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Semen
Revue de sémio-linguistique des textes et discours

19 | 2005 :
L'ordre des mots

L’Oulipo du traducteur
Isabelle Collombat
https://doi.org/10.4000/semen.2143

Entrées d’index
Mots-clés : Transposition, Ordre des mots, Oulipo, Traduction, Logique

Texte intégral
1 Les rapprochements entre traduction et Oulipo sont dans l’ordre des choses – dans l’ordre des
mots  –  : parler de «  contrainte  » ou de «  servitude1« est courant en traduction, et le mot
«  traduction  » affleure souvent dans la terminologie oulipienne, où fleurissent les traductions
homophoniques, syntaxiques et encore homosémantiques2.  Comme le notent Baetens et
Schiavetta (1998 : 9),

Traduire la contrainte suppose […] une démarche spécifique qui n’est pas sans rappeler l’écriture à
contraintes, et qui rapproche le traducteur de l’écrivain. À l’inverse, les pratiques de l’écriture à contrainte
sont peut-être moins éloignées du travail de traduction […] que ne pourraient penser ceux qui croient
pouvoir faire l’économie de toute contrainte.

2 De fait, on décèle entre les deux types de pratique des points communs significatifs, l’Oulipo
pouvant être abordé, à l’instar de la traduction, de deux manières complémentaires et
indissociables : « une analytique et une synthétique » (Lescure, in Oulipo 1988 : 33). Selon cette
démarche duale de praticien et de théoricien, oulipiens et traducteurs tour à tour analysent les
procédés de transformation textuelle qui sont à l’œuvre puis les appliquent.
3 Autre similitude entre traduction et littérature oulipienne  : l’absence de place attribuée à
l’inspiration – comme le soulignent notamment Baetens et Schiavetta (1998 : 10) – et au hasard.
Exercices essentiellement cérébraux, traduction et littérature oulipienne partent d’un texte
existant et le transposent : ce sont donc des modes de transformation consciente et construite.
4 Enfin, « traduire est une chance d’écriture qu’on ne doit jamais prendre à la légère. À plusieurs
points de vue, on doit même la croire interchangeable avec la pratique même de l’écriture à
contraintes  », précisent encore Baetens et Schiavetta (ibid.). Sans doute certains membres de
l’Oulipo auront-ils pris cette affirmation au pied de la lettre, si l’on en juge d’après le nombre
d’Oulipiens qui ont pratiqué la traduction, tels Jean Queval, Jacques Roubaud, Raymond
Queneau, Georges Perec ou encore Italo Calvino.
5 Nous allons donc étudier ce que nous estimons être les quatre points de convergence
principaux entre la traduction et l’Oulipo afin d’en faire ressortir les similitudes et dissemblances
essentielles. Nous verrons successivement comment ces pratiques métamorphosent les textes,
quelles contraintes elles mettent en œuvre et en mots, leurs rapports avec la logique et leur statut
au regard de l’invisibilité.
1. Les avatars du texte
6 Traduction et exercices oulipiens ont tout d’abord pour dénominateur commun d’être des
modes de transformation textuelle. Dans sa typologie des pratiques hypertextuelles, Gérard
Genette [1982  : 49, 238] classe la pratique oulipienne parmi les transformations textuelles à
fonction ludique (ou « parodie »), et la traduction parmi les transformations de type sérieux (ou
«  transposition  »). Ainsi, il ressort qu’une des différences notables dans le mode de
fonctionnement de ces deux types de métamorphose textuelle tient à la présence ou à l’absence de
ludicité. Il existe toutefois des cas limites de traductions ludiques, par exemple le recours à la
traduction automatique pour la production de textes à l’aide des fonctions «  traduction  » de
certains moteurs de recherche. Cette pratique est bien évidemment à dissocier des recherches
dans le domaine du traitement automatique des langues et de l’utilisation de la traduction
automatique à des fins sérieuses ; aussi le détournement de ces outils à des fins ludiques peut-il
être considéré comme une pratique oulipienne. Ce que certains Oulipiens avérés revendiquent
d’ailleurs  : c’est le cas des «  dérivations de textes  » et «  aller-retours  » pratiqués par le
Laboratoire d'Inventions Scientifique(s)3. La dérivation consiste à effectuer une «  chaîne de
traductions » : le texte de départ est traduit dans plusieurs langues successivement, avant d’être
retraduit dans la langue de départ. L’aller-retour, quant à lui, consiste à traduire le texte de
départ dans une langue-cible, puis à traduire le texte-cible en langue-source. Utilisé à des fins
sérieuses, ce procédé – nommé « rétrotraduction » – permet de vérifier les éventuelles « pertes en
ligne » lors du processus de traduction. À des fins ludiques – détournement permis par la relative
imperfection des fonctions «  traduction  » des moteurs de recherche  –, ce procédé mène à la
production d’un ou de plusieurs textes générés en fonction de formules (inconnues du traducteur
oulipien) fixes. En somme, la règle logique mise en œuvre s’apparente au sophisme : « Tous les
chevaux ont quatre pattes ; mon chat a quatre pattes ; donc, mon chat est un cheval ». Ainsi, la
traduction automatique élémentaire établit un rapport d’équivalence entre deux mots de deux
langues, sans tenir compte de la polysémie ni du contexte, ou en choisissant une acception
erronée.
7 Pour illustrer l’utilisation de la traduction automatique comme procédé oulipien, nous
présentons en   quelques variations de « Gaspard Hauser chante », de Paul Verlaine. Le choix de
ce texte n’est pas anodin  ; c’est en effet le point de départ des «  Micro-traductions  »
perecquiennes. Ainsi, pour reprendre la typologie de Genette, l’exercice que nous nous proposons
de réaliser tient à la fois de la transposition, de la parodie et du pastiche4 ; il est à la fois sérieux et
ludique, à la fois transformation et imitation. La multiplicité des pratiques hypertextuelles qui
sont dès lors en jeu permet de brouiller la contrainte ; c’est dire si l’exercice est, dans l’intention et
au final, éminemment oulipien…
8 Autre possibilité, exemplifiée par le manifeste «  Mots en mouvements  » de l’Association des
traducteurs et traductrices littéraires du Canada  : à partir d’un original, lancer un appel à
traduction5. L’original (en l’occurrence, un poème en français et un autre en anglais, tous deux
d’auteurs reconnus) trouve sa pluripotentialité exprimée dans chacune des traductions proposées,
presque une trentaine pour chaque texte. Les différences notables entre les traductions qui en
résultent illustrent de manière probante la notion de potentialité contenue dans l’œuvre originale.
9 La question du statut du texte original mérite d’ailleurs qu’on s’y arrête. Cas extrême : il n’existe
pas. Certains oulipèmes6 sont en effet dits «  autonomes  »  ; c’est le cas par exemple de La
Disparition de Perec, qui n’est le fruit d’aucun texte transformé, mais un récit original écrit selon
une contrainte lipogrammatique. On pourrait rapprocher l’oulipème autonome de la pseudo-
traduction, cette «  traduction sans original  » pour reprendre la mention paratextuelle d’un
ouvrage d’Agnès Whitfield (1993) ou « contrefaçon “ex nihilo” délibérée » (Collombat 2003a : 151,
d’après Eco, 1992 : 193). Ces deux cas mettent en évidence a contrario l’existence d’un code ou
d’une contrainte « invisibles », peut-être même inexistants, qui ne valent peut-être que par leurs
effets. Plutôt que de métamorphose, il serait alors question d’anamorphose. Le concept même de
transformation, évoqué comme un vecteur sous-jacent à l’œuvre, fait dans ce cas partie du
processus de création lui-même  ; d’une certaine manière, il permet de mettre l’accent sur la
pluripotentialité intrinsèque au texte, comme si le produit édité n’était qu’une des actualisations
possibles d’une œuvre antérieure, que celle-ci existe ou non.
10 Quoi qu’il en soit, dans la plupart des cas, oulipèmes et traductions sont le résultat d’une
translation d’un texte original selon un code, le terme de code pouvant s’entendre ici dans le sens
d’ «ensemble de contraintes ».
11 Prenons encore une fois l’exemple des micro-traductions de Perec : selon Reggiani (2000 : 13),
dans ces quinze variations sur le poème de Verlaine « Gaspard Hauser chante », le texte original
est transformé par des manipulations diverses qui jouent tant sur le fond que sur la forme
(disposition dans la page), «  allant jusqu’à la suppression de certains éléments du texte […] et
même à sa disparition totale en tant que tel ». L’auteure ajoute que « le travail de Perec manifeste
donc un total irrespect du texte », la manifestation la plus patente de cet irrespect apparaissant

