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Insertion d’Apollon dans des

réseaux divins. Réflexions à


partir de dédicaces de
militaires
Apollon en réseaux dans des
dédicaces de militaires
stationnés à Rome
3Parmi les inscriptions de l’Vrbs qui mettent Apollon en réseaux
avec d’autres divinités, une série de dédicaces de prétoriens et
d’equites singulares Augusti fournit un échantillon utile à qui
souhaite interroger les apports et les limites de l’épigraphie à
l’interprétation des systèmes de relations et d’interactions entre
les dieux. Ces inscriptions nous renseignent toutefois moins sur
le réseau divin d’Apollon, qui n’est qu’une des nombreuses
divinités honorées, que sur les réseaux divins que les membres de
la garde impériale choisissaient d’invoquer.
• 4 CIL, VI, 32550 (= 2822).

4L’une de ces dédicaces fut offerte dans les années 238-244 p.C.
par deux prétoriens issus de Gaule Belgique4 :
Diis [san]ctis patrie[nsi]bus / I(oui) [O(ptimo)] M(aximo) et Inuict[o e]t
A[p]ollini Mercurio Dianae He[rc]uli Marti // ex prouincia Belgica [ciues
Aug(ustae)] V<i=E>romand(uorum) / Iul(ius) Iustus mil(es) coh(ortis) I
praet(oriae) p[iae uindic]is Gordianae / > (centuria) Val[entis] et //
Firmius Mater[nianus mil(es) coh(ortis)] X pr[aet(oriae)] / piae uindic[is
Gordianae ---]da[…

• 5 Trad. Colling 2010, 220.


“Aux vénérables dieux de la patrie, à Jupiter Très Bon, Très Grand, et à
Inuictus, et à Apollon, Mercure, Diane, Hercule et Mars ; les citoyens
d’Augusta Viromanduorum, de la province de Belgique, Iulius Iustus,
soldat de la Ière cohorte prétorienne Gordienne pieuse et protectrice,
dans la centurie de Valens, et Firmius Maternianus, soldat de
la Xe cohorte prétorienne Gordienne pieuse et protectrice dans la
centurie de…”5

• 6 Fut retrouvée en même temps une autre dédicace votive de ces


deux prétoriens (CIL, VI, 32551 = 28 (...)

• 7 En ce sens, à juste titre, Colling 2010, 222-223. Sur les dii patrii,
voir Bendlin 2000.

• 8 Van Andringa 2017, 156 ; id. 2002, 141.

5Retrouvée sur l’Esquilin en 18756, l’inscription est accompagnée


d’un important décor en bas-relief représentant les divinités
bénéficiaires de la dédicace, dans un ordre légèrement différent
de l’inscription : Mars, en particulier, est représenté à l’extrême
gauche du registre supérieur du décor, alors qu’il clôt
l’énumération des dieux dans le texte de l’inscription. Quant à
l’énumération des bénéficiaires divins, elle s’ouvre sur un groupe
de dédicataires non représenté sur le bas-relief, les dii sancti
patrienses (“vénérables dieux de la patrie”). Il convient
certainement d’y reconnaître les dii patrii7, “chargés d’une
connotation identitaire et collective”8, c’est-à-dire les dieux de la
“petite” patrie – Augusta Viromanduorum, d’où nos deux
prétoriens sont originaires.
Fig. 1. Roma, Musei Capitolini, Nuovo catalogo epigrafico 479.
Agrandir Original (jpeg, 688k)

Dimensions du monument (marbre) : 60 x 47 x 10 cm. CIL, VI, 32550


(= 2822) ; Imagines Roma I, 2200.
© M. Clauss

• 9 Durry 1938, 320-323.

• 10 Colling 2010, 225.

• 11 Derks 1998, 107-110 ; Roymans 2009, 221-223 ; Van Andringa


2017, 156-158 et 166-167.

• 12 Raepsaet-Charlier 2006b, 48 et 58-59 (tableau 1).


6La présence, parmi les dédicataires, de Jupiter, Mars, Hercule
et Inuictus, quatre divinités militaires, n’a rien d’étonnant dans
une dédicace de soldats romains. Les dédicaces personnelles de
prétoriens à Mars n’étant toutefois pas fréquentes9, on a parfois
cherché à expliquer sa présence ici par une habitude cultuelle
propre aux ressortissants des provinces gallo-romaines du Nord,
d’où proviennent les deux prétoriens10. Quand bien même cette
fragile hypothèse serait fondée, il ne faudrait pas oublier que ce
fut moins en référence à une divinité gauloise antérieure que pour
les liens entre Mars, la légende romuléenne et les Iulii que de
nombreuses cités gauloises choisirent cette divinité, au début de
l’époque impériale, pour représenter leur nouvelle identité11.
Aucun particularisme iconographique, toutefois, ni aucune
épithète cultuelle ne trahissent ici un quelconque caractère
indigène de Mars, contrairement à l’usage de ses dévots en Gaule
Belgique, qui associaient fréquemment à cette divinité une
épiclèse locale12. Le détour interprétatif par la province d’origine
des deux prétoriens ne semble donc pas nécessaire pour
expliquer le choix de deux membres de la garde impériale
d’honorer, à Rome, le dieu de la guerre par excellence.
• 13 Sol, dans une énumération, par un procurateur, de dédicataires
divins, à Sarmizegetusa (AE, 1977, (...)

• 14 CIL, VI, 2821 : voir supra, n. 6.

• 15 En revanche, on ne suggérera pas, comme D. Colling (2010,


225-226 et n. 35), d’identifier ce dieu (...)

7L’absence du nom de la divinité désignée par l’épithète Inuictus a


également intrigué les Modernes – qu’il se soit agi d’un choix des
dédicants ou, comme le laisse penser le soin apporté à la
réalisation de la liste des bénéficiaires divins, d’un oubli du
lapicide. A priori, on aurait pu imaginer qu’Inuictus se rapporte à
Jupiter Optimus Maximus ; cependant, ce dernier ne semble
jamais désigné de la sorte. Quant aux divinités “invaincues” qui
sont associées à Jupiter Optimus Maximus dans d’autres
dédicaces, celles-ci sont peu nombreuses. On trouve, notamment
dans des dédicaces émanant de soldats ou d’officiers, Sol, Hercule
et Mars13. Étant donné que le premier est présent dans la liste des
bénéficiaires d’une autre dédicace de nos deux prétoriens14, il
paraît logique de reconnaître Sol dans le dieu Inuictus de notre
inscription15.
• 16 Colling 2010, 226, s’appuyant sur Durry 1938, 323 (où il n’est
pas question d’Apollon).

• 17 CIL, VI, 31141 (Roma, Museo Nazionale Romano, Terme di


Diocleziano, Inv. 78170).

8La présence d’Apollon, de Mercure et de Diane aux côtés de ces


divinités militaires semble avoir posé davantage de problèmes aux
chercheurs. D. Colling, en particulier, n’en donne aucune
explication, se contentant de souligner la rareté des invocations
de prétoriens à leur égard16. Un étonnement similaire a été
suscité par l’insertion d’Apollon et de Diane dans la liste des
bénéficiaires d’une série de dédicaces votives offertes par
des equites singulares Augusti le jour de leur démobilisation –
datables, pour neuf d’entre elles, des années 132-141 p.C. Même
si Hercule et Fortuna sont régulièrement insérés entre Victoria et
Mercure, la liste des bénéficiaires divins, parfois conclue par la
formule ceterisq(ue) dis immortalib(us), se moule dans un
formulaire type, à l’instar de la dédicace collective des equites
singulares Augusti libérés en 133 p.C. Cette dédicace occupait la
face principale d’un autel de marbre, dont les deux faces latérales
portaient la liste des dédicants, non reproduite ici17 :
Ioui Optimo / Maximo, Iunoni, / Mineruae, Marti, / Victoriae, Mercurio,
/ Felicitati, Saluti, / Fatis, / Campestribus, / Siluano, Apollini, / Dianae,
Eponae, Matribus / Suleuis et Genio / Singularium Aug(usti). / Veterani,
missi honesta / missione, ex eodem / numero ab / Imp(eratore)
Traiano Hadriano / Aug(usto), p(atre) p(atriae) ; / l(aeti) l(ibentes)
m(erito) u(otum) s(oluerunt). / Hibero et Sisenna co(n)s(ulibus).
• 18 Trad. Colling 2010, 231-232.

