Vous êtes sur la page 1sur 5

Cours 1: La pragmatique linguistique

La pragmatique[1] linguistique

Le structuralisme linguistique ou la linguistique structurale   est un courant linguistique tirant son


origine du cours de linguistique générale de Ferdinand de Saussure. Pour Saussure  la langue est
considérée comme un système. Elle est composée d’unités de différents niveaux (rangs). Chaque
unité est définie par les relations qu’elle entretient avec les autres unités et l’ensemble du
système. Chaque unité se définit par les rapports de hiérarchie, de solidarité et d’opposition par
rapport à toutes les autres unités. « Dans la langue, il n’y a que des différences[2] » disait
Saussure. Mais même si Saussure a beaucoup apporté à la linguistique, on lui reproche toujours
de ne pas évoquer la notion de l'énoncé et du contexte, d'où la naissance d'une nouvelle science
développée par Austin et qui a pour but de s'intéresser plus à la signification dans l'énoncé. Une
science à qui, on donne le nom de pragmatique.

1- Naissance de la pragmatique "linguistique"

Du grec « pragma », « praxis », qui signifie « action ».

Dans le langage courant, être pragmatique c'est être réaliste et plus logique. C'est aussi être
empirique, pratique et réaliste.

La pragmatique linguistique est fondée comme discipline des sciences du langage par Charles
William Morris, dans une filiation peircienne[3], et définie comme l'étude de la relation des
signes à leurs usagers/utilisateurs ou «interprétants». L’apport décisif pour la pragmatique
linguistique sera le travail des philosophes du «langage ordinaire», et en particulier Austin et
Searle, qui ont développé la théorie, désormais classique, des «actes de langage», théorie
philosophique qui, il faut bien le noter, est conçue «initialement sans lien avec la réflexion
linguistique».

C.W. Morris (formule clairement une série de distinctions, par exemple


entre désignation et denotatum : « Le désignation n'est pas une chose mais une espèce d'objets
ou une classe d'objets; or une classe peut avoir beaucoup d'éléments, ou un seul élément, ou aucun
élément. Les denotata sont les éléments d'une classe. » II distingue également entre les
dimensions sémantique* syntaxique et pragmatique d'un signe : est sémantique la relation entre
les signes et les designata ou les denotata; syntaxique, la relation des signes entre eux;
pragmatique, la relation entre les signes et leurs utilisateurs.

En pragmatique, J. L.Austin est considéré comme un des fondateurs de la théorie des actes de


langage, l’une de ses contributions aux fondements de cette théorie, c’est sa découverte du
performatif. Il signale que tous les énoncés sont dotés d’une force illocutionnaire. « Austin part
d’une simple constatation : de nombreuses phrases […] ne décrivent [pourtant] rien et ne sont pas
évaluables du point de vue de leur vérité ou de leur fausseté. En fait, loin d’être utilisées pour
décrire la réalité, elles sont utilisées pour la modifier : elles ne disent rien de l’état présent ou
passé du monde, elles le changent ou cherchent à le changer.

Austin pense à des phrases comme « Je t’ordonne de te taire », […] ou « Je te promets que je
viendrai demain ». Dans ces phrases, on ne dit rien de l’état du monde, mais on cherche à agir
sur lui : le locuteur de « Je t’ordonne de te taire » cherche à imposer le silence à son interlocuteur
et, probablement, à passer d’un état bruyant à un état silencieux du monde ; […] le locuteur de «
Je te promets que je viendrai demain » crée un engagement, une sorte de contrat moral entre lui et
son interlocuteur, contrat qui n’existait pas préalablement.

De cette constatation, Austin tire une conclusion : parmi les phrases […], certaines, comme « Le
chat est sur le paillasson » ou « Il pleut », décrivent le monde et peuvent être évaluées quant à
leur vérité ou leur fausseté ; d’autres, comme celles que nous avons indiquées plus haut, ne
décrivent pas le monde et ne sont pas susceptibles d’une évaluation en termes de vérité ou de
fausseté. Il nomme les premières constatives et les secondes performatives […] Enfin, les
phrases performatives, si elles ne sont pas susceptibles de vérité ou de fausseté, ne sont pas pour
autant impossibles à évaluer : leur évaluation se fait en termes de bonheur ou d’échec. … »

Un autre fondateur de ce domaine est J. R. Searle, qui a développé sa théorie sur l’hypothèse de
J. L. Austin. Il a indiqué que parler une langue, c’est d’abord réaliser des actes de langage, et que
ces actes sont en général rendus possibles par l’évidence de certaines règles régissant l’emploi des
éléments linguistiques. « Comme Austin, Searle considère que tout énoncé linguistique fonctionne
comme un acte particulier, c’est-à-dire, il vise à produire un certain effet et à entraîner une
modification de la situation interlocutive » (C. Kerbrat-Orecchioni 2001 :16). Cette force
illocutoire manifeste sa valeur dans la communication.