dans la disposition même des « traductions » sur la page. Le poème de Verlaine ne jouit en effet de ce point
de vue d’aucun privilège, il ne constitue que le premier terme d’une série – l’ «état initial » – qui n’est
organisée par aucune hiérarchie. Le poème verlainien n’est qu’un élément textuel parmi d’autres, dans une
série de « variations » qui seront lues comme autant de ses possibles.

12 Ainsi, le texte de Verlaine serait comme dépossédé de son statut d’original, d’œuvre unique, car
il n’est «  que  » le premier d’une série (ou d’un ordre). L’analyse de Reggiani peut paraître
étonnante, dans la mesure où le fait que Perec choisisse ce texte de Verlaine pour point de départ
de ses variations peut au contraire s’interpréter comme une marque de déférence. Comme le
signale Topia (1990 : 47), « c’est […] le propre de toute grande œuvre de rester perpétuellement
ouverte à des mutations postérieures  », ce qui signifie, en d’autres termes, que la «  grande
œuvre » est justement le substrat de la potentialité littéraire – voire de la littérature potentielle.
Choisir un poème particulier comme point de départ d’une série de variations, c’est lui
reconnaître, précisément, ce statut de « grande œuvre ».
13 En traduction, ce constat est particulièrement évident dans les retraductions, i. e. les nouvelles
traductions d’une même œuvre7. Selon Topia, il est illusoire d’opposer la prétendue éternité de
l’œuvre originale au caractère éphémère de la traduction  ; «  paradoxalement, c’est l’œuvre qui
change et la traduction qui ne change pas » (1990 : 46). De fait, l’œuvre originale évolue avec le
temps, au fil des changements de perspective liés à l’évolution sociale et historique, dans la
perspective eliotienne d’interaction temporelle : « The past is altered by the present as much as
the present is directed by the past  » (Eliot, 1919  : 39). L’œuvre originale se métamorphose
progressivement en tous ses possibles, sa pluripotentialité se développant avec le temps. Au
contraire, la traduction fige une et une seule actualisation possible de la virtualité de l’original.
Elle résout l’ambiguïté, choisit une voie au détriment d’autres options et répond à des normes
temporelles, caduques par excellence. C’est pourquoi la retraduction est inévitable  ; à quelques
exceptions près, la première traduction est tellement marquée par les normes traductionnelles
d’une époque donnée que le code normatif qui préside à sa production en oblitère la potentialité.
14 Les exceptions à ce figement ? Ce que Berman (1990 : 2) nomme « grandes traductions », qui
constituent un «  événement dans la langue d’arrivée  » et sont alors élevées au rang d’œuvre
originale  ; les traductions des œuvres d’Edgar Poe par Baudelaire sont ainsi qualifiées de
« grandes traductions ». Pour preuve, dans Le Petit Robert, à l’entrée « reliquat », est attribuée à
Baudelaire (et non à Poe) la citation « un petit reliquat de son patrimoine », qui est extraite de
Double Assassinat dans la rue Morgue, version française de The Murders of the Rue Morgue.
Dans le même ouvrage lexicographique, les citations d’Oscar Wilde sont attribuées à leur auteur
et non au traducteur, même si ces citations – à l’origine en anglais – sont données en français,
donc traduites.

