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La Réticulo Péritonite Traumatique (RPT) des bovins

1. Définition
La réticulo-péritonite traumatique est une maladie commune des
grands ruminants. C’est la cause la plus fréquente de douleur
abdominale crâniale chez les bovins.
Affection qui intéresse le réseau (ou bonnet) souvent à cause
d’un objet métallique tranchant, ingéré accidentellement lors de la prise
alimentaire, et qui aboutit à la perforation du péritoine. (Les animaux les
plus touchés sont les vaches laitières après le part.)
Les répercussions économiques sont toujours conséquentes,
qu’elles soient occultes ou évidentes, en raison de la clinique induite :
chute de productions (lait, viande, GMQ), amaigrissement et
conséquences associées (infertilité, cétose…), risques de saisies à
l’abattoir. Un diagnostic précis de cette affection est donc nécessaire
afin d’en limiter les pertes associées.
2. Étiologie
Les particules métalliques sont fréquentes dans le milieu de vie des
bovins. Que ce soit en raison d’ensilages maintenus fermés par des
vieux pneus ou jantes de pneus, de clôtures récemment refaites, de fils
de fer barbelés rouillant dans les champs, de travaux dans les bâtiments
d’élevage…les bovins ingèrent régulièrement des corps étrangers
métalliques.
Il s’agit le plus souvent d’un corps étranger qui possède les particularités
suivantes :
1. dense pour rester au fond du réseau
2. acéré à une extrémité (s’il l’est des deux côtés, il perfore et
traverse complètement la paroi du réseau)
3. long (5 à 10 cm) pour passer à travers le péritoine
Les bovins sont bien plus exposés aux RPT que les petits ruminants :
1. ils mastiquent peu et réalisent une préhension non sélective
de la nourriture, avec la langue et pas les lèvres (qui sont très
sensibles et permettent donc la détection immédiate des
corps étrangers, comme c’est le cas chez les petits
Ruminants).
2. La majorité des cas les corps étrangers sont métalliques.
(clous, fils de fer, fils de pneus………….)
Les facteurs qui favorisent l’implantation du corps étranger sont :
1. La gestation : le volume pris par le veau comprime les organes et
fait pression sur l’objet métallique, qui est poussé contre la paroi du
réseau
2. Après le part : quand l’animal a fait de nombreux efforts de
contraction
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3. Pendant le transport : nombreuses bousculades
4. En cas de marche forcée (montagne lors de la transhumance) :
les viscères postérieurs sont comprimés par les antérieurs lors du
mouvement
5. La nature physique du régime alimentaire : foins grossiers ;
pâturage au voisinage de décharge de détritus
Autres causes pré disposantes :
1. La position déclive (basse) du réseau (effet de la gravité)
2. La structure alvéolée du réseau, qui piège les corps étrangers
3. Les fortes contractions biphasiques (très puissantes) du réseau,
qui ont lieu toutes les 55 secondes : la lumière disparait totalement
ce qui facilite la perforation de la paroi réticulaire. Cette dernière ce
fait souvent vers le bas et à gauche. C’est là où se trouve le cœur,
ce qui a pour conséquence d’entraîner fréquemment des
Péricardites.
3. Étude clinique
Les puissantes contractions réticulaires permettent au corps
étranger tombé dans le reticulum de pénétrer la paroi du réseau, puis
d’atteindre les organes situés à proximité. Les signes cliniques d’une
réticulo-péritonite traumatique seront alors d’expression et de sévérité
variées, en fonction du nombre d’organes affectés lors du trajet du corps
étranger : diaphragme, foie, rate, poumons, péricarde, cœur…et de
l’étendue de la péritonite associée. Parfois des vaches comportant
plusieurs corps étrangers métalliques peuvent ne présenter aucun signe
clinique, ou des signes cliniques modérés. D’autre part, les signes
cliniques sont plus marqués en raison des lésions induites par le
passage d’un seul corps étranger. Le caractère aiguë ou chronique
jouera également. Une mort subite peut survenir si le corps étranger
lacère l’artère coronaire ou perfore le cœur
3.1. Symptômes :
3.1.1. Forme classique
- Les symptômes surviennent brutalement
- hyperthermie (entre 39,5 et 40°C), une anorexie brutale, une chute
de la production laitière de 30-50%, des signes de douleur
(position antalgique : dos voussé, faciès crispé, abduction des
coudes et tremblement des anconés).
- L’évolution après quelques jours peut être asymptomatique. ce qui
rend le diagnostic plus compliqué.
- L’animal peut aussi refuser de se déplacer.
- Les signes digestifs : atonie du rumen (pas de contraction) ou
hypomotilité (peu de contractions, la norme étant 8 à 10
contractions régulières toutes les 10mn - à écouter au
stéthoscope).

