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Macroéconomie approfondie – Licence 3 MIASHS – Isabelle LEBON

CHAPITRE 1
APPREHENDER LA MONDIALISATION :
LA NATURE ET LA MESURE DES ECHANGES INTERNATIONAUX

OBJECTIF : Le chapitre 1 a pour objectif de dresser une typologie des échanges donnant lieu
à des flux monétaires entre une économie et les économies étrangères qui sont regroupées sous
le vocable de « Reste du Monde (RdM) », de mesurer l’importance des échanges commerciaux
internationaux à travers différents indicateurs et finalement de présenter synthétiquement la
Balance de Paiements qui retrace ces échanges.

1. Une typologie des principaux échanges d’un pays avec le Reste du


Monde

1.1 De qui parlons-nous ?

Il s’agit de décrire tous les échanges donnant lieu à des flux monétaires entre le pays et le RdM,
des échanges qui reposent sur des relations entre les « agents résidents » et les « agents non-
résidents ».

Les agents résidents sont les ménages dont la résidence habituelle est fixée dans le pays et les
entreprises implantées dans le pays.

Les agents non-résidents sont les ménages dont la résidence habituelle est fixée à l’étranger
(dans le RdM) et les entreprises implantées à l’étranger (dans le RdM).

La distinction entre les agents résidents et non-résidents repose sur une logique géographique
et non sur une logique de nationalité.

Ainsi, un français vivant à Los Angeles est un agent résident du point de vue des Etats-Unis et
un agent non-résident du point de vue de la France. La filiale d’une entreprise allemande (dont
le siège social est en Allemagne) implantée en France est un agent résident du point de vue de
la France et un agent non-résident du point de vue de l’Allemagne.

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1.2 Pour quels types d’échange ?

o Des échanges commerciaux

Les agents résidents achètent des biens et des services produits par les entreprises non
résidentes, ce sont les IMPORTATIONS (par exemple, la France importe tout son pétrole,
l’Australie importe toutes ses voitures).

Les entreprises résidentes de chaque pays vendent des biens et services aux agents du RdM, ce
sont les EXPORTATIONS (par exemple, la France exporte des produits agro-alimentaires ou
des produits de hautes technologies (ex: Airbus), l’Australie exporte des produits miniers).

Les pays exportent et importent des biens (produits manufacturés, produits agricoles, matières
premières, …) mais aussi des services.

VOIR FICHE INTERACTIVE 1.1 : Les échanges internationaux de services.

o Des transferts

Ils peuvent avoir des origines très différentes, parmi lesquelles on trouve notamment :

 Les transferts de revenu des ménages.

Plusieurs types de travailleurs transfèrent internationalement leurs revenus : Les travailleurs


transfrontaliers habitent et donc touchent leur salaire dans un pays qui n’est pas celui où ils ont
leur emploi. Les travailleurs migrants envoient souvent une partie de leurs revenus à leur famille
dans leur pays d’origine. Chaque pays connait des transferts entrants et sortants.

Prenons l’exemple de travailleurs tongans émigrés en Nouvelle-Zélande et qui rapatrient de


leurs salaires aux Tonga. Il s’agit de transferts entrants pour les Tonga et sortants pour la
Nouvelle-Zélande.

 Les transferts des profits des entreprises

Une entreprise qui a une filiale implantée dans un pays étranger rapatrie les profits faits par
cette filiale vers le pays où est installé son siège social.
Par exemple, si Coca Cola rapatrie aux Etats-Unis les profits fait par son usine française, il
s’agit d’un transfert sortant pour la France et entrant pour les Etats-Unis.

 Les transferts des Etats, par exemple les aides publiques au développement

Les pays développés soutiennent souvent les pays en développement en leur versant des aides,
ce sont des Aides Publiques au Développement (ADP).

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Par exemple, quand l’Australie verse des aides aux îles Fidji, il s’agit de transferts sortants pour
l’Australie et entrants pour les Fidji.

o Des flux financiers

Les flux financiers se développent de manière considérable depuis 30 ans, au point qu'ils sont
devenus aujourd'hui le pan majeur des échanges internationaux. Ils sont aujourd'hui en valeur
beaucoup plus élevés que les échanges commerciaux. Ils prennent différentes formes :

 Les Investissements Directs Etrangers (IDE).

Les IDE sont des mouvements internationaux de capitaux initiés par une entreprise pour créer,
développer ou racheter une filiale à l’étranger. Un pays est à la fois émetteur d’IDE quand les
entreprises nationales investissent à l’étranger (flux financiers sortants) et récepteur d’IDE
quand des capitaux étrangers viennent s’investir (flux financiers entrants).