2. La contrainte
15 Comme le rappelle Lapprand, «  tout lecteur averti sait qu’un texte oulipien se fonde sur une
contrainte, ou une combinaison de plusieurs contraintes  » (1998  : 47). En traduction, la
contrainte est elle aussi multiple et dépend d’un grand nombre de paramètres :

Rappelons qu’au moment de traduire, le traducteur rapproche deux systèmes linguistiques, dont l’un est
exprimé et figé, l’autre est encore potentiel et adaptable. Le traducteur a devant les yeux un point de départ
et élabore dans son esprit un point d’arrivée ; […] il va probablement explorer tout d’abord son texte :
évaluer le contenu descriptif, affectif, intellectuel des unités de traduction qu’il a découpées ; reconstituer la
situation qui informe le message ; peser et évaluer les effets stylistiques, etc. (Vinay et Darbelnet, 1958
[1977] : 46)

16 Le traducteur repère les unités de traduction (ou unités sémantiques) présentes dans le texte-
source et, dans le texte-cible, s’attache à respecter la charge sémantique du texte-source. Ce
faisant, il doit aussi tenir compte d’éléments sémantiques implicites, tels que le niveau de langue,
la connotation ou les diverses prescriptions ou limitations d’emploi d’un mot ou terme
(archaïsme, régionalisme, etc.).
17 Certes, ces contraintes sont cousines de celles de l’œuvre littéraire,

tenue de s’accommoder tant bien que mal d’une série de contraintes et de procédures qui rentrent les unes
dans les autres comme des poupées russes. Contraintes du vocabulaire et de la grammaire, contraintes des
règles du roman […] ou de la tragédie classique […], contraintes de la versification générale, contraintes des
formes fixes […], etc. (Le Lionnais, in Oulipo, 1973 : 16)
18 Cependant, il convient de souligner que la plupart des contraintes autres que les servitudes
linguistiques font appel au jugement du traducteur qui, libre de s’y soumettre ou non, créera,
selon son choix, un effet particulier. La question du choix de la contrainte par le scripteur est en
effet centrale : selon Reggiani (2000 : 10), les contraintes discursives (« du vocabulaire et de la
grammaire ») sont imposées au scripteur, tandis que les contraintes d’écriture « relèvent, pour le
scripteur, d’un choix volontairement consenti ». Pour preuve de la centralité du choix en fonction
du type de contraintes, le fait qu’il existe – comme nous l’avons vu dans le cas du manifeste
«  Mots en mouvement  » – plusieurs possibilités de traductions grammaticalement correctes et
sémantiquement justes d’un même texte. Cela revient à dire qu’au-delà des servitudes
linguistiques, il existe d’autres codes, d’autres modes de passage interlinguistiques qui ouvrent la
voie à d’autres possibles de l’œuvre originale.
19 En traductologie, on oppose habituellement8 la théorie comparative ou contrastive (celle de
Vinay et Darbelnet, précisément) et la théorie interprétative, formalisée notamment par Lederer
et Seleskovitch (1984). Selon ses détracteurs, l’approche constrastive serait «  trop axée sur la
“langue”« (Roberts, 1984  : 48) et sur les aspects purement formels, tandis que l’approche
interprétative consiste exclusivement en une théorie du sens reposant sur la triade
« compréhension – déverbalisation – réexpression ». Au juste, la théorie contrastive ressortit elle
aussi à une théorie du sens, mais l’aspect sémantique y est plus étroitement lié aux aspects
formels (lexicaux, grammaticaux, stylistiques, etc.) et tient mieux compte, selon nous, des
interactions entre le sens et la forme ainsi que du polymorphisme des contraintes qui en résulte.
En ce sens, les contraintes définies dans le cadre de la théorie contrastive se rapprochent, dans
leur variété, des contraintes oulipiennes, qui visent à produire un texte « recevable » (Reggiani,
2000 : 14), donc sémantisé – fût-il abscons –, sans jamais perdre de vue le mot : la plus concrète
des contraintes lexicales serait alors le lipogramme.
20 Dans l’optique traditionnelle de la stylistique comparée, on recense sept procédés de
traduction, énoncés par leurs inventeurs, Jean-Paul Vinay et Jean Darbelnet, dans l’ordre
croissant de difficulté ou d’éloignement par rapport au texte original9 :
21 L’emprunt : procédé de traduction qui consiste à conserver dans le texte-cible un mot ou une
expression appartenant à la langue-source, soit en l’absence d’un équivalent lexicalisé, soit pour
des raisons stylistiques ou rhétoriques.
22 Le calque : emprunt d’un syntagme du texte-source avec traduction littérale de ses éléments
(ex. « fin de semaine » pour « week end »).
23 La traduction littérale : procédé de traduction qui consiste à produire un texte d’arrivée en
respectant les particularités formelles du texte de départ et qui est habituellement conforme aux
usages de la langue d’arrivée du point de vue grammatical.
24 La transposition (ou recatégorisation)  : procédé de traduction qui consiste à établir une
équivalence par un changement de catégorie grammaticale (ex. Three ways to make life easier —
> Trois façons de se simplifier la vie).
25 La modulation : procédé de traduction qui consiste à restructurer un énoncé du texte-cible en
faisant intervenir un changement de point de vue ou d’éclairage par rapport à la formulation du
texte-source. (ex. You are wanted on the phone —> On vous demande au téléphone  ; to take
French leave —> filer à l’anglaise).
26 L’équivalence consiste à rendre compte de la même situation de référence mais en recourant
à des formulations totalement différentes (ex. The story so far —> résumé des épisodes
précédents).
27 L’adaptation recourt à une situation de référence équivalente d’une langue à l’autre (ex. dans
un pays où le figuier est considéré comme une plante nuisible, on adaptera la parabole du figuier
en se référant à une autre plante).
28 Les trois premiers procédés sont regroupés dans la catégorie des procédés directs, les quatre
derniers dans celle des procédés obliques (ou indirects) ; plus on s’éloigne des procédés directs,
plus le choix du traducteur entre en jeu. Le contrat est le suivant10 :

