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Lieux de culte, réseaux

divins, statues et reliefs


“cultuels” : la cité de Vienne
au Haut-Empire
Emmanuelle Rosso
p. 51-76

TEXTE NOTES AUTEURILLUSTRATIONS


TEXTE INTÉGRAL
• 1 Raepsaet-Charlier 1993 ; Van Andringa 2002 ; De Cazanove &
Meniel, dir. 2012.

• 2 Golosetti 2016.

1Si de nombreux travaux récents ont abordé les panthéons


civiques des Trois Gaules et des Germanies1, les lieux de culte de
la province de Gaule Narbonnaise n’ont pour l’heure pas fait
l’objet de grandes synthèses : une exception notable est
constituée par l’ouvrage de Raphaël Golosetti, qui a permis de
mieux comprendre l’évolution des sanctuaires et le paysage
religieux de la vallée du Rhône et des Alpes2. Les études de type
monographique consacrées à des cités ou à des divinités
singulières sont en revanche plus nombreuses, mais elles
privilégient le plus souvent un type de sources (inscriptions,
temples ou offrandes votives), sans offrir un tableau exhaustif des
traces archéologiques des pratiques cultuelles. En particulier, les
témoignages iconographiques et épigraphiques font encore trop
souvent l’objet d’études séparées, ce qui entrave toute réflexion
d’ensemble de manière particulièrement préjudiciable. Certes
l’ampleur de la documentation – et de la tâche – pour la vingtaine
de cités que comptait la Prouincia est un élément d’explication : il
demeure que les cités de Narbonnaise offrent du point de vue de
l’étude des cultes des ensembles documentaires encore en partie
sous-exploités.
• 3 CIL, XIII, 1668 ; D. 212.

• 4 Golvin 2010, 36.

• 5 Selon l’hypothèse formulée par B. Helly : Helly 1994 ; CAG 38/3,


378-379, fig. 356.

• 6 Rémy 1970 ; Rémy 1992, 201.

• 7 Environ 900 inscriptions et 500 fragments de sculptures sur


pierre.

• 8 Pelletier 1982. Outre le volume de la Carte Archéologique de la


Gaule (CAG 38/3), celui du Nouvel (...)

• 9 La thèse d’A. Vigier (Vigier 2011) traite plus largement des élites
allobroges. Quelques études a (...)

2Précocement et intensément romanisée, la cité des Allobroges et


son chef-lieu, la colonia Iulia Augusta Viennensium, colonie de
droit latin fondée par Octavien et promue au rang de colonie
romaine honoraire sous Caligula, est l’une des plus opulentes et
éminentes villes de la province, capable de rivaliser avec la
capitale des Gaules toute proche. Elle est la ville de tous les
superlatifs : ornatissima et ualentissima, comme la désigne
Claude dans son discours de Lyon3, elle possède la plus grande
enceinte de la Gaule4, le seul stade de la province5 et une
panoplie monumentale exceptionnelle à tous égards. La colonie
de Vienne représente de ce point de vue un cas d’étude
emblématique, en raison de l’ancienneté de ses relations avec
Rome, de l’étendue de son territoire – 14 000 km2, ce qui en fait
l’une des plus grandes de la Gaule6 – de la richesse de la
documentation7, de l’excellente conservation de sa parure
monumentale, mais aussi en raison des nombreuses publications
qui lui ont été consacrées à la suite de l’importante monographie
d’A. Pelletier8. Or en dépit de ces conditions d’étude très
favorables, le panthéon civique de la cité des Allobroges n’a
jamais fait l’objet d’une réflexion globale approfondie et l’histoire
religieuse de Vienne à l’époque impériale reste encore largement
à écrire9.
• 10 Rémy & Jospin 1998.

• 11 Pagus Dianensis ou Dianius.

• 12 Ils sont recensés commodément dans la CAG 38/3, 129-131.

• 13 CAG 38/3, [065], 265-270.

• 14 NEsp I, 144-149, n° 331 à 338, pl. 215-218 (avec bibliographie


antérieure). Certains ont été déco (...)

• 15 Gascou 1997, 92-101.

• 16 Van Andringa 2009b.

3Le territoire de la cité de Vienne comportait un maillage


important d’agglomérations urbaines dont certaines peuvent être
identifiées comme des uici : parmi les principales
figurent Genaua/Genève, Augustum/Aoste10, Boutae/Annecy, Cul
aro/Grenoble, Aquae/Aix-les-Bains ou encore Albinnum/Albens,
ainsi qu’un pagus Dia[- - 11(fig. 1). La richesse documentaire
pour le seul chef-lieu est aussi impressionnante que
problématique : pour donner une idée de l’ampleur des difficultés
méthodologiques, il suffit de rappeler que des dix-sept lieux de
culte attestés à Vienne par des vestiges archéologiques12 (fig. 2),
seul le temple d’Auguste et de Livie13 peut être identifié avec
certitude ; pour un petit nombre d’entre eux, le titulaire divin peut
être déduit de certaines dédicaces ou éléments de statuaire – par
exemple un temple d’Apollon grâce à une série de chapiteaux
ornés de serpents enroulés autour d’un trépied14 – tandis que la
plupart demeurent totalement anonymes. Les inscriptions
relatives aux prêtrises15 – en particulier aux flaminats, attestés en
nombre relativement important – restent en réalité notre source la
plus fiable pour connaître le panthéon officiel : elles révèlent que
les grands cultes publics de la cité étaient ceux de Mars, de la
Jeunesse et des membres de la famille impériale, qui étaient
vénérés de leur vivant ou à titre posthume selon des modalités
très variées. Sont également attestés Mercure, Apollon, Jupiter et
Junon, les Dioscures, Mithra ou encore Hercule : or tous ces dieux
n’ont peut-être pas bénéficié d’un temple monumental, et il n’est
sans doute pas légitime de vouloir identifier le lieu de culte d’une
divinité sur la seule base d’un témoignage figuré ou d’une
dédicace. En première lecture, et comme il est normal pour une
colonie, le panthéon viennois est dominé par ce que W. van
Andringa désigne comme “les cultes représentatifs de l’État et du
pouvoir romain établi sur le monde”16.
Fig. 1. Carte du territoire de la cité de Vienne au Haut-Empire (d’après
Vigier 2009, 121).
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Fig. 2. Plan simplifié de Vienne antique.


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• 17 Voir supra, l’introduction par Y. Berthelet et F. Van Haeperen.

• 18 Vienne a livré des fragments de reliefs dits “historiques”, genre


pratiquement inexistant en deho (...)

• 19 Sur ces dernières et pour l’ensemble de la Gaule Narbonnaise,


voir Boularot 2015.

4Dans le cadre restreint de cette étude, une synthèse n’est


évidemment pas envisageable ; néanmoins, puisque le présent
volume se donne pour objectif “d’explorer les réseaux
polythéistes, tels qu’ils sont attestés dans un contexte donné17”,
il semble pertinent de réfléchir à l’articulation des textes
épigraphiques, des monuments conservés et des documents
iconographiques et à l’apport spécifique des documents figurés à
la compréhension des identités divines et des réseaux divins.
Quatre types de sources seront sollicités en priorité : les statues,
en particulier les statues colossales de divinités attestées en
nombre particulièrement élevé (il s’agit du lot le plus important de
toute la Narbonnaise et peut-être des Gaules), les fragments
d’autels monumentaux18, les bases inscrites de statues divines et
enfin les inscriptions mentionnant la dédicace de statues19. En
croisant les données issues de ces différents supports, il n’est pas
seulement possible de mieux cerner les rites, les composantes
architecturales des sanctuaires, leur richesse décorative ou leurs
phases d’aménagement successives ; elles offrent surtout
l’opportunité d’une réflexion méthodologique sur l’identification
des statues cultuelles ou votives et sur la cohabitation d’une
multiplicité d’images divines révélatrices de liens et de réseaux,
sur la valeur des contextes archéologiques, sur le rôle que les
images ont pu jouer dans l’expression visuelle et rituelle des
associations divines.
5Le propos sera centré sur le Haut-Empire, pour lequel les
sacerdoces et les lieux de culte sont mieux connus, et sur un petit
nombre de dossiers où la statuaire a été placée au cœur du débat
sur le lieu de culte auquel elle est censée se rattacher ou sur la
nature de la potestas de la divinité représentée : le Capitole, les
réseaux de dea Vienna, les caractéristiques du Mars viennois et
l’intégration des empereurs divinisés dans le panthéon civique.

Architecture et statuaire : le
dossier évanescent du Capitole
• 20 CIL, II, 594, titres LXX et LXXI. Sur les temples capitolins, voir
Barton 1982.
• 21 Autel octogonal en marbre blanc dédié vers 198 p.C. pour le
salut de Septime Sévère et Caracalla (...)

6Dans une colonie romaine, le culte de la triade capitoline est


attendu et même requis, si on en croit les prescriptions des lois
coloniales, en particulier la loi d’Vrso20. Or cela n’implique pas
l’existence d’un Capitole monumental ; en outre ce culte capitolin
est particulièrement évanescent à Vienne. Seules quatre
inscriptions mentionnent en effet Iuppiter Optimus Maximus :
deux ex-voto de nature inconnue, le socle d’une statuette
également dédiée à Venus Augusta, enfin le couronnement d’un
autel figuré découvert et conservé à Agnin, au sud de la capitale
de cité21, qui réunit les bustes des “protecteurs sidéraux de la
semaine” (Junon, Mars, Neptune, Diane, Mercure, Minerve) autour
de celui de Septime Sévère.
• 22 Pelletier 1976, 61-62 ; 1988, 38.

• 23 Récemment identifié au niveau du cimetière Pipet (Helly 2004,


100) ; sur l’identification de ces (...)

7En 1975, des découvertes fortuites sur la colline Sainte-Blandine,


à l’arrière de la colline de Pipet mais à l’intérieur de l’enceinte
urbaine, conduisent au dégagement d’un monument
luxueusement décoré, dont la construction a nécessité
l’aménagement d’une terrasse, creusée dans le versant nord-
occidental de la colline22. L’édifice prenait place au terme de la
séquence monumentale et scénographique qui comportait en
contrebas le théâtre, puis le grand sanctuaire impérial de la
colline de Pipet et enfin un possible stade23, lui-même associé à
un portique. La monumentalité des espaces a conduit à identifier
un quartier à caractère public, comportant une succession de
lieux de spectacle et de lieux de culte pour lesquels on peut
légitimement supposer une forte interdépendance.
• 24 Toute la partie antérieure a disparu. Golosetti 2016, 307, fig.
107.

• 25 CAG 38/3, 379 ; fig. 356 p. 378 (salle Zc).

• 26 Pelletier 1976, 58-63.