“À Jupiter, Très Bon, Très Grand, à Junon, à Minerve, à Mars, à Victoria,


à Mercure, à Felicitas, à Salus, aux Fata, aux Campestres, à Silvain, à
Apollon, à Diane, à Épona, aux Matres Suleuiae, et au Génie des
(equites) singulares Augusti ; les vétérans libérés de ce même numerus
avec le congé honorable par l’Empereur Trajan Hadrien Auguste, Père
de la Patrie, se sont acquittés de leur vœu volontiers et à juste titre,
sous le consulat d’Hiberus et de Sisenna.”18

• 19 Scheid 2002-2003, 807.

9Dans son cours au Collège de France de 2002-2003, consacré à


la vie religieuse dans les quartiers de la Rome impériale, J. Scheid
analyse comme suit le réseau de divinités honorées : après la
triade capitoline et les divinités militaires (Mars, Victoria, Hercule),
les soldats invoquent successivement une divinité associée aux
déplacements (Mercure) ; les divinités liées aux hasards de
l’existence et du métier (Fortuna, Felicitas et Salus, “qui exprime
le résultat de la protection de toutes ces divinités”) ;
les Fata ou Fatae ; les divinités du champ d’exercice
(Campestres) ; le dieu des terres marginales (Siluanus) ; Apollon et
Diane “dont la présence surprend, mais peut être due à
l’implication ancienne d’Apollon dans la guerre” ; des divinités
d’origine celtique (Épona, déesse associée à la cavalerie, et
les Suleuiae) ; enfin, le Genius singularium Augusti, c’est-à-dire la
divinité propre aux equites singulares Augusti19. Même si une
explication est ici proposée – “l’implication ancienne d’Apollon
dans la guerre” –, la présence d’Apollon et de Diane ne paraît pas
aller de soi pour les Modernes. Dans son étude de 2010,
D. Colling marque à son tour son étonnement :
• 20 Colling 2010, 236.

“Arrivent ensuite Apollon et Diane. Si l’association de ces deux divinités


est typique, on peut, par contre, se poser la question de savoir
pourquoi elles apparaissent dans une dédicace collective d’equites
singulares Augusti”20.
• 21 Gagé 1955, 69-113.

• 22 Dumézil 1982, 36-42 (Esquisse 3 : “Apollo Medicus”) et 155-163


(Esquisse 16 : “Les grands blessés (...)

• 23 Gagé 1955, 282-284 (sur la fondation “uictoriae, non ualetudinis


causa” des ludi Apollinares). Su (...)

10De fait, la nature militaire de l’inscription cadre assez mal avec


le champ de compétence habituellement reconnu à l’Apollon
romain, à savoir non pas la guerre, mais la médecine. C’est en
effet d’abord comme medicus qu’Apollon intéressa la Res publica,
qui introduisit son culte en 433 a.C. pour conjurer une pestilence
(pestilentia)21. J. Scheid propose de résoudre la difficulté en
rappelant, à la suite de G. Dumézil22, que le domaine médical
n’était sans doute pas le seul champ d’action d’Apollon à Rome. Il
semblerait, en effet, que le robuste dieu archer ait été également
invoqué très tôt pour son assistance dans les combats, sinon dès
l’établissement du culte public – la victoire du Mont Algide étant
censée avoir suivi de près le vœu du temple d’Apollon et précédé
de peu sa dédicace –, du moins dès l’instauration des Ludi
Apollinares en 212 a.C. Tite-Live et Macrobe ont ainsi conservé le
souvenir d’un débat entre ceux qui affirmaient que les Ludi
Apollinares avaient été fondés pro ualetudine et ceux – auxquels
Tite-Live se rallie – qui prétendaient qu’ils l’avaient été pro
uictoria23 :
• 24 Trad. F. Nicolet-Croizat, CUF, 1992.

11Liv. 25.12.11-15 : “On consacra un jour aux expiations


qu’exigeait cette prophétie (sc. la prophétie des carmina
Marciana) ; le lendemain, un sénatus-consulte ordonna aux
décemvirs de consulter les livres sibyllins sur la célébration des
jeux d’Apollon et de son culte (senatus consultum factum est ut
decemuiri libros de ludis Apollini reque diuina facienda
inspicerent). À la suite de cette consultation et du rapport des
décemvirs au Sénat (ea cum inspecta relataque ad senatum
essent), celui-ci décida qu’il fallait vouer et célébrer des jeux à
Apollon (censuerunt patres Apollini ludos uouendos faciendosque)
et, quand ces jeux auraient été célébrés, donner au préteur douze
mille as pour le culte, et deux victimes adultes (duodecim milia
aeris praetori ad rem diuinam et duas hostias maiores dandas). Un
second sénatus-consulte prescrivit aux décemvirs de sacrifier
selon le rite grec les victimes suivantes (alterum senatus
consultum factum est ut decemuiri sacrum Graeco ritu facerent
hisce hostiis) : pour Apollon, un bœuf aux cornes dorées et deux
chèvres blanches aux cornes dorées, pour Latone, une vache aux
cornes dorées. Au moment de célébrer les jeux dans le Grand
Cirque, le préteur ordonna au peuple d’apporter, pendant ces
jeux, une offrande à Apollon proportionnée aux moyens de
chacun. Telle est l’origine des Jeux apollinaires, voués et célébrés
pour obtenir la victoire, et non la santé, comme on le croit
généralement (haec est origo ludorum Apollinarium, uictoriae,
non ualetudinis ergo ut plerique rentur, uotorum factorumque).”24
• 25 Trad. C. Guittard, La Roue à Livres, 2004 [1997].

12Macr., Sat., 1.17.27 : “Mais je lis dans les sources littéraires que
ces jeux ont été institués pour la victoire et non, comme le
rapportent certains annalistes, à des fins prophylactiques (inuenio
in litteris hos ludos uictoriae, non ualitudinis causa, ut quidam
annalium scriptores memorant, institutos). C’est en effet au cours
d’un conflit entre Rome et Carthage que, sur instruction des livres
sibyllins, ces jeux furent institués pour la première fois (Bello
enim Punico hi ludi ex libris Sibyllinis primum sunt instituti).”25
• 26 Wissowa 1912, 295 : “die Einsetzung von ludi
Apollinares angeordnet, uictoriae, non ualetudinis e (...)

• 27 En faveur de liens anciens entre Apollon et la uictoria, bien que


prudemment, Gagé 1955, 113 : “C (...)

• 28 Voir Mineo 2013 (62 pour la citation), qui montre que “l’Apollon
livien possède les mêmes traits (...)

• 29 Assenmaker 2014, 73-77. L’utilisation du temple d’Apollon pour


les délibérations du Sénat sur les (...)

• 30 Mineo 2013, 45 : “Pour le lecteur contemporain de Tite-Live,


l’Apollon dieu de victoire pouvait d (...)

13Si les historiens ont pu douter du bien-fondé de la position


adoptée par Tite-Live dans ce débat26, voire de l’ancienneté des
affinités d’Apollon avec la victoire27, il paraît toutefois difficile de
nier une telle association, sinon à partir des guerres puniques28,
du moins à partir du IIe s. a.C.29. L’exploitation qui fut faite de
l’Apollon d’Actium par le fondateur du principat suffirait à
éclairer, de toute façon, l’attachement des soldats de la garde
impériale à l’Apollon dieu de victoire30 :
Actius haec cernens arcum intendebat Apollo / desuper : omnis eo
terrore Aegyptus et Indi, / omnis Arabs, omnes uertebant terga Sabaei.

• 31 Verg., Aen., 8.704-706, cité et traduit par Dumézil 1982, 41.


Pour une étude de l’Apollon “august (...)