Si, une fois le procédé n° 3 atteint, la traduction littérale est reconnue inacceptable par le traducteur, il faut
recourir à une traduction oblique. Par inacceptable, nous entendons que le message, tel qu’il se laisse rédiger
littéralement,

a) donne un autre sens

b) n’a pas de sens

c) est impossible pour des raisons structurales

d) ne correspond à rien dans la métalinguistique de la [langue-cible]

e) correspond bien à quelque chose, mais non pas au même niveau de langue.
29 Plus le traducteur s’éloigne de la littéralité, plus il prend donc de liberté ; toutefois, celle-ci ne
réside pas dans l’absence de contrainte, mais dans le choix de la contrainte. Les choses se
compliquent encore pour les procédés de traduction 4 et 5, qui peuvent être figés ou libres : ainsi
la transposition peut-elle être obligatoire ou facultative11. Elle est par exemple obligatoire quand
on traduit «  dès son lever  » par «  as soon as he gets up  », car il n’y a aucune substantivation
possible en anglais. Par contre, dans le sens inverse, « as soon as he gets up » peut se traduire
« dès son lever » (transposition du verbe en nom) ou « dès qu’il se lèvera » (pas de transposition).
La transposition est donc facultative.
30 De même, s’agissant de la modulation, celle-ci peut être figée ou libre12. Les modulations sont
dites figées lorsqu’elles sont lexicalisées  ; le traducteur n’a d’autre choix que de s’y soumettre
(«  poisson rouge  » se traduit en anglais par «  goldfish  »  ; les deux termes sont équivalents,
puisqu’ils désignent le même référent, mais avec une modulation interne de couleur). Certaines
modulations discursives sont également figées (par exemple, « There is no room to swing a cat »
se traduira par «  C’est grand comme un mouchoir de poche  »)  ; elles deviennent alors des
équivalences.
31 La modulation libre, quant à elle, fait intervenir le choix du traducteur. Notons toutefois qu’en
l’occurrence, « libre » ne signifie pas « facultative » ; le traducteur n’a pas le choix entre effectuer
une modulation ou non, mais il a le choix entre plusieurs modulations possibles : par exemple, la
phrase »He’ll never set the Thames on fire » est traduisible par « Il n’a pas inventé l’eau chaude »,
par « Il n’a pas inventé le fil à couper le beurre », ou encore par « Il n’a pas la tête à Papineau »,
variante québécoise13.
32 Si la contrainte traductionnelle est polymorphe, elle est en outre fluctuante ; on remarque ainsi
que chaque texte semble appeler un type particulier de contrainte. Ce serait le cas des œuvres
d’Edgar Poe traduites par Charles Baudelaire, et notamment de The Murders in the Rue Morgue.
Charles Baudelaire a opté pour une traduction littérale14  ; son postulat s’inscrivait d’ailleurs
pleinement dans le «  nouveau dogme  » apparu au xixe siècle, selon lequel «  les traductions
littérales sont les plus fidèles  » (Horguelin, 1981  : 148), la fidélité étant alors érigée en vertu
suprême du traducteur. Mais Berman, pourtant fervent défenseur de la traduction littérale,
précise que « ce type de traduction n’a de sens que pour un certain type d’œuvre, dont le rapport
avec leurs langues est tel qu’il exige cet accouplement différentiel de la traduction littérale  »
(1984 : 277). Au dire de certains exégètes anglophones de l’œuvre de Poe, le texte-source produit
en anglais, francisé dès l’origine (l’action de The Murders in the Rue Morgue se déroule à Paris, le
protagoniste est français et le texte regorge de mots français), se prêterait particulièrement bien à
une traduction en français, laquelle aurait le mérite de dépouiller le texte de ses « bizarreries » :

When Poe is translated into French, the structure of the target language acts as a filter which eliminates
much of what English readers criticize in his writing. […] The translation reads better than the original text
because of the structure of the target language which filters out the worst of Poe’s stylistic recourses (Faber,
1989 : 255).

