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Ostéoradionécrose et ostéonécrose
des maxillaires aux bisphosphonates
S. Salino, A.-G. Bodard, Q. Timour
Les étiologies des nécroses osseuses des maxillaires peuvent être multiples. L’ostéoradionécrose (ORN) et
l’ostéonécrose des maxillaires (ONM) aux bisphosphonates (BP) sont les plus fréquentes. L’ORN est
connue depuis presque un siècle. Elle se présente sous forme d’un os « dévitalisé » exposé à travers la peau
ou la muqueuse au sein d’un territoire irradié chez un patient traité pour un cancer, avec absence de
cicatrisation après une période de plusieurs mois. Elle intéresse plus fréquemment la mandibule que le
maxillaire, peut être spontanée, mais survient le plus souvent après un traumatisme (avulsion dentaire).
Elle peut évoluer jusqu’à la fracture osseuse. Son incidence a nettement diminué au cours des trente
dernières années, essentiellement grâce à la mise en place de mesures préventives (technique
d’irradiation, fluorothérapie). La physiopathologie des ORN repose sur des phénomènes d’hypoxie,
d’hypocellularité, d’hypovascularisation et de fibroatrophie. La prise en charge est conservatrice pour les
stades précoces et beaucoup plus invasive dans les stades avancés. L’ostéonécrose des maxillaires (ONM)
en rapport avec un traitement par BP est une entité clinique individualisée beaucoup plus récemment que
l’ORN. Les BP sont des molécules prescrites en oncologie et pour certaines pathologies bénignes
(ostéoporose, maladie de Paget, etc.). L’ONM est une exposition osseuse localisée dans la région
maxillofaciale (os avasculaire, atone, nécrotique), persistant au-delà de 8 semaines après identification et
instauration d’un traitement adéquat, chez un patient traité ou ayant été traité par BP et sans
antécédent d’irradiation craniofaciale. L’atteinte osseuse est souvent très mal délimitée, contrairement à
l’ORN. Il s’agit d’une complication concernant presque exclusivement les patients bénéficiant de BP par
voie intraveineuse pour des pathologies malignes. L’incidence des ONM dans ce contexte est de l’ordre de
1 % à 12 %. L’ONM résulte d’une perturbation de l’activité ostéoclastique due à l’imprégnation osseuse
par les BP, mais la physiopathologie de la maladie est mal connue. Elle est souvent associée à un geste
invasif (avulsion dentaire), sans qu’il soit systématiquement possible de savoir si le geste est la cause de
l’ONM ou s’il ne fait que révéler une ONM sous-jacente. Il n’existe pas de consensus quant à la prise en
charge qui est plus ou moins invasive selon les stades et les auteurs. En l’absence de traitement curatif
probant de l’ONM, les efforts doivent être orientés sur la prévention.
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Épidémiologie
Facteurs de risque et facteurs de protection
2
2
■ Introduction
Physiopathologie 2
L’ostéoradionécrose (ORN) et l’ostéonécrose des maxillaires
Prise en charge thérapeutique 4
(ONM) en rapport avec un traitement par bisphosphonates sont
Prévention 4
les deux principaux types de nécrose de la région maxillofaciale.
¶ Ostéonécrose des maxillaires et bisphosphonates 4 Elles présentent des similarités dans leurs caractéristiques
Bisphosphonates 4 cliniques et radiologiques. Il n’en demeure pas moins qu’il s’agit
Définition 6 de deux entités cliniques bien distinctes. L’objectif de cet article
Épidémiologie 7 est de faire le point sur les connaissances actuelles de ces deux
Facteurs de risque 7 pathologies afin de préciser leurs différences quant au diagnos-
Physiopathologie 8 tic, à l’épidémiologie, aux facteurs de risque, à la physiopatho-
logie et à la prise en charge.
