est
pris en considération que s’il présente les caractères de la force majeure et en conséquence
entraîne l’exonération totale du débiteur. Quant au fait fautif, il peut constituer une cause
d’exonération partielle même s’il ne présente pas tous les caractères de la force majeure.

b- Le fait du tiers

Pour libérer le débiteur, le fait du tiers doit être pour lui irrésistible et imprévisible. Il faut en
outre que le tiers ne soit pas un représentant ni un préposé du débiteur car alors il n’y aurait
pas d’extériorité. Le fait du tiers a un effet exonératoire total.

II : La mise en œuvre de la responsabilité contractuelle

115
Le droit du créancier se réalise par une procédure, mais avant le procès qui doit aboutir à la
condamnation du débiteur à des dommages intérêts, une procédure extrajudiciaire peut être
nécessaire dans certains cas pour fixer le droit du créancier : c’est la mise en demeure

Prévue par l’art.1146, la mise en demeure est une manifestation de volonté du créancier qui
exige l’exécution des prestations qui lui sont dues. Elle s’opère en général par un acte
d’huissier appelé sommation. Elle peut toutefois résulter d’un acte équivalent. Ex : un
commandement de payer ou une assignation qui ouvre l’action en justice.

- Dans le cas des dommages et intérêts moratoires : La mise en demeure est en principe
exigée, c’est une condition à défaut de laquelle les dommages et intérêts moratoires ne sont
pas dus.

- Dans le cas des dommages et intérêts compensatoires : Dans cette hypothèse, la mise en
demeure n’est pas exigée, mais elle est recommandée dans la mesure où elle constitue un
moyen de pression et un moyen de preuve.

III : Les effets de la responsabilité contractuelle

L’allocation des dommages et intérêts au créancier de l’obligation inexécutée est le procédé


normal de réparation du dommage. Cela fait entrer dans le patrimoine du créancier une valeur
égale à celle dont il a été privé pour compenser le préjudice résultant de l’inexécution. Les
dommages et intérêts sont toujours fixés en argent. Pour leur évaluation, on fait la distinction
entre les obligations en nature et les obligations en argent.

A) Cas des obligations en nature

En cas d’inexécution d’une obligation en nature, les dommages intérêts compensatoires sont
dus. Le principe est que les juges du fond sont souverains pour en déterminer le montant sous
réserves que la somme attribuée puisse entièrement réparer le préjudice subi. Mais le
législateur peut dans certains cas prévoir des sommes forfaitaires.

B) Cas des obligations pécuniaires


Cela suppose que le débiteur ne paie pas la somme qu’il devait. Dans ce cas, seuls les
dommages intérêts moratoires sont dus. Le créancier peut obtenir un titre exécutoire pour le
paiement à titre principal. Les dommages intérêts moratoires sont dus à compter de la date de
mise en demeure et le créancier y a droit sans qu’il ait à établir son préjudice. Le juge n’a pas
à évaluer les dommages intérêts moratoires. La loi fixe leur montant. Les dommages et
intérêts moratoires se présentent comme un pourcentage de la somme due autrement dit
comme un intérêt d’un capital.

Les parties peuvent elles-mêmes décider qu’en cas de non paiement, le débiteur devra des
intérêts sur les intérêts qu’il doit : c’est l’anatocisme (art.1154).

VI : Les conventions relatives à la responsabilité

116
Les parties peuvent insérer dans le contrat diverses clauses relatives à la responsabilité
contractuelle.

A) Les clauses de non responsabilité


Elles tendent à écarter totalement l’obligation de réparer et stipulent dans le contrat que le
débiteur ne sera pas responsable et ne devra rien en cas d’inexécution de l’obligation. Elles
sont en principe valables mais inopposables dans un cas : si l’inexécution du contrat est due à
une faute dolosive ou à une faute lourde du débiteur.

Certaines lois annulent les clauses de non responsabilité dans certains contrats. Ces lois
concernent les contrats de transport. Ex : L’art.103 du C. Commerce déclare nulles les clauses
d’irresponsabilité en matière de transport terrestre des marchandises.

B) Les clauses limitatives de responsabilité


Elles fixent un maximum au montant des dommages intérêts qui serait attribué en cas
d’inexécution du contrat. Ces clauses sont en principe valables et soumises au même régime
que les clauses de non responsabilité, c'est-à-dire qu’elles sont inopposables en cas de dol ou
de faute lourde du débiteur. Certaines lois spéciales réglementent ces clauses dans certains
types de contrats. Dans cette hypothèse, la clause limitative est valable si elle respecte la
limite légale donnée par le texte.

C) Clauses pénales
C’est une clause par laquelle les contractants déterminent eux-mêmes forfaitairement les
dommages intérêts qui seront dus en cas d’inexécution. Si elles sont conçues objectivement,
elles évitent les difficultés d’évaluation judiciaire. Contrairement aux clauses limitatives de
responsabilité, les clauses pénales tiennent lieu de dommages intérêts car l’évaluation
conventionnelle est substituée à l’évaluation judiciaire.

La clause pénale est un forfait. Cela signifie que la peine est applicable par le seul fait de
l’inexécution et il n’est pas nécessaire que le créancier établisse le montant du préjudice subi.

Par ailleurs, l’art.1152 interdit au juge de réviser le montant de la clause pénale soit à la
hausse, soit à la baisse. Toutefois, compte tenu de la sévérité de cette règle pour le débiteur,
elle a été abandonnée en droit français.

CE QU’IL FAUT RETENIR :

Force obligatoire, oui ! Mais il n’en demeure pas moins que l’une des parties pour des raisons
diverses, justifiées ou non, n’exécute pas son obligation. L’autre partie dispose alors de
différentes actions lui permettant de sanctionner la partie défaillante. Certaines de ces sanctions
sont communes à tous les contrats, et d’autres sont spécifiques au contrat synallagmatique.

Au titre des sanctions communes à tous les contrats il y en a de deux types : l’exécution forcée
ou en nature et l’exécution par équivalent (la responsabilité contractuelle).

L’exécution forcée consiste à procurer au créancier la prestation qui lui était due. Elle peut être
directe ou indirecte. Dans le cas d’une exécution forcée directe, lorsque l’obligation consiste au

