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N° 239
Fracture de l'extrémité supérieure du fémur
chez l'adulte.
- Diagnostiquer une fracture de l'extrémité supérieure du fémur chez l'adulte.
Les fractures de l’extrémité supérieure du fémur sont fréquentes, de l’ordre de 50 000 cas
par an en France. Chez les sujets âgés, elles sont à l’origine d’une surmortalité de l’ordre de 20% la
première année et de 10% l’année suivante (le pourcentage de surmortalité est égal au pourcentage
de personnes décédées dans l’année qui suit une fracture du col du fémur, moins le pourcentage de
personnes décédées en moyenne à cet âge). Les options thérapeutiques doivent tenir compte de la
localisation de la fracture, du type de fracture et du terrain.
Si les complications de décubitus sont communes, les fractures cervicales et les fractures
trochantériennes n’ont pas les mêmes complications propres et diffèrent par leurs indications
thérapeutiques.
I. RAPPEL ANATOMIQUE
L’anatomie de ces régions permet de mieux comprendre les différences entre les fractures
cervicales et les fractures trochantériennes :
*Le trochanter est extra articulaire, composé essentiellement d’os spongieux ; cette région reçoit
essentiellement des forces de compression ; la vascularisation est riche.
*Les fractures trochantériennes consolident en moyenne en une quarantaine de jours. *Elles se
compliquent essentiellement de cals vicieux.
Les fractures de l’extrémité supérieure du fémur peuvent survenir par des mécanismes à haute ou à
basse énergie.
Les mécanismes à haute énergie surviennent lors d’accidents de la circulation, le plus
souvent par syndrome du tableau de bord. Les forces violentes de compression sont transmises
depuis le tableau de bord par le genou et le fémur jusqu’à l’extrémité supérieure du fémur.
Ces fractures peuvent également survenir par des mécanismes à basse énergie, par exemple
une simple chute de sa hauteur sur un os pathologique. Ces fractures sont le plus souvent l’apanage
des sujets âgés qui ont un os ostéoporotique et beaucoup plus rarement, des sujets plus jeunes ayant
des troubles du métabolisme osseux ou des tumeurs primitives ou secondaires.
Le sujet âgé est le terrain de prédilection. La F.E.P.F. survient après une chute domestique
particulièrement fréquente à cet âge souvent après un malaise cardiaque (trouble du rythme), un
accident vasculaire cérébral mineur et transitoire, un malaise hypoglycémique ou tout simplement
un faux pas favorisé par le manque d'agilité, la mauvaise vue.
Les chutes sont fréquentes chez la personne âgée : 1/3 des plus de 65 ans feraient au moins une
chute par an ; cinq pour cent des chutes s'accompagnent de fractures : poignet, humérus proximal,
branche ischio-pubienne et fémur proximal sont les localisations exclusives chez la personne âgée.
La perte progressive du capital osseux est un phénomène physiologique qui débute tôt et accélère à
la ménopause. L'ostéoporose entraîne une diminution de masse minérale de l'os. Ceci se traduit par
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une porosité accrue des corticales et une disparition des travées spongieuses cervico-céphaliques
donc une plus grande fragilité. Dans certains cas, il semble même que la fracture soit spontanée et
puisse précèder la chute. L'ostéoporose est multi-factorielle : hormonale (ostéop. œstrogénique
ménauposique, hyperparathy-roïdie sénile) alimentaire (insuffisance en vitamine D, diminution
apport calcique), sédentarité.
Dans ces tranches d'âge, les défaillances organiques ou comorbidités présentés antérieurement à la
fracture vont expliquer sa gravité. Elles sont présentes chez 50 à 65 % des patients :
- troubles cardio-respiratoires : hypertension, infarctus, troubles du rythme
- troubles neurologiques : sénilité, séquelle d'hémiplégie, Parkinson
- troubles vasculaires : artério-sclérose, insuffisance veineuse.
- diabète.
Ces troubles organiques expliquent la mortalité post-opératoire importante, soit environ 25 à
30 %. Il s'agit en fait d'une surmortalité c'est-à-dire, une augmentation du taux habituel de décès
connus pour la tranche d'âge considérée. Cette surmortalité s'étale sur 1 à 2 ans qui suivent le
traumatisme. Ses facteurs sont l'âge, le sexe (surmortalité masculine), les pathologies pré-existentes
(en particulier cardio-vasculaire et démence sénile).
3.1 Clinique
3.2 Radiographie
Deux clichés sont indispensables à la fois pour affirmer le diagnostic de fracture de l’extrémité
supérieure du fémur et en évaluer les facteurs pronostics. Bien que réalisées dans les conditions des
urgences, ces radiographies doivent être techniquement bien faites.
Radiographie de face en rotation interne de 10° du membre inférieur : ce cliché permet de faire
une vraie face du col qui est anatomiquement en ante version de 10 à 20°. La plaque est
positionnée sous le malade et l’incidence radiographique est antero postérieure.