2- Quelques définitions de la pragmatique

Pour Armengaud : «La pragmatique étudie l’utilisation du langage dans le discours, et les
marques spécifiques qui, dans la langue, attestent sa vocation discursive[4].»

En effet, on peut dire que la pragmatique est une branche de la linguistique, un courant dans
l’étude du discours, ou plus largement dans le concept de la langue. Elle étudie la
contextualisation des phrases et des énoncés ainsi que la manière dont ils réagissent dans les
situations langagières. Pour Gardiner, «...le langage ne peut plus être conçu comme un simple
moyen de présenter la pensée. Il apparaît comme un moyen d’agir, plus précisément comme un
moyen pour le locuteur de provoquer un face à face avec son allocutaire, dans l’intention de le
faire réagir, d’une manière ou d’une autre, à un certain état de choses[5].»

 Les trois concepts les plus importants de la pragmatique sont: 1- l’acte (la langue ne sert pas
seulement à représenter le monde, mais aussi à accomplir des actions), 2- le contexte (la situation
concrète de lieu, du temps, de l’identité de locuteur, etc.) et 3- la
performance (l’accomplissement de l’acte en contexte).

D’après C. Kerbrat-Orecchioni, la pragmatique peut être définie comme l’étude du langage en


acte, qui recouvre deux grands types d’objets :

 le langage en situation, actualisé au cours d’un acte d’énonciation particulier. Dans cette
perspective, on s’intéressera à l’ensemble des phénomènes observables au cours du
processus d’actualisation, et en particulier aux modalités de l’inscription dans l’énoncé
des énonciateurs impliqués dans ce processus ;
 le langage envisagé comme un moyen d’agir sur le contexte interlocutif et permettant
l’accomplissement d’un certain nombre d’actes spécifiques, l’expression « speech acts »
est traduite en français, par « actes de langage » ou « actes de parole ».

Pour Maingueneau, la parole est une action ; dire, c’est


transmettre une information à autrui, mais c’est aussi faire,
c’est-à-dire tenter d’agir sur l’interlocuteur. Selon cette
conception, parler, c’est non seulement transmettre un certain
contenu mais encore manifester qu’on a le droit de parler
comme on le fait : « Accomplir tel ou tel acte de langage,
c’est se conférer un certain statut, conférer le statut corrélatif
au destinataire, poser son énonciation comme légitime dans le
contexte. »
La pragmatique du langage ou linguistique définie comme étude des actes du langage,  visera
donc au départ à expliquer comment la parole, bien plus qu’une simple application de la langue,
est en même temps en variation par rapport à des codes établis et génératrice de nouveaux codes.

Tout acte de parole a lieu dans un contexte défini par des données spatio-temporelles et
socio-historiques ; aussi la pragmatique vise à montrer comment ces données interagissent
avec le système de la langue et comment le sens prend naissance dans un contexte
situationnel donné (Austin, 1970). Le concept de contexte est donc un concept clé de la
pragmatique, en ce qu’elle tente d’expliciter comment le langage s’exerce concrètement dans des
contextes spécifiques, et comment ce fonctionnement échappe en partie à la syntaxe et à la
sémantique[6].

La pragmatique «étudie tout ce qui, dans le sens d’un énoncé, tient à la situation dans laquelle
l’énoncé est employé, et non à la seule structure linguistique de la phrase utilisée» (Ducrot et
Schaeffer, 1995: 111)

La pragmatique est l'étude de la relation entre les signes et leurs utilisateurs. (Ducrot et Todorov,
1972: 122).

La pragmatique (à l'origine) a concerné les caractéristiques de l'utilisation du langage             


(motivations psychologiques des locuteurs, réactions des interlocuteurs, types socialisés de
discours, etc.) par opposition à l'aspect sémantique et syntaxique. Elle s'est étendue ensuite aux
modalités d'assertion, à l'énonciation et au discours pour englober les conditions de vérité et
l'analyse conversationnelle[7].