117
paiement d’une somme d’argent, elle est toujours possible et elle est la seule possible.
Egalement lorsqu’elle porte sur des obligations de donner elle est toujours possible également.
Quant aux obligations de faire ou de ne pas faire, selon l’art 1142 cc dispose qu’il ne se résout
qu’en dommages-intérêts mais à condition que cette obligation implique les qualités
individuelles du débiteur. L’exécution forcée indirecte consiste en une astreinte. Il s’agit d’une
condamnation portant sur une somme d’argent fixée par le juge que le débiteur doit payer par
jour de retard ou par infraction constatée. Et il l’exécution par équivalent. Elle consiste à obtenir
la réparation du préjudice subi par le créancier en raison du manquement du débiteur. Pour ce
faire, il est nécessaire de mettre en œuvre la responsabilité contractuelle du débiteur. Sa mise
en œuvre doit respecter des conditions positives (c’est-à-dire qu’elles doivent être remplies),
mais il faut en plus l’absence de conditions négatives (il s’agit de causes qui pourraient exonérer
le débiteur). Les conditions positives sont au nombre de trois : la faute contractuelle, qui est soit
l’inexécution ou l’exécution en retard de la prestation. En outre, lorsqu’on se trouve dans une
obligation de résultat, la faute du débiteur est présumée (art 1147 cc), tandis que s’il s’agit d’une
obligation de moyen, sa faute doit être prouvée (art 1137 cc). Celle-ci peut être une faute
ordinaire, lourde ou dolosive ; Ensuite il y a le préjudice (art 1150 cc), qui est l’atteinte, le
dommage (matériel, moral ou corporel) que subit le créancier. Mais il n’y a que le dommage
prévisible qui peut être réparé c’est-à-dire celui qui est rentré dans le champ contractuel. Enfin,
il y a le lien de causalité, c’est-à-dire le lien de cause à effet entre l’inexécution par le débiteur
de son obligation et le dommage dont le créancier réclame la réparation. Et selon l’art 1151 cc,
il faut que le lien de causalité soit direct, une suite immédiate de la faute du débiteur. Encore
faut-il en rapporter la preuve. Mais lorsque les conditions positives sont remplies, il faut encore
qu’il y ait absence de causes d’exonération du débiteur qui serait de nature à obstruer la mise
en œuvre de sa responsabilité contractuelle. En effet, selon l’art 1147 cc, le débiteur est libéré
s’il justifie d’une cause étrangère qui ne lui est pas imputable. Et l’art 1148 cc fait référence à
la force majeure ou au cas fortuit. Et cela, la jurisprudence y adjoint le fait du créancier et celui
du tiers.

Parlant de la force majeure ou cas fortuit, il s’agit d’un évènement imprévisible, extérieur aux
parties, qui rend impossible l’exécution du contrat. Ainsi cet évènement, pour qu’il soit
considéré comme une force majeure, doit présenter trois caractères cumulatifs que sont,
l’irrésistibilité, l’imprévisibilité et l’extériorité. L’irrésistibilité suppose que l’évènement est tel
qu’il est objectivement impossible de pouvoir exécution le contrat. L’imprévisibilité suppose
que les parties ne puissent prévoir un tel évènement, il est en dehors de toute prévision humaine.
Et l’extériorité signifie que l’évènement doit se produire en dehors de la sphère du débiteur
(matériels défaillants par exemple). En juxtaposition à la force majeure, il y a le fait du créancier
et le fait du tiers. Dans la première situation, le débiteur n’exécute pas son obligation en raison
du propre fait du créancier. Par son comportement, le débiteur a manqué à son obligation. Dans
un tel cas, si ce fait remplit les conditions de la force majeure, alors le débiteur est exonéré,
mais l’exonération peut être partielle. Quant au fait du tiers, il s’agit d’une personne qui n’est
pas partie au contrat et par son fait, le débiteur n’arrive pas à exécuter son obligation. Pour
qu’un tel fait soit libératoire pour le débiteur, il doit remplir les conditions également de la force
majeure. En pareil cas, le débiteur est totalement libéré.

118
Lorsque les conditions de la responsabilité contractuelle sont remplies, le débiteur pourra
prétendre au paiement de dommages-intérêts. Mais il existe les dommages-intérêts moratoires
et les dommages-intérêts compensatoires. Ainsi avant d’arriver au procès qui doit déboucher
sur la condamnation du débiteur, il peut être exigé de la part du créancier que celui-ci adresse
une mise en demeure au débiteur qui est un acte d’huissier (commissaire de justice) qui permet
de sommer le débiteur, c’est-à-dire rappeler au débiteur qu’il est tenu d’exécuter une obligation.
Cette mise en demeure est obligatoire pour pouvoir prétendre aux dommages-intérêts
moratoires. Mais pour les dommages-intérêts compensatoires, c’est une faculté. En outre
lorsque l’obligation inexécutée du débiteur est une obligation en nature, ce sont des dommages-
intérêts compensatoires qui sont dus. Mais lorsque les obligations sont de nature pécuniaire,
alors seuls les dommages-intérêts moratoires sont dus. Mais avec la liberté qu’ont les parties
dans la rédaction de leur contrat, il est loisible qu’elles insèrent des clauses de nature soit à les
exonérer du paiement de dommages-intérêts (clause de non responsabilité) ou à plafonner le
montant de ceux-ci (clause limitative de responsabilité). Ces clauses sont valables, donc
s’imposent à elles, sauf lorsque la faute du débiteur peut être regardée comme une faute lourde
ou dolosive, dans ce cas la clause devient caduque et ne peut produire aucun effet.

EXERCICES D’APPLICATION :

I- CONTRÔLE DE CONNAISSANCES

1) Quelles sont les conditions de la responsabilité contractuelle ?

2) En cas d’exonération de l’une des parties en raison d’un cas de force majeure, l’autre
partie est-elle tenue d’exécuter sa prestation ?

3) Quel est l’intérêt de la distinction des fautes dolosive, lourde et légère ?

4) Quelles sont les conditions d’application de la règle exception non adimpleti


contractus ?

5) Un contractant peut-il arguer d’une grève du personnel d’un service public ou d’une
guerre civile qui sévit dans son pays pour ne pas exécuter son obligation ?

II- EXERCICES PRATIQUES

CAS PRATIQUE

M. PETICOUTO a passé commande auprès de la société SAMEHADA. A l’échéance, il ne


reçoit pas livraison des marchandises. Il est de ce fait obligé de se les procurer chez un autre
fournisseur à un prix élevé.

En outre, la société de spectacle DANCING production a conclu un contrat avec l’artiste


Général Anaconda pour une série de représentations à l’occasion des fêtes de fin d’année.

119
Malheureusement aux dates convenues l’artiste ne se présente pas. M. FACHE DG de la société
DANCING production est désespéré.

Eclairez M. PETICOUTO et la société sur toutes les sanctions possibles.

Les références bibliographiques


- ASSI ESSO Anne Marie, Droit civil les obligations, éditions IUBA, Abidjan,
2012.
- Bony Serges, Droit civil, droit des obligations, les éditions ABC, 2016

- François TERRE, Yves LEQUETTE, Philipe Simler, Droit civil,


les obligations, Paris 2009
- MAZEAUD Jean et CHABAS François, Droit civil, tome 2,1 er volume, édition
Montchrestien

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Sous-section 2 : Les sanctions spécifiques aux contrats synallagmatiques

En pratique, les contrats synallagmatiques sont les plus importants. En cas d’inexécution d’un
contrat synallagmatique, il existe en plus des règles communes précédemment étudiées, des
règles spéciales qui sont justifiées par l’idée de cause. La cause de l’obligation contractée par
une partie est l’obligation promise par l’autre.

Il en résulte que si l’un des contractants n’exécute pas son obligation, l’obligation de l’autre
partie n’a plus de cause, c'est-à-dire qu’il n’y a plus de raison qu’elle soit exécutée. Nous
verrons essentiellement deux sanctions : l’une est temporaire : l’exception d’inexécution,
l’autre est définitive : la résolution.

§1 : L’exception d’inexécution

L’exception d’inexécution ou exceptio non adimpleti contractus (exception de contrat non


accompli) est un moyen de défense opposé par un contractant à qui l’on demande l’exécution
de son obligation. Ce contractant refuse d’exécuter son obligation si l’autre partie n’exécute
pas elle-même l’obligation qu’elle doit.

