Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
La pragmatique[1] linguistique
Dans le langage courant, être pragmatique c'est être réaliste et plus logique. C'est aussi être
empirique, pratique et réaliste.
La pragmatique linguistique est fondée comme discipline des sciences du langage par Charles
William Morris, dans une filiation peircienne[3], et définie comme l'étude de la relation des
signes à leurs usagers/utilisateurs ou «interprétants». L’apport décisif pour la pragmatique
linguistique sera le travail des philosophes du «langage ordinaire», et en particulier Austin et
Searle, qui ont développé la théorie, désormais classique, des «actes de langage», théorie
philosophique qui, il faut bien le noter, est conçue «initialement sans lien avec la réflexion
linguistique».
Austin pense à des phrases comme « Je t’ordonne de te taire », […] ou « Je te promets que je
viendrai demain ». Dans ces phrases, on ne dit rien de l’état du monde, mais on cherche à agir
sur lui : le locuteur de « Je t’ordonne de te taire » cherche à imposer le silence à son interlocuteur
et, probablement, à passer d’un état bruyant à un état silencieux du monde ; […] le locuteur de «
Je te promets que je viendrai demain » crée un engagement, une sorte de contrat moral entre lui et
son interlocuteur, contrat qui n’existait pas préalablement.
De cette constatation, Austin tire une conclusion : parmi les phrases […], certaines, comme « Le
chat est sur le paillasson » ou « Il pleut », décrivent le monde et peuvent être évaluées quant à
leur vérité ou leur fausseté ; d’autres, comme celles que nous avons indiquées plus haut, ne
décrivent pas le monde et ne sont pas susceptibles d’une évaluation en termes de vérité ou de
fausseté. Il nomme les premières constatives et les secondes performatives […] Enfin, les
phrases performatives, si elles ne sont pas susceptibles de vérité ou de fausseté, ne sont pas pour
autant impossibles à évaluer : leur évaluation se fait en termes de bonheur ou d’échec. … »
Un autre fondateur de ce domaine est J. R. Searle, qui a développé sa théorie sur l’hypothèse de
J. L. Austin. Il a indiqué que parler une langue, c’est d’abord réaliser des actes de langage, et que
ces actes sont en général rendus possibles par l’évidence de certaines règles régissant l’emploi des
éléments linguistiques. « Comme Austin, Searle considère que tout énoncé linguistique fonctionne
comme un acte particulier, c’est-à-dire, il vise à produire un certain effet et à entraîner une
modification de la situation interlocutive » (C. Kerbrat-Orecchioni 2001 :16). Cette force
illocutoire manifeste sa valeur dans la communication.
Pour Armengaud : «La pragmatique étudie l’utilisation du langage dans le discours, et les
marques spécifiques qui, dans la langue, attestent sa vocation discursive[4].»
En effet, on peut dire que la pragmatique est une branche de la linguistique, un courant dans
l’étude du discours, ou plus largement dans le concept de la langue. Elle étudie la
contextualisation des phrases et des énoncés ainsi que la manière dont ils réagissent dans les
situations langagières. Pour Gardiner, «...le langage ne peut plus être conçu comme un simple
moyen de présenter la pensée. Il apparaît comme un moyen d’agir, plus précisément comme un
moyen pour le locuteur de provoquer un face à face avec son allocutaire, dans l’intention de le
faire réagir, d’une manière ou d’une autre, à un certain état de choses[5].»
Les trois concepts les plus importants de la pragmatique sont: 1- l’acte (la langue ne sert pas
seulement à représenter le monde, mais aussi à accomplir des actions), 2- le contexte (la situation
concrète de lieu, du temps, de l’identité de locuteur, etc.) et 3- la
performance (l’accomplissement de l’acte en contexte).
le langage en situation, actualisé au cours d’un acte d’énonciation particulier. Dans cette
perspective, on s’intéressera à l’ensemble des phénomènes observables au cours du
processus d’actualisation, et en particulier aux modalités de l’inscription dans l’énoncé
des énonciateurs impliqués dans ce processus ;
le langage envisagé comme un moyen d’agir sur le contexte interlocutif et permettant
l’accomplissement d’un certain nombre d’actes spécifiques, l’expression « speech acts »
est traduite en français, par « actes de langage » ou « actes de parole ».
Tout acte de parole a lieu dans un contexte défini par des données spatio-temporelles et
socio-historiques ; aussi la pragmatique vise à montrer comment ces données interagissent
avec le système de la langue et comment le sens prend naissance dans un contexte
situationnel donné (Austin, 1970). Le concept de contexte est donc un concept clé de la
pragmatique, en ce qu’elle tente d’expliciter comment le langage s’exerce concrètement dans des
contextes spécifiques, et comment ce fonctionnement échappe en partie à la syntaxe et à la
sémantique[6].
La pragmatique «étudie tout ce qui, dans le sens d’un énoncé, tient à la situation dans laquelle
l’énoncé est employé, et non à la seule structure linguistique de la phrase utilisée» (Ducrot et
Schaeffer, 1995: 111)
La pragmatique est l'étude de la relation entre les signes et leurs utilisateurs. (Ducrot et Todorov,
1972: 122).
EXERCICES
[3] Charles Sanders Peirce est un logicien américain. Il est le fondateur du pragmatisme logique et
à l'origine de la sémiotique.
[4] Armengaud, F., (2007), La Pragmatique, 5ed, Que sais-je?, PUF, Paris, page 5.