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Cholestase
Re sume
Cholestasis Les tests sanguins utiles au diagnostic d’une cholestase se r esument aux
determinations des phosphatases alcalines, de la gamma-glutamyl transpepti-
dase et de la bilirubin emie conjugu ee et non conjugu ee. Certaines donn ees
Dominique-Charles Valla cliniques ont une haute sp ecificit
e mais leur sensibilit
e est faible. Les donnees de
Ho^pital Beaujon,
service d’hepatologie ;
l’imagerie des voies biliaires, la biopsie hepatique et, dans certains cas, des etudes
Universite Paris-Diderot et Inserm U773, gen etiques mol eculaires sont n ecessaires. Les cholestases par atteinte acquise
92118 Clichy-la-Garenne, des transporteurs biliaires, principalement du fait de l’inflammation, ont et
e sous
France estim ees. L’ict
ere cholestatique est g en eralement multifactoriel.
e-mail : <dominique.valla@bjn.aphp. s : bilirubine, acides biliaires, transporteurs biliaires
n Mots cle
fr>
Abstract
Blood tests that contribute to the diagnosis of cholestasis are limited to the
determination of alkaline phosphatase, gamma-glutamyl transpeptidase activity,
and conjugated and unconjugated bilirubin. Certain clinical features have a high
specificity but their sensibility is poor. Biliary imaging, liver biopsy and
occasionally molecular genetic testing may be needed. Cholestasis related to
an acquired dysfunction in biliary transport systems has been underestimated.
Cholestatic jaundice is generally multifactorial in origin.
n Key words: bilirubin, bile acids, biliary transport systems
‘‘
La bile est un liquide
La bile est un liquide aqueux (97 % aqueux (97 % d’eau)
d’eau) assurant l’
ecoulement jusqu’au assurant l’écoulement jusqu’au
duod enum de multiples substances duodénum de multiples
produites par le foie ou les voies
doi: 10.1684/hpg.2013.0915
’’
elles-me
HEPATO GASTRO
y
et Oncologie digestive
Pour citer cet article : Valla DC. Cholestase. Hepato Gastro 2013 ; 20 : 618-627. doi : 10.1684/
hpg.2013.0915
Tir
es
a part : D.-C. Valla
PHOSPHOLIPIDES
FIC1 (ABC8B1)
MDR3 (ABCB4)
BSEP (ABCB11)
A. BILIAIRES
Figure 1. Transporteurs hepatocytaires indispensables a la production de la bile par captation des acides biliaires au po ^le sinusoı̈dal des hepatocytes
et s
ecr ^le canaliculaire. Il s’y ajoute une petite portion de synthese quotidienne a partir du cholesterol, non representee ici. ATP8B1, FIC1.
etion au po
ABCB11, BSEP. ABCB4, MDR3. SLC10A1, NTCP. SLC2A, OATP.
Il s’y ajoute dans le canalicule, le petit courant hydrique, dit Le d ebit normal quotidien de bile est de l’ordre de
« fraction du d ebit biliaire ind ependante des acides 700 mL/jour. Il est augment
e par la s
ecr
etine qui agit sur la
biliaires », gener
e par la s ecr
etion d’autres substances fraction cholangiocytaire du d
ebit biliaire.
hydrosolubles dans le canalicule.
Un peu plus loin, dans l’arbre biliaire tapiss e de cellules
biliaires ou cholangiocytes, une autre fraction hydrique est Quelques constituants biliaires utiles
ajoutee au courant principal [3-5]. Cette derni ere fraction, à connaı̂tre, et leur passage dans la bile
qui compte pour 25 a 30 % du d ebit biliaire, naı̂t de la
secretion des ions chlore et bicarbonate au po ^le biliaire des Il ne sera discut
e ici que du me tabolisme de quelques
cholangiocytes, par le transporteur CFTR (ABCC7) pour le composants utiles pour leur signification clinique.
