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Ministère de l’enseignement Faculté de Médecine

supérieur et de la recherche Ibn El Jazzar Sousse


Université de Sousse

Sémiologie Digestive
LES ICTERES

Habiletés Cliniques & Sémiologie


PCEM 2

Dr. Aya Hammami - Dr.Mehdi Ksiaa

Année universitaire : 2019 – 2020


Objectifs éducationnels

1) Définir l’ictère
2) Expliquer les mécanismes de survenue d’un ictère
3) Différencier sur des éléments cliniques et biologiques entre un ictère à
bilirubine conjuguée et un ictère à bilirubine non conjuguée
4) Recueillir les éléments du diagnostic positif des ictères
5) Recueillir les éléments du diagnostic étiologique des ictères
6) Citez les principales étiologies des ictères à bilirubine conjuguée
7) Citez les principales étiologies des ictères à bilirubine non conjuguée

PRE- REQUIS

1) Anatomie des voies biliaires intra et extra hépatiques


2) Métabolisme de la bilirubine 

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LES ICTERES

I. Définition - Introduction
L’ictère est une coloration jaune à brune, généralisée, des téguments secondaires à
l’accumulation de bilirubine dans le sang. Il doit être recherché à la lumière naturelle du jour.

La bilirubinémie normale est inférieure à 20 µmol/L.

Une bilirubinémie comprise entre 20 et 40 µmol/L est anormalement élevée mais cette élévation
est indétectable par l’inspection du patient.

L’ictère apparaît lorsque la bilirubinémie dépasse 40 µmol/L. Un ictère léger, ou débutant, est
visible en regard de la sclère oculaire, endroit le plus clair des téguments.

On distingue deux types d'ictère :

1) Les ictères à bilirubine libre : urines claires


2) Les ictères à bilirubine conjuguée : urines foncées

II. Mécanisme d’augmentation de la bilirubinémie: Fig. 1 et Fig 2

1. Les ictères à bilirubine  « non conjuguée » (libre  ou  indirecte) :

 Mécanismes :
 Hyper production de bilirubine libre par hémolyse. L’hémolyse entraîne une
anémie, une augmentation du nombre des réticulocytes et du fer sérique, et une
baisse de l’haptoglobinémie
 Diminution de la conjugaison de la bilirubine secondaire à un déficit génétique
de la glucuro-conjugaison alors que la production de bilirubine libre est normale :
Maladie de Gilbert ou syndrome de Crigler-Najar
2. Les ictères à bilirubine conjuguée ou directe :

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Ils sont la conséquence du reflux dans le milieu intérieur de la bilirubine déjà conjuguée. Il
existe 2 causes d’ictères à bilirubine conjuguée :

a- Les ictères non cholestatiques : Syndrome de Rotor et Syndrome de Dubin-Johnson


b- Les ictères cholestatiques

L’ictère à bilirubine conjuguée de type cholestatique est dû à une diminution ou un arrêt de


l’excrétion biliaire de la bilirubine. La bilirubine conjuguée par l’hépatocyte est hydrosoluble,
elle est régurgité dans le sang et passe dans les urines.

 Mécanismes en cause des ictères cholestatiques:


o Obstruction de l’arbre biliaire
o un dysfonctionnement des hépatocytes à l’origine de la diminution ou de l’arrêt de
la sécrétion biliaire dans le duodénum. On parle de cholestase
 Il existe deux types de cholestase :
- Cholestase intra-hépatique due soit à :

 Une altération des systèmes de transport et de sécrétion de la bile par les


hépatocytes (cholestase hépatocellulaire ou canaliculaire)

 Une obstruction des voies biliaires intra-hépatiques

- Cholestase extra-hépatique en rapport avec une obstruction des voies biliaires extra
hépatiques.