Ce moyen de défense est justifié par le fait que dans un contrat synallagmatique les
obligations des 2 parties doivent s’exécuter en même temps. Le Code Civil n’a pas prévu ce
moyen de défense dans un texte général. Il ne l’envisage que dans certains contrats
particuliers tels que la vente (art.1612).

La jurisprudence a généralisé ce moyen de défense dans tous les contrats synallagmatiques en


s’appuyant sur la théorie de la cause c'est-à-dire l’interdépendance des obligations dans les
contrats synallagmatiques.

A- Les conditions de l’exception d’inexécution

Celui qui oppose l’exception d’inexécution doit être tenu d’une obligation envers l’autre
contractant. Les 2 obligations doivent relever du même contrat, être exigibles. Les deux
obligations doivent s’exécuter simultanément trait pour trait.

Celui qui oppose l’exception d’inexécution doit agir de bonne foi. L’on considère qu’il y aura
mauvaise foi si l’inexécution de l’autre partie est minime. Ex : un locataire ne peut refuser de
payer les loyers sous prétexte que le bailleur a négligé de procéder à des réparations dont
l’immeuble a besoin.

On considère qu’il ne serait pas conforme à la bonne foi d’opposer ainsi l’inexécution d’une
obligation relativement secondaire pour se dispenser de remplir soit même son engagement
essentiel.

121
L’exception d’inexécution se fait en dehors de tout recours au juge et peut être exercée sans
mise en demeure préalable. En revanche, si le cocontractant estime que l’exception
d’inexécution lui a été opposée à tort, il doit saisir le juge et c’est au tribunal qu’il appartient
de vérifier le bien-fondé de l’exception.

B- Les effets de l’exception d’inexécution

- L’exception d’inexécution est un moyen purement défensif. Le débiteur ne


prend pas d’initiative. Il se borne à refuser l’exécution quand le créancier la lui
réclame soit à l’amiable soit en justice.

- L’exception d’inexécution est un moyen purement temporaire. Le contrat est


suspendu. Le créancier repoussé pourra obtenir satisfaction dès qu’il aura accompli
sa propre obligation.

§2 : La résolution du contrat

La résolution peut être soit fautive, soit fortuite.

I : La résolution du contrat pour manquement de l’un des contractants à son obligation

Lorsqu’une partie manque à ses obligations et que cette inexécution s’avère définitive, l’autre
partie peut choisir de mettre fin au contrat en saisissant le juge : c’est la résolution judiciaire
du contrat.

Par ailleurs, les parties peuvent prévoir dans le contrat que la sanction de l’inexécution sera la
résolution du contrat : c’est la résolution conventionnelle du contrat.

A- La résolution judiciaire
L’art.1184 laisse le choix au créancier d’une obligation inexécutée entre l’exécution forcée, si
elle est possible, et la résolution du contrat.

1) Les conditions

a- Condition de fond

- La résolution n’est pas admise dans tous les contrats. Il faut que l’on soit en principe en
présence d’un contrat synallagmatique. Mais la loi exclu la résolution pour certains contrats
synallagmatique. Ex : Le contrat de rente viagère.

- La résolution ne peut être demandée qu’en cas d’inexécution fautive imputable au débiteur.
Peu importe que cette inexécution concerne une obligation principale ou une obligation
accessoire. Peu importe également que l’inexécution soit totale ou partielle.

122
b- Condition d’exercice

- Elle doit être demandée en justice (art.1184 al.2, 3 C. Civil). Mais il peut y avoir
dispense de la saisine du juge si un texte de loi le prévoit expressément. La jurisprudence
admet aussi dans certains cas d’inexécution grave que la résolution joue de plein droit.

Le prononcé de la résolution dépend du pouvoir souverain d’appréciation du juge qui peut


prononcer la résolution sans attribution de dommages et intérêts ou avec attribution des
dommages et intérêts. Le juge peut en revanche, accorder au débiteur un délai de grâce pour
exécuter ses obligations ou attribuer des dommages et intérêts au créancier sans prononcer la
résolution du contrat.

2) Les effets de la résolution judiciaire

a- Dans les rapports entre les parties

Le contrat est anéantit, c'est-à-dire qu’il est considéré comme n’ayant jamais été conclu. Cet
effet rétroactif soulève 2 problèmes :

- Pour les contrats à exécution successive, il n’y a pas de résolution mais


seulement résiliation, car contrairement à la résolution, la résiliation ne joue
que pour l’avenir.

- Pour les contrats instantanés, l’effet rétroactif de la résolution peut


soulever des difficultés. Il peut y avoir des améliorations ou des détériorations
de la chose objet du contrat. Dans ce cas, on procède à un calcul d’indemnité
pour tenir compte des améliorations ou des détériorations.

b- Dans les rapports avec les tiers

Le principe est identique à celui des nullités. La résolution anéantit les droits que les parties
ont pu consentir aux tiers sur la chose faisant l’objet du contrat. La résolution doit entraîner
donc une cascade d’autres résolutions.

Mais ce principe connaît des atténuations. Les actes d’administrations sont maintenus. Pour
les actes de dispositions, on peut faire jouer l’art.2279 C. Civil en matière mobilière. En
matière immobilière, les tiers sont protégés par les règles de la publicité foncière.

B- La résolution conventionnelle
Les parties prévoient dans le contrat l’éventualité de la résolution pour inexécution. Ce sont
les clauses résolutoires ou pactes commissoires.

Elles sont valables sauf lorsque certaines lois spéciales réglementent leurs conditions de
validité et d’opposabilité. Ex : Dans le contrat de bail réglementé par la loi du 18 Décembre

123
1977. L’art.10 de cette loi n’admet la clause résolutoire qu’à défaut de paiement de loyer et
ne lui accorde d’effet que si le juge n’accorde pas un délai de grâce au débiteur pour se
libérer.

En principe, sauf limitation légale, l’insertion des clauses résolutoires ou pactes


commissoires dans un contrat a pour finalité de s’exonérer de la saisine du juge et permet à
une partie d’invoquer la résolution conventionnelle. Toutefois, pour la jurisprudence, la clause
ne vaudra résiliation conventionnelle que si elle est clairement et précisément rédigée
notamment : la clause précise que la résolution aura lieu de plein droit en cas d’inexécution.

II : La résolution en vertu de la théorie des risques

On parle de théorie des risques lorsqu’il y a impossibilité d’exécuter un contrat à raison d’un
cas de force majeure. La question est de savoir si le débiteur de l’obligation inexécutée, c'est-
à-dire celui qui n’a pas accompli sa prestation, peut exiger de l’autre l’exécution de sa
prestation.

A- La règle générale

Lorsque dans un contrat synallagmatique l’un des contractants ne peut exécuter son
obligation à raison de force majeure, l’autre contractant est dispensé d’exécuter la sienne. On
en déduit que les risques sont pour le débiteur de l’obligation inexécutée.

- Si l’impossibilité d’exécuter est totale, les obligations sont entièrement


éteintes. Le contrat est alors résolu.