8L’édifice de Sainte-Blandine constituait plus précisément


l’élément central d’une séquence de trois “salles d’apparat”,
toutes dotées de pavements luxueux et disposées le long du vaste
portique ; d’une largeur de 14,60 m pour une longueur conservée
de 13 m (mais elle devait atteindre 30 m24), il possédait un sol
en opus sectile composé de 209 dalles de Porta Santa et
d’Africano, encadrées par une bordure en calcaire jaune25. Le mur
de fond accueillait un imposant massif de maçonnerie (1,85 m x
3,65 m) qui a été interprété comme un socle de statue ou de
groupe statuaire. A. Pelletier, qui a dirigé les investigations
archéologiques, y a immédiatement reconnu un sanctuaire,
notamment sur la foi des statues fragmentaires qui y ont été
découvertes26. Cet ensemble représente un cas intéressant de lieu
de culte dont le titulaire est inconnu faute de mentions
épigraphiques, et où les fragments de statuaire se sont substitués
à l’information écrite dans l’interprétation. Dans quelle mesure
cette démarche est-elle légitime dans ce cas précis ?
• 27 NEsp I, 24-25, n° 53, pl. 52-53 ; CAG 38/3, 380, n° 2, fig. 359.

• 28 Pelletier 1976, 62.

9C’est sur le sol dallé qu’ont été découverts de nombreux


fragments de statues colossales, dont le plus remarquable est une
tête féminine diadémée en marbre27 (figs. 3-4). Haute de 1,06 m
de la base du cou au sommet du diadème, cette tête à bouchon
d’encastrement oblige à restituer une statue d’une hauteur
dépassant initialement cinq mètres28 si la déesse était
représentée debout. Le format colossal, la présence du diadème et
le caractère matronal de la représentation ont conduit A. Pelletier
à reconnaître Junon.
Fig. 3. Sanctuaire de Sainte-Blandine – tête féminine colossale au
moment de sa découverte (d’après Pelletier 1988, planche II, fig. 3).

Agrandir Original (jpeg, 566k)

Fig. 4. Vienne, Musée lapidaire Saint-Pierre : tête féminine en marbre


(clichés E. Rosso).
Agrandir Original (jpeg, 183k)

• 29 R. Robert, D. Terrer, in : NEsp, I, 95, n° 211, pl.


172 ; CAG 38/3, 380 n° 3.

• 30 NEsp, I, 91, n° 196, pl. 168 ; CAG 38/3, 379 fig. 358.

• 31 NEsp, I, 101, n° 237, pl. 178 ; CAG 38/3, 380.


10L’hypothèse d’un groupe statuaire placé sur la banquette
maçonnée paraît confortée par le lieu de découverte des autres
fragments, dispersés en avant de ce massif : un avant-bras
droit29 (fig. 5), une jambe droite et un pied chaussé30 (fig. 6)
ayant appartenu à une même statue masculine. Des fragments de
draperie en calcaire31 viennent compléter l’ensemble, qu’A.
Pelletier n’hésite pas à identifier comme un groupe cultuel
capitolin – le pied chaussé étant attribué à Jupiter et Minerve
n’étant “reconnaissable” qu’au travers des draperies.
Fig. 5. Vienne, Musée lapidaire Saint-Pierre : avant-bras droit colossal
en marbre (cliché E. Rosso).

Agrandir Original (jpeg, 83k)

Fig. 6. Vienne, Musée lapidaire Saint-Pierre : jambe droite et pied


chaussé colossaux, en marbre (cliché Centre Camille Jullian -CNRS).
Agrandir Original (jpeg, 260k)

• 32 R. Robert, in : NEsp, I, p. XLVII.

• 33 Golosetti 2016, 307-308, 346.

11Si la situation privilégiée de ce bâtiment dominant le paysage


urbain, le luxe de sa décoration et la colossalité de ce qui semble
être un groupe cultuel constituent des arguments favorables, les
implications d’une telle proposition ne sont pas minces. Depuis
lors, l’identification de l’édifice a été accueillie avec un certain
scepticisme par R. Robert32 puis par R. Golosetti, qui préfère
parler avec prudence d’un “édifice de type basilical”33.
• 34 Pelletier 1976, 62.

• 35 NEsp, I, 101 ; mais ces fragments pourraient tout aussi bien


avoir appartenu à d’autres statues, (...)

• 36 Selon Hermann & Newman 2000, 298.

• 37 Balty 2007, 60.

• 38 Biard & Rosso 2017.

• 39 R. Robert, D. Terrer, in : NEsp, I, 91 et 95.

12Puisque la planimétrie ne fournit aucun indice, l’identification


repose tout entière sur l’analyse de la statuaire : mais peut-on
retenir les identifications proposées ? En premier lieu, l’hypothèse
d’une triade capitoline semble mise à mal par le fait que,
contrairement à ce qu’a proposé A. Pelletier, aucun des fragments
ne peut être attribué avec certitude à une statue de Jupiter34 : en
effet le pied chaussé d’une sandale a appartenu à une jambe
dénudée jusqu’au niveau du genou ; le fragment n’est d’ailleurs
pas cassé à cet endroit, la statue était simplement assemblée, en
raison de ses dimensions, à partir de pièces sculptées
séparément ; le recours à cette technique composite est confirmée
par le plan de collage visible sur la partie antérieure du pied, qui
était elle-même rapportée. Composites, les statues étaient peut-
être aussi polylithes – associant plusieurs pierres, comme le
suggèrent les fragments de draperie en calcaire découverts à
proximité35 – voire acrolithes36. Comme la jambe est dénudée
jusqu’au niveau du genou, il paraît exclu que la statue ait
appartenu à une statue de Jupiter, qui était toujours représenté
avec le bas du corps drapé et portait, comme Zeus, des sandales à
la grecque37 ; la jambe conservée provient plus
vraisemblablement d’une statue cuirassée colossale en pied.
Parmi les dieux cuirassés, on pense en priorité au type de Mars
Ultor largement diffusé à partir d’Auguste ; néanmoins celui-ci
porte le plus souvent des cnémides et chausse des bottines de
type mullei ou, de nouveau, des sandales de type grec38, ce qui
n’est pas le cas ici. Une seconde hypothèse consiste à y voir la
représentation d’un empereur, comme l’ont proposé à juste titre
D. Terrer et R. Robert39.
• 40 CAG 38/3, 380 : “les attributions respectives à Jupiter et Minerve
proposées par A. Pelletier (20 (...)

13Les fragments de draperies en calcaire issus du même contexte


n’autorisent aucune autre proposition40. Dans l’état actuel de la
documentation, il faut donc s’en tenir à l’identification d’un
groupe bipartite, associant une divinité féminine à un empereur
cuirassé, dans une salle à probable destination cultuelle intégrée à
un complexe plus vaste.
• 41 Herman & Newman 2000, 298-300, fig. 17 p. 299 (dernier quart
du Ier s. p.C.).

• 42 D. Terrer, R. Lauxerois, in : NEsp, I, 24-25, n° 53, pl. 52-53.

• 43 Rosso 2000.

14Mais si on peut exclure l’hypothèse d’une triade capitoline,


l’identification avec Junon demeure-t-elle valide ? Si J. J. Hermann
et R. Newman envisagent Diane ou Vénus aussi bien que Junon41,
la proposition d’A. Pelletier a été retenue par les auteurs
du Nouvel Espérandieu sur la foi d’un rapprochement avec la
Junon Ludovisi42. Les deux œuvres ont en effet en commun de
figurer une divinité féminine diadémée selon un format colossal,
mais la comparaison demeure générique et surtout, plusieurs
détails iconographiques permettent de mieux situer la tête de
l’Vrbs ; l’infula qui orne sa chevelure a conduit à y reconnaître une
représentation idéalisée d’Antonia Minor, mère de Claude,
identification qui fait pratiquement l’unanimité aujourd’hui. Les
traits impersonnels de la tête viennoise ne permettent pas
d’exclure totalement la représentation d’une impératrice
divinisée ; dans ce cas, à côté d’Antonia, dont une effigie
colossale est déjà attestée au théâtre de Vienne43, seule Livie
serait réellement envisageable avec une telle coiffure. Loin d’être
un ensemble “capitolin”, le groupe de Sainte-Blandine pourrait
être, dans cette perspective, un cycle statuaire impérial.
• 44 Josèphe, BJ, 1. 21. 7.

• 45 Aurigemma 1940, 44-45, fig. 25 ; Boschung 2002, p. 8 n° 1.2,


pl. 2,2. 4.

• 46 Lauxerois et al., 1982, 403-405, fig. 12 (il s’agirait selon eux de


Minerve) ; A. Hermary, in : N (...)

15En réalité, certaines observations techniques permettent d’aller


un peu plus loin. En premier lieu, le diadème se termine du côté
gauche par une volute sculptée très inhabituelle pour ce genre de
représentation (fig. 7a) ; en outre, on note la présence, à l’arrière
du diadème, de cavités de fixation destinées à recevoir des
éléments rapportés, probablement en métal car les mortaises sont
de dimensions assez modestes (fig. 7b). Ces éléments
garantissent la présence, à l’origine, de compléments susceptibles
de préciser l’identification de la divinité figurée. Si la volute est le
vestige d’un casque en partie rapporté, ce dernier devait être de
faible volume, de type attique peut-être, et appelle une
comparaison avec certaines représentations de Roma. Une
contamination de l’iconographie de cette déesse par celle
d’Héra/Junon est attestée dès les premiers moments du
Principat dans la partie hellénophone de l’empire : dans le temple
de Rome et d’Auguste de Caesarea Maritima, l’empereur était
figuré comme le Zeus d’Olympie et Roma d’après l’Héra
d’Argos44 ; une “confusion” avec une représentation de Junon est
donc tout à fait compréhensible. Parmi les témoins
archéologiques du culte de la déesse associé à celui des
empereurs, la statue colossale du temple du forum de Leptis
Magna compte parmi les plus impressionnants45 ; le visage et la
coiffure sont proches de ceux de la tête viennoise ; néanmoins à
Vienne, la forme incurvée du diadème à l’avant diffère nettement
de celle que revêt la tête lepcitaine ; en outre, les longues mèches
bouclées retombant de part et d’autre du cou semblent s’opposer
à une telle hypothèse de restitution. En revanche on pourrait
rapprocher la tête colossale de Vienne de celle d’une statuette en
marbre découverte dans une domus de la ville46 : ce qui apparaît
comme un diadème en vue frontale est en fait un casque doté
d’un couvre-nuque et orné de deux volutes latérales (fig. 8).
Fig. 7a –Vienne, Musée lapidaire Saint-Pierre : tête féminine en
marbre : détails (clichés E. Rosso).
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Fig. 7b –Vienne, Musée lapidaire Saint-Pierre : tête féminine en


marbre : détails (clichés E. Rosso).
Agrandir Original (jpeg, 483k)

Fig. 8 a. Vienne, Musée lapidaire Saint-Pierre : tête d’une statuette de


divinité féminine (cliché Centre Camille Jullian).
Agrandir Original (jpeg, 293k)

Fig. 8 b. Vienne, Musée lapidaire Saint-Pierre : tête d’une statuette de


divinité féminine (cliché Centre Camille Jullian).
Agrandir Original (jpeg, 327k)

• 47 Picard 1964 ; A. Hermary, in : NEsp I, 36-37, n° 72, pl. 84-85.

• 48 Pelletier 1976, 62-63.

