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Ostéites des os de la face


J.-M. Maes, G. Raoul, M. Omezzine, J. Ferri

Les affections inflammatoires des os de la face sont d’origines diverses, souvent infectieuses (dentaire
surtout, traumatique, tumorale, radiothérapique, etc.), mais parfois apparemment primitives
(ostéomyélite chronique primitive), survenant dans ce cas soit isolément, soit dans le cadre d’affections
plurifocales. Enfin, récemment ont été mises en évidence des ostéomyélites survenant sous traitement par
biphosphonates, selon un mécanisme inconnu. Le signe clinique majeur est la douleur, avec fréquemment
tuméfaction locale, trismus, halitose, et hypoesthésie labiomentonnière dans les formes chroniques
mandibulaires. Un bilan minutieux doit poser le diagnostic et éviter les erreurs thérapeutiques. Les aspects
habituels en imagerie (radiographie conventionnelle, scanner, imagerie par résonance magnétique
[IRM]) sont l’ostéolyse, l’ostéogenèse périostée, des séquestres et, dans les formes chroniques primitives,
une sclérose. La scintigraphie révèle très précocement la maladie, mais manque de spécificité pour la
localisation précise des lésions. Hémogramme, vitesse de sédimentation (VS) et protéine C réactive (CRP)
sont variables, mais sont très utiles dans la surveillance. Les résultats des études bactériologiques sont très
variés, et doivent être analysés avec circonspection. La biopsie est souvent indispensable au diagnostic.
L’évolution infectieuse spontanée peut se faire précocement vers l’extension locale, régionale ou générale.
Secondairement, une fracture pathologique, un retard de consolidation ou le passage à la chronicité sont
possibles. Enfin, l’évolution tardive peut être marquée par une pseudarthrose, une dégénérescence
néoplasique, des récidives ou des séquelles (perte de substance, troubles fonctionnels par rétraction
musculaire masticatrice ou ankylose temporomandibulaire, déformations esthétiques avec atrophie ou
hypertrophie faciale). Le traitement dans les formes infectieuses associe antibiothérapie, à utiliser avec
discernement, oxygénothérapie hyperbare pour certains et, si nécessaire, traitement chirurgical de la
cause et de l’infection (décortication, résection interruptrice). Les formes chroniques répondant mal à ces
traitements, il est suggéré l’emploi de biphosphonates ou de macrolides à 14 ou 15 atomes de carbone. Il
n’y a pas encore de recommandations concernant les ostéites sous biphosphonates. L’hygiène buccale est
la meilleure prévention.
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Mots clés : Ostéite ; Ostéomyélite ; Maxillaire ; Mandibule ; Infection ; Biphosphonates

Plan ¶ Biologie 6
¶ Microbiologie 6
¶ Introduction 2 Technique 6
¶ Définition 2 Résultats 7
¶ Rappel anatomique 2 ¶ Anatomopathologie 7
Mandibule 2 Formes aiguës 7
Massif facial 2 Ostéites chroniques 7
¶ Épidémiologie 2 ¶ Évolution 7
¶ Physiopathologie 2 Guérison 7
Ostéites (suppurées) 2 Complications 7
Ostéites primitives (non suppurées, « sèches ») 3 Séquelles 8
Ostéites sous biphosphonates 3 ¶ Formes cliniques 9
¶ Étude clinique 3 Ostéite hyperostosante de Garré (périostite) 9
Signes cliniques 3 Formes chroniques primitives 9
Formes avec localisations extrafaciales 10
¶ Imagerie 5
Ostéites sous biphosphonates 10
Imagerie photonique : radiologie conventionnelle et scanner 5
Formes rares 11
Imagerie par résonance magnétique 5
Scintigraphie 6 ¶ Diagnostic 12
Fistulographie 6 Diagnostic positif 12
Résumé de l’imagerie 6 Diagnostic différentiel 12

Stomatologie 1
22-062-D-10 ¶ Ostéites des os de la face

¶ Traitement 12 La vascularisation, assurée par des réseaux artériels largement


Méthodes 12 anastomosés et la présence importante de muqueuses, est riche,
Indications thérapeutiques 14 expliquant la moindre fréquence des ostéites maxillaires par
Protocole de Topazian 15 rapport à la mandibule.
Prévention 15 Ces deux structures osseuses sont situées à proximité de
cavités septiques (cavité buccale, cavité sinusienne) et sont donc
¶ Conclusion 15
soumises à des agressions bactériennes fréquentes, mais sont
protégées par des systèmes (muqueuses, salive) qui limitent la
contamination. De plus, elles sont beaucoup plus résistantes aux
■ Introduction infections que le reste du squelette.

Les ostéites des os de la face se présentent sous des aspects


variables : ■ Épidémiologie
• des formes localisées, secondaires à une cause locale, rencon-
Les ostéites infectieuses sont souvent d’origine dentaire, et
trées en pratique quotidienne, et qui répondent habituelle-
sont le fait de patients négligents ou désocialisés. Les fractures
ment au traitement local avec antibiothérapie ;
sont également souvent en cause. Elles touchent une population
• des formes rares diffuses, surtout mandibulaires, souvent
principalement masculine.
d’origine générale ou inexpliquée, entraînant des délabre-
Les études, rares, sur les ostéites non infectieuses, portent sur
ments osseux importants, posant des problèmes diagnostiques
des séries restreintes. L’atteinte paraît plus fréquemment
délicats, et ne répondant parfois pas au traitement ;
intéresser des sujets féminins. [9] L’âge des patients est variable,
• enfin, la littérature récente fait état de la survenue d’ostéites
avec un pic avant 20 ans, [10] et un autre après 50 ans. [11]
sous biphosphonates [1-4], lesquels sont par ailleurs préconisés
par certains auteurs comme traitement des autres ostéomyé-
lites diffuses. [5-8]
■ Physiopathologie
■ Définition Les ostéites varient cliniquement selon la localisation, la
durée, la présence de suppuration, et la cause.
Les ostéites représentent une affection inflammatoire du tissu
osseux. Leur aspect clinique varie selon la localisation (corticale Ostéites (suppurées)
[ostéite], médullaire [ostéomyélite], périosté [périostite], tissus
Dans les formes suppurées, les bactéries, ainsi que les leuco-
mous, diffuse), la présence ou non de suppuration, la durée
cytes eux-mêmes, agissent par production de facteurs inflam-
(aiguë ou chronique) et la cause.
matoires variés. [12, 13] Les bactéries présentent des récepteurs
Dans la majorité des cas, elles sont liées à une cause locale
protéiques ou glycoprotéiques d’adhésion aux protéines de la
bien identifiée (dentoalvéolaire, traumatique, tumorale, etc.). Au
matrice extracellulaire, et des exopolysaccharides (slime ou
contraire, certaines ostéomyélites chroniques ne font pas la
glycocalyx) réduisant l’action des cellules immunitaires,
preuve de leur étiologie, la cause bactérienne étant très discutée.
l’ensemble constituant un biofilm, adhérant à l’os et agissant
Elles sont en nette régression depuis quelques décennies,
comme une barrière à la diffusion des agents antibactériens et
grâce aux progrès de l’hygiène buccodentaire, de l’accès aux
des nutriments, avec prolifération parfois pluribactérienne. Plus
soins et de l’antibiothérapie, mais persistent néanmoins en
le biofilm est ancien, moins il est accessible aux antibiotiques.
raison de certains comportements (excès de boissons sucrées,
L’ostéite est donc une urgence thérapeutique.
négligence, etc.) ou de terrain fragilisé.
Par ailleurs, l’œdème avec compression vasculaire dans l’os,
Si le diagnostic est en général facile dans les ostéites d’origine
qui ne peut se dilater, entraîne une thrombose avec zones de
infectieuse, les ostéomyélites chroniques posent des problèmes
nécrose que ne peuvent atteindre les cellules immunitaires et les
bien plus délicats.
antibiotiques.
Le traitement des formes infectieuses repose sur la correction
de la cause et l’antibiothérapie. Au contraire, certaines ostéites
Origine infectieuse
chroniques sont rebelles à tout traitement antibiotique, chirur-
gical et à l’oxygénothérapie hyperbare. Cause locale ou régionale
Organe dentaire. C’est la cause la plus fréquente (pulpite,
■ Rappel anatomique granulome ou kyste périapical, parodontopathie).
Traumatismes maxillofaciaux. Ils représentent également
une cause fréquente. Il s’agit le plus souvent de fractures,
Mandibule l’infection étant favorisée par la proximité de la cavité buccale,
La mandibule est un os corticospongieux. L’os spongieux est des délabrements muqueux et/ou cutanés avec dévascularisation
prédominant au niveau du corpus, cet os spongieux se raréfie périostée, la présence de corps étrangers septiques (gravillons,
vers la région articulaire. etc.), ou des défauts de réduction de l’articulé dentaire
La vascularisation artérielle repose sur un réseau principal Tumeurs. Elles sont bénignes ou malignes, l’infection peut
central d’une part (artère alvéolaire inférieure), et un réseau être révélatrice.
périosté, les anastomoses étant de faible débit. Origine iatrogène. Elle est la conséquence d’un geste théra-
La branche montante est située à distance des structures peutique (extraction dentaire, notamment de dent incluse,
dentaires. En région symphysaire, le réseau périosté est relative- chirurgie des maxillaires traumatologique, orthopédique,
ment développé. C’est donc la branche horizontale, ayant la tumorale, réparatrice, implantaire, etc.), surtout en cas de mise
vascularisation la plus précaire par prédominance du réseau en place d’un corps étranger (plaque d’ostéosynthèse, implant,
central, exposé directement aux thromboses infectieuses, qui est etc.). L’infection peut débuter 48 h après l’intervention, mais
la plus atteinte par les nécroses. parfois beaucoup plus tardivement.
Autres causes. Elles sont plus rares : sinusienne (sinusite
chronique), salivaire, ou cutanée.
Massif facial
Il s’agit d’une structure osseuse composée de 13 os, appendue Cause générale
à la base du crâne. La structure osseuse est différente de la L’infection propagée à la mandibule par voie hématogène est
mandibule, l’os étant fin, comportant très peu de structures exceptionnelle. C’est beaucoup plus souvent le phénomène
spongieuses, lesquelles sont situées au niveau de l’os alvéolaire, inverse qui se produit. Les ostéomyélites hématogènes touchent
et des os zygomatiques. surtout les enfants ou les personnes âgées, elles ont une origine