“À cette vue, Apollon d’Actium du haut du ciel tendait son arc et, de
terreur, tous les Égyptiens et les Indiens, tous les Arabes tournaient le
dos, et tous les Sabéens.”31
• 32 Monbrun 2007, passim. Cf. Dumézil 1982, en particulier
les Esquisses 1 (Vāc) et 2 (Apollon délien(...)

• 33 Wissowa 1912, 143 ; Dumézil 1974, 215-256 ; Scheid 1990,


622.

• 34 Sur Mercure, dieu des voyageurs posté aux carrefours et


protecteur des routes, voir Kahn-Lyotard (...)

14Le relief accompagnant l’inscription des deux prétoriens étudiée


plus haut fournit un indice iconographique qui invite à interpréter
de la même façon la présence d’Apollon : le dieu n’y est pas
représenté avec sa lyre, mais tenant son arc de la main gauche. Le
caractère militaire de l’Apollon ici honoré est encore souligné par
sa proximité, sur le relief, avec Mars, autre protecteur redoutable,
mais selon un mode d’action différent : alors que l’aède-archer
Apollon, maître de l’harmonie comme du chaos, tend son arc
comme il tend sa lyre, décochant au loin une flèche zigzaguant
infailliblement vers sa cible32, Mars monte une garde vigilante sur
le seuil du territoire qu’il défend et se tient prêt à déchaîner la
violence nécessaire pour repousser les agressions extérieures33.
L’observateur du relief est également frappé par la symétrie entre
Apollon et Hercule, deux dieux de la victoire situés l’un et l’autre
aux extrémités du registre inférieur, et par l’alternance entre les
deux dieux-archers, d’une part – Apollon et sa sœur Diane –, et
les deux divinités protectrices des routes, des passages et des
personnes en déplacement, d’autre part – Mercure et Hercule34.
15Une autre explication à la présence d’Apollon dans les dédicaces
d’equites singulares Augusti a cependant été proposée. Dans son
ouvrage sur les cavaliers de la garde impériale, Michael P. Speidel
suggère d’y voir plutôt un apport de soldats venus de Mésie et de
Thrace :
• 35 Speidel 1994, 30. Cf. id. 2005, 122-123 : “Soldiers in Rome
often clung to their home gods (dii p (...)
“Die auf den Weihungen der Jahre 118-141 zusammen angerufenen
zwanzig Götter wurden gedeutet als die Götter des römischen
Staates: Iuppiter, Iuno,
Minerua, vielleicht auch Mars, Victoria,
Hercules, Fortuna, Mercur, Felicitas, Fata, Salus, Genius imperatoris;
dann die Götter der Truppe: Campestres, Epona, Genius singularium;
schließlich die Heimatgötter der Reiter: Matres Suleuiae aus dem
rheinischen Germanien, Siluanus vielleicht aus
Pannonien, Apollo und Diana aus Moesien und Thrakien.
Wahrscheinlich sind jedoch die meisten keltisch-germanische
Götter.35”

• 36 CIL, VI, 32546 (= 2797) ; CIL, VI, 32570 (= 2798) ; CIL, VI,
32571. Voir Durry 1938, 336-337.

• 37 Dana-Ricci 2014, §38 et n. 65 ; §42 et n. 77 (avec bibliographie


antérieure).

• 38 Une nuance, toutefois, doit ici être apportée pour Siluanus, qui
ne bénéficia jamais d’un culte p (...)

16Sur plusieurs dédicaces prétoriennes à Apollon36, la présence


d’épithètes topiques thraces signale en effet une interpretatio
Romana d’Heros, le “Cavalier thrace”, souvent représenté sur les
stèles funéraires et les dédicaces d’equites singulares Augusti et
de prétoriens37. Dans la série de dédicaces qui nous occupe,
toutefois, Apollon ne se voit associer aucune iconographie du type
du “Cavalier thrace” ni aucune épiclèse ethnique, et sa sœur pas
davantage. Est-on autorisé, dans ces conditions, à y voir des
“Heimatgötter” portant des noms romains, plutôt que des “Götter
des römischen Staates”38 ?
• 39 Lavagne 1989, 52.

• 40 ILB2, 43 (= CIL, XIII, 3605). Pétry 1992, 227-228.

• 41 CIL, III, 7775 ; 8483 ; 13368 ; CIL, VI, 658 (relief avec Diane
et Siluanus) ; CIL, XIII, 382 ; 5 (...)
• 42 Pour l’étymologie, voir Schmidt 1987, 149. Cf. Speidel 2005, 124
et n. 187. Pour les Matres Suleu (...)

17Les equites singulares Augusti invoquent certes Apollon à l’écart


des autres divinités militaires romaines (Mars, Victoria et Hercule)
et non loin de divinités d’origine celtique (Épona et les Matres
Suleuiae). Sa position entre Silvain et Diane, toutefois, ne
pourrait-elle pas simplement s’expliquer par le binôme qu’il
forme avec sa sœur ? Archère comme lui, Diane était
fréquemment honorée par les militaires, notamment sur
le limes germanique39 ; aussi familière que lui des espaces
sauvages et des espaces de marge habités par les nymphes40, elle
était régulièrement associée à Siluanus, dieu de la forêt et des
espaces frontaliers41. La séquence “Silvain, Apollon, Diane” se
comprend donc parfaitement dans le cadre théologique romain,
sans qu’il y ait besoin de faire venir Silvain de Pannonie ou
Apollon et sa sœur de Thrace et de Mésie. Quant aux divinités
d’origine celtique, elles semblent avoir été invoquées par
les equites singulares Augusti moins comme des “Heimatgötter”
que pour leurs fonctions : Épona était une déesse de la cavalerie
et les Matres Suleuiae paraissent avoir été considérées, si l’on en
croit leur nom celtique, comme de “bonnes guides” qui, d’après
une inscription, “prennent soin de vous” (quae curam uestram
agunt)42. La catégorie même des “Heimatgötter”, enfin, paraît
artificielle. Leurs provenances supposées sont en effet trop
diverses (Rhin, Pannonie, Mésie ou Thrace) pour que tous
les equites singulares Augusti aient pu y voir des dieux de leur
patrie d’origine.

Apollon en réseaux dans les


dédicaces de soldats stationnés
à Apulum
• 43 Sur les divinités honorées à Apulum, Rossignol 2010, Szabó
2015 et 2018.

• 44 Voir l’introduction de I. Piso au volume IDR, 3, 5, xx-xxi.

• 45 La fouille récente des principia n’a pas encore été publiée. Voir
déjà Szabó 2015, 130-133. Pour (...)

• 46 AE, 1956, 204 (IDR, 3, 5, 299) : Dis Penatibus Lari/bus


Militaribus Lari / Viali Neptuno Saluti / (...)

• 47 PIR² C 571 (consul suffect vers 208-210 ; consul ordinaire en


216). En tant que préteur urbain, i (...)

• 48 Selon Szabó (2018, 30), l’assocation Esculape-Diane-Apollon


pourrait être typique d’Apulum, où il (...)

18Des dédicaces à plusieurs divinités, parmi lesquelles Apollon,


émanent également des soldats et vétérans basés à Apulum43.
Agglomération de Dacie, formant une sorte de conurbation à
l’histoire complexe, Apulum s’est développée à partir
du castrum de la légion XIII Gemina. Elle devient un municipe sous
Marc Aurèle (municipium Aurelium Apulense) et est promue
colonie sous Commode (colonia Aurelia Apulense). Quant au
secteur des canabae du camp, situé au nord de la cité, il est
partiellement promu sous les Sévères, en devenant le municipium
Septimium Apulense44. Une des dédicaces qui nous retiendra ici
provient des principia du camp45 ; elle n’est pas sans rappeler
celles des membres de la garde impériale romaine46. Elle est
offerte, en acquittement d’un vœu, par un tribun de légion, Catius
Sabinus, qui fera ensuite une belle carrière sénatoriale47. Apollon
est honoré parmi une série d’autres dieux, douze au total – ce qui
n’est sans doute pas anodin. La liste des dédicataires divins a été
soigneusement établie. Aux dieux pénates et Lares militaires,
divinités qui représentent en quelque sorte le foyer du soldat,
succèdent le Lare des voies et Neptune, vraisemblablement
honorés en tant que divinités ayant protégé les routes terrestres,
maritimes ou fluviales parcourues. Suivent Salus, déesse de la
bonne santé physique et morale, et Fortuna Redux qui a patronné
le retour, sain et sauf, du soldat. Sont ensuite invoqués Esculape,
dieu de la médecine, Diane et Apollon, Hercule, l’Espoir et la
Faveur. La place qu’occupe Apollon dans la liste témoigne peut-
être de ses identités multiples (ou plutôt de l’aspect
kaléidoscopique de son identité) : membre d’une triade, dont fait
aussi partie sa sœur Diane ; medicus, comme son fils qui le
précède dans la liste ; mais aussi pourvoyeur de victoire, à l’instar
d’Hercule qui le suit48.
• 49 Szabó 2015, 133-134 ; 2018, 68-78 (avec la bibliographie
antérieure).