33 Autre cas de figure, qui illustre à la fois la relative liberté du traducteur dans le choix des
contraintes et la possibilité de combiner ces dernières  : retraductrice de Don Quichotte, Aline
Schulman explique que sa « mission [était de faire] une traduction au plus près de la sensibilité
des lecteurs d'aujourd'hui, en restant fidèle à l’esprit du texte original  » (1997  : 114). Elle s’est
donc appliquée à n’utiliser « quasiment pas […] de mots apparus dans la langue française après
1650  », tout en recourant à une syntaxe française actuelle afin d’en faciliter l’accès au lecteur
contemporain. Deux impératifs ont donc guidé la traductrice  : respecter l’auteur, se faire
comprendre du lecteur. Autant dire que la surcontrainte qui en résulte se veut une synthèse des
deux courants majeurs (littéralité et littérarité), une voie médiane entre le sourcier et le cibliste
pour reprendre les termes de Ladmiral (1979).
34 Enfin, en traduction, il est un cas particulier de contrainte que l’on néglige encore trop souvent,
malgré l’importance de son impact, c’est le doublage cinématographique, dans lequel

le choix des équivalents se trouve tyrannisé par l’obligation de respecter les mouvements des lèvres des
acteurs, leur débit, leurs gestes, la musique, la situation définie par l’image visuelle, et même les réactions
sociologiques propres à l’auditoire en groupe (Mounin, 1963 : 14).

35 La contrainte sémantique et contextuelle se trouve augmentée par l’image, et à cela s’ajoute une
surcontrainte matérielle : respecter la synchronisation des labiales d’une langue à l’autre. Dans les
faits, cette contrainte littérale (ou « grammatique ») peut être tenue pour parente de la contrainte
lipogrammatique. Certes, elle est orale et visuelle, et consiste à imposer certains phonèmes, non
leur suppression. Autre différence : les contraintes propres au doublage cinématographique sont
« sérieuses » – même si le cinéma peut être considéré comme un divertissement – et obligatoires
compte tenu de leur finalité – rendre crédible le fait que des acteurs s’expriment dans une langue
qui n’est pas la leur  –, tandis que les lipogrammes ont une vocation ludique et constituent une
contrainte délibérément choisie par l’auteur qui y recourt. Mais il n’empêche que toutes deux, en
dépit de ces différences d’intention, sont également formelles, littérales et intrinsèquement
asémantiques.

3. La logique
36 Comme le rappelle Jacques Roubaud (1991  : 82), «  il n’y a de contrainte oulipienne, au sens
strict, que mathématisable » ; il ajoute d’ailleurs que « ni Queneau ni [Le Lionnais] ne détachent
vraiment la Logique de la mathématique)  ». De fait, la relation entre mathématiques et Oulipo
n’est plus à démontrer  ; chacun sait que Raymond Queneau et François Le Lionnais – co-
fondateurs de l’Oulipo – étaient tous deux mathématiciens et que Queneau était même membre
de la Société mathématique de France. Dans Bâtons, chiffres et lettres (1965  : 340), il postule
ainsi une sorte de mise en équation du discours :

On peut comparer la formation d’une phrase au produit de deux matrices dont les éléments seraient des
mots, les uns (ceux de la matrice de gauche) étant tous des formants, les autres (ceux de la matrice de droite)
étant tous des signifiants.

37 Parallèlement, certains traductologues15 mettent l’accent sur le rôle prépondérant de la logique


dans le processus de traduction  : inférences, équivalences, conditions nécessaires et suffisantes
sont très présentes à différents niveaux de la démarche. Le titre de l’ouvrage de Ladmiral,
Traduire  : théorèmes pour la traduction, est en vérité symptomatique d’une approche
mathématisante de ce processus.
38 Considérons par exemple le tableau ci-après, dans lequel sont mises en regard les différentes
acceptions de deux équivalents partiels anglais et français, litter et litière. La comparaison des
diverses extensions des deux termes laisse apparaître des relations d’équivalence (lignes 1, 3 et 4)
et des lacunes (lignes 2, 5, 6, 7, 8 et 9). Il s’ensuit que dans un contexte donné – lieu
d’actualisation sémantique  – le   traducteur devra choisir l’équivalent adapté en fonction de sa
définition. L’opération mentale qui est à l’œuvre est donc d’abord une inférence (il faut déduire le
sens du contexte) puis une recherche d’équivalence par l’intermédiaire d’une recherche de
condition nécessaire : « Litter égale litière si et seulement si le contexte permet d’établir que litter
correspond aux définitions 1, 3 et 4. »