Un cliché de profil : il est possible en urgence de réaliser sans mobiliser le membre inférieur
fracturé, un cliché de profil dit “ profil chirurgical ” ou “profil inguinal “ ou “ profil
d’Arcelin ”. Pour réaliser ce cliché, la plaque est positionnée dans le plan sagittal contre l’aile
iliaque et le trochanter du côté fracturé et le rayon est orienté perpendiculaire à la plaque dans le
creux inguinal, le membre inférieur opposé étant surélevé.
Ces deux clichés de face et de profil sont indispensables mais suffisants.
Les classifications ont pour but d’évaluer les facteurs de risque des fractures et de pouvoir ainsi
porter l’indication thérapeutique.
Les classifications des fractures cervicales ont pour but d’analyser la stabilité du foyer de fracture
pour préjuger du risque de pseudarthrose et la qualité de la vascularisation en résiduel dans le but
de préjuger du risque de nécrose.
3.3.1.1.3 Exemples
- Au type I, avec impaction du col qui est engrené et déplacé en valgus : le col est raccourci et la
capsule est détendue. Le risque de rupture de l’artère est faible.
- Au type II, fracture non déplacée, le risque de rupture de la capsule est nul et le risque de lésion
de l’artère est faible : cependant, le risque de nécrose n’est pas nul puisqu’il est évalué à 20% en
raison de la présence de l’hématome intra-articulaire qui crée une tension
- Au type III, déplacement en varus avec conservation d’une charnière interne, la capsule est
mise en tension, partiellement déchirée mais résiste. Le risque de rupture de l’artère est
important avec un risque de nécrose de l’ordre de 50%
- Au type IV, déplacement complet sans contact de charnière, la capsule est rompue, le risque de
nécrose est fort de l’ordre de 70% mais pas certain.
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L’élément essentiel à analyser pour les fractures trochantériennes, est la stabilité des fractures. Il a
été proposé de nombreuses classifications. Le point commun des formes instables est la fracture
avec détachement du petit trochanter. La perte de la console interne d’appui entraîne une
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instabilité de l’ensemble de la fracture. Les formes les plus graves sont celles avec 4 fragments : la
tête fémorale, la métaphyse fémorale, le petit trochanter et le grand trochanter.
La classification de Singh permet de juger de l’importance de l’osteoporose en analysant le
polygone de sustentation du côté opposé.
Le geste opératoire ne doit pas forcément être réalisé en urgence mais plutôt en urgence différée.
Les personnes qui présentent des fractures de l’extrémité supérieure du fémur sont souvent âgées ;
il vaut mieux faire un bilan médical complet et une préparation à l’anesthésie ; le geste opératoire
peut être réalisé dans les 48 heures qui suivent la fracture.
Il est nécessaire de réaliser une mise en traction du membre inférieur pour lutter contre la douleur
responsable du choc ( le deuxième facteur de choc est l’hypovolémie). La traction peut être trans-
tibiale par une broche ou traction collée à la jambe en fonction des habitudes et de l’état cutané. La
traction doit être trans-tibiale pour laisser une articulation entre un éventuel point d’entrée
infectieux ( la broche dans le tibia ) et le foyer chirurgical (l’extrémité supérieure du fémur). Le
malade doit être “ nursé ” pendant l’attente pour prévenir les complications du décubitus qui
commencent dès le premier jour (voir chapitre “ complications ”).
4.2.1 Le but : redonner aux personnes âgées une fonction la plus rapide possible ; chercher à
conserver la tête fémorale par tous les moyens chez les sujets jeunes.
4.2.2.2 Ostéosynthèse : les fractures cervicales peuvent être réduites sur table orthopédique par
des manœuvres adaptées, le plus souvent traction – rotation interne – adduction et
ostéosynthésées par des vis ou une vis plaque. Les vis peuvent être placées en per cutané
mais sont moins stables qu’une vis plaque. Les vis plaques possèdent une prise par vis
ou lame dans la tête fémorale et le col et un appui par plaque vissée à la face externe de
l’extrémité supérieure du fémur.
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4.2.2.3 Prothèses céphaliques : il est possible de remplacer par une prothèse uniquement la tête
fémorale. Le modèle de base de ce type de prothèse est la prothèse dite de Moore, du
nom de son concepteur. Il s’agit d’une prothèse uniquement encastrée, non fixée par du
ciment de stabilisation et dont la tête est d’un diamètre identique à celui de la tête
fémorale réséquée, c’est-à-dire supérieur à 40 mm. Ces modèles de prothèse donnent
une excellente stabilité pour une intervention chirurgicale peu traumatisante. Cependant,
au bout de quelques années de marche, la prothèse devient douloureuse. Ces modèles de
prothèse sont à réserver aux personnes âgées avec un faible périmètre de marche.
4.2.2.4 La prothèse totale de hanche : elle comprend une pièce cotyloïdienne et une pièce
fémorale. Elle peut être fixée par du ciment chirurgical ou être posée sans ciment,
simplement impactée, la colonisation osseuse de la prothèse permettant de la fixer ; ces
derniers modèles ont en effet un type de surface particulier, microporeux, obtenu par
sablage, éventuellement recouvert d’hydroxyapatite qui permet de guider la colonisation
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osseuse. Le résultat d’une prothèse totale de hanche est souvent excellent avec la reprise
d’une fonction normale ; la longévité peut être estimée aujourd’hui entre 15 et 30 ans.