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Ostéoradionécrose et ostéonécrose des maxillaires aux bisphosphonates ¶ 28-865-A-10
Production
Fibroblastes
de cytokines
Myofibroblastes
Nécrose de microvaisseaux Ostéoblastes
Ostéocytes
Ostéoclastes INFß PDGF
Thrombose vasculaire
IL1, IL4, IL6
FGF TGF-ß1
Lésion irréversible de l’ADN,
nécrose de cellules osseuses
Perte tissulaire Perturbation du métabolisme
du collagène
Traumatisme
Ostéoradionécrose
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ischémies locales et des pertes tissulaires. La libération de libres de fibula [23, 34, 36-38, 42]. Elles offrent une base ferme
certaines cytokines suite à l’atteinte des cellules endothéliales autorisant la mise en place d’implants ostéo-intégrés qui
favorise la transformation des fibroblastes en myofibroblastes. permettent une réhabilitation prothétique stabilisée, à la fois
Ces derniers sont caractérisés par un taux de prolifération élevé, fonctionnelle (mastication et phonation) et esthétique [43, 44].
une sécrétion de produits anormaux dans la matrice extracellu-
laire et une faible capacité à éliminer ces produits. Il en résulte Prévention
une désorganisation de la matrice extracellulaire. En outre,
l’action directe de l’irradiation ainsi que les composés oxygénés Indépendamment de l’amélioration de la prise en charge
réactifs et les radicaux libres endommagent de façon irréversible chirurgicale de l’ORN avérée, l’incidence de cette pathologie a
les cellules osseuses (ostéocytes, ostéoblastes et osctéoclastes). La nettement diminué au cours des dernières décennies, passant de
diminution du nombre d’ostéoblastes et leur faible capacité à se plus de 10 % dans les années 1970 à 1-2 % actuellement [11, 13].
régénérer associées à la prolifération des myofibroblastes Cette diminution est directement liée au développement de
aboutissent à la diminution de la matrice osseuse et à son mesures préventives.
remplacement par un tissu fibreux. L’os irradié est alors Ces dernières concernent tout d’abord l’amélioration de la
paucicellulaire, hypovascularisé et fibrosé. Il est susceptible de prise en charge buccodentaire des patients concernés, avant et
faire l’objet d’une réaction inflammatoire tardive en cas de après la radiothérapie. Avant la radiothérapie, un bilan bucco-
survenue d’un traumatisme physique ou chimique. L’ORN peut dentaire clinique et radiologique doit être systématique dans le
alors survenir [10]. but de détecter et d’éliminer tous les foyers infectieux avérés ou
potentiels. En cas d’extraction dentaire, un délai de 3 à 4 semai-
Prise en charge thérapeutique nes doit être observé entre la date de l’avulsion et le début de
la radiothérapie [15]. Après l’irradiation, tout doit être mis en
Les caractéristiques cliniques de l’ORN peuvent aller de la œuvre pour que les dents en place soient conservées. Cela
simple exposition osseuse peu étendue et asymptomatique, prise implique une hygiène buccodentaire et prothétique rigoureuse,
en charge pendant des mois par des traitements conservateurs, l’instauration d’une prévention fluorée (application topique
à des atteintes sévères allant jusqu’à la fracture osseuse et quotidienne d’un gel ou dentifrice fortement concentré en
nécessitant une approche plus invasive. La décision dépend fluor), et un suivi régulier. Les prothèses dentaires doivent être
souvent davantage de l’expérience du chirurgien que de recom- réalisées de façon minutieuse et régulièrement contrôlées afin de
mandations pratiques fondées sur l’évidence [14]. ne pas risquer une effraction muqueuse par traumatismes
mécaniques répétés [20, 45].
Traitement conservateur En outre, les progrès des techniques d’irradiation ont égale-
Les traitements conservateurs sont réservés aux ORN dia- ment contribué à la diminution de l’incidence des ORN. Il a été
gnostiquées précocement et d’étendue limitée. Ils peuvent être démontré que l’avènement de la radiothérapie conformation-
non chirurgicaux : lavages locaux, applications d’antiseptiques, nelle ainsi que l’hyperfractionnement des doses d’irradiation
amélioration de l’hygiène buccale, oxygénothérapie hyperbare ont permis une diminution de cette incidence d’environ
(OHB). Des chirurgies a minima peuvent être également réali- 5 % [19]. De même, le recours de plus en plus fréquent à la
sées (débridement, curetage, séquestrectomie) dans le but RTMI, qui fait appel à de multiples faisceaux d’intensités
d’éliminer les tissus caractérisés par les 3 H et de retrouver un variables, limite les zones de forte irradiation en périphérie de
os vascularisé [14]. la lésion, et diminue ainsi le risque d’ORN [13, 20].
