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Stephane LARRIEU - marcheprime3314@gmail.

com - 202303/954491/1977321
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Abîme
Une campagne historique et horrifique
pour Colonial Gothic

Crédits
Ecrit par Trickytophe
Avec l’aide de Thomas Munier
Relecture : Batro, Thomas Munier
Illustration de couverture : Fred Dalphin
Illustrations intérieures : domaine public, Emmanuel Roudier
Cartographie : Akae
Mise en page : Tony Martin

Remerciements :
Merci à Rogue Games pour nous avoir permis de publier une campagne inédite en français !
Les souscripteurs pour avoir financé cette campagne. Sans vous, rien n’aurait été possible. MERCI.
Trickytophe remercie tous ceux qui liront et joueront cette campagne. Amusez-vous !
Sommaire

Introduction 3

I - Peur sur Québec 5

II - Apparences 14

III - Nos fautes 25

IV - Du sang et des larmes 38

Annexe : protagonistes et créatures 55

Stephane LARRIEU - marcheprime3314@gmail.com - 202303/954491/1977321


Introduction 3

ette campagne en quatre parties, intitulée « Abîme », fait découvrir aux joueurs plusieurs facettes de

C Colonial Gothic ainsi que la richesse de son contexte historique et horrifique.

Les différents scénarii qui la composent amèneront les personnages à fréquenter le surnaturel et à combattre les
horreurs de la Nouvelle-France mais pas que… Les personnages devront également survivre au climat, à la guerre,
aux complots, etc. et à une menace complexe, insidieuse et impitoyable.

Parallèlement, ils pourront rencontrer divers acteurs, plus ou moins majeurs, réels ou imaginaires, de cette fin
d’époque coloniale : découvrir ainsi la culture amérindienne et ses mythes, côtoyer les agents des nations et leurs
plans, se faire des alliés précieux ou des ennemis impitoyables, entrevoir une autre réalité cauchemardesque et
peut-être trouver leur place au sein de la Compagnie des Cent-Associés malgré la chute inexorable qui semble se
profiler…

Résumé des épisodes

● Scénario I : « Peur sur Québec »

Ce scénario d’ouverture est tourné vers l’investigation urbaine. Il se déroule à Québec et peut suivre les
événements du scénario d’introduction : “le Comptoir Perdu” présent à la fin du livre de base. Un tueur menace la
ville et sème la panique. Derrière cette histoire se cache une sombre malédiction. Cette aventure sera l’occasion de
faire d’étranges rencontres… fantômatiques. Déjà, les pions se mettent en place en prévision de la chute, l’abîme
s’entrouvre…
● Scénario II : « Apparences »

Loin des horreurs du surnaturel, ce scénario d’espionnage aux relents politiques va confronter les personnages
à une menace plus terre-à-terre mais tout aussi dangereuse  : celle de la guerre contre les Anglais avec en
arrière plan leurs velléités contre Québec. Seigneurs terriens, argent, complots et action seront au rendez-vous.
Les personnages auront même l’occasion de rencontrer le Maréchal Louis-Joseph de Montcalm envoyé
expressément par le Roi pour défendre la Nouvelle-France.

● Scénario III : « Nos fautes »

De nouveau confrontés à l’horreur alors que la Guerre de Conquête s’accélère, dans ce scénario tourné vers
la culture amérindienne, les personnages vont plonger dans un autre monde et ce dans tous les sens du terme.
Au programme, négociations intertribales et voyage éreintant pour tenter d’éviter le pire ! Tout se paye et le
châtiment se rapproche.

● Final, scénario IV : « Du sang et des larmes »

La Nouvelle-France est menacée de toutes parts ! Québec est à bout de souffle ! Le surnaturel est réveillé, l’horreur
est aux portes de la civilisation, les ennemis sont innombrables et sournois. Les personnages en ont pris conscience
tout au long de leurs aventures depuis leur entrée au sein de la Compagnie. En plein siège, alors que les plaines
se couvrent de sang, il serait temps de trouver de nouveaux alliés. Ce final ouvre de nouvelles perspectives et
permettra aux joueurs d’asseoir leur rôle et leur statut auprès des mystérieux Cent-Associés !

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I - Peur sur Québec

Présentation
ette aventure est le premier chapitre et l’introduction de la campagne Abîme. Néanmoins, elle peut aussi

C être jouée de manière indépendante. Comme son nom l’indique, elle se déroule à Québec, la capitale
emblématique de la Nouvelle-France. Vous trouverez un descriptif complet de la ville à cette époque dans
le supplément Québec 1754.

Dans ce scénario, les tout nouveaux membres de la Compagnie vont faire plus ample connaissance avec
leur supérieur et coordinateur direct, Robert Campagne. Celui-ci est le représentant influent et officiel des
Cent-Associés en ville.

Les personnages seront surtout confrontés à une sinistre histoire de fantôme assassin. Plusieurs meurtres rapprochés
vont démontrer au groupe que la multiplication actuelle des événements surnaturels en Nouvelle-France est bel
et bien une réalité.

Cette aventure citadine met également en scène une autre facette importante de l’univers mystique développé
dans Colonial Gothic : la porosité entre la Colonie et les Mille-Et-Un-Vaux, la dimension forestière, spectrale et
terrifiante qui pourrait à terme tout engloutir. Vous trouverez un petit guide pratique des Mille-Et-Un-Vaux dans
l’annexe du livre de base.

Ce scénario volontairement ouvert permettra aussi aux nouvelles recrues de tisser des relations avec des
personnages-non-joueurs clés.
Ambiance musicale

Voici deux liens vers quelques morceaux à écouter pendant toute cette campagne :
♦ https://neurosis.bandcamp.com/album/honor-found-in-decay
♦ https://avantgardemusic.bandcamp.com/album/the-sachems-tales
Vous pouvez aussi jeter un oeil à cette playlist, il faudra trier selon vos envies mais c’est une
bonne base pour travailler l’ambiance sonore de vos parties :
♦ http://www.terresetranges.net/forums/viewtopic.php?id=892

Synopsis
Les personnages sont conviés par Robert Campagne à venir rendre compte de leurs dernières activités.

Conseil au Meneur
Si vous jouez ce scénario à la suite du “Comptoir Perdu”, les personnages doivent informer
leur commanditaire des terribles événements de Roc-Plat et de la présence de Mandoags dans le
secteur. Sinon, vous pouvez imaginer une courte mission précédente dont les personnages doivent
maintenant effectuer un compte-rendu. Par exemple : la traque infructueuse d’une mystérieuse
créature repérée par des charbonniers de Québec. Vous pouvez aussi faire jouer un scénario de votre
cru au préalable et enchaîner avec celui-ci.

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Inquiet, Robert Campagne profite de leur entretien pour leur faire part d’agressions récentes ayant causé la mort
de trois jeunes québécois (dans l’ordre des disparitions : Accriline Fise, Thaïse Rocquier et Marc Daumanges).
Ces morts mettent la ville en émoi et causent des tensions au sein de la population.
Les événements sont difficilement gérables pour le Conseil souverain qui est déjà bien malmené par le contexte
de la guerre contre les Anglais qui débute. D’une manière générale, les autorités sont remises en cause par les
habitants pour leur impuissance à les protéger. La population est déjà très inquiète à cause du conflit qui gronde.
En fait, ces crimes pourraient être la goutte d’eau qui ferait déborder le vase de la colère et du ras-le-bol.

Par la suite, eux-mêmes témoins d’une nouvelle agression, les aventuriers vont faire la rencontre de la jeune et
étrange Diane, une enfant médium au pouvoir surprenant. Les personnages vont dès lors comprendre qu’une
créature surnaturelle est à l’origine des drames.

De fil en aiguille, nos enquêteurs découvriront l’existence de Renaud Duval, ou plutôt de son fantôme, revenu
d’entre les morts pour continuer à exercer sa sinistre besogne. Sa maison hantée ouvre sur les Mille-Et-Un-Vaux.
Au sein de sa demeure de l’épouvante, la puissance ravageuse de l’égrégore commence à manifester sa présence
au sein de Québec même !

Introduction : Voir Québec


Nous sommes en hiver, fin janvier 1754. Il fait froid et tout le monde attend le printemps avec impatience après un
hiver assez rude. Les personnages ont fini leur traversée des Plaines d’Abraham, bien enneigées à cette saison.
Ils arrivent près du Saint-Laurent, “là où la rivière se rétrécit” (Stadacona en amérindien, l’autre nom de Québec).
Au sommet et au bas de la colline qui domine le cours d’eau est planté Québec, le symbole d’une civilisation en
lutte contre la Nature sauvage. “L’Enceinte”, la fortification qui entoure le haut de l’agglomération est visible de
loin.

Les personnages se rendent directement auprès de Robert Campagne dont la belle demeure se situe dans la Haute-
Ville, non loin du Fort Saint-Louis où se trouvent le Gouverneur Général de Vaudreuil et le Conseil souverain.

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Québec
Québec est situé sur le cap Diamant qui domine le fleuve. Elle est divisée en deux grands
quartiers : la Haute-Ville et la Basse-Ville (selon leur élévation par rapport au fleuve et à la
colline). Québec trouve ses origines dans l’Habitation (un ensemble de premiers bâtiments
pionniers) fondée par Samuel de Champlain en 1608. La capitale est le poumon de la Colonie,
son centre et le reflet de tous ses paradoxes.
C’est aussi une ville cosmopolite toujours en ébullition, riche d’histoire et forte du courage
de ses habitants face à toutes les adversités. A l’époque, on y croise des Colons, des nouveaux
arrivants issues de diverses nationalités européennes mais aussi des Amérindiens originaires
des multiples tribus neutres ou alliées. Le gratin aristocratique local ou fraîchement débarqué y
côtoie la racaille la plus vulgaire. Les travailleurs fourmillent et les explorateurs de tout poil y
passent divers marchés plus ou moins moraux. Les rues sont souvent tordues et sales (surtout
au abord du Saint-Laurent, dans la Basse-Ville). Les chantiers de construction ou de démolition
ne manquent pas car la capitale semble en constant changement.

Robert est un homme impressionnant. Il tient plus de l’ancien soldat que du marchand. Son charisme et son gabarit
en imposent. Il parle vite et bien. Il ne mâche jamais ses mots. Il accueille les personnages dans son cabinet de
travail situé à l’étage près des chambres. De nombreux papiers administratifs et commerciaux s’entassent sur son
bureau. L’endroit est assez austère.

Conseils pour le meneur

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Profitez aussi de cette entrevue pour donner quelques informations supplémentaires sur la
Compagnie des Cent-Associés à vos joueurs : son histoire, ses buts actuels et finalement la
fonction des personnages en tant que jeunes recrues prometteuses. Référez vous au livre de
base pour cela.

Campagne écoute leur rapport avec attention et demande de nombreux détails pertinents. L’homme n’est pas
hautain, loin de là. Il traite ses interlocuteurs à leur juste valeur en reconnaissant leurs compétences, sans préjugé
de rang social ou d’origine. C’est un ancien militaire toujours en phase avec le terrain. Il est pragmatique et sait se
faire respecter. Pour autant, s’il est interrogé sur son passé ou son parcours, Robert reste vague. Il a même tendance
à changer de sujet. En fait, c’est un pur Colon. Né à Québec, c’est un ancien militaire de carrière. Cet officier
brillant a été démobilisé en raison d’une sale blessure reçue face à des Iroquois. Il a été recruté rapidement par les
Cent-Associés. Les origines commerçantes de sa famille, son intelligence, son charisme et sa bonne réputation en
font un élément essentiel pour la Compagnie.

Si les personnages ont participé à l’expédition à Roc-Plat, Robert les informe qu’il va intercéder auprès du Conseil
souverain pour qu’un corps expéditionnaire solide soit envoyé au plus vite sur place pour “faire le ménage”.
Il insiste sur l’importance stratégique de l’endroit pour les temps à venir. Sinon, il écoute simplement le compte-
rendu de ses agents suite à l’aventure qu’ils ont vécu.

Néanmoins, leur supérieur semble soucieux. Tout au long de l’entretien, Robert fixe par intermittence un rapport de
la milice locale où figurent trois noms soulignés et annotés. Après le laïus des personnages, il les invite à rester et
explique les tristes événements ayant frappé la ville récemment : l’assassinat inexpliqué et sauvage de trois jeunes
gens en moins de dix jours ! Actuellement débordée par les velléités anglaises et les tensions qui s’enveniment au sein
de la population soumise à rude épreuve, la Compagnie serait ravie que les personnages puissent s’intéresser à cette
étrange affaire. En effet, trois meurtres si rapprochés (une série ?) inquiètent Robert d’autant plus qu’aucune piste
sérieuse ne semble avoir été trouvée pour arrêter le meurtrier. La foule gronde et on commence à parler d’un tueur
diabolique, au sens premier du terme… Certains, encore plus vils ou imbéciles, n’hésitent pas non plus à utiliser ces
tueries pour faire des Sauvages présents en ville des boucs émissaires tout indiqués. Quoiqu‘il en soit, les Québécois
accusent les autorités de laxisme et d’incompétence. Bref, malgré qu’ils mériteraient sans doute un peu de repos,
Robert aimerait que les personnages rassemblent des informations et, si possible, aident à la capture du scélérat.
Janvier 1754 : les prémices de la guerre

La Guerre de la Conquête n’a pas véritablement encore éclaté. Cependant, les tensions franco-
anglaises sont bien présentes et ce depuis longtemps (la guerre intercoloniale à venir ne sera
pas la première). Surtout, les enjeux territoriaux et commerciaux de la Vallée de l’Ohio n’ont
jamais été aussi prégnants. Ainsi, des premières escarmouches ont lieu. Les Colons français
commencent à construire des fortins et on s’arme de plus en plus. Parallèlement, les Anglais
ne sont pas en reste et “poussent” les frontières. Des deux côtés, les autorités commencent à
compter leurs forces et à déployer leurs troupes. Les rumeurs d’une guerre inévitable circulent
de plus en plus. Il ne manque plus qu’une étincelle. La population est inquiète, d’autant que la
vie quotidienne n’est déjà pas facile et qu’en Europe les rivalités et les menaces augmentent
également (la future Guerre de Sept Ans).

Chapitre I : Le mal rôde


Par commodité, les personnages sont tous logés à Québec dans la Basse-Ville aux frais de la Compagnie.
Voici plusieurs possibilités en la matière, utilisez celle(s) qui vous semble(nt) la plus adéquate :

p  “La Pension de la Mère Françon”, un établissement à tarif réduit bien tenu par ladite Madame
Françon, une femme forte au sacré caractère mais avec le coeur sur la main.

p  “Au Souvenir de Nantes”, une auberge rustique à la clientèle peu recommandable gérée par Ernest
Combes, un ancien coureur des bois courageux originaire de Nantes.

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p  Sachez aussi que Québec recèle de nombreuses habitations non occupées attendant d’être louées ou
squattées (rappelez-vous : la Nouvelle-France a un réel problème de peuplement).

  Vous pouvez pousser le vice jusqu’à faire loger l’un des personnages dans un des logements récemment rendu
“disponible” par la mort d’une des victimes.

L’ambiance en ville est tendue, faites-le ressentir à vos joueurs à travers quelques scénettes du quotidien :
conversation avec un voisin, altercation entre deux débatteurs dans une taverne, discussion entre coureurs des
bois, etc. Les Québécois sont aux aguets. Les rumeurs les plus contradictoires se répandent au sujet des Anglais
et de leur probable prochaine invasion de la colonie. Certains parlent de carnages perpétrés par les Iroquois, les
grands alliés des Manteaux rouges (Red coats). Certains espèrent l’arrivée de renforts venus de France. Bref, la
populace gronde et se lamente. Si la guerre éclate, la situation de Québec pourrait devenir intenable car pour les
Anglais prendre la capitale reviendrait à prendre la Nouvelle-France.

En s’intéressant aux meurtres et en interrogeant les citadins, les personnages apprendront les faits suivants sur
Accriline, Thaïse et Marc :

p  Les victimes vivaient toutes dans le même quartier près du centre de la Basse-Ville, le quartier Notre-
Dame-des-Victoires. Il s’agit d’un secteur habité par la population québécoise la plus modeste. Ce quartier
est centré autour de la vieille église du même nom, un bâtiment emblématique issu de la fondation de
Québec.

p  Accriline et Thaïse, les deux jeunes femmes attaquées, avaient sensiblement le même âge, aux alentours
de 16/18 ans. Elles avaient un physique relativement similaire : des cheveux longs clairs, une assez grande
de taille pour l’époque (une description proche de celle de feu Marie Duval, la pauvre épouse de Renaud,
voir plus loin à ce sujet).

p  Marc était un ancien enfant de choeur de l’église. Il était âgé de 20 ans. Fils unique, il avait repris la
petite épicerie familiale l’année dernière à la mort de son père décédé de maladie. Très pieux, il était issu
d’une famille proche du clergé local. Par tradition, tous les garçons deviennent des servants d’autel de
l’église Notre-Dame-des-Victoires. Renaud a tué Marc car il n’a jamais supporté ces polisseurs de crucifix.

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p  Les agressions ont toutes eu lieu dans le quartier au crépuscule ou en début de nuit. A chaque fois,
il n’y a eu aucun témoin direct et aucun suspect n’a été vu ou même entraperçu. Les crimes ont été rapides
et expéditifs, d’une rare férocité. Chaque victime est morte étranglée ou battue à mort avec divers objets à
disposition (une bûche, une corde à noeud, même un vieux fer à cheval, etc.).

p  Accriline, Thaïse et Marc étaient sans histoire : pas encore mariés, pas d’enfant, etc. Tous les trois étaient
jeunes, connus pour être plutôt prudes, pieux et issus de familles modestes respectables (ils visitaient donc
des tombes familiales au cimetière assez régulièrement et fréquentaient l’église. C’est à ces endroits que le
fantôme de Renaud les a repéré).

Si les personnages se renseignent dans le quartier Notre-Dame-des-Victoires et plus particulièrement à l’église


(sachez d’ores et déjà que des registres paroissiaux y sont entreposés, cela aura de l’importance pour la suite de
cette investigation), ils y rencontrent le Père Pierre Corbin et apprennent les informations suivantes :

p  La population est à la fois terrorisée et excédée. Le quartier est une poudrière !

p  L’église a toujours été très fréquentée par les habitants du quartier. C’est un point de repère pour eux
et ce dans tous les sens du terme. D’ailleurs, le quartier porte son nom en respect pour ce lieu fondateur.

p  A contrario, le Père Pierre est un ecclésiastique usé, si ce n’est désabusé. Il est loin d’incarner un
prêtre idéal dans un quartier si fervent. Il semble beaucoup s’interroger sur sa propre foi et ne supporte
visiblement plus la Nouvelle-France. A l’image de son physique sec et nerveux, il est aigri et taciturne.
Il rêve de retourner en France, loin de toute cette sauvagerie !

Quoiqu’il en soit, à un moment ou à un autre de leur investigation, à la tombée de la nuit, les personnages sont
alertés par des cris de détresse. Une jeune fille est de nouveau sauvagement agressée dans une ruelle voisine.
Elle se débat mais elle est happée par les ombres environnantes, comme attirée par une silhouette indistincte mais

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puissante. Les personnages accourront sans doute à son secours.

L’agression :
La température dans la ruelle est glaciale. Les ténèbres y sont plus épaisses. Les sons semblent étouffés et on
entend des bruits anormaux - comme du vent sifflant dans des branches lointaines. La jeune femme est ballotée
comme une poupée de chiffon, anormalement suspendue en hauteur. Elle est terriblement malmenée avant de
finir fracassée contre un mur. S’ils se précipitent, les personnages sont surpris de ne pas tomber nez-à-nez avec
l’agresseur. En effet, vu l’étroitesse de la ruelle et leur temps de réaction, il est impossible que celui-ci se soit
échappé… Les membres de la Compagnie n’ont vu personne hormis cette vague silhouette furtivement aperçue à
leur arrivée (tests d’Observation et d’Athlétisme).

Conseils pour le meneur


Soyez affreux dans vos descriptions : bruits d’os éclatés, sang qui macule le visage de la
victime, hurlements, demande de pitié...! Cette scène doit mettre en avant le côté surnaturel et
terrifiant de cette agression.

L’interrogatoire :
Les hurlements de la pauvre victime (une certaine Isabelle Fray, une autre fille sans histoire du quartier au
physique relativement similaire à celui d’Accriline et Thaïse) alertent le voisinage et très vite la milice débarque.
Les personnages sont emmenés manu militari sous les regards véhéments de la foule qui commence déjà à
s’amasser malgré l’heure tardive. La tension est palpable. Les miliciens et leur sergent nommé François Acourt
cherchent surtout à éviter une explosion de colère populaire. Interrogés par la suite au calme dans la maison
proche d’un des miliciens, les personnages font face à l’incrédulité des gardes qui les soupçonnent d’y être pour
quelque chose dans cette quatrième et odieuse agression. Néanmoins, sans preuve concrète, ils seront relâchés
(les personnages peuvent aussi faire jouer leur connexion avec l’influent Robert Campagne pour se dépatouiller
de cette affaire).
Diane :
A la sortie de ce rude interrogatoire, les personnages sont suivis maladroitement par une petite fille d’environ 8 à 9
ans. Repérée et interpellée par le groupe, elle explique de manière embrouillée que ses parents sont venus à Québec
pour des achats il y a quelques jours et qu’elle les a perdus. La fille des rues dit s’appeler Diane. Etrangement,
elle n’arrive pas à se rappeler son nom de famille, ni le prénom de ses parents, ni d’où elle vient exactement, ni
depuis quand elle est égarée, etc. Elle paraît déboussolée. Par contre, son vocabulaire est élaboré. Son comportement
et son attitude laissent supposer une éducation de famille aisée et coloniale. Au-delà, si effectivement Diane est
sale et mal en point après plusieurs jours dehors, c’est une enfant soignée et bien nourrie.