- Si l’impossibilité d’exécution est partielle, le créancier n’est pas


entièrement libéré. Il bénéficie seulement d’une réduction de ses obligations.
L’intervention du juge n’est pas nécessaire, sauf si les parties ne sont pas
d’accord sur les modalités de rééquilibrage du contrat.

B- L’exception

Selon l’art.1138, dans les contrats translatifs de propriété, les risques sont pour le créancier
parce qu’il est déjà devenu propriétaire par le seul accord des volontés. Cela signifie que
l’acquéreur d’une chose doit payer le prix de la chose même si elle est détruite par cas de
force majeure ; on dit que la perte est pour le propriétaire.

Il peut également exister des exceptions légales ou conventionnelles.

Si le vendeur est mis en demeure de livrer, les risques continuent à peser sur lui car la mise en
demeure constate son retard. Par ailleurs, les parties sont libres d’indiquer dans le contrat que
les risques seront transférés soit à l’acheteur, soit au vendeur.

CE QU’IL FAUT RETENIR :

124
Les contrats synallagmatiques sont les plus nombreux en pratique. En cas de méconnaissance
des obligations contractuelles, on peut recourir aux règles communes qui sanctionnent
l’inexécution, mais il y a des règles qui sont spécifiques à ce contrat car les deux parties sont
concomitamment débitrices et créancières. Ainsi nous verrons d’une part l’exception
d’inexécution et d’autre part la résolution du contrat.

L’exception d’inexécution est un moyen de défense que l’une des parties soulève pour refuser
d’exécuter son contrat lorsque l’autre partie n’exécute pas elle-même son obligation. Pour se
prévaloir de cette règle, il faut que des conditions soient respectées. En effet, il faut qu’il
s’agisse d’abord de deux obligations qui relèvent du même contrat, ensuite il faut que les
obligations des deux parties s’exécutent simultanément, et enfin celui qui oppose l’exception
doit être de bonne foi. Cette exception se lève en dehors de tout recours au juge. Ce moyen de
défense a pour effet de suspendre le contrat.

Quant à la résolution, elle peut intervenir en cas de faute de l’une des parties, ou en raison d’un
cas fortuit.

La résolution pour faute peut se faire par la saisine d’un juge afin qu’il mette fin au contrat : il
s’agit de la résolution judiciaire. Mais également les parties peuvent prévoir des cas où le contrat
prendra fin : il s’agit de la résolution conventionnelle.

La résolution judiciaire est une possibilité qui tire sa source de l’art 1184 cc, et elle obéit à des
conditions de fond et d’exercice. Au titre des conditions de fonds, il faut qu’on soit en présence
d’un contrat synallagmatique d’une part et il faut qu’il y ait une faute imputable au débiteur
d’autre part. Au niveau des conditions d’exercice, elle doit être demandée en justice (art 1184
al 2,3 cc), mais il y a des cas de résolution de plein droit en fonction de la gravité de
l’inexécution. Le prononcé de la résolution dépend de l’appréciation souveraine du juge qui
peut la prononcer ou non, avec des dommages-intérêts ou non. Dans les rapports entre les
parties il y anéantissement rétroactif du contrat, et à l’égard des tiers, les droits qui ont été
consentis sur la chose faisant objet du contrat, sont anéantis également. Mais en dehors des cas
où la résolution est demandée devant un juge, il peut arriver que les parties prévoient les cas
d’inexécution qui entraineront la résolution conventionnelle du contrat.

La résolution fortuite quant à elle intervient lorsque l’une des parties n’est plus en mesure
d’exécuter sa prestation en raison d’un cas de force majeure. Ainsi, l’autre partie est exonérée
de l’exécution de sa prestation également. Les risques sont alors pour le débiteur de l’obligation
inexécutée. Toutefois, à cette règle, l’art 1138 cc apporte une exception s’agissant des contrats
translatifs de propriété portant sur des corps certains. Ici, le seul accord de volonté a fait du
créancier le véritable propriétaire du bien et dès ce moment il supporte tous les risques que sa
chose pourrait subir. Dans ce cas alors le créancier sera tenu d’exécuter sa prestation même si
le débiteur lui a été exonéré en raison du cas fortuit. Mais cette exception est empreinte
également d’exception. Si le créancier a mis en demeure le débiteur de s’exécuter, alors les
risques continuent de peser sur le débiteur, car la mise en demeure constate son retard.

EXERCICES D’APPLICATION :

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I- EXERCICES PRATIQUES

CAS PRATIQUE

La compagnie BTU spécialisée dans le transport des personnes et des marchandises a inséré
dans les contrats de transports, passés avec les passagers, qu’elle n’est pas responsable des
dommages corporels subis par les passagers en cours de transport. Ainsi en cas de dommages
corporels subis par un passager lors d’un accident de la circulation intervenu en cours de
transport, elle ne devra pas des dommages et intérêts. Cette clause est-elle valable ? Justifiez
votre réponse.

Les références bibliographiques


- ASSI ESSO Anne Marie, Droit civil les obligations, éditions IUBA, Abidjan,
2012.
- Bony Serges, Droit civil, droit des obligations, les éditions ABC, 2016

- François TERRE, Yves LEQUETTE, Philipe Simler, Droit civil,


les obligations, Paris 2009
- MAZEAUD Jean et CHABAS François, Droit civil, tome 2,1 er volume, édition
Montchrestien

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CHAPITRE 2 : L’EFFET RELATIF DU CONTRAT

Nous verrons le principe et les atténuations du principe.


Section 1 : le principe de l’effet relatif des contrats
L’article 1165 dispose : « les conventions n’ont d’effets qu’entre les parties
contractantes, elles ne nuisent point aux tiers et elles ne leur profitent que dans les
cas prévus par l’article 1121 ».

§1 : L’application du principe à l’égard des parties


A leur égard le principe de l’effet relatif des contrats s’applique pleinement. Ce
principe signifie que les effets obligatoires du contrat ne lient que les seules parties
qui l’ont signé, car elles seules ont exprimé la volonté de se lier. Aux parties
contractantes on assimile leurs représentants et leurs ayants cause.

A/ Les représentants des parties au contrat


Le représentant est une personne qui par le mécanisme de la représentation signe
le contrat en lieu et place d’une autre personne appelée représentée. Les
représentants sont assimilés aux parties au contrat car c’est finalement dans le
patrimoine des personnes représentées que le contrat conclu produit ses effets.
Ex : dans le mandat, dans la représentation légale du mineur, d’un conjoint etc.
La représentation ne joue pleinement que si elle remplit certaines conditions :
- le représentant doit avoir le pouvoir de représenter. Ce pouvoir
existe quand le représentant a été investi par la loi ou par une convention
conclue avec le représenté.
- Le représentant doit avoir l’intention de représenter c'est-à-dire
qu’il doit avoir la volonté d’agir pour le compte du représenté.