2 Stomatologie
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souvent cutanée (furoncle, anthrax, etc.) ou oto-rhino- A posteriori, nous avons retrouvé plusieurs patients suivis
laryngologique (ORL) (angine), le germe en cause étant habi- dans le service pour ostéomyélites maxillaires et mandibulaires,
tuellement un staphylocoque doré. y compris chez des édentés, sans cause infectieuse, la majeure
partie d’entre eux étant sous biphosphonates.
Autres ostéites secondaires Cette pathologie pourrait être en rapport avec l’effet inhibi-
Elles sont exceptionnelles (mycoses, produits chimiques). teur des ostéoclastes qui caractérise les biphosphonates, ralen-
tissant le phénomène d’apposition-résorption osseuse, ainsi
Facteurs favorisants
qu’avec un effet inhibiteur de l’angiogenèse de certaines
Ils seront toujours à rechercher (diabète, corticothérapie, molécules de ce groupe (zolédronate). Ruggiero [1] et Marx [2]
immunosuppresseurs, tabac, malnutrition, virus de l’immuno- impliquent cette molécule, ainsi que le pamidronate, et
déficience humaine [VIH], maladie du collagène, vascularite excluent les autres biphosphonates. [2] Le rôle du terrain et de
radique, ostéopathies, ...). [14] la pathologie sous-jacente n’est pas précisé, de même que celui
d’une extraction dentaire souvent réalisée aveuglément, et qui
Ostéites primitives conduit à une dénudation osseuse non contrôlable.
(non suppurées, « sèches ») Enfin, un dernier élément déroutant est que les biphospho-
nates ont été utilisés avec un certain succès comme traitement
Le terme d’ostéite scléreuse chronique a été introduit par des ostéomyélites primitives. [5-8]
Shafer en 1957. [15] L’évolution de ces ostéites chroniques est souvent péjorative,
Ce sont des affections rares, méconnues, d’étiologie mal du fait de la résistance aux traitements classiques (antibiothéra-
précisée, de diagnostic difficile, à l’origine de traitements pie, décortication, hyperbarie).
inappropriés, dont la prise en charge est souvent décevante. Au total, les réflexions concernant les ostéites chroniques
Elles sont marquées par une sclérose osseuse. Elles touchent apportent plus de questions que de réponses, et des études plus
principalement la mandibule, du fait vraisemblablement d’une poussées seront nécessaires. Par ailleurs, il apparaît que la prise
vascularisation plus précaire qu’au maxillaire. en charge des ostéites des os de la face nécessite une étroite
L’origine infectieuse à bas bruit, [16] sur des constatations collaboration multidisciplinaire entre praticiens spécialistes de
bactériologiques, est contestée, certains des germes mis en ces os, de l’imagerie, de l’infectiologie, de la microbiologie, de
évidence étant saprophytes de la cavité buccale, et non patho- l’anatomopathologie, etc.
gènes. Par ailleurs, les traitements classiques antibiotiques
locaux ou généraux, les interventions chirurgicales (décortica-
tion), et l’oxygénothérapie hyperbare sont peu efficaces. Seuls ■ Étude clinique
les anti-inflammatoires non stéroïdiens semblent avoir une
certaine action sur le déroulement de la maladie. En outre, Suei Signes cliniques
et al. [17] ont rapporté qu’un greffon osseux non vascularisé,
après résection mandibulaire unilatérale, était viable, malgré sa Le maître symptôme est la douleur, souvent très vive, locali-
contiguïté avec la mandibule résiduelle ostéitique. Enfin, sée ou irradiée, continue ou à renforcements paroxystiques,
nombre de ces ostéites diffuses chroniques surviennent chez des parfois insomniante, majorée au contact. Elle gêne
patients édentés. l’alimentation.
Par conséquent, plusieurs autres hypothèses ont été émises : Un autre signe essentiel est la tuméfaction œdémateuse
altération de l’immunité locale, [18-20] origine périostée, [21] parfois érythémateuse, à proximité du site de l’inflammation.
origine génétique, [11, 22] parafonctions, [18, 23] par analogie avec D’autres signes sont fréquents, tels le trismus en cas d’atteinte
la panbronchiolite diffuse réfractaire, suspectent la présence osseuse postérieure, l’halitose et la mobilité d’un groupe
d’un biofilm qui rend inopérants les antibiotiques et les dentaire. Il peut apparaître une dénudation osseuse. L’hypo-
défenses immunitaires. Les macrolides à 14 ou 15 atomes de esthésie labiomentonnière (signe de Vincent) est fréquemment
carbone, par leur effet antibiofilm, semblent donner des retrouvée dans les formes chroniques mandibulaires. L’anesthé-
résultats encourageants. sie sous-orbitaire est rare.
Par ailleurs, certaines de ces ostéomyélites surviennent D’autres signes peuvent être trompeurs (syndrome myofascial
isolément, d’autres dans un cadre multifocal squelettique et syndrome algodysfonctionnel de l’appareil manducateur
(ostéomyélite chronique récurrente multifocale, et syndrome [SADAM]).
SAPHO associant synovite, acné, pustulose palmoplantaire, Il peut exister des adénopathies cervicales. La température est
hyperostose et ostéomyélite). Il existerait des relations entre ces variable selon l’intensité et l’étiologie.
trois affections, qui seraient l’expression variable d’une maladie On recherchera également des signes d’abcédation : hyper-
unique, mais cette hypothèse reste à vérifier. [24] thermie oscillante au-delà de 39 °C, douleur insomniante,
La terminologie elle-même est discutée. Le terme habituel fluctuation au niveau de la gencive ou signe du godet cutané.
d’ostéomyélite sclérosante diffuse est ambigu, car il regroupe les Ces éléments sont variables en fonction de l’étiologie (atté-
diverses affections décrites ci-dessus. Le terme d’ostéomyélite nués dans les formes chroniques [3]), plus marqués chez le sujet
chronique primitive semble préférable. [11] jeune, et souvent masqués par une antibiothérapie prescrite
Actuellement, aucune de ces étiologies ne peut être infirmée préalablement.
ni confirmée.
Causes infectieuses
Ostéites sous biphosphonates Alvéolites
Plusieurs auteurs [1-4] ont récemment attiré l’attention à Elle survient 2 ou 3 jours après une extraction dentaire. La
propos du développement d’ostéomyélites chroniques non douleur est très vive. À l’examen clinique, il peut s’agir d’une :
bactériennes des maxillaires chez des patients sous traitement • alvéolite sèche : les parois osseuses de l’alvéole sont exposées
au long cours par biphosphonates pour affections ostéolytiques en bouche, la douleur est extrêmement vive au moindre
majeures, malignes (métastases d’adénocarcinomes, en particu- contact alimentaire ou à la sonde. Progressivement, en 2 à
lier mammaire, myélome), ou bénignes (maladie de Paget, 3 semaines, un tissu de granulation recouvre les parois, les
ostéoporose sévère). La fréquence apparaît beaucoup plus élevée douleurs s’atténuent. L’alvéolite sèche serait favorisée par les
que celle des ostéites primitives, mais elle est apparemment vasoconstricteurs associés aux anesthésiants locaux. Des
faible en regard du nombre de patients sous biphosphonates. fragments osseux alvéolaires fracturés peuvent être expulsés à
Ces ostéomyélites semblent toucher exclusivement les maxillai- la gencive quelques semaines après l’extraction ;
res. Par ailleurs, le maxillaire est intéressé dans un tiers des cas. • alvéolite suppurée : la douleur est vive, lancinante, associée à
La suspension du traitement par biphosphonates n’améliore pas un œdème des parties molles et à un trismus dans le cas des
toujours la pathologie des maxillaires, peut-être en raison de dents de sagesse. Elle peut survenir plus tardivement après
leur effet prolongé. l’extraction.

Stomatologie 3
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Figure 1. Ostéite infectieuse maxillaire et


mandibulaire droite sur kystes radiculoden-
taires (A, B, C, D).

Figure 2. Ostéite infectieuse sur fracture pathologique mandibulaire après extraction dentaire, avec séquestres et fistule cutanée (A, B, C).

Infection de l’organe dentaire (Fig. 1) Ostéite postopératoire


Elle associe des signes de monoarthrite à des douleurs
irradiant à l’oreille, à la symphyse lors d’une atteinte mandibu- L’infection survient au plus tôt 48 heures après une interven-
laire, vers le sinus ou la région orbitaire dans le cas du maxil- tion sur les maxillaires. Les douleurs postopératoires se majo-
laire, avec fréquemment un œdème des parties molles gingival rent, il apparaît un œdème et un érythème local, la mastication
et sous-cutané et des adénopathies satellites. est douloureuse.
Infection post-traumatique (Fig. 2) Le diagnostic est formel en cas de suppuration, spontanée ou
Elle survient au décours d’une fracture, avec un tableau après désunion de plaie.
inflammatoire secondaire (douleur, tuméfaction, érythème,
mobilité du foyer, brèche muqueuse, et fistule purulente).
Il s’agit en général soit d’un patient négligent ne respectant Ostéite d’origine générale
pas l’immobilisation bimaxillaire, soit d’un traitement mal
conduit avec défaut de restauration d’une occlusion équilibrée. Elle est exceptionnelle. Elle touche surtout les sujets jeunes
(enfants, adolescents) ou les personnes âgées, principalement en
Infection d’origine tumorale
région angulomandibulaire. Les signes généraux sont brutaux,
Dans les tumeurs bénignes, l’infection est souvent révélatrice. marqués par un syndrome septicémique sévère, avec hyperther-
En ce qui concerne les tumeurs malignes, l’interrogatoire mie oscillant au-delà de 39 °C et frissons, la douleur locale est
retrouve fréquemment des épisodes antérieurs douloureux ou de violente, le trismus est serré.
tuméfaction, avec parfois anesthésie labiomentonnière.
Un signe négatif est essentiel, il n’y a pas de point d’appel
Infection d’origine sinusienne
local gingivodentaire. L’origine est à rechercher au niveau
La sinusite maxillaire aiguë ou chronique unilatérale, avec cutané (panaris, furoncle, anthrax) ou pharyngé (angine).
douleurs locales, obstruction nasale, rhinorrhée purulente,
cacosmie et larmoiements, peut rarement se compliquer d’une Chez les adultes en milieu de réanimation, à l’état général
ostéite, avec douleurs anormalement vives, et survenue ulté- critique, les ostéites faciales passent souvent au second plan, le
rieure d’une communication buccosinusienne spontanée. diagnostic étant porté au stade de fistule ou de séquelle.