chlore, par l’ echangeur d’anions chlore-bicarbonates, et
par des canaux sp ecifiques pour le passage transmem- Les acides biliaires
branaire de l’eau (aquaporines). Les mutations de CFTR,
responsables de la mucoviscidose, peuvent effectivement Les acides biliaires conjugu es, synthetis
es par l’hepatocytes
s’accompagner d’une atteinte biliaire. La s ecr
etion de
a partir du cholest erol, sont l’objet d’une recirculation
bicarbonates permet la mise en place d’un « parapluie » intensive dans le cycle ent erohepatique [2, 5]. Ce cycle fait
alcalin qui protege les acides biliaires d’une protonation. En intervenir 2 pompes m ecaniques, la v esicule biliaire et
effet, les acides biliaires protones peuvent p en etrer dans les l’intestin. Dans l’intestin, les acides biliaires d econjugues
cholangiocytes et y provoquer des l esions. par les bact eries sont r eabsorb es passivement. Ces 2
pompes m ecaniques sont s epar ees par 3 pompes chimi-
ques : i) ABCB11 (BSEP), d ej
a envisag ee, pour la secr
etion
‘‘
Les mutations de CFTR, responsables canaliculaire ; ii) SLC10A2 (solute carrier transporter A2 ou
de la mucoviscidose, peuvent apical sodium-dependent bile salt transporter ou ASBT) du
^le luminal des ent erocytes de l’il
eon terminal, coupl e
’’
s’accompagner d’une atteinte biliaire po a
‘‘
Les acides biliaires conjugués, synthétisés glucuronyl bilirubine transferase (ou UGT1A1) du r eticulum
par l’hépatocytes à partir du cholestérol, endoplasmique.
sont l’objet d’une recirculation intensive Une fois conjugu ee, la bilirubine, hydrosoluble, peut ^ etre
’’
dans le cycle entérohépatique
secr
et
ee dans le canalicule par un transporteur polyvalent,
ABCC2, prenant en charge les anions organiques conjugu es
Les mutations qui inactivent ABCB11 (BSEP) sont respon- (comme la bilirubine conjugu ee, le glutathion, ou certains
sables de la cholestase familiale progressive de type 2 (ou acides biliaires conjugu es, mais aussi des x enobiotiques
PFIC2 pour progressive familial intrahepatic cholestasis comme la BSP ou certains anticanc ereux, d’ou son ancien
type 2) et de la cholestase r
ecurrente benigne (ou BRIC2 nom de multidrug resistance associated protein 2 (ou
pour benign recurrent intrahepatic cholestasis type 2) MRP2). Les mutations inactivant le g ene de ABCC2
(figure 3) [6, 7]. expliquent le tr es rare syndrome de Dubin-Johnson, est
caract e par une augmentation isolee de la bilirubin
eris emie
conjugu ee.
La bilirubine
La bilirubine conjugu ee de l’h epatocyte peut aussi d’^ etre
La bilirubine ne participe pas ou peu a la formation du secr
etee dans le sinusoı̈de par un autre transporteur,
courant hydrique de la bile mais elle met ce courant
a profit ABCC3. La bilirubine conjugu ee du sang sinusoidal ^ etre
pour son elimination vers l’intestin (figure 2) [8]. La captee a nouveau par l’h epatocyte, au moyen de
bilirubine produite par la degradation de l’h eme est, en transporteurs polyvalents de nombreux anions organiques
pratique, principalement issue des globules rouges en (organic anion transporting polypeptide 1 B1 ou B3,
raison du fort taux de renouvellement de ces cellules OATP1 B1/B3). Le syndrome de Rotor est une anomalie tr es
BNC
UGT1A1
ABCC2
OATP1B1/B3
BC
BC
ABCC3
Figure 2. Captation et elimination de la bilirubine non conjuguee et de la bilirubine conjuguee par l’hepatocyte. BC, bilirubine conjuguee. BNC,
bilirubine non conjuguee. ABCC2, MRP2.
rare due a des mutations inactivant OATP1 B1/B3. Il est scopiques. Les mutations inactivant le gene ABCB4 sont a
caracterise par une augmentation dans le serum a la fois de l’origine du syndrome de la bile pauvre en phosphatidyl-
la bilirubine conjugu ee et de la bilirubine non conjugu ee choline (low phospholipid associated cholestasis and
[9]. cholelithiasis, ou LPAC) [11]. Ce syndrome peut comporter
Toutes les mutations affectant directement le m etabolisme une atteinte des petites voies biliaires attribu
ee
a l’effet
de la bilirubine mais non le m
etabolisme des acides biliaires detergent des acides biliaires normalement contro ^ l
e par
ne determinent pas de cholestase. A l’exception notable de leur incorporation dans les micelles mixtes.
la maladie de Crigler-Najjar, elles sont b enignes [9, 10].