B/ Les ayants cause universels et les ayants cause à titre universels


Les ayants cause universels sont des personnes qui ont reçu la totalité du
patrimoine d’une autre personne qui est leur auteur.
127
Les ayants cause à titre universel ne reçoivent qu’une quote part c'est-à-dire une
fraction de l’intégralité du patrimoine de leur auteur.
Les ayants cause universels et à titre universels (héritiers ou légataires universels
ou à titre universels) sont assimilés aux parties au contrat car ils continuent les
personnalités juridiques de leurs auteurs, parties contractantes (art 1122). En
recevant le patrimoine ils reçoivent à la fois les biens et sont tenus de répondre
des obligations. Finalement c’est dans le patrimoine de ces ayants cause que les
contrats conclus de leur vivant par leurs auteurs produisent à la mort de ceux-ci
leurs effets.
Toutefois cette règle ne s’applique pas dans certaines hypothèses :
- les contrats intuitu personae s’éteignent par la mort des contractants, ils ne
se transmettent donc pas à leurs ayants cause. Ex : contrat de mandat,
contrat de travail, etc.
- les parties peuvent prévoir que leur contrat s’éteindra à la mort de l’une
d’elles.

§ 2 : A l’ égard des 1/3


Ici, il y a différentes sortes de tiers au contrat. Certains tiers occupent une situation
intermédiaire entre de véritables tiers et les parties au contrat. D’autres tiers sont
totalement étrangers au contrat.
A/ Les tiers occupant une situation intermédiaire
Ce sont les ayants cause à titre particulier et les créanciers chirographaires.
1) Les ayants cause à titre particulier
Ces personnes n’ont de droit que sur un bien déterminé du patrimoine de leur
auteur : ce sont les acquéreurs d’un bien, (acheteur par exemple), le légataire
particulier (donataire par exemple), le cessionnaire d’une créance, les créanciers
hypothécaires ou gagistes. Ce bien est envisagé dans son individualité et non
comme une portion du patrimoine de l’auteur. La question qui se pose est de
savoir si les actp peuvent être tenus des obligations ou dettes de leurs auteurs ou
128
s’ils peuvent invoquer à leur profit des créances de leurs auteurs ? En principe en
se basant sur l’article 1165 du civil, la question ne devrait pas se poser car ils sont
tiers, donc cela n’est pas possible.
Toutefois la réponse à la question devient plus délicate si les créances qu’ils
invoquent et les obligations ou dettes qu’on veut leur imposer, sont attachés au
bien qu’ils ont reçu. Dans cette hypothèse soit la situation a été envisagée par la
loi ou les parties, soit non.
a) les solutions légales ou conventionnelles :
- le législateur n’a prévu que quelques cas particuliers tels que les cas de
vente d’immeubles : dans ce cas selon l’article1743 du code civil, les
contrats de bail passés par le 1er propriétaire sont transférés à l’actp
(acquéreur de l’immeuble) ; il est donc tenu de les respecter et de les
maintenir.
- Les parties peuvent prévoir que l’actp continuera d’assumer et de bénéficier
des contrats conclus précédemment par le vendeur. Ex : dans la vente d’un
fonds de commerce les parties peuvent prévoir que l’actp (l’acheteur)
continuera de s’approvisionner auprès du fournisseur qui avait conclu un
contrat avec le vendeur.
b) en l’absence de dispositions légales et conventionnelles
- Si le contrat fait naître une dette en rapport avec le bien transmis :
 le principe est celui de l’intransmissibilité des dettes à l’actp (art 1165)
 exception : transmission de tous les droits réels grevant le bien reçu:
L’ayant cause à titre particulier acquiert l’élément du patrimoine de son auteur
dans l’état où il se trouve lors de son acquisition c'est-à-dire que le bien acquis
reste affecté par tous les actes qui ont pu le modifier ou le restreindre quand il
était encore dans le patrimoine de l’auteur. Ainsi tous les droits réels grevant un
immeuble vendu par l’auteur sont transmis aux ayants cause à titre particulier.
Ex : l’hypothèque. Mais les obligations contractées par l’auteur à l’égard de

129
l’immeuble ne sont pas transmises aux ayants cause car elles sont personnelles à
l’auteur.
- Si le contrat fait naître une créance en rapport avec le bien transmis : l’actp
peut – il invoquer à son profit une créance ou un droit attaché au bien qu’il
a reçu ? ex : clause de non concurrence, garantie décennale etc.
 le principe est celui de l’intransmissibilité (art 1165 civill)

4) Les créanciers chirographaires


*le principe :
Ce sont des créanciers de somme d’argent à l’égard de l’une des parties au contrat
mais ils ne bénéficient d’aucune garantie pour le recouvrement de leur créance.
La seule garantie qu’ils peuvent invoquer est le droit de gage général sur le
patrimoine du débiteur. Les créanciers chirographaires sont en principe tiers aux
contrats passés par leur débiteur : ils ne peuvent répondre de leurs dettes ni
réclamer l’exécution des contrats de leur débiteur.
Toutefois dans la mesure où tous les actes passés par le débiteur et affectant son
patrimoine ont un retentissement sur la créance chirographaire : tous les contrats
qui enrichissent le patrimoine du débiteur sont bénéfiques au créancier
chirographaire et tous les contrats qui appauvrissent le patrimoine lui sont
préjudiciables, des atténuations au principe sont admises.
 les atténuations au principe :
L’action oblique (art 1166ccvl) : permet aux créanciers chirographaires de se
substituer à leur débiteur négligent pour exercer les droits que celui-ci omet
d’exercer au nom et pour le compte du débiteur.
L’action paulienne (art 1167 c civil) : permet aux créanciers chirographaires
d’attaquer les actes frauduleux passés par leurs débiteurs.

B/ Les 1/3 Penitus extranei


* le principe :
130
Ces tiers sont de véritables tiers au contrat passé par les parties. C’est à leur égard
que l’article 1165 du code civil prévoit que le contrat ne saurait ni leur profiter ni
leur nuire.
* les exceptions :
Toutefois le contrat demeure à l’égard de ces tiers un fait juridique qu’ils ne
peuvent méconnaître, le contrat s’impose à eux : c’est le principe de l’opposabilité
du contrat aux tiers. C’est pourquoi la jurisprudence retient la responsabilité des
tiers qui se rendent complices de l’inexécution d’un contrat auquel ils sont
étrangers. Ces tiers engagent à l’égard de la partie contractante victime de
l’inexécution, leur responsabilité délictuelle (civil 1ère chambre, 7 octobre 1958,
au Dalloz 1958, p763).
A l’inverse le tiers peut invoquer l’existence du contrat contre les parties au
contrat : c’est le principe de l’opposabilité du contrat par les tiers (requête 8 mars
1937, au Dalloz Hebdo 1937, p217- au Sirey 1937 1ère partie p241). Ainsi il est
admis qu’un tiers qui subit un préjudice du fait de la mauvaise exécution de ses
obligations par une partie contractante, peut se prévaloir du contrat pour demander
la réparation de son préjudice. Ex : un prestataire de service pose mal un ascenseur
qui s’effondre et blesse un usager, un vendeur livre une chose de mauvaise qualité
qui blesse ultérieurement quelqu’un d’autre. L’inexécution de l’obligation
contractuelle sera invoquée par la victime comme la preuve d’une faute
délictuelle.