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- Un tympanisme modéré (météorisation intermittente, distension du
flanc à gauche) ; constipation, émission de fèces faible.
- Mise en évidence : on effectue différents tests pour lesquels le
bovin manifestera des plaintes ou rebuffades s’il souffre de RPT :
o Epreuve du bâton : le vétérinaire se place à la tête de
l’animal, 2 aides soulèvent un bâton contre la région
xiphoïdienne et au signal du vétérinaire, relâchent le bâton.
La « retombée » des viscères provoque une douleur en cas
de RPT
o Epreuve du Garrot : on pince la zone du garrot où les poils
changent d’orientation. En temps « normal », la vache se
cambre, ce qui abaisse donc ses viscères abdominaux.
o Epreuve du plan incliné
3.1.2 Formes atypiques
- Formes hyperesthésiques (causées par des aiguilles qui traversent le
corps)
- Formes convulsives (lorsque l’objet touche un nerf)
- Formes frustes
- Formes pseudo-paraplégiques
3.1.3 Forme chronique
L’animal en souffrant est décrit par l’éleveur comme « une vache
qui bricole » : elle maigrit un peu, mange de façon aléatoire, sa
température est normale, son poil terne, et elle alterne diarrhées et
constipation, et surtout ne montre pas de signe de douleur.
3.2. Diagnostic
Il est difficile, et doit toujours être précoce pour éviter les complications.
Les symptômes d’appel sont :
- Pour la Forme Chronique : un appétit capricieux, une rumination
lente, irrégulière, un état général qui se dégrade et une douleur réticulo-
diaphragmatique de faible intensité.
- Pour la Forme aigüe : Chute de la production laitière brutale, anorexie,
arrêt du transit digestif et légère fièvre associée à une douleur spontanée
ou provoquée
Les techniques les plus employées sont :
3.2.1. Mise en évidence du corps étranger
- Détecteur électromagnétique : A surtout un effet psychologique sur
l’éleveur, car on peut faire des erreurs par défaut (ne détecte pas les
objets non métalliques susceptibles de blesser quand même l’animal, ou
ceux trop profonds) et par excès (l’objet peut se situer ailleurs que dans
le réseau, ou bien y être mais ne pas causer le problème s’il s’agit d’un
bolus ou d’un aimant).

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- Laparoscopie et laparotomie exploratrices : On ouvre le flanc et on
regarde les dégâts causés par le corps étranger (fibrine, adhérences…).
- Numération Formule (NF) leucocytaire. (à l’excetion des vaches
souffrant de RPT chronique peuvent avoir une NF normale. Cet examen
permet juste de qualifier le type de réponse inflammatoire (Aiguë /
Chronique)
- L’augmentation des Protéines Totales Plasmatiques (> 90 g / mL)
signe une RPT
- L’augmentation du Taux de Fibrinogène Sanguin également (> 10 g /
L, la normale étant de 3-7 g / L)
3.2. 2. Méthodes plus spécifiques :
- Laparotomie exploratrice.
- Échographie (attention, elle ne sert qu’à visualiser les
CONSEQUENCES, donc les lésions, causées par le corps étranger et
non pas le CE !!!). L’examen se fait avec une sonde 2,5 - 3,5 MHz, le
bovin est debout et on se place à 6-7 espaces intercostaux, à gauche et
à droite du sternum. On évalue alors les organes adjacents au réseau, le
contour de ce dernier, la motilité des pré- estomacs… Afin de repérer
des abcès, adhérences, fibrine, liquide périréticulaire.