Le traitement des infections secondaires repose sur une
antibiothérapie de type amoxicilline-acide clavulanique ou
fluoroquinolone ; les crises algiques sont traitées par des ■ Ostéonécrose des maxillaires
antalgiques de niveau adapté à l’intensité de la douleur [9, 32].
Le recours à l’oxygénothérapie hyperbare (OHB) a été forma- et bisphosphonates
lisé par Marx dans son protocole de prise en charge des
L’ostéonécrose des maxillaires (ONM) en rapport avec un
ORN [29]. Le principe de l’OHB repose sur le fait que les besoins
traitement par bisphosphonates (BP) est une entité clinique
en oxygène nécessaires aux processus de cicatrisation sont plus
individualisée beaucoup plus récemment que l’ORN. Sa pre-
importants pour un tissu irradié que pour un tissu normal. Un
mière description a été faite en 2003 [46], et elle a fait l’objet de
approvisionnement accru en oxygène au sein d’un os irradié
très nombreuses publications depuis lors.
hypoxique favorise l’angiogenèse et la différenciation de cellules
osseuses [16, 29, 33]. Cependant, la pertinence clinique de ce
traitement reste controversée, les résultats étant parfois contra- Bisphosphonates
dictoires selon les études. Des études prospectives fondées sur le
suivi des patients au long terme sont nécessaires pour évaluer Structure et classification
précisément l’intérêt clinique de l’OHB [14]. Les BP ont été synthétisés pour la première fois en 1865 et ils
ont d’abord été utilisés dans l’industrie textile comme inhibi-
Traitement radical teurs de la corrosion [47] . Leurs applications cliniques sont
Les limites entre une prise en charge conservatrice et un relativement récentes et remontent à une trentaine d’années
traitement radical demeurent relativement mal définies. Dans environ [48]. Ce sont des analogues structuraux des pyrophos-
les cas où l’ORN est réfractaire au traitement conservateur, avec phates naturels au sein desquels l’atome d’oxygène central a été
persistance de douleur, trismus, exposition d’os nécrotique remplacé par un atome de carbone. Il en résulte une structure
surinfecté, parfois associé à une fistule cutanée, voire à une chimique de base du type Phosphate-Carbone-Phosphate (P-C-P)
fracture, une thérapeutique plus agressive est requise : une (Fig. 2). Cette dernière confère aux BP une résistance à l’hydro-
chirurgie interruptrice est alors nécessaire [34, 35]. Elle concerne lyse enzymatique et permet leur utilisation en médecine [49]. Il
le plus souvent la mandibule, avec l’ensemble des conséquences en résulte que les BP ne sont pas transformés en métabolites et
fonctionnelles, esthétiques et psychosociales qui en découlent. sont excrétés inaltérés. Les deux groupements phosphates
Une reconstruction immédiate de l’arc mandibulaire est réalisée jouent un rôle dans la fixation à l’os et dans l’activité antiré-
lorsque cela est possible, au moyen d’attelles de reconstruction, sorptive qui caractérisent les BP [50] . La structure P-C-P est
d’autogreffes osseuses non vascularisées, de lambeaux régionaux complétée par des chaînes R1 et R2 propres à chaque molécule,
pédiculés, ou de transplants osseux vascularisés libres [36]. Ces avec ou sans groupement aminé. Les « non-amino »-BP (étidro-
derniers peuvent être prélevés au niveau de la fibula [34, 36-38], nate, clodronate, tiludronate) sont les BP de première généra-
de la crête iliaque [34], de la scapula [34, 39], du radius [40] ou tion caractérisés par une puissance relativement faible. Les
d’une côte [41]. Ces reconstructions donnent les résultats les plus « amino »-BP (pamidronate, alendronate, risédronate, ibandro-
fiables tant sur le plan fonctionnel qu’esthétique, particulière- nate, zolédronate) appartiennent aux deuxième et troisième
ment pour ce qui concerne les transplants osseux vascularisés générations et sont plus puissants (Tableau 1) (Fig. 2).