‘‘
Les phospholipides biliaires Lorsque le rapport de concentration entre
phosphatidyl-choline, acides biliaires
Il s’agit principalement de la phosphatidyl-choline (ou et cholestérol n’est pas approprié, le cholestérol
lecithine). Constituant normal de la membrane cellulaire, la insoluble dans l’eau précipite sous forme
phosphatidyl-choline en d eplac ee du feuillet interne de la
’’
de cristaux dans les petites voies biliaires
membrane canaliculaire vers le feuillet externe bile par le
transporteur ABCB4 (encore nomm e multidrug resistance
protein 3 ou MDR3), ce qui autorise sa s ecr
etion dans la bile La membrane canaliculaire est e galement le sie ge d’un
(figure 1). Tous deux amphiphiles, les acides biliaires et la transporteur de phospholipides nomm e ATP8B1 (ou familial
phosphatidyl-choline entrent dans la composition de intrahepatic cholestasis type 1 protein, FIC1), ce trans-
micelles mixtes ou le cholest erol est solubilise. Lorsque le porteur de type P-ATPase est inactiv e par les mutations
rapport de concentration entre phosphatidyl-choline, responsables de la maladie de Byler (ou cholestase familiale
acides biliaires et cholest erol n’est pas appropri e, le progressive de type 1), et de la cholestase r ecurrente
cholesterol insoluble dans l’eau pr ecipite sous forme de benigne de type 1 (ou BRIC1 pour benign recurrent
cristaux dans les petites voies biliaires. C’est ce que decrit le intrahepatic cholestasis type 1) (figure 3) [6, 7, 12]. Il s’agit
fameux triangle de Small. L’augmentation de volume des d’un transporteur des aminophospholipides (phosphatidyl-
cristaux mene a la formation des calculs biliaires macro- s
erine et phosphatidyl-ethanolamine) du feuillet externe au
PFIC1 PFIC3
ICP ICP
BRIC1 LPAC
FIC1 MDR3
BSEP
BRIC2
ICP
PFIC2
Figure 3. Les anomalies genetiques responsables de cholestase par atteinte des transporteurs canaliculaires et leur expression clinique. PFIC1, 2, 3,
cholestase familiale progressive de type 1, 2, 3. BRIC1, 2, cholestase recurrente benigne de type 1, 2, 3. ICP cholestase gravidique. LPAC, low
phospholipid associated cholestasis and cholelithiasis.
‘‘
(ABCG5/8) [3, 7]. Il est aussito e dans les micelles L’association du prurit à une augmentation
(par les acides biliaires), les micelles mixtes et les vesicules de l’autaxine dans le sérum a maintenant
unilamellaires, (avec les phospholipides). La moiti
’’
e du été bien démontrée mais n’est pas expliquée
cholesterol biliaire est r
eabsorb e dans l’intestin.
‘‘
a L’augmentation de l’activité phosphatase
bilirubine conjuguee envisage plus haut et le prurit. Le alcaline du sérum est l’élément clé du
prurit cholestatique n’est initialement associ
e
’’
a aucune syndrome de cholestase
‘‘
erum Toutes les atteintes hépatiques et biliaires
dans 3 principales circonstances : la cholestase, la fin de la peuvent augmenter l’activité sérique
grossesse (elle est d’origine placentaire), et l’augmentation de la gamma-glutamyl transpeptidase (GGT)
’’
de la construction osseuse. Cette derni ere peut para- et ce de façon parfois très marquée
doxalement s’associer aux l esions ost
eolytiques. Au cours
de la cholestase, l’expression des phosphatases alcalines
‘‘
L’augmentation de la GGT est un test très
augmente au niveau de la membrane du po ^le sinusoı̈dal
sensible de consommation excessive
des hepatocytes et dans le cytoplasme des cholangiocytes.