16Néanmoins A. Pelletier avait lui-même envisagé une autre


identification pour la tête féminine, avant de la rejeter au profit de
Junon : ayant remarqué les cavités de fixation, il avait alors
proposé de restituer une couronne tourelée, caractéristique des
représentations de Tutela et des personnifications de cités, avant
d’écarter cette possibilité en raison de la taille des mortaises, qui
lui semblaient trop faibles pour accueillir un attribut très
imposant. Il supposait que cet élément rapporté était
particulièrement monumental sur la base d’une comparaison avec
la célèbre statue dite “Tutela de Vienne”47 (fig. 9) : il estimait en
effet à 0,50 m la hauteur du calathos à restituer48. Or le lien qu’il
établit avec cette œuvre est sans doute trop contraignant : cette
dernière provient en effet de l’Isère, près de la zone occupée par
l’édifice thermal connu sous le nom de “Palais du Miroir”, qui
réunissait des statues de formats, sujets et époques très divers,
pour une partie en situation d’exposition secondaire ; si la statue
figure indubitablement une Tychè, rien ne prouve qu’elle ait
représenté la divinité tutélaire de Vienne en particulier. Il demeure
que l’hypothèse d’un diadème tourelé pour rendre compte du
dispositif visible sur la partie sommitale du crâne demeure
intéressante ; si on se détache de l’image de
la cosidetta “Tutela de Vienne”, il peut être pertinent d’envisager
une attribution à la déesse Vienna, dont le culte est amplement
attesté par ailleurs dans la capitale de cité.
Fig. 9. Statue de Fortuna/Tychè, appelée « Tutela de Vienne » (cliché
Centre Camille Jullian).
Agrandir Original (jpeg, 136k)

De Junon à Vienna ?
• 49 Desbat et al., 1983, 395-399, fig. 1-5 ; le diamètre du médaillon
est de 15,5 cm. On en connaît u (...)

• 50 CIL, XII, 1827 = ILN, V-1, 44 : Pro salute Augustorum et


u[ictoria] / et reditu et statu ciuitati (...)

17Le dossier documentaire relatif à la divinité est assez fourni,


quoique très hétéroclite. Le témoignage iconographique le plus
explicite de la fonction et de l’importance de la déesse Vienna, la
cité divinisée, est un vase à médaillon d’applique retrouvé à Lyon
dans le sanctuaire du Verbe Incarné, dédié au culte impérial49 (fig.
10b) : on y voit Vienna lourdement drapée, la tête ceinte d’une
couronne tourelée, tenant sceptre et patère ; à l’arrière, une
Victoire la couronne. Elle conduit un char tiré par un bige qu’elle
s’apprête à faire entrer triomphalement dans la ville, dont les
remparts (eux-mêmes tourelés) sont visibles à l’arrière-plan.
Mercure, vêtu d’une chlamyde, identifiable quoiqu’acéphale, car
caractérisé par ses sandales ailées, tient la bride des chevaux. Une
inscription placée dans l’ouverture de la porte vient expliciter la
scène (Vien(na) / Flor(entia) / Felix), tandis que la partie inférieure
du médaillon accueille une inscription couramment développée
ainsi : F[elix Vi]enna Potens Flore(ntia) / [Suo?] Principe Saluo. Une
nouvelle lecture, fondée sur la confrontation de plusieurs
médaillons fragmentaires, fait de la formule un souhait (Vienna
flor(escas) Felix), ce qui ne change pas fondamentalement
l’interprétation : la puissance, la prospérité et le “bonheur” de
Vienne sont strictement liés à la santé de l’empereur tandis que
Mercure, l’un des grands dieux de la cité, apparaît comme un
protecteur et un guide. L’association de ces deux divinités est
parfaitement attendue. Ce lien étroit entre cité et empereur est
confirmé par l’inscription CIL, XII, 182750 pour le salut des
empereurs et de la cité de Vienne.
Fig. 10a. Vase à médaillon d’applique du « triomphe de Vienne », vase
et dessin du médaillon d’après Desbat et al. 1983, fig. 3.
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Fig. 10b. Vase à médaillon d’applique du « triomphe de Vienne », vase


et dessin du médaillon d’après Desbat et al. 1983, fig. 3.

Agrandir Original (jpeg, 137k)

• 51 Picard 1964, 101-123, part. p.102-104.

• 52 CIL, VI, 36835 = AE 1900, 5. Elle est exposée sur le Forum


Romain, à proximité de la Basilica Aem (...)

18Quoique la fonction religieuse des vases à médaillon d’applique


ne puisse être démontrée, l’image a l’avantage de préciser
l’iconographie de la déesse Vienna, qui s’écarte de celle de
la Tutela précédemment évoquée : alors que cette dernière tient
un gouvernail et une corne d’abondance51, l’image du médaillon
se caractérise par une couronne crénelée dépourvue
de calathos mais associée à un diadème – qui en l’occurrence
rappellerait en filigrane le don de la muraille par Auguste – mais
aussi par une pose solennelle et des attributs insistant sur
la pietas et la souveraineté, la première apparaissant comme la
garantie de la seconde. Malgré le caractère fortement symbolique
du médaillon, il semble livrer une iconographie “officielle” de la
déesse, puisqu’elle apparaît à l’identique sur un autre médaillon
proposant le face-à-face des divinités tutélaires de Vienne et de
Lyon : le Genius de la capitale des Gaules à droite, et à
gauche Vienna, identifiée par une didascalie, qui tient de nouveau
sceptre et patère (fig. 11). Ces images aident donc peut-être à
restituer l’aspect de l’image cultuelle, mais surtout à mieux cerner
la “personnalité” de la déesse, sa puissance divine ou Numen, qui
est d’ailleurs célébré en tant que tel dans une inscription de
Rome, où M. Nigidius Paternus lui a élevé un autel en
marbre52 : Numini deae / Viennae / ex d(ecreto) d(ecurionum) /
M(arcus) Nigidius Paternus / IIuiral(is) pon(endum) cur(auit). On
ignore les circonstances de dédicace du monument, mais il
permettait assurément de garantir la présence de la divinité
poliade dans l’espace de l’Vrbs.
Fig. 11. Vienna et le genius de Lyon sur un médaillon d’applique :
dessin d’après Wuilleumier & Audin 1952, n° 97.
Agrandir Original (jpeg, 335k)

• 53 CIL, XII, 5864 a-b = ILS 6999 et 6999a ; De Kisch 1979, 262,
n° 20-21p. 277. Rémy 1992, 210, 217- (...)

• 54 De Kisch 1979, 262 : “Il s’agit, pour une statue unique et pour
un versement non effectué en méta (...)

• 55 Rémy & Géroudet 2015, 56.

• 56 Estienne 1997, 83.

19Un autre texte doit être versé au dossier de ce culte : il était


dupliqué sur deux bases de statues en calcaire53 offertes à la fin
du Ier ou au début du IIe s. p.C. par un affranchi aux
frères Coelii (Sextus Coelius Canus et Sextus Coelius Niger) qui
avaient exercé la charge de questeurs à Vienne et qui, en
remerciement de leur accession au décurionat (à l’âge de 77 ans !)
avaient offert une statue en argent de la
déesse Vienna (simulacrum Viennae argenteum). Le texte est
célèbre en raison de la somme exorbitante consacrée à ce don :
200 000 sesterces, ce qui correspond à la somme la plus
importante consacrée à une seule statue pour l’ensemble du
monde romain54. Le caractère exceptionnel du geste invite à
s’interroger à la fois sur l’aspect, la fonction et la destination de
l’œuvre : en général, au-delà de 100 000 sesterces, il s’agit de
dons collectifs ou hors norme : faut-il penser à une statue en
argent massif ou en bronze recouvert d’argent ? Ce n’est pas
impossible, mais peut-être la somme reflète-t-elle (aussi)
l’excellence du travail de l’artiste. Si on devait proposer une
restitution de l’œuvre disparue, il faudrait sans doute la présenter
comme une déesse drapée et tourelée, tenant sceptre et patère.
En outre, il s’agit de la seule attestation du terme simulacrum non
seulement dans la cité de Vienne, mais aussi dans l’ensemble de
la Narbonnaise ; à Vienne, les statues divines sont qualifiées
de signa, éventuellement de statuae55. Les études
lexicographiques récentes concluent à une multiplicité des termes
désignant les statues de culte ; néanmoins, comme l’a rappelé
S. Estienne, les termes de simulacrum et de signum “sont réservés
à des représentations de dieux ou d’empereurs divinisés, tandis
que statua et imago désignent généralement des statues en pied,
le plus souvent honorifiques et des portraits d’hommes vivants ou
morts”56. Il serait donc imprudent d’affirmer que les
frères Coelii ont financé une nouvelle statue de culte pour le
temple de Vienna ; en revanche, ils ont manifestement tenu à ce
que leur offrande soit insigne, remarquable entre toutes.
• 57 Lamoine 2009, 201 sqq,
20Il paraît significatif que le dédicant – qui pourrait d’ailleurs être
un affranchi de l’un des frères – présente leur don comme un
témoignage de leurs qualités morales, la pietas et la concordia,
deux des vertus cardinales sur lesquelles reposent l’harmonie et
la stabilité de l’ordre civique57. Sans descendance directe, les
frères Coelii ont affecté une somme très importante à la
célébration de la déesse qui incarnait cet ordre civique : en
remerciement des charges exercées et du privilège de siéger
parmi les décurions (qui n’était pas automatique pour les anciens
magistrats, comme l’a souligné J. Gascou), c’est à Vienna,
personnification divinisée de leur cité, et vraisemblablement au
sein même de son sanctuaire, qu’ils ont fait preuve de leur piété
insigne : un tel emplacement aurait garanti à
ce simulacrum exceptionnel la plus grande visibilité. Notons enfin
que l’affranchi, en tant que sévir, participait à titre personnel à la
gestion du culte des empereurs, qui étaient régulièrement
associés à Vienna dans les hommages comme dans les images.
21Ces divers témoignages indirects, qu’ils soient iconographiques
ou épigraphiques, permettent d’établir l’existence d’un culte
de Vienna dans le chef-lieu de cité ; la richesse des dons de
statues attestés dans la ville témoigne à la fois de l’importance du
sanctuaire pour les élites viennoises mais aussi de son rôle
comme vitrine et lieu d’expression de la concordia, du consensus
et de la pietas existant entre les hommes et les dieux, entre les
membres de la communauté, mais aussi entre la cité et
l’empereur. Tous ces témoignages expriment leur confiance dans
le cadre institutionnel offert par la cité pour la perpétuation et le
salut de tous.
22Revenons à l’édifice “basilical” de Sainte Blandine. L’hypothèse
d’une triade capitoline peut être écartée, mais celle d’un lieu de
culte accueillant les statues monumentales de deux divinités reste
plausible. La statue masculine a toutes les chances d’avoir figuré
un empereur cuirassé ; si on ne peut exclure la représentation à
ses côtés d’une impératrice ou princesse divinisée aux traits
idéalisés, la présence et la nature de compléments en métal
aujourd’hui disparus invitent à envisager la restitution d’un
casque (il pourrait alors s’agir de Roma) ou d’une couronne
tourelée, caractéristique des personnifications de cités ;
l’hypothèse d’une représentation de dea Vienna avec de tels
attributs serait concordante avec l’image que livrent les
médaillons d’applique.
23La réunion des attestations révèle les contours d’une divinité
dont l’image fut implantée jusqu’au cœur de l’Vrbs, et s’inscrivant
au sein d’un réseau divin comprenant d’une part son
correspondant lyonnais, prenant la forme d’un Genius, d’autre
part les princes divinisés, qui représentaient l’échelon central du
pouvoir, mais aussi Mercure, qui est le dieu le plus fréquemment
présent dans l’épigraphie religieuse de la cité.