Interrogée sur la raison de sa présence à la sortie des personnages, Diane explique qu’elle a déjà vu “l’homme qui
attaque les gens” et qui s’est sauvé lorsque le groupe est arrivé dans la ruelle. Elle raconte qu’une nuit (rappelez-
vous : au-delà de son jeune âge, Diane semble avoir l’esprit embrumé avec un rapport au temps et à l’espace),
elle s’était réfugiée au cimetière à l’abri à l’intérieur d’un mausolée. Elle a alors vu l’homme qui rôdait parmi les
tombes en jurant. Il semblait très en colère.

En réalité Diane est une enfant très particulière. Elle a été intentionnellement abandonnée par ses parents, des
nobles vivants en dehors de Québec, en raison de son pouvoir dérangeant. Son père et sa mère voyaient en elle
une enfant du Diable à cause de sa capacité à voir les morts ! Diane est une puissante médium malgré son jeune
âge. Son état mental embrouillé s’explique à la fois par le traumatisme subi mais surtout parce que ses parents
ont utilisé un élixir alchimique d’oubli contre elle afin d’effacer leurs traces. Depuis son abandon, Diane survit
difficilement en mendiant ou en volant. Si elle a suivi les personnages, c’est parce qu’elle les a vus “affronter
l’horrible monsieur qui tue les gens”. Diane est une enfant attachante. Elle-même se sent à l’aise auprès des
personnages et fera tout pour les suivre. Elle tente de s’attirer leur protection et leur bienveillance. L’histoire de
Diane est le fil rouge de cette campagne. Elle réapparaîtra au cours des prochains scénarii.

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Chapitre II : Démence
Au cimetière Diane montrera aux personnages l’endroit où elle a aperçu le “méchant monsieur”. Les personnages
remarquent alors dans la petite allée les tombes de la famille Duval :

p  Renaud Duval est mort il y a 20 ans en 1734, à l’âge de 24 ans (né en 1710).

p  Son épouse Marie Duval (née Corneau) est décédée 2 ans avant lui, en 1732, à l’âge d’un peu moins
de 20 ans (née en 1712).

p  La jeune soeur de Renaud, Loïse Duval, est morte en 1723 à l’âge de 10 ans (née en 1713) alors que
Renaud en avait 13.

p  Leurs parents, Louis et Jeanne Duval (née Martinet), sont décédés respectivement en 1729 (44 ans)
et 1731 (47 ans).

Si les personnages retournent dans le quartier auprès des habitants et, ou du Père Pierre afin d’en savoir plus sur
les Duval et leur histoire, ils apprennent les faits suivants :

p  Le Père Pierre ne connaît pas la famille Duval. Cependant, il se rappelle vaguement de ce nom car son
prédécesseur, le Père Philippe Jamet, en parle dans son journal. Celui-ci a laissé ses notes personnelles
comme livret d’accueil et guide pour son remplaçant. Avec un peu de tact et de bagou (test d’Influence ou
de Baratin), les personnages peuvent y avoir accès.

p  Le Père Philippe évoque dans son journal personnel Renaud. Il écrit qu’il ne l’aimait pas et qu’il le
considérait comme un mauvais Chrétien. Le prêtre évoque un enfant puis un jeune homme caractériel et
violent. Celui-ci faisait peur à ses parents et semblait tyranniser sa jeune soeur Loïse. Le curé évoque aussi
le fait que Renaud terrifiait les jeunes gens du quartier en général.

p  Le Père Philippe écrit avoir été très chagriné par la mort de Loïse. Il émet d’ailleurs des doutes sur
“sa chute inexpliquée” dans les escaliers qui l’a tuée.

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p  De même pour la mort de la femme de Renaud, Marie, retrouvée morte dans son lit. Le curé parle à
demi-mots d’un soupçon de sévices.

p  La mort de Renaud n’est nullement évoquée. On note que le journal du Père Philippe s’arrête
brutalement en 1734 à la date de celle-ci. Le prêtre colonial demande expressément son retour en France
dans les mois qui suivent. Il part peu de temps après en 1735, avant l’arrivée du Père Pierre à Québec,
sans même l’accueillir.

p  Parallèlement à tout cela, les personnages remarquent que le journal du Père Philippe retrace divers
événements étranges ayant frappé Québec et ses alentours alors que celui-ci officiait. Le Père Philippe
y apparaît comme un ecclésiastique curieux, ouvert et intelligent. A certains endroits du texte, le prêtre
évoque le fait qu’il croit fermement que “des choses mystérieuses et inconnues baignent ces terres”.
Selon lui, malgré sa profonde foi chrétienne, il serait bon d’y prendre garde pour mieux les comprendre afin
de pouvoir éventuellement y faire face.

p  En questionnant les habitants du quartier ils apprendront que l’ancienne maison des Duval existe
toujours. Elle n’est plus habitée depuis longtemps. La masure est située aux limites du quartier, dans
un endroit isolé et laissé à l’abandon de la Basse-Ville. La ruine branlante gît sur un terrain vague à la
limite d’entrepôts de charpente. Les habitants du quartier l’évitent depuis toujours suite à divers incidents
étranges qui y ont eu lieu au fil des années : le suicide d’un nouveau propriétaire qui avait tenté de la
restaurer, un début d’incendie inexpliqué, des bruits étranges certains nuits de pleine lune, etc. D’ailleurs,
certains la disent hantée. Jusqu’à l’année dernière, le Père Pierre acceptait encore de prier sur place de
temps à autre pour rassurer le voisinage mais il ne le fait plus. Interrogé à ce sujet, le Père Pierre dit
“en avoir assez de ces agneaux débiles nourris des superstitions des Sauvages”. Le prêtre rêve de retrouver
des ouailles dignes de sa dévotion à Dieu et surtout de finir sa vie en France, “en vraie France”.

Attention, parallèlement à leur investigation, les personnages doivent gérer la présence encombrante de Diane.

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Ils devront sans doute la confier à quelqu’un de confiance qui pourra prendre soin d’elle : Robert, un ou une amie,
le Père Pierre?

Chapitre III : La maison des horreurs


Les personnages visiteront sans doute l’ancienne bâtisse des Duval. C’est une masure abandonnée et isolée située
en bordure du quartier Notre-Dame-des-Victoires. Elle se trouve non loin d’une grande scierie et d’une série
d’entrepôts de bois d’oeuvre. Les habitants l’évitent effectivement comme la peste. Interrogés, certains regrettent
amèrement la fin des prières du Père Pierre. Les locaux parlent aussi de bruits étranges provenant de la demeure
la nuit et plus particulièrement depuis quelques temps. Pour autant, personne ne fait pour le moment encore le
lien avec les agressions nocturnes actuelles. De jour, les personnages n’y trouvent rien de particulier. Mais de
nuit, la maison devient le repaire de Renaud et le musée de ses horreurs... car Renaud était un psychopathe.
Il avait toujours été quelqu’un d’étrange et de violent. Quelqu’un de craint sur qui pesaient à l’époque déjà bien
des soupçons. Il avait tué sa soeur en la poussant dans les escaliers après lui avoir fait subir pendant des années,
un véritable calvaire au quotidien. C’est aussi lui qui avait assassiné sa femme en l’étouffant après lui avoir fait
vivre mille et unes tortures. Surtout, Renaud a, au cours des années, tué d’autres personnes, souvent au hasard,
parfois à cause de leur ressemblance avec quelqu’un qu’il n’aimait pas. Il les a fait disparaître dans sa cave.
Le Père Philippe s’est souvent opposé à lui, convaincu de ses méfaits. Il a fini par prendre, au prix de sa place
au Paradis, la décision de tuer cet homme malfaisant. Rongé par le remord et le poids de son péché, le curé a
fini par fuir Québec pour retourner en France sans même accueillir son remplaçant. D’âge vénérable, il a fini
sa vie dans un monastère de l’Est de la France. Sa mort a libéré l’âme pervertie et torturée de Renaud. Celle-ci
s’est lentement gorgée de haine et d’égrégore au fil de ses années d’errance au sein de son ancienne demeure.
Aujourd’hui, alors que les Mille-Et-Un-Vaux sont de plus en plus proches et que sa Némésis est morte, Renaud
est revenu !

La maison
La maison possède un rez-de-chaussée, un étage et une vaste cave. Elle est aujourd’hui en piteux état. C’est une
masure délabrée pleine d’humidité et de recoins sombres. Les planchers grincent, la toiture fuit, le vent s’engouffre
partout et il y règne une ambiance de désolation et de lamentation. Un chaman ou tout autre personnage sensible
au surnaturel (un occultiste, un inquisiteur, un démonologue, etc.) sera très mal à l’aise à l’intérieur (test de
Psyché ou profond sentiment d’étouffement et de crainte). Il pourrait même y percevoir d’étranges phénomènes
(test d’Observation. Exemples : froid glacial, pleurs dans le vent, ombres changeantes, etc.). Un chaman pourrait y
interroger les esprits. Il fera alors face à un vide absolu, comme si tous les esprits avaient déserté l’endroit depuis
longtemps. Pour autant, le chaman ressent une tension spirituelle impressionnante ainsi que des émanations de
haine pure, une sorte de contamination (test de Psyché pour contenir des tremblements et des sueurs froides).

Conseils pour le meneur


L’exploration de la demeure doit être le point d’orgue de ce scénario. Ne lésinez
pas sur vos effets : lumière tamisée, chandelles, musique d’ambiance sinistre, etc.
Faites perdre automatiquement un point de Santé mentale aux personnages tant la visite des
lieux est perturbante.

Le rez-de-chaussée était consacré aux pièces à vivre : salle commune, cuisine, réserve, etc. Il n’y a rien à signaler
hormis un état de délabrement avancé et des traces d’un ancien incendie.

L’étage est plus intéressant. On y trouve les anciennes chambres familiales qui renferment les souvenirs et les
émanations psychiques des atrocités commises par Renaud sur sa soeur puis sur son épouse. Les personnages s’y
sentent tous mal à l’aise (test de Volonté pour réprimer une peur insidieuse) et un personnage sensible sera au bord
du malaise (test de Psyché pour résister à des vomissements, une profonde mélancolie accompagnée d’une envie
de pleurer). Quelques restes de lits, de coffrets et d’armoires gisent dans un état d’abandon total.

La cave est le véritable antre de la folie de cette demeure. C’est là que Renaud a malmené, et torturé ses pauvres
victimes. C’est ici qu’il a déchaîné toute sa haine et sa démence. Il s’agit d’un grand espace humide qui s’étend sous
toute la maison mais aussi vers des cavités plus naturelles formant des niches inquiétantes dans les soubassements.
L’endroit pue la peur et la charogne, pourtant aucun cadavre n’est visible. Les lieux sentent aussi terriblement

12
l’humus. D’ailleurs, l’humidité est partout, galopante. Le sol a commencé à se recouvrir d’une épaisse couche
de moisissure d’où percent d’horribles racines noires couvertes d’épines. De la vermine difforme courre partout
et s’éparpille dès qu’une lumière est brandie. Une brume épaisse, quasi liquoreuse, émerge de certaines niches.
On entend au loin grincer les branches d’arbres gigantesques. Depuis cette cave, théâtre de bien des horreurs,
on peut accéder à la forêt cauchemardesque des Mille-Et-Un-Vaux. D’ailleurs, l’endroit est bien plus vaste que ce
qu’il devrait être. On s’y perdrait presque. La puissance corruptrice de l’égrégore s’infiltre. Ce sinistre souterrain
est la preuve que quelque chose est à l’oeuvre pour faire tomber les barrières entre le Nouvel Eden et les Vaux !
La maison des Duval est un symptôme du mal qui menace toute la Colonie.

Le fantôme de Renaud loge dans la cave. C’est là qu’il attend la nuit pour se rendre au cimetière insulter sa famille
ou pour répandre ses vices en agressant les gens dans les rues. L’intrusion des personnages en son royaume le rend
fou de rage ! Il se manifeste, vocifère, jouit de son retour et de l’impuissance des personnages face à lui. Dans
son délire mégalomaniaque et pervers, il glorifie celle qu’il appelle “Celle Qui vient”. Au comble de l’hystérie,
il attaque en projetant débris, immondices, clous rouillés, cailloux mais aussi racines épineuses pourrissantes sur
les personnages. Ceux-ci ne peuvent que fuir face à ce fantôme déchaîné mais intouchable car intangible.

Conseils pour le meneur

Si les personnages s’acharnent, ils sont morts. Dévoré par la colère et nourri par l’égrégore
depuis près de 20 ans, Renaud est devenu surpuissant ! Dites clairement à vos joueurs qu’il est
mortellement dangereux et que la fuite a parfois du bon.
S’ils sont vraiment mal en point après un affrontement contre Renaud vous pouvez faire
intervenir un québécois bienveillant : Bernard Grandpré. Il s’agit du contremaître de la scierie
proche qui vit dans le quartier. En tant qu’ancien médecin militaire, Bernard a des compétences
de soins bien utiles. Malgré ses airs bourrus, ce bon samaritain solitaire a le coeur sur la main.
Il connaît bien Québec, il peut aider les personnages, les soigner, les accueillir, etc. Si vous
le souhaitez, Bernard pourrait devenir un personnage-non-joueur récurrent. N’hésitez pas à
l’utiliser comme bouée de secours dans ce scénario ou dans d’autres pour aider votre groupe.

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Pour se débarrasser de Renaud et refermer le passage qui s’ouvre sur les Vaux il faut brûler sa maison et purifier
sa tombe. Attention, il faut impérativement effectuer les deux tâches. Réaliser un seul de ces deux actes ne suffira
pas et Renaud sera toujours actif. Les personnages peuvent profiter du jour car Renaud est bien moins actif.

S’ils pataugent, Diane peut instinctivement les mettre sur la voie en leur parlant des fantômes et de leur lien avec
notre monde, un lien qu’il faut soit apaiser, soit détruire. Diane affiche également une certaine compréhension
des événements terrifiants de la cave. Les manifestations spectrales ne lui sont pas étrangères… Elle parle d’une
grande et sombre forêt embrumée qu’elle aperçoit dans ses rêves. Elle dit aussi entendre régulièrement le bruit
d’un vent lointain ou le craquement sinistre de branches...

Les personnages peuvent également effectuer des recherches sur les fantômes et la façon de s’en débarrasser.
Robert Campagne dispose d’une petite bibliothèque ésotérique idéale pour cela. Autre possibilité : le Père Pierre
a gardé les notes de son prédécesseur, le Père Philippe, qui s’intéressait bien plus que lui à l’étrange, aux mythes
locaux, à l’occulte et à l’ésotérisme. Les personnages pourraient aussi y trouver des pistes concernant la chasse
aux fantômes.

Conclusion
Dites aux joueurs que si leurs personnages affrontent directement Renaud dans sa demeure, ils courent à l’échec.
Si les personnages s’acharnent au point d’y laisser leur vie, Robert entreprendra des recherches pour les retrouver.
Il remontera ainsi le fil de leurs investigations et finalement fera le nécessaire avec l’aide d’autres membres de la
Compagnie (d’éventuels nouveaux personnages-joueurs ?).

Si les personnages fuient puis font ensuite intelligemment le nécessaire, Renaud sera éliminé. De plus, la maison
sera “nettoyée”. Cet accès aux les Mille-Et-Un-Vaux disparaît.

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Déterrer le cercueil de Renaud ne sera pas une mince affaire car c’est un crime et un sacrilège. Les personnages
vont devoir être prudents et ingénieux. Trouver de l’huile et de l’eau bénite ne devrait pas être un souci (le Père
Pierre et Robert Campagne peuvent les aider). Le cercueil est pourri d’humidité et rongé par une moisissure
malsaine. Des insectes horribles s’en échappent sans fin. A l’intérieur, les ossements de Renaud sont prisonniers
d’un amas de racines noires putrides. Seul subsiste son coeur palpitant et gonflé d’une humeur visqueuse et
huileuse (comme du pétrole). Un murmure incompréhensible se fait entendre en permanence une fois la tombe
ouverte. La scène de purification est un autre grand moment de cette aventure car le fantôme de Renaud réapparaît
une ultime fois pour empêcher les personnages d’en finir ! Si les personnages se concentrent sur la destruction des
restes de sa dépouille malgré ses assauts, le fantôme s’étiole et disparaît rapidement.

Après ces événements, les personnages prennent conscience d’un phénomène de grande ampleur. Les Mille-Et-
Un-Vaux sont une menace à même de renverser la Colonie et un danger pour l’Humanité tout entière !

Robert est très satisfait de ses nouvelles recrues et en fera l’éloge auprès des mystérieux Associés. Les Cent
connaîtront de fait le nom et les premiers exploits du groupe. Les personnages ont pris de l’expérience et ont
acquis la confiance de la Compagnie qui s’apprête à se lancer dans une guerre militaire et occulte féroce liée au
destin de la Nouvelle-France.

Diane est placée sous protection de la Compagnie. Son don de médium est extraordinaire et il n’attend que de
se développer. Diane pourrait être un atout majeur. Robert a tout à fait conscience de son potentiel et proposera
de la recueillir afin de s’occuper d’elle directement. Néanmoins, Diane garde un lien et une relation privilégiée
avec les personnages qu’elle considère comme ses sauveurs. N’hésitez pas à la mettre en scène dans vos propres
scénarii. Diane doit devenir une figure d’attachement et un personnage-non-joueur de référence. Mais, qui est-elle
exactement ? Qui sont ses parents ? Quelle est son histoire ? Et si l’égrégore en venait à s’intéresser à elle ?
14 II - Apparences

Présentation
ette aventure fait suite au scénario “Peur sur Québec” et constitue le deuxième épisode de la campagne

C “Abîme”. Néanmoins, plus de deux ans séparent ces deux histoires. Nous sommes à présent au printemps
1756. Il conviendrait que les personnages aient vécu d’autres péripéties avant de se plonger dans ce
nouveau chapitre (des scénarii intermédiaires, officiels ou maison).

Au cours de ce scénario, les personnages vont goûter à la vie politique coloniale. Loin des confrontations contre
l’horreur et le surnaturel, cette aventure va présenter aux joueurs une autre facette du jeu, un aspect plus “terre-à-
terre” mais tout aussi dangereux.

La durée de ce scénario sera très variable selon les tables de jeu. En effet, les scènes de roleplay peuvent être plus
ou moins longues. Si vous ajoutez les diverses scènes intermédiaires proposées la durée en sera d’autant plus
impactée. Les tests ont été effectués en séance de 4h comme en deux longues séances d’une durée totale de 9h de
jeu.

Synopsis
Les personnages ont acquis de l’expérience. Leur relation avec Robert Campagne a positivement évolué.
Le représentant des Cent-Associés à Québec ne voit plus en eux de simples recrues mais bel et bien des agents
aguerris à même de faire face aux turbulences actuelles et à venir.

Suite aux événements de “Peur sur Québec”, Robert a pris sous son aile la jeune et brillante Diane. Celle-ci
a grandi. Elle a confirmé et conforté ses pouvoirs de médium. Aujourd’hui Diane est un élément clé pour la
Compagnie dans sa lutte contre les forces anglaises mais aussi contre le surnaturel. Afin de garder une influence
sur elle et surtout pour préserver le secret de ses capacités, ses origines n’ont pas été recherchées. Le mystère

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Diane reste donc entier. Une mission d’escorte mandatée plus ou moins directement par le Gouverneur-Général
Pierre de Rigaud de Vaudreuil va changer la donne.

Dans le premier chapitre, les personnages, suite à un entretien préalable avec Robert Campagne, vont rencontrer le
nouveau commandant en chef des forces armées : le maréchal Louis-Joseph de Montcalm. Ils prépareront son
accompagnement pendant un voyage familial.

Dans le chapitre suivant, ce voyage vers une petite seigneurie va leur permettre de mieux faire connaissance avec
ce personnage historique majeur mais surtout de contrecarrer une attaque iroquoise aux allures d’embuscade.

Dans le dernier chapitre, les personnages devront mettre à jour une trahison et un complot visant la mort du
maréchal. Ils affronteront les traîtres et des agents anglais. Ils pourront également en apprendre plus sur les
mystérieuses origines de Diane en découvrant qui sont ses parents.

Quelques rappels historiques

En 1755, le marquis Pierre de Rigaud de Vaudreuil est nommé Gouverneur-Général de


Nouvelle-France. Il remplace le marquis Michel-Ange Duquesne de Menneville reparti en
France. Né au sein de la Colonie, homme compétent, De Vaudreuil fut auparavant Gouverneur de
Trois-Rivières puis de Louisiane. Nommé par Louis XV, il représente le Roi outre-Atlantique.
De fait, il administre l’armée et il est le chef de la diplomatie des colonies d’Amérique du Nord.
C’est le personnage politique local le plus important de l’époque.
Néanmoins il partage son pouvoir avec l’intendant François Bigot. Ancien commissaire-
ordonnateur de l’Île Royale, ce bordelais de naissance gère l’administration civile de la
Nouvelle-France mais aussi le commerce, la justice, les relations avec les seigneurs locaux et

15
surtout les finances.

Depuis la Basilique-Cathédrale Notre-Dame de Québec, L’évêque Henri Marie du Breil


de Ponbriand (d’origine bretonne) commande toutes les affaires religieuses (la charité,
les hôpitaux, l’éducation, la conversion, etc.).
Ces trois hommes incontournables forment avec douze conseillers rattachés le Conseil
souverain, la structure gouvernementale coloniale imaginée par Louis XIV et Colbert.
Pour mettre en oeuvre sa politique, exploiter et surtout développer la Colonie, ce gouvernement
s’appuie sur un régime semi-féodal assez souple par rapport à celui pratiqué alors en France.
La Colonie est donc découpée en seigneuries concédées par le roi ou au nom du roi à des
seigneurs locataires d’une terre qu’ils doivent impérativement mettre en valeur pour le bien
des intérêts français. Ce seigneur qui habite sur place (par obligation) divise à son tour son
domaine en parcelles variables (tant en terme de qualité que de taille) et les attribue à des
habitants chargés de concrètement faire fructifier la seigneurie. Le seigneur se réserve sa propre
parcelle qu’il fait entretenir par l’impôt et les corvées. Les seigneurs n’étaient pas forcément
d’ascendance noble, ils pouvaient être issus de l’armée, du clergé voir du peuple (un cas qui
reste rare). Ils devaient rendre des comptes au Conseil souverain. De fait, les seigneuries de
Nouvelle-France étaient très différentes les unes par rapport aux autres : en taille, en richesse, au
niveau de l’organisation, avec des inégalités sociales plus ou moins forte, selon la personnalité
du seigneur, les relations entre seigneurs, etc.