d’alcool ou de syndrome métabolique,
L’augmentation dans le s erum pourrait r esulter a la fois de particulièrement lorsqu’ils s’accompagnent d’une
cette induction et de cette redistribution des phosphatases ^ me discrète
’’
atteinte hépatique, me
alcalines a la membrane plasmique du po ^le sinusoı̈dal, et
aussi de sa d esinsertion de la membrane sous l’effet
detergent des acides biliaires en exc es. Au cours de la Le principal inter^et de la determination de l’activite de
cholestase, l’augmentation des phosphatases alcalines la GGT s erique est d’attribuer une augmentation des
n’est pas brutale et le retour a une activit e normale est phosphatases alcalines a une maladie du foie ou des voies
lent apres la levee de la cause [15]. Ce fait et d’autres biliaires et non pas a une atteinte osseuse. On doit
arguments indiquent qu’il ne s’agit pas d’un simple prendre garde a ne pas conclure par exc es a une
passage par r egurgitation de constituants biliaires dans cholestase en cas d’augmentation isol ee de la GGT ; une
le serum. telle hypoth ese ne peut ^ etre retenue en l’absence d’une
cause claire d’atteinte biliaire. Le second int er^
et de la
determination de la GGT en cas de cholestase naı̂t d’un
‘‘
Au cours de la cholestase, l’augmentation r
esultat normal ou tr es peu elev
e. En effet cela suggere
des phosphatases alcalines n’est pas l’absence de proliferation ductulaire. Ce type de cholestase
brutale et le retour à une activité normale sans proliferation ductulaire est rencontr e en cas de
’’
est lent après la levée de la cause cholestase familiale progressive ou de cholestase recurrente
benigne de type I (dues
a une atteinte d’ATP8B1) ou de type
2 (dues a une atteinte de ABCB11) [12].
Gamma-glutamyl transpeptidase (GGT)
‘‘
Cette enzyme est egalement localis ee dans la membrane La GGT permet principalement d’attribuer
des cellules d’un grand nombre de tissus incluant le foie, le une augmentation des phosphatases
’’
pancreas, le rein, et les voies biliaires. Sa fonction est de alcalines à une atteinte hépatique ou biliaire
transferer un residu gamma-glutamyl a un autre peptide
ou acide amin e. Le substrat le plus abondant est le
glutathion.
Bilirubinémie
Toutes les atteintes h epatiques et biliaires peuvent
augmenter l’activit e s
erique de cette enzyme, et ce, de La bilirubine non conjugu ee, li
ee a l’albumine, ne peut
façon parfois tr
es marqu ee. L’augmentation de la GGT est ^
etre filtr
ee dans le globule r enal. La bilirubine conjugu ee
un test tres sensible de consommation excessive d’alcool est eliminee par filtration glom erulaire et r
eabsorption et
ou de syndrome m etabolique, particuli
erement lorsqu’ils secr
etion tubulaire. Sa clairance plasmatique est d’envi-
s’accompagnent d’une atteinte h epatique, m^ eme discrete. ron la moiti e de celle de la cr eatinine. Chez le sujet
Comme ces circonstances sont fr equentes dans la normal, la concentration s erique de bilirubine totale est
population gen erale, l’augmentation de la GGT manque inferieure a 17mmol/L ; les trois quarts de la bilirubine
totalement de sp ecificit
e. Au cours de la cholestase, serique sont non conjugu es et un quart est conjugu ea
l’augmentation de la GGT est fortement associ ee a la l’acide glucuronique. L’augmentation de la bilirubine
proliferation ductulaire (ou cholangiolaire) que l’on observe dans le s erum est visible par l’œil au niveau des parties
en cas d’obstruction ou de destruction des voies biliaires claires des teguments (peau blanche et scl erotique) sous
mais qui manque en cas de cholestase par atteinte forme d’un ict ere lorsque la concentration de la bilirubine
canaliculaire [16]. L’augmentation de l’activit e r
esulte depasse 40 mmol/L. En cas d’ict ere, des urines claires
principalement d’une induction de son expression dans les indiquent qu’il s’agit principalement d’une augmentation
ductules biliaires (ou cholangioles) et sans doute, comme de la bilirubine non conjugu ee. Des urines tr es foncees
pour les phosphatases alcalines, d’une lib eration de la indiquent une hyperbilirubinurie conjugu ee, due a une
membrane cellulaire par l’action d etergente des acides hyperbilirubin emie en l’absence de concentration
biliaires [16]. marqu ee des urines.