4 Stomatologie
Ostéites des os de la face ¶ 22-062-D-10

La biologie retrouve une hyperleucocytose à polynucléaires temporal, et rarement de l’espace parapharyngé. Ces aspects du
neutrophiles, avec vitesse de sédimentation (VS) et protéine C masséter sont un indicateur précoce de récurrence ou d’exacer-
réactive (CRP) élevées. Des hémocultures doivent être pratiquées bation de la pathologie.
lors des pics fébriles.
Réossification des zones radioclaires
La prise en charge doit être immédiate compte tenu de l’état
général. Au cours de la guérison, on assiste à une réossification des
zones radioclaires. En revanche, les zones d’ostéosclérose
peuvent persister au titre de séquelle.
■ Imagerie Selon la forme clinique
Elle est essentielle au diagnostic, au bilan d’extension et à la Ostéomyélites suppuratives. la répartition des lésions est
surveillance. Elle comprend la radiographie standard, la tomo- continue, avec perforation corticale, séquestres, transformation
densitométrie (scanner), l’imagerie par résonance magnétique scléreuse discrète et peu évolutive, et réaction périostée lamel-
(IRM) et la scintigraphie. Chacun de ces examens a sa place laire en « pelure d’oignon ».
dans la prise en charge de la pathologie. L’étude porte sur les Ostéomyélites chroniques. Les lésions sont extensives, plus
structures osseuses (os cortical, os spongieux, canal dentaire), et éparses, le condyle peut être intéressé. [14] Elles sont caractéris-
sur les parties molles (périoste, muscles masticateurs). Enfin, on tiques mais non pathognomoniques, peuvent prêter à confusion
recherchera une cause (granulome ou kyste apical, corps et conduire à une biopsie si l’on ne dispose pas de scanner ou
étranger [matériel d’ostéosynthèse], fracture, pathologie tumo- d’IRM pour différencier l’affection d’une maladie néoplasique :
rale, ...). La précocité du diagnostic est essentielle, mais pose le • phase de début : on assiste à une ostéolyse et à une réaction
problème du délai d’accès aux examens. périostée ;
• phase d’état : l’aspect scléreux se développe progressivement,
l’ostéolyse régresse, les lésions s’étendent ;
Imagerie photonique : • phase tardive : prédominance de la sclérose, densité osseuse
radiologie conventionnelle et scanner homogène caractéristique, et réaction périostée compacte,
déformant la mandibule, [21, 22] plus marquée chez le sujet
Technique jeune, et qui est, chez l’adulte, un indicateur de l’inflamma-
tion chronique ou récurrente. [14] La sclérose peut être
La radiographie conventionnelle repose principalement sur interprétée comme une cicatrice, d’autant plus marquée que
l’orthopantomogramme, ainsi que sur des incidences particuliè- l’évolution est ancienne et que le sujet est âgé. L’ostéolyse
res (maxillaires défilés, face basse de face et de profil, clichés réapparaît lors des périodes de poussée. [11] Les séquestres sont
occlusaux, rétroalvéolaires, etc.). Les signes radiologiques sont rares.
retardés par rapport à la clinique (4 jours à 3 semaines). Le scanner révèle un élargissement osseux, le cortex d’origine a
Le scanner précise plus précocement et en trois dimensions disparu, il est remplacé par une zone radio-opaque correspon-
les données de la radiographie conventionnelle. Il étudie dant à la réaction périostée. En cas d’apposition osseuse
l’érosion de l’os cortical côté endostal ou périosté, du canal, et corticale endostale, l’os médullaire diminue et peut être oblitéré.
l’élargissement du trou mentonnier. Il étudie la baisse de densité Le scanner est recommandé pour établir le stade de la
osseuse traduisant la déminéralisation. Il analyse enfin le pathologie et lors de son suivi. Il distingue les ostéomyélites
périoste et les parties molles (sinusite, cellulite, muscles actives et quiescentes, les modifications postopératoires et les
masticateurs). [14] processus réparateurs après traitement efficace. Il peut reconnaî-
Toutefois, radiographies et scanner ne détectent pas les tre un échec du traitement chirurgical, lorsque la sclérose
anomalies débutantes, et le scanner est gêné par les soins progressive diffusant dans le corps mandibulaire indique une
dentaires conservateurs et restaurateurs. décortication inefficace.

Résultats
Imagerie par résonance magnétique
Ostéolyse
Il s’agit d’une décalcification osseuse initialement localisée au Technique
niveau de l’os spongieux, pouvant éroder la corticale du canal Elle nécessite une acquisition en pondération T1, T2, et
mandibulaire et se propager vers le trou mentonnier, avec T1 avec injection de gadolinium. D’autres techniques, telles la
raréfaction de la trame, corticale et médullaire à limites floues. réduction du signal du graisseux médullaire, [14, 25] ou les
À 4 semaines, le scanner est toujours positif. [14] techniques spin-echo ou écho de gradient, [13] réduisent l’hyper-
Ostéogenèse périostée ou sous-périostée signal graisseux et augmentent la détection hydrique, et par
conséquent l’inflammation débutante. L’IRM est intéressante
Elle est plus marquée chez les sujets jeunes. Le scanner révèle pour le canal médullaire, le périoste et les parties molles, qu’elle
un dépôt linéaire ou semi-lunaire après 10 à 14 jours. Il s’agit analyse avec une très grande spécificité, ainsi que pour un
d’une néo-ostéogenèse mono- ou multicouche parallèle à l’os diagnostic précoce et la détection d’une pathologie maligne. Elle
cortical, avec des spicules plus rares qu’en pathologie néoplasi- évite l’irradiation. Elle est « artefactée » par les traitements
que. Le côté vestibulaire est plus fréquemment atteint. dentaires. Elle est contre-indiquée en présence de corps étran-
Séquestres (4e à la 11e semaine) gers ferromagnétiques.

Il s’agit de fragments osseux isolés du reste de la structure Résultats


osseuse restante par un liseré radioclair périphérique. La densité
est élevée, alors que sur l’os restant, on observe une décalcifica- Formes aiguës
tion à proximité du liseré radioclair. Le scanner est plus précis L’IRM est plus précise et plus précoce que le scanner pour
pour apprécier la présence, la localisation et l’extension des déterminer l’extension intramédullaire. Le degré d’intensité peut
séquestres. Leur apparition traduit le passage à la chronicité. Les être corrélé au résultat histopathologique. Les aspects générale-
signes radiologiques étant retardés par rapport à la clinique, ment rencontrés sont un hyposignal en T1 et un hypersignal
certains auteurs pensent que la chronicité pourrait apparaître après injection de gadolinium et en T2. Elle permet de faire la
avant la limite arbitraire de 4 semaines. [6] part entre le processus inflammatoire et le processus de sclérose,
marqué par un hyposignal au gadolinium. La réaction périostée
Tissus mous (scanner)
et l’extension aux muscles masticateurs sont décelées précoce-
On observe un œdème et une prise de contraste du muscle ment. Elle peut déceler précocement une transformation
masséter, moins fréquemment du ptérygoïdien interne, du maligne. Os cortical et séquestres sont moins bien analysés.

Stomatologie 5
22-062-D-10 ¶ Ostéites des os de la face

Figure 3. Ostéomyélite chronique « primi-


tive ». La scintigraphie est très évocatrice, en
l’absence de signes physiques et radiologiques
(A, B, C, D).

Formes chroniques Résumé de l’imagerie


La sclérose médullaire est dépistée précocement, certains La radiographie panoramique dentaire est indispensable pour
auteurs pensent que la chronicité apparaît avant la limite étudier la dentition, les signes directs d’ostéomyélite, la présence
arbitraire des 4 semaines. [14] de conditions prédisposantes (fracture, maladie osseuse systémi-
L’IRM retrouve une bonne corrélation avec l’examen histolo- que) et dans le suivi.
gique, sauf en cas de geste chirurgical retardé, de traumatisme Le scanner, également dans le bilan préchirurgical, précise le
ou d’infarctus osseux. L’IRM est d’un grand intérêt avant degré de destruction corticale, la présence de séquestres et
décortication, car elle permet d’établir la localisation et le degré l’étendue d’os à réséquer.
d’atteinte du périoste. L’IRM, du fait de sa grande sensibilité, est utile pour la
La surveillance postopératoire est difficile, les changements au détection de l’atteinte médullaire, et pour planifier le traitement
niveau de la moelle osseuse prenant 1 à 6 mois pour revenir à chirurgical.
la normale. Toutefois, après 6 mois, l’IRM est plus fiable que le Enfin, la scintigraphie est recommandée à la recherche
scanner pour détecter des zones évolutives ou récurrentes. d’autres localisations (ostéomyélite chronique récurrente
multifocale, syndrome SAPHO).
Scintigraphie (Fig. 3)
Les techniques récentes proposent un protocole en trois
phases (1 minute après injection : temps de perfusion ; 5 minu-
■ Biologie
tes : lit vasculaire ; 2 à 3 heures : « phase de minéralisation » du Le bilan inflammatoire comprend la recherche d’une
« turn over » osseux), améliorées en combinant le technétium hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles, d’une accéléra-
99m et le gallium 67, plus spécifique de l’infection osseuse que tion de la VS et d’une élévation de la CRP. Ces éléments sont
le technétium, [26] ou les leucocytes marqués par l’iridium 111, en général étudiés à des périodes variables de la maladie, leur
également plus spécifique de l’infection osseuse, mais moins degré de modification est difficilement interprétable. La répéti-
sensible). tion de ces examens permet une surveillance de l’évolution.
La scintigraphie est caractérisée par son extrême sensibilité Dans les ostéomyélites chroniques, la VS est habituellement en
(100 %), avec une hyperfixation dès le 2e jour de la maladie, dessous de 30 mm à la première heure. Lorsque le taux est
mais avec une faible spécificité qui ne permet pas une analyse supérieur, une autre étiologie doit être recherchée.
fine des différentes structures. Entre la VS et la CRP, la prédominance de sensibilité varie
Lors des traitements conservateurs, la diminution du selon les auteurs.
contraste correspond à une réduction de l’activité et une Les tests d’immunité sont divergents. [10]
augmentation à une reprise de l’affection. L’hyperfixation peut Par ailleurs, la biologie recherche une étiologie et d’éventuel-
persister jusqu’à 4 mois après disparition des signes cliniques. Le les défaillances viscérales.
retour à la normale est plus précoce qu’en scanner. [14]
En outre, tout geste chirurgical préalable ou la régénération
osseuse modifiant les images, elle est peu adaptée à la sur- ■ Microbiologie
veillance de l’évolution postopératoire.
Enfin, la scintigraphie permet de déceler une atteinte d’une
autre structure osseuse, en cas d’ostéite multifocale.
Technique
La flore buccale saprophyte particulièrement riche est source
de nombreux artefacts. Les prélèvements doivent respecter
Fistulographie certaines règles : enquête microbiologique exhaustive pour
obtenir l’historique de l’ostéite du patient, fenêtre antibiotique
Elle permet de préciser le trajet d’une fistule en vue de son de 48 heures dans les traitements aveugles préalables, prélève-
excision ou de sa mise à plat. ments par aspiration des écoulements purulents à la seringue