En 1754 éclate la quatrième guerre intercoloniale appelée Guerre de la Conquête (1754-


1763). Elle oppose encore une fois les Français et les Anglais ainsi que leurs alliés coloniaux et
amérindiens. Les guerres intercoloniales étaient le moteur de l’expansion territoriale de ces deux
grandes puissances européennes en Amérique du Nord. Pour rappel, la précédente, la troisième,
a eu lieu de 1744 à 1748. Ce nouveau conflit trouve cette fois ses racines dans la volonté des
deux camps d’étendre leur influence dans la vallée de l’Ohio, au sud des grands lacs. Au début
des affrontements, les Français multiplient les succès et les Anglais paniquent. Cependant,
assez rapidement, tout va s’inverser. Alors que la déportation des Acadiens francophones est
organisée par les Anglais et que des renforts arrivent d’Europe, les Français perdent pied.
Nommé en 1755 commandant en chef des forces françaises (quasiment en même temps que
le nouveau Gouverneur-Général de Vaudreuil), le baron Jean-Armand de Dieskau perd la
bataille du lac Georges en septembre. Il y est même blessé et fait prisonnier. Suite à cet échec
retentissant, il est remplacé au printemps 1756 par le talentueux maréchal et marquis Louis-
Joseph de Montcalm venu spécialement de France sur ordre direct du Roi.
Il est important de rappeler que la Guerre de la Conquête n’est que le prémice d’un conflit
plus étendu que l’on pourrait même considérer comme la véritable première guerre mondiale :
la Guerre de Sept Ans (1756-1763). Celle-ci a opposé de nombreuses puissances regroupées
en deux alliances antagonistes (France, Autriche et alliés contre Angleterre, Prusse et alliés).
Elle s’est déroulée sur plusieurs continents à travers divers théâtres d’opérations. Ses enjeux
étaient avant tout territoriaux, expansionnistes et bien sûr économiques. A la fin de celle-ci, on
assiste un rééquilibrage géopolitique européen mais aussi du monde qui mènera par la suite à
d’autres conflit dont par exemple la Guerre d’indépendance des Etats-Unis dès 1775.

La déportation des Acadiens


Les Acadiens sont les descendants des premiers colons français. Ils sont plutôt originaires
de l’ouest de la France. Ils se sont également quelque peu mêlés à des colons écossais venus
à la même époque en Amérique du Nord. L’Acadie de l’époque correspond plus ou moins à
l’actuelle Nouvelle-Écosse, province canadienne maritime située à l’extrême nord-ouest de la
côte atlantique. Le terme d’Acadie pourrait venir de la langue micmac et signifier “terre fertile”.
Il est important de comprendre qu’en 1755 lors de leur déportation les Acadiens sont depuis
plus de quarante ans sous administration britannique, l’Acadie ayant été cédé par la France à
l’Angleterre en 1713 via le Traité d’Utrecht qui met fin à la Guerre de Succession d’Espagne.
De fait, il ne s’agit pas d’un territoire français récemment conquis mais d’un territoire anglais
ancré bien que majoritairement habité par des francophones. Les Acadiens ayant toujours gardé

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une neutralité dans les différents conflits opposant les deux puissances coloniales depuis leur
transition de l’autorité française à celle anglaise.
En 1755, suite au début de la Guerre de la Conquête, les autorités anglaises, agacées par les
premiers succès français et poussées par les colons de souche britannique qui convoitent les
terres acadiennes depuis longtemps, décident d’exproprier et de déporter définitivement les
Acadiens pour les remplacer cette fois totalement par de purs colons britanniques.
Cette déportation massive, soudaine et surprenante car décalée par rapport à la date de
prise de possession anglaise, se fait dans des conditions exécrables et violentes : les gens sont
brutalement expulsés, les familles sont déchirées, leurs terres sont confisquées et les maisons
brûlées. Il s’agit d’un vrai drame sanitaire et humanitaire ! Plus de 12000 Acadiens (soit ¾ de
la population présente) furent dispersés manu militari sur d’autres terres coloniales anglaises,
beaucoup plus inhospitalières que la douce et fertile Acadie, certains furent rendus à la France.
On estime à près de 8000 le nombre d’Acadiens morts (de misère, de faim, de froid, de maladie,
etc.) avant d’avoir pu retrouver un nouveau lieu d’installation quelque part dans le monde et ce
au terme d’un long périple.

Introduction : Home sweet home


Au milieu du printemps 1756 les personnages prennent un peu de repos à Québec. L’ambiance est tendue. Après
avoir été un temps chassée par l’euphorie galvanisante des premiers succès militaires français (1754-1755),
la peur des débuts du conflit est de retour. La population parle maintenant des échecs qui se succèdent et évoque
surtout largement la défaite cuisante au début de l’automne dernier du commandant de Dieskau. Les Québécois
craignent de voir le conflit définitivement basculer en faveur des Anglais. Cette crainte court aussi les campagnes.
La déportation inattendue des Acadiens initiée l’année dernière par les Britanniques est également une source de
profonde angoisse. Les récits sur les exactions commises par les Anglais sur place sont atroces. Les rumeurs les
plus folles circulent ! On parle de l’arrivée imminente d’une armada qui viendrait bouter les forces françaises loin
du Saint-Laurent. Les Anglais chasseraient dès lors les Colons avec la même violence que celle utilisée contre les
pauvres Acadiens...

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Conseils pour le meneur
Incarnez cette tension grâce à quelques rencontres préalables issues du quotidien :
une discussion animée dans une taverne sur la défaite du lac Georges, des rumeurs populaires
au marché sur un débarquement anglais, le récit terrible de son exil de la part d’un pauvre
réfugié acadien lors d’un ravitaillement dans une échoppe, etc. Dans le scénario précédent, la
population craignait que la guerre n’éclate, aujourd’hui elle craint que le conflit ne s’emballe et
ne tourne en défaveur des Français.

Sur ces entrefaites, les personnages vont de nouveau être conviés par Robert Campagne. Ils rencontreront
celui-ci comme à l’accoutumée dans sa grande demeure de la ville haute. L’imposant Robert a bien changé en
deux ans... L’homme naguère charismatique et rassurant semble à présent aux aguets, perpétuellement soucieux,
comme rongé par la somme des récits terribles dont il a été le dépositaire de la part de l’ensemble des agent de la
Compagnie. Son visage est blême, son regard est cerné, il a maigri et sa tenue est moins impeccable.

Conseils pour le meneur


Faites comprendre à vos joueurs que les choses se précipitent en Nouvelle-France. Le
basculement progressif mais notable de Robert (et dans une moindre mesure de sa demeure)
doit être le symbole et le reflet de ce que vit plus globalement la colonie actuellement, de
son délabrement face aux tensions. Appuyez-vous pour cela sur la relation que vous avez pu
construire entre Robert Campagne et les personnages au fil de vos propres scénarii. Il incarne
l’état moral d’une colonie française ballotée par la guerre et poussée aux abois. L’état de Robert
est aussi lié avec le développement de Diane et de ses pouvoirs (cf. épisodes suivants).

Après avoir pris des nouvelles des personnages, Robert en vient au principal. Il a reçu une convocation de la
part du Gouverneur-Général De Vaudreuil. Celui-ci a informé Robert de la visite prochaine du tout nouveau
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commandant De Montcalm chez un de ses parents éloignés, un seigneur terrien du nom de François Gozon
de Crevier. En effet, les Gozon de Crevier, malgré leur statut colonial de petite noblesse, sont liés familialement
au marquis Louis-Joseph de Montcalm, le maréchal et nouveau chef des forces armées françaises en Nouvelle-
France. Arrivé il y a peu au sein de la colonie, celui-ci prévoit de rendre visite rapidement à son parent colonial.
Le Gouverneur-Général pense qu’il serait opportun que la Compagnie puisse se rapprocher du maréchal vu le
contexte géopolitique et surnaturel actuel. Il a donc invité Robert à se joindre à la visite de Montcalm.

De son côté, Robert pense qu’il serait bon que la Compagnie s’assure que l’installation aux manettes militaires
du marquis soit “sécurisée”. Montcalm n’est pas véritablement au fait des événements surnaturels qui baignent la
Nouvelle-France. Il est surtout focalisé sur la menace anglaise. Malheureusement retenu par d’autres obligations,
Robert s’est arrangé afin que les personnages servent de guides et d’intermédiaires auprès de Montcalm et de sa
suite en partance pour la seigneurie des Gozon de Crevier. Il n’en dévoilera rien mais Robert est soucieux vis-à-vis
de l’accroissement des pouvoirs de Diane. Il compte profiter de son absence pour mener ses propres recherches
sur son don. Une rencontre est prévue ce soir pour finaliser tout cela auprès du commandant lui-même et du
Gouverneur-Général. Les personnages vont accompagner Robert Campagne auprès des autorités coloniales pour
y être présentés. Cette entrevue est cruciale car tout le monde doit être convaincu de l’utilité de la présence des
agents de la Compagnie lors de ce voyage.

Robert souhaite également que Diane soit du voyage. En effet, en deux ans, la jeune médium a considérablement
développé ses pouvoirs. Aujourd’hui elle est toujours capable de voir les morts et autres fantômes (son Trait :
Médium) mais elle est maintenant aussi capable de prémonition (son autre Trait). Diane a des visions de l’avenir
proche. Elle peut également avoir des flashs symboliques en présence de certains lieux ou de certaines personnes.
Près de Louis-Joseph de Montcalm, elle pourrait avoir des visions pour l’avenir de la colonie et pour aider la
Compagnie en cette période de guerre. La mission des personnages auprès du maréchal lors de ce voyage familial
en est d’autant plus importante puisqu’ils devront à la fois participer à la protection du nouveau commandant,
entrer dans une relation de confiance avec lui pour le bien de la Compagnie et s’assurer que Diane puisse
faire son office de prédicatrice. Une mission ô combien complexe ! Officieusement Robert a besoin de l’absence
de Diane pour effectuer sa propre investigation et rencontrer des spécialistes (occultiste, chaman, etc.).
En fin d’entretien Diane se joindra au groupe. La petite fille des rues de Québec a bien grandi. Plus distante et plus
mature, elle semble avoir vécu bien des choses depuis sa première rencontre avec les personnages. En effet, Diane
a fortifié son don en se confrontant pendant deux ans au surnaturel par l’entremise de Robert. Elle a déjà pu aider
d’autres agents et se plonger dans l’autre réalité de la colonie. La petite fille n’en est plus vraiment une ! Elle n’a
pas été épargnée et ce au nom des intérêts français. Robert lui a fourni une éducation et un confort matériel tout
en la plongeant au coeur des étrangetés qui menacent la colonie. Sa relation avec le représentant de la Compagnie
à Québec s’est affirmée. Diane considère Robert comme son tuteur et son mentor. De son côté, Robert protége sa
pupille par affection mais surtout parce qu’elle est utile à la Compagnie. Robert est avant tout un homme qui sert
le roi et il est très conscient de ses responsabilités. Même quand celles-ci l’amènent à confronter une jeune enfant à
des choses qui dépassent l’entendement... Quoiqu’il en soit Diane sera ravie de revoir les personnages. Son regard
est encore plus troublant qu’auparavant. Son attitude trop mature pour son âge (Diane à maintenant un peu plus de
10 ans) est dérangeante. C’est comme si une adulte s’adressait à eux à travers le corps d’une enfant.

Après ses retrouvailles Robert demande aux personnages de s’apprêter et leur donne rendez-vous en compagnie
de Diane en fin de journée pour se rendre auprès du Gouverneur-Général et du maréchal.

Les Gozon de Crevier


François Gozon de Crevier est un seigneur discret, peu présent à la capitale. On le dit par
contre très attaché à ses terres familiales. Il est veuf et sans enfant. Sa seigneurie est située non
loin de Québec. Il s’agit d’un petit domaine concédé à ses ancêtres en 1663 par la Compagnie
des Cent-Associés elle-même alors que celle-ci administrait encore directement la colonie,
juste avant son démantèlement par Louis XIV et la mise en place du Conseil souverain et donc
la réorganisation gouvernementale actuelle.
Selon le Gouverneur-Général qui s’en réfère à ce que sait son administration (l’Intendant

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Bigot et ses fonctionnaires), c’est un domaine agricole modeste mais bien tenu, articulé autour
d’un manoir (une ferme fortifiée plusieurs fois agrandie). Il comporte une vingtaine de tenures
ainsi qu’une petite église et un four communal.

Chapitre I : Coeur colonial


L’entrevue aura lieu en début de soirée au siège du Conseil souverain, dans la Haute-Ville, au sein du Fort
Saint-Louis qui surplombe le Saint-Laurent. Il s’agit d’un édifice bastionné massif, à la Vauban, qui au-delà de
ses fonctions officielles fait partie du système défensif de la ville. Avec le Palais de l’Intendant, l’autre grand
bâtiment officiel de la ville, il concrétise tout le pouvoir colonial français.

Plutôt accoutumés à la rudesse des routes et à l’horreur du surnaturel, les personnages ne devraient pas avoir
l’habitude de ce genre de rencontre politique et de haute société. C’est donc le moment de leur faire entrevoir une
autre facette de la vie québécoise et surtout le lien qui unit la Compagnie aux autorités locales et donc au destin
de la Nouvelle-France.

Annoncés, Robert et sa suite seront guidés au coeur du fort pour rencontrer le Gouverneur-Général De Vaudreuil
et le maréchal De Montcalm. Dans la salle de réunion du Conseil, les deux hommes devisent aimablement un verre
de liqueur à la main. En 1756, le gouverneur est âgé de 56 ans, le maréchal en a 44 (voir leurs portraits d’époque
à la suite de la section consacrée aux pnjs). L’ambiance est feutrée. De Vaudreuil est un politicien averti et
De Montcalm un militaire d’expérience très apprécié du roi. Ces deux hommes forts n’ont pas l’habitude de s’en
laisser compter. Chacun est sûr de son fait, du bien fondé de ses idées et surtout de son analyse de la quatrième
guerre intercoloniale en cours. On devine dans leur discours et dans leurs regards toute la difficulté qu’ils vont
avoir à cohabiter et à respecter la place de l’autre !

De Vaudreuil fera bon accueil à Campagne. Il le porte en grande estime. Le gouverneur a conscience de la
résurgence du surnaturel et croit aux horreurs que l’on raconte. Il est né ici. Il a exercé le pouvoir aussi en
Louisiane, autre terre réputée occulte. Il sait que quelque fois certaines choses dépassent l’entendement, la foi et
la connaissance des colons. Il a peut être même entendu parler des Mandoags, originaires de la région.

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Concernant De Montcalm, c’est plus compliqué. Il connait la Compagnie de nom et son importance aux yeux du roi dans
le conflit actuel. Par contre, il vient du continent et pour lui tous ces récits étranges sont un ramassis de superstitions. Il a
du mal à accepter le rôle occulte de la Compagnie. Militaire convaincu, le maréchal a surtout la question anglaise en tête.
L’éventualité d’une autre menace, d’autant plus surnaturelle, le dépasse un peu.

Le nouveau commandant en chef est un peu étonné qu’on lui présente un tel rassemblement de francs-tireurs pour intégrer
son escorte lors de son voyage personnel auprès du domaine des Gozon de Crevier. Il ne s’en offusque pas mais il a du
mal à se faire à ces méthodes peu orthodoxes. Il se laisse convaincre pour ne pas brusquer les autorités coloniales plus
que par réelle conviction. Cependant De Montcalm ne comprend absolument pas la présence de Diane. Une enfant ! Si on
évoque devant lui ses pouvoirs, le maréchal ne cache pas son incrédulité et sa méfiance vis-à-vis de toutes ces bizarreries
pour Sauvages. Diane restera en retrait mais elle observe toute la scène avec grand intérêt. Elle se concentre sur chacun
afin d’entrevoir la trame des possibles.

Pour résumer, le maréchal va bien se rendre auprès de François, son cousin par alliance. Il voyagera léger et sera accompagné
par son ordonnance, le lieutenant Pierre Philippe Chassins de Prosnes ainsi que par deux gardes français issus de sa
protection rapprochée : les soldats Camille Blanc et Benoît Dufour. Louis-Joseph explique qu’il connaît son cousin à
travers quelques correspondances et qu’il se réjouit d’enfin rencontrer ce parent issu de Nouvelle-France. Au-delà de cela,
il ne peut pas en dire grand chose car il ne le connaît pas vraiment.

Soldat expérimenté, De Montcalm apprécie le fait d’être accompagné par des gens du cru et de terrain. Mais, noble d’épée
se méfiant des bourgeois par tradition, il accepte assez mal la connexion flagrante entre la Compagnie et le pouvoir local.
Malgré qu’il ne soit pas sans ignorer le goût de son roi pour les intrigues et autres “moyens de l’ombre”, et qu’il connaît
donc plus ou moins le rôle officieux de la corporation, De Montcalm reste un noble français typique, avare de ses privilèges
et fier de son statut supérieur. Le maréchal va d’emblée tenter d’imposer sa fonction et son autorité. Campagne le vivra
avec difficulté alors que De Vaudreuil est plus conciliant et apprécie visiblement le représentant des Cent-Associés. Robert
est un homme intelligent. Il laissera faire De Montcalm. Néanmoins il n’hésitera pas à rappeler son propre statut et il ne se
laissera pas déborder devant les personnages, ses subalternes.

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Le départ est prévu dès le lendemain. Le voyage devrait durer trois à quatre jours. La seigneurie De Crevier est située non
loin du Chemin du Roy en direction de Trois-Rivières. Les Colons nomment l’endroit aux allures de village simplement
“Crevier”. Robert Campagne se chargera d’organiser rapidement la logistique concernant les personnages (montures,
rations, fournitures, un peu d’argent liquide, etc.). Néanmoins, il ne sera pas contre l’aide et les conseils d’un logisticien
issu du groupe (Test de Profession : Logisticien).

Conseil au meneur :
jouez cette rencontre en détail (Tests d’Influence, de Culture coloniale, d’Observation, etc.). Elle est
volontairement ouverte. Elle peut donc se dérouler de bien des façons. Prenez votre temps. Cet entretien
privé doit bousculer vos joueurs et leurs personnages dans leurs habitudes. On délaisse un temps
l’horreur et l’action pures et dures pour une ambiance plus feutrée, tout en roleplay et en interaction.
La Compagnie n’est pas qu’une agence de chasseurs de monstres ! Elle existe dans un univers riche
et travaille de concert avec les grands de ce monde colonial. C’est un autre aspect de ce que peut être
une partie de Colonial Gothic. Pendant tout cet entretien, les personnages seront sollicités par les uns
et les autres. Attention, ils n’assistent pas à un spectacle entre PNJs ! Ils sont partie prenante de cette
entrevue. Leur avis est pris en compte car leur professionnalisme est reconnu. C’est l’occasion pour eux
d’interagir avec des gens d’importance et d’influence.

Chapitre II : Gozon, un nom et une trahison


Le voyage vers Crevier se déroule sous un temps clément et dans une ambiance détendue. Le printemps est bien engagé
et il est plutôt agréable. Ainsi, De Montcalm privilégie les nuitées en extérieur afin de profiter de cette Nature qu’il trouve
magnifique. Le marquis tombe amoureux de la Nouvelle-France et de sa beauté sauvage.

De Montcalm est un homme sympathique. Il est franc et direct. Sur la route, le noble cède la place au militaire. Ainsi, sa
relation avec les sous fifres que sont pour lui les personnages sera facilitée. Le maréchal aime raconter ses campagnes,
ses combats et son service auprès du roi. Il ne se vante pas, il raconte juste avec entrain toutes les péripéties qui l’ont amené
à devenir le commandant actuel des forces coloniales.
Le lieutenant De Prosnes est un homme discret et réservé. Il est d’une loyauté absolue envers son supérieur
qu’il vénère presque. Son attitude envers les personnages est relativement distante. Fervent catholique, le noble
militaire de carrière est méfiant vis à vis des moeurs et autres traditions coloniales et amérindiennes. Son regard
vis à vis des Amérindiens n’est pas tendre.
Camille et Benoît sont deux solides gaillards, des soldats expérimentés mais aussi des amis au-delà d’être de
simples camarades. Sympathiques et ouverts, ils se rapprocheront naturellement des personnages avec lesquels ils
partagent la même vie d’action et de danger.

La présence de Diane au sein du petit convoi suscite bien des interrogations. Cependant, De Montcalm et sa suite
ne s’approchent pas d’elle. Ils semblent instinctivement se méfier de cette enfant si étrange. Diane de son côté
fait profil bas. Elle reste plutôt auprès des personnages qu’elle apprécie depuis toujours. Ceux-ci pourront ainsi
remarquer que Diane est de plus en plus nerveuse au fil des jours. Interrogée, elle explique qu’elle ressent un grand
danger autour du maréchal et surtout toute l’importante trame qui semble se tisser autour de lui depuis son arrivée.
Selon la médium, le maréchal est et sera au centre d’un canevas d’événements cruciaux pour l’avenir. Son contact
au quotidien perturbe les sens extralucides de Diane. Elle prononcera cette phrase sibylline à plusieurs reprises
: “Les plaines auront raison de lui mais son sabre sera jusqu’au bout un flambeau pour le lys. Lorsqu’il
s’éteindra, le sort en sera jeté. L’innocence n’est pas la meilleure des forteresses. (Il s’agit d’une référence
claire à la devise des De Montcalm : Mon innocence est ma forteresse.)”.