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Figure N° 1 : Shémas des voies biliaires extra-hépatiques

III. Conséquences de la cholestase : augmentation des concentrations sériques et tissulaires


d’acides biliaires :
2- Cliniques :
 Le foie est augmenté de taille : hépatomégalie
 Les selles sont décolorées : selles blanc mastic lorsque la cholestase est complète (¯Sels
biliaires)
 Les urines sont foncées : la Bilirubine conjuguée est soluble
 Le prurit : démangeaisons sans lésions cutanées initiales due à une activation neuronale. Il
engendre des lésions de grattage
3- Biologiques :
Bilirubine conjuguée, sels biliaires et des enzymes de cholestase

IV. Éléments du diagnostic des ictères

1. Interrogatoire : doit rechercher


 Antécédents et/ou terrain : transfusion ; anémie, cas similaires dans la famille, prise
médicamenteuse, lithiase biliaire,  éthylisme chronique, professions exposées,
toxicomanie ….

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 Mode d'installation de l'ictère : récidivant, intermittent, fluctuant ou progressif, présence
ou non d’une phase pré-ictérique avec céphalées, douleurs articulaires et troubles
digestifs ….
 Couleur des urines et des selles
 Prurit 
 Autres symptômes associés : Fièvre, douleur, altération de l'état général

2. Examen clinique  à la recherche de :


 Un ictère d’intensité variable allant d’un subictère conjonctival, recherché à la lumière
du jour, au niveau des conjonctives et du dos de la langue, à un ictère cutanéo-muqueux
franc de coloration jaune à vert olive.
 Des urines foncées et mousseuses.
 Des selles +/- décolorées au maximum blanc mastic (notion rapportée par le malade ou
retrouvée au toucher rectal).
 Des lésions de grattage secondaires au prurit, et des xanthomes.
 Splénomégalie
 Signes d’insuffisance hépatocellulaire 
 Signes d’hypertension portale : ascite, circulation veineuse collatérale...
 Hépatomégalie et préciser ses caractéristiques :
-bord inférieur tranchant, surface régulière : cirrhose
-Ferme, bord mousse : foie de cholestase
-Nodulaire, douloureuse : origine néoplasique
 Une grosse vésicule palpable qui indique que l’obstacle est cholédocien (en aval de la
convergence du canal cystique et du canal hépatique commun : signe de Courvoisier -
Terrier
 Masse intra-abdominale 
3. Examens biologiques
 NFS, plaquettes, réticulocytes ; LDH, Haptoglobine, Bilirubine totale et conjuguée ;
Transaminases, phosphatases alcalines, gamma-GT
- Hyperbilirubinémie à prédominance conjuguée. Le taux de 25 µmol/l est le seuil de
l’apparition de l’ictère. L’ictère est franc quand la Bilirubine > 50 µmol/l.
La BC dépasse rarement 500µmol/l. Quand la BC>500 µmol/l, il faut rechercher soit une
insuffisance rénale soit une hémolyse associée.

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- Augmentation des: PAL, GGT
- Augmentation de la 5'nucléotidase : plus spécifique du foie.
-Hypercholestérolémie objectivée au bilan lipidique.
Il peut s’y associer :
 Une cytolyse modérée: c'est une cytolyse d'accompagnement témoignant d'une
souffrance hépatocytaire..
 Diminution du TP avec facteur V normal, corrigé par l'adjonction de Vit K parentérale
(test de Kohler +)
 Bilan étiologique :
-Marqueurs des hépatites virales A, B et C 
-Bilan immunologique …..
4. Examens morphologiques :

Demandés en cas d’ictères à bilirubine conjuguée ++++


 Échographie abdominale +++ : Le premier examen à réaliser.
- Examen clé du diagnostic. Elle permet de distinguer les cholestases extra-hépatiques des
cholestases intra-hépatiques.
- Elle montre la présence ou non d’une dilatation des voies biliaires intra ou extra-
hépatiques, avec si possible visualisation de l’obstacle en cause.
 Tomodensitométrie abdominale : Trouve son intérêt surtout dans le bilan
d’extension des tumeurs bilio-pancréatiques.