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Ostéoradionécrose et ostéonécrose des maxillaires aux bisphosphonates ¶ 28-865-A-10
L’affinité des BP pour l’hydroxyapatite dépend principalement Certains BP ont une action antiangiogénique. C’est le cas de
de la composition et de la structure tridimensionnelle des l’acide zolédronique qui inhibe la prolifération des cellules
groupements R1 et R2 de la molécule. De petites modifications endothéliales, du facteur de croissance des fibroblastes (fibroblast
à ces niveaux peuvent modifier considérablement l’affinité. growth factor – FGF) et du facteur de croissance endothélial
Ainsi, cette affinité pour l’hydroxyapatite diffère selon le type de vasculaire (vascular endothelial growth factor – VEGF). Il agit
BP et influence probablement la variabilité de leur distribution également sur l’adhésion et la migration des cellules
dans l’os, leurs effets biologiques et leur durée d’action. Des endothéliales [54].
Tableau 1.
Structure et puissance des bisphosphonates (BP) commercialisés.
DCI Nom commercial Voie d’administration Puissance Indications
Bisphosphonates première génération
Étidronate Didronel® Per os 1 Ostéoporose
Clodronate Clastoban® Per os/i.v. 10 Oncohématologie
Lytos® Per os 10 Oncohématologie
Tiludronate Skélid® Per os 10 Maladie de Paget
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Tableau 2.
Stadification clinique des ostéonécroses des maxillaires (ONM) [56].
Indications
Les BP sont utilisés dans le traitement de certaines patholo-
gies malignes telles que le myélome multiple, les métastases
osseuses des tumeurs solides et l’hypercalcémie maligne. Ils sont
également indiqués dans la prise en charge de plusieurs types de
pathologies non cancéreuses au premier rang desquelles figure
l’ostéoporose. La maladie de Paget, la dysplasie fibreuse,
l’ostéogenèse imparfaite, la nécrose aseptique de la hanche et le
syndrome SAPHO (synovite, acné, pustulose, hyperostose,
ostéite) peuvent également être des indications de traitement
par BP. Ils peuvent être prescrits par voie orale ou par voie
intraveineuse selon les molécules et les indications. Les pres-
criptions intraveineuses sont la plupart du temps associées à
une puissance plus importante.
Figure 4. ONM mandibulaires multiples : face interne de la région
molaire droite (1), région canine droite (2, fistule), région canine
Définition gauche (3).
L’ONM figure parmi les effets secondaires potentiels d’un .
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Facteurs de risque
Les principaux facteurs de risque sont en rapport avec le
traitement par BP lui-même (puissance de la molécule, voie
d’administration, durée du traitement et dose cumulée) et avec
des facteurs buccodentaires (gestes invasifs, mauvaise hygiène
buccodentaire).
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and Mineral Research (ASBMR) [55] . Cependant, il n’existe des ONM avérées font encore l’objet de discussions. La compré-
actuellement pas de preuve formelle que ces thérapeutiques hension relativement limitée de la physiopathologie de cette
augmentent effectivement le risque d’ONM [66, 72]. L’ostéopo- nouvelle affection ne permet pas, à l’heure actuelle, d’instaurer
rose, en revanche, a été retrouvée comme un facteur de risque un traitement étiologique véritablement éclairé. C’est pourquoi
significatif parmi les patients pris en charge pour un myélome de nouvelles recherches prospectives sont nécessaires afin de
multiple [64]. préciser la conduite à tenir [55, 63, 83].