Conseils pour le meneur


Selon vos envies et les goûts de votre table, vous pouvez agrémenter ce voyage grâce à
quelques péripéties secondaires :

p  De Montcalm aimerait chasser. Cette battue en forêt est l’occasion d’une rencontre
déroutante avec des coureurs des bois porteurs d’un témoignage halluciné sur des lueurs

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étranges entraperçues dans les bois. S’ils se rendent à l’endroit indiqué, des structures de bois
inquiétantes ont été érigées. Par qui ? Pourquoi ? Diane en tout cas est terrifiée. Au pied des
structures, une vermine grouille comme attirée.

p  Sur la route, le convoi croise des chasseurs abénakis. C’est l’occasion de partager un
bivouac et de négocier quelques belles peaux. Le plus charismatique des trappeurs, Alawa, est
un très bon conteur. Il connait bien les exploits de Nanabush, le lièvre farceur et protecteur.
Il parlera aussi de la victoire récente d’un groupe d’Algonquins menés par le puissant chef
Amikniping (Castor des eaux, il apparaît dans le prochain épisode) contre les Iroquois.

p  Vous pouvez corser le voyage avec une embuscade nocturne menée par un ou deux Ewahs
en chasse (page XX du livre de base). Les créatures ont été invoquées par un chaman fou
(le responsable des structures de bois inquiétantes trouvées en forêt). Elles comptent bien profiter
de leur séjour hors des Vaux pour perpétrer un doux carnage. Cette première confrontation
directe au surnaturel impactera fortement De Montcalm et sa suite !

Lors de leur dernière nuit, à l’approche de leur destination, le groupe va être attaqué par une bande d’Amérindiens.
En fait, aux alentours de Crevier, des tueurs iroquois sont embusqués. Leur rôle est d’intercepter De Montcalm et
de l’assassiner avant son arrivée au domaine. Ils sont employés par les agents anglais déjà sur place qui tiennent
l’information de la venue du maréchal du traître François Gozon de Crevier. Néanmoins, les six guerriers tribaux
de ce commando ne s’attendent pas à une telle opposition. Les personnages n’étaient pas prévus au programme.
Quoiqu’il en soit, ils savent que la disparition du nouveau commandant français est impérative pour leurs alliés
anglais. Les Iroquois vont profiter du couvert de la nuit pour attaquer le camp et se concentrer sur l’élimination du
maréchal. Si leur approche n’est pas repérée, c’est Diane qui donnera l’alerte suite à une prémonition du meurtre
du marquis. Entre leur infériorité numérique, l’échec de leur embuscade et le fait que le lieutenant De Prosnes est
prêt à se sacrifier pour sauver son idole, les Amérindiens ne peuvent qu’échouer.

Stephane LARRIEU - marcheprime3314@gmail.com - 202303/954491/1977321


Conseils pour le meneur
Mettez en scène un combat sanglant face à des Iroquois prêts à tout. Cependant, jamais
De Montcalm ne sera inquiété, son destin est ailleurs. Vous pouvez aussi mettre en place une scène
héroïque où un des personnages aura l’opportunité de sauver la vie du marquis.
Si vous voulez jouer avec l’Histoire, tuez De Montcalm afin d’introduire un autre général français
et bifurquer le cours des événements à venir. Néanmoins, nous vous conseillons de garder le marquis
vivant !

A la fin de l’affrontement, la fouille des attaquants avec la présence de colifichets et d’armes


de facture anglaise confirme la thèse d’une embuscade iroquoise. De plus, dans les environs,
les personnages peuvent découvrir un petit campement dissimulé (Test de Survie, d’Observation
et de Tactique). Tout porte à croire qu’il s’agit d’un piège et que tout cela n’a rien de fortuit.
De Montcalm est circonspect car seul son entourage proche, le Gouverneur-Général et bien sûr son cousin étaient
au courant de ce voyage privé.

Chapitre III : Aux origines


L’arrivée de la troupe à Crevier se fait dans une ambiance beaucoup plus morose et tendue qu’au départ de Québec.
L’attaque de la veille a laissé des traces tant physiques que morales. La suspicion devrait être au rendez-vous.

Crevier est un village colonial typique. En ce printemps les habitants sont en plein travail agricole. Tout le monde
s’affaire. Le manoir domine l’endroit. Il s’agit d’un ensemble de bâtiments massifs et anciens mais plutôt bien

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entretenus. A vrai dire, comparativement aux autres demeures paysannes, l’édifice est du même acabit, juste plus
spacieux et plus confortable. L’autre différence principale provient de l’enceinte qui en fait une ferme fortifiée au
sens propre du terme.

Le manoir
Le manoir en lui-même comporte un étage. Le rez-de-chaussée est composé du salon-salle de réception où trône
une énorme cheminée, des cuisines, d’un cellier et du cabinet de travail et de comptabilité du seigneur. L’étage est
réservé aux quatre chambres. Seule celle de François est utilisée.
Deux dépendances encadrent le manoir et délimitent une basse-cour bien remplie. Elles servent à la fois
de logement pour les serviteurs permanents mais aussi de réserve pour des vivres, du bois et de l’outillage.
L’une d’elle dispose d’une cave voûtée. Des potagers étendus puis des terres arables complètent la propriété.

L’accueil de François Gozon de Crevier est chaleureux (il sait donner le change…). Celui-ci est en pleine
organisation des corvées annuelles et de la future perception de son impôt (en monnaie et en nature) en lien
avec les prochaines récoltes. Il est donc fort occupé. Néanmoins il paraît ravi de recevoir son cousin de France,
un homme si important et si proche du trône. Par contre, l’accueil pratique de celui-ci et de sa suite laisse à
désirer. Rien ne semble véritablement prêt. François mettra cela sur le compte du printemps qui est précoce et à
l’organisation des activités agricoles. Il se dit débordé et s’excuse pour ses manières un peu rustres qui flirtent
avec le manque d’hospitalité. Ses explications sont crédibles mais devraient malgré tout déjà faire quelque peu
écho aux événements de la nuit précédente. Néanmoins, la demeure est vaste, la famille prospère et les serviteurs
réactifs. L’accueil de tous ne posera aucun problème.

Peu de temps après l’arrivée des personnages, d’autres visiteurs pointent le bout de leur nez. Il s’agit du seigneur
voisin et ami de François, Paulin de Matane accompagné de quelques serviteurs. Son arrivée va créer un
véritable choc car à peine pose-t-il les yeux sur Diane que De Matane pâlit et se décompose. De son côté, la jeune
abandonnée semble mal à l’aise également. Au prix de ce qui semble être d’un réel effort de volonté qui lui vaudra
un malaise, Diane finit par s’écrier : “Père !”.
Souvenons-nous
Dans le premier scénario “Peur sur Québec”, Diane apparaît sous les traits d’une fillette
abandonnée par sa famille dans les rues de Québec. Cependant, les personnages avaient déjà
pu noter son allure contradictoire avec une vie de totale misère : maintien, bonne santé, bonnes
manières, étrange difficulté à se souvenir de son passé et de son identité exacte, etc. En fait,
les parents de Diane, Paulin et Irène De Matane ont abandonné leur fille après lui avoir fait
ingérer une potion alchimique d’oubli. Ceux-ci avaient très peur des pouvoirs manifestés par
leur fille et craignaient une possession diabolique. En même temps, ils ne se voyaient pas la
faire disparaître. Lâchement, ils ont livré Diane à la rue lors d’une discrète escapade à Québec,
et on fait croire à tous au départ de leur fille chez une riche tante en France pour parfaire son
éducation. Aujourd’hui, deux ans plus tard, le Destin s’acharne et fait apparaître au grand jour
les origines de Diane.

Cet événement pour le moins surprenant va complexifier les choses. Les personnages vont continuer leur mission
d’escorte (surtout au vu de l’attaque précédente), favoriser le contact entre Louis-Joseph de Montcalm et la
Compagnie et gérer l’histoire de Diane. Le tout alors qu’un sombre complot est à l’oeuvre.
En effet, François Gozon de Crevier et Paulin de Matane ont été approchés par des agents anglais. Ils ont été
achetés et ont trahi la France au nom de leurs petits intérêts personnels. Pour eux, malgré les premiers succès
français, à terme la Nouvelle-France sera vaincue et deviendra britannique. Ils ne veulent pas vivre un triste sort
similaire à celui des Acadiens. Ils ont pris les devants et le risque de passer à l’ennemi. En gage de son ralliement
et afin de devenir incontournable, François a même offert sur un plateau la tête de son cousin éloigné, le nouveau
commandant en chef des forces armées de la colonie. Paulin, homme lâche et servile par excellence (l’odieux
stratagème qu’il a orchestré autour de sa fille le prouve bien), marionnette de De Crevier, a suivi le mouvement.
Il héberge actuellement des agents anglais sous couverture, ceux-là même qui ont organisé l’embuscade de la

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veille avec leurs alliés iroquois !

Tout ce galimatias va devoir être savamment démêlé par les personnages. Traquer un monstre en forêt oui !
Mais faire face à une petite fille bouleversée, être en relation avec un officiel puissant dont dépend sans doute
l’avenir de la colonie, le tout dans une ambiance de secret et de trahison... Ils vont avoir fort à faire…

Voici quelques points clés pour vous guider dans ce chapitre mouvementé :

p  D’abord dans le déni et le mensonge, poussé dans ses retranchements, Paulin craquera et révélera la
triste vérité. D’autant plus si les personnages pensent à se rendre chez lui ou à faire venir son épouse Irène.
Celle-ci n’a pas supporté l’abandon de Diane. Irène est rongée par le remord et les regrets. Cette femme
vit sous la coupe de son mari lâche et cupide. Elle aimerait revenir en arrière et changer sa vie. Face à son
enfant, elle s’effondrera et avouera toute la triste vérité (Test d’Influence). Voulant racheter ses fautes,
Irène pourrait devenir une précieuse alliée pour les personnages afin de confondre son époux et François.
Cependant, impitoyable, Diane ne pardonnera rien à ses parents et se montrera rejetante et froide.

p  Diane est perturbée par la révélation de ses origines. Cela la rend extrêmement sensible et accroît
de manière impressionnante ses pouvoirs médiumniques et de prémonition. Au-delà, sa volonté lutte
furieusement contre les effets de la potion d’oubli alchimique qu’elle finira par vaincre mentalement. Le
comportement de Diane en devient donc de plus en plus inquiétant. La fillette fait des crises d’épilepsie et
de somnambulisme diurne comme nocturne. Elle soliloque et a des moments d’égarement pendant lesquels
elle semble partir véritablement ailleurs (dans le Monde des Esprits, au sein des Mille-Et-Un-Vaux ?).
Le développement soudain de ses capacités psychiques est tel que son environnement en est affecté de
manière incontrôlable. Cette ambiance est difficile à vivre surtout pour des gens peu habitués au surnaturel
comme De Montcalm, sa suite, les habitants, etc.

Soyez imaginatifs et créez la panique au sein du manoir en multipliant les scènes étranges :

p  Diane en pleine crise génère des effets télékinésiques qui saccagent le salon du manoir (tests d’Esquive
et d’Influence pour faire revenir Diane).

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p  Soudain, une obscurité totale envahit la pièce où se trouvent les personnages alors que nous sommes
en plein jour. La pièce semble aussi perdre ses dimensions. Les personnages évoluent dans un véritable
labyrinthe alors qu’auparavant ils étaient tranquillement installés. Une odeur d’humus répugnante se
répand. On entend des bruits étranges et spongieux. Au loin un vent violent souffle à travers des branches...

p  Des bruits étranges sont entendus à l’étage dans une des chambres (comme des billes qui chutent et
roulent sur le parquet). Sur place, les personnages découvrent des coquilles d’escargots monstrueuses
couvertes de pointes acérées et d’une substance huileuse.

p  Diane attire la curiosité d’esprits intangibles et invisibles plus ou moins agressifs qui se rient d’elle ou
même qui l’attaquent à vue. Les personnages doivent l’exfiltrer et la mener en lieu sûr (la cave ? Le grenier ?
tests d’Athlétisme, de discrétion, etc.). Ensuite, ils doivent rassurer la fillette terrifiée (test d’Influence).

p  Une nuit Diane a disparu alors que personne ne l’a vu sortir du manoir ! La petite fille reviendra sans
que personne ne la voie rentrer. Elle a les cheveux humides et collants. Ses pieds sont boueux et ses bras
couverts d’égratignures.

p  Au petit matin, la cuisine du manoir se transforme et devient une grotte aux parois recouverte d’un
lichen nauséabond. Un rideau de brume liquoreuse est présent au fond de la cavité. Il mène directement
au coeur des Vaux près d’un marécage sans fin. Rapidement la pièce redevient normale et tout le monde
réapparaît dans notre réalité (Test de Volonté ou -1 en Santé mentale).

p  François est lui de plus en plus nerveux. Il a peur que Paulin et Irène en craquant ne révèlent aussi leur
sombre manigance. Il tentera à plusieurs reprises de s’entretenir fermement avec son ami et les personnages
auront l’occasion d’assister à leurs entretiens “dominant-dominé” (Tests d’Observation et de discrétion).
De plus, il est clair que la visite de son parent ne l’arrange pas vu qu’il ne l’avait pas vraiment prévu.
Après tout le maréchal n’était pas censé arriver jusqu’au manoir ! Ces foutus Anglais devaient l’éliminer

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avant ! Des lettres cryptées peuvent être retrouvées dans son bureau. Il s’agit de sa correspondance secrète
concernant la négociation de sa trahison avec les anglais (Test de Filouterie). Démasqué François défendra
chèrement sa peau et, ou tentera à tout prix de fuir (exemples : prise en otage de Diane, faux repentir puis
attaque sournoise, etc.).

p  Si Paulin ne revient pas ou si les personnages débarquent chez lui (ils pourraient vouloir confronter
Irène à Diane), les militaires anglais qui y sont secrètement accueillis ne vont pas rester sans rien faire.
Les quatre agents britanniques tenteront d’éliminer les personnages. Ils effectueront même une sortie
musclée chez les Gozon de Crevier pour savoir ce qu’il en retourne. S’ils n’arrivent pas à se débarrasser des
forces françaises, ils tenteront de fuir en utilisant les mêmes moyens que François. Notez que ces militaires
sont des soldats capables et bien entraînés. Ce sont des spécialistes de ce genre d’opération d’infiltration.

p  De Montcalm et sa suite seront à la fois des atouts face à tous ces événements mais aussi une source
de complication supplémentaire. En effet, face aux manifestations surnaturelles générées par Diane,
les Français réagiront mal, très mal. Leur peur est palpable. Si la trahison de Paulin et François est révélée,
leur réaction sera extrême. Comme beaucoup ils détestent les Anglais et encore plus leurs séides et les
traîtres à la couronne. Ils n’hésiteront pas à fusiller les comploteurs.

Conseils pour le meneur


Les conclusions possibles de ce dernier chapitre sont variables. Il y a de fortes chances que
finalement Paulin et, ou Irène craquent, révèlent tout, que de fait François tente de fuir et que
les Anglais débarquent brutalement, tout se terminant par une échauffourée sanglante au sein du
manoir. Quoiqu’il en soit, De Montcalm s’en tirera au pire blessé. Faites en sorte qu’il revienne
à Québec même si le groupe est au plus mal.
Conclusion : Retour au bercail
Cette aventure aura un impact significatif sur le maréchal. D’un côté, il comprend que le danger anglais n’a
jamais été aussi présent. Cela va renforcer sa conviction profonde de revoir l’organisation des forces françaises
coloniales. De fait, il va être de plus en plus présent à la fois sur le terrain mais aussi auprès du Conseil souverain.
Cela ne va d’ailleurs pas arranger ses relations avec le Gouverneur-Général De Vaudreuil et une rivalité va naître
peu à peu entre les deux hommes. Cela va aussi en faire une Némésis pour les britanniques, une cible ambulante.

Parallèlement, De Montcalm comprend que la Nouvelle-France vit un surnaturel bien réel. Il sera à présent plus
attentif aux récits et autres événements étranges qui vont avoir lieu. Au-delà, il cerne mieux pourquoi Louis XV
tient à la Compagnie des Cent-Associés. Le marquis rejoindra l’avis de sa majesté et tentera dès lors de travailler
au mieux avec la corporation et ses agents.

Les personnages ont côtoyé des “huiles” et celles-ci vont les avoir à la bonne. Avoir l’oreille du Gouverneur-
Général et du maréchal est un plus indéniable pour la suite de leur parcours ! Ils ne sont plus de vulgaires inconnus,
tenez-en compte.

Robert Campagne sera impressionné par leur travail et les considérera comme les agents N°1 de la guilde,
la crème de la crème. Il en rendra compte et cela aura également un impact pour la suite de leur carrière face à
l’horreur (lisez la lettre reçue par le groupe en fin de campagne...).

Diane est bouleversée par la révélation de ses origines et la tragédie de son abandon. Son retour à Québec sera
difficile. La fillette est pleine de rancoeur et de désespoir. Parallèlement ses pouvoirs ont encore augmentés.
Soit son père est mort, soit il a été arrêté pour trahison. Sa mère est esseulée. Quoiqu’il en soit, Diane restera
dans un rejet massif de ses parents qu’elle considère comme morts. Elle refuse tout contact. Ainsi, Diane n’a plus
rien à perdre. Elle va se lancer à coeur perdu dans ce que la Compagnie et Robert demandent d’elle ! Elle va se

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concentrer sur ses pouvoirs et sur l’inquiétant autre monde qu’elle perçoit quelque fois.

Si les personnages se renseignent sur l’élixir d’oubli utilisé contre Diane, ou mieux si l’un d’eux est alchimiste et
décide de se consacrer à la question, ils apprennent qu’il s’agit d’une création unique. Elle est issue de Mnémosynas,
un alchimiste à moitié fou et maintenant introuvable car en fuite en raison de ses recherches controversées. Les
effets de la potion sont malheureusement irréversibles. En creusant (tests d’Influence, de Filouterie et d’Alchimie),
ils apprennent que Mnémosynas a un temps fréquenté Québec mais il aurait eu des problèmes avec un club
d’érudits inquiets de ses expériences. Ce groupe discret est difficilement identifiable. Cependant, un personnage
alchimiste sait qu’un cercle d’alchimie existe à Québec mais qu’il est difficile d’y entrer sans y être invité ou
sans une bonne raison. Sachez que ce cercle alchimique apparaîtra au grand jour lors du dernier scénario de la
campagne. Un personnage-joueur alchimiste pourra même participer à une de leurs réunions. Vous pourrez alors
introduire cette société secrète dès à présent.

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III - Nos fautes 25
Présentation
ette aventure fait suite au scénario “Apparences” et constitue le troisième épisode de la campagne

C “Abîme”. Un peu moins de deux ans se sont écoulés depuis le dernier opus. Nous sommes en hiver 1758,
en plein mois de février. Dans l’idéal il conviendrait que les personnages aient vécu d’autres péripéties
avant de se plonger dans ce chapitre (des scénarii intermédiaires, officiels ou “maison”).

Au cours de ce scénario interculturel, les personnages vont négocier avec des représentants algonquins afin que le
marquis de Montcalm puisse compter sur eux dans de futures actions militaires. Cette rencontre stratégique sera
l’occasion pour les personnages d’affiner leur sens de la diplomatie mais aussi de se plonger en plein coeur de la
culture et du mysticisme amérindien. En effet, les personnages vont voyager entre réalité et Monde des Esprits,
pour le meilleur et pour le pire.

Un peu d’Histoire
La Guerre de la Conquête fait maintenant rage. Les Français depuis l’arrivée de Montcalm ont redressé la barre
(entre 1756-1758). Les troupes accumulent les succès. Le maréchal a considérablement amélioré le système
défensif de la colonie mais aussi multiplié les opérations ambitieuses qui ont permis aux colons de retrouver
confiance en l’avenir. Malheureusement à partir de 1758 un virage va avoir lieu. Peu à peu les Anglais vont réussir à
faire basculer le cours des événements. Les Britanniques vont envoyer des renforts conséquents; le blocus efficace
des ports organisé par la Royal Navy va saper la logistique et le moral français; mais surtout l’intensification de la
guerre en Europe va pousser les autorités royales à abandonner la colonie à son sort et à sa chute.

Revenons un peu en arrière afin de bien comprendre les tenants et les aboutissants de ce nouveau scénario. En août
1757, a lieu la bataille de Fort William Henry. Ce fort, aussi connu sous le nom de Fort Saint George, est situé
près du lac du même nom au sein de la province britannique de New-York. Lors de cette belle victoire française,
Montcalm accepte la reddition anglaise et autorise même les soldats vaincus à rejoindre avec les honneurs la ville
proche de Fort Edward. Mais contrairement à ses premiers engagements le marquis décide finalement de brûler
la fortification. Ses alliés amérindiens refusent doublement cette conclusion. Ils s’estiment trompés et floués.
Pour eux les Anglais ne méritent pas un tel traitement de faveur vu leurs propres exactions envers les Natifs.
De plus le fort était censé être une prise de guerre offerte par les Français à leurs alliés amérindiens. A deux reprises
ces derniers s’en prennent violemment aux Britanniques et De Montcalm devra utiliser les troupes françaises et la
force pour les protéger. Cet épisode suscitera bien des remous par la suite.

L’alliance franco-amérindienne est primordiale. Montcalm a besoin du soutien des Amérindiens pour faire face
à la puissante machine de guerre anglaise. Il ne peut s’en passer. C’est pourquoi, après les événements de l’été
dernier qui ont marqué les esprits autant chez les Colons que chez les Sauvages, De Montcalm a besoin de
réaffirmer les liens et l’entente entre les Français et les tribus traditionnellement alliées. Pour cela le marquis a
décidé de faire appel à des intermédiaires, des spécialistes de terrain expérimentés et des mystères surnaturels, les
agents de la fidèle Compagnie des Cent Associés. C’est pourquoi il contacte de nouveau Robert Campagne pour
que celui-ci mandate ses meilleurs hommes auprès d’un chef algonquin. Ils doivent renouveler le pacte d’alliance
franco-amérindien au nom du roi et de lui-même en tant que chef de l’armée coloniale.