4. Evolution et pronostic
Le pronostic dépend de l’endroit où a migré le corps étranger, des
lésions qu’il a engendrées et de la capacité de rémission de l’animal. Les
lésions inflammatoires induites lors de réticulo-péritonite traumatique
peuvent se résorber de façon remarquable. Des lésions trop étendues
ou trop profondes auront cependant peu de chance de guérir et
aboutiront à une fibrose de la paroi réticulo-ruminale crâniale,
empêchant une motilité correcte du reticulum. L’animal atteint devient
alors très vite une non-valeur économique. En pratique, en cas de non
réponse au traitement médicamenteux de première intention, il convient
d’envisager une ruminotomie, une euthanasie ou un abattage.
a. Favorable vers la guérison, si le corps étranger retourne
dans la lumière du réseau, ou bien s’il se casse. Le
phénomène inflammatoire est alors limité, et il y a stérilisation
par enkystement du foyer infectieux, à l’intérieur d’un amas
de fibrine, car les bovins ont une aptitude à circonscrire une
infection, de plus, les Bovins ont une grande résistance à la
douleur (cela dépends de l’état général de l’animal, sa
robustesse).
b. Péritonite chronique localisée : l’inflammation est limitée
mais des abcès froids ainsi que des adhérences viscéro-
pariétales se forment. L’animal souffre et l’activité digestive

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est diminuée. Et comme conséquence I’atteinte du nerf
vague.
c. Péritonite aiguë généralisée : souvent la mort survient
brutalement si on n’agit pas très vite. (cas atypique de
mortalité d’étable)
d. Péricardite aiguë : très fréquente lorsque l’objet traverse le
péricarde, et qui conduit à l’accumulation de pus.
e. Atteinte d’autres organes comme le foie, la rate, les reins :
la perforation permet aux agents pathogènes de se
disperser, jus de rumen sort du rumen, il peut alors y avoir
des abcès sur d’autres organes.
.
6. Traitement
Les bovins qui reçoivent un traitement sont ceux dont les répercussions
cliniques ont été détectées par l’éleveur, qui ne présentent pas un
tableau clinique trop grave et dont la valeur justifie l’emploi d’une
thérapeutique médicamenteuse ou chirurgicale.
6.1. Traitement médicamenteux
Il concerne les bovins comportant des lésions fibrino-
suppuratives autour du reticulum, de l’atrium du rumen ou entre le
réticulum et la rate. On administre alors des antibiotiques 5 à 8
jours, additionnés d’insufflation d’oxygène dans la cavité
péritonéale (combattre anaérobiose). En l’absence de réponse
après 3 jours de traitement, une laparotomie exploratrice peut être
réalisée, avec si nécessaire une ruminotomie.
6.2. Traitement chirurgical et médicamenteux
Les abcès de plus de 7-10 cm de diamètre peuvent être drainés.
Idéalement cela se fait par voie transcutanée, sous guidage
échographique. Cette procédure peut être réalisée sur les abcès
adjacents à la paroi abdominale. Les abcès situés entre le reticulum et la
rate peuvent seulement être drainés à travers la paroi réticulaire. Les
abcès situés entre le reticulum et le foie ou entre le reticulum et
l’omasum se drainent préférentiellement via la paroi thoracique droite
lorsqu’ils sont accolés à la paroi abdominale. Dans le cas contraire le
drainage s’effectue à travers la paroi réticulaire.
6.3. Limites du traitement
Chez les patients comportant des lésions fibrineuses et abcédées
très étendues ou ayant déjà évoluées vers de la fibrose, les antibiotiques
et la chirurgie n’ont pas d’effet bénéfique. Ces animaux devraient être
abattus ou euthanasiés

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7. Prévention
L’élimination des sources de corps étrangers ferromagnétiques
traumatiques est une première étape, dont la mise en pratique n’est pas
toujours évidente. Cela peut être permis par l’installation de larges
aimants dans les mélangeuses et sur les tapis d’alimentation, la
suppression des pneus et jantes de pneu sur les ensilages, et une
vigilance accrue de l’éleveur lors des ses divers travaux de clôture ou de
bâtiment. De plus l’administration d’un aimant dans les pré-estomacs de
tous les bovins âgés de 6 à 8 mois permet de capter la majorité des
corps étrangers ferromagnétiques avant qu’ils n’aillent se ficher dans les
parois stomacales. Il est toujours préférable d’administrer un aimant à
titre préventif plutôt que curatif. Sur le terrain il convient de vérifier à
l’aide d’une boussole la présence d’un aimant dans les pré-estomacs
des ruminants et d’en administrer le cas échéant. Les aimants encagés
offrent plus de sécurité car ils neutralisent l’action traumatique des corps
étrangers qui s’y accolent. Éviter d’administrer plusieurs aimants à la fois