6 Stomatologie
Ostéites des os de la face ¶ 22-062-D-10

médullaire). L’os trabéculaire apparaît irrégulier en taille et en

▲ Mise en garde forme, avec occlusion du système haversien. [24] Il y a un


épaississement sous-périosté lié à la néo-ostéogenèse avec
remodelage sous-jacent de l’os cortical par apposition-
Les résultats bactériologiques sont à interpréter avec résorption. L’apposition osseuse endostale est de type pagé-
beaucoup de prudence. toïde. [10] La répétition des poussées aboutit à un tableau en
« mosaïque ». [29] Il peut y avoir formation de micro-abcès.
Les séquestres sont rares.
Ces phénomènes sont variables selon l’étiologie. La vascula-
avec cathéter, demande d’étude en aérobiose et anaérobiose (le risation plus précaire de la mandibule explique qu’elle soit plus
matériel dans ce cas est à placer en Vacutainer ® stérile), fréquemment et plus gravement atteinte que le maxillaire.
transmission rapide au laboratoire. La méthode par écouvillon La plupart des auteurs ne décrivent aucune complication à la
est à éviter, car les quantités de liquide sont très faibles et ne suite de biopsies et font état d’une cicatrisation muqueuse
permettent pas l’étude de l’architecture du prélèvement. En ce normale, malgré la crainte de déclencher une exacerbation de
qui concerne le bacille de Koch, il est relativement résistant et l’ostéite.
ne nécessite pas de précautions particulières, sinon de préciser
au laboratoire d’en effectuer spécifiquement la recherche,
comme les autres germes mycéliens. Des cultures multimédias ■ Évolution
sont recommandées. [27]
L’étude bactériologique sur prélèvements osseux (séquestres) La surveillance doit être mensuelle en période aiguë.
mis en flacon stérile, a des résultats très aléatoires. Il n’y a
actuellement pas de consensus mondial sur la fiabilité d’une Guérison
telle analyse. La contamination périphérique entraîne un risque
d’artefact dû à la flore saprophyte. Une amélioration peut être Alvéolites
obtenue par broyage en laboratoire. Il a été proposé un carot-
tage osseux, avec analyse de la face profonde du prélèvement, L’alvéolite sèche évolue favorablement en 3 semaines.
au contact du processus infectieux. [28] L’alvéolite suppurée guérit dans un délai de quelques jours à
Il faut être critique devant les résultats bactériologiques. Des quelques semaines, après lavage de la cavité.
prélèvements profonds et multiples ont une plus grande
fiabilité. Ostéites
L’avenir réside dans l’étude de la génétique des bactéries. En ce qui concerne les ostéites, la guérison survient sous
traitement. La douleur et l’œdème régressent, le trismus se lève
Résultats en un délai variable, pouvant aller jusqu’à 2 mois, l’ostéolyse
diminue avec la symptomatologie.
La variété des germes susceptibles d’être responsable d’ostéites
est très importante. Le groupe des staphylocoques est souvent Critères de guérison
en cause (Staphylococcus aureus, albus, epidermidis, melitis, etc.).
Un délai de plus de 1 mois sans symptomatologie est actuel-
On retrouve également fréquemment des streptocoques (oralis,
lement admis. [17, 30] Toutefois, il semble prudent de respecter
sanguis, milleri, viridans, anginosus, midis, etc.) et des pneumoco-
un certain nombre de paramètres : [31] terrain fragilisé, paramè-
ques, des Haemophilus parainfluenzae, des germes à Gram –
tres cliniques (délai de prise en charge, délai de disparition de
(Klebsiella, Serratia, Proteus, Escherichia coli, Enterobacter, etc.), des
tous les signes cliniques locaux, technique chirurgicale qui a dû
bacilles à Gram+ anaérobies (Propionobacterium acnes).
tenir compte du problème fonctionnel), ou paracliniques
Des germes mycéliens peuvent également être dépistés
(normalisation de la VS et de la CRP, surveillance des éléments
(Candida, Aspergillus israelii, A. Naeslundii).
de l’imagerie à distance à 3 mois des gestes chirurgicaux en
Des mycoplasmes, type Mycobacterium israelii ou Nocardia,
scintigraphie osseuse et en IRM). On recherchera la restitutio ad
sont difficiles à mettre en évidence.
integrum des structures osseuses ou un aspect scléreux cicatriciel
Enfin, citons des bactéries intracellulaires (Coxiella burnettii),
dans les formes chroniques.
ainsi que Veillonella, Eikenella corrodens, Pseudomonas aeruginosa,
Cependant, seul le recul permet d’affirmer définitivement la
Peptococcus, Neisseria, Porphyromonas, Fusobacterium, Peptostrepto-
guérison, un délai de 2 ans paraissant un minimum.
coccus intermedius, etc.
Dans les ostéites chroniques, il s’agirait de contamination lors Causes d’échec
du prélèvement. [10]
Ce sont [31] des attitudes incohérentes dans le traitement, la
persistance de lésions mal visualisées, une antibiothérapie mal
■ Anatomopathologie adaptée ou mal suivie, une pathologie néoplasique, une ostéo-
myélite non bactérienne.
Formes aiguës
L’inflammation au niveau de l’os n’a pas de particularité
Complications
(œdème, infiltrat lymphoplasmocytaire). À l’endroit de l’infarc- Elles sont d’autant plus marquées que le diagnostic et le
tus apparaît une réaction hyperémique, avec augmentation traitement sont tardifs.
d’activité des ostéoclastes. La zone nécrosée est le siège d’une
résorption périphérique, sous forme d’un séquestre, avec Précoces
cicatrisation sous-jacente à partir du tissu sain. Le séquestre finit
par être expulsé. Entre-temps, il est responsable d’abcédation, tel Elles correspondent à la diffusion de l’infection.
un corps étranger infecté. On retrouve des colonies bactérien- Locales
nes. [9] Pendant ce temps, une apposition périostée avec néo-
ostéogenèse apparaît. L’infection s’étend de proche en proche en contaminant l’os
sain et les parties molles (cellulite), les signes cliniques s’exacer-
bent, de même que l’œdème périosseux. Au niveau des parties
Ostéites chroniques molles, il apparaît des fistules muqueuses ou cutanées à l’étage
Elles évoluent plus lentement. Il se produit des remaniements mandibulaire, une sinusite unilatérale au niveau maxillaire, avec
de la médullaire, qui est remplacée par un tissu fibreux (lym- rhinorrhée purulente, obstruction nasale et cacosmie.
phocytes, fibrocytes, polynucléaires, augmentation des ostéo- Les ostéomyélites chroniques primitives n’entraînent habi-
blastes et des ostéoclastes, ces derniers empiétant sur l’os tuellement pas de séquestres ni de fistulisation.

Stomatologie 7
22-062-D-10 ¶ Ostéites des os de la face

années à plusieurs décennies. L’imagerie doit comporter au


minimum une radiographie panoramique régulière, permettant
de juger de l’évolution des lésions osseuses et de leur extension,
et une IRM qui décèle la persistance de phénomènes inflamma-
toires. Outre les classiques aspects d’ostéolyse, il apparaît une
ostéosclérose avec densification de l’espace médullaire. L’IRM
révèle, parfois de façon précoce, avant la fin du premier mois
d’évolution, des images de sclérose du canal médullaire, autre
signe de passage à la chronicité. La biologie, à la recherche de
l’hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles, de l’accéléra-
tion de la VS et de l’élévation de la CRP, peut être normale.
L’extension peut se faire également vers les parties molles,
notamment au masséter et au ptérygoïdien interne dans les
formes postérieures mandibulaires, avec myosite rétractile.
Figure 4. Fracture pathologique sur ostéite chronique.
Tardives
Régionales Locales
D’autres complications par diffusion plus à distance peuvent Pseudarthrose. Elle se distingue du retard de consolidation
survenir : abcès de la fosse infratemporale, phlegmon orbitaire, par son caractère pérenne. Elle est définie par une mobilité
ostéite de la base du crâne, thrombophlébite de la veine faciale, indolore du foyer de fracture, après un délai de 6 mois, et une
de la veine angulaire interne et du sinus caverneux, arthrite calcification de type cortical des canaux médullaires de part et
temporomandibulaire, avec risque chez l’enfant d’ankylose et d’autre du trait de fracture.
d’hémiatrophie mandibulaire. Ces évolutions mettent en jeu le Dégénérescence néoplasique (Fig. 6D). Elle est exception-
pronostic fonctionnel et parfois vital. nelle. Il peut s’agir d’un sarcome (osseux) ou d’un carcinome
épidermoïde (muqueux), après plusieurs années d’évolution.
Générales
Nous avons été confrontés à une telle dégénérescence carcino-
Sur le plan général, la diffusion infectieuse peut entraîner une mateuse épidermoïde. [32] Le diagnostic de malignité est très
septicémie ou une septicopyohémie, avec état de choc, abcès difficile au stade de début, en raison de la prépondérance des
cérébraux, articulaires, pulmonaires, etc. Il peut également signes d’ostéite masquant le caractère insidieux du néoplasme
survenir, notamment avec les streptocoques, des endocardites, débutant. Cela souligne l’intérêt de réaliser des IRM régulière-
des atteintes oculaires, etc. ment dans la surveillance d’une ostéite chronique rebelle.
Ces diffusions générales mettent en jeu le pronostic vital.
Générales
Secondaires Il peut survenir un rhumatisme articulaire aigu, une atteinte
Fracture pathologique (Fig. 4) ophtalmique. Enfin, toute inflammation prolongée est suscepti-
ble d’entraîner une amylose avec insuffisance rénale.
Elle peut survenir à la suite d’un traumatisme minime, avec
des douleurs locales modérées et une mobilité osseuse. Le
diagnostic est posé par la radiographie panoramique et le Séquelles
scanner.
Pertes de substance
Retard de consolidation
Elles sont la conséquence de l’affection ou de son traitement.
Il s’agit de la persistance d’une mobilité douloureuse d’un Il s’agit de pertes dentaires, et de pertes de substance osseuse
foyer de fracture, sans densification médullaire de part et d’autre avec ou non interruption de la continuité, entraînant dans le
de la fracture, dans un délai inférieur à 6 mois après la fracture. premier cas à la mandibule des pseudarthroses, et au maxillaire
Le potentiel de consolidation est intact. des communications bucconasales ou buccosinusiennes.
Passage à la chronicité (Fig. 5, 6A, 6B, 6C)
Séquelles fonctionnelles : troubles de la fonction
Au-delà de 4 semaines, il est généralement admis que l’ostéite manducatrice
doit être considérée comme une forme chronique. Certains
auteurs estiment que la chronicité survient plus précoce- Ils peuvent être dus à une constriction permanente des
ment. [14] Elle se traduit par la persistance ou la réapparition de mâchoires par rétraction musculaire masticatrice (masséter,
signes inflammatoires locaux (douleur, tuméfaction), une ptérygoïdien interne).
atteinte osseuse plus étendue, avec asymétrie faciale. Il peut Il peut s’agir également d’une ankylose par arthrite temporo-
apparaître une dénudation osseuse persistante. Des phénomènes mandibulaire, avec, chez l’enfant, défaut de croissance mandi-
de poussées récurrentes peuvent survenir pendant plusieurs bulaire ou hémifaciale, responsable d’une hypotrophie du côté