Résumé du scénario
Dans le premier chapitre, après une rencontre d’introduction avec un Robert Campagne aux abois accompagné
d’une Diane de plus en plus étrange, les personnages vont partir pour un périple difficile à la rencontre de la tribu
algonquienne.

Dans le chapitre suivant, ils devront convaincre les Algonquins des bonnes intentions de De Montcalm et surtout
de la continuité de l’intérêt de la couronne pour eux. Cela sera l’occasion de vivre au plus proche les us et les
coutumes de cette puissante tribu à même de rassurer et de rallier toutes les autres.

Dans un dernier chapitre, les personnages devront sceller concrètement le renouvellement de l’alliance franco-

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amérindienne en aidant directement un chaman algonquin grâce à un voyage mouvementé au coeur du Monde
des Esprits. En effet, lors de leur séjour, les personnages auront pu remarquer que la tribu a un sérieux problème
spirituel à régler...

Introduction : Sens-tu le vent tourner ?


L’hiver 1758 est particulièrement rude. Le froid et la neige frappent Québec de plein fouet. Les rues sont désertes.
Si on ajoute à ce contexte déjà difficile, les tensions dues à la guerre de plus en plus intensive entre les Français
et les Anglais, l’ambiance n’est pas au beau fixe. Etrangement, malgré les succès engrangés par De Montcalm,
la Colonie semble retenir son souffle, comme dans l’attente du pire. La quasi révolte des troupes alliées
amérindiennes lors de la prise de Fort Henry a marqué les esprits. Finalement, malgré les décennies, les liens entre
les colons et les Amérindiens restent fragiles. La guerre actuelle pousse tout le monde dans ses retranchements.
D’ailleurs, partout, à la campagne comme à la ville, le regard sur les Amérindiens a quelque peu changé : et si un
jour c’était aux troupes françaises que les Sauvages s’en prenaient ?

Pour terminer de poser l’ambiance de nouveau lourde de ce nouveau scénario, n’oublions pas que près de deux ans
se sont écoulés depuis le deuxième épisode de cette campagne. La résurgence du surnaturel est à son paroxysme.
Jamais la frontière entre le Monde des Esprits et le nôtre n’a été aussi poreuse. Les Mille-Et-Un-Vaux gangrènent
également de nombreux endroits en Nouvelle-France. Les personnages ont pu être confrontés à de multiples
dangers entre le deuxième scénario et celui-ci ! La Compagnie des Cent Associés est devenu LE barrage face à la
menace qui gronde. Aujourd’hui, les missions liées à la préservation des intérêts français (comme le commerce
de fourrures et la lutte contre les forces anglaises) ont été reléguées au second plan par rapport à la confrontation
contre l’horreur surnaturelle. Ce qui ne semblait être au début qu’un épiphénomène de la Guerre de la Conquête
est devenu à présent le centre de l’action de la Compagnie.

Insistez sur cette tension omniprésente et sous jacente ! C’est un des buts de cette campagne : une mise en abîme
à l’échelle des personnages de la chute inexorable vers laquelle tend la Nouvelle-France. Au fil du temps et des
scénarios, les personnages sont passés du statut de jeunes recrues à celui de vétérans ayant vécu bien des horreurs.
La Colonie semble prise dans une spirale infernale. Les succès militaires n’atténuent plus la peur primitive que
tout le monde ressent inconsciemment. Cette ambiance d’inéluctable est à distiller au cours de vos séances,
tant dans celles liées aux chapitres officiels de cette campagne qu’au sein de vos propres créations.

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Dans le même ordre d’idée, si Robert Campagne apparaissait surmené et soucieux lors du scénario officiel
précédent, cette fois, il a basculé ! L’homme a mal vieilli. Ces deux dernières années l’ont fortement impacté.
Amaigri et amer, le visage blafard, rongé par les insomnies, Robert n’est plus que l’ombre de lui-même. Il est
loin le temps où le solide notable recevait les personnages dans son chaleureux bureau pour partager un verre de
liqueur tout en les envoyant au front. Si lors de l’épisode Apparences, Robert était aux aguets, aujourd’hui il est
aux abois ! Sa demeure est à son image : laissée à l’abandon. Hanté par les récits rapportés par les agents de la
Compagnie, dépositaire de bien des horreurs et de bien des secrets, la voix des Associés au sein de la capitale est
devenue paranoïaque. Robert s’est coupé d’un monde qui lui semble futile et promis à un funeste destin. Sa seule
véritable relation, pour le meilleur et pour le pire, tant pour sa personne que pour sa santé mentale, est Diane.

Diane

Diane n’est plus une petite fille. Elle est maintenant âgée d’une douzaine d’années (gardez à
l’esprit qu’à l’époque on n’est plus un enfant à cet âge). Les pouvoirs de Diane se sont encore
affirmés (voyez son profil actualisé dans l’annexe). A présent, médium émérite, l’étrange fillette
abandonnée par les De Matane évolue quasi constamment entre plusieurs mondes, entourée
d’esprits et d’âmes en peine. Ses prémonitions se sont affinées au point où Diane est maintenant
capable de se projeter mentalement au coeur de celles-ci et d’entrevoir ainsi la somme des
possibles. Pour elle, les événements contemporains ne sont qu’un fil parmi d’autres. Diane
est devenue distante, froide. Son discours est désincarné, quelque fois halluciné, souvent
dérangeant. Elle se montre volontiers condescendante et un brin autoritaire. Elle considère les
autres comme des pantins et des aveugles dans un monde qui les dépasse. Cette attitude rend
tout le monde mal à l’aise et agace. Cela l’éloigne un peu plus chaque jour des autres, de ses
pairs comme des adultes. La vérité sur ses origines l’a profondément traumatisée. Diane en
garde une rancune tenace et une colère froide solidement accrochée au coeur. Bref, à l’instar de

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Robert, il est loin le temps où les personnages ont recueilli cet enfant attachante…

Comme toujours l’entretien a lieu dans le cabinet de travail de Robert. C’est un véritable capharnaüm où
s’amoncellent une quantité impressionnante de dossiers et autres missives. Diane sera présente. Elle vit ici à plein
temps et forme avec son tuteur un duo inséparable (d’ailleurs la nature exacte de leur relation a de quoi interroger :
qui a le plus d’autorité sur l’autre ? Diane ne joue-t-elle pas un rôle dans l’état alarmant de Robert ?...). D’emblée,
Robert explique la situation actuelle de tension entre les forces armées françaises et leurs alliés amérindiens
suite aux événements de Fort Henry. De son point de vue, De Montcalm aurait mieux fait de laisser les tribus se
“défouler” tout en respectant ses engagements de leur céder le fort. Campagne apparaît particulièrement dur et
impitoyable dans ses propos. Diane ne dit rien mais semble acquiescer. Elle finit par appuyer les propos de son
protecteur en affirmant d’une voix éthérée à glacer les sangs : “La rage appelle la rage et tout a un prix.”.

Robert explique que le maréchal De Montcalm a confié une mission épineuse à la Compagnie : rallier les amérindiens
en réaffirmant l’union naturelle entre ceux-ci et la France. Une rencontre a été organisée avec Amikniping (que
l’on pourrait traduire par “Castor des eaux”*), un influent Okima (chef) algonquin. Un dirigeant tribal écouté par
l’ensemble des alliés amérindiens de la Nouvelle-France. Les personnages ont pu déjà en entendre parler (test de
Raison possible). car nous y faisons référence dans l’épisode précédent lors de la rencontre avec les chasseurs
abénakis).

L’évènement doit avoir lieu au Lac des Deux Montagnes, près de Montréal, dans une des baies de la rive nord
nommée la Baie du Fer à Cheval. Le lac est situé à une semaine de voyage de Québec environ. Amikniping
et sa communauté se sont installés là-bas pour l’hiver avant de reprendre leur parcours traditionnel de pêche et de
chasse au printemps. De Montcalm souhaite que la Compagnie serve d’intermédiaire car il ne veut pas brusquer
les tribus. Il pense à raison que les Cent Associés sont respectés par les Amérindiens, peut-être plus que lui-même
vu le contexte tendu... C’est pourquoi Robert Campagne mandate ses meilleurs agents : les personnages vont
devoir se rendre auprès des Algonquins et renouer une confiance délitée. Ils ont carte blanche pour cela mais
les autorités coloniales malgré les pénuries engendrées par la guerre ont prévu divers cadeaux pour les aider :
alcool bien sûr, armes à feu, bijoux et quelques produits de bouche exotiques venant du royaume. Robert ne cache
pas que cette mission est cruciale. Il évoquera en substance les tensions actuelles ayant lieu également au sein du
Conseil souverain : De Montcalm “fatigue” le Gouverneur-Général de Vaudreuil et leur relation déjà compliquée
ne s’est pas arrangée suite à la crispation des liens avec les forces amérindiennes.
Les personnages peuvent estimer qu’offrir des babioles à un si puissant émissaire risque d’être malvenu.
La démarche de De Montcalm apparaît comme décalée. Nous ne sommes plus au temps des premières négociations
et les Amérindiens ne sont évidemment pas des sauvages primitifs ! S’ils en font la remarque, Robert acquiesce et
explique qu’en parallèle du marquis le Gouverneur-Général de Vaudreuil est prêt à rétrocéder quelques terres aux
tribus avec en plus une promesse de les aider à y ériger une modeste fortification. Le maréchal ignore ce fait mais
De Vaudreuil tient à rester discret pour ne pas le froisser. Les babioles sont plus à considérer comme des cadeaux
en remerciement de l’hospitalité.

Une note sur les noms amérindiens

Pour les puristes, sachez que nous avons utilisé des noms qui ne sont pas forcément issus de la
langue algonquienne. Certains sont originaires de diverses ethnies amérindiennes afin de jouer
sur les sonorités et les significations. Merci de votre compréhension.

La Compagnie et Robert ont organisé le voyage et prévu les vivres et l’attelage en conséquence. Le voyage peut
se faire en traîneau à cheval ou à chiens (à la préférence des personnages). La plus grande partie du périple est
praticable via le Chemin du Roy, ce qui est sécurisant. Après cette entrevue le groupe est invité à partir le plus tôt
possible.

Quelques repères
Les Algonquins sont une tribu nomade populeuse et puissante formée par différentes ethnies (ou
liée à différentes peuplades), elle-même subdivisée selon plusieurs communautés. Pour faire simple,

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nous parlerons et traiterons des Algonquins comme un seul et même ensemble tribal cohérent. Les
Algonquins sont respectés par toutes les tribus amies et alliées à la Colonie : Abénakis, Hurons,
Outaouais, etc.

A l’époque de Colonial Gothic, les Algonquins ont été repoussés par les Iroquois et ils se sont
regroupés dans la région de l’Outaouais (c’est à dire autour de la rivière Ottawa). Cependant il existe
aussi des communautés en Ontario près des grands lacs américains. Plutôt nomades mais pouvant
aussi se sédentariser temporairement, les Algonquins vivent dans des wikiwans, des habitations
légères en bois ou en écorce (de bouleau généralement). Leur culture est tournée vers la pêche et la
chasse. Néanmoins, lors des périodes de sédentarisation, la pratique de l’agriculture est commune
(maïs, haricots et courges) et ce bien qu’ils essaient toujours de vivre en harmonie avec la Nature.
Ils rejettent ainsi toute idée de domestication poussée de celle-ci.

Leurs croyances sont riches. Elles sont axées sur l’existence de nombreux esprits nommés
manitok et de rites permettant d’interagir avec eux (exemples : la tente tremblante et la suerie).
Le Midewiwin est à la fois le terme utilisé pour nommer l’ensemble de leurs croyances mais aussi le
nom de la société religieuse et spirituelle (appelée aussi la “Société de la Grande Médecine”) fondée
par l’ensemble des chamans (ou Mide), une sorte de clergé animiste.

Mais vec l’arrivée des missionnaires français, de nombreux Algonquins se sont convertis au
christianisme. Le Midewiwin s’est teinté de croyances catholiques. Leurs pratiques cérémonielles
sont variées et subtiles. Les Algonquins croient que tous les êtres vivants possèdent une essence
spirituelle plus ou moins puissante leur permettant à leur échelle d’agir sur le Monde des Esprits.
Les rites permettant de communier et de communiquer avec les esprits sont habituels.

Leur organisation politique repose sur un chef nommé Okima entouré et conseillé par des sages,
des hommes médecines, des notables voir d’anciens okima. C’est le cercle des anciens qui choisit
le prochain okima lorsque celui-ci meurt ou s’il ne souhaite plus ou ne peut plus exercer sa charge.
Les okima et les cercles algonquins sont réputés pour leur grande sagesse, leur courage et leur érudition.

La société algonquienne est patriarcale. La séparation des rôles entre hommes et femmes est bien
fixée. Les hommes sont des chasseurs et des guerriers, ils gardent les rênes du pouvoir au sein de
la tribu. Les femmes interviennent dans l’éducation des enfants, la gestion familiale, la cueillette,

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l’agriculture, etc. Leur influence sociale et politique est faible contrairement aux femmes iroquoises
qui évoluent dans une société matriarcale.

La communauté d’Amikniping est importante et soudée. Surtout, cet okima est réputé et
extrêmement respecté, de même que son cercle des anciens. Parmi celui-ci se trouve Ishatokela
(“Renard protecteur”) un des plus puissant mide actuel. Cette tribu est également auréolée de
plusieurs succès militaires d’importance contre les Iroquois.

Chapitre I : Back to the snow


Comme nous avons déjà pu le souligner, cet hiver 1758 est particulièrement rude (froid, neige, vent, congères,
blizzard, etc.) ! Le voyage vers Montréal et le lac des Deux Montagnes est donc difficile malgré la logistique
adaptée prévue par la Compagnie. Les personnages auront l’impression d’être les seuls à mettre le nez dehors.
Malgré des haltes protégées dans des abris de fortune, des relais de route laissés à la disposition des voyageurs,
des fermes ou des relais marchands hospitaliers, ce voyage est pénible et éreintant.

Rendez ce périple périlleux ! Les personnages doivent être mis en difficulté. Insistez sur la dangerosité de la saison
et de l’environnement. Mettez en retrait la thématique du paradis perdu : blanc, immaculé et sauvage au profit
d’un froid hostile et d’un hiver particulièrement dangereux. Mettez à rude épreuve les capacités des agents de la
Compagnie en demandant divers tests : de Survie, d’Endurance, d’Athlétisme, etc.

Voici en vrac quelques idées à exploiter selon vos envies. N’hésitez pas à en inventer d’autres :

- Une des montures se blesse sur une plaque de verglas et un traîneau est immobilisé : Les personnages

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doivent négocier son remplacement auprès d’un fermier peu commode. Au-delà de cette interaction,
la scène peut être l’occasion de faire face à un danger inattendu : un esprit du froid malmène la famille,
il faut l’apaiser avec une offrande approprié : le sacrifice d’un des cochons de la ferme.

- Une partie des vivres est avariée ou de mauvaise qualité : Les personnages doivent chasser ou débusquer
des terriers d’hiver pour améliorer leur ordinaire. cette chasse en condition extrême est particulièrement
difficile. Les personnages pourraient tomber dans une crevasse formée entre deux dénivellations (test
d’Observation et d’Athlétisme).

- Un des personnages tombe malade suite à des efforts répétés : une halte doit avoir lieu au sein d’un relais
de route exigu. Le groupe est perdu au milieu d’un piège de neige. Dehors le vent souffle et une meute de
loups des Vaux affamés se rapproche...

Les personnages passeront près des villes de Trois-Rivières et de Montréal pendant leur progression vers les
Algonquins. Selon vos envies et votre imagination, vous pouvez très bien intercaler des épisodes de jeu liés à ces
villes dans ce scénario :

- Un incendie étrange et destructeur frappe Trois-Rivières. Il est dû à un esprit du feu en colère qui demande
à être amadoué. Il s’agit du frère spirituel de l’esprit du froid de la ferme (si vous utilisez cette scène).
L’esprit doit être apaisé par un sacrifice. Mais surtout, Saturnin Queuleu, un artisan brasseur, doit être
sauvé des flammes qui ravage son établissement : L’Ecume des neiges.

- Près de Montréal, des miliciens signalent la présence inquiétante de soldats anglais et iroquois en repérage
et en maraude. La petite troupe prépare l’attaque et le sabotage d’un entrepôt de vivres militaires.
Accueillis par les autorités, les personnages ont l’occasion de s’y ravitailler alors que l’assaut est donné.

Le Baykok
Lorsque le groupe aura bien souffert, faites apparaître une éclaircie. La journée semble moins froide. Le fleuve
se divise et le groupe progresse plus facilement près de l’île de Montréal. Ils bifurquent alors pour longer le
fleuve vers le lac des Deux montagnes et la Baie du fer à cheval. Bref, installez une ambiance plus sereine mais
trompeuse de fin de voyage comme si le prochain chapitre s’annonçait tranquille et que les joueurs et leurs
personnages pouvaient enfin souffler après en avoir tant bavé.
A partir de là le groupe est pris en chasse par un Baykok (attention, cette créature bénéficie ici d’un profil amélioré
par rapport à celui donné dans le livre de base. Voyez l’annexe à la fin de ce livre). Le mort-vivant affamé est un
ancien Abénaki exilé pour meurtre, mort de faim et de froid. Cette créature ne pense qu’à manger le foie chaud des
voyageurs isolés ! Le Baykok se montrera patient et prudent. Sournois, il attaque à la faveur de la nuit en harcelant
le groupe avec ses flèches. Son but est de fatiguer les personnages et de leur tendre un piège pour mieux isoler.
Les personnages vont devoir débusquer le monstre. Les personnages doivent arriver auprès des Algonquins
épuisés. Ce premier chapitre sous forme de “road trip” doit être une véritable aventure en lui-même. L’intervention
du mort-vivant en est le clou du spectacle !

Conseil pour le meneur


Faites de cette traque une ultime épreuve éprouvante ! Mettez en scène un pistage difficile du
Baykok après une attaque nocturne avec un combat final dans une combe enneigée et traîtresse
(test d’Athlétisme et de Survie).

Chapitre II : Auprès des Vrais Hommes

Les Vrais Hommes


Avec d’autres ethnies de langue algonquienne (Outaouais, Ojibwés, etc.), les Algonquins
se définissent comme des Anishinaabe : des “Vrais Hommes” ou “le Peuple des Origines”.
Cette désignation est importante car elle reflète le relatif positionnement de leadership des
Algonquins et surtout leur lien privilégié avec le Monde des Esprits et la Terre-Mère. Pour

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compléter cette approche, sachez que le terme Algonquin dérive du Malécite et signifie
“Ceux de notre parenté”. Cela réaffirme leur statut d’hommes véritables en comparaison à tous
les autres hommes qui seraient issus eux d’une autre branche de l’Humanité (d’une autre espèce
en quelque sorte, à l’image des Néandertaliens et de l’Homo sapiens).

Après ce voyage mouvementé, les personnages arrivent dans la baie aux berges glacées. Ils aperçoivent un rassemblement
de wikiwans. Plus de trois cents Algonquins se sont installés ici pour l’hiver. Malgré le temps, tout le monde est actif et
la vie continue : les hommes pêchent après avoir brisé la glace, les femmes secouent les peaux, les enfants jouent, etc.
Au centre de l’agglomération, un grand et magnifique totem de Nanabush trône (l’esprit bienfaiteur mais aussi farceur
du Grand-Lièvre). On peut aussi remarquer grâce aux pierres noircies qui les entourent la présence de plusieurs petites
tentes de sudation. L’arrivée du groupe est remarquée et des guerriers viennent à leur rencontre.

Les Algonquins sont tout d’abord méfiants mais ils se montreront accueillants. En effet, la Compagnie des Cent-
Associés a bonne réputation auprès des Amérindiens et beaucoup ne sont pas sans savoir que la corporation ne
s’occupe pas que de commerce. La Compagnie a souvent des liens privilégiés avec différents mides et autres
chamans à propos des menaces surnaturelles qui frappent la Nouvelle-France. Ainsi, Nathorod (“Petit tonnerre”),
le guerrier à la tête des sentinelles, les mène sans difficulté vers le chef Amikniping.

Attention, Nathorod est un adopté et non un Algonquin pure souche. Son ancien nom est Paul Fabert. Il s’agit
d’un colon, un ancien marchand itinérant ayant fait le choix de vivre auprès de la tribu. Il a été sauvé par les
Amérindiens après avoir été blessé lors d’une chute en forêt. Il a épousé une femme algonquienne : Sora (“Oiseau
chantant”) qui est actuellement enceinte de leur premier enfant.

Conseils pour le meneur


Nathorod/Paul Fabert sera pendant toute cette partie de l’aventure le guide des personnages
et leur interface privilégiée avec les Algonquins. N’hésitez pas à le mettre en scène pour faire
découvrir à vos joueurs la richesse de la culture amérindienne mais aussi pour leur filer un
coup de pouce au besoin. Soyez subtil et sortez des images d’Epinal à propos des autochtones.
N’oubliez pas qu’à l’époque les mélanges interculturels étaient bienvenus. Les colons
français faisaient preuve d’une certaine acceptation et les autorités royales pour des besoins
démographiques prônaient l’intégration.

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Amikniping est un okima algonquin typique dans sa présentation. Il porte des fourrures d’excellente qualité
fermées par une très longue et magnifique ceinture wampum. Il est armé d’un coutelas aux nombreux colifichets
pour rappeler son rôle de chef de guerre soutenu par les manitok. Il porte aussi une pipe de pierre finement
ouvragée. Physiquement, Amikniping est impressionnant, c’est un colosse aux yeux doux, une force de la nature
dont il émane une aura de sagesse et d’autorité naturelle. En le regardant et en l’entendant parler, il devient clair
qu’effectivement cet okima est un chef respecté à même d’influer sur la situation tendue actuelle.