CE QU’IL FAUT RETENIR :


Le second principe sacrosaint du droit des contrats est l’effet relatif des contrats dont le
fondement est l’art 1165 cc. Selon ce principe, le contrat ne peut pas profiter aux tiers ni leur
nuire. Ainsi c’est seulement les parties au contrat qui subissent tous les effets de celui-ci. Il est
nécessaire d’apprécier ce principe tant à l’égard des parties qu’à l’égard des tiers.
A l’égard des parties, il faut dire que les représentants des parties et leurs ayants-cause sont
assimilés aux parties contractantes.
Le représentant est une personne qui signe le contrat en lieu et place d’une autre personne
appelée le représenté. Ils sont assimilés aux parties car ils agissent au nom et pour le compte du
représenté. La représentation est valable lorsque le représentant a un pouvoir de représenter,
qui lui est soit conféré par la loi, soit par la convention. Ensuite il doit avoir l’intention de

131
représenter. Quant aux ayants-cause universels ou à titre universel, ce sont des personnes qui
ont reçu respectivement la totalité du patrimoine d’une autre personne qui est leur auteur, ou
une quote part, c’est-à-dire une fraction du patrimoine de leur auteur. Ils sont assimilés aux
parties car continuent la personnalité juridique de leur auteur (art 1122 cc). Ils bénéficient des
droits mais sont également tenus pour les dettes. Toutefois, cette règle ne s’applique pas aux
contrats intuitu personae conclus par leur auteur, de sorte qu’à sa mort le contrat prend fin, mais
aussi lorsque les parties ont prévu que le contrat prendra fin à la mort de l’une d’elles.
A l’égard des tiers, nous avons les ayants-cause à titre particulier, les créanciers chirographaires
et les tiers penitus extranei.
Les ayants cause à titre particulier sont des personnes qui n’ont de droit que sur un bien
déterminé du patrimoine de leur auteur (acquéreur d’un bien par exemple). Ce bien est
considéré comme une individualité. A la question de savoir si les actp peuvent être tenu des
obligations ou dettes de leurs auteurs ou s’ils peuvent invoquer des créances de leurs auteurs il
y a des solutions légales ou conventionnelles tel que dans le cas du bail selon l’art 1743 cc.
Ainsi l’acquéreur d’un immeuble est tenu de continuer les contrats de bail passés par le 1er
propriétaire. Mais en l’absence de solutions légales ou conventionnelles, si le contrat fait naitre
une dette par rapport au bien transmis, il y a le principe de l’intransmissibilité des dettes à l’actp.
Toutefois, lorsqu’il s’agit de droit réel grevant le bien, il y a transmission de ceux-ci (une
hypothèque). Dans le cas où le contrat fait naitre une créance au profit de l’actp, le principe de
l’intransmissibilité joue également.
A l’égard des créanciers chirographaires, l’art 1165 cc a vocation également à s’appliquer même
s’il est vrai qu’ils subissent les variations du patrimoine de leur débiteur sans pouvoir s’opposer
aux contrats qu’il passe. Toutefois, par la voie de l’action oblique (1166 cc) et l’action paulienne
(1167 cc), les créanciers chirographaires disposent de ces actions pour agir respectivement
contre le débiteur de leur débiteur, lorsque ce dernier est négligent, et contre des tiers à qui leur
débiteur a consenti des droits en fraude de leurs droits.
S’agissant des tiers penitus extranei, il s’agit de véritable tiers, et l’art 1165 cc s’applique
pleinement. Néanmoins, le contrat reste à leur égard un fait juridique qu’ils ne peuvent
méconnaitre, il s’impose à eux : c’est le principe de l’opposabilité du contrat aux tiers. Ils ne
doivent pas se rendre complice de l’inexécution du contrat auquel ils sont étrangers. Egalement,
les tiers peuvent invoquer l’existence du contrat contre les parties lorsqu’il subit un préjudice
de l’exécution de celui-ci : il s’agit de l’opposabilité du contrat par les tiers.
EXERCICES D’APPLICATION :
I- Contrôle de connaissances

1- Un ayant cause universel peut-il être tenu d’une dette contractée par son auteur ?
Justifiez votre réponse
2- Un ayant cause universel peut-il être tenu de poursuivre les contrats conclus par son
auteur ? Justifiez votre réponse
3- Un ayant cause à titre particulier peut-il être tenu d’une dette née du fait de son auteur,
c’est-à-dire de l’ancien propriétaire du bien ?

Les références bibliographiques


- ASSI ESSO Anne Marie, Droit civil les obligations, éditions IUBA, Abidjan,
2012.

132
- Bony Serges, Droit civil, droit des obligations, les éditions ABC, 2016

- François TERRE, Yves LEQUETTE, Philipe Simler, Droit civil,


les obligations, Paris 2009
- MAZEAUD Jean et CHABAS François, Droit civil, tome 2,1 er volume, édition
Montchrestien

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Section 2 : La dérogation au principe de l’effet relatif des contrats.
Ces dérogations concernent deux sortes de contrat. L’une des dérogations est
réelle : C’est la stipulation pour autrui. L’autre n’est qu’apparente : C’est la
promesse de porte- fort.

§1 : La stipulation pour autrui


Elle est prévue et réglementée par les articles 1119 et 1121. C’est un mécanisme
juridique dans lequel une personne, le stipulant fait prendre à une autre personne
le promettant l’engagement de servir une prestation à une tiers personne le
bénéficiaire. Par ce mécanisme, une personne tierce à un contrat devient
créancière de l’une des parties à ce contrat. Trois systèmes juridiques ont été
proposés pour justifier la nature juridique de la stipulation pour autrui3 :
-
De toutes ces trois hypothèses, la jurisprudence retient la troisième. Il est résulte
que la stipulation pour autrui est une institution particulière.

A/ Les conditions de validité de la stipulation pour autrui


Elle est soumise aux conditions générales de validité des actes juridiques c'est-à-
dire les conditions tenant au consentement, à la capacité, à l’objet et à la cause.
Deux points importants se posent en la matière :
 Dans quel genre de contrat la stipulation pour autrui doit-elle être
insérée ?

3
La théorie de l’offre ou encore la théorie du double contrat. Le stipulant signe un premier contrat 134
avec le promettant à l’égard de qui il acquiert un droit. Dans un deuxième contrat qu’il signe avec le
tiers bénéficiaire il offre de lui céder ce droit, ce que ce tiers accepte. La théorie de la
gestion d’affaires : on considère que le stipulant et le promettant gèrent les affaires du bénéficiaire, et
ce dernier en acceptant la stipulation ratifie cette gestion. Le système de la création du droit direct : ici
le tiers bénéficiaire acquiert un droit direct contre le promettant.
 A quelle condition un tiers peut-il être désigné comme
bénéficiaire ?

1) Les conditions tenant au contrat principal conclu entre le stipulant


et le promettant
La stipulation est une opération accessoire, insérée dans un contrat principal. Ce
contrat est conclu entre le stipulant et le promettant. Les articles 1119 et 1921 du
code civil tendent à limiter le genre de contrat que l’on peut prendre en compte.
A l’origine, ces deux articles n’admettaient la SPA que dans deux sortes de
contrats :
- Les donations avec charges
- Les contrats dans lesquels la stipulation était l’accessoire d’une
stipulation principale pour soi.
Depuis la jurisprudence a étendu la validité de la stipulation à d’autres hypothèses.
Pour se faire elle interprète largement les textes. Il en résulte qu’aujourd’hui la
stipulation connaît en pratique un grand essor. Elle s’applique dans différents
secteurs d’activités économiques : En matière de transport de marchandises
quand l’accord conclu entre le transporteur et l’expéditeur fait naître un droit au
bénéfice du destinataire ; dans le contrat de transport des personnes, dans ceux-ci,
le voyageur est sensé avoir stipulé avec le transporteur au bénéfice de ses propres
parents en cas d’accident mortel (Civil 6 Décembre 1932 et 24 Mai 193,3 Dalloz
1933, 1ère partie, p137 Sirey 1934, 1ère parte, p18) ; dans le contrat d’assurance
vie etc.