 Écho -endoscopie bilio –pancréatique : Elle offre une meilleure exploration des
structures bilio-pancréatiques

 Bili –IRM : permet d’explorer les voies biliaires intra et extra hépatiques.

 Ponction Biopsie du Foie : en cas de cholestase intra-hépatique ++

V. Étiologies des ictères :


Les causes des ictères sont très nombreuses. Elles sont divisées en deux catégories selon la
prédominance de l’augmentation sur la bilirubine non conjuguée ou sur la bilirubine conjuguée.

1- Étiologies des ictères à bilirubine non conjuguée « libre »


 Les ictères hémolytiques :

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Se sont généralement des ictères modérés sans prurit avec des urines claires, et des selles
normo colorées. Il n'existe pas de prurit ni d'hépatomégalie de cholestase ni de vésicule palpable
avec l'existence souvent d’une pâleur et d'une splénomégalie.
 La maladie de Gilbert :

C’est une maladie héréditaire, bénigne le plus souvent latente. Elle peut se manifester par un
ictère modéré et fluctuant. . L’ictère est majoré par le jeûne et les infections intercurrentes ; Les
autres tests hépatiques sont normaux.

 Le syndrome de Crigler-Najjar

Maladie héréditaire due à une mutation de la bilirubine-uridine-glucuronyl transférase1. L'ictère


apparait dès la naissance et persiste toute la vie.

2- .Étiologies des ictères à bilirubine conjuguée


 Par obstacle sur les voies biliaires extra-hépatique ( cholestase extra
hépatique) :

Ils sont dans la majorité des cas en rapport avec une obstruction des voies biliaires situées à
l’extérieur du foie, de la terminaison des canaux hépatiques et de la convergence jusqu’ a la
papille.

 Lithiase de la voie biliaire principale :

 Il faut chercher par l’interrogatoire les antécédents de colique hépatique (douleur


biliaire), de cholécystectomie pour lithiase 

 L’ictère est souvent fluctuant  si l’obstacle est incomplet.

L’ictère peut être continu si la lithiase est obstructive.

 Parfois une complication infectieuse : angiocholite aigue ? (douleurs-fièvre-ictère en


moins de 72 heures.

 Cancer de la tête du pancréas :

- Réalise un obstacle complet avec un ictère nu d’intensité croissante en rapport avec un


engainement de la voie biliaire principale (VBP) par la masse tumorale de la tête du pancréas.

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- L’examen physique : Grosse vésicule palpable en rapport avec le caractère complet et
continu de l’obstacle sur le bas cholédoque.

- Une dilatation de tout l’arbre biliaire en amont.

 Ampullome Vatérien :

- C’est une tumeur développée au niveau de l’ampoule de Vater (carrefour bilio-


pancréatique). Elle donne une symptomatologie clinique voisine de celle du cancer de la
tête du pancréas.

- Quand la tumeur présente un développement dans la lumière duodénale, elle peut entrainer
un saignement digestif (méléna ou anémie ferriprive).

 Cancer des voies biliaires extra hépatiques (cholangiocarcinome): tableau voisin de


celui du cancer de la tête du pancréas.
 Pancréatite chronique :
- C’est une maladie inflammatoire chronique du pancréas généralement secondaire à un
éthylisme chronique important.
- L’ictère est en rapport avec un engainement de la VBP par une fibrose de la tête du
pancréas.
 Par atteinte intra- hépatique ( cholestase intra hépatique) :
 Cholestases hépato cellulaire : canaliculaire

 Hépatites virales aigues ictériques en rapport avec les virus A, B, C, D, E


 Hépatite alcoolique aiguë
 Hépatites médicamenteuses
 Cirrhose
 Cholestase par obstruction des voies biliaires intra hépatiques

 Cirrhose biliaire primitive


 Tumeurs du foie primitives ou secondaires
 Localisations hépatique des hémopathies malignes,

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Figure N° 2 : Métabolisme normal de la bilirubine

Déficit en glucuronyl Hémolyse


transférase

FIGURE N° 3 : Premières étapes du métabolisme de la bilirubine

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