Figure 5.
A, B. Ostéite chronique « primi-
tive » mandibulaire gauche débu-
tante. La 37 saine a été extraite.

8 Stomatologie
Ostéites des os de la face ¶ 22-062-D-10

Enfin, il peut s’agir d’une perte de substance maxillaire ou


mandibulaire, d’autant plus grave qu’elle se situe dans les
régions antérieures.

Séquelles esthétiques
Atrophie faciale
Il peut s’agir d’une insuffisance de développement osseux
dans le cadre d’une ankylose chez l’enfant ou d’une perte de
substance osseuse n’ayant pas fait l’objet d’une réparation.
Hypertrophie faciale
Malgré la guérison de l’ostéite, il peut persister une tuméfac-
tion résiduelle donnant un aspect d’hypertrophie faciale. Sur le
plan cutané, les cicatrices de fistules sont en général rétractiles
et disgracieuses.

■ Formes cliniques
Ostéite hyperostosante de Garré
(périostite) [33-38]
Il s’agit d’une néoprolifération périostée, survenant chez
l’enfant vers l’âge de 10 ans ; la prédominance féminine est
marquée. Du point de vue clinique, elle se présente sous forme
d’une tuméfaction périmandibulaire d’allure inflammatoire,
dure, faisant corps avec la mandibule, avec de vives douleurs.
L’aspect radiologique standard est assez évocateur, avec une
ossification périostée en plusieurs couches, faisant évoquer la
classique « pelure d’oignon ». La périostite peut s’accompagner
de réactions inflammatoires osseuses, visibles au scanner, avec
ostéolyse sous-corticale. L’étiologie en est infectieuse, dentaire,
parodontale ou traumatique, en général au niveau de la région
molaire mandibulaire.
Sur le plan histopathologique, l’examen révèle une ostéoge-
nèse périostée importante, avec ostéoformation selon un axe
perpendiculaire au périoste, et une médullaire fibreuse.
L’évolution sous traitement est en général longue, sur
plusieurs mois, avec régression de la tuméfaction et normalisa-
tion de l’aspect osseux. Il peut parfois persister une tuméfaction
séquellaire.

Formes chroniques primitives (Fig. 7)


Les ostéomyélites chroniques primitives font l’objet de
nombreuses discussions d’ordre nosologique. Elles peuvent
survenir isolément, ou s’inscrire dans le cadre d’une pathologie
diffuse (ostéomyélite chronique récurrente multifocale, syn-
drome SAPHO). La nature bactérienne est contestée. Deux tiers
des patients n’ont pas de problème dentaire. Elles touchent
presque exclusivement la mandibule.
L’âge des patients se répartit en deux pics de fréquence, l’un
chez le sujet jeune avant 20 ans, l’autre au-delà de 50 ans. Elles
touchent plutôt des sujets de sexe féminin.
La symptomatologie associe des signes d’ostéite, souvent sur
un mode mineur, avec phénomènes douloureux, parfois inter-
mittents, évoluant par poussées entrecoupées de périodes
quiescentes, tuméfaction dure, adhérant à l’os, trismus et, de
façon inconstante, anesthésie labiomentonnière. Les douleurs
Figure 6. sont volontiers irradiées à la symphyse et à la région auriculaire,
A, B, C, D. Même cas que Figure 5, après 2 ans d’évolution, malgré un et à la région orbitaire en ce qui concerne le maxillaire supé-
traitement antibiotique prolongé, des curetages et des séances d’oxygé- rieur. Il n’y a pas de suppuration ni d’hyperthermie. Le diagnos-
nothérapie hyperbare répétés. L’ostéolyse mandibulaire est totale, avec tic peut être très tardif, jusqu’à 9 ans pour un syndrome
dégénérescence carcinomateuse épidermoïde droite sur le site ostéitique SAPHO. [39]
initial sur l’imagerie par résonance magnétique (IRM) (Fig. 6D), dont le La radiologie est évocatrice, en révélant une opacité médul-
diagnostic est très difficile à poser à un stade précoce. laire témoignant d’une réaction de sclérose, parfois associée à
des zones d’ostéolyse. Les séquestres sont rares.
Les analyses bactériologiques sont négatives ou retrouvent des
pathologique, et d’un encombrement dentaire d’autant plus germes saprophytes de la cavité buccale, qu’il est difficile
grave qu’elle survient dans le plus jeune âge, avec troubles de d’incriminer dans la pathogénie. Cela rend toutefois plus
l’hygiène et défaut de soins dentaires, et parfois risque drama- complexes les discussions sur cette pathogénie.
tique d’inhalation de corps étranger impossible à ôter du fait du Il est essentiel dans ces conditions de rechercher une cause,
défaut d’ouverture buccale. même minime (dentaire, parodontale). Faute de quoi, il faut

Stomatologie 9
22-062-D-10 ¶ Ostéites des os de la face

Figure 8. Ostéite maxillaire chez une patiente édentée sous biphospho-


nates. Absence caractéristique de cicatrisation après curetage (A, B).

Syndrome SAPHO (synovite, acné, pustulose


palmoplantaire, hyperostose, ostéite) [41]
Il s’agit de l’association d’une ostéomyélite chronique diffuse
mandibulaire à des lésions extrafaciales, associant de façon
variable des éléments divers à type de synovite, d’acné, de
pustulose palmoplantaire, d’hyperostose, et d’ostéites diffuses
(ostéosclérose, hyperostose, réaction périostée), lesquelles
touchent préférentiellement la paroi thoracique antérieure
(sternum, clavicules, côtes), mais également les vertèbres, le
pelvis, le crâne et les os longs. Il s’agit d’une affection du sujet
jeune, à prédominance féminine, une origine génétique étant
suspectée. Le tableau clinique est rarement complet. Il peut s’y
Figure 7. Ostéomyélite chronique primitive mandibulaire droite. Hy- associer une arthrite des articulations adjacentes. [42] La mandi-
perfixation en scintigraphie, hyposignal en imagerie par résonance ma- bule est atteinte dans environ 10 % des cas. [22] Suei suspecte
gnétique (IRM) en T1 et extension aux parties molles, aspect de sclérose une étiologie périostée responsable d’une ostéogenèse initiale,
osseuse diffuse avec lacunes sur le scanner (A à D). puis d’une résorption ostéoclastique. [21] La fréquence du
syndrome SAPHO serait sous-estimée. [10]
considérer l’ostéomyélite comme primitive. La distinction est Dans ces deux formes d’ostéomyélites diffuses multifocales, la
essentielle, car si les formes secondaires répondent aux traite- scintigraphie est l’examen essentiel au diagnostic, au même titre
ments classiques (prise en charge de la cause, antibiothérapie, que l’examen clinique général dermatologique concernant le
oxygénothérapie hyperbare, décortication, etc.), les formes SAPHO.
primitives y sont particulièrement résistantes, et ont tendance Les prélèvements bactériologiques sont en général négatifs.
à récidiver après une accalmie post-thérapeutique. Marx et al. [16] ont cependant retrouvé différents germes :
Actinomyces, Propionibacterium propionicus, et Eikenella corrodens,
Formes avec localisations extrafaciales Jacobson et al. [43] rapportant la présence de Propionibacterium
acnes, dont on ne peut préciser le rôle dans l’ostéite.
Ostéomyélite chronique récurrente multifocale [40]
À la localisation faciale s’associent des localisations souvent Ostéites sous biphosphonates [1-4]
peu symptomatiques d’ostéomyélites chroniques localisées au (Fig. 8 et 9)
niveau d’autres os (clavicule, sternum, côtes, humérus, radius,
fémur tibia, etc.). La radiographie conventionnelle et la scinti- Chez le patient denté, l’ostéomyélite débute habituellement
graphie révèlent une atteinte synchrone ou métasynchrone d’os par l’absence de cicatrisation d’une alvéole après une extraction
multiples. dentaire indiquée pour douleurs locales. Puis les tableaux

10 Stomatologie
Ostéites des os de la face ¶ 22-062-D-10

Figure 10. Ostéomyélite mandibulaire sur ostéopétrose, avec fistules


cutanées multiples. Aspect radiologique de sclérose diffuse, avec ostéoge-
nèse périostée.