 Les investissements de portefeuille

Déplacement de capitaux d’un pays à l’autre, d’une place financière à l’autre, pour acheter des
titres et souscrire divers produits financiers (à commencer par la simple ouverture de comptes
bancaires), dans un but qui n’est pas de réaliser un investissement productif. Il s’agit
simplement de faire un placement, éventuellement très court (spéculatif).

Avec l’intégration financière mondiale, ces flux financiers internationaux se sont développés à
l’extrême au cours des dernières décennies. Les capitaux se déplacent quasi instantanément
d’une place financière à l’autre pour profiter d’une opportunité de rémunération ou éviter un
risque de perte.

2. Les indicateurs des échanges commerciaux internationaux, ce qu’ils


nous révèlent du commerce international et de son évolution

2.1 Les indicateurs du commerce international et leur signification

o Le taux de couverture

Il se calcule de la façon suivante (en % des importations) :

𝐸𝑥𝑝𝑜𝑟𝑡𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛𝑠
𝑇𝑥𝐶𝑜𝑢𝑣𝑒𝑟𝑡𝑢𝑟𝑒 = 𝐼𝑚𝑝𝑜𝑟𝑡𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛𝑠 × 100

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Ce ratio permet de connaître la situation de la Balance Commerciale (BC) du pays considéré :

 Taux de couverture > 100  Exportations > Importations  BC excédentaire


 Taux de couverture = 100  Exportations = Importations  BC équilibrée
 Taux de couverture < 100  Exportations < Importations  BC déficitaire

o Le taux de pénétration

Il se calcule de la façon suivante (en % de la demande intérieure (la demande des agents
résidents) = PIB + Importations – Exportations) :

𝐼𝑚𝑝𝑜𝑟𝑡𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛𝑠
𝑇𝑥𝑃é𝑛é𝑡𝑟𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛 = 𝑃𝐼𝐵+𝐼𝑚𝑝𝑜𝑟𝑡𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛𝑠−𝐸𝑥𝑝𝑜𝑟𝑡𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛𝑠 × 100

Il mesure la part de la demande intérieure couverte par les importations.

La demande intérieure est approximée par le PIB plus les importations moins les exportations
(en référence à l’équilibre sur le marché des biens et services en économie ouverte, voir chapitre
4).

o Le degré d’ouverture

1 𝐸𝑥𝑝𝑜𝑟𝑡𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛𝑠 𝐼𝑚𝑝𝑜𝑟𝑡𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛𝑠
Il est égal à (en % du PIB) : 𝐷𝑒𝑔𝑟é𝑂𝑢𝑣𝑒𝑟𝑡𝑢𝑟𝑒 = [ + ] × 100
2 𝑃𝐼𝐵 𝑃𝐼𝐵

Cet indicateur mesure le lien mais aussi la dépendance économique d'un pays à l'égard de
l'extérieur (du RdM).

Une augmentation du degré d'ouverture signifie que l'économie d'un pays s'ouvre sur l'extérieur
tant au niveau des importations (c’est-à-dire qu’une plus grande partie de la demande est
satisfaite par des biens produits par des entreprises non résidentes) que des exportations (c’est-
à-dire qu’une plus grande partie de la production est vendue à des agents non-résidents).

Un degré d’ouverture plus important permet à un pays de mieux profiter des opportunités
internationales, mais expose davantage aux crises internationales. Une hausse du degré
d’ouverture signifie que le commerce international (exportations et/ou importations) croît plus
vite que l’activité économique (le PIB).

Attention : la dénomination de « degré d’ouverture » (ou taux d’ouverture) est parfois utilisée
avec une autre définition. Il s’agit alors du ratio (Exportations/PIB).

VOIR FICHE INTERACTIVE 1.2 : Les indicateurs du commerce international pour un


échantillon de pays

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2.2 La mondialisation des échanges à travers le « taux d’ouverture » des
économies

Le paragraphe suivant s’appuie sur un travail du CEPII (CEPII, L'économie mondiale 2017, La
Découverte, coll. Repères, 2016. Ce graphique a été publié initialement dans La Lettre du CEPII n°365 : M.
Fouquin et J. Hugot, "La régionalisation, moteur de la mondialisation" (mai 2016)) qui étudie l’évolution des
échanges commerciaux internationaux à travers un indicateur de « taux d’ouverture » des
économies, un indicateur calculé comme le ratio Exportations / PIB.