Quelles images et quelles


divinités autour du
Mars viennois ?
• 58 Bertrandy 2000.

• 59 ILN, V-2, 547, 548 et 549.

24Mars est l’un des cultes civiques les mieux connus grâce à un
corpus épigraphique conséquent et à l’étude exhaustive de
F. Bertrandy, qui a dressé un inventaire des dédicaces et
inscriptions relatives à ce dieu pour l’ensemble du territoire des
Allobroges58. Au total, ce ne sont pas moins de 26 inscriptions
qui le mentionnent, dont 19 sont des dédicaces au dieu et 10
mentionnent l’un de ses prêtres. Si le chef-lieu apparaît bien
comme le centre principal de sa vénération, les dédicaces du
territoire se concentrent dans sa moitié orientale (Grenoble, lac du
Bourget, Annecy et Genève ou encore Passy59).
• 60 Sur le flaminat de Mars, voir ILN, V-1, p. 48-49 ; Christol 2010,
364. Dans les Trois Gaules, Mar (...)

• 61 Christol 2010, 365 ; B. Helly, in : CAG 38/3, 128.

• 62 Notamment à deux reprises à Passy : ILN, V-2, 548 et 549


= ILHS, 80 et 81 = Bertrandy 2000, 239 n (...)

25Comme l’a souligné M. Christol, Vienne est l’une des rares cités
de Gaule qui ait inscrit le culte de Mars dans ses cadres
institutionnels, ce que révèle le flaminat du dieu60. Or le nom de
Mars n’est accompagné, à Vienne même et dans la plupart des
cas, d’aucune épiclèse qui vienne préciser le périmètre de son
pouvoir61 ; mais sur le territoire, à six reprises, c’est un
Mars Augustus qui est honoré62. L’interprétation qu’il convient de
donner aux divinités augustes est, on le sait, encore très
débattue. Si certains spécialistes (dont F. Bertrandy et B. Rémy)
défendent l’idée d’un lien direct entre cette dénomination et
l’hommage, voire le culte rendu à l’empereur – et y voient
l’expression d’un loyalisme de type politique envers le prince –,
d’autres interprétations sont aujourd’hui retenues : elle
désignerait plutôt les grands dieux communautaires – lecture qui
paraît particulièrement pertinente dans le cas de Vienne. Le
caractère officiel du culte est amplement confirmé par le rang des
dédicants connus, parmi lesquels figurent trois personnages de
rang équestre et cinq magistrats municipaux ; deux dédicaces à
Mars sont le fait de flamines du dieu.
• 63 En toute logique, il devait se trouver à l’extérieur de l’enceinte
urbaine mais à proximité imméd (...)
26La richesse du dossier épigraphique est en contraste flagrant
avec l’absence quasi-totale de témoignages iconographiques et
plus largement archéologiques : en effet on ne recense que
quelques statuettes de bronze difficiles à interpréter (ex-voto,
éléments de “laraires” domestiques ?) et on ne connaît ni
l’emplacement ni l’aspect de ce qui devait être l’un des lieux de
culte les plus imposants de la ville63. On est donc en présence
d’un dieu à la fois omniprésent et insaisissable : dieu sans
épithète, Mars était-il aussi un dieu isolé, “sans réseau” et
comment l’interpréter ?
• 64 Vienne, Musée archéologique Saint-Pierre, inv. R 2001-5-123.
GAG 38/3, 128, 305 fig. 259 ; A. Her (...)

• 65 La présence d’une figure d’Eros parmi les fragments non jointifs


du relief confirme l’identificat (...)

• 66 Mars et Ilia : Bertrandy 2000, 243 type D, 244 fig. 9 ; B. Helly,


in : CAG 38/3, 128.

27Un relief en marbre pourrait apporter des indices intéressants à


propos de la personnalité du Mars viennois : aux abords
du “jardin de Cybèle” a été exhumé un relief monumental64 très
lacunaire proposant une scène mythologique complexe (fig. 12) :
seule est conservée la partie supérieure droite de la composition,
qui était encadrée par un décor de rais-de-cœur. On y voit deux
figures féminines allongées : l’une, dans la partie supérieure,
drapée dans un vêtement fin, est sous un figuier ; l’autre, en-
dessous, est sur une kliné ; elle a le buste dénudé. A. Hermary
propose de reconnaître Vénus en bas65 et Rhéa Silvia en haut, car
elles sont représentées ainsi sur des sarcophages de la collection
Mattei qui figurent certainement ces personnages ; la partie
manquante de la composition comprendrait entre autres une
représentation de Mars “visitant” la vestale, selon une
iconographie rare en Gaule mais attestée sur un médaillon
d’applique de Vienne66 (fig. 13).
Fig. 12. Vienne, Musée lapidaire Saint-Pierre : relief mythologique
monumental (cliché Centre Camille Jullian).
Agrandir Original (jpeg, 327k)
Fig. 13. Médaillon d’applique : Mars et Rhéa Silvia (d’après Bertrandy
2000, fig. 9).

Agrandir Original (jpeg, 256k)

• 67 Dardenay 2012, 146-147. Je la remercie de m’avoir indiqué cette


étude.

• 68 NEsp I, 63-64, n° 129, pl. 128-129.

28Les dimensions très importantes du panneau sculpté (2,30 m


de haut pour la seule partie conservée) imposent de l’attribuer à
un grand monument, somptueusement décoré ; si l’hypothèse
d’un temple dédié à la naissance de Rome a été avancée, il
convient de rester prudent sur l’interprétation, comme l’a rappelé
A. Dardenay67. Le relief ne provient probablement pas du temple
de Mars : on suppose que ce dernier était situé sous Saint-André
le Haut, où a été retrouvé un autel au dieu. À quel monument
pourrait-on le rattacher ? Aucune structure en place ne peut lui
être attribuée, mais d’autres fragments présentant la même
moulure d’encadrement figurent un quadrige et un buste de Sol-
Apollo68. La présence d’autres épisodes mythologiques et
d’autres divinités semble en première lecture affaiblir le sens de la
composition : nous ne sommes ni en présence d’un cycle
spécifiquement consacré aux primordia Vrbis ni d’un ensemble
centré sur Mars. Comme l’a noté R. Robert, deux inscriptions
découvertes dans le même secteur pourraient contribuer à éclairer
sa destination : la base d’une statue de Germanicus et un vœu
pour la sauvegarde des empereurs et de la cité. Ce contexte
iconographique et épigraphique suggère un lien entre l’image des
origines de Rome et la célébration impériale, sans qu’il soit
possible d’aller plus loin dans l’interprétation.
• 69 CIL, XII, 2201 et 2002 ; ILN, V-2, 347 et 348 (Saint-Laurent-du-
Pont, entre Vienne et Grenoble) ; (...)

• 70 Rémy in : ILN V-2, 52.

29Néanmoins la présence probable de l’épisode de Mars et Rhéa


Silvia, qui rappelle le statut d’un Mars pater, père du fondateur de
Rome, tisse un lien, ténu mais significatif, avec le grand dieu
officiel du panthéon viennois et confirmerait indirectement le
caractère éminemment romain du culte. Si tel était le cas, Vienne
s’affirmerait à travers son panthéon comme un véritable miroir de
la capitale de l’empire, où Mars comptait aussi parmi les plus
grands dieux. Or il n’est peut-être pas indifférent que le territoire
de la cité accueille le seul lieu de culte dédié à Quirinus69 –
d’ailleurs honoré lui aussi comme Augustus – de l’ensemble des
Gaules et peut-être des provinces occidentales70 ; on ne peut
s’empêcher de penser à la première triade romaine formée avec
Jupiter et Mars et d’établir un lien avec l’institution du flaminat de
ce dernier.
• 71 CIL, XII, 2580 = ILN V-3, 809 = ILHS, 57. Bertrandy 2000, 21 p.
239.

• 72 CIL, XII, 2589 = ILN, V-3, 823 ; Maier 1983, 97 n° 74 ;


Bertrandy 2000, 239 n° 22. L’inscription (...)

• 73 Rémy 1994, 180.

30Quoique rares, les combinaisons divines révélées par quelques


dédicaces multiples vont dans le même sens : à Douvaine, Mars
est associé à Jupiter dans un ex-voto71, de même qu’à Genève72,
où il apparaît à la tête d’une “triade” que vient compléter Mercure,
l’autre grande divinité des Allobroges, qui apparaît dans 43
inscriptions sur le territoire de la cité et occupe ainsi “la première
place dans le panthéon épigraphique de la cité de Vienne”73. Il
semblerait que cette dernière dédicace convoque les trois
principales divinités du panthéon local, garantes de la
souveraineté, de la protection et de la prospérité de la cité.
• 74 ILN V-1, 370.

• 75 Boularot 2015, 47.

• 76 CIL, XII, 2218 = ILN, V-2, 357 ; Rémy 1992, 218 n° 19 ;


Bertrandy 2000, 238 n° 4 ; CAG 38/4, 189 (...)

• 77 CIL, XII, 2225 = ILN, V-2, 363 ; Rémy 1992, 218 n°


20 ; CAG 38/4, 189, 190 fig. 145.

31Les prescriptions testamentaires d’un membre de l’ordre


équestre, Decimus Decmanius Caper, révèlent une autre
combinaison : une inscription de Vienne74 fait état de la donation
de 50 000 sesterces que ce sous-préfet des cavaliers de
l’aile Agrippiana a laissée pour l’érection de statues divines75 ; or
les bases en calcaire de deux d’entre elles, d’une facture et d’une
gravure très soignées, ont été découvertes à Grenoble : la
première est dédiée à Mars76, la seconde à Saturne77.
Curieusement, alors que le nom d’aucune des deux divinités n’est
complété par une épithète, B. Rémy suppose que le Saturne
correspond au dieu romain, tandis que Mars serait “le dieu gallo-
romain et non le dieu guerrier du panthéon romain”, ce qui paraît
quelque peu contradictoire. Un rapprochement avec l’autel
d’Agnin précédemment évoqué permet d’envisager une
signification astrale pour ce cycle de dédicaces, qui est
probablement incomplet.
• 78 CAG 38/3, 229, fig. 157 ; D. Terrer, in : NEsp I, 77-79, n° 149,
pl. 150.

• 79 La hauteur conservée est de 80 cm.