• 50 CIL, III, 990 (IDR, 3, 5, 31) : Ex iussu dei / Apollinis fon/tem


Aeterni Vlp(ius) / Proculinus / (...)

• 51 Cumont 1888, 186-188 ; Sanie 1978 ; Carbó García 2010,


828. Aeternus apparaît dans d’autres inscr (...)

• 52 Voir Bartels & Kolb 2011.

• 53 Apollon est également présent dans d’autres inscriptions


d’Apulum non examinées ici, soit qu’elle (...)

• 54 Apollon et les Nymphes sont honorés conjointement dans


plusieurs dédicaces (voir par exemple : CI (...)

• 55 Voir le cours de J. Scheid donné en 2007 au Collège de France et


les références citées dans le su (...)

• 56 Scheid, cours de 2007 ; Dumézil 1982.

19D’autres dédicaces à Apollon proviennent d’une zone


identifiable au vaste sanctuaire extra muros d’Esculape, au nord
des murs de la colonia Aurelia49. Ainsi un speculator restaure, sur
ordre d’Apollon, une fontaine (fons), dédiée à Aeternus50. Cette
divinité, principalement attestée en Dacie, a longtemps été mise
en rapport avec un dieu oriental (Jupiter Dolichenus ou Baal
syrien)51. Un réexamen récent du dossier invite plutôt à y voir un
dieu local ou régional, dont les attributions restent cependant
obscures52. Faudrait-il dès lors, considérer que l’Apollon
mentionné dans la dédicace correspond à une divinité locale ?
L’hypothèse ne semble pas nécessaire étant donné la présence
importante de l’Apollon romain à Apulum53 et le lien qui l’unit par
ailleurs aux sources54. Cette dédicace nous fait ainsi entrevoir un
autre terrain d’action d’Apollon (je parle bien de terrain et non de
mode) : son rapport privilégié avec les eaux vives et les sources,
qu’il patronne fréquemment, ou encore les Nymphes. Sonores, ces
dernières sont comme lui liées aux Muses, à la poésie, à la parole
inspirée55. Comme le rappelait J. Scheid à la suite de G. Dumézil,
si le mode d’action d’Apollon est lié à la sonorité, on “entrevoit
pourquoi Apollon pourrait patronner une source avec son
murmure incessant”56.
• 57 AE, 1980, 735 (IDR, 3, 5, 36) : Apol[l]ini Dianae / et Leto(!)
ceterisque / dis deab[us]q(ue) hui (...)

• 58 À la description du bas-relief fournie in IDR (voir réf. infra) qui


ne correspond pas à ce qui es (...)

20C’est aussi de la zone de l’Asklepieion que provient une


inscription d’un vétéran, ayant atteint la fonction de décurion de
la colonie d’Apulum57. Celui-ci y offre une dédicace à Apollon,
Diane et Léto, ainsi qu’aux autres dieux et déesses salutaires de
ce lieu, et construit un pont, à la suite d’un ordre du dieu, pour lui
et pour les siens. Remarquons la présence des autres divinités
qualifiées de salutares – qualité qui semble ici s’étendre à la triade
apollinienne figurée au-dessus du champ épigraphique : Leto au
centre ; Diane à gauche avec son carquois ; Apollon à droite (avec
de longues boucles)58.
Fig. 2. Alba Iulia – Muzeul Unirii, 7861.
Agrandir Original (jpeg, 556k)

Dimensions de l’autel (calcaire) : 52x122x26 cm. AE, 1980, 735 (IDR,


3, 5, 36).
© Ortolf Harl 2010.

• 59 CIL, III, 987 (IDR, 3, 5, 21) : Aesculapio / et Hygiae


ce/terisq(ue) di{i}s dea/busq(ue) huiusq(u (...)

• 60 AE, 1972, 456 (IDR, 3, 5, 34) : Apollini / Salutari / pro salute /


filiorum / sua co(n)i{i}ugis / (...)

• 61 CIL, VI, 39 : Apollini salutari et medicinali sacrum.

• 62 Je ne reprends pas ici les dédicaces à un dieu qui n’est qualifié


qu’une fois de salutaris (Isis (...)

• 63 La liste qui suit ne prétend pas à l’exhaustivité. L’ordre des


divinités ainsi qualifiées pourrai (...)

21Le même individu a posé une inscription similaire quelque


temps auparavant, cette fois à Esculape et Hygie et aux autres
dieux et déesses salutaires de ce lieu, à la suite d’un vœu, après
avoir recouvré la vue59. Le formulaire très proche renforce
l’hypothèse selon laquelle l’Apollon honoré par le vétéran est un
dieu salutaris. Cette épithète n’est cependant que très rarement
accolée au dieu. À l’exception d’une autre inscription d’Apulum
provenant elle aussi de l’Asklepieion (mais posée par un civil,
pour son salut)60, celle-ci n’apparaît qu’à Rome, où le dieu est en
outre qualifié de medicinalis61. Il n’est pas anodin de constater
que l’adjectif salutaris n’est pas très répandu, dans les sources
épigraphiques, pour désigner un dieu. En outre, seul un petit
nombre se voit ainsi qualifié62. Il s’agit, dans l’ordre décroissant
des attestations, des Nymphes, de Fortuna, de Jupiter Optimus
Maximus ou Jupiter seul, de Siluanus, d’Hercule, de
dieux patrii ou “indéterminés”, d’Esculape seul ou avec Hygie63.
On remarque immédiatement que ces divinités sont citées dans
les dédicaces examinées précédemment, en lien avec Apollon – ce
qui n’est sans doute pas un hasard. Il serait sans nul doute
intéressant d’approfondir à l’avenir la question des dieux
“salutaires” et de leurs éventuels “réseaux” ou interconnexions.
• 64 Voir, par exemple, CIL, XIII, 5079 (Germ. sup. -
Aventicum) : Numinib(us) Aug(ustorum) / et Genio (...)

• 65 Voir, par exemple, Gummerus-4, 467 = Gummerus-5, 48 (Belg.


– Treveri) : Deo / Apollini / Geminius (...)

• 66 Voir cependant l’exemple cité supra (CIL, XIII, 5079), tout


comme Kovacs 2, 6 (Pann. sup.) : Aesc (...)

• 67 CIL, XIII, 6621 (Germ. sup. - Obernburg am Main) : I(oui)


O(ptimo) M(aximo) / Apollini et Aes/cul (...)

22Outre l’inscription de Rome mentionnée ci-dessus, Apollon est


parfois invoqué comme medicus64 et reçoit des dédicaces
émanant de médecins65. Les occurrences restent cependant peu
nombreuses et ne le mettent que rarement en réseaux66. Le texte
suivant, provenant d’Obernburg am Main, est sans doute l’un des
plus significatifs et, même s’il ne concerne pas Apulum, il vaut la
peine d’être mentionné dans la mesure où il émane d’un médecin
de cohorte. Celui-ci s’acquitte d’un vœu formulé pour la salus du
préfet de sa cohorte67. Les dieux dédicataires sont
Jupiter Optimus Maximus, Apollon et Esculape, Salus et
enfin Fortuna. Notons qu’Apollon et Esculape sont les seules
divinités à être reliées par la conjonction de coordination “et”, ce
qui vise sans doute à souligner leur parenté et indique
vraisemblablement quelle est la compétence d’Apollon
principalement visée ici. Remarquons en outre que, à l’exception
de Salus, et pour cause, les autres divinités mentionnées figurent
parmi celles qui, précisément, peuvent recevoir l’épithète
de salutaris.
• 68 CIL, III, 1138 (IDR, 3, 5, 307) : Deo B(ono) P(h)os/phoro
Apol/lini Pythio / D(ecimus) Iulius Ru/ (...)