Quelques objets algonquins


Les Algonquins utilisent au quotidien de nombreux objets symboliques ou sacrés. Ils servent
à affirmer un statut, un rôle ou à être en lien avec les manitok à travers le Midewiwin.

p  Ceinture wampum : cette ceinture de petits coquillages fait office d’aide-mémoire tribal.
Plus elle est longue et décorée, plus la tribu a une histoire digne. On y retrouve rapportés sous
forme de chronique les prophéties, les alliances, les traités et les événements majeurs de la
communauté.

p Pipes traditionnelles : faites en bois et en pierre tendre, elles étaient des objets
importants. En effet, pour les Algonquins, fumer permettait d’acheminer ses pensées vers les
esprits créateurs pour mieux réfléchir. Fumer était aussi un acte de respect vis à vis des manitok.
Fumer servait aussi à mesurer le temps : Nijopwagan (soit “fumer 2 pipes”) signifiait une heure
de temps écoulée.

p  Bâton orateur : il symbolise le lien avec la terre de la tribu. Il sert à animer et à réguler
les débats. Celui qui le tient peut parler sans interruption. Ouvragé et béni par les manitok,

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il est à la garde du cercle des anciens. En dehors des rassemblements officiels, lorsque plusieurs
Algonquins voulaient parler ensemble d’un sujet important, il n’était pas rare qu’ils se passent
un bâton orateur improvisé (une branche).

p  Tambours et hochets : la musique est importante pour cette tribu (comme pour beaucoup
d’autres). Cependant, elle a aussi un rôle à part entière, majeur, dans la pratique du Midewiwin.
Ainsi, on retrouve au sein de la tribu de nombreux instruments richement décorés et entretenus
avec soin.

p  Bourse sacrée : c’est un petit sac de cuir contenant des pierres, des plumes, des racines,
une pipe, etc. et qui a pour vocation de servir d’outil rituel au chaman. Elle peut être transmise
de Mide à Mide lors d’une cérémonie solennelle. La peau qui la constitue indique souvent le
rang du chaman dans le Midewiwin. Plus elle est rare et précieuse, plus le chaman est reconnu.

Amikniping reçoit les personnages dans son vaste wikiwan. Nirvelli (“Enfant de l’eau”), son épouse, et ses fils
adolescents Tadi (l’aîné, “Vent”) et Wakiza (“Guerrier déterminé”) laisseront les hommes parler entre eux. Si Tadi
et Wakiza suivent à la lettre les directives d’Amikniping, Nirvelli est moins docile. C’est une Algonquine au fort
tempérament. Ses fils vivent dans l’ombre de leur père et attendent leur heure, ils restent très (trop) respectueux
vis-à vis de lui. Par contre, Nirvelli n’hésite pas à bousculer les traditions : elle veut faire entendre la voix des
femmes au sein de la tribu. Déterminée, elle a tissé de nombreux liens avec les autres épouses. Dans le dos de
l’okima, Nirvelli est devenue une femme d’influence. Elle s’intéressera aux personnages et à leur objectif. Nirvelli
pourrait être un appui tout au long de leur séjour.

Rapidement, le chaman Ishatokela se joint aux palabres. Le Mide est un homme maigre et sec. Il semble avoir été
sculpté dans le bois d’un arbre mort. Sa bourse sacrée en peau de lynx roux indique un rang élevé dans la société
Midewiwin. Ses yeux semblent briller d’un feu intérieur et son regard est difficile à soutenir (test de Psyché à -2
pour ne pas baisser les yeux après quelques instants).

Les deux notables écoutent avec attention les envoyés de la Compagnie et de De Montcalm ainsi que leurs
propositions. Ils ne laissent rien transparaître de leurs sentiments. Ils sont sur la réserve. Amikniping évoque juste
le sujet de la relation entre les tribus, les colons et l’armée royale. Il estime qu’il faut une réunion du cercle des
anciens puis une assemblée tribale. En effet, en tant qu’okima, Amikniping estime que chacun doit entendre le
discours des personnages afin que chacun puisse ensuite se positionner et transmettre ou non aux autres tribus la
parole d’alliance française. Lui-même a été perturbé par le récit et les témoignages des événements de Fort Henry.
Ishatokela est encore plus attentif. Il observe les personnages, il soupèse à chaque instant leur propos et surtout il
paraît scruter l’esprit, l’âme même, des ambassadeurs. C’est extrêmement dérangeant.

Conseils pour le meneur


Cette première entrevue est importante car elle va donner le ton pour la suite. Les personnages
font-ils une bonne première impression à Amikniping et à Ishatokela ? Soignez votre roleplay
et invitez les joueurs à en faire autant. Ils doivent avoir conscience que leur ambassade est
primordiale en ces temps troublés. Appuyez-vous éventuellement sur quelques tests d’Influence
et de Tribus amérindiennes.

L’assemblée tribale n’aura pas lieu tout de suite. C’est l’hiver, rien ne presse. De toute manière, ce n’est qu’au
printemps qu’Amikniping pourra intercéder auprès des autres okima algonquins et plus généralement auprès des
autres chefs tribaux. Sa communauté ne rencontrera d’autres Amérindiens qu’au cours de son périple traditionnel
qui débutera à la fonte des neiges, “lorsque Nanabush quittera son terrier pour courir à nouveau la Terre-Mère”.
Pour le moment les personnages sont les invités de la tribu. Ils peuvent résider ici et profiter de l’hospitalité des
Algonquins. C’est l’occasion pour eux de découvrir leur vie quotidienne et de partager leurs activités. C’est aussi
l’opportunité pour l’okima et son cercle d’anciens d’observer le comportement des personnages : les actes ont
souvent plus de poids que de belles paroles.

Développements possibles

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Voici une liste de scènes clés que vous pouvez introduire au cours de ce chapitre. Ces scènes comportent des
événements révélateurs pour la suite de ce scénario :

p Une séance de chasse ou de pêche hivernale autour du lac lors d’une journée clémente
est l’occasion de briller avec des tests de Survie, d’Athlétisme, d’Observation et de Discrétion.
Les Algonquins sont des pêcheurs et des chasseurs émérites, ils respecteront leurs pairs. Pendant
cette sortie, les personnages remarquent que les animaux semblent bizarrement peu nombreux
près de la baie.

p  La participation à une cérémonie funéraire, un rite très important chez les Algonquins. En
effet, la vénérable Aponi (“Papillon”) a rendu l’âme, son corps rejoint la terre et son esprit les
manitok. Les Algonquins enveloppent la dépouille dans une belle peau peinte et dans de l’écorce
afin qu’elle ne soit pas souillée. Pendant quatre jours, ainsi préparée, Aponi est déposée sur une
plate-forme en hauteur dans un arbre afin de préserver et d’honorer son lien précieux avec la Nature
et la vie. Par la suite, elle est portée puis enterrée par les siens avec ses biens les plus précieux
(en termes affectifs, pas forcément matériels) et avec des dons venant de la tribu. Sa famille reçoit
des présents de consolation de la part des autres membres de la communauté. De la musique est
jouée et Iskatokela invite par le chant Nanabush et d’autres puissants manitok (le filou Raton laveur
et le fort Caribou) à guider Aponi vers la terre des esprits. Sa famille construit alors une maison de
l’esprit (une toute petite cabane) au cas où l’esprit de la vieille dame resterait un peu ici-bas, pour
l’abriter. Ils entretiennent un feu pendant quatre jours au-dessus de son tumulus pour l’honorer et la
veiller. Dans le même ordre d’idée, par respect, la famille portera le deuil pendant une année entière
en se souvenant le plus souvent possible d’Aponi et de son parcours de vie. Toute la communauté
(personnages y compris) se retrouve autour d’un repas où l’ambiance est à la fois chaleureuse et
respectueuse. Cette cérémonie riche et toute son organisation devraient marquer les personnages.
Ils pourraient avoir des visions des esprits venant à la rencontre de la dépouille d’Aponi,
devenu un papillon de feu pendant le chant chamanique. Certains semblent plus sombres que
d’autres, plus agressifs aussi. Leur forme est torturée et ils semblent dégouliner d’une humeur
poisseuse. Ils seront difficilement repoussés par les autres esprits présents, plus apaisés et lumineux.

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p  La femme de Nathorod est malade. Le futur bébé est en danger ! Ishatokela construit une
tente tremblante, un petit abri cylindrique en branches et en écorce dans lequel à la nuit tombante
il s’enferme tout en chantant et en jouant du tambour. Il demande à Nathorod et aux personnages
de garder les environs. Leur présence est importante car l’enfant métis porte aussi du “sang blanc”.
Soudain, alors que le Mide convoque ses auxiliaires et protecteurs spirituels, des cris d’animaux
venus de nulle part résonnent et la tente se met à s’agiter et à trembler !

p  Une terrifiante ombre noire au contour incertain, puant l’humus et la mort apparaît (test de
volonté à -2 ou perte de 2 points de Santé mentale). Elle se jette sur la tente. La voix d’Ishatokela
prend de l’ampleur alors que le chaman invoque le renard, son esprit tutélaire en protection.
Un renard fantomatique mais lumineux apparait et assaille l’ombre. Au loin, Sora hurle de douleur
! Les personnages doivent agir. Ils aideront le chaman à chasser l’esprit malveillant (trois tests de
Psyché réussis pour refléter un combat mental ardu, mais perte d’1 point de Santé mentale quelque
soit le résultat). Ishatokela les remerciera et Nathorod promet de nommer son enfant du nom d’un
des personnages dont il fera le parrain.

Conseils pour le meneur

Le but est de découvrir la vie des Algonquins et de poser quelques jalons pour la suite.
Prenez votre temps. Laissez à chacun l’occasion de partager des moments conviviaux avec la
communauté et aux joueurs le loisir d’incarner leurs personnages N’hésitez pas à imaginer vos
propres scènes. Bref, courez vous renseigner sur les Vrais Hommes !

33
Chapitre III : D’un monde à l’autre
Une quinzaine de jours environ après leur arrivée, Amikniping annonce qu’une assemblée sera convoquée pour
le soir même. En effet, selon Ishatokela, les esprits sont propices au dialogue et le bâton orateur attend d’être saisi
et partagé.

Le cercle des anciens de la tribu se réunit auparavant dans le grand wikiwan du chef. Celui-ci est composé
d’Ishatokela et de trois autres notables :

p Amarok (“Loup), un sage, un ancien au sens littéral du terme.

p Bly (“Grand”), le vénérable ancien okima qui a perdu la vue et qui a quitté ses fonctions il y a
quelques années.

p Tekoa (“Magnifique”), un artiste mystique à la fois un musicien, un sculpteur, un peintre et un


conteur. Il est aussi ouvert au Monde des Esprits, il aurait d’ailleurs pu rejoindre le Midewiwin en
tant que chaman.

Conseils pour le meneur


Lors du second chapitre vous pouvez déjà introduire les autres membres du cercle des anciens.
La réunion d’ouverture de ce chapitre paraîtra moins artificielle. Par exemple, Amarok pourrait
lui aussi vouloir se faire une idée sur la personnalité des étrangers en les invitant à partager un
repas au sein de son wikiwan. Bly, en tant qu’ancien okima, estime avoir son mot à dire sur
les événements politiques actuels et propose de partager une sudation et une discussion en huis
clos. De son côté, Tekoa s’intéresse beaucoup à la Compagnie et à son rôle : il questionne les
personnages au détour d’une promenade aux abords du lac.
Le débat
Celui-ci est vif mais respectueux. Les personnages pourront argumenter et parler des divers cadeaux qu’offrent
De Montcalm et surtout De Vaudreuil. C’est à eux de construire leur discours et d’y apporter un étayage probant.
Leur but est d’apaiser les tensions actuelles et de rappeler la bonne entente entre les colons et les autochtones.
Les événements de Fort Henry doivent être relativisés. L’objectif de De Montcalm est de renforcer sa position
de commandant en chef des opérations auprès des chefs tribaux. Il faut restaurer la confiance entre les tribus et
la couronne française. Fort Henry ne doit être qu’un incident. En s’appuyant sur l’influence d’Amikniping et
de sa tribu, les autorités françaises comptent faire circuler dès le printemps prochain un message de concorde.
Votre groupe doit être persuasif ! Sachez néanmoins qu’Amikniping et son cercle des anciens sont intelligents :
ils savent que l’alliance avec les Français est indispensable à tous. C’est pourquoi ils sont ouverts à l’apaisement.
A moins que les personnages ne se plantent lamentablement, cette réunion devrait bien se dérouler. Après celle-ci,
l’okima et son cercle s’adressent à la tribu rassemblée.

Les personnages pourront eux aussi résumer leurs arguments face à l’ensemble des Algonquins qui ne s’opposent
pas à la décision de leurs chefs. Pendant toutes les négociations Ishatokela paraîtra à la fois soucieux et attentif
aux propos et à l’attitude des personnages, encore plus qu’auparavant.

Conseils pour le meneur


Laissez vos joueurs s’exprimer librement ! Ne les bridez pas et libérez-vous pour cette
fois des chiffres et des Compétences. Si un joueur a de bons arguments et qu’il est persuasif
malgré le fait que son personnage soit peu sociable, ce n’est pas grave, ni même incohérent.
On peut estimer que celui-ci est galvanisé par sa tâche et que la tranche de vie vécue auprès des
Algonquins lui a insufflé une motivation et un charisme jusqu’ici insoupçonnés.

34 Après tout cela, le Mide vient à la rencontre du groupe. Il les félicite pour leurs bonnes paroles de paix et de
fraternité. Il leur dit à quel point il les apprécie et qu’il pense sincèrement qu’ils sont dignes d’avoir été accueillis
par la tribu. Ishatokela, soudain plus sombre, annonce que la tribu a besoin d’un service : Amikniping et lui
seraient satisfaits si les personnages le leur rendaient. Cela entérinerait le fait que la tribu intercède en faveur de
De Montcalm et des autorités coloniales. Le chaman explique qu’actuellement la tribu est en souffrance vis-à-vis
des esprits. Il s’appuie entre autres sur un certain nombre de détails que les personnages peuvent avoir eux-mêmes
remarqué pendant leur séjour :

p  Le manque de gibier.

p  La présence de manitok malveillants lors de l’enterrement d’Aponi.

p  La maladie brutale de la femme de Nathorod et la présence de l’ombre.

Si son intuition venait à se confirmer, la tribu pourrait paniquer et reléguer au second plan ce que veulent les
personnages. C’est pourquoi il souhaite organiser une cérémonie rituelle durant laquelle les aventuriers pourraient
régler le problème.

La cérémonie de la sudation
Dès le lendemain, au lever du jour, Ishatokela fait préparer une cérémonie de sudation et une grande tente sacrée
de suerie. Il impose aux personnages de jeûner jusqu’au soir.

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Qu’est que la suerie ?
Les sueries sont des huttes en forme de dôme surchauffées. Elles accueillent des rites de
purification (par sudation pour éliminer les toxines et les maladies) et de communion avec les
esprits. Cette tradition est héritée de longue date et remonte aux tout premiers autochtones.
Les Algonquins en faisaient un usage médical régulier et le Midewiwin y était très attaché.
La chaleur intense qui règne sous la tente est générée grâce à l’eau vaporisée au contact de
pierres chauffées. Les sueries sont des lieux sacrés dédiés à la Terre-Mère, la hutte est une
métaphore de son ventre. Pendant la cérémonie, le chaman, gardien du feu, chante et agite des
hochets tout en versant l’eau et des plantes sur les pierres. Il peut également fumer une pipe
sacrée remplie d’herbes aux propriétés diverses et variées (hallucinogènes en autres). Nus et
réunis en cercle autour du foyer, les communiants sont plongés dans les ténèbres, au sein d’une
chaleur de plus en plus forte, emplie d’odeurs végétales et de chants lancinants. Ils atteignent
alors un état second et les hallucinations ou transes ne sont pas rares. Selon son objectif de
purification (médicale) ou spirituel (lien avec le Monde des Esprits), la cérémonie est plus ou
moins longue, complexe et éreintante (tant physiquement que psychiquement).

Entre chien et loup, à la tombée de la nuit, la cérémonie débute et les personnages entrent dans la hutte. Ishatokela
mène le rituel d’une main de maître. Le Mide gagne encore en prestance et en charisme. il semble auréolé d’une
aura mystique difficilement soutenable. D’une voix profonde, il appelle les manitok et semble invoquer un passage
vers un autre monde : “Ici, au milieu de la terre, je suis debout sur la montagne sans arbres. Je sais que je ne
suis pas un homme. Je sais que je vole entre les mondes. Je sais que mon appel résonne et ouvre les voies.”
(Pour information, il s’agit d’un détournement d’un chant réel rapporté par J. Rousseau dans son étude des

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rites païens de la forêt québécoise). Subitement les esprits (les âmes ?) des personnages quittent leur enveloppe
charnelle et entrent dans le Monde des Esprits ! L’expérience est bouleversante (test de Volonté à -2 ou -2 points
de Santé mentale) : ils ont été transportés en chair et en os (ou presque) dans une autre réalité...

Dans le Monde des Esprits


Ils retrouvent le paysage de la baie et du Lac des Deux Montagnes mais dans une version spectrale inquiétante.
Les Algonquins et leurs tentes ont disparus. Il fait nuit. Une lune pleine et bleutée éclaire le ciel. Une brume
épaisse baigne les berges. Ils entendent le chant d’Ishatokela au loin.

Des arbres énormes et décharnés sont visibles. Ils sont envahis de lianes graisseuses et épineuses. Leur présence
n’est pas raccord avec le reste du décor. Ils ont l’air de pustules végétales déposées là. Un réseau chaotique de
lianes et de ronces s’étend entre eux. Dans ce paysage désolé, les pieds des personnages, toujours entièrement
nus, s’enfoncent dans un humus putride et spongieux où semble s’ébattre une vermine horrible et foisonnante.
Après avoir erré quelque temps, les personnages sentent une brise chaude et humide qui souffle depuis un bosquet
à demi immergé (une mangrove labyrinthique). En se concentrant, ils distinguent au coeur du fatras végétal une
énorme forme qui palpite. A leur approche, celle-ci se déploie et s’extirpe de son cocon, de son nid d’humus,
tel un immonde foetus.

De nouveau, les personnages semblent happés et projetés dans un ailleurs. Ils pénètrent dans un monde dans
le monde ! Ils sont aspirés par une réalité spirituelle encore plus angoissante. Cette transition est beaucoup
plus douloureuse que la première ! Les personnages ont la sensation que leur chair est arrachée alors que leur
corps spirituel se disloque. En morceaux, ils traversent un maelstrom de ronces et de lierre qui flagelle leur âme.
La souffrance est insoutenable. Brusquement, tout s’arrête alors que les personnages se reforment comme de
vulgaires empilements d’os, de chair et d’âme. Bienvenue dans les Mille-Et-Un-vaux !
Conseils pour le meneur

Avant de continuer, relisez la présentation des Mille-et-Un-Vaux dans l’annexe ainsi que la
description des esprits dans le bestiaire du livre de base.
Sans le savoir la tribu s’est installée près d’une brèche en formation entre le Monde des
Esprits et les Mille-Et-Un-Vaux. Cela explique tout ce qui a pu se passer dernièrement et les
mauvaises “ondes” que ressent actuellement Ishatokela. Contaminé par l’égrégore, le Monde
des Esprits se transforme et laisse échapper animosité et malveillance. Ce genre de phénomènes
de porosité est de plus en plus fréquent. Cela explique en grande partie les maux (maladies,
monstres, complots, guerre, perte de repères identitaires, etc.) qui frappent la colonie depuis
plusieurs années, y compris la résurgence surnaturelle à laquelle sont régulièrement confrontés
les personnages. C’est un cercle vicieux : plus la colonie s’abîme dans le chaos, la guerre et la
fin des traditions autochtones, plus les Vaux sont présents, et plus ils influencent les évènements.
Attention, c’est un processus et non l’intervention d’une pseudo déité maléfique ! Les Vaux,
même s’ils sont ici incarnés par cette sorcière d’humus, ne sont pas un simple monstre de plus
à abattre.

Alors que le chant du mide est toujours audible, il semble prêt à s’arrêter. Cerné par une muraille de brume,
le groupe fait face à une créature terrifiante, une gigantesque vieille femme. Elle est squelettique et nue.
Sa peau grisâtre et parcheminée est couverte d’humus. Son origine ethnique est indéfinissable. Malgré sa nature
spirituelle, elle dégage une odeur horrible. Il émane d’elle une malveillance primale. Ses yeux sont deux puits
de ténèbres d’où coule une substance qui n’est pas sans rappeler du pétrole. Derrière elle, le bosquet devenue
forêt cauchemardesque semble s’étendre à l’infini. Un vent fort y souffle comme une respiration accompagnée
de craquements sinistres. On y distingue des formes et des silhouettes fantomatiques (des Mandoags, des Ewahs,
etc.). De la bouche garnie de crocs gâtés de la vieillarde monstrueuse, un gouffre d’où s’extirpent d’énormes

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scarabées luisants, un râle se fait entendre avant de former des mots gutturaux.

Elle se moque des personnages. Sa seule parole compréhensible : “Je suis celle qui vient car vous m’y avez
invité”. Un maelstrom d’images pulvérise alors la psyché des agents de la Compagnie. Ils revivent en accéléré,
à travers un filtre végétal envahissant, l’arrivée des premiers colons, l’émergence de la civilisation coloniale et la
dégénérescence progressive des anciennes traditions des autochtones. Une fresque odieuse émaillée de maladies,
de violence, d’abus, de destruction de la Nature et de corruption de la terre, de la vie, des hommes et des esprits
(test de Volonté à -4 où perte de 3 points de Santé mentale, 1 point minimum même en cas de réussite).