loppe à nouveau dans les milieux à conditions socioéconomi-


ques défavorables, et également en liaison avec le développe-
ment du virus VIH. La mandibule peut être contaminée par voie
hématogène ou par inoculation buccale. Cliniquement, elle
peut simuler un abcès alvéolodentaire, d’où un risque d’erreur
diagnostique. Intradermoréaction (IDR) et test VIH doivent être
réalisés. L’aspect histologique est une nécrose caséeuse à cellules
géantes multinucléées de Langhans, cellules épithélioïdes et
lymphocytes. Le diagnostic est fondé sur les cultures de prélè-
Figure 9. Ostéomyélite débutante, avec ostéogenèse périostée, au vements (crachats, tubage gastrique, prélèvements urinaires, ...)
cours d’un traitement par biphosphonates. L’atteinte est d’emblée diffuse. sur milieu de Lowenstein-Jensen en 6 à 8 semaines, mais peut
être accéléré par le système BACTEC (détection automatisée de
mycobactéries) ou par l’utilisation de la réaction de chaîne
clinique et paraclinique se complètent. Le contexte de maladie
polymérase pour l’ADN de Mycobacterium tuberculosis. Le
ostéolytique est souvent évoqué, mais non pris en considération
traitement consiste en une triple antibiothérapie de 9 mois en
du fait de l’ignorance de cette association pathologique d’indi-
moyenne.
vidualisation récente. L’affection est parfois rebelle à l’arrêt du
traitement par biphosphonates. L’examen bactériologique est
négatif, l’examen histopathologique fait état d’une ostéite Ostéite et infection par le virus
chronique. de l’immunodéficience humaine
La morbidité apparaît supérieure. [48] Le traitement doit être
Formes rares précoce, car l’extension peut être considérable. Les traitements
D’autres formes sont beaucoup plus exceptionnelles dans nos doivent être discutés, notamment s’ils sont mutilants, en
régions. Il faut néanmoins savoir y penser lorsque la bactério- fonction de l’espérance de vie des patients, et de préférence
logie est négative ou que l’évolution sous traitement est rester médicaux.
défavorable.
Ostéite sur ostéopétrose [49-52] (Fig. 10)
Ostéite actinomycotique [44-46]
La maladie d’Albers-Schönberg, autosomale, serait liée à une
L’actinomycose mandibulaire est rare, elle intéresse essentiel- dysfonction ostéoclastique. C’est une sclérose osseuse touchant
lement l’homme, [45] à un âge très variable, du jeune enfant à fréquemment les vertèbres, le bassin, les côtes, le crâne, la
l’adulte âgé ; elle touche également les vertèbres. Le tableau est mandibule, incluant le condyle. L’aspect d’épaississement
celui d’une inflammation osseuse locale aiguë. La survenue peut cortical avec diminution de l’espace médullaire est différent de
être primitive ou secondaire (germes opportunistes) sur une celui des ostéomyélites. Les os sont anormalement vulnérables
pathologie préexistante (fracture). Des faux négatifs bactériolo- aux agressions, traumatiques ou infectieuses, notamment
giques ou histologiques peuvent être liés à des traitements dentaires. Devant une ostéomyélite bilatérale de la mandibule,
antibiotiques aveugles préalables. il faut rechercher une ostéopétrose sous-jacente. Le traitement
visant à réduire la déminéralisation osseuse (corticoïdes, régime
Ostéite tuberculeuse [47] pauvre en calcium, interféron c-1 dans les formes sévères),
Le germe responsable principal est le Mycobacterium tuberculo- l’ostéomyélite est pratiquement impossible à traiter. [52] Les
sis, mais d’autres variantes peuvent être en cause (avium, bovis, transplants osseux microvascularisés stricts sont déconseillés,
kansasii, scrofulaceum). La maladie a nettement régressé depuis l’os étant susceptible d’être atteint. Des lambeaux myo-osseux
la vaccination et l’apparition de l’antibiothérapie, mais se déve- sont préférables. La capacité de guérison diminue avec le

Stomatologie 11
22-062-D-10 ¶ Ostéites des os de la face

nombre de gestes chirurgicaux, la cicatrisation étant de plus en Méthodes


plus retardée. Chaque patient doit donc être traité individuelle-
ment avec grande prudence. Méthodes médicales
Formes exceptionnelles Antibiothérapie [12, 31]

Nous citerons les formes exceptionnelles d’ostéites d’origine L’identification du germe est un préalable à l’instauration
infectieuse (syphilis, salmonellose, rougeole, scarlatine, noma, d’une antibiothérapie efficace.
lèpre), ou chimique : arsenic, dont l’utilisation en dentisterie Choix des antibiotiques. 1) L’antibiothérapie doit avoir un
conservatrice est désormais proscrite, avec gencive violacée et spectre adapté aux bactéries responsables, mais le plus étroit
expulsion d’un séquestre après 2 à 3 semaines, ou profession- possible. Les concentrations sériques minimales semblent devoir
nelles (phosphore dans l’industrie des explosifs et des allumet- être au moins quatre fois la concentration minimale inhibitrice
tes, tourneurs de nacre autrefois, produits radioluminescents...), (CMI), nécessitant des dosages réguliers, l’efficacité in vitro
aujourd’hui disparues grâce à la législation. n’étant pas toujours un gage d’efficacité in vivo.
Les ostéoradionécroses font l’objet d’un autre fascicule. 2) Les antibiotiques doivent diffuser dans l’os infecté et le
slime bactérien. Les associations d’antibiotiques doivent avoir
une synergie de bactéricidie dans les tissus infectés.
■ Diagnostic 3) Il faut identifier les antécédents : allergie médicamenteuse,
les différentes prescriptions antibiotiques antérieures, ainsi que
leurs effets sur l’évolution de l’ostéite (amélioration, guérison
Diagnostic positif transitoire, etc.).
Il repose sur l’anamnèse, l’examen clinique, l’imagerie, la 4) Il faut utiliser au mieux les propriétés des molécules :
bactériologie, l’examen histopathologique et, en dernier ressort, • on tentera de diminuer les contraintes du traitement pro-
sur l’évolutivité. Aucune technique ne permet d’affirmer ou longé : la voie intraveineuse n’est utilisée que si elle est
d’infirmer avec une absolue certitude la présence d’une indispensable (ostéite grave, antibiogramme), la voie orale
ostéomyélite. doit lui être substituée dès que possible, notamment chez
l’enfant. Pour la voie intraveineuse, on privilégiera les
Diagnostic différentiel antibiotiques à demi-vie sérique prolongée (une seule admi-
nistration journalière en ambulatoire) (céphalosporines de
Si devant un tableau associant de violentes douleurs à une troisième génération, glycopeptides) ;
tuméfaction osseuse inflammatoire, dans un contexte de • en administration prolongée, on associe l’amphotéricine orale
suppuration, avec séquestres et fistules, le diagnostic est évident, contre les surinfections digestives à levures, et du métronida-
au contraire les formes chroniques primitives peuvent poser des zole ou de l’Ultra-Levure® (controversée) à la clindamycine,
problèmes beaucoup plus délicats. en prévention des colites pseudomembraneuses à Clostridium
Il faut éliminer une pathologie bénigne ou maligne, locale ou difficile ;
générale. • les antibiotiques oraux doivent avoir une bonne biodisponi-
bilité, qui peut être réduite par interactions médicamenteuses
Affections bénignes avec ostéocondensation (pansements gastriques, fer, vitamines, ...).
On distingue : Règles de prudence à respecter. Les règles à respecter sont :
• la dysplasie fibreuse : pas de réaction périostée, pas de • certains antibiotiques ne doivent jamais être utilisés seuls
tuméfaction des tissus mous. Elle touche le sujet jeune, on devant le risque d’émergence de résistance par mutation
observe une opacification avec érosion et extension au cortex. pendant tout le traitement de l’ostéite (rifampicine, fosfomy-
L’activité est diminuée en scintigraphie au gallium 67 ; cine) ou à la phase initiale de la prise en charge et devant
• la dysplasie osseuse floride : elle touche le sujet d’âge moyen, présence de matériel (fluoroquinolones systémiques, acide
est asymptomatique sauf si elle est compliquée d’une ostéo- fusidique) ;
myélite, avec densification osseuse alvéolaire, bilatérale et • les interactions médicamenteuses (notamment avec la rifam-
symétrique, au niveau des quatre cadrans ; picine) et les effets secondaires doivent être connus ;
• le fibrome ossifiant ou cémentifiant, cémentome ; • l’utilisation concomitante d’anti-inflammatoires stéroïdiens et
• la maladie de Paget ; non stéroïdiens au cours ou au décours des ostéites est
• l’hyperostose corticale infantile de Carrey ; contre-indiquée.
• l’ostéopétrose d’Albers-Schönberg ; Orientation antibiothérapique. On peut suggérer quelques
• l’ostéoblastome (lacune plus ou moins bien définie, compo- orientations antibiothérapiques après identification du
sante ostéoblastique et ostéoclastique) ; germe : [26]
• le chérubisme, angiome mandibulaire avec lacune multigéo- • Staphylococcus aureus méti-S : céfazoline ;
dique ; • Staphylococcus aureus méti-R : vancomycine, associée à la
• le fibrome desmoïde (image lytique), histiocytose X. rifampicine en cas d’échec, puis relais oral par rifampicine et
doxycycline ;
Affections malignes • streptocoques : ceftriaxone (une administration par jour) puis
Ce sont le sarcome ostéogénique, le sarcome d’Ewing, de relais per os par amoxicilline ;
Hodgkin, le lymphome, le néoplasme osseux primitif ou • bacilles à Gram– : ceftriaxone ;
secondaire. • Pseudomonas aeruginosa : ciprofloxacine ;
Les diagnostics les plus difficiles sont la dysplasie fibreuse en • actinomyces : benzathine pénicilline, ou doxycycline en cas
poussée, et la malignité, surtout en cas d’association ou de d’allergie.
dégénérescence maligne. [53] En ce qui concerne ce dernier Arrêt du traitement antibiotique. La décision d’arrêter le
diagnostic, il peut se présenter sous forme d’une ostéolyse avec traitement antibiotique doit être prise sur les critères de
tuméfaction douloureuse et signe de Vincent. La rupture guérison, en accord avec le patient informé d’une récurrence
corticale n’est pas toujours pathognomonique. Le recours à la possible.
biopsie osseuse est nécessaire. Parfois, l’antibiothérapie est à poursuivre (patient âgé ou en
mauvais état général, matériel inextirpable en raison d’un risque
de grande mutilation (attelle métallique) et ayant une réponse
■ Traitement favorable sous traitement médical). Dans ces rares cas, il peut
être nécessaire de prolonger l’antibiothérapie, parfois
C’est une urgence thérapeutique médicale ou médicochirur- indéfiniment.
gicale. Le but est de guérir l’affection et d’en limiter les Roxithromycine. [18] Elle a une efficacité même en adminis-
séquelles. tration orale. Sa durée d’administration est variable selon les