• 69 CIL, III, 1130, 1132, 1133, 1136 (IDR, 3, 5, 300, 303, 305,
306).

• 70 CIL, III, 1133 (IDR, 3, 5, 306) : Deo Bono / Puero P(h)os/phoro


Apol/lini Pythio / T(itus) Fl(aui (...)

• 71 CIL, III, 875. Sanie 1989, 1207-1209.

• 72 Szabó 2015, 150.

• 73 Alföldi 1928 ; Berciu & Baluta 1972, 1050.

• 74 Voir déjà, mais sans justification, Cumont 1888b, 96.

• 75 Cumont 1888b, 96.

• 76 Drijvers 1980, 171.

23Une dernière dédicace d’Apulum, posée par un custos


armorum, à Deus bonus (Puer) phosphorus Apollo Pythius mérite
qu’on s’y arrête68. De provenance inconnue, elle a été découverte
en remploi, dans la cathédrale catholique, en même temps que
d’autres dédicaces à Deus bonus phosphorus69. L’une d’entre
elles, émanant d’un civil, associe aussi ce dieu à Apollon
Pythius70. D’origine arabo-syrienne, la divinité, également
qualifiée d’Aziz ailleurs en Dacie71, possédait peut-être un
sanctuaire à Apulum (il en existait un à Potaissa)72. Faut-il,
comme certains, faire de Deus bonus phosphorus Apollo
Pythius une divinité “syncrétique”73 ? ou plutôt considérer qu’il
s’agit de deux divinités différentes, Apollon Pythien étant adjoint
à la divinité “orientale” symbolisant l’étoile du matin ? Je préfère la
seconde solution74. À Aziz-Phosphorus, l’étoile du matin “qui
précède le soleil et annonce le retour de la lumière et de la vie”75,
les dédicants accolent Apollon – Phoebus certes – mais auquel ils
donnent ici l’épithète de pythien. Peut-être parce que Bonus
Puer détenait aussi des fonctions oraculaires, comme le suppose
prudemment, sur cette seule base, H.J. Drijvers76.
24Quoi qu’il en soit, Apollon peut être honoré en même temps
que des divinités n’appartenant pas au panthéon gréco-romain,
qu’elles soient indigènes ou orientales (tel Aeternus ou Bonus
puer à Apulum). Le manque d’information sur ces deux divinités
ne permet guère de comprendre pourquoi Apollon leur a été
associé – même si vraisemblablement celles-ci partageaient ou
complétaient certains de ses modes d’action.

Conclusion
25Ce bref parcours a montré qu’Apollon pouvait être situé, par les
militaires, au sein de réseaux divins, selon diverses combinaisons.
• 77 Wissowa 1912, 295 et n.3.

26Un constat s’impose d’emblée : dans la majorité des cas


examinés, il est honoré conjointement avec sa sœur Diane, Latone
étant plus rarement nommée, comme cela a d’ailleurs été noté
depuis longtemps77.
• 78 Ibid., 251.

27Une partie des inscriptions semblent directement liées au


métier de soldat exercé par le dédicant, telles celles de Rome et
du tribun d’Apulum, qui ont été posées, à la suite d’un vœu, dans
une caserne ou un camp, soit au terme du service, soit au retour
d’une mission. La place qu’y occupe le dieu dans la liste des
bénéficiaires divins semble révélatrice à la fois des identités
multiples et de la pluralité des champs d’action qui peuvent lui
être attribuées par ces militaires. Formant avec sa sœur un couple
divin typiquement romain (hérité, bien sûr, du monde grec78), que
nous ne sommes pas surpris de voir honoré par les soldats d’élite
du Prince, Apollon est invoqué dans ces listes de dédicataires
divins à un endroit qui laisse apparaître relativement clairement
ses différents champs d’action : le domaine de la ualetudo, le
domaine de la guerre et les espaces sauvages des confins. Il
ressort en particulier assez nettement que l’Apollon romain ne
peut pas être réduit, comme on le fait trop souvent, au
seul Apollo medicus.
28Les autres dédicaces, celles du speculator, du vétéran et
du custos armorum d’Apulum, semblent avoir été offertes dans
des sanctuaires de la cité, par un militaire agissant “hors service” –
c’est bien sûr le cas du vétéran, mais les deux autres inscriptions
n’ont pas davantage de rapport direct avec le métier de soldat du
dédicant. Dans ces trois cas, Apollon semble honoré dans le
sanctuaire d’une autre divinité, dont on peut supposer qu’il
complète ou reflète l’action. Salutaris, il seconde Esculape ;
pythien, il est accolé à Deus Puer, peut-être à cause de sa parole
prophétique. Ordonnant la réparation d’un fons, il témoigne de
son lien avec les Nymphes ou eaux vives, bien attesté par ailleurs,
y compris peut-être chez Horace, qui évoque les Camènes –
celles-ci possédaient en effet une source à Rome et pouvaient,
comme le fait le poète, être assimilées aux neuf Muses. Ne
surprend cependant pas le fait que le rapport d’Apollon aux arts
ne soit pas présent dans les inscriptions examinées, qui émanent
de militaires. En revanche, les autres facettes de l’identité du dieu,
chanté par le poète, se retrouvent dans nos dédicaces : dieu
archer, medicus et, vraisemblablement, devin.
• 79 Dumézil 1982 ; Monbrun 2007.

29S’il a été suggéré que la logique de la succession entre les


divinités associées en un même réseau ne relève pas toujours des
champs d’action, mais peut également ressortir aux modes
d’actions de la divinité, force est de constater que l’on rencontre
là les limites de la documentation épigraphique. Car si les
inscriptions éclairent assez bien les identités et champs d’action
des divinités – encore qu’on est parfois amené, même dans ce
cas, à recourir aux hypothèses –, elles ne suffisent pas en elles-
mêmes à nous renseigner sur leurs modes d’action. C’est alors,
semble-t-il, que les connaissances partagées sur ces figures
divines, notamment grâce aux récits mythologiques, peuvent être
utilement mises en dialogue avec les données épigraphiques
brutes. Ainsi, les modes d’action d’Apollon que G. Dumézil et
P. Monbrun ont su mettre au jour, permettent à certaines des
associations divines dans lesquelles Apollon est partie prenante
de faire sens79 : si Apollon peut être associé à d’autres divinités
pourvoyeuses de guérison, c’est que, maître de l’arc et des
instruments de musique à cordes, il peut aussi bien rétablir
l’harmonie en ramenant la santé que la rompre en semant le
chaos dans les rangs de ses ennemis ; précisément, s’il peut être
associé à d’autres divinités pourvoyeuses de victoire, c’est qu’il
est avant tout un redoutable archer qui voit l’ennemi avant
quiconque et sait le frapper de loin ; apte, par là-même, à abolir
les distances de la pointe de ses flèches ou de l’acuité de son
esprit, il peut être invoqué aux côtés de divinités qui veillent sur
les individus en déplacement ; enfin, s’il peut être associé aux
dieux protégeant les marges et les confins, c’est sans doute qu’il
est familier, comme sa sœur, du monde sauvage habité par les
Nymphes.
30Reste à préciser – en élargissant l’enquête au-delà du seul cas
de la fontaine restaurée sur l’ordre d’Apollon – dans quelle
mesure la “sonorité”, sur laquelle G. Dumézil attirait déjà
l’attention, constitue une pierre angulaire de l’identité et des
modes d’action d’Apollon. Ses attributs, arc et lyre, sont sonores,
comme la voix prophétique par lui inspirée, comme les eaux qu’il
patronne. Des voix, des sons, qui portent loin, et pourraient aussi
être liés à l’harmonie et au rétablissement de celle-ci.
NOTES
1 Hor., Carmen saeculare, 61-64 (trad. Dumézil 1982, 39, légèrement
modifiée).