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Les syndromes de HOFLUND

1. Définition
Il s’agit d’une complication des RPT (évolution chronique). Ce
sont des vaches qui météorisent souvent. Le terme de « syndrome »
est utilisé pour qualifier une origine mal connue de ces indigestions
chroniques des bovins adultes. On la désigne aussi sous l’appellation
d’ « Indigestions Vagales » ou « Vagus ». ce phénomène a été
observé dans les années 1940, par Sven HOFLUNG qui soulève
l’hypothèse que ces météorisations sont dues à une atteinte de la
composante motrice du nerf vague.
En pratique, on définit ce syndrome selon la portion impliquée par
une classification fonctionnelle. Elle comprend :
- L’arrêt ou le ralentissement du transit dans l’ORO ; orifice réticulo-
omasal (dit « sténose antérieure »)
- L’arrêt ou le ralentissement du transit dans l’orifice pylorique (dit : «
sténose postérieure »)
2. Arrêt ou ralentissement du transit dans l’orifice réticulo omasal
2.1. Signes cliniques
- L’animal est amaigri, indolent et légèrement déshydraté. Sa
température est normale, mais son appétit diminué, alors que la soif est
augmentée.
- On observe une bradycardie (diminution de la fréquence cardiaque) et
une tachy-cardie en phase terminale du syndrome.
- L’évolution est souvent mortelle à la suite d’échecs thérapeutiques.
- Examen de l’appareil digestif :
Les périodes de rumination sont diminuées voire absentes. En
observant l’animal par l’arrière, on constate : Une distension progressive
du flanc gauche, ainsi qu’une distension progressive du flanc droit (partie
inférieure), le rumen est dit « en L » (sac ventral distendu) ; La palpation
- pression du flanc gauche fait entendre des bruits de flots : contenu
liquide abondant, sans stratification. L’émission de matières fécales est
diminuée, et elles sont toujours sèches et fermes.
2.2. Etiologie
Cet arrêt du transit dans l’ORO peut être causé par :
- Une insuffisance fonctionnelle du sphincter par lésions obstructives
(tumeurs, corps étrangers, processus infectieux) ou lésions
compressives (tumeurs, abcès) ou encore par déformation du sphincter
et création d’adhérence entre le réseau et le diaphragme (RPT).
- Une faillite des mouvements de propulsion du réticulo-rumen
causée par des lésions proches du nerf vague (abcès du pharynx,
péritonite…) ou par l’étirement du vague (consécutif à une torsion de
caillette par exemple).
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2.3. Diagnostic différentiel
Avec les météorisations gazeuses et spumeuses (= mousseuses), et des
péritonites et RP chroniques.
2.4. Traitement
- Drainage des abcès
- Fistule du rumen
- Chercher et supprimer la cause de la sténose
- Vidange du réticulo-rumen par ruminotomie : 20-30L d’eau tiède salée
et du jus de rumen d’une autre vache.
3. Arrêt ou ralentissement du transit dans l’orifice pylorique
3.1. Aspects cliniques
Elle touche souvent les vaches en fin de gestation. L’animal présente
les mêmes symptômes que précédemment, avec une déshydratation
plus ou moins intense, et surtout une hypoglycémie, une hypochlorémie
et une alcalose métabolique.
- Examen de l’appareil digestif
L’appétit est diminué, tout comme la rumination. On observe un
gonflement de la caillette, du feuillet et du rumen profil « pomme-poire
». Les fèces sont pâteuses, huileuses, et très finement digérées. Le
liquide ruminal est de couleur grisâtre, signe d’acidose chlorhydrique
provoquée par un vomissement interne (tout le contenu de la caillette,
bloqué dans son transit normal, retourne dans le rumen). Ce choc de pH
est très dangereux pour la flore ruminale (à ph < 4 dans le rumen, la
vache est déjà morte !). L’examen sanguin confirme l’alcalose par un
taux de bicarbonates > 27 mmol. L’animal est en acidurie.
3.2. Etiologie
L’arrêt du transit pylorique peut être dû à :
- l’obstruction du pylore par un corps étranger
- une augmentation de la viscosité du contenu de l’estomac
- des lésions vagales
- des péritonites
- la présence d’un gros foetus qui comprime le pylore, auquel cas les
symptômes s’arrêtent après la mise bas
3.3. Diagnostic différentiel
Un déplacement à gauche de la caillette peut aussi être en cause. On
doit considérer les troubles du transit pylorique comme des
complications possibles de nombreuses affections digestives et extra-
digestives.
3.4. Traitement
- Rétablissement de l’équilibre hydro-électrique avec du Ringer ou soluté
physiologique (30 à 40L/jr)
- Laparotomie et ruminotomie
- Vidange de la caillette (sels de magnésium, huiles minérales)

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