39 Ce processus sémantique de substitution définitionnelle n’est pas sans rappeler le principe de la


littérature définitionnelle, qui consiste à remplacer chaque mot signifiant par sa définition
(Oulipo, 1973 : 215). Le choix de la phrase de départ dans l’exemple canonique de Queneau (« Le
chat a bu le lait  ») semble montrer que la polysémie n’est pas, à ce stade, un facteur
supplémentaire de création ; les termes de départ sont pris dans leur sens non figuré. Preuve en
est l’emploi du mot définition au singulier (à chaque mot SA définition)  ; la question des
différences d’extension n’est donc pas prise en compte.
40 Incidemment, on relève une notion commune à la traduction et à la littérature définitionnelle,
celle de foisonnement, qui ajoute au texte une dimension mathématique. En effet, la littérature
définitionnelle relève de la contrainte par allongement. Si les Oulipiens appliquent la loi de
Hooke16 à la littérature définitionnelle, de sorte qu’il est possible même de concevoir la
« résistance limite du texte » (Von Bariter, 2000 : 57), les traducteurs calculent, quant à eux, le
coefficient de foisonnement des traductions. Le terme de foisonnement est lui aussi emprunté à la
physique  : il désigne généralement une augmentation de volume d’une matière quelconque. En
traduction, le foisonnement correspond à l’allongement du texte d’arrivée par rapport au texte de
départ17. Évidemment, la longueur d’un texte se compte en mots  ; les valeurs obtenues ne sont
exploitables et interprétables que pour des combinaisons linguistiques données. Par exemple, la
comparaison du nombre de mots en français et en allemand ne conduira pas à des données
comparables à celles que l’on obtiendrait par calcul du taux de foisonnement du français à l’italien
ou de l’allemand au portugais. Le calcul de ce taux permet de vérifier que la traduction n’est pas
trop longue  ; car, «  s’il est excessif, le foisonnement peut nuire à la qualité et à la lisibilité des
traductions » (Delisle, 2003 : 42).
41 D’une manière générale, on constate un allongement du texte lors du processus de traduction.
Ce foisonnement peut résulter de plusieurs facteurs, le premier étant l’application des
« contraintes liées au transfert interlinguistique » (Delisle, 2003 : 42) : par exemple, lors d’une
traduction de l’anglais au français, l’explicitation des articles ou l’étoffement nécessaire de
certaines prépositions. Autre facteur, les « défauts de méthode de la part du traducteur » (Delisle,
2003 : 42). Pour illustrer les deux points précédents, prenons le syntagme « the girl next door to
me  ». Un étoffement sera nécessaire entre l’équivalent de girl et celui de next pour obtenir une
phrase grammaticalement correcte en français, telle que « la fille qui habite à côté de chez moi ».
On observe un passage de 6 à 9 mots, soit un taux de foisonnement de 50%18. Sur un syntagme
aussi court, ce résultat n’est ni significatif ni exploitable ; cependant, si ce taux est constant tout
au long du texte, le foisonnement global risque d’être trop élevé. Le traducteur, qui doit viser à la
concision19, peut alors procéder à une substitution définitionnelle et traduire « the girl next door
to me  » par «  ma voisine  », le substantif voisin signifiant «  personne qui vit, habite le plus
près20«.
42 L’exemple qui précède met ainsi en exergue deux approches comparables chez l’auteur oulipien
et le traducteur  : la pratique de la substitution définitionnelle et l’application de formules
mathématiques à un énoncé littéral. Les deux approches sont à la fois profondément logiques et
mathématisables.

4. L’invisibilité de la contrainte
43 La question de l’invisibilité est fondamentale, tant pour l’auteur oulipien que pour le
traducteur. Elle détermine le rapport au lecteur et le statut du texte produit :

certes, on peut lire Perec avec plaisir, voire avec jubilation, en ignorant tout des subtilités de la quenine ou
du bicarré latin ; sans doute aussi une excessive attention aux procédés d’écriture risque parfois de détourner
du texte lui-même. (Magné, 1990 : 21)