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Chez les patients recevant un bisphosphonate dans le cadre d’une osseux traumatisant les tissus mous et dans les cas de sympto-
ostéoporose/maladie de Paget, il est recommandé : matologie douloureuse associée (Afssaps) [56, 70, 72]. Les partisans
• de réaliser un suivi buccodentaire : celui-ci est pratiqué par un de cette approche justifient le recours à un curetage osseux a
chirurgien-dentiste ou un stomatologue au moindre symp- minima par le fait que les limites de l’ONM sont floues. En
tome buccodentaire et, comme recommandé dans la popula- effet, contrairement à l’ORN pour laquelle il est habituellement
tion générale, au minimum une fois par an ; possible de réaliser un curetage de l’os nécrotique jusqu’à
• d’effectuer les avulsions dentaires, lorsqu’elles sont nécessai- atteindre un os normalement vascularisé, les limites de l’ONM
res, sous traitement antibiotique et de la façon la moins proprement dite sont mal définies en raison de l’hypovascula-
traumatisante possible. La chirurgie nécessaire est réalisée en risation de l’os environnant. Cependant, une lampe à fluores-
évitant de lever un ou des lambeaux d’épaisseur totale ; s’il cence permettrait de préciser ces limites et pourrait guider la
existe des problèmes de fermeture de la plaie, on privilégie un chirurgie d’exérèse [85] . Enfin, le traitement laser des ONM
lambeau d’épaisseur partielle pour préserver au mieux la semble donner des résultats encourageants, malgré le peu de
vascularisation de l’os sous-jacent. recul et la nécessité d’études sur ce type de prise en charge [86].
Les données actuellement disponibles ne permettent pas de
considérer que la prise de BP pour une ostéoporose est une Traitement plus invasif
contre-indication à la mise en place d’un implant dentaire.
D’autres auteurs prônent une approche chirurgicale plus
Recommandations générales concernant les patients sans évidence
systématique en complément des traitements médicaux. Le but
d’ostéonécrose, avant ou pendant un traitement par bisphosphonate
i.v. ou oral (situations 1 et 2) : est d’obtenir une fermeture muqueuse pérenne et donc un
• les soins dentaires peuvent être effectués en ville ou à isolement de l’os par rapport à la cavité buccale, évitant ainsi
l’hôpital ; les surinfections secondaires. Le taux de succès de la prise en
• le chirurgien-dentiste est invité à questionner le patient afin charge serait alors supérieur [76], particulièrement lorsque la
de s’assurer que celui-ci a été correctement informé du risque chirurgie est réalisée rapidement après l’apparition de
d’ONM et de la nécessité de maintenir une bonne hygiène l’ONM [87]. L’association d’un traitement conservateur au laser
dentaire ; et d’une chirurgie d’exérèse précoce donnerait les meilleurs
• le patient doit être informé de la nécessité de signaler toute résultats [88]. L’Afssaps déconseille le recours aux chirurgies
mobilité dentaire ou toute douleur, gonflement, ou inflam- reconstructrices de type transplants osseux vascularisés libres
mation de la muqueuse gingivale à son chirurgien-dentiste ou après résection interruptrice mandibulaire. Néanmoins, cela a
à son (ses) médecin(s). été récemment décrit par certaines équipes qui concluent à une
faisabilité de cette prise en charge [89, 90].
Patients atteints d’une ostéonécrose avérée
Fenêtre thérapeutique
Le patient doit être impérativement adressé à un service hospitalier
de chirurgie maxillofaciale, d’ORL ou d’odontologie. Dans En cas de nécessité d’avulsion dentaire chez un patient traité
l’attente de la prise en charge hospitalière, il est recommandé : par BP ou de curetage chirurgical d’une ONM avérée, la ques-
• de réaliser un bilan radiologique (panoramique dentaire) afin tion d’une éventuelle fenêtre thérapeutique se pose.
d’apprécier l’importance de la nécrose et la présence éven- Rien ne permet actuellement d’affirmer que l’arrêt du traite-
tuelle d’un séquestre ; ment (arrêt dont la durée serait à définir) améliore significati-
• d’éviter tout geste chirurgical ; vement la cicatrisation postextractionnelle [91]. En outre, un
• de traiter médicalement la douleur ; arrêt, même temporaire, des BP peut favoriser la progression de
• de poursuivre une hygiène buccodentaire stricte. la maladie pour laquelle ils sont prescrits (lésions ostéolytiques,
Des rinçages quotidiens à l’aide d’une solution antiseptique métastases, douleurs, etc.) [92].