2 Verg., Aen., 12.391-394 : Iamque aderat Phoebo ante alios dilectus


Iapyx/ Iasides, acri quondam cui captus amore/ ipse suas artis, sua
munera, laetus Apollo/ augurium citharamque dabat celerisque
sagittas./ Ille, ut depositi proferret fata parentis,/ scire potestates
herbarum usuque medendi/ maluit et mutas agitare inglorius
artis. (“Près de lui (= Enée), déjà, un homme cher à Phébus entre tous,
Iapyx, fils d’Iasus : jadis, épris d’un ardent amour, Apollon voulait lui
communiquer ses arts et prérogatives, augures, cithare, flèches
rapides, avec joie. Mais, pour prolonger les destins de son père
expirant, il préféra connaître les pouvoirs des herbes, la pratique de la
médecine, et exercer sans gloire des arts silencieux”, trad. J. Perret,
CUF, 1980).

3 Le point 1 a été rédigé par Y. Berthelet, le point 2, par F. Van


Haeperen.

4 CIL, VI, 32550 (= 2822).

5 Trad. Colling 2010, 220.

6 Fut retrouvée en même temps une autre dédicace votive de ces deux
prétoriens (CIL, VI, 32551 = 2821), datée de 246 p.C., mais sans
Apollon parmi les dédicataires (Jupiter Optimus Maximus,
Mars, Nemesis, Sol, Victoria, Dii patrienses).

7 En ce sens, à juste titre, Colling 2010, 222-223. Sur les dii patrii, voir
Bendlin 2000.

8 Van Andringa 2017, 156 ; id. 2002, 141.

9 Durry 1938, 320-323.


10 Colling 2010, 225.

11 Derks 1998, 107-110 ; Roymans 2009, 221-223 ; Van Andringa


2017, 156-158 et 166-167.

12 Raepsaet-Charlier 2006b, 48 et 58-59 (tableau 1).

13 Sol, dans une énumération, par un procurateur, de dédicataires


divins, à Sarmizegetusa (AE, 1977, 673) ; à Fectio, en Germanie
inférieure, dans une litanie par un légat propréteur (CIL, XIII, 8812) ;
dans une litanie émanant d’un légat d’Auguste à Asturica Augusta (CIL,
II, 2634 ; sur cette inscription, voir la contribution d’A. Álvarez Melero
dans ce volume) ou encore dans des textes dont le dédicant (ou sa
fonction) n’est pas mentionné (CIL, III, 3020, en Dacie ; CIL, III, 3475, à
Aquincum). Hercule, par un tribun militaire à Adamclisi (CIL, III,
14214,1) ou par des prêtres en Dacie (CIL III, 7681). Mars, en Dalmatie
(CIL, III, 2803).

14 CIL, VI, 2821 : voir supra, n. 6.

15 En revanche, on ne suggérera pas, comme D. Colling (2010, 225-


226 et n. 35), d’identifier ce dieu invaincu à Mithra. Le dieu perse ne
semble en effet jamais honoré dans ce genre de litanies complexes.

16 Colling 2010, 226, s’appuyant sur Durry 1938, 323 (où il n’est pas
question d’Apollon).

17 CIL, VI, 31141 (Roma, Museo Nazionale Romano, Terme di


Diocleziano, Inv. 78170).

18 Trad. Colling 2010, 231-232.

19 Scheid 2002-2003, 807.

20 Colling 2010, 236.

21 Gagé 1955, 69-113.


22 Dumézil 1982, 36-42 (Esquisse 3 : “Apollo Medicus”) et 155-163
(Esquisse 16 : “Les grands blessés de la victoire du mont Algide”).

23 Gagé 1955, 282-284 (sur la fondation “uictoriae, non ualetudinis


causa” des ludi Apollinares). Sur le développement des aspects
“triomphaux” de l’Apollon romain : ibid., 111-113 et 413-418. Sur
Apollon porteur de victoire à l’époque républicaine, voir plus
récemment Assenmaker 2014, 47-95, notamment 70-73 (sur le
tournant constitué par les ludi Apollinares de 212 a.C.) et 73-77 (sur la
survivance d’Apollon comme dieu de victoire au IIe siècle a.C.)

24 Trad. F. Nicolet-Croizat, CUF, 1992.

25 Trad. C. Guittard, La Roue à Livres, 2004 [1997].

26 Wissowa 1912, 295 : “die Einsetzung von ludi


Apollinares angeordnet, uictoriae, non ualetudinis ergo, wie Livius,
polemisierend gegen eine abweichende, vielleicht richtige Ansicht,
betont.”

27 En faveur de liens anciens entre Apollon et la uictoria, bien que


prudemment, Gagé 1955, 113 : “C’est ainsi que, tout en restant avant
tout le Medicus tout-puissant, le dieu des Prés Flaminiens, regardant la
Ville à travers les portes Carmentale et Triomphale, commençait
discrètement dès le IVe siècle peut-être à veiller, non plus seulement
sur la ualetudo du peuple romain, mais aussi un peu sur ses
victoires.” ; Coarelli 1997, 378, considère de son côté que
la ualetudo et la uictoria allaient de pair dans les cultes archaïques des
divinités guérisseuses ; Assenmaker 2014, 68-73. Contra, à tort selon
moi, Bonnefond-Coudry 1989, 155 : “Il est […] improbable que ces
liens [sc. entre Apollon et le triomphe], accidentels en quelque sorte
[sc. en raison de la localisation du temple d’Apollon sur le Champ de
Mars, tout près du pomerium], se soient développés aussi
anciennement que l’affirme la tradition.”

28 Voir Mineo 2013 (62 pour la citation), qui montre que “l’Apollon
livien possède les mêmes traits que ceux du dieu sous les auspices
duquel Auguste avait voulu placer son pouvoir et dont le modèle avait
été vraisemblablement forgé bien auparavant par le collège décemviral
peut-être animé par Fabius Pictor, à l’époque des guerres puniques” ;
Assenmaker 2014, 70-73.

29 Assenmaker 2014, 73-77. L’utilisation du temple d’Apollon pour les


délibérations du Sénat sur les demandes de triomphe est attestée pour
la première fois en 189 a.C. (Bonnefond-Coudry 1989, Tableau iv,
144 ; cf. Liv. 37.58.3).

30 Mineo 2013, 45 : “Pour le lecteur contemporain de Tite-Live,


l’Apollon dieu de victoire pouvait difficilement ne pas évoquer le dieu
d’Actium.” L’Apollon d’Actium est toutefois non seulement le dieu de la
victoire, mais aussi celui qui rétablit après les guerres civiles
l’harmonie, la paix et l’âge d’or, comme l’attestent la poésie
augustéenne (voir la note suivante) et le programme iconographique de
la Rome augustéenne (Zanker 1988, notamment 85-89 ; Sauron 2000,
en particulier 177-204).

31 Verg., Aen., 8.704-706, cité et traduit par Dumézil 1982, 41. Pour
une étude de l’Apollon “augustéen” dans la poésie augustéenne, voir
Miller 2009. Cf. Le Doze 2014, notamment 487-489.

32 Monbrun 2007, passim. Cf. Dumézil 1982, en particulier


les Esquisses 1 (Vāc) et 2 (Apollon délien), 13-35, où l’Apollon sonore
est comparé à la Voix d’un hymne védique, qui permet la
communication indispensable à l’harmonieuse commensalité humaine,
mais déchaîne aussi le tumulte du combat en relâchant la corde tendue
de son arc. Voir aussi Détienne 1998, 260, n. 113 : “L’arc d’Apollon […]
est l’instrument d’une puissance et d’une force surnaturelle, laquelle
frappe de loin, soudainement, et va toujours droit au but. L’arc
apollinien est également symétrique de la lyre et du chant.” Cf. ibid.,
60-61 (Et voici l’arc et la lyre).