32Enfin, un autre témoignage archéologique pourrait être versé au


dossier : la puissante tête barbue appelée “la Bobe”78 (fig. 14).
Remployée comme clé de voûte dans une porte médiévale, elle est
aujourd’hui exposée au Musée lapidaire ; elle se caractérise par
ses dimensions colossales79, sa frontalité et son traitement sans
effet. Elle a dernièrement été identifiée comme un portrait de
Septime Sévère, mais la ressemblance paraît purement générique
et surtout, la partie supérieure du crâne manque, ce qui interdit
d’étudier la coiffure et de rattacher l’agencement capillaire à l’un
des types officiels de l’empereur. Le format et la frontalité
indiquent une probable effigie divine ; or on remarque qu’elle
n’est pas cassée dans sa partie sommitale, mais aménagée : un
plan horizontal a été préparé pour recevoir un complément
aujourd’hui disparu. La barbe volumineuse, le cou puissant et la
moue sévère qui a donné son surnom populaire à la statue – “la
Bobe” – peuvent donner des indices : une représentation de
Jupiter étant exclue en raison de la chevelure qui est trop courte,
il pourrait s’agir de Mars, dont le casque rapporté a disparu. Si tel
était le cas, nous aurions une indication précieuse non seulement
sur l’aspect, mais aussi sur le rôle du dieu : s’il était casqué, il
était aussi probablement cuirassé et le type statuaire s’inspirait du
Mars Ultor romain. L’œuvre est trop fragmentaire pour permettre
une étude plus approfondie, et les sources épigraphiques
n’autorisent en aucun cas à faire du Mars viennois un Mars
Vengeur, décalque du Mars romain, car le type a pu être utilisé
pour représenter des Mars “interprétés” ; néanmoins les choix
iconographiques confirment la prégnance du modèle romain et
impérial, construisant une image à la mesure de la puissante
protection qu’il exerçait sur le territoire des Allobroges.
Fig. 14. Vienne, Musée lapidaire Saint-Pierre : tête masculine
colossale (Mars ?) (cliché Centre Camille Jullian – CNRS).
Agrandir Original (jpeg, 263k)

33Il ressort de ce tableau très lacunaire le caractère à la fois


dominant et multiple du Mars viennois ; le texte des inscriptions
est en tant que tel peu explicite, mais les associations révélées
par certaines dédicaces multiples, reliefs ou statues contribuent à
préciser les fonctions autant que les hiérarchies : Mars n’est
associé qu’aux plus grands dieux, et malgré l’absence d’épithète,
on ne saurait nier son caractère éminemment romain ni déceler la
moindre réminiscence d’un dieu indigène antérieur à la création
de la cité.

Le culte impérial dans les


réseaux divins de la cité de
Vienne
• 80 Il s’agirait du sanctuaire situé sous l’immeuble Le Ponsard : Helly
2014, 129, n° 4.

• 81 Helly 2014, 130, n° 8.

• 82 Rémy 2003b.

• 83 CIL, XII, 1872 = ILN, V-1, 66.

• 84 Rémy 2003b, 372 n° 8.

• 85 Pour le seul chef-lieu de cité : Rosso 2006, 293, n° 81


(Germanicus, 14-19 p.C., perdue), 293, n° (...)

34On a déjà relevé à propos de Vienna ou de Mars l’association


étroite de la célébration ou de la vénération impériale aux cultes
civiques ; elle est si régulière dans les dédicaces religieuses en
Gaule qu’il est difficile d’en tirer des conclusions précises. Or à
Vienne, si l’on suit les identifications proposées pour les
différents lieux de culte archéologiquement ou épigraphiquement
avérés, le “culte impérial” aurait proprement annexé l’ensemble de
l’espace urbain dès les débuts du Principat : outre le temple
d’Auguste et de Livie seraient attestés un Augusteum80, le temple
sur podium de la rue Victor Hugo81 et le grand sanctuaire de
Pipet. Dans l’étude qu’il a consacrée au culte impérial viennois82,
B. Rémy a recensé pas moins de 87 inscriptions et parmi les
sacerdoces municipaux (flaminats), la gamme des modalités de
culte des empereurs vivants ou divinisés et à celui de divers
membres de la famille impériale est particulièrement étendue :
sont en effet attestés les cultes de Rome et Auguste, d’Auguste
puis du diuus Augustus et enfin de Germanicus César83, une
spécificité locale d’un grand intérêt, qui pourrait s’expliquer par la
proximité des élites municipales avec certains membres de la
famille de Caligula. Le culte des princesses divinisées était pris en
charge par des flaminiques, attestées en nombre important à
Vienne : on ne connaît pas moins de huit prêtresses
municipales84. Les statues impériales présentes en grand nombre
à Vienne même sont un autre signe de l’intensité de la célébration
impériale, mais doivent être considérées comme des statues
honorifiques sortant au moins partiellement de la sphère du culte
impérial, d’autant plus qu’elles sont pour la plupart attestées par
des bases inscrites qui ont fait l’objet de remplois85 : la présence
de deux bases de statues de Germanicus confirme néanmoins
l’importance du prince, révélée par l’existence d’un sacerdoce
spécifique. Si l’omniprésence statuaire des membres de
la domus impériale semble acquise, il est plus difficile de cerner
les modalités et les espaces précis de leur vénération. En effet
malgré l’abondance des témoignages, leur découverte en dehors
de tout contexte archéologique interdit le plus souvent de
connaître les sanctuaires à proprement parler et de reconstituer la
topographie du culte impérial viennois. Elle permet en revanche
de comprendre les logiques d’associations des divinités
impériales avec d’autres divinités civiques et de mieux saisir une
forme de “maillage” du territoire de la cité.

Un temple et plusieurs autels


• 86 Helly 2014, 119-120.

35Le temple du forum compte parmi les édifices religieux les


mieux conservés non seulement de Gaule romaine, mais aussi de
l’empire. Le monument, de style corinthien, dominait initialement
la place du Forum ; moins célèbre que la Maison Carrée, il
présente pourtant un cas assez similaire, les titulaires divins étant
connus dans les deux cas grâce aux cavités de fixation laissées
par les lettres en bronze de l’inscription dédicatoire aujourd’hui
disparue. Celle-ci était apposée sur l’architrave et la frise du
temple, pour lequel les spécialistes d’architecture s’accordent à
reconnaître deux phases successives. Les deux états de
l’inscription confirment donc les deux vies du monument :
initialement dédié à Rome et Auguste, selon une formule
largement et précocement diffusée dans l’Occident romain, il fut
transformé par l’adjonction de Livie divinisée, Diua Augusta, après
sa consecratio intervenue en 41 p.C., associée désormais au diuus
Augustus. Selon B. Helly, c’est un séisme intervenu sous Caligula
qui aurait partiellement détruit l’édifice et favorisé sa
transformation86.
• 87 Gros 2008, 70.

• 88 Le Bot-Helly & Helly 2002, 124-126 ; Tardy 2009, 176-177, fig.


1.

• 89 Rosso 2001 ; A. Hermary, in : NEsp I, 75, n° 146, pl. 148 ;


Rosso 2006, 299-301, n° 89, fig. 68.

36Pour reprendre une expression de P. Gros, le temple n’est pas


seulement “l’axe générateur” de la place publique87, mais devient
celui de la spectaculaire séquence monumentale se développant
sur plusieurs niveaux qui a déjà été évoquée à propos de l’édifice
de Sainte-Blandine. Le théâtre, adossé à la colline de Pipet, en est
le premier élément ; il est le seul des théâtres gallo-romains à
accueillir dans sa partie sommitale un dispositif doté
d’une cella barlongue et d’un pronaos88, véritable sacellum in
summa cauea. La présence impériale est assurée dans l’édifice
théâtral par l’effigie diadémée très fragmentaire d’Antonia Minor
qui y a été découverte89. L’infula qui orne sa chevelure la désigne
comme prêtresse du divin Auguste, dont le culte est parfaitement
attesté à Vienne – tout comme celui de Livie, qui avait précédé
Antonia dans l’exercice de ce sacerdoce à Rome. Ces
caractéristiques tout comme son format colossal lui confèrent une
tonalité particulière qui semble excéder la simple dimension
honorifique. Si on accepte que le sanctuaire de Pipet ait été dédié
au culte impérial, qui était peut-être également présent dans
l’édifice de Sainte Blandine, on remarque que de la place du forum
au sommet de la colline, c’est l’ensemble de la série monumentale
qui se trouvait marquée par cette présence cultuelle, avec une
intensité particulière entre Tibère et Claude, avec de possibles
échos thématiques entre différents édifices publics et/ou cultuels
du centre monumental.
• 90 Les premiers à avoir rapproché les deux effigies, conservées
l’une à Vienne et l’autre à Lyon, so (...)

• 91 Rosso 2004, 166, fig. 2 a-b.

37Les reliefs confirment l’importance de cette phase et


témoignent de l’existence d’au moins deux autels monumentaux
directement liés à la célébration des empereurs. Le premier
accueillait le seul véritable “relief historique” conservé pour
l’ensemble des provinces gauloises. Il s’agit d’une composition à
tonalité dynastique dont sont conservés les portraits d’Auguste et
de Tibère, représenté avant son avènement90, ce qui permet de
situer sa dédicace dans la décennie 4-14 p.C. Les couronnes
précisent le message global : alors qu’Auguste est couronné de
chêne, insigne qui lui avait été octroyé pour avoir mis un terme à
la guerre civile et qui représente donc l’empereur pacifer, Tibère
est couronné de laurier, en souvenir de ses campagnes militaires
victorieuses. Leur face-à-face exprimait donc visuellement l’idée
même de co-régence91. Une tête féminine a probablement
appartenu au même relief : elle présente un visage juvénile et
porte une coiffure classicisante. Sa tête est ceinte d’un bandeau.
On y a parfois vu une représentation de Vénus, ce qui
constituerait peut-être dans ce contexte une allusion à l’adoption
de Tibère dans la Gens Iulia, mais on ne peut exclure qu’il
s’agisse d’une effigie impériale fortement idéalisée : il pourrait
dès lors s’agir de Livie. Si ces considérations sont exactes, et
malgré les lacunes, il est probable que le relief ait appartenu à un
autel destiné au culte dynastique. La rareté du motif en dehors de
Rome suffirait presque à l’assurer ; malheureusement, comme
souvent à Vienne, l’emplacement précis n’est pas identifiable,
puisque la tête d’Auguste était en remploi sur les pentes nord de
la colline de Pipet, mais indique une proximité avec les lieux de
culte précédemment mentionnés.
• 92 NEsp, I, 154-158, n° 347-358, pl. 223-226 ; Robert 2005.

• 93 Sauron 1991 ; Carrier 2005-2006.

• 94 Gros 2008, 70.

38Le second autel, identifié et publié par R. Robert92, est composé


de plusieurs fragments de plaques de revêtement en marbre
blanc, d’inégales dimensions ; elles étaient ornées de cygnes
tenant dans leur bec des guirlandes composées de végétaux et de
fruits. Ce motif de prédilection de l’art officiel augustéen renvoie
sans ambiguïté à l’abondante série des “autels d’Auguste”, issus
de l’Vrbs et des cités du monde romain, qui mettaient en exergue
la prospérité et la piété retrouvées grâce à l’action conjointe
du Princeps et d’Apollon. Il est attesté notamment sur l’un des
autels retrouvés in situ dans l’orchestra du théâtre d’Arles, autre
colonie de Narbonnaise particulièrement favorisée par la famille
impériale ; les autres autels de ce cycle bien connu, tous
anépigraphes, ce qui nous interdit de connaître leur(s)
destinataire(s), associent de manière systématique symboles
augustéens et emblèmes apolliniens, en une ambiguïté voire une
confusion savamment entretenue93. Du fait de ses dimensions
plus imposantes, l’autel de Vienne prend des allures d’Ara
Pacis gauloise94 qu’il est vraisemblable de rattacher à l’une des
modalités du culte impérial viennois, même si la possibilité d’un
lien avec Apollon ne saurait être exclue.
• 95 Sur la place et le rôle des autels impériaux dans la ville, voir
Mauger 2016.