12 Stomatologie
Ostéites des os de la face ¶ 22-062-D-10

patients, un traitement précoce semblant être une condition à identifiée, et non au hasard devant une douleur et une tumé-
une guérison plus rapide. Les lésions étendues nécessitent au faction inexpliquées, au risque de mutiler les patients et de
moins 10 mois de prolongation de traitement après guérison, favoriser le développement d’une ostéomyélite chronique
celles limitées au corpus mandibulaire semblent pouvoir être primitive.
interrompues à la disparition de la symptomatologie. En ce qui concerne le matériel d’ostéosynthèse, sous traite-
Le risque est l’ergotisme, les effets secondaires des troubles ment antibiotique et éventuellement sous drainage local, il peut
digestifs mineurs. être maintenu en place le temps de la consolidation, soit
D’autres antibiotiques ont également une action antibiofilm, pendant 4 à 6 semaines, en s’assurant qu’il n’y a pas de
mais n’ont pas fait l’objet d’études au niveau de la face. complications au niveau du foyer de fracture.
Anti-inflammatoires Traitement de l’infection osseuse
Outre leurs effets secondaires, ils ont l’inconvénient de Incision muqueuse et/ou cutanée. Elle permet l’évacuation
réduire les défenses immunitaires, et sont contre-indiqués dans des collections.
les formes infectieuses. Curetage, décortication. Ils ont pour but de restaurer un
Au contraire, dans les ostéites chroniques primitives, il environnement vascularisé viable, d’éliminer l’os nécrosé, et de
semble qu’il s’agisse d’un des rares traitements efficaces, réaliser des prélèvements bactériologiques et histopathologiques.
quoique de manière inconstante. On ne peut espérer la guérison de l’os nécrosé, qui va se
Antalgiques comporter comme un corps étranger infecté. [12] L’exérèse se fait
à la curette, à la pince gouge ou à la fraise, jusqu’en tissu osseux
Ils sont à prescrire lors des périodes douloureuses, par paliers hémorragique.
et en fonction des effets secondaires.
La décortication consiste à réséquer la totalité ou la quasi-
Anticoagulants et thrombolytiques totalité de l’os cortical et sous-cortical infecté, et la zone
périostée correspondante dans les formes chroniques primiti-
Ils auraient une utilité dans la prévention des phénomènes de
ves. [54] Le principe en est l’exérèse des foyers d’ostéites
thrombose et de nécrose, en en réduisant la fréquence ou en en
chroniques, la réduction de la compression vasculaire médul-
limitant l’extension.
laire, et la revascularisation par les tissus mous mieux irrigués.
Oxygénothérapie hyperbare Elle recherche un os bien vascularisé. Toutefois, son efficacité
semble limitée dans les formes primitives. En règle générale,
Protocole de Marx : 90 minutes à 2,4 atmosphères à raison de
c’est l’os cortical vestibulaire, plus facilement accessible, qui fait
deux séances par jour pendant 1 mois. [11] L’oxygénothérapie
l’objet de cette décortication. Elle doit être répétée. [9]
hyperbare augmente la perfusion tissulaire, les défenses immu-
nitaires, améliore l’oxygénation tissulaire, la dégradation L’exérèse doit être suffisamment large, [17] mais l’os viable est
lysosomiale, la création de radicaux libres, la diminution des parfois difficile à atteindre. [29] À ce titre, un marquage préalable
exotoxines, et l’augmentation de la néo-angiogenèse. [9] Elle par 250 mg de tétracycline toutes les 6 heures pendant les
diminue la concentration nécessaire en antibiotiques. 48 heures précédant l’intervention et un éclairage en ultraviolet
à la lampe de Wood en peropératoire [55, 56] ont été proposés.
Biphosphonates [5-8] L’intérêt est de déterminer l’étendue de l’os nécrotique, souvent
Certains auteurs rapportent une efficacité certaine de ce supérieure aux constatations en lumière naturelle. L’inconvé-
groupe de médicaments à effet antiostéoclastique, et pour nient est de rendre difficilement interprétables les prélèvements
certaines molécules, antiangiogénétique (zolédronate). La bactériologiques.
prescription se limite aux formes chroniques, en dehors évi- Dans la mesure du possible, le nerf alvéolaire inférieur doit
demment des formes survenant sous ce traitement. être respecté.
Leur efficacité peut être précoce en quelques jours (pamidro- Les séquestres doivent être enlevés. Ils sont en général
nate) ou retardée après quelques mois (disodium extrêmement faciles à retirer (« cueillette »).
clodronate). [11] L’abord chirurgical permet en outre de mettre en place un
système de drains à double flux d’irrigation-lavage à foyer fermé
Sulfasulazine et méthotrexate par antiseptiques ou antibiotiques. Une lame festonnée type
Ils ont été proposés dans les formes chroniques. lame de Delbet permet également un drainage satisfaisant et des
irrigations anti-infectieuses répétées. Il est possible également de
Hygiène buccodentaire mettre en place un dispositif (billes, cales de ciment) délivrant
Il s’agit d’un des meilleurs traitements préventifs. Par ailleurs, in situ un antibiotique (aminoside, pénicilline, céphalosporine,
il semble que ce soit une précaution particulièrement utile clindamycine). L’intérêt de cette technique est controversé.
avant l’instauration de traitements par biphosphonates. L’appli- Une fistule sera excisée et mise à plat ou suturée.
cation de gouttières fluorées est suggérée dans les ostéites Technique d’Ogawa et al. (« saucerization »). [30] Elle
chroniques, à l’identique des ostéoradionécroses, afin de consiste en la résection de toute la zone périostée épaissie
prévenir les lésions carieuses dentaires. visible, de l’os cortical latéral, de l’os spongieux et de la moelle,
avec greffe d’os spongieux et de moelle. Elle respecte la conti-
Réanimation
nuité, les contours et la fonction de la mandibule.
Dans les formes majeures d’ostéomyélites associées à une Résection interruptrice. Dans les formes rebelles sévères
septicémie, les moyens de réanimation sont nécessaires. Les diffuses ou récidivantes, souvent multiopérées et à l’évolution
troubles de la déglutition seront corrigés par sonde d’alimenta- désespérante, la partie ostéitique doit être réséquée de façon
tion nasogastrique ou de gastro- ou jéjunostomie. large. Ici encore, le marquage à la tétracycline permet de mieux
visualiser l’extension de la zone de nécrose.
Méthodes chirurgicales La résection partielle donne de meilleurs résultats que la
Elles consistent à traiter la cause de l’infection, à éliminer décortication dans les ostéomyélites diffuses suppurées, mais
celle-ci, à éliminer l’os nécrotique, et à corriger les séquelles. moindres dans les ostéomyélites primitives chroniques
primitives.
Traitement de la cause infectieuse
Immobilisation intermaxillaire
Il s’agit de la condition sine qua non pour une guérison des
formes infectieuses (extraction de la dent causale, curetage La stabilité osseuse en orthopédie générale est la condition
apical, curetage ou mise à plat des foyers parodontaux, résection majeure à la guérison d’une fracture. Le principe est d’intervenir
apicale, curetage ou marsupialisation de kyste, dépose sur os consolidé (rétablissement de la continuité par greffon,
d’implants dentaires). Toutefois, les extractions dentaires ostéosynthèse et immobilisation). Au niveau facial, l’immobili-
doivent être indiquées avec discernement, sur une pathologie sation intermaxillaire par arc péridentaire ou sur prothèse ou

Stomatologie 13
22-062-D-10 ¶ Ostéites des os de la face

Ostéites

Suppurées « Sèches »
ATB, O2 (ATB, O2, décortication,
anti-inflammatoires)

Aiguës Chroniques Chroniques primitives : Sous biphosphonates :

Décortication si nécessaire Décortication Macrolides 14-15C ? Macrolides 14-15C ?


Roxithromycine ? Roxithromycine ?
Arrêt biphosphonates ?

Figure 11. Arbre décisionnel. Thérapie en fonction de l’étiologie.

encore par fixateur externe, couramment utilisée en traumato- associé à l’oxyde de zinc, soit sous forme d’une pâte comportant
logie, est aisément transposée. des produits désinfectants et anesthésiants locaux. Au besoin,
En l’absence de fracture, la mise au repos fonctionnelle peut l’application sera renouvelée après quelques jours jusqu’à
également aider à la guérison. guérison définitive, en 3 semaines environ.
En absence de reconstruction primaire, il est nécessaire de
maintenir l’espace par une plaque d’ostéosynthèse métallique Alvéolites suppurées
rigide résistante, les modèles actuels en titane étant bien tolérés, Elles nécessitent un lavage, et éventuellement une reprise de
dans l’attente d’une reconstruction secondaire. Des greffons la cicatrice muqueuse dans le cas d’extraction de dent incluse,
osseux libres sont également préconisés par certains auteurs. [17] avec curetage des débris granulomateux.
Reconstruction
Ostéites secondaires
Elle vise à rétablir l’intégrité osseuse, en cas de perte de
substance, soit par distraction à partir de l’os sain avoisinant Ostéites aiguës
dans les pertes de substance limitées, soit par greffon non Outre le traitement médical antibiotique, antalgique et
vascularisé si les conditions locales de désinfection et de éventuellement anti-inflammatoire, le traitement de la cause
couverture muqueuse sont satisfaisantes, soit sinon par lambeau dentaire, parodontale, fracturaire ou tumorale bénigne, est
vascularisé, de rotation ou à distance microvascularisé, appor- nécessaire. Cela permettra le curetage simultané de l’os conta-
tant du tissu osseux (calvaria, clavicule, omoplate, côte, péroné, miné, les prélèvements à visée bactériologique et anatomopa-
crête iliaque, etc.). thologique, pour préciser le diagnostic et orienter
Les régions antérieures doivent faire l’objet d’une réparation l’antibiothérapie.
rapide, compte tenu de la mutilation esthétique et fonctionnelle Les fractures font l’objet d’une immobilisation en bonne
qu’entraîne leur exérèse. Les structures latérales, plus fréquem- position, avec restauration d’un articulé dentaire équilibré.
ment touchées, peuvent faire l’objet d’une discussion sur la
reconstruction secondaire. Ostéites chroniques
La prise en charge de l’arthrite temporomandibulaire fait Le traitement en est souvent décevant. Dans les formes
l’objet d’un fascicule spécifique. infectieuses, l’association rifampicine-fluoroquinolones est
l’association de référence. [57] L’antibiothérapie, l’oxygénothéra-
Réhabilitation dentaire
pie hyperbare et la décortication sont souvent suivies d’une
Les séquelles dentaires devront faire l’objet de réhabilitation période de rémission initiale, puis d’une récidive volontiers
par prothèse amovible, bridge ou sur implants, avec toutefois le rebelle. Ruggiero [1] considère néanmoins l’os nécrotique comme
risque de poser un implant dans un os qui a été le siège d’une un foyer infectieux potentiel qui doit être réséqué, afin d’éviter
ostéite. de surajouter des phénomènes infectieux risquant de contami-
ner les reconstructions, même par os ou tissus mous vasculari-
Indications thérapeutiques (Fig. 11) sés. Ce pronostic incertain doit rendre prudent dans les exérèses
osseuses larges, notamment chez l’enfant, du fait du risque sur
Le traitement doit être mis en route sans tarder. la croissance. [11]
La reconstruction primitive par greffe osseuse non vasculari-
sée est envisagée par certains auteurs, considérant que le
processus infectieux ne contamine pas le greffon. [17] Dans ce