33 Wissowa 1912, 143 ; Dumézil 1974, 215-256 ; Scheid 1990, 622.


34 Sur Mercure, dieu des voyageurs posté aux carrefours et protecteur
des routes, voir Kahn-Lyotard 1981 ; sur Hercule, héros à la force
invincible, protecteur des bergers et des transhumances de leurs
troupeaux et, plus largement, maître des passages, voir Jourdain-
Annequin 2013, notamment 161. Cf. Derks 1998, 104-105.

35 Speidel 1994, 30. Cf. id. 2005, 122-123 : “Soldiers in Rome often
clung to their home gods (dii paterni), hence the gods of the guard
might very well be Celtic or German gods under Roman names. […] If
so, the gods of the guard were gods of Lower German tribes, freely
chosen by veterans for their altars. Later, when one such list of gods
became the model for other altars, that group of gods became the
guard’s own”. Voir, déjà, Wissowa 1912, 86-87.

36 CIL, VI, 32546 (= 2797) ; CIL, VI, 32570 (= 2798) ; CIL, VI, 32571.
Voir Durry 1938, 336-337.

37 Dana-Ricci 2014, §38 et n. 65 ; §42 et n. 77 (avec bibliographie


antérieure).

38 Une nuance, toutefois, doit ici être apportée pour Siluanus, qui ne
bénéficia jamais d’un culte public (Wissowa 1912, 213). P.F. Dorcey
(1992, 84), tout en soulignant également que son culte ne devint
jamais public, précise : “Dedications from military units suggest
that Siluanus attained a quasi-official status among some troops.”

39 Lavagne 1989, 52.

40 ILB2, 43 (= CIL, XIII, 3605). Pétry 1992, 227-228.

41 CIL, III, 7775 ; 8483 ; 13368 ; CIL, VI, 658 (relief avec Diane
et Siluanus) ; CIL, XIII, 382 ; 5243 ; 6618.

42 Pour l’étymologie, voir Schmidt 1987, 149. Cf. Speidel 2005, 124 et
n. 187. Pour les Matres Suleuiae “qui prennent soin de vous”, voir CIL,
XIII, 5027 : Banira et Doninda e[t] / Daedalus et Tato Icari fil/i(i) Suleis
suis qui(!) curam / uestra(m) agunt ide<m=N> / Cappo Icari l(ibertus).
43 Sur les divinités honorées à Apulum, Rossignol 2010, Szabó 2015 et
2018.

44 Voir l’introduction de I. Piso au volume IDR, 3, 5, xx-xxi.

45 La fouille récente des principia n’a pas encore été publiée. Voir déjà
Szabó 2015, 130-133. Pour les inscriptions s’y rapportant, voir
Schmidt Heidenreich 2013, n° 403-429.

46 AE, 1956, 204 (IDR, 3, 5, 299) : Dis Penatibus Lari/bus Militaribus


Lari / Viali Neptuno Saluti / Fortunae Reduci / (A)esculapio Dianae /
Apollini Herculi / Spei Fa(u)ori P(ublius) Catius / Sabinus trib(unus)
mil(itum) / leg(ionis) XIII G(eminae) u(otum) l(ibens) s(oluit). Szabó
2018, 29-30.

47 PIR² C 571 (consul suffect vers 208-210 ; consul ordinaire en 216).


En tant que préteur urbain, il a offert des sacrifices à Hercule à Rome
(CIL, VI, 313 = 30735b) et aux Dioscures à Ostie (CIL, XIV, 1), qu’il a
rappelés en des poèmes gravés sur la pierre.

48 Selon Szabó (2018, 30), l’assocation Esculape-Diane-Apollon


pourrait être typique d’Apulum, où ils sont attestés dans un même
sanctuaire guérisseur (voir infra et CIL, III, 986). Une telle association
semble effectivement rare (les trois divinités apparaissent, Esculape
étant toutefois séparé d’Apollon et de Diane, dans une même liste de
nombreux dieux figurant sur une dédicace de Sarmizegetusa offerte
par un procurateur impérial [IDR, 3, 2, 246 = AE, 1977, 673]).

49 Szabó 2015, 133-134 ; 2018, 68-78 (avec la bibliographie


antérieure).

50 CIL, III, 990 (IDR, 3, 5, 31) : Ex iussu dei / Apollinis fon/tem Aeterni
Vlp(ius) / Proculinus / speculator leg(ionis) XIII G(eminae) Gordia/nae a
solo resti/tuit.

Le texte de l’inscription ne permet pas d’établir si la fontaine était


directement liée à un lieu de culte. Certains ont suggéré qu’il s’agissait
d’une source publique, à disposition des soldats et des habitants de la
cité (voir par exemple Carbó García 2010, 835). Il semble vraisemblable
que la fontaine ait fait partie de l’Asklepieion, dans la mesure où
l’inscription a été trouvée, tout comme d’autres mentionnant Apollon
(IDR, 3, 31, 32, 35 : voir supra et infra ; voir déjà en ce sens, Berciu &
Baluta 1972, 1050 ; Szabó 2015, 134), dans la vaste zone où on le
situe.

51 Cumont 1888, 186-188 ; Sanie 1978 ; Carbó García 2010,


828. Aeternus apparaît dans d’autres inscriptions d’Apulum (voir Sanie
1978, 1096-1099 ; Szabó 2015, 134).

52 Voir Bartels & Kolb 2011.

53 Apollon est également présent dans d’autres inscriptions d’Apulum


non examinées ici, soit qu’elles émanent de civils (IDR, 3, 5, 20
[dédicace de trois frères aux Aures, à Esculape, Hygie, Apollon et
Diane] ; 33 [dédicace votive, pro se suisque, à
Apollon praestantissimus] ; 34 [dédicace, pro salute sua suorumque, à
Apollon salutaris]), soit qu’elles ne s’adressent qu’à ce seul dieu, sans
le situer “en réseaux” (IDR, 3, 5, 30 [dédicace d’un vétéran au numen
Apollo] ; 32 [dédicace d’un portique par un centurion, à Apollon, sur
ordre de son numen] ; 699 [dédicace votive d’un beneficiarius à
Apollon domesticus]). Voir aussi une dédicace fragmentaire aux dieux
Apollon et Diane (IDR, 3, 5, 35).

54 Apollon et les Nymphes sont honorés conjointement dans plusieurs


dédicaces (voir par exemple : CIL, X, 6786, 6787, 6788 [Aenaria] ; XI,
3286, 3287, 3288, 3289, 3294 [Vicarello] ; III, 5861 [Raetia Ennetach] ;
Spalj 1, p. 57 [Pann. sup. Aquae Iasae]), y compris dans des
inscriptions émanant de soldats ou de vétérans (voir par exemple : CIL,
XIII, 7691 [Germ. sup. Brohl] ; AE, 1978, 555 [Germ. sup. Burgbrohl] ;
Spalj 1, p. 75 [Pann. sup. Aquae Iasae]).

55 Voir le cours de J. Scheid donné en 2007 au Collège de France et les


références citées dans le support. URL : http://www.college-de-
france.fr/media/john-
scheid/UPL6218929901427283779_3._Cours_8.11.2007.pdf (page
consultée le 14 octobre 2018), ainsi que le résumé de ce cours (Scheid
2007-2008).

56 Scheid, cours de 2007 ; Dumézil 1982.

57 AE, 1980, 735 (IDR, 3, 5, 36) : Apol[l]ini Dianae / et Leto(!)


ceterisque / dis deab[us]q(ue) huiusq(ue) / loci salutar[ib]us ex /
imperio numi[n]is C(aius) Iul(ius) / Frontonia[nu]s uet(eranus) /
leg(ionis) V M(acedonicae) p(iae) e[x b(ene)f(iciario) co(n)s(ularis)] /
dec(urio) col(oniae) Apul(ensis) pr[o se et] / suis p(ecunia) s(ua) pontem
/ exstruxit. Szabó 2018, 71 fournit une interprétation rapide du texte,
en considérant à tort que la dédicace est également adressée
au numen de l’empereur – alors qu’elle a été dressée sur l’ordre de la
puissance divine (numen), dans laquelle on pourrait reconnaître soit
Apollon, premier dédicataire du monument, soit Esculape, divinité
tutélaire du sanctuaire où a été posée l’inscription.