Cependant, il existe des risques (voir chapitre “ complications des prothèses ”).
4.2.2.5 Prothèses intermédiaires : Une tête à double glissement améliore la longévité des
prothèses céphaliques.
Lorsque les sujets sont très âgés avec d’importants facteurs de risque, la pose d’une
prothèse céphalique est indiquée dans tous les cas.
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Lorsque les sujets sont jeunes avec un bon état général, la conservation de la tête fémorale
est indiquée dans tous les cas. Si après chirurgie conservatrice il apparaissait une
pseudarthrose, il est possible de traiter celle-ci par un geste chirurgical conservateur
(ostéotomie de réorientation du trait de Pauwells / voir chapitre complications /
Pseudarthroses). S’il apparaissait une nécrose, il faudrait alors poser une prothèse totale de
hanche.
Chez les sujets d’âge intermédiaire (entre 50 et 80 ans) c’est le type de fracture et l’état
général du malade qui va guider le choix entre chirurgie conservatrice ou prothèse totale de
hanche.
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4.2.3 Par exemple, une fracture stable type Garden I ou II chez un sujet de 50 ans en bon état
général, conduit automatiquement à une chirurgie conservatrice. Une fracture type III de
Pauwells, IV de Garden chez un sujet d’une soixantaine d’années, conduit à une
arthroplastie totale de hanche. Tous les cas intermédiaire sont évidemment possibles et
l’indication est fonction de l’expérience du chirurgien.
4.3.1 Les buts : permettre la mise au fauteuil rapide, une mise en charge différée de trois semaines
à un mois en évitant les cals vicieux.
4.3.3 Indications :
L’indication est dans pratiquement tous les cas, une réduction et une ostéosynthèse dans les 48
heures qui suivent la réception du malade. Quelques cas exceptionnels de prothèse trochantérienne
peuvent être discutés par des chirurgiens expérimentés.
IV COMPLICATIONS
Les malades atteints d’une fracture de l’extrémité supérieure du fémur souvent âgés, peuvent même
après traitement chirurgical être confinés au lit. En effet, un malade qui à la suite d’une simple
chute présente une fracture de l’extrémité supérieure du fémur, a été sélectionné comme étant
faible. Les soins apportés au malade alité doivent être vigilants ; il convient de mettre le plus
rapidement possible le malade au fauteuil. Il est cependant menacé de complications de décubitus
qui sont nombreuses et dont certaines sont mortelles. Nous ne ferons que les citer : perte
progressive de la vie et des relations (gâtisme), accident vasculaire cérébral, hémiplégie,
dénutrition, infection pulmonaire et pleurale, œdème aiguë du poumon, ulcères d’estomac,
occlusion fonctionnelle, lithiase des voies biliaires, lithiases des voies urinaires, infections
urinaires, décompensation d’un syndrome prostatique, escarres, enraidissement articulaire,
amyotrophie et surtout le risque majeur de phlébite avec sa complication classique d’embolie
pulmonaire qui peut dans ses formes massives être mortelle.
5.2.1.2 Nécrose :
La nécrose de la hanche se traduit par une douleur diurne et nocturne intense. La nécrose
peut dans un premier temps, être soupçonnée à la scintigraphie et diagnostiquée par l’IRM ;
cependant cet examen est souvent perturbé par la présence du matériel d’ostéosynthèse. Il se
produira secondairement une fracture sous chondrale suivie d’un affaissement de la tête
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fémorale. Les nécroses post-traumatiques sont souvent des nécroses étendues qui ne sont pas du
même type que les nécroses idiopathiques. La solution chirurgicale est alors, quel que soit l’âge,
une prothèse totale de hanche. Chez le sujet jeune, il faudra plutôt choisir un modèle non
cimenté avec un couple de frottement performant permettant d’obtenir la meilleure longévité
possible (voir : “ complications des prothèses”).
La complication principale des fractures trochantériennes est le cal vicieux. Il s’agit le plus
souvent d’un cal vicieux en varus, raccourcissement et rotation externe. Cependant, ce type de cal
vicieux compensé par une chaussure orthopédique, permet à une personne âgée de rester autonome.
C’est chez les sujets jeunes qu’il convient d’éviter le plus possible l’apparition de ces cals vicieux
pour retrouver une fonction normale ainsi que la reprise d’une profession mettant en jeu les
membres inférieurs. Il est ainsi bon de différer la remise en charge des formes les plus instables
jusqu’à apparition d’un cal radiovisible, c’est-à-dire vers la fin du premier mois post-opératoire. Le
traitement d’une importante pseudarthrose chez un sujet jeune peut être une ostéotomie
trochantérienne de réorientation.
En conclusion, quelques mots clés sont à retenir : surmortalité, radiographie de face et profil,
classification Pauwells et Garden pour les fractures cervicales, fracture du petit trochanter pour les
fractures trochantériennes, chirurgie conservatrice de la hanche, chirurgie prothétique de la hanche,
pseudarthrose, nécrose, cal vicieux, complication de décubitus,complication des
PTH,luxation,paralysies,infection, descellement…