Conseils pour le meneur


Soignez vos effets et vos descriptions ! Cette scène est le point d’orgue de ce scénario et
doit être l’une des rencontres les plus marquantes de la vie des personnages. Après avoir
assisté au cours de leurs aventures à différentes manifestations d’égrégore, les personnages ont
l’opportunité d’observer le coeur putride des Vaux.

Il n’y a ici pas d’échappatoire ou de combat épique final ! Les personnages font face à quelque chose qui les
dépasse sans commune mesure. Leur esprit est déjà en train de se perdre dans les Vaux. Leur seule chance est de
faire appel à Ishatokela pour réintégrer leur corps et le monde réel. Ils entendent en effet au loin toujours son chant
fluet, comme une bouée dans cet océan de terreur.

Demandez des tests de Psyché à -2 à votre groupe. Les joueurs doivent cumuler à eux tous (1 + nombre de
personnages) succès pour être secourus in extremis par le totem du chaman : un magnifique renard au pelage
lumineux les guide en dehors de la sphère d’influence de la vieillarde. Par contre, s’ils cumulent avant cela un
même nombre d’échecs, ils sont définitivement prisonniers des Vaux et leur esprit sera dévoré. Fin de la campagne
pour ces personnages !

Stephane LARRIEU - marcheprime3314@gmail.com - 202303/954491/1977321


Conclusion : entends-tu le bruit des canons ?
Si les personnages sont sauvés par le Mide, ils pourront relater leur terrible voyage astral. Dès lors, Ishatokela
qui a vu également à travers les yeux de son esprit-totem la créature persuadera Amikniping de partir le plus
rapidement possible pour un autre lieu d’hivernage.

Avant cela, il faudrait tenter de renfermer ou tout du moins de ralentir l’ouverture sur les Vaux. Une cérémonie
de paix partagée entre la tribu et les personnages avec la promesse à la clé d’une entente renouvelée entre colons
et Amérindiens dès le printemps serait idéale. Une sorte de renouveau. Encore une fois, l’égrégore et l’emprise
sont des processus complexes qui tirent leurs racines de l’humanité même, de ses égarements et du chaos sordide
dont elle est capable. Symboliquement, cette cérémonie fraternelle aura un meilleur impact qu’un vulgaire combat
contre une créature qui est l’incarnation d’un phénomène qui dépasse l’entendement.

Au vu des événements, L’Okima et le cercle des anciens remercieront profondément les personnages mais tous
semblent très pessimistes concernant l’avenir. Quoiqu’il en soit, Amikniping tient sa promesse et dès le retour
des beaux jours il agit pour apaiser les tensions et faire en sorte que les tribus alliées renouent avec les autorités
coloniales, De Montcalm en tête. Cela va permettre à la colonie de tenir un peu plus face aux Anglais, au moins
jusqu’à l’année prochaine…

De retour à Québec, après avoir repris des forces, les personnages pourront faire leur rapport à Robert Campagne.
Silencieuse, Diane ne perdra pas une miette de leur récit. Leur supérieur sera satisfait de l’intervention des
personnages. Il paraît soulagé. Diane a le regard vide et semble ailleurs. Interpellée, elle sourit aux personnages,
quitte la pièce en répétant : “Tout a un prix. Lorsqu’on invite quelqu’un, il veut s’attendre à le recevoir...”.

Robert informe le groupe que l’Angleterre a fait débarquer des renforts et que la Royal Navy a verrouillé l’accès
maritime du Saint-Laurent ! Le Gouverneur-Général de Vaudreuil a écrit au roi à Paris au nom du Conseil souverain

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en le suppliant d’envoyer des subsides, du matériel et des hommes... Des espions royaux et d’autres agents de la
Compagnie sont persuadés que les Anglais veulent en finir et prendre Québec d’ici la fin de l’année prochaine.

La guerre est là.


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IV - Du sang et des larmes
Présentation
ette aventure fait suite à l’épisode III “Nos Fautes” et conclut la campagne “Abîme” (comptez deux à

C trois bonnes séances si vous développez et détaillez chaque axe). L’action se déroule lors de l’été 1759, en
plein siège de Québec, soit environ un an et demi après les événements précédents. Il conviendrait comme
à l’accoutumée que les personnages aient vécu d’autres péripéties avant de se plonger dans cet ultime chapitre
(des scénarii intermédiaires, officiels ou “maison”).

Au cours de cette conclusion mouvementée mêlant action militaire, négociation et horreur, les personnages vont
être confrontés à la chute de la capitale de la Nouvelle-France. Ce tournant majeur sonnera le glas de la puissance
coloniale française et mènera progressivement la France à la défaite face aux Anglais avec la signature au Traité
de Paris à la clé.

Préambule historique : résumez ces événements à vos joueurs.


En 1759, l’étau anglais s’est resserré ! Malgré le succès militaire obtenu l’été dernier par le Marquis de Montcalm
à Fort Carillon, les Anglais sont de plus en plus menaçants. La Nouvelle-France est sérieusement mise à mal.
Le blocus anglais a été renforcé. Les Britanniques ont pris Louisbourg (sur l’Île royale, ou l’Île du Cap Breton en
Nouvelle-Écosse actuelle) et Fort Duquesne (dans la Vallée de l’Ohio, en Pennsylvanie actuelle). Surtout, le manque
flagrant de soutien de la part de la France, et ce malgré les appels à l’aide répétés de la colonie, est démotivant.

Comprenant qu’il a l’avantage, William Pitt, le Ministre de la guerre anglais, veut donc en finir. Pour faire plier
les Français, il va les obliger à se défendre sur deux fronts : à l’est (près de Niagara) et à l’ouest (à Québec).
Ainsi, le fraîchement promu major-général James Wolfe doit prendre la capitale coloniale française au plus vite.
Début juin 1759, une armada quitte Louisbourg avec cet objectif. Cette flotte compte environ un quart des effectifs
anglais, soit plus de 150 navires et plus de 25 000 hommes.

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Malgré la bonne coordination franco-indienne et la victoire de Fort Carillon, l’année 1758 fut difficile. En 1759,
De Montcalm se doute que la guerre est arrivée à un tournant et que les Anglais préparent un coup d’éclat, voire
le coup de grâce. Désespéré par le manque de moyens et l’absence de renforts, empêtré dans des différences
stratégiques et une rivalité avec le Gouverneur-Général, dès les beaux jours de mai, le maréchal décide de se
retrancher et de fortifier Québec et ses alentours. De Montcalm fait établir des lignes de défense en partie enterrées
le long de la rive nord, le tout est émaillé de quelques redoutes.

Le 26 juin, l’armada anglaise tant crainte arrive près de Québec sur l’Île d’Orléans qui a été heureusement évacuée
auparavant. Le 27, Wolfe fait débarquer ses troupes et avance vers le sud pour établir un camp bien en vue des
lignes françaises. Parallèlement, l’officier britannique galvanisé par sa tâche diffuse un manifeste très menaçant où
il promet le pire à la population (à l’instar de ce qui a été fait il y a quelques années aux Acadiens…). L’écrit est
placardé aux portes de toutes les églises. Le 28, en réaction, les Français tentent une opération risquée en envoyant
des brûlots, des embarcations incendiaires, contre la flotte amarrée. En raison d’un manque de coordination et
d’une confusion au sein de l’état-major, c’est un fiasco ! Les 29 et 30 juin, les Anglais accélèrent leur déploiement
et se rapprochent encore plus de la ville même s’ils restent cantonnés de l’autre côté du Saint-Laurent. La milice du
capitaine de Léry n’arrive pas à contenir ce mouvement tactique, Québec ferme ses portes et le siège commence...

Résumé du scénario
Ce scénario suit le déroulé plus ou moins historique du siège de Québec tout en y incorporant des éléments propres
à Colonial Gothic. Les personnages vont tout d’abord assister à une entrevue houleuse entre Robert Campagne,
Diane et De Montcalm. Il leur sera alors demandé d’aller au devant d’un cercle alchimique québécois pour essayer
d’obtenir leur aide face au siège en cours.

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Dans le premier chapitre, sous les bombardements, les membres de la Compagnie vont devoir mener une alliance
alchimique et participer à la Bataille de Beauport.

Dans le deuxième chapitre, au mois d’août, en pleine représailles anglaises, les personnages devront faire face à
la folie sanguinaire de Wolfe. Sa terrible politique de terre brûlée va provoquer une émergence des Mille-Et-Un-
Vaux catastrophique qui fera basculer définitivement Diane dans l’égrégore. Robert Campagne n’y réchappera
pas !

Enfin, l’ultime chapitre de cette campagne aura lieu le jeudi 13 septembre 1759, le jour de la Bataille des Plaines
d’Abraham. Les personnages assisteront au plus près à la mort du marquis de Montcalm et du général Wolfe dans
une débauche de sang et de larmes...
Les personnages devront survivre à la capitulation française pour devenir de nouveaux Associés de la Compagnie.
Une surprise de taille les attend !

Introduction : Derrière les portes


Ce scénario débute le 12 juillet 1759, soit douze jours après le début de l’état de siège alors que le soir tombe
et que les premiers bombardements anglais ont lieu. Les personnages se rendent au Fort Saint-Louis pour y
rencontrer de nouveau le marquis de Montcalm. Alors qu’ils se dirigent vers l’édifice en compagnie de Robert
Campagne et de Diane, le premier tir retentit et un obus éclate à proximité.

Robert Campagne est méconnaissable. Son état ne s’est pas arrangé depuis le dernier épisode. L’homme n’est plus
qu’une ombre parmi les ombres. Il suit fanatiquement Diane. Son ex protégée le contrôle complètement.

De son côté, à bientôt quatorze ans, l’adolescente semble transfigurée. Devenue une jeune fille charismatique,
Diane en impose à tous ceux qui la croisent. Sa voix, son regard et tous ses gestes incarnent à présent une autorité
surnaturelle. Elle met visiblement mal à l’aise aussi bien les gens que les bêtes.

Après le tir, Robert se signe et marmonne de sombres paroles quasi incompréhensibles. Diane quant à elle continue
d’avancer comme si de rien n’était, les bombes semblant nullement l’incommoder. La bombe a frappé fort et des
cris retentissent du bâtiment touché qui commence à prendre feu. Les personnages sont happés par la foule paniquée
qui surgit des maisons alentours. Il serait bon qu’ils organisent les secours sinon l’incendie risque de se propager.
Il y a des survivants à sauver dans les décombres : un père et son enfant, seuls rescapés d’une famille de notables
pulvérisée par la munition anglaise. Il va falloir pénétrer dans la bâtisse qui menace de s’écrouler (tests d’Athlétisme,
de Volonté et d’Endurance de +0 à -2, voir plus si le temps presse), organiser les secours et canaliser les peurs
(tests d’Influence et de Tactique) mais aussi juguler les flammes (tests de Force, d’Endurance et d’Influence).
Certains québécois se montrent courageux, d’autres lâches. C’est la débandade qui menace. Les personnages sont
projetés dans un maelstrom de cris et de pleurs où tout le monde semble compter sur eux ! (ou presque car Robert
et surtout Diane continuent leur trajet vers le fort sans prêter attention au drame alentour)

Conseils pour le meneur


Faites de cette scène d’ouverture un moment choc. La nuit est calme et soudain l’Enfer
débarque sur terre ! Alors que le siège était juste un face-à-face tendu, en cette nuit du 12
juillet 1759, il se transforme en véritable guerre d’usure, un conflit sale émaillé chaque jour
de nouvelles horreurs : bâtiments détruits, vies perdues, famille bouleversées, estropiés,
mutilés, tensions et autres désastres à répétition, etc. Soyez sanglant dans vos descriptions :
les corps sont dans un état effroyable, ce qui demandera un test de Volonté ou une perte d’un
point de Santé mentale. Les personnages doivent arriver au fort choqués, couverts de suie, de
poussière et de sang !

Finalement, le groupe rejoint le fort où De Montcalm les attend. L’officier supérieur est débordé. Le bombardement
crée un chambardement sans précédent qu’il doit maintenant gérer. Malgré l’urgence le marquis prend un peu de
temps pour les recevoir. Robert et Diane sont déjà là. L’ambiance est tendue car le duo semble faire peu de cas
de la terrible situation actuelle. Robert est effacé. Diane reste froide. Elle conclut un éventuel échange teinté de
reproches avec les personnages par ces mots sinistres et sans concession : “Ce qui doit arriver, arrive. C’est ainsi
! La rage appelle la rage.”

40 Un ciel de poudre
Depuis la fermeture des portes de la ville, les Anglais ont érigé des batteries d’artillerie en
face de celle-ci et le long de la falaise de l’Île d’Orléans. Le 12 juillet, de la tombée de la nuit
au lever du jour, les Britanniques vont faire pleuvoir plus de 300 bombes sur la Haute-Ville.
A partir cette nuit là, et pendant deux mois, ces bombardements intensifs auront lieu tous les
soirs et ce jusqu’à la capitulation de la ville après la Bataille des Plaines d’Abraham. Il est
important de souligner que les Anglais utilisent principalement des bombes incendiaires et
que Québec devra donc faire face à plusieurs incendies ravageurs. De plus, les Red Coats
augmenteront au fur et à mesure le nombre de pièces installées et leur calibre. De leur côté, les
batteries françaises situées dans la Basse-Ville ou sur les lignes défensives en aval et en amont
répliquent peu car elles manquent de poudre. Elles se rationnent.
Dans un rapport final rédigé en septembre 1759, les autorités militaires anglaises affirment
avoir tiré au total plus de 5000 obus et 13000 boulets ! Ces bombardements massifs et
destructeurs vont saper peu à peu le moral des troupes et de la population.

Si De Montcalm a fait venir la compagnie et ses meilleurs agents, c’est pour qu’ils essaient de se rapprocher des
Fils de l’Ether, un cercle alchimique discret de la ville. Ce regroupement d’étranges scientifiques pourrait peut-
être aider les autorités à se sortir de ce guêpier. Les Fils de l’Ether disposent d’un lieu de regroupement connu des
autorités. En effet, une fois par mois, ils tiennent une séance privée de réflexion et de discussion à l’Aube dorée,
une des auberges chics de la Haute-Ville. Une certaine Alba Magnifica en serait la chef, à savoir l’Ordonnatrice
et la Grande Laborantine de cet ordre alchimique québécois.

Robert n’est pas opposé à la participation de la Compagnie dans ce projet de rapprochement. Diane, elle,
le trouve ridicule. L’adolescente se moque ouvertement de ces pseudos magiciens de pacotille. Pendant l’entretien,
De Montcalm a du mal à supporter sa présence. Il se méfie de cette étrange enfant aux allures de prophétesse.

Stephane LARRIEU - marcheprime3314@gmail.com - 202303/954491/1977321


Conseils pour le meneur
Insistez sur le changement d’attitude de Diane ! Celle-ci est devenue la voix de la Compagnie
à Québec. L’adolescente a pris l’ascendant sur Robert et ne supporte plus qu’on la traite comme
une enfant. Elle regarde les gens de haut. Elle considère de plus en plus les autres comme des
aveugles et des idiots. De son côté, Robert est apathique et effacé. Il suit sans sourciller celle
qui semble en tout point à présent le dominer.

Chapitre I : Juillet 1759 : Sous les bombes


Les Fils de l’Ether sont peu nombreux, un petite dizaine tout au plus. Cette société discrète (mais pas secrète) est
un cercle d’initiés dissertant sur les questions d’alchimie et de sciences nouvelles. Seule Alba Magnifica (Viviane
Dumont de son vrai nom) est une alchimiste compétente. Les autres membres sont plutôt de simples passionnés :
un mélange de notables, d’érudits et de scientifiques, tous férus d’histoire, d’alchimie et éventuellement
d’occultisme.

Conseils pour le meneur

Pensez à la société de magiciens présentée au début du roman et de l’excellente série télé :


“Jonathan Strange & Mr Norrell”.

41
L’Aube dorée est un établissement de luxe, l’un des meilleurs de Québec. Il est tenu par un des membres de la société,
Fabricien Tremblay. Le petit homme bedonnant est bavard, il déteste les Anglais et voue une admiration sans borne
à Dumont (il en est même secrètement amoureux). Il est dans les faits le deuxième membre le plus important des
Fils de l’Ether.

Rencontrer Alba ne sera pas vraiment difficile. En se rendant à l’auberge et en faisant bonne impression à Fabricien
(un peu de flatterie et de connaissances alchimiques peuvent s’avérer utiles), les personnages pourront être introduits
auprès de l’alchimiste. Cela sera encore plus facile si un alchimiste est présent dans le groupe. Les Fils sont toujours à
la recherche de nouveaux membres actifs. D’ailleurs, un personnage alchimiste aura pu entendre parler d’Alba et des
Fils de l’Ether même si, trop accaparé par son rôle au sein de la Compagnie, il n’a pas pu s’en rapprocher d’avantage.

Alba est une femme dans la force de l’âge. Néanmoins, elle est charismatique et passionnée, peut-être un brin trop
théâtrale dans son phrasé et ses manières. On est loin de la caricature du rat de laboratoire. L’alchimiste est aimable,
vive et souriante. Après avoir été longtemps déconsidérée par le Conseil souverain malgré ses demandes d’entrevue,
elle est ravie que les autorités s’y intéressent. Il faut dire que l’évêque Henri Marie du Breil de Ponbriand, membre
du Conseil et responsable des affaires religieuses en Nouvelle-France, a largement oeuvré dans l’ombre afin que
le Gouverneur-Général reste à distance de cette québécoise farfelue (voir sentant le soufre selon l’ecclésiastique).
Connaissant la réputation de la Compagnie (y compris concernant ses missions royales officieuses), Viviane est
satisfaite de pouvoir s’en rapprocher même si c’est au prix de quelques services. Lorsqu’elle anime les réunions du
cercle alchimique, Alba revêt une toge de type romaine bleutée et se sert d’un caducée pour souligner l’importance
de son rôle (un caducée est une baguette d’olivier patinée et vernie, celle-ci est surmontée de deux ailes et entourée
de deux serpents entrelacés, faits de bronze.).

De fil en aiguille, Alba accepte volontiers de faire visiter sa demeure et surtout son laboratoire. L’alchimiste est
en effet propriétaire d’une belle maison familiale dont la cave a été reconvertie en un vaste laboratoire bien fourni
disposant d’un imposant athanor (un four alchimique). Alba travaille actuellement dans le domaine météorologique.
En effet, l’alchimiste pense qu’il est possible de modifier localement le temps grâce à des poudres et autres précipités
envoyés directement dans les cieux. Après avoir longtemps étudié la transformation alchimique spontanée des
minéraux et des métaux, Alba a décidé de se concentrer sur la transformation des éléments impalpables. Elle veut
s’essayer à l’Éther, cette substance si subtile qui, selon elle, mais aussi selon bien d’autres alchimistes, constitue
l’espace et forme en grande partie les cieux. Elle explique qu’intervenir sur le climat pourrait être un sacré avantage
pour les troupes françaises. Les officiers pourraient ainsi soutenir leurs mouvements défensifs ou offensifs grâce à
des conditions météorologiques favorables pour eux et, ou défavorables pour leurs adversaires.
Bien entendu, selon l’avancée de leur rapprochement, les personnages pourront présenter officiellement Alba
(et peut-être les Fils de l’Ether) à De Montcalm, au Gouverneur-Général De Vaudreuil, à Robert et peut-être à
Diane. L’alchimiste fera alors étalage de son savoir et de ses progrès actuels en alchimie climatique. Elle proposera
également des solutions opérationnelles à base de tirs de canons vers le ciel. Alba argumente chacune de ses
propositions avec diverses formules et autres calculs des plus abscons. Elle pourrait même aller jusqu’à proposer
une démonstration discrète aux autorités locales, une expérience organisée avec l’aide des personnages en dehors
de Québec, vers le nord pour éviter les fuites.

Conseil au meneur
Cette première partie diplomatique est laissée libre. Son but est la création d’une alliance
entre les autorités de la ville aux abois, la Compagnie et les Fils de l’Ether (avec Alba en tête).
Jouez ce chapitre pas à pas sur tout le mois de juillet au fil de rencontres variées mais de plus
en plus fructueuses.
Néanmoins, n’oubliez pas que pendant tout ce chapitre, les bombes pleuvent sur Québec
chaque nuit. Le long des fortifications extérieures, des escarmouches ont lieu régulièrement
entre les soldats français et anglais. Les dégâts humains et matériels sont nombreux et terribles.
L’ambiance en ville est angoissante : les gens ont peur et la guerre n’a jamais été aussi
quotidienne. Cela doit transparaître dans toutes vos descriptions.

Pour vous aider, vous pouvez mettre en scène divers incidents annexes à la trame principale :

p  Le logement d’un des personnages est détruit. Il faut se reloger, ce qui n’est pas une partie
de plaisir. Certains usuriers, dont le patibulaire Michel “Trois-doigts”, profitent de la situation
pour fournir à prix d’or des logements vétustes et exigus.

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p  Le laboratoire d’Alba est touché et une fuite de gaz toxique a lieu. Les personnages présents
doivent la juguler. Il faut également faire évacuer le quartier. La situation n’est pas évidente
à gérer d’autant que les habitants sont sur les nerfs en raison des bombardements incessants.
cela pourrait déraper...

p  L’Aube dorée s’écroule en partie. Fabricien est bloqué à l’intérieur. les personnages
peuvent le sauver en s’enfonçant sous les décombres qui menacent de s’effondrer.

p  Si vous avez utilisez Bernard Grandpré comme personnage-non-joueur récurrent


(cf. épisode I - Peur sur Québec), les personnages sont appelés à son chevet. Le médecin est
à l’agonie après avoir été atrocement brûlé par une bombe. Il demande aux personnages de
l’accompagner jusqu’au bout car il a peur des fantômes qui pourraient l’attendre dans l’au-delà.

p  Poussé à bout, le Père Pierre Corbin pète les plombs ! (cf. épisode I - Peur sur Québec).
Les habitants du quartier Notre-Dame-des-Victoires demandent aux personnages d’intervenir.
Le curé s’est barricadé dans son église qu’il menace de brûler pour enfin pouvoir retourner en
France !

p  Le lieutenant Pierre Philippe Chassins de Prosnes (cf. épisode II - Apparences),


l’aide de camps de De Montcalm, demande le soutien et l’expertise des personnages. Un esprit
malveillant s’en prend à ses hommes chargés de tenir une redoute en aval de la ville. La créature
est un esprit de la terre dérangé par la construction de la fortification. Il faut l’apaiser et négocier
avec lui. Une offrande serait la bienvenue.