2) Les conditions requises en la personne du tiers bénéficiaire


Le bénéficiaire d’une stipulation ne peut être une personne indéterminée car en
droit, un droit ne saurait naître sans que l’on ne sache au profit de qui il naît. Mais
la stipulation pour autrui est valable si à défaut d’être nommément désigné au

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moment de la conclusion du contrat, le tiers bénéficiaire est déterminable au
moment de l’exécution du contrat.
Une autre question se pose : la stipulation peut-elle naître au profit de personnes
futures ? C'est-à-dire de personnes qui non seulement ne sont pas nées mais aussi
ne sont pas encore conçues au moment de la stipulation ? Initialement la
jurisprudence avait exclu une telle possibilité. Mais en droit Français, une reforme
intervenue en 1980 et modifiant la loi sur les assurances de 1930 a admis cette
possibilité. Il en résulte maintenant qu’en la matière des enfants non encore nés
peuvent être désignés comme tiers bénéficiaires de l’assuré.

B/ Les effets de la stipulation pour autrui


Ces effets sont essentiellement d’origine jurisprudentielle, mais la loi de 1930 sur
l’assurance modifiée par le code CIMA les a consacrés par la suite.
Il faut envisager ces effets sous trois angles :
 Les rapports entre le stipulant et le promettant
Entre ces deux personnes il y a deux sortes de rapports :
- Ces 2 personnes sont liées d’abord par un contrat principal. Sur ce
contrat principal se grève la stipulation. Ce contrat principal s’exécute
selon le droit commun des contrats c'est-à-dire que chaque partie doit
respecter l’engagement pris envers l’autre partie. Elles engagent
réciproquement leur responsabilité contractuelle.
- le 2ème rapport dérive de la stipulation. Dans ce cas une question se
pose : Le stipulant peut-il obliger le promettant à exécuter la promesse
faite au bénéfice du tiers ? Le stipulant n’a dans ce cas qu’un seul moyen
indirect. Il peut agir en résolution du contrat principal pour inexécution.
Cette action lui permet de reprendre ce qu’il a fournit au promettant.
Le stipulant dispose maintenant d’une action directe contre le promettant en
exécution de la stipulation. Mais il n’agit pas pour son propre compte, il agit
au bénéfice du tiers (civil 1ère chambre 12 juillet 1956 Dalloz p749).
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 Les rapports entre le bénéficiaire et le promettant
Entre ces deux personnes il n’y a pas de contrat, mais le bénéficiaire a un
droit direct contre le promettant qui lui permet de l’actionner en exécution
de la stipulation (civil 31 Janvier 1969 JCP 2ème partie n°15.982).
Par ailleurs, en vertu du droit direct, le tiers bénéficiaire est l’ayant cause du
promettant et non du stipulant. Il en résulte que ni les créanciers, ni les héritiers
du stipulant ne peuvent contester ce droit qui naît le jour même où la stipulation
est faite. Le droit du tiers bénéficiaire n’est cependant pas indépendant du contrat
principal.
En conséquence le promettant peut opposer au tiers, les exceptions et les clauses
de résiliation conventionnelles prévues au contrat principal. Ainsi l’assureur peut
refuser d’indemniser la victime si l’assuré ne paie pas ses primes ou ne déclare
pas tous ses risques. Le tiers bénéficiaire bien que bénéficiant d’un droit direct
contre le promettant, ne peut donc agir contre le promettant en résolution du
contrat principal. En effet en tant que tiers il ne lui ait pas reconnu l’intérêt pour
agir.
 Les rapports entre le stipulant et le tiers bénéficiaire
Entre ces deux personnes, il n’y pas forcement de contrat, c’est pourquoi la
stipulation peut être à titre gratuit ou à titre onéreux :
1) La stipulation est à titre gratuit quand le stipulant désigne comme
bénéficiaire un tiers à qui il ne doit rien.
2) La stipulation est à titre onéreux quand la stipulation désigne un
bénéficiaire qui du fait d’un précédent contrat est son créancier. Ici le
stipulant agit dans le but d’éteindre une dette.
Par ailleurs le stipulant peut révoquer la stipulation faite au profit du tiers. Cette
révocation n’entraîne pas l’anéantissement du contrat principal. Seule la
stipulation grevée sur le contrat principal est anéantie. Et la prestation initialement
destinée au bénéficiaire retombe dans le patrimoine du stipulant. Cependant, le

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droit de révocation de la stipulation reconnu au stipulant prend fin dès que le tiers
bénéficiaire accepte la stipulation. Cette acceptation peut être expresse ou tacite.

§ 2 : La promesse de porte- fort


A/ Généralités
Les articles 1119 et 1120 du code civil réglementent deux sortes de promesse : la
promesse pour autrui et celle de porte fort.
- Il y a promesse pour autrui quand une personne A conclu une
convention avec une autre B, en s’engageant à ce qu’un tiers Z l’exécute.
Z n’a jamais été consulté dans cette transaction. Une telle promesse est
sans effet juridique et donc est nulle car elle n’engage ni Z ni même A.
L’article 1119 s’y oppose. En effet on ne peut s’engager que pour soi
même.
- A l’inverse, la promesse de porte-fort est valable. Elle se fonde sur
l’article 1120 du code civil. Il y a promesse de porte-fort quand une
personne X conclu un contrat avec une autre Y , en promettant qu’un tiers
Z ratifiera ce contrat. Une telle promesse est aussi appelée convention de
porte-fort. Elle est valable juridiquement.

B/ Les effets de promesse de Porte-fort


Ces effets varient selon que le tiers accepte ou non de ratifier la convention.
1- Si le tiers refuse de ratifier la convention :
Ce refus entraîne deux conséquences :
 Le contrat principal conclu entre X et Y est privé de tout effet.
S’ils avaient exécuté les prestations réciproques, elles sont restituées.
 Le porte-fort doit indemniser son contractant pour le préjudice
résultant de la non ratification. Le porte-fort est alors en faute de n’avoir
pas rapporté la signature du tiers car il était tenu d’une obligation de
résultat.
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2- Si le tiers accepte de ratifier :
Il y a deux conséquences :
 Cette ratification produit un effet libératoire à l’égard du porte-fort.
Il a promis la signature et l’a rapportée. Sa responsabilité est désormais
écartée.
 Le contrat principal produit tous ses effets de façon retro active. Il
est désormais considéré comme ayant été conclu entre le contractant du
porte-fort et le tiers ratifiant. Et cela à la date où le Porte-fort et son
contractant l’ont effectivement conclu.
Finalement la promesse de Porte-fort n’est qu’une exception apparente au
principe de l’effet relatif des contrats, car en ratifiant le tiers devient partie à ce
contrat, même s’il n’était que personne représentée au contrat. Il est donc normal
que le contrat produise effet à son égard.