’’
necessairement une cholestase : les syndromes de Rotor binémie conjuguée
et de Dubin-Johnson peuvent l’expliquer par un simple
trouble du transport de la bilirubine. En pratique, l’extr^
eme
rarete de ces 2 syndromes rend l’hyperbilirubin emie
conjuguee synonyme d’une cholestase [8]. Autres éléments du syndrome de cholestase
L’apport d’autres de terminations que celle des phospha-
tases alcalines, de la GGT et de la bilirubine pour la prise en
‘‘
L’hyperbilirubinémie conjuguée est quasi- charge diagnostique, pronostique et th erapeutique d’un
’’
ment synonyme d’une cholestase syndrome de cholestase est pratiquement nulle. La valeur
pronostique de la d etermination des concentrations
s
eriques d’acide biliaire au cours de la cholestase
Une cholestase peut ^ etre pr
esente sans ictere, puisque le
gravidique est de peu d’utilite en pratique.
metabolisme de la bilirubine est (relativement)
independant de celui des acides biliaires qui, lui, est
‘‘
directement en cause dans la cholestase. En fait, la L’apport d’autres déterminations que celle
presence ou l’absence d’ictere pour un degr e similaire de des phosphatases alcalines, de la GGT et
cholestase n’est pas toujours facile a expliquer. En cas de la bilirubine pour la prise en charge d’un
d’ictere sans obstruction biliaire compl
’’
ete, cette discor- syndrome de cholestase est pratiquement nul
dance s’explique probablement par l’association de
plusieurs facteurs a la cholestase ; par exemple : i) une
hyperhemolyse associ ee constitutionnelle ou acquise qui
augmente la charge en bilirubine ; ii) un d efaut associe Diagnostic du syndrome de cholestase
constitutionnel (polymorphisme g enetique) ou acquis Un diagnostic de cholestase peut e ^tre port e i) lorsqu’un
(inflammation) des transporteurs propres de la bilirubine ; prurit ou un ict ere a bilirubine conjugu ee s’associent
ou iii) une insuffisance r enale qui diminue la clairance
a une augmentation des phosphatases alcalines ; ou
plasmatique de la bilirubine conjugu ee. ii) lorsqu’une une augmentation des phosphatases
alcalines s’associe a une augmentation de la GGT. Dans
ce dernier cas, le diagnostic en confort e par l’absence de
‘‘
La présence ou l’absence d’ictère pour un
degré similaire de cholestase n’est pas consommation importante d’alcool et de syndrome
m etabolique, ou par la pr esence d’une cause possible
’’
toujours facile à expliquer
de cholestase.
Une cholestase bien d emontr ee avec des phosphatases
Les medicaments utilisant les me ^mes voies me taboliques alcalines normales doit faire evoquer une forme mineure
que la bilirubine peuvent provoquer un ict ere
a bilirubine d’aphosphatasie. Comme indiqu e ci-dessus, une choles-
non conjugu ee, par simple comp etition. C’est en particulier tase sans augmentation de la GGT est evocatrice d’une
le cas de certains inhibiteurs de prot ease du virus de atteinte gen etique d’ATP8B1 ou ABCB11. En l’absence
l’immunodeficience humaine [8]. d’histoire familiale, de prurit, ou d’ict ere, le diagnostic en
Excepte en cas d’atteinte de la glucuro-conjugaison est tr
es difficile.