(chlorhexidine aqueuse 0,1 %) sont recommandés en présence
d’ulcérations avec zone d’os nécrotique visible en bouche.
Les traitements chirurgicaux ne doivent s’envisager qu’a minima. Prévention
Il convient de préférer une chirurgie de propreté : régularisation
des bords traumatisants les tissus mous environnants, élimina- Les traitements dont nous disposons actuellement, qu’ils
tion de séquestre mobile. En cas de fractures et lorsque la soient conservateurs ou qu’ils privilégient une attitude inter-
nécrose osseuse envahit largement la mandibule, il faut éviter ventionniste plus invasive, ne donnent globalement pas de
les reconstructions par greffes osseuses libres ou pédiculées. résultats probants, l’ONM continuant à évoluer la plupart du
Après résection de l’os nécrotique au voisinage de la fracture, un temps. Cela explique sans doute au moins partiellement
fixateur externe peut être envisagé ou, mieux, une plaque de l’absence de consensus des auteurs quant aux modalités de prise
reconstruction avec des ancrages vissés les plus éloignés en charge des ONM. C’est pourquoi, en l’absence de traitement
possibles de la zone de nécrose. curatif efficace et éprouvé, la plupart des publications récentes
Il est nécessaire d’informer le médecin prescripteur de la complica- insistent sur l’importance capitale d’une approche préventive
tion du traitement par bisphosphonates. La poursuite du traitement des ONM [63, 73, 76, 93].
par BP doit être décidée au cas par cas par le médecin Les mesures préventives préconisées s’appliquent avant et
prescripteur. pendant le traitement par BP. Avant l’instauration du traite-
ment, un bilan buccodentaire clinique et radiologique
Considérations générales sur la prise en charge (orthopantomographie associée ou non à des clichés rétroalvéo-
des ostéonécroses maxillaires avérées laires) doit être réalisé, suivi d’une mise en état buccodentaire.
La prise en charge des ONM avérées demeure problématique Celle-ci consiste à éliminer les éventuels foyers infectieux avérés
et l’attitude n’est pas consensuelle : l’approche est plus ou ou potentiels par avulsions ou traitements dentaires conserva-
moins radicale en fonction du stade de l’ONM et selon les teurs, à réaliser un assainissement parodontal (détartrage et
auteurs [55, 56]. instauration d’une hygiène buccale rigoureuse) et à éliminer
toutes les causes possibles de traumatisme muqueux. Le patient
Traitement conservateur doit également être informé des risques encourus et du rôle qui
Les traitements conservateurs reposent sur une antibiothéra- lui incombe dans la prévention de l’ONM. Pendant le traite-
pie à large spectre au long cours (pénicillines, macrolides ou ment, un suivi clinique (et radiologique si nécessaire) régulier
tétracyclines), associée à des rinçages antiseptiques pluriquoti- tous les 4 à 6 mois est nécessaire pour intercepter tout problème
diens (chlorhexidine) et à des antalgiques si nécessaire. Cette et le gérer de la façon la moins invasive possible [55].
approche permettrait une guérison dans la majorité des cas Des études récentes ont démontré que le risque de déclencher
selon certains auteurs, notamment pour la prise en charge une ONM diminue de façon significative parmi les patients
d’ONM d’étendue limitée [84] . Une chirurgie a minima est pour lesquels ces mesures préventives avaient été instaurées,
néanmoins souvent associée dans le but de régulariser les bords comparés aux patients qui n’en avaient pas bénéficié [94, 95].
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Salino S., Bodard A.-G., Timour Q. Ostéoradionécrose et ostéonécrose des maxillaires aux
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