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URCA – Campus des Comtes de Champagne

Licence 1 AES

SEGAIS Germinal
Sociologie Année 2021-2022

Cours et échanges autour de l’Ecole sociologique de Chicago

sociologie des relations ethniques

L’Ecole sociologique de Chicago


(Ce cours s’appuie en grande partie sur l’ouvrage suivant : Alain COULON, L’Ecole de Chicago, Presses
Universitaire de France, Paris, 5e édition, 2012)

Introduction :

Les travaux ayant marqué l’histoire de l’Ecole sociologique de Chicago ont généralement été
menés entre 1915 et 1940 par des chercheurs de cette université.
Reposant sur des recherches qualitatives en milieu urbain, ces travaux sont majoritairement
consacrés aux migrants et à leur assimilation à la société ainsi qu’à la déviance et à la
délinquance.

La sociologie des relations ethniques

L’université de Chicago est fondée en 1892 dans le contexte de l’accroissement exponentiel


de la population de la ville. Chicago passe de 4 470 habitants en 1840 à 1 100 000 en 1890
puis à 3 500 000 habitants en 1930.

Dès 1850, arrivent les ruraux du Middle West et des : Allemands, Scandinaves, Irlandais,
Italiens, Polonais, Juifs… En 1900, plus d’un habitant sur 2 est né hors d’Amérique.

La question de l’assimilation et l’intégration des migrants devient centrale aux USA en raison
des importantes vagues d’émigration au 19 ème et lors des deux 1ères décennies du 20ème
siècle.

Un débat intense s’instaure sur l’américanisation d’anciens émigrants et sur l’opportunité


d’en accueillir de nouveaux.

Pensant que la société dispose des moyens d’assimiler ses minorités ethniques, des
sociologues de l’Université de Chicago (comme Thomas, Znaniecki, Park et Burgess)
développent des concepts comme : la désorganisation sociale, la définition de la situation, la
marginalité, l’acculturation.
Nombre de chercheurs de cette école (Robert Ezra Park, Burgess, Charles Johnson, William
Brown, Franklin Frazier) ont développé des théories portant sur le cycle des relations
ethniques.

Dans cette perspective, ils ont analysé l’adaptation des communautés immigrées à la société
américaine.

Ces analyses portent sur : l’immigration européenne (Polonais, Irlandais, Russes, Allemands,
Italiens) et l’immigration intérieure (Noirs du sud).

Le cycle des relations ethniques chez Park :

En 1921, Park estime que le cycle des relations ethniques se déroule progressivement en 4
étapes : la rivalité, le conflit, l’adaptation et l’assimilation.

Etape 1 (la rivalité/confrontation inconsciente) : caractérisée par l’absence d’interactions


entre les migrants et la société d’accueil, elle se réduit aux rapports économiques. Elle se
définit par la répartition géographique et la distribution du travail.

Etape 2 (le conflit/confrontation consciente) : Confrontés à une structure sociopolitique


asymétrique (dominants/dominés), les membres de la minorité (culturelle, sociale) se
fédèrent et entrent dans l’ordre politique.

Etape 3 (l’adaptation) : Les individus s’ajustent à la situation. Les relations sociales


organisées visent à réduire les conflits.

Etape 4 (l’assimilation) : Les différences s’atténuent et les valeurs se rapprochent. Les


individus « s’intègrent dans une vie culturelle commune » (Park). Par exemple, les
organisations culturelles émigrées jouent un rôle déterminant dans ce processus.

Approfondissement de l’analyse du cycle des relations ethniques sous fond de tension


raciale :

Les sociologues noirs de l’Ecole de Chicago ayant étudié les relations ethniques sont :
Charles Johnson, William Brown, Franklin Frazier, Bertram Doyle.

Suite aux émeutes de 1919 ayant fait 38 morts dont 23 noirs, Charles Johnson préside une
commission d’enquête ayant recours à : l’observation directe, les questionnaires et
interviews, les histoires de vie de familles noires.

Les chercheurs s’aperçoivent que les Noirs estiment que la presse est partiale dans le
traitement des évènements concernant leur communauté.
Les émeutes partent d’un incident survenu sur une plage interdite aux Noirs alors qu’aucune
ségrégation officielle n’est établie.

Le rapport rendu par Charles Johnson recommande de : renforcer le travail de la police,


poursuivre les délinquants, contrôler les lieux fréquentés par les jeunes blancs émeutiers,
améliorer l’habitat et les écoles des Noirs, renforcer l’assistance sociale…

Selon ce rapport, l’habitat est un facteur de ségrégation mais il n’y a pas de discrimination à
l’école. Cependant, les élèves noirs réalisent souvent de moins bonnes performances en
raison du contexte familial (parents illettrés, instables, pauvres…).

Relativisation de la théorie de R.E. Park (du cycle des relations ethniques) par W. Brown :

En 1930, W. Brown estime que le conflit intercommunautaire n’est pas une étape. Il subsiste
lors de chaque phase du cycle des relations ethniques.

Selon lui, lors de l’étape 3 décrite par Park (l’adaptation), le conflit s’accroit. La culture noire
est présentée comme inférieure. Le développement de cette ambiance rend impossible
l’assimilation complète des Noirs.

Acculturation ou assimilation :

Selon Frazier (1932), le cycle s’arrête par le développement de 2 systèmes raciaux distincts.
Chaque groupe ethnique habite des zones différentes.

L’Amérique absorbe les cultures européennes mais ségrégue Asiatiques et Noirs. Les Noirs
sont acculturés mais pas assimilés. Ainsi, cette stagnation sociale peut perdurer en raison de
la violence politique récurrente héritée de l’esclavage.

Il pensait que l’urbanisation favoriserait l’assimilation des Noirs car ces derniers pourraient
passer de la famille naturelle, soumise à l’autorité des blancs, à la famille institutionnelle,
soumise au pater familias.

Il distingue donc : l’acculturation (acquisition de la culture du groupe) et l’assimilation


(complète identification de l’individu au groupe).

Sous l’influence de ces nouvelles observations, R.E. Park modifie sa théorie des cycles en
1937, estimant qu’une minorité raciale peut conserver une identité spécifique en raison de la
stigmatisation. Même des migrants blancs peuvent relever durablement de minorités.
L’Ecole sociologique de Chicago « les relations ethniques »
Dès la fin du 19e siècle, l’Ecole sociologique de Chicago développe ses recherches dans le
contexte de l’accroissement exponentiel de la population de la ville. Alors que plus de la
moitié des Chicagoans sont nés hors d’Amérique, nombre de chercheurs de cette école
vontdévelopper des techniques d’enquêtes qualitativistes (interviews, analyse
d’autobiographie et courriers privés…) afin d’observer le comportement des minorités
ethniques en milieu urbain. Ainsi, ils inventeront des concepts et théories relatifs à
l’assimilation des migrants et de leurs descendants tels que : « la désorganisation sociale »
(Thomas et Znaniecki dans The Polish Peasant), « l’observation du cycle des relations
ethniques » (Park, Burgess, Bogardus, Johnson, Brown, Frazier), l’homme marginal ».

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