2- Rapport entre syntaxe, sémantique et pragmatique

Selon le dictionnaire de l’analyse du discours de Patrick Charaudeau et de Dominique


Maingueneau, cette notion est issue de la tripartition de Morris (1938) qui distingue trois
domaines dans l’appréhension de toute langue, qu’elle soit formelle ou naturelle :(1) la syntaxe,
qui concerne les relations des signes aux autres signes. C'est aussi l'étude de l'agencement des
mots entre eux et la partie de la grammaire décrivant les règles par lesquelles se combinent en
phrases les unités significatives ; (2) la sémantique, qui traite de leur relations avec la réalité. La
sémantique est définie comme l’étude scientifique du sens, ou de la signification. La sémantique
établit des liens entre les quatre niveaux: phonétique, phonologique, lexicologique et sémantique.
Discipline qui étudie la signification conventionnellement attachée aux formes et expressions des
langues naturelles. (3) la pragmatique, qui s’intéresse aux relations des signes avec leur
utilisateurs, à leur emploi et à leur effets. De manière générale, quand nous parlons aujourd’hui
de composant pragmatique ou quand nous disons qu’un phénomène est soumis à «des facteurs
pragmatiques », nous désignons par là le composant qui traite des processus d’interprétation des
énoncés en contexte : qu’il s’agisse de la référence des embrayeurs ou des déterminants du nom,
et ou de la force illocutoire de l’énoncé, de sa prise de position par le locuteur (l’énoncé peut être
ironique, par exemple), des implicites qu’il libère, des connecteurs, etc.

3- Rapport linguistique de l'énonciation et pragmatique (à développer par une petite


recherche)
On distingue différentes origines disciplinaires et différentes approches, mais les matériaux
d'étude sont assez proche :
___- la linguistique de l'énonciation s'intéresse à l'énoncé ;
___- la pragmatique s'intéresse à l'usage du langage, en particulier au rôle du contexte.

EXERCICES

1- En pragmatique, que veulent dire:  

Pragmatique de Grice,  Implicatures scalaires et Présupposition.

2- Déterminez les différents travaux des fondateurs de la pragmatique linguistique: John


Langshaw Austin, Charles William Morris, Oswald Ducrot, John Rogers Searle et Charles
Sanders Peirce.

[1] Ne pas confondre pragmatisme et pragmatique. La pragmatique philosophique -ou


«pragmatisme»-, terme utilisé pour désigner un courant de pensée de la philosophie analytique
dont Peirce est le chef de file, courant qui a eu (et a toujours) une influence considérable sur
l’ensemble des sciences humaines et sociales. Les pragmatistes récusent les spéculations de la
métaphysique en énonçant que tout ce qui existe est dans l’action. Exemplifié trop rapidement: les
psychologues intégreront les apports de cette philosophie en axant leur travail sur le
«comportement» (c’est la psychologie dite «comportementale») et rejetteront corollairement le
modèle de l’introspection (introspection qui constitue un «en dehors de l’action» qui n’a pas de
réalité selon l’orientation pragmatiste). La pragmatique linguistique (désormais PL), fondée
comme discipline des sciences du langage par Charles William Morris, dans une filiation
peircienne, et définie comme l'étude de la relation des signes à leurs usagers/utilisateurs ou
«interprétants». L’apport décisif pour la pragmatique linguistique sera le travail des philosophes
du «langage ordinaire», et en particulier Austin et Searle, qui ont développé la théorie, désormais
classique, des «actes de langage», théorie philosophique qui, il faut bien le noter, est conçue
«initialement sans lien avec la réflexion linguistique»

[2] Cours de linguistique générale- page 166.

[3] Charles Sanders Peirce est un logicien américain. Il est le fondateur du pragmatisme logique et
à l'origine de la sémiotique.

[4] Armengaud, F., (2007), La Pragmatique, 5ed, Que sais-je?, PUF, Paris, page 5.

[5] Gardiner, A. H. (1989), Langage et acte de langage: aux sources de la pragmatique. Lille:


Presses universitaires du septentrion, page 7.
 

[7] Dubois et al., 2002 -dictionnaire de linguistique-, page 375

Modifié le: samedi 17 avril 2021, 17:44


◄ Présentation du contenu du second semestre
Aller à…

Vous aimerez peut-être aussi