58 À la description du bas-relief fournie in IDR (voir réf. infra) qui ne


correspond pas à ce qui est figuré, il faut préférer celle de
http://lupa.at/11114 ici reprise.

59 CIL, III, 987 (IDR, 3, 5, 21) : Aesculapio / et Hygiae ce/terisq(ue)


di{i}s dea/busq(ue) huiusq(ue) / loci salutarib(us) / C(aius) Iul(ius)
Fronto/nianus uet(eranus) ex / b(ene)f(iciario) co(n)s(ularis) leg(ionis) V
M(acedonicae) P(iae) / redditis sibi lumi/nibus grat(ias) age(ns) ex /
uiso pro se et Carteia / Maxima coniug(e) et Iul(ia) / Frontina filia /
u(otum) s(oluit) l(ibens) m(erito).

60 AE, 1972, 456 (IDR, 3, 5, 34) : Apollini / Salutari / pro salute /


filiorum / sua co(n)i{i}ugis / suorumq(ue) / C(aius) Iul(ius) Varianus.
Notons que le même dévot (à moins qu’il ne s’agisse d’un homonyme)
fait une dédicace à Luna Lucifera (CIL, III, 1097 = IDR, 3, 5, 246), ce qui
n’est sans doute pas un hasard.

61 CIL, VI, 39 : Apollini salutari et medicinali sacrum.


62 Je ne reprends pas ici les dédicaces à un dieu qui n’est qualifié
qu’une fois de salutaris (Isis [CIL, VI, 436], les Lares [CIL, VI, 543], Deus
Sol Victor [AE, 1968, 282], Mithra [CIL, VI, 82] ; les dei militares [CIL, III,
3473]).

63 La liste qui suit ne prétend pas à l’exhaustivité. L’ordre des divinités


ainsi qualifiées pourrait en outre être revu, à la suite d’une enquête
plus approfondie. Il faut également noter que la prééminence des
Nymphes doit être relativisée dans la mesure où sept dédicaces
proviennent du même endroit, Aquae Iasae (Pann. sup.) :

• Nymphes : AE, 1974, 397 ; 1991, 908 ; 2013, 1209 ; Aquae


Iasae 76 ; CIL, III, 10891 ; 10893 ; 14548 (IMS, 4, 105) ; ILSard,
1, 187 ; Lupa, 25463, 25464 ; RICIS, 3, 613, 1002 ;

• Fortune : AE, 1902, 143 (IDR, 3, 3, 303) ; CIL, III, 3315 ; VI, 184 ;
201 ; 202 ; XIII, 6678 ; 7994 ; IRCPacen, 613 ; IMS, 6, 217
(! Fortunae est une restitution) ;

• Jupiter Optimus Maximus : AE, 1942/1943, 69 ; 1980, 793a ; CIL,


III, 6456 (le dédicant, un centurion, s’acquitte d’un
voeu, grauissima infirmitate liberatus) ; VI, 425 ; IX, 4852 ; XIII,
240 : I(oui) O(ptimo) M(aximo) / Salutari / Vlpianus /
Amf(i)l(us?) graui / infirmita/te libera/[tus(?) ;

• Jupiter seul : CIL, XI, 6944 (le dédicant est un medicus classis
praetoriae Ravennatis) ; AE, 2004, 887 (ILN, VIII, 2) ;

• Siluanus : AE, 1979, 62 ; 2009, 1138 ; CIL, VI, 543 ; 651 ; 652 ;
3716 ; 36786 ;

• Hercule : CIL, VI, 237 ; 338 ; 339 ; XI, 7112 ; RIU, 2, 392 ;

• Esculape : CIL, XI, 3710 ; AE, 2003, 2022 ;

• dii patrii : AE, 1929, 135 (deus patrius salutaris) ; 1956, 159 (dii
Maures salutares) ; 2001, 2137 (dii salutares Maures) ; CIL, VIII,
17721 (dii patrii salutares) ; 21720 (dii Maures salutares) ;
• dieux ‘indéterminés’ : ILJug, 3, 2881 (dii salutares) ; CIL, III,
14540 (IMS, 1, 107 : dii salutares).

64 Voir, par exemple, CIL, XIII, 5079 (Germ. sup. -


Aventicum) : Numinib(us) Aug(ustorum) / et Genio col(oniae)
Hel(uetiorum) / Apollini sacr(um) / Q(uintus) Postum(ius) Hyginus / et
Postum(ius) Hermes lib(ertus) / medicis et professorib(us) / d(e) s(uo)
d(ederunt).

65 Voir, par exemple, Gummerus-4, 467 = Gummerus-5, 48 (Belg. –


Treveri) : Deo / Apollini / Geminius / Similis med(icus) / u(otum)
s(oluit) l(ibens) m(erito) ; CIL, XII, 2374 (ILN, 5, 2, 553 ; Gallia Narb. –
La Balme-les-Grottes : Apollini Aug(usto) sa[crum] / T(itus) Cominius
Gratus me[dicus(?)] / [et(?)] Censa mater ex [uoto]).

66 Voir cependant l’exemple cité supra (CIL, XIII, 5079), tout comme
Kovacs 2, 6 (Pann. sup.) : Aescula/pio et / Apollini et / Hygiae / sacrum
/ Cl(audius) Vere/cundus med(icus) / u(otum) s(oluit) l(ibens) m(erito).

67 CIL, XIII, 6621 (Germ. sup. - Obernburg am Main) : I(oui) O(ptimo)


M(aximo) / Apollini et Aes/culapio Saluti / Fortunae sacr(um) / pro
salute L(uci) Pe/troni Florenti/ni praef(ecti) coh(ortis) IIII /
Aq(uitanorum) eq(uitatae) c(iuium) R(omanorum) M(arcus) Ru/brius
Zosimus / medicus coh(ortis) s(upra) s(criptae) / domu Ostia / u(otum)
s(oluit) l(ibens) l(aetus) m(erito).

68 CIL, III, 1138 (IDR, 3, 5, 307) : Deo B(ono) P(h)os/phoro Apol/lini


Pythio / D(ecimus) Iulius Ru/sonius cust(os) / armorum / pro salute
sua / et suorum / u(otum) s(oluit) l(ibens) m(erito).

69 CIL, III, 1130, 1132, 1133, 1136 (IDR, 3, 5, 300, 303, 305, 306).

70 CIL, III, 1133 (IDR, 3, 5, 306) : Deo Bono / Puero P(h)os/phoro


Apol/lini Pythio / T(itus) Fl(auius) Titus et / T(itus) Fl(auius) Philetus /
pr(o) s(alute) s(ua) s(uorumque).

71 CIL, III, 875. Sanie 1989, 1207-1209.


72 Szabó 2015, 150.

73 Alföldi 1928 ; Berciu & Baluta 1972, 1050.

74 Voir déjà, mais sans justification, Cumont 1888b, 96.

75 Cumont 1888b, 96.

76 Drijvers 1980, 171.

77 Wissowa 1912, 295 et n.3.

78 Ibid., 251.

79 Dumézil 1982 ; Monbrun 2007.

TABLE DES ILLUSTRATIONS

Titre Fig. 1. Roma, Musei Capitolini, Nuovo catalogo epigrafico 479.

Légende Dimensions du monument (marbre) : 60 x 47 x 10 cm. CIL, VI, 32550 (=


2822) ; Imagines Roma I, 2200.

Crédits © M. Clauss

URL http://books.openedition.org/ausonius/docannexe/image/16254/img-1.jpg

Fichier image/jpeg, 688k

Titre Fig. 2. Alba Iulia – Muzeul Unirii, 7861.

Légende Dimensions de l’autel (calcaire) : 52x122x26 cm. AE, 1980, 735 (IDR, 3,
5, 36).

Crédits © Ortolf Harl 2010.

URL http://books.openedition.org/ausonius/docannexe/image/16254/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 556k

AUTEURS
Yann Berthelet

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