CE QU’IL FAUT RETENIR :

Le principe de l’effet relatif du contrat est assorti d’exceptions qui sont de nature soit à mettre
des charges sur la tête d’un tiers : la promesse de porte-fort, ou soit à créer des droits au profit
d’un tiers : la stipulation pour autrui.
La stipulation pour autrui est prévue par l’art 1119 cc et 1121 cc. C’est un mécanisme qui
consiste pour une personne appelée le stipulant qui obtient d’une autre appelée le promettant
qu’elle s’engage à exécuter une prestation au profit d’un tiers bénéficiaire. Mais pour être
valable, cette opération doit respecter des conditions tenant de prime abord au contrat principal
entre le stipulant et le promettant. En effet, la SPA est une opération accessoire insérée dans le
contrat principal, et elle était limitée à deux sortes de contrat, mais aujourd’hui son champ est
beaucoup plus large. Ensuite, il y a des conditions tenant en la personne du tiers bénéficiaire. Il
doit s’agir d’une personne déterminée, mais elle est valable si à défaut d’être nommément
désigné au moment de la conclusion du contrat, le tiers bénéficiaire est déterminable au moment
de l’exécution du contrat.
Lorsque les conditions sont remplies, il en résulte des effets qui s’apprécient d’abord dans les
rapports entre le stipulant et le promettant. Ici les parties doivent respecter leurs obligations en
vertu du contrat principal qui les lie. Mais le stipulant ne peut pas obliger le promettant à
exécuter sa prestation, il ne peut qu’agir en résolution. Ensuite dans les rapports entre le
bénéficiaire et le promettant, le bénéficiaire est tiers au contrat mais il a un droit direct qui lui
permet de réclamer l’exécution de la prestation. Mais le promettant peut opposer toutes les
exceptions et clauses de résiliation conventionnelle qui figurent dans le contrat principal. Enfin
dans les rapports entre le stipulant et le bénéficiaire, le stipulant dispose d’un droit de révocation

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de la stipulation tant que le bénéficiaire ne l’a pas acceptée, mais dès lors qu’il y a acceptation,
il ne peut plus avoir révocation.
La promesse de porte fort est régie par l’art 1120 cc, peut se définir comme un contrat par lequel
le porte fort s’engage auprès de l’autre partie à obtenir d’un tiers qu’il ratifie le contrat envisagé.

Les effets de cette opération sont fonctions de la ratification ou non du contrat envisagé. En
effet, en cas de refus le contrat principal est privé de tout effet, de sorte que les prestations
exécutées seront restituées. En outre le porte-fort doit indemniser son cocontractant car il était
tenu d’une obligation de résultat. Mais si le tiers ratifie le contrat, le porte-fort est libéré et le
contrat produit tous ses effets de façon rétroactive.

EXERCICES D’APPLICATION :

I- Contrôle de connaissances

1) Mr Yao a conclu un contrat d’assurance-vie avec la compagnie d’assurance Colina au


profil de ses enfants nés et à naitre. Ceux-ci percevront de la compagnie d’assurance,
10 millions de FCFA en cas de décès de leur père. Quelle est la technique juridique
utilisée ? Quelles sont les différentes appellations de chaque intervenant ?
2) Koffi propriétaire indivis d’un immeuble avec sa sœur Dora, consent un bail au profil
de Soro en promettant que sa sœur consentira aussi au bail. Inquiet tout de même Mr
Soro voudrait savoir ce qui se passera si sa sœur refuse de consentir au bail.

II- Résoudre le cas pratique suivant


Mr Koffi est un entrepreneur immobilier jouissant d’une longue et riche expérience dans ce
domaine. En janvier 2008, il décide de se séparer de son associé et de s’installer à son propre
compte, en créant une société unipersonnelle à responsabilité limitée.
Il sollicite en emprunt d’un montant de 500 millions auprès de la Banque Ivoirienne de Crédit
(BIC), dans le but de construire un immeuble sur son terrain situé à la Riviera III. Selon les
clauses du contrat de prêt, la BIC bénéficie d’une hypothèque sur l’immeuble à construire, qui
servira de siège social à la société. La construction de l’immeuble est confiée à l’entreprise de
construction BATIM dont le responsable est M. Bosson. Le prix des travaux s’élève à 400
millions y compris la main d’œuvre. La société de construction a confié divers travaux de
plomberie dans l’immeuble à M. Moussa. Les travaux de construction prirent fin en juin
2008.M. Koffi chargera la société PRIMOR de l’installation des tables et bureaux, et de la
décoration des lieux.
Les affaires de la société unipersonnelle à responsabilité limitées ont été très florissantes jusqu’à
juin 2009. Depuis cette date, la société connait d’énormes difficultés financières qui ont
nécessité le licenciement d’une grande partie de son personnel. M. Koffi décide finalement de
vendre l’immeuble construit à 6 millions. Richmond un riche homme d’affaires décide
d’acquérir l’immeuble au prix proposé. La BIC qui vient d’être informée de la vente de
l’immeuble voudrait agir en justice contre M. Richmond, car M. Koffi lui doit encore 200
millions au titre du contrat de prêt.
Quant à la société de construction BATIM elle vous apprend que M. Koffi lui doit encore 100
millions au titre des travaux de construction. Elle voudrait également agir contre M. Richmond
le nouveau propriétaire de l’immeuble pour se faire payer.

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Le responsable de la société PRIMOR, vous informe que sa société est encore créancière d’une
somme de 50 millions FCFA au titre des travaux d’aménagement et de décoration. Il vient
d’être informé que la société unipersonnelle à responsabilité limitée est titulaire de plusieurs
créances qu’elle néglige de percevoir. Ainsi Dame Ratou est débitrice de 10 millions ainsi que
M. Ali d’une somme de 10 millions. Ces créances sont venues à échéance depuis juillet 2009.
Par ailleurs le responsable de la société unipersonnelle à sa fille Flora Koffi. Il voudrait savoir
s’il dispose de moyens juridiques pour contester la donation et pour agir contre les débiteurs de
la société unipersonnelle.

Quant à M. Richmond il vient de constater plusieurs fissures et malfaçons dans l’immeuble,


dues à la mauvaise exécution des travaux de construction, ainsi que la défectuosité des travaux
de plomberie. Il voudrait mettre en œuvre la responsabilité contractuelle de la société de
construction BATIM et du plombier Moussa.
M. Affairé, voisin immédiat de l’immeuble vendu, veut intenter une action en responsabilité
contre la société BATIM parce qu’une partie de la clôture de l’immeuble a provoqué dans son
effondrement des dégâts matériels dans sa résidence.

Conseillez les différentes parties sur les chances de succès des actions envisagées.

Les références bibliographiques


- ASSI ESSO Anne Marie, Droit civil les obligations, éditions IUBA, Abidjan,
2012.
- Bony Serges, Droit civil, droit des obligations, les éditions ABC, 2016

- François TERRE, Yves LEQUETTE, Philipe Simler, Droit civil,


les obligations, Paris 2009
- MAZEAUD Jean et CHABAS François, Droit civil, tome 2,1 er volume, édition
Montchrestien

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