44 Perec semble exprimer indirectement cette crainte de voir l’attention du lecteur se focaliser sur
les mécanismes de production de l’écrit plutôt que de se laisser aller au plaisir immédiat de la
lecture, lorsqu’il se décrit comme « un enfant qui joue à cache-cache et qui ne sait ce qu’il craint
ou désire le plus : rester caché, être découvert » (1975 : 14).
45 De son côté, Roubaud énonce le Principe de Queval : « Un texte est écrit suivant une contrainte
mais, par modestie, l’auteur a si bien caché la contrainte qu’il n’est pas certain qu’on la découvre »
(1991 : 89), précisant que « Queneau, […] pour lui-même, cherche la contrainte invisible. Il a la
pudeur de la contrainte  » (1991  : 90). Comme le rappelle également Reggiani (2000  : 15),
Raymond Queneau et Henry Mathews, notamment, étaient adeptes des contraintes invisibles,
tandis qu’Italo Calvino et Jean Lahougue (bien que non oulipien), prônent leur révélation. Notons
que Perec a pour sa part tenu les deux positions.
46 Ce dilemme – « rester caché, être découvert » – n’est pas sans évoquer la séculaire alternative
qui se présente au traducteur, lequel, sourcier ou cibliste, doit choisir entre la littéralité et la
littérarité. S’il opte pour le respect du texte-source, il risque de compromettre la lisibilité voire
l’acceptabilité du texte produit en langue-cible. À l’inverse, s’il décide de faciliter la réception par
le lecteur en langue-cible, il sera accusé d’avoir trahi le texte de départ en l’adaptant pour le
rendre plus accessible. Dans l’un ou l’autre des cas, le traducteur obéit à des contraintes multiples
et polymorphes, dont le degré de visibilité sera plus ou moins grand  : ainsi, la contrainte est
moins repérable par le Lecteur Modèle21 lorsque le traducteur lui facilite la tâche en adaptant au
maximum le texte-source.
47 Dans une optique pragmatique, il est souvent prescrit de « traduire l’œuvre étrangère de façon
que l’on ne “sente” pas la traduction » (Berman, 1985 : 53) ; « la traduction doit se lire comme
une composition originale » (Bénard et Horguelin, 1979 : 17). L’efficacité du code de translation
d’une langue à l’autre est donc jugée à l’aune de sa transparence, elle-même érigée en principe.
Contrairement au texte oulipien – produit selon une contrainte dont la révélation et l’explication
sont constitutives du projet littéraire –, la traduction doit faire oublier qu’elle en est une. Le degré
extrême de cette négation équivaut à un « camouflage », quand les traductions « manifestement,
visent à ne pas être reconnues comme telles  » (Lambert, 1994  : 77). C’est le cas dans certaines
parties de la Belgique, où toute « trace » de l’autre langue nationale est parfois considérée comme
suspecte. De même, dans certains magazines et sur certains ouvrages publiés notamment aux
États-Unis, on constate l’absence fréquente de la mention « traduction » et, a fortiori, du nom du
traducteur.
48 Cette «  visée de transparence  » (Folkart,  1991  : 218) «  vire vite à l’abnégation, à l’auto-
effacement, à la transparence » (ibid. : 369), en sorte que l’invisibilité du code de translation se
confond avec la transparence du traducteur, dont la vertu cardinale première serait l’humilité22,
l’oubli de soi23 : « Le traducteur est un être masqué qui ne montre jamais son visage à nu. Il ne
faut pas que sa voix s’entende », déclare même la traductrice Sheila Fishman (citée par Beaulieu,
1986 : 157). La transparence est telle qu’elle devient « non-intervention » (Folkart, 1991 : 370) ; en
fin de compte, le traducteur n’existe plus.
49 Ainsi, l’on voit bien la subtile divergence qui s’instaure entre l’invisibilité de la contrainte
oulipienne et la transparence de la traduction : si la révélation ou non de la contrainte oulipienne
ne menace en rien la reconnaissance de l’existence de l’auteur, la transparence de la traduction
peut aller jusqu’à la négation de l’existence même du traducteur, scripteur dépouillé de tout statut
auctorial.

Bibliographie
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Annexe
Dérivations de texte : deux exercices sur « Gaspard Hauser chante » de Paul Verlaine24
1. Aller-retour
Texte original :
Je suis venu, calme orphelin,

Riche de mes seuls yeux tranquilles,

Vers les hommes des grandes villes :

Ils ne m'ont pas trouvé malin.

À vingt ans un trouble nouveau,

Sous le nom d'amoureuses flammes,

M'a fait trouver belles les femmes :

Elles ne m'ont pas trouvé beau.

Bien que sans patrie et sans roi

Et très brave ne l'étant guère,

J'ai voulu mourir à la guerre :

La mort n'a pas voulu de moi.

Suis-je né trop tôt ou trop tard ?

Qu'est-ce que je fais en ce monde ?

Ô vous tous, ma peine est profonde :

Priez pour le pauvre Gaspard !


Traduction en anglais :
I came, calm orphan,

Rich person of my only quiet eyes,

Towards the men of the large cities :

They did not find me malignant.

At twenty years a new disorder,

Under the name of in love flames,

Made me find beautiful the women :

They did not find me beautiful.

Although without fatherland and king

And very brave being it hardly,

I wanted to die in the war :

Death did not want ego.

Was I born too early or too late ?

What do I make in this world ?

Ô you all, my sorrow is deep :

Request for poor Gaspard !


Rétrotraduction de l’anglais au français :
Je suis venu, l'orphelin calme,

Personne riche de mes seulement yeux silencieux,

Vers les hommes des grandes villes :

Ils ne m'ont pas trouvé malin.

À vingt ans un nouveau désordre,

Sous le nom de en des flammes d'amour,

A rendu me la trouvaille belle les femmes :

Ils ne m'ont pas trouvé beau.

Bien que sans patrie et roi

Et être très courageux lui à peine,

J'aie voulu mourir dans la guerre :

La mort n'a pas voulu le moi.

Est-ce que j'étais né trop tôt ou trop en retard ?

Que est-ce que je fais en ce monde ?

Ô vous tout, ma douleur est profond :


Demande de Gaspard pauvre !
2. Chaîne de traductions
Texte original : voir supra.
Traduction du français à l’anglais :
I came, calm orphan,

Rich person of my only quiet eyes,

Towards the men of the large cities :

They did not find me malignant.

At twenty years a new disorder,

Under the name of in love flames,

Made me find beautiful the women :

They did not find me beautiful.

Although without fatherland and king

And very brave being it hardly,

I wanted to die in the war :

Death did not want ego.

Was I born too early or too late ?

What do I make in this world ?