39Il n’est évidemment pas nécessaire de postuler l’existence d’un


monument cultuel spécifique pour chacun de ces destinataires
impériaux : un autel placé devant une statue pouvait suffire et
l’aire du temple d’Auguste et de Livie (ou du sanctuaire de Pipet) a
pu accueillir les rites consacrés à l’ensemble des princes julio-
claudiens divinisés95. On aimerait bien sûr en savoir plus sur le
réseau viennois, apparemment d’une grande densité, des diui,
diuae et des princes ou princesses de la famille impériale dont
témoignent d’une manière elliptique les titulatures sacerdotales :
le titre de “prêtre d’Auguste” pouvait renvoyer à des pratiques et
des destinataires variés (culte du Genius, du Numen…).
• 96 L’inscription proviendrait de Pipet. CIL, XII, 1904 ; ILS 3400 ;
Rémy 1992, 211, 217 n° 14 ; ILN, (...)

40À défaut de saisir avec précision ces modalités cultuelles, nous


pouvons connaître grâce à une inscription monumentale gravée
sur une table de calcaire un aménagement cultuel et statuaire
exceptionnel96 offert par une flaminique (flaminica
Viennae) : tegulas aeneas auratas / cum carpusculis et / uestituris
basium et signa Castoris et Pollucis cum equis et signa Herculis et
Mercuri.
• 97 Chorier, 1659, 173.
• 98 Rémy 2003b, 372.

• 99 On se reportera au tableau commode fourni par Rémy 2003b,


372 n° 8.

• 100 CIL, XII, 2317 = ILN, V-2 458 et peut-être ILN, V-3, 858.

• 101 Rémy-Geroudet 2015, 63.

• 102 L’expression est de J. Scheid.

41Le bloc semble complet, mais comme le nom de la flaminique


manque, il faut peut-être supposer la présence d’un second bloc
aujourd’hui perdu. N. Chorier en faisait la dédicace d’un temple97,
ce qui semble improbable étant donné la taille et la mise en page
du texte ; en revanche elle témoigne indéniablement d’un acte
d’évergétisme de grande ampleur. B. Rémy pense que la
mention D(ecreto) D(ecurionum) renvoie au mode de désignation
de la prêtresse98 ; en réalité, on pourrait tout aussi bien supposer
qu’elle révèle le caractère officiel de l’octroi de l’emplacement du
monument auquel l’inscription appartenait. En outre huit
flaminiques sont attestées dans la cité de Vienne99 et les
inscriptions ne précisent que rarement l’identité des
divinités “prises en charge” par ce sacerdoce ; seules deux
épitaphes de Grenoble donnent un titre complet mais ambigu,
celui de flaminica Aug(ustae)100. Il est fort vraisemblable que
l’inscription fasse état des ornements architecturaux et statuaires
apportés à un sanctuaire, éventuellement dans le cadre d’un
évergésie ob honorem, ainsi que le suggère B. Rémy101. En effet,
ces aménagements sont à la fois considérables et luxueux : tuiles
et antéfixes (carpuscula) en bronze doré pour le toit, socles ornés
et quatre statues divines qu’on peut difficilement considérer
comme purement “décoratives” : celles des Dioscures (avec leurs
chevaux), de Mercure et d’Hercule. Cette association de divinités
masculines pourrait révéler les dévotions propres à la dédicante,
ou encore renvoyer à des divinités du panthéon civique. La
présence de Mercure ne surprendrait guère : il est le dieu le plus
fréquemment présent dans l’épigraphie religieuse de Vienne et il
apparaît comme “guide” du char triomphal de Vienna sur le
médaillon d’applique lyonnais. En outre l’une des compétences
des Dioscures est de veiller sur le transport maritime : ils sont
donc parfaitement attendus aux côtés de la divinité tutélaire d’un
important port fluvial. Le rôle d’Hercule dans cette combinaison
est plus délicat à cerner, dans la mesure où le culte du dieu n’est
pas attesté par ailleurs à Vienne : lié à l’élevage, il est également
attaché “au retour victorieux après les exploits accomplis au
loin”102 et c’est peut-être au titre de sa fonction “civilisatrice”
qu’il était présent dans cet ensemble. L’inscription de la
flaminique anonyme qui a offert ces signa ne révèle pas
seulement l’existence d’un culte et d’un sanctuaire public, elle
offre aussi de précieux renseignements, de nouveau, sur les
domaines d’action attachés à la déesse et la nature de
divinités “invitées” dans son sanctuaire – à tout le moins sous la
forme de leurs images.
42On a coutume d’opposer les cultes populaires qui relèveraient
de la romanisation de cultes indigènes, et les cultes officiels des
centres urbains, dont le culte impérial serait le parangon. Or le
sanctuaire de Châteauneuf, situé dans la Combe de Savoie, près
du confluent de l’Arc et de l’Isère, sur sa rive droite, réduit
considérablement – voire abolit totalement – cette césure et révèle
un très intéressant réseau divin.

Limetus, l’empereur et les autres : le


sanctuaire de Châteauneuf
• 103 Mermet 1993 ; Rémy 1999, part. p. 31-32 pour le site et son
occupation ; voir aussi Golosetti 201 (...)
• 104 ILN, V-2, 462 p. 155-156 (avec bibl. antérieure) ; AE, 1993,
1111 ; Golosetti 2016, fig. 117.

• 105 Mermet 1993, 127.

43Découvert en 1977, le site de Châteauneuf-les-Boissons a été


partiellement fouillé jusqu’en 1986. Ont été mis au jour un
établissement thermal, un théâtre et, en contrebas de ce dernier,
un sanctuaire composé d’un temple à deux cellae entouré d’un
péribole, qui a seul fait l’objet d’investigations complètes103. Le
sanctuaire, construit à la fin du règne d’Auguste, a connu une
intense phase de fréquentation jusqu’à l’époque flavienne qui vit
sa destruction, peut-être due à une inondation. Son titulaire
principal est connu grâce à l’inscription dédicatoire demeurée en
place, gravée sur une plaque de schiste et insérée dans le sol de
béton au centre géométrique du péribole104 : il s’agit de Limetus,
par ailleurs inconnu, que l’on a voulu expliquer comme une
divinité des confins sur la foi d’une “ressemblance
entre Limetus et limitis” ; dans ce cas, il faudrait supposer une
naturalisation d’un dieu indigène dont le nom romain tendrait à
traduire le domaine d’action, celui de protecteur de la
frontière. Le temple a été dédié à la suite d’un vœu par deux
dédicants pérégrins, dont Quartio fils d’Atepo. Or ce qui a toutes
les apparences d’un petit sanctuaire de campagne se révèle d’une
extraordinaire richesse cultuelle ; il “accueille” en effet plusieurs
autres divinités sous la forme d’ex-voto et d’offrandes dont
témoigne une série de graffiti gravés sur les enduits peints des
murs extérieurs de la cella (au nombre de 59) ou sur des tuiles
déposées en bordure sud du péribole, peut-être auprès d’une
statue ou d’un autel secondaire105 (18 au total). Tous font état
d’offrandes en nature ou, plus fréquemment encore, en espèces
et révèlent tout un réseau divin autour de Limetus, puisque
plusieurs autres divinités apparaissent comme destinataires des
ex-voto : Mercure et Maia, les “dieux et déesses” (di, diae), Rome
et l’empereur régnant, qui reçoit plusieurs dénominations (Caesar,
Imperator, Augustus).
• 106 Rémy 1999, 35.

• 107 Rémy 1999, 33 (7 graffites au total).

• 108 Mermet 1993, 112 n. 41.

44Cette configuration divine particulière a suscité plusieurs


commentaires : en premier lieu, la présence de l’empereur a été
justifiée par l’éloignement du sanctuaire civique106 qui se trouvait
à Vienne. En outre, B. Rémy propose que le dieu local Limetus ait
été “assimilé” à Mercure, notamment parce que ce dernier est
beaucoup plus fréquemment attesté dans les ex-voto107 et
surtout parce qu’il est le grand dieu des Allobroges ; l’hypothèse
se retrouve chez C. Mermet, qui établit un lien entre le domaine
d’action d’un Mercure “gardien des frontières” et l’étymologie
supposée du nom divin108 ; elle est en effet suggestive, puisque
Châteauneuf est proche de la limite de la cité, de la frontière entre
Gaule Narbonnaise et Alpes Cottiennes, et de surcroît proche du
confluent entre l’Arc et l’Isère.
• 109 Mermet 1993, n° 39 p. 130 ; AE, 1993, 1152 ; ILN, V-2, 463.

• 110 Mermet 1993, n° 1A ; AE, 1993, 1112b ; ILN, V2, 471 et


Mermet 1993, n° 14 p. 114 ; AE, 1993, 1122 (...)

• 111 Mermet 1993, 107-108 n° 2. En revanche, on ne trouve jamais


Limetus associé à Mercure, ce qui ten (...)

• 112 Rémy 1999, 34.

• 113 CIL, XIII, 1769.


45En revanche rien ne prouve que Mercure ait succédé ou se soit
substitué à Limetus dans une phase plus avancée du culte. Très
intéressantes sont les associations divines attestées par les ex-
voto, honorées par couples ou plus exactement par paires :
un Nero et Limetus109, Mercure et Maia110, Rome et Auguste et de
manière plus hypothétique, Mercure et Rome111. B. Rémy justifie
ces associations comme des “répétitions d’intensité”, destinées
pour le dévot à “mettre toutes les chances de son côté”112. En
réalité elles sont probablement moins redondantes qu’il n’y
paraît, dans la mesure où elles font émerger une nébuleuse
parfaitement cohérente qui lie étroitement, dans le quotidien des
habitants de l’agglomération ou des visiteurs de passage, la
prospérité du commerce (et plus largement de tout type
d’échange) et au pouvoir de Rome “incarnée” par l’action du
prince, le tout fortement ancré dans le territoire d’une cité qui
devait une partie de son opulence à sa situation privilégiée de
carrefour routier et fluvial ; de même à Lyon, un affranchi, M.
Herennius, a dédié, dans un temple construit à ses frais mais sur
sol public, les statues (cultuelles ?) de Mercure et Maia (signa duo)
ainsi qu’une imago (un portrait, peut-être sous forme de buste)
de l’empereur Tibère113, probablement présent en tant que
divinité “invitée”, dont l’action était absorbée en quelque sorte
dans la sphère de compétence des divinités titulaires – prospérité
de la terre et des échanges. Par ces combinaisons, c’est l’identité
du lieu de culte et de la communauté qui le fréquente qui se
construit et les “puissances divines” qui le composent se
complètent mutuellement.
• 114 Il s’agirait donc d’une abréviation de Colonia Iulia Augusta
Vienna (J. Gascou, in : AE 1993, 114 (...)