(syndromes de Gilbert ou de Crigler-Najjar), une hyper- La couleur des urines, la d etermination des phosphatases
bilirubinemie non conjugu ee est toujours associ ee a une alcalines, et la d etermination des fractions conjugu ees et
hyperbilirubinemie conjugu ee [8]. La charge en bilirubine non conjugu ees rendent faciles les diagnostics diff erentiels
non conjugu ee pourrait expliquer i) une augmentation de l’ict
ere cholestatique.
l’efflux de bilirubine conjugu ee par ABCC3 de la
membrane sinusoı̈dale, et/ou ii) une saturation de l’excr e-
tion canaliculaire de la bilirubine conjugu ee alors que la Causes du syndrome de cholestase
limite de saturation de la glucuro-conjugaison n’est pas
atteinte. On estime que l’anomalie porte principalement Lorsque les phosphatases alcalines sont sup erieures a 3 fois
sur le metabolisme de la bilirubine conjugu ee lorsque la la valeur sup erieure de la norme la discussion etiologique
fraction de cette derni ere dans le s erum est sup erieure a doit debuter par celle d’une cholestase, quelle que soit la
75 % du total de la bilirubin emie (ce qui correspond valeur des transaminases. En revanche, en dessous de ce
approximativement a la proportion normale). seuil et en l’absence de douleur biliaire, il est probablement
plus approprie de debuter par une discussion de l’augmen- la malabsorption qu’elle entraı̂ne. De ce fait, un amai-
tation des transaminases lorsqu’elles sont sup erieures
a grissement apparaissant apr
es la constitution d’un ict
ere
5 fois leur limite normale superieure. cholestatique n’a aucune sp ecificit
e. En revanche, un
Une classification des causes de cholestase op erationnelle amaigrissement pr ec
edant la constitution d’un ict ere
en clinique est bien connue de tous. Elle est r
esum ee dans cholestatique doit faire envisager en premier lieu une
le tableau 2. La principale dichotomie est constitu ee par autre cause d’amaigrissement, par exemple un cancer ou
l’atteinte ou le respect de voies biliaires. une affection inflammatoire chronique.
‘‘ ’’
La principale dichotomie est constituée
‘‘
Un amaigrissement apparaissant après
par l’atteinte ou le respect de voies
la constitution d’un ictère cholestatique
biliaires
’’
n’a aucune spécificité étiologique
Grosses voies biliaires Petites voies biliaires Atteinte des transporteurs canaliculaires
*PFIC (pour progressive familial intrahepatic cholestasis), cholestase familiale progressive. BRIC (pour benign recurrent intrahepatic cholestasis),
cholestase récurrente bénigne. ICP (pour intrahepatic cholestasis of pregnancy), cholestase gravidique. LPAC (pour low phospholipid associated
cholestasis and cholelithiasis), syndrome de la bile pauvre en phospholipides.
‘‘
de type M2 ou certains anticorps antinoyau y sont quasi- Les atteintes acquises sont liées à une
constants. L’association de ces autoanticorps et d’un inhibition du transport des acides biliaires
et de la bilirubine par les cytokines
syndrome de cholestase permet de se passer de la biopsie
’’
pro-inflammatoires
hepatique diagnostique [18].
Les cholangite immuno-allergiques sont principalement
medicamenteuses. Les m edicaments habituellement en
cause sont : l’association acide clavulanique-amoxycilline, Diagnostic de la cause de la cholestase
les sulfamides, les macrolides et l’allopurinol. Une fi evre,
des douleurs marqu ees de l’hypochondre droit et une La de marche est bien connue. Elle commence par
hypereosinophilie y sont frequentes [19]. l’
echographie pour rep erer des anomalies des voies
Deux affections g en
etiques d ej
a mentionn ees peuvent biliaires. Celles-ci seront alors pr
ecis
ees par une cholan-
determiner une atteinte des canaux biliaires de petit ou giopancr eatographie par IRM. L’ echoendoscopie permet
moyen calibre et conduire a une cholestase : la muco- parfois de pr eciser des points particuliers. Le cath
et
erisme
viscidose et le syndrome LPAC ou PFIC3 due a une r
etrograde endoscopique des voies biliaires est un outil
mutation de ABCB4 [4]. principalement th erapeutique. Lorsque l’ echographie ne
suggere pas d’anomalie des voies biliaires, le premier test 3. Paumgartner G. Biliary physiology and disease: reflections of a
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