Ô you all, my sorrow is deep :

Request for poor Gaspard !


Traduction de l’anglais au portugais :
Eu vim, o orphan calmo,

Pessoa rica de meus somente olhos quietos,

Para os homens das cidades grandes :

Elas m'ont não encontrado malignant.

Em vinte anos um disorder novo,

Sob as flamas do nome d'amoureuses,

Os makes de m'a encontram bonito as mulheres :

Eles m'ont não encontrado

No poço vão que sem fatherland e rei

Muito bravo e mal l'étant,

J'ai desejou morrer na guerra :

A morte de n'a não desejada de mim

Era I carregado demasiado cedo ou demasiado tarde ?

Qu'est isto que eu faço neste mundo ?

Ô você todo, meu sorrow é profundo :

Pedido para Gaspard pobre !


Traduction du portugais au français :
Je suis venu, l'orphan calme,

La personne riche de mien seulement yeux tranquilles,

Pour les hommes des villes grandes :

Elles m'ont non trouvée malignant.

Dans vingt ans un disorder nouveau,

Sous les flammes du nom d'amoureuses,

Makes de m'a trouvent jolies les femmes :

Ils m'ont non trouvée dans le puits

Vont que sans fatherland

Et roi très courageux et mal l'étant,

J'ai a désiré mourir dans la guerre :

Le décès de n'a désiré de moi.

N'était pas I chargé trop tôt ou trop tard ?

Qu'est ceci que je fais dans ce monde ?

4ème tu tout, mien sorrow est profond :

Demande pour Gaspard pauvre !

Notes
1 Voir notamment Vinay et Darbelnet (1958 [1977] : 31) et Delisle (2003 : 33).
2 Voir Atlas de littérature potentielle, 1988 : 143-158. Signalons en préambule que notre propos n’est pas la
traduction de la contrainte, qui a fait l’objet d’un important dossier publié dans Formules n° 2, Traduire la
contrainte, 1998.
3Voir Oulipoweb n° 22, à
http://worldserver2.oleane.com/fatrazie/Calis_22.htm#Dérivations %20de%20textes.
4  Le pastiche est défini par Genette comme une «  imitation d’un style dépourvue de fonction satirique  »
(1982 : 33-34).
5  Toutes les traductions proposées par des traducteurs différents pour un original donné sont publiées à
l’adresse suivante : http ://www.attlc-ltac.org/move.htm.
6 Oulipème : texte produit par l’Oulipo (d’après Genette, 1982 : 49).
7 À noter que le terme de retraduction est parfois employé dans le sens de rétrotraduction que nous avons
défini plus haut.
8 Cf. Collombat (2003b : 423).
9 Définitions d’après Vinay et Darbelnet (1958 [1977]) et Delisle (2003).
10 Vinay et Darbelnet, 1958 [1977] : 49.
11 Termes utilisés par Vinay et Darbelnet (1958 [1977] : 50).
12 Termes utilisés par Vinay et Darbelnet (1958 [1977] : 51).
13 Voir Dulong, 1999 : 367.
14«Il faut surtout bien suivre le texte littéral. Certaines choses seraient devenues bien autrement obscures, si
j’avais voulu paraphraser mon auteur, au lieu de me tenir servilement attaché à la lettre. J’ai préféré faire du
français pénible et parfois baroque et donner dans toute sa vérité la technique philosophique d’E.  Poe  »
(Charles Baudelaire, cité par Seylaz, 1979 : 49).
15 Notamment Durieux (1988 : 18 et 1990 : 189-200) et Delisle (2003 : 530-536).
16  Loi physique qui pose qu’au cours de la déformation élastique d'un corps, la contrainte est
proportionnelle à la déformation relative.
17 D’après Delisle, 2003 : 43.
18 Le taux de foisonnement est le produit d’une règle de trois.
19 Notamment Delisle, 2003 : 440.
20 Le Petit Robert sur CD-ROM (2001).
21  Pour Eco, le Lecteur Modèle est un lecteur «  capable de coopérer à l’actualisation textuelle de la façon
dont […] l’auteur le pensait et capable aussi d’agir interprétativement comme [l’auteur] a agi
générativement » (1985 : 68).
22 Notamment prônée par Larbaud , 1946 [1997] : 57.
23 Voir en particulier Bourjea, 1986 : 260.
24  Les traductions figurant dans cette annexe ont été effectuées à l’aide de la fonction «  traduction  » du
moteur de recherche Altavista (http ://babelfish.altavista.com/).

Table des illustrations


URL http://journals.openedition.org/semen/docannexe/image/2143/img-1.jpg

Fichier image/jpeg, 330k

Pour citer cet article


Référence électronique
Isabelle Collombat, « L’Oulipo du traducteur », Semen [En ligne], 19 | 2005, mis en ligne le 16 mai 2007,
consulté le 31 août 2022. URL : http://journals.openedition.org/semen/2143 ; DOI :
https://doi.org/10.4000/semen.2143

Cet article est cité par


Buhl, Virginie. (2019) Le chien, le traducteur et l’apprenti-lecteur : contraintes et libertés
dans la traduction du Livre de lecture de Gertrude Stein. Palimpsestes. DOI:
10.4000/palimpsestes.3090

Auteur
Isabelle Collombat

Université Laval - Québec

Droits d’auteur
© Presses universitaires de Franche-Comté

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