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Elle ne [se] vit pas plütot [au couvent] que le Ciel dis
tenebres de son esprit, et brisant le bandeau fatal q
devant les yeux, elle se mit à repasser dans son imag
desordres de sa vie passée, elle les vit avec horreur, et
misericordes échauffant son cceur autre-fois insensible aux attraits
de sa grace, des ce moment elle ne songea plus qu'a expier par une
sincere conversion les dereglemens d'une vie tout à fait libertine.
Elle crut d'abord qu'elle n'y auroit pas beaucoup de peine : des
qu'elle oübliroit facillement un homme qu'elle ne pouvait plus
espérer de revoir, et qu'il luy seroit facile de ne plus songer au
monde, puisqu'elle ne voioit plus aucun lieu d'y retourner ; mais
les liens qui l'y attachoient étoient trop forts pour les rompre avec
tant de facilité, et elle aimoit avec trop d'ardeur, pour éteindre si
aisément un feu qui avoit causé de si grands embrasemens. Elle
ne triompha qu'aprés avoir vaincuè, et elle n'eut la gloire de la
victoire qu'aprés de longs combats. Lors qu'elle faisoit reflexion
à l'énormité des ses crimes, elle ne trouvoit pas de penitence assez
rigoureuse pour l'expier; mais elle ne venoit pas plütost à se
representer les plaisirs de sa vie passée, et les rigueurs de celle
qu'elle devoit embrasser, que malgré ses efforts, son triste coeur
se laissoit encore entrainer au torrent qu'il avoit suivy si long-
temps. Les charmes de son eher amant se presentoient sans cesse
à ses yeux, et les flatteuses douceurs qu'elles (sic) avoit ressentie
en l'aimant, sollicitoient encore son cceur avec tant de violence,
qu'elle se voioit quelques fois sur le point de chercher de nouveaux
moiens d'en jouir encore, étonnée d'un côté de l'austérité de la vie
penitente, et charmée de l'autre du plaisir trompeur qu'elle
ressentoit en songeant à son amour, la croix de JESUS CHRIST
luy paroissoit insuportable, les engagemens de son état ne luy
inspiroit que de l'horreur : et il luy sembloit impossible de pouvoir
jamais vivre sans aimer. Elle se sentoit quelques fois tellement
empörter au panchant de son amour qu'elle se seroit infalliblement
perdue sans un autre secours. Un jour qu'aprés de violentes agi-
tations qu'elle venoit de souffrir, elle prenoit un peu de relâche
dans le jardin du Convent au pié d'une petite fontaine qui Taróse
de ses eaux sa raison l'abandonnant, sa passion fit encore de si
grands ravages dans son coeur qu'elle se leva toute transportée de
son amour, dans la resolution de l'abandonner de nouveau aux
inclinations de son coeur amoureux, mais le Ciel qui ne vouloit
point la perdre, la fit aussi-tôt rentrer en elle-même, il luy fit
connoitre le precipice oü elle alloit tomber, son aveuglement luy
fit horreur, et s'étant jetté (sic) aux pies d'un crucifix qu'elle
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Université de Liege
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