46Ainsi à Châteauneuf, de façon significative, deux tuiles portent


l’abréviation C.I.V. (pour Colonia Iulia Vienna114) qui montre que
la cité est un protagoniste à part entière de la “transaction” divine,
ou plus exactement que les visiteurs n’expriment pas seulement
leur attachement au prince, mais au système de la cité en tant que
tel, considéré comme un jalon intermédiaire essentiel.
47Ces modes d’association prouvent, s’il en était encore besoin,
l’absence de solution de continuité entre le “culte impérial”, les
grands dieux romains et les divinités locales ; contrairement à ce
qui a longtemps été affirmé, l’empereur, tout comme la déesse
Rome, font l’objet de vœux. L’idée d’une césure entre les cultes
officiels du chef-lieu et les cultes locaux du territoire doit donc
être rejetée.

Conclusion
48Les ensembles documentaires relatifs au prétendu Capitole et
aux cultes de dea Vienna, de Mars ou des diui, étude de cas d’un
grand intérêt méthodologique dans le cas de la cité de
Vienne, permettent de mesurer la contribution spécifique des
images et de leurs supports monumentaux à notre connaissance
du “paysage religieux” d’une colonie latine puis romaine au Haut-
Empire et plus spécifiquement, de cultes importants mais
relativement peu attestés dans les supports traditionnels de
l’expression religieuse. Ces dossiers illustrent un large éventail de
situations à partir d’états documentaires inégaux : alors que le
Mars viennois est un grand dieu civique largement attesté dans
l’épigraphie mais difficile à saisir dans ses valences spécifiques en
raison de l’absence d’épiclèses, dea Vienna est au contraire peu
présente dans les dédicaces mais régulièrement représentée dans
les sources iconographiques les plus variées. Dans les deux cas, la
prise en compte simultanée des textes épigraphiques et des
images divines autorise quelques relectures ou propositions :
dans le cas de Mars, le réseau iconographique perceptible autour
de la divinité pointe vers une “personnalité” étroitement liée au
Mars augustéen, à Rome et à ses origines, puisqu’il apparaît à
plusieurs reprises associé à Rhéa Silvia et/ou à Vénus. La présence
sur le territoire d’un culte à Quirinus, d’une extrême rareté en
contexte provincial, pourrait confirmer indirectement cette facette
du culte ; à Rome, le fronton du temple de Mars Ultor associait
notamment ces trois divinités à la figure du prince.
• 115 Van Andringa 2011, 219.

49L’importance de dea Vienna dans le panthéon civique se déduit


moins de l’abondance des dédicaces conservées que des usages
qui ont pu être faits de son image : les circonstances de dédicace
de l’exceptionnel simulacrum offert par les
jumeaux Coelii révèlent que la divinité, “émanation de l’existence
municipale”115 et équivalent des Génies de colonie d’autres cités,
était convoquée comme un médiateur divin de premier plan dans
la célébration de la concorde au sein des instances civiques.
50De manière assez paradoxale, on remarque dans la plupart des
études une tendance à laisser de côté les documents figurés
quand l’information épigraphique et archéologique est de bonne
qualité, et au contraire à les surinvestir (quitte à les surinterpréter)
quand elle fait défaut. Dans la reconstitution de ces réseaux
divins, l’iconographie et la statuaire méritent de constituer autre
chose qu’un palliatif auquel on recourt “faute de mieux” car elles
apportent davantage qu’une illustration ou un complément
d’information. Il ne s’agit en aucune manière de renverser la
perspective pour placer la documentation statuaire au centre de la
réflexion sur le quotidien religieux des cités, mais de lui redonner
la place qui lui revient au sein de raisonnements souvent
complexes : l’identification des divinités par le biais des attributs
ou des modèles artistiques, la présence de parèdres, la
hiérarchisation à l’œuvre dans les images, la nature des statues
offertes et le type d’espaces ou d’emplacements qu’on leur
octroyait sont autant d’éléments essentiels à sa compréhension.
Ces associations sont parfois le fruit des initiatives des dédicants
singuliers, et renseignent alors sur la personnalité et les
intentions des cultores ; mais elles peuvent aussi être révélatrices
de tendances plus structurantes, de nature à éclairer l’identité
religieuse ou les différentes potestates (modes d’action) des
divinités mises en présence.
NOTES
1 Raepsaet-Charlier 1993 ; Van Andringa 2002 ; De Cazanove &
Meniel, dir. 2012.

2 Golosetti 2016.

3 CIL, XIII, 1668 ; D. 212.

4 Golvin 2010, 36.

5 Selon l’hypothèse formulée par B. Helly : Helly 1994 ; CAG 38/3,


378-379, fig. 356.

6 Rémy 1970 ; Rémy 1992, 201.

7 Environ 900 inscriptions et 500 fragments de sculptures sur pierre.

8 Pelletier 1982. Outre le volume de la Carte Archéologique de la


Gaule (CAG 38/3), celui du Nouvel Espérandieu (NEsp I) consacré aux
sculptures sur pierre a réuni plus de 500 notices, tandis que la
collection épigraphique a fait l’objet de trois volumes des Inscriptions
Latines de Narbonnaise (ILN, V, 1 à 3) complétés par les Inscriptions
Latines de Haute Savoie (ILHS) et celles de Genève (Maier 1983) ; il faut
ajouter à ces ouvrages de référence de nombreux articles de synthèse
sur l’urbanisme de la colonie.

9 La thèse d’A. Vigier (Vigier 2011) traite plus largement des élites
allobroges. Quelques études abordent une divinité particulière : Mars
(Bertrandy 2000), Mercure (Rémy 1994) ou encore Vintius (Vigier
2009).

10 Rémy & Jospin 1998.

11 Pagus Dianensis ou Dianius.

12 Ils sont recensés commodément dans la CAG 38/3, 129-131.

13 CAG 38/3, [065], 265-270.

14 NEsp I, 144-149, n° 331 à 338, pl. 215-218 (avec bibliographie


antérieure). Certains ont été découverts en remploi à Notre-Dame
d’Outre-Gère : CAG 38/3, 418 4*, fig. 407.

15 Gascou 1997, 92-101.

16 Van Andringa 2009b.

17 Voir supra, l’introduction par Y. Berthelet et F. Van Haeperen.

18 Vienne a livré des fragments de reliefs dits “historiques”, genre


pratiquement inexistant en dehors de la capitale de l’Empire : Rosso
2004 et 2011.

19 Sur ces dernières et pour l’ensemble de la Gaule Narbonnaise, voir


Boularot 2015.

20 CIL, II, 594, titres LXX et LXXI. Sur les temples capitolins, voir Barton
1982.

21 Autel octogonal en marbre blanc dédié vers 198 p.C. pour le salut
de Septime Sévère et Caracalla ; CIL, XII, 2183 ; Espérandieu 1907,
281-282, n° 412 ; CAG 38/1, 111-112, fig. 72 p. 112 ; CAG 38/4, 84-
85, fig. 18-19 ; ILN, V-2, 320 p. 29. Cet autel est également dédié “aux
autres dieux immortels” pour le salut des membres de la dynastie
sévérienne.

22 Pelletier 1976, 61-62 ; 1988, 38.


23 Récemment identifié au niveau du cimetière Pipet (Helly 2004,
100) ; sur l’identification de ces structures, voir la discussion dans
la CAG 38/3, 378-379.

24 Toute la partie antérieure a disparu. Golosetti 2016, 307, fig. 107.

25 CAG 38/3, 379 ; fig. 356 p. 378 (salle Zc).

26 Pelletier 1976, 58-63.

27 NEsp I, 24-25, n° 53, pl. 52-53 ; CAG 38/3, 380, n° 2, fig. 359.

28 Pelletier 1976, 62.

29 R. Robert, D. Terrer, in : NEsp, I, 95, n° 211, pl. 172 ; CAG 38/3,


380 n° 3.

30 NEsp, I, 91, n° 196, pl. 168 ; CAG 38/3, 379 fig. 358.

31 NEsp, I, 101, n° 237, pl. 178 ; CAG 38/3, 380.

32 R. Robert, in : NEsp, I, p. XLVII.

33 Golosetti 2016, 307-308, 346.

34 Pelletier 1976, 62.

35 NEsp, I, 101 ; mais ces fragments pourraient tout aussi bien avoir
appartenu à d’autres statues, entièrement en calcaire.

36 Selon Hermann & Newman 2000, 298.

37 Balty 2007, 60.

38 Biard & Rosso 2017.

39 R. Robert, D. Terrer, in : NEsp, I, 91 et 95.

40 CAG 38/3, 380 : “les attributions respectives à Jupiter et Minerve


proposées par A. Pelletier (2001) ne reposent sur aucun fondement”.
41 Herman & Newman 2000, 298-300, fig. 17 p. 299 (dernier quart
du Ier s. p.C.).

42 D. Terrer, R. Lauxerois, in : NEsp, I, 24-25, n° 53, pl. 52-53.

43 Rosso 2000.

44 Josèphe, BJ, 1. 21. 7.

45 Aurigemma 1940, 44-45, fig. 25 ; Boschung 2002, p. 8 n° 1.2, pl.


2,2. 4.

46 Lauxerois et al., 1982, 403-405, fig. 12 (il s’agirait selon eux de


Minerve) ; A. Hermary, in : NEsp, I, 25-26, n° 54, pl. 54-57 (Roma ou
Minerve, IIe s. ap. p.C.) ; CAG 38/3, 451 n° 2, fig. 451, où la légende du
cliché indique une représentation de Roma, alors que le texte attribue
la statuette à Minerve.

47 Picard 1964 ; A. Hermary, in : NEsp I, 36-37, n° 72, pl. 84-85.

48 Pelletier 1976, 62-63.

49 Desbat et al., 1983, 395-399, fig. 1-5 ; le diamètre du médaillon


est de 15,5 cm. On en connaît un autre exemplaire à Cologne : Bolaños
Herrera 2016.

50 CIL, XII, 1827 = ILN, V-1, 44 : Pro salute Augustorum et u[ictoria] /


et reditu et statu ciuitatis Vi[ennensium.

51 Picard 1964, 101-123, part. p.102-104.

52 CIL, VI, 36835 = AE 1900, 5. Elle est exposée sur le Forum Romain,
à proximité de la Basilica Aemilia.

53 CIL, XII, 5864 a-b = ILS 6999 et 6999a ; De Kisch 1979, 262, n° 20-
21p. 277. Rémy 1992, 210, 217-218 n° 15-16, fig. 1 et 2 ; ILN, V-1,
72 ; CAG 38/3, 396 n° 1, fig. 379 a-b. Dimensions : 104 cm x 68 cm.
Elles ont été retaillées et leur couronnement abattu, de sorte que les
éventuelles traces de fixation des statues originelles ont disparu.
54 De Kisch 1979, 262 : “Il s’agit, pour une statue unique et pour un
versement non effectué en métal précieux, de la somme la plus
importante que nous connaissions”. Elle est dépassée par quelques
autres donations, mais pour plusieurs statues.

55 Rémy & Géroudet 2015, 56.

56 Estienne 1997, 83.

57 Lamoine 2009, 201 sqq,

58 Bertrandy 2000.

59 ILN, V-2, 547, 548 et 549.

60 Sur le flaminat de Mars, voir ILN, V-1, p. 48-49 ; Christol 2010,


364. Dans les Trois Gaules, Mars Mullo a un flamine chez
les Riedones (Bérard 2006, 26).

61 Christol 2010, 365 ; B. Helly, in : CAG 38/3, 128.

62 Notamment à deux reprises à Passy : ILN, V-2, 548 et 549 = ILHS,


80 et 81 = Bertrandy 2000, 239 n° 14 et 16. Voir également CIL, XII,
2219 = Bertrandy 2000, 238 n° 5 (Grenoble).