“ Erreur à ne pas commettre cadre, il est néanmoins préférable d’utiliser des autotransplants
microvascularisés, d’autant que leur transposition sur les
vaisseaux cervicaux leur assure une meilleure irrigation.
Des traitements antibiotiques aveugles ou des extractions Les macrolides à 14 ou 15 atomes de carbone ou les biphos-
dentaires pour douleurs non étiquetées ne doivent pas phonates (en dehors des cas survenant sous ce traitement)
être entrepris sans un diagnostic précis de l’affection et de donneraient des résultats intéressants. D’autres thérapeutiques
sa cause. ont été proposées (sulfasalazine, méthotrexate).
Ostéites sous biphosphonates
Ces ostéites sont également rebelles aux traitements médico-
chirurgicaux habituels. En l’absence d’une meilleure compré-
Alvéolite sèche hension physiopathologique et de preuve formelle des relations
Le traitement local est en général suffisant, le patient étant entre l’ostéite et les biphosphonates, et compte tenu du
soulagé en quelques instants par la mise en place d’eugénol, soit contexte néoplasique généralisé souvent bien contrôlé par les

14 Stomatologie
Ostéites des os de la face ¶ 22-062-D-10

[2] Marx RE. Pamidronate (Aredia®) and zoledronate (Zometa®) induced

“ Erreur à ne pas commettre


[3]
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Migliorati CA. Biphosphonates and oral cavity avascular bone
Il ne faut pas extraire inconsidérément une dent necrosis. J Clin Oncol 2003;21:4253-4.
douloureuse chez un patient traité par biphosphonates, [4] Lugassy G, Saham R, Nemets A, Ben-Dor D, Nahlieli O. Severe
au risque de voir se développer une dénudation osseuse osteomyelitis of the jaws in long-term survivors of multiple myeloma:
a new clinical entity. Am J Med 2004;117:440-1.
irréversible.
[5] Sugata T, Fujita Y, Myoken Y, Kiriyama T. Successful management of
severe facial pain in patients with diffuse sclerosing osteomyelitis
(DSO) of the mandible using disodium clodronate. Int J Oral
Maxillofac Surg 2003;32:574-5.
biphosphonates, il n’est pas recommandé de suspendre ce [6] Ucok C. Using of disodium clodronate on DSO patients. Int J Oral
traitement, tant les bénéfices en sont remarquables sur la Maxillofac Surg 2003;32:443.
pathologie maligne. En l’état actuel des connaissances et en [7] Soubrier M, Dubost JJ, Ristori JM, Sauvezie B, Bussiere JL.
l’absence de protocole d’étude validé, il faut que les praticiens Pamidronate in the treatment of diffuse sclerosing osteomyelitis of the
concernés soient informés de cet effet secondaire jusqu’à mandible. Oral Surg Oral Med Oral Pathol Oral Radiol Endod 2001;
présent inconnu. La seule recommandation proposée est de 92:637-40.
considérer les patients sous biphosphonates à l’identique des [8] Montonen M, Kalso E, Pylkkaren L, Lindstrorm BM, Lindqvist C.
patients irradiés pour néoplasme des voies aérodigestives Disodium clodronate in the treatment of diffuse sclerosing
supérieures, c’est-à-dire de prévoir une mise en état rigoureuse osteomyelitis (DSO) of the mandible. Int J Oral Maxillofac Surg 2001;
de la denture avant instauration du traitement, et d’assurer un 30:313-7.
suivi strict sur le plan de l’hygiène dentaire, voire de prescrire [9] Carmony B, Bobbitt TD, Rafetto L, Cooper EP. Recurrent mandibular
l’application de gouttières fluorées quotidiennes. [1] pain and swelling in a 37-year-old man. J Oral Maxillofac Surg 2000;
58:1029-33.
Séquelles [10] Baltensperger M, Gratz K, Bruder E, Lebeda R, Makek M, Eyrich G. Is
Leur traitement rejoint les procédés classiques de chirurgie primary chronic osteomyelitis a uniform disease? Proposal of a classi-
réparatrice. fication based on a retrospective analysis of patients treated in the past
30 years. J Craniomaxillofac Surg 2004;32:43-50.
[11] Eyrich GK, Baltensperger MM, Bruder E, Graetz KW. Primary chronic
Protocole de Topazian osteomyelitis in childhood and adolescence: a retrospective analysis of
Il résume la prise en charge des ostéites suppurées : [58] 11 cases and review of the literature. J Oral Maxillofac Surg 2003;61:
• diagnostic précoce ; 561-73.
• drainage du pus ; [12] Lew DP, Waldvogel FA. Osteomyelitis. Lancet 2004;364:369-79.
• cultures bactériologiques et tests de sensibilité aux antibioti- [13] Lew DP, Waldvogel FA. Osteomyelitis. N Engl J Med 1997;336:
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• traitement antibiotique approprié ; [14] Schuknecht B, Valavanis A. Osteomyelitis of the mandible.
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Hygiène buccodentaire, asepsie lors des gestes osseux, respect [17] Suei Y, Tanimoto K, Miyauchi M, Ishikawa T. Partial resection of the
d’une occlusion équilibrée en chirurgie traumatologique ou mandible for the treatment of diffuse sclerosing osteomyelitis: report of
orthopédique, antibiothérapie de couverture, bactéricide à four cases. J Oral Maxillofac Surg 1997;55:410-5.
spectre étroit envers les germes aérobies et anaérobies, lors des [18] Yoshii T, Nishimura H, Yoshikawa T, Furudoi S, Yoshioka A,
gestes à risques (endocardite), sont des règles de base pour Takenono I, et al. Therapeutic possibilities of long-term roxithromycin
réduire encore la fréquence de ces infections. treatment for chronic diffuse sclerosing osteomyelitis of the mandible.
La prise en charge des pathologies néoplasiques et de l’ostéo- J Antimicrob Chemother 2001;47:631-7.
radionécrose fait l’objet d’autres fascicules. [19] Piette F, Reychler H. Pathologie des maxillaires. In: Traité de patholo-
gie buccale et maxillo-faciale. Bruxelles: de Boeck université; 1991.
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■ Conclusion [20] Malmstrom M, Fyhrquist F, Kosunen TU, Tasanen A. Immunological
features of patients with chronic ostemyelitis of the mandible. Int J Oral
Les ostéites de la face sont toujours à considérer comme Surg 1983;12:6-13.
potentiellement graves, nécessitant un traitement précoce, [21] Suei Y, Taguchi A, Tanimoto K. Diagnostic points and possible origin
médical ou médicochirurgical. of osteomyelitis in synovitis, acne, pustulosis, hyperostosis and osteitis
Une meilleure compréhension des formes chroniques primi- (SAPHO) syndrome: a radiographic study of 77 mandibular
tives est nécessaire pour réduire leur incidence, qui semble osteomyelitis cases. Rheumatol 2003;42:1398-403.
augmenter du fait de relations mal précisées avec les [22] Kahn MF, Hayem F, Hayem G, Grossin M. Is diffuse sclerosing
biphosphonates. osteomyelitis of the mandible part of synovitis, acne, pustulosis,
Enfin, rappelons l’intérêt d’une prise en charge multi- hyperostosis, osteitis (SAPHO) syndrome? Analysis of seven cases.
disciplinaire. Oral Surg Oral Med Oral Pathol 1994;78:594-8.
[23] Van Merkesteyn JP, Groot RH, Bras J, McCarrol RS, Bakker DJ.
Diffuse sclerosing osteomyelitis of the mandible: a new concept of its
>
Nous remercions pour leurs précieux conseils les professeurs Daniel Mathieu
etiology. Oral Surg Oral Med Oral Pathol 1990;70:414-9.
et Henri Migaud et les docteurs Eric Senneville et Abdelghni Serghini.
[24] Suei Y, Tanimoto K. Diffuse sclerosing osteomyelitis and florid osseous
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Stomatologie 15
22-062-D-10 ¶ Ostéites des os de la face

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J.-M. Maes (jm-maes@chru-lille.fr).


G. Raoul.
Service de chirurgie maxillofaciale et stomatologie, hôpital Roger Salengro, CHRU Lille, rue du 8-Mai 1945, 59037 Lille cedex, France.
M. Omezzine.
Service de chirurgie maxillofaciale, CHU Sahloul, Route de ceinture 4054, Sousse, Tunisie.
J. Ferri.
Service de chirurgie maxillofaciale et stomatologie, hôpital Roger Salengro, CHRU Lille, rue du 8-Mai 1945, 59037 Lille cedex, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Maes J.-M., Raoul G., Omezzine M., Ferri J. Ostéites des os de la face. EMC (Elsevier SAS, Paris),
Stomatologie, 22-062-D-10, 2005.

Disponibles sur www.emc-consulte.com


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