Cette étude retrace l’évolution du commerce internationale entre 1827 et 2014 à travers ce taux
d'ouverture  qui est la part de la production des pays vendue à des agents non-résidents. Les
trois courbes représentées sur le graphique correspondent à trois échantillons de pays, dont le
nombre varie en fonction de la longueur de la série chronologique : 7 pays (Australie, Chili,
Espagne, France, Royaume-Uni, Suède, États-Unis) sont pris en compte pour la série qui
démarre en 1827, 17 pays pour la série commençant en 1861, et 110 pays pour la plus récente,
à partir de 1960. On remarque deux interruptions de séries correspondant aux périodes des deux
guerres mondiales.

Graphique 1.1 : L'évolution de la part des exportations pour trois échantillons de pays
entre 1827 et 2014 (%)

L’observation de ce graphique montre que depuis la Révolution Industrielle, le monde a connu


deux grandes périodes d'extension du commerce international :

 Une première entre 1830 et 1870, ensuite le taux d’ouverture diminue mais se maintient
à environ 10% jusqu’à la Première Guerre Mondiale. L’entre-deux guerre est au
contraire l’occasion d’un écroulement du commerce international.
 Une deuxième à partir de la fin des années 1960 début des années 1970, dans le cadre
d’une diminution très importante des droits de douane entre tous les pays (accords du
GATT (General Agreement on Tariffs and Trade) puis de l’OMC (Organisation
Mondiale du Commerce) qui lui a succédé) et de la diminution des coûts de transports
notamment maritimes avec la généralisation de l'usage des conteneurs.

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VOIR FICHE INTERACTIVE 1.3 : Les chiffres de la mondialisation du commerce à
travers les données de la Banque Mondiale

3. La Balance des Paiements pour retracer les échanges d’un pays avec le
Reste du Monde

La balance des Paiements (BP) est le document statistique qui retrace l'ensemble des flux
monétaires qu'un pays / qu’un territoire entretient avec le RdM.

Le document suivant de la Banque de France montre comment ce document se présente


concrètement, il s’agit de la BP française pour 2020 et 2021 :

Document 1.1 Balances des Paiements de la France (année 2020 et 2021)

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Source : https://www.banque-
france.fr/sites/default/files/medias/documents/fr_bdp_stat_info_decembre_2021_fr.pdf

La BP comporte donc trois comptes intermédiaires :

 Le compte des transactions courantes recense les flux monétaires résultant des
échanges internationaux de biens et services (Solde dans le sens flux financiers entrants
– flux financiers sortants), ainsi que des revenus et transferts courants.  Les échanges
commerciaux et transferts que nous avions répertoriés sont tous retracés dans la balance
des transactions courantes.

Le document 1.1 fait apparaître directement les soldes des différents types de flux pour
la France en 2021 :

o Pour les biens, on lit par exemple « -72,4 milliards € » pour 2021. Cela signifie que :
Exportations de biens – Importations de biens = -72,4 milliards € (contre -59,9
milliards € en 2020)  Les importations de la France sont supérieures à ses
exportations de 72,4 milliards €.

o Le solde de la BC des biens et services et donc égale à : -72,4 + 35,7 = -36,7 milliards
€.  Le déficit commercial de la France s’établit à 36,7 milliards € en 2021 (contre
43,5 en 2020). On note la très forte dégradation du poste « énergie » entre 2020 et
2021 : il passe de -24,4 milliards € en 2020 à -40,6 milliards. Cela résulte à la fois
de l’aggravation de la facture pétrolière et de la reprise économique qui se traduit
par une augmentation de la consommation énergétique.

o Le solde de la balance des transactions courantes s’élève à : -25,8 milliards €  Les


différents transferts améliore grandement la situation par rapport au déficit de la BC.

 Le compte de capital recense les flux monétaires résultant de l'achat ou de la vente


d'actifs non financiers, comme les brevets, ainsi que des transferts de capital (il s’agit
de remise de dettes, de pertes sur créances, d’aides à l’investissement (par exemple les

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aides permises par les fonds européens)).  Les flux retracés par cette balance sont
généralement peu importants.

 Le compte financier recense l'ensemble des flux financiers, sous forme


d'investissement direct à l'étranger (IDE), investissement de portefeuille, réserves de
change et autres.

Dans le cas de la France en 2021, le solde du compte financier est négatif à hauteur de
48,7 milliards €.

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