63 En toute logique, il devait se trouver à l’extérieur de l’enceinte


urbaine mais à proximité immédiate de la ville.

64 Vienne, Musée archéologique Saint-Pierre, inv. R 2001-5-123. GAG


38/3, 128, 305 fig. 259 ; A. Hermary, in : NEsp I, 59-61, n° 123, pl.
124-125 (avec bibliographie complète) ; voir aussi R. Robert,
in : NEsp I, p. XLIX. Dimensions : H. : 230 cm ; L. : 137,5 cm (début
du IIe siècle p.C.)

65 La présence d’une figure d’Eros parmi les fragments non jointifs du


relief confirme l’identification de Vénus (D. Terrer, in : NEsp, I, 61, n°
124, pl. 126).
66 Mars et Ilia : Bertrandy 2000, 243 type D, 244 fig. 9 ; B. Helly,
in : CAG 38/3, 128.

67 Dardenay 2012, 146-147. Je la remercie de m’avoir indiqué cette


étude.

68 NEsp I, 63-64, n° 129, pl. 128-129.

69 CIL, XII, 2201 et 2002 ; ILN, V-2, 347 et 348 (Saint-Laurent-du-


Pont, entre Vienne et Grenoble) ; CAG 38/4, 80-81, 307 fig. 283 et 284
(époque julio-claudienne).

70 Rémy in : ILN V-2, 52.

71 CIL, XII, 2580 = ILN V-3, 809 = ILHS, 57. Bertrandy 2000, 21 p.
239.

72 CIL, XII, 2589 = ILN, V-3, 823 ; Maier 1983, 97 n° 74 ; Bertrandy


2000, 239 n° 22. L’inscription est aujourd’hui perdue.

73 Rémy 1994, 180.

74 ILN V-1, 370.

75 Boularot 2015, 47.

76 CIL, XII, 2218 = ILN, V-2, 357 ; Rémy 1992, 218 n° 19 ; Bertrandy
2000, 238 n° 4 ; CAG 38/4, 189 n° 6, fig. 144.

77 CIL, XII, 2225 = ILN, V-2, 363 ; Rémy 1992, 218 n° 20 ; CAG 38/4,
189, 190 fig. 145.

78 CAG 38/3, 229, fig. 157 ; D. Terrer, in : NEsp I, 77-79, n° 149, pl.
150.

79 La hauteur conservée est de 80 cm.

80 Il s’agirait du sanctuaire situé sous l’immeuble Le Ponsard : Helly


2014, 129, n° 4.

81 Helly 2014, 130, n° 8.


82 Rémy 2003b.

83 CIL, XII, 1872 = ILN, V-1, 66.

84 Rémy 2003b, 372 n° 8.

85 Pour le seul chef-lieu de cité : Rosso 2006, 293, n° 81 (Germanicus,


14-19 p.C., perdue), 293, n° 82 (Drusus Minor, vers 23 p.C, perdue),
294, n° 83 (Tibère, 14-37 p.C.), 297-299, n° 86 et 87, fig 67 (Caligula
à deux reprises), 299, n° 88 (Caligula, 34-37 p.C.), 304, n° 92, fig. 71
(Constantin 1er, 302-324 p.C.), 305, n° 93 et 94 (empereurs
indéterminés).

86 Helly 2014, 119-120.

87 Gros 2008, 70.

88 Le Bot-Helly & Helly 2002, 124-126 ; Tardy 2009, 176-177, fig. 1.

89 Rosso 2001 ; A. Hermary, in : NEsp I, 75, n° 146, pl. 148 ; Rosso


2006, 299-301, n° 89, fig. 68.

90 Les premiers à avoir rapproché les deux effigies, conservées l’une à


Vienne et l’autre à Lyon, sont F. Salviat et D. Terrer : Salviat & Terrer
1983. Ils appartenaient à un même relief. Cf. D. Terrer, in : NEsp I, 71-
74, n° 142-143, pl. 138-145 ; Rosso 2006, 134-135, n° 84-85 et p.
294-297.

91 Rosso 2004, 166, fig. 2 a-b.

92 NEsp, I, 154-158, n° 347-358, pl. 223-226 ; Robert 2005.

93 Sauron 1991 ; Carrier 2005-2006.

94 Gros 2008, 70.

95 Sur la place et le rôle des autels impériaux dans la ville, voir Mauger
2016.
96 L’inscription proviendrait de Pipet. CIL, XII, 1904 ; ILS 3400 ; Rémy
1992, 211, 217 n° 14 ; ILN, V-1, 88 ; CAG 38/3, 347 fig. 308 ; Boularot
2015, n° 9 p. 44.

97 Chorier, 1659, 173.

98 Rémy 2003b, 372.

99 On se reportera au tableau commode fourni par Rémy 2003b, 372


n° 8.

100 CIL, XII, 2317 = ILN, V-2 458 et peut-être ILN, V-3, 858.

101 Rémy-Geroudet 2015, 63.

102 L’expression est de J. Scheid.

103 Mermet 1993 ; Rémy 1999, part. p. 31-32 pour le site et son
occupation ; voir aussi Golosetti 2016, 323-327.

104 ILN, V-2, 462 p. 155-156 (avec bibl. antérieure) ; AE, 1993, 1111 ;
Golosetti 2016, fig. 117.

105 Mermet 1993, 127.

106 Rémy 1999, 35.

107 Rémy 1999, 33 (7 graffites au total).

108 Mermet 1993, 112 n. 41.

109 Mermet 1993, n° 39 p. 130 ; AE, 1993, 1152 ; ILN, V-2, 463.

110 Mermet 1993, n° 1A ; AE, 1993, 1112b ; ILN, V2, 471 et Mermet
1993, n° 14 p. 114 ; AE, 1993, 1122 ; ILN, V-2, 472. Je remercie F. Van
Haeperen qui m’a communiqué une étude encore inédite sur la déesse
Maia.

111 Mermet 1993, 107-108 n° 2. En revanche, on ne trouve jamais


Limetus associé à Mercure, ce qui tendrait à renforcer l’hypothèse de
B. Rémy.
112 Rémy 1999, 34.

113 CIL, XIII, 1769.

114 Il s’agirait donc d’une abréviation de Colonia Iulia Augusta


Vienna (J. Gascou, in : AE 1993, 1148 et 1155).

115 Van Andringa 2011, 219.

TABLE DES ILLUSTRATIONS

Titre Fig. 1. Carte du territoire de la cité de Vienne au Haut-Empire


(d’après Vigier 2009, 121).

URL http://books.openedition.org/ausonius/docannexe/image/16259/img-1.jpg

Fichier image/jpeg, 164k

Titre Fig. 2. Plan simplifié de Vienne antique.

URL http://books.openedition.org/ausonius/docannexe/image/16259/img-2.jpg

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Titre Fig. 3. Sanctuaire de Sainte-Blandine – tête féminine colossale au


moment de sa découverte (d’après Pelletier 1988, planche II, fig. 3).

URL http://books.openedition.org/ausonius/docannexe/image/16259/img-3.jpg

Fichier image/jpeg, 566k


Titre Fig. 4. Vienne, Musée lapidaire Saint-Pierre : tête féminine en marbre
(clichés E. Rosso).

URL http://books.openedition.org/ausonius/docannexe/image/16259/img-4.jpg

Fichier image/jpeg, 183k

Titre Fig. 5. Vienne, Musée lapidaire Saint-Pierre : avant-bras droit


colossal en marbre (cliché E. Rosso).

URL http://books.openedition.org/ausonius/docannexe/image/16259/img-5.jpg

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Titre Fig. 6. Vienne, Musée lapidaire Saint-Pierre : jambe droite et pied


chaussé colossaux, en marbre (cliché Centre Camille Jullian -CNRS).

URL http://books.openedition.org/ausonius/docannexe/image/16259/img-6.jpg

Fichier image/jpeg, 260k

Titre Fig. 7a –Vienne, Musée lapidaire Saint-Pierre : tête féminine en


marbre : détails (clichés E. Rosso).

URL http://books.openedition.org/ausonius/docannexe/image/16259/img-7.jpg

Fichier image/jpeg, 228k

Titre Fig. 7b –Vienne, Musée lapidaire Saint-Pierre : tête féminine en


marbre : détails (clichés E. Rosso).

URL http://books.openedition.org/ausonius/docannexe/image/16259/img-8.jpg

Fichier image/jpeg, 483k

Titre Fig. 8 a. Vienne, Musée lapidaire Saint-Pierre : tête d’une statuette de


divinité féminine (cliché Centre Camille Jullian).

URL http://books.openedition.org/ausonius/docannexe/image/16259/img-9.jpg

Fichier image/jpeg, 293k

Titre Fig. 8 b. Vienne, Musée lapidaire Saint-Pierre : tête d’une statuette de


divinité féminine (cliché Centre Camille Jullian).

URL http://books.openedition.org/ausonius/docannexe/image/16259/img-10.jpg

Fichier image/jpeg, 327k

Titre Fig. 9. Statue de Fortuna/Tychè, appelée « Tutela de Vienne » (cliché


Centre Camille Jullian).

URL http://books.openedition.org/ausonius/docannexe/image/16259/img-11.jpg

Fichier image/jpeg, 136k

Titre Fig. 10a. Vase à médaillon d’applique du « triomphe de Vienne »,


vase et dessin du médaillon d’après Desbat et al. 1983, fig. 3.
URL http://books.openedition.org/ausonius/docannexe/image/16259/img-12.jpg

Fichier image/jpeg, 249k

Titre Fig. 10b. Vase à médaillon d’applique du « triomphe de Vienne »,


vase et dessin du médaillon d’après Desbat et al. 1983, fig. 3.

URL http://books.openedition.org/ausonius/docannexe/image/16259/img-13.jpg

Fichier image/jpeg, 137k

Titre Fig. 11. Vienna et le genius de Lyon sur un médaillon d’applique :


dessin d’après Wuilleumier & Audin 1952, n° 97.

URL http://books.openedition.org/ausonius/docannexe/image/16259/img-14.jpg

Fichier image/jpeg, 335k

Titre Fig. 12. Vienne, Musée lapidaire Saint-Pierre : relief mythologique


monumental (cliché Centre Camille Jullian).

URL http://books.openedition.org/ausonius/docannexe/image/16259/img-15.jpg

Fichier image/jpeg, 327k

Titre Fig. 13. Médaillon d’applique : Mars et Rhéa Silvia (d’après


Bertrandy 2000, fig. 9).

URL http://books.openedition.org/ausonius/docannexe/image/16259/img-16.jpg
Fichier image/jpeg, 256k

Titre Fig. 14. Vienne, Musée lapidaire Saint-Pierre : tête masculine


colossale (Mars ?) (cliché Centre Camille Jullian – CNRS).

URL http://books.openedition.org/ausonius/docannexe/image/16259/img-17.jpg

Fichier image/jpeg, 263k

AUTEUR
Emmanuelle Rosso

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