Au fur et à mesure de l’avancée de ce chapitre, par exemple lors d’une de leurs visites auprès des autorités ou de
Robert Campagne, ou encore lors d’une conversation avec des soldats en permission en ville, les personnages vont
apprendre les deux informations importantes suivantes :

Dès le 09 juillet mais surtout à partir du 19, les Anglais vont commencer une série de reconnaissances.
Cela va fortement inquiéter l’état-major français.

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Le 26 juillet, un affrontement majeur a lieu le long de la rivière Montmorency non loin de Beauport entre
les soldats français retranchés et une force d’attaque anglaise menée par le général James Wolfe. La rivière est un
affluent du fleuve. Il est évident que les Anglais recherchent un gué afin de se rapprocher au plus près de la ville
après un débarquement en aval sur la rive nord. Cette attaque pourrait être considérée comme un test. En effet,
Wolfe pense que la côte nord du fleuve près de Beauport est propice à un débarquement puis à une marche forcée
vers Québec en traversant la rivière. Cependant, De Montcalm a bien fortifié l’endroit. Ainsi, le général anglais
doit jouer de prudence et se montrer ingénieux.

Ainsi, vu la bonne entente établie avec les Fils de l’Ether et suite aux explications d’Alba concernant ses travaux
sur le climat, le 28 juillet, De Montcalm décide malgré les protestations de De Vaudreuil et de l’évêque Du Breil
d’envoyer l’alchimiste et les personnages à Beauport. De Montcalm demande à ce qu’Alba soit escortée par les
personnages. Parallèlement, la présence d’un alchimiste compétent, voir d’un maître, au sein du groupe serait un
plus dans le sens où avec l’aide d’un collègue Alba pourrait faire des progrès appréciables rapidement. L’objectif
du marquis est le suivant : si les Anglais décident de débarquer à cet endroit et donc d’attaquer Québec, Alba et les
personnages pourront aider les Français à tenir et à repousser l’envahisseur. L’officier voit cela comme une sorte
d’épreuve du feu afin que la maîtresse des Fils de l’Ether prouve concrètement ses dires.

Après un court voyage, sur place, le 29 juillet (Beauport n’est situé qu’à cinq bons kilomètres à l’est de Québec),
les personnages et l’alchimiste qui a amené son chariot-laboratoire avec elle seront accueillis par le capitaine
Hubert de Brouage. Malgré sa surprise et ses doutes, celui-ci se montre coopératif. Selon lui, si les Anglais
attaquent, ils le feront entre Beauport et les chutes de la rivière Montmorency. Il peut faire visiter la redoute et les
lignes françaises au groupe puis les emmener reconnaître l’aval en direction des chutes. Avec tous ces éléments
de terrain observés en direct, Alba peut affiner sa proposition d’aide. Elle pense pouvoir préparer une “poudre
d’orage” ainsi qu’un gaz d’essence minérale à même de transformer les berges en une barrière de rochers quasi
infranchissable. Elle a besoin d’aide car cela va demander un travail colossal. Surtout il est nécessaire de préparer
le terrain :

43
p  Installation d’un canon de gros calibre pointé vers les nuages.

p  Mise en place de charges explosives pour disperser le gaz sur et dans les berges.

Alba s’enferme dans son laboratoire itinérant (éventuellement avec un personnage alchimiste pour la soutenir et
la seconder) et laisse les autres personnages négocier et organiser tout le reste avec De Brouage. Aux personnages
de faire preuve de bagout pour convaincre l’officier de toutes ces étranges manoeuvres mais aussi de faire preuve
de discrétion pour éviter d’être repérer par d’éventuels éclaireurs anglais (Tests d’Influence, de Discrétion,
de Tactique et d’Observation).

Le 31 juillet au matin, les craintes coloniales se confirment. Le navire de guerre The Centurion est en approche.
Il se positionne près des chutes afin de bombarder la côte. Les transports de troupes armés, Russell et Three
Sisters, quittent l’Île d’Orléans à leur tour. Avant midi, Wolfe devrait être en mesure de tenter un débarquement.
Les personnages doivent réagir ! La Bataille de Beauport vient de commencer ! Il s’agit du premier affrontement
d’envergure du siège de Québec.

Pour empêcher Wolfe d’obtenir la victoire, les personnages vont avoir pour mission, dans l’ordre :

1) Eriger la barrière rocheuse surnaturelle afin d’éviter un débarquement anglais rapide à un endroit non
couvert par l’artillerie de la redoute française. Wolfe va perdre un temps précieux à trouver un autre lieu
de débarquement possible mais malheureusement il sera sous le feu français.

2) Faire tirer au canon la poudre alchimique afin qu’un puissant orage d’été se déchaîne et gêne les
Anglais dans leur déploiement et leur progression. Pris sous une pluie torrentielle, non préparés à cette
éventualité, les Anglais s’embourbent et leur poudre se mouille. Au contraire, les Français prévoyants
(prévenus) ne quittent pas leurs positions, ne font aucune sortie et restent relativement au sec. Ils évitent
ainsi d’être débordés. Wolfe est alors contraint à la retraite pour éviter un massacre.
Quoiqu’il en soit, alors que les troupes s’engagent sauvagement, les personnages seront eux-mêmes mis en
danger par :
p  Le bombardement quasi continu du site depuis le Centurion et depuis les batteries anglaises à
longue portée (tests d’Esquive, d’Athlétisme et d’Endurance).

p  Le harcèlement des défenses françaises par plusieurs vagues d’assaut successives de Red coats
motivés par les discours nationalistes de leur général (tests d‘Esquive et de Tir, mise en scène d’une
éventuelle échauffourée).

p  Plus spécifiquement, remarquant les manoeuvres des personnages et de l’alchimiste, un petit


commando anglais s’infiltre et cherche à les éliminer (autant de soldats que de personnages-joueurs,
et un alchimiste anglais).

Si tout va bien, les Anglais devraient être mis en déroute. S’ils échouent, la bataille sera plus mortelle que prévue
mais le capitaine Hubert de Brouage fera preuve d’un courage exemplaire et d’un sens tactique brillant. Ses
troupes tiendront et l’emporteront. Finalement, au prix d’énormes efforts et de pertes plus conséquentes, Wolfe
reculera.

Ce premier chapitre se termine avec cette bataille. Les personnages rentrent ensuite à Québec où ils sont félicités
par De Montcalm et l’ensemble du Conseil souverain. Robert et Diane seront présents. L’adolescente se montre
encore une fois froide et distante. Elle commente la victoire française et les exploits des personnages d’un simple
: “Ce n’est qu’un début…”. De Montcalm de son côté exprime à la fois sa satisfaction mais aussi son inquiétude.
Pour l’homme de guerre, il est clair que les Anglais vont revenir à la charge et que ce succès ne fait pas pour autant
gagner la guerre : “Wolfe porte bien son nom. C’est un loup, il ne lâchera pas. Québec est sa proie…”.

La Bataille de Beauport

44 Tout comme pour le bombardement de Québec, cet épisode retrace le déroulement historique
de la bataille en l’accommodant à la sauce Colonial Gothic. Effectivement, le 31 juillet 1759,
Wolfe fera face à une barrière rocheuse imprévue. Cela retardera le débarquement anglais et
les red coats se retrouveront à portée des canons français. Par la suite, en fin d’après-midi,
un orage d’été éclatera bel et bien. Il mettra un terme aux velléités anglaises. Ce jour là, les
anglais enregistrent plus de 200 morts et plus de 200 blessés. Les Français ne sont pas en reste
et souffrent de près de 700 pertes. L’artillerie lourde anglaise a fait un carnage ! En débarquant
au bon endroit et sans l’orage, les Anglais l’auraient emporté et annihilé la position française.
Quoiqu’il en soit cette bataille sauvage, chaotique et sanglante a ouvert le bal. Elle est le prélude
de la chute de la capitale. James Wolfe n’est pas découragé. Bien au contraire, connu pour son
goût du sang et son inflexibilité, il écrit à ses supérieurs que cet échec n’est rien et qu’il faut
passer outre les pertes...

Chapitre II : Août 1759 : Représailles


James Wolfe est furieux de sa défaite à Beauport car la prise de Québec est retardée d’autant. Il n’accepte pas l’échec
d’une manière générale et encore moins celui-ci. Dès le début août, le général anglais ordonne des représailles
sans précédent. Il va mettre en oeuvre ce dont il a menacé dès son arrivée les colons dans son manifeste : la terre
brûlée, du sang et des larmes. Plusieurs expéditions extrêmement violentes sont donc lancées afin d’incendier les
fermes et les communautés françaises. Toute résistance sera impitoyablement balayée. En effet, les Colons éloignés
(les seigneurs comme les simples tenanciers), mais aussi les Amérindiens alliés, participent tous au ravitaillement
de Québec et défendent âprement leurs terres. Les Rangers américains et les Iroquois qui accompagnent les
troupes anglaises sur l’ordre express de Wolfe ne font pas de quartier ! Ils brûlent, tuent et scalpent sans vergogne.
C’est un véritable bain de sang qui va se dérouler aux alentours de la capitale. La terreur va monter d’un cran.

Parallèlement à cela, la ville de Trois-Rivières qui contient une importante réserve de poudre, d’armes et de grains,
un dépôt indispensable à Québec, est attaquée. La nourriture vient donc à manquer.

Stephane LARRIEU - marcheprime3314@gmail.com - 202303/954491/1977321


Les forces françaises ne savent plus où donner de la tête. Elles doivent à la fois protéger Québec, tenir les
lignes extérieures fortifiées, tenter d’aider les Colons massacrés et peut-être aller au secours de Trois-Rivières.
De Montcalm est débordé. Le succès de Beauport est vite oublié. Surtout que les bombardements anglais
s’intensifient (Gardez bien à l’esprit que les bombes continuent de frapper Québec et poursuivez vos descriptions
dans ce sens). Les gens perdent toute confiance et tout espoir.

Le Conseil souverain est lui aussi mis à mal. Les dissensions en son sein sont nombreuses. De Montcalm et
De Vaudreuil ne se supportent plus. Le marquis veut tenir jusqu’au bout alors que le Gouverneur-Général aimerait
sauver les meubles.

Dans les rues de la cité devenues un vaste champ de ruines, la misère est partout, galopante. Beaucoup de québécois
ont perdu leur logement et dorment dehors. La peur et la faim font des ravages. En lien, la violence gangrène tout.
Le désespoir et la folie se répandent en ville comme une traînée de poudre.

Pendant tout ce mois d’août 1759, les mauvaises nouvelles vont ainsi s’accumuler sans qu’aucun soutien de la part
du royaume ne se profile à l’horizon. La colonie se sent abandonnée et livrée à la sauvagerie de Wolfe ! Force est
de reconnaître qu’en un peu plus d’un mois, la terrible politique du général anglais va payer : la colonie est mise
à genoux.

L’alliance avec Alba Magnifica n’y change rien. L’alchimiste est elle aussi dépassée. Malgré ses talents et l’appui
des Fils de l’Ether (et des personnages), elle ne peut être partout. elle aura beau convaincre d’autres collègues
alchimistes éloignés de rallier les forces de défense coloniales, cela semble trop tard. En face les Anglais utilisent
également des chamans et des alchimistes...

Pour animer ce début de deuxième chapitre et faire ressentir à vos joueurs l’horreur de la situation, vous pouvez
mettre en scène les événements suivants et les développer à l’envi :

45
p  Les personnages sont envoyés au nord, en dehors de la ville, avec Alba. Ils sont missionnés par
Robert et la Compagnie pour prêter main forte à une petite expédition française. Celle-ci pourrait
être menée par Hubert de Brouage ou par le lieutenant Pierre Philippe Chassins de Prosnes. Selon
des informations issues d’un coureur des bois, les fermes isolées de la région sont attaquées par les
Anglais. Sur place, c’est un massacre ! (Gare à la Santé mentale, test de Volonté obligatoire ou perte
d’un point) Le groupe arrive trop tard. Tout le monde a été passé par les armes : femmes, enfants,
vieillards, etc. Tout le monde, y compris les animaux qui n’ont pas pu être volés. Pour corser cet
épisode traumatique, une horreur d’humus, un charnier vivant gorgé d’égrégore émerge des
Vaux. Elle est attirée par la souffrance des suppliciés et se repaît de leurs cadavres.

p  Les personnages doivent se porter à la rencontre d’un maigre convoi de ravitaillement ayant
réussi à s’échapper de Trois-Rivières et l’escorter jusqu’à la capitale. Ils sont pris à partie en chemin
par des Rangers en maraude. Le groupe aura ainsi l’occasion de se rendre compte que les troupes
anglaises utilisent des chamans iroquois particulièrement sanglants. En effet, parmi les Rangers et
leurs alliés amérindiens, se trouve un chaman iroquois vindicatif. L’homme n’a plus toute sa tête.
Il semble possédé par divers mauvais esprits. Il hurle des paroles incompréhensibles, il se scarifie
et incite ses camarades au massacre. Une odeur d’humus insoutenable l’entoure. Une humeur
visqueuse et noirâtre suinte de sa peau.

p  Dans les ruelles de Québec, Thomas, un jeune garçon, est pris à partie par plusieurs brutes
patibulaires qui veulent lui faire passer un sale quart d’heure. Ils en ont après sa miche de pain rassis
mais pas que… Lorsqu’ils portent secours à la pauvre victime, les personnages remarquent que les
malfrats ne sont pas dans leur état normal. Ils sont particulièrement violents et acharnés. A la fin
de la rixe, dans la gibecière de l’un d’entre eux, ils pourront trouver les restes putréfiés d’une main
rongée. Des cannibales à Québec !

Ces différents incidents se dérouleront tout au long du mois d’août. Ils s’enchaînent et laissent peu de répit aux
personnages.
Conseils pour le meneur
Le but de cette première partie de chapitre est de faire comprendre aux joueurs que tout est
en train de basculer, tant d’un point de vue militaire et historique que vis-à-vis de l’univers
développé par Colonial Gothic. On sort de l’horreur d’un conflit armé pour plonger dans une
atrocité encore plus perturbante. La Guerre de la Conquête et le siège de Québec accélèrent la
porosité avec les Vaux. Ils vont tout contaminer ! La guerre atteint son paroxysme, l’horreur
et le surnaturel aussi. Insistez sur le fait que les personnages enchaînent ces missions courtes
mais éreintantes tant physiquement que psychologiquement. Ils sont au bout du rouleau. Ils ont
du mal à se poser et à prendre un peu soin d’eux. La fatigue et le surmenage sont devenus leur
triste quotidien.

Finalement, alors qu’ils vaquent à leurs nombreuses occupations (une patrouille sur les lieux du dernier
bombardement nocturne par exemple), au petit matin du 31 août, les personnages reçoivent par messager interposé
une missive laconique de la part de Robert. Le pli indique : “Venez vite ! Je garde la maison. J’ai besoin de vous.
Mon dieu, aidez nous.”. L’écriture est vacillante et tremblante. Le pli est taché d’encre. Il y a des ratures. Le tout
semble très peu soigné.

Venez vite ! Je garde la maison. J’ai besoin de vous.


Mon dieu, aidez nous. La placer ici mais aussi
dans l’annexe tout à la fin.
46 Le basculement :
Arrivés sur les lieux, le groupe est accueilli par Robert au bord de la crise de nerfs. L’homme est sale et négligé.
Il a le regard cerné, il est hagard et fiévreux. Il invite les personnages à l’intérieur tout en claquant la porte.
Robert explique ensuite avec un peu de difficulté et d’incohérence qu’il a cloîtré Diane dans sa chambre à l’étage.
Diane a beaucoup changé ces dernières années et encore plus ces derniers mois mais, selon lui, depuis quelques
jours, elle n’est vraiment plus la même. L’adolescente murmure de plus en plus toute seule. Elle a des absences à
répétition. Son sommeil a toujours été agité certes mais à présent, victime de cauchemars terrifiants, elle ne dort
plus. Elle semble entretenir en permanence un dialogue intérieur. Son comportement s’est fait encore plus distant
récemment avant de devenir instable puis violent. Diane erre dans la maison en marmonnant, coupée du monde
extérieur. Elle a eu plusieurs crises de rage ingérables. Elle a détruit du mobilier. Elle a même pu agresser Robert
avant de se scarifier en vociférant des propos incompréhensibles. Désemparé, Robert ne savait plus quoi faire.
L’attitude de Diane a toujours été étrange mais là la jeune médium semble avoir franchi une limite.

Alors que Robert accueille les personnages et leur explique la situation, les événements se précipitent.
Un hurlement retentit à l’étage au niveau des chambres. Si les personnages accourent, ils constatent qu’une odeur
de pourriture insoutenable provient de la chambre de Diane. Une horde d’insectes a envahi tous les murs du couloir.
Une humidité atroce infiltre les murs à vue d’oeil, les font cloquer et pourrir. Des craquements sinistres inexplicables
se font entendre. Un puissant courant d’air aux relents de charogne fait claquer les portes et les meubles.
La scène devient folle en un instant ! A l’intérieur de sa chambre, Diane hurle puis elle émet des glapissements,
des vagissements et semble vomir en quantité. Des chuchotements, des rires et des soupirs retentissent partout
dans la maison.

Si les personnages interviennent, ils remarquent que la porte de la chambre de Diane est gorgée d’eau. Elle
semble aussi barricadée de l’intérieur. Une mousse épaisse et noire la recouvre en quelques instants et s’étend
dans le couloir. Elle provient de l’intérieur de la pièce. Des insectes improbables rampent ou volent aux alentours.
Depuis qu’ils sont dans le Nouveau Monde, les personnages ont souvent vu des invertébrés et des insectes
intrigants mais ceux-ci sont vraiment hors-normes : des mouches énormes, des scarabées noirs aux cornes de
cerf, des araignées-ganglions jaunâtres, des lombrics velus et huileux, etc. L’odeur d’humus et de décomposition
provoque à présent des nausées et des haut-le-coeur.

Stephane LARRIEU - marcheprime3314@gmail.com - 202303/954491/1977321


Une fois enfoncée, la porte ne donne plus sur une chambre mais sur un immense paysage nocturne déroutant, un
îlot perdu au loin au milieu d’un marécage baigné de brume. La porte de l’ex-chambre est maintenant fixée dans
le tronc d’un immense saule-pleureur à l’écorce rongée par les mousses et les champignons, tous plus difformes
les uns que les autres. La chambre de Diane n’existe plus ! Derrière cette porte, on plonge directement au coeur
des Mille-Et-Un-Vaux ! Diane reste invisible. Soudain, la scène s’emballe et une aspiration irrésistible happe les
personnages (Robert y compris) pour les projeter dans la vase et l’eau stagnante. Derrière eux, la porte et le saule
pleureur ont disparu !

Au-delà de l’étendue d’eau saumâtre, on distingue sur les berges accidentées du monticule terreux un bosquet de
lianes tortueuses et enchevêtrées. Un chant guttural et strident à la fois en provient. Les mots sont incompréhensibles
mais ils impactent l’âme même des personnages, y distillant une peur primale (test de Psyché ou malus de -1
pendant toute la scène et test de Volonté ou -1 point de Santé mentale). L’endroit n’est pas sans rappeler celui dans
lequel les personnages ont évolué lors du scénario précédent (cf. épisode III - Nos Fautes).

Le regard des personnages se focalise sur le bosquet. Ils ne peuvent résister à l’attraction malsaine qu’il exerce
(aucun test de résistance possible, c’est plus fort qu’eux !). Alors qu’ils traversent le marais, avec de l’eau croupie
jusqu’aux genoux, irrésistiblement attirés, le groupe distingue plusieurs scènes phares vécues pendant cette
campagne flottant sur l’onde : Diane retrouvée dans les ruelles de Québec, le combat contre Renaud Duval dans sa
cave, leur première rencontre avec De Montcalm, une des scènes de chaos provoquée par l’expansion brutale des
pouvoirs de Diane au sein du domaine des Gozon de Crevier, la confrontation avec François Gozon de Crevier ou
Paul de Matane, la traque du baykok, la rencontre avec Ishatokela, etc. Les personnages peuvent se traîner dans la
vase jusqu’à ces scènes reconstituées et interagir et dialoguer avec les personnages-non-joueurs qui peuplent ces
souvenirs (basez-vous sur les scènes qui ont marqué vos joueurs et leurs personnages !). Ce trajet est l’occasion
pour eux d’exprimer d’éventuels regrets, ou de tenter de sauver une personne qu’ils avaient échoué à sauver dans
le passé. Mais ils échoueront à nouveau. Il sera vain de résister contre la mort et la dégradation naturelle de toutes
choses. Si les personnages restent spectateurs, peut-être que ce sont leurs connaissances qui viennent les solliciter
(«Viens m’aider !», «Viens te battre !», etc.)

47
Sur la rive, pourtant vide l’instant auparavant, Diane est présente à l’orée du fatras végétal. Elle est nue. Son corps
maigre et encore enfantin porte les stigmates de nombreuses scarifications plus ou moins récentes (principalement
ses bras, le creux de ses cuisses et sa poitrine). Cela doit faire longtemps que Diane s’inflige ces souffrances.
Des insectes biscornus et luisants rampent sur elle, entrent dans ses narines, sa bouche et ses oreilles, sans
provoquer la moindre réaction. Le visage de la jeune médium est méconnaissable, comme vieilli prématurément.
Ses traits sont ridés, grossiers et déformés. Un rictus marque ses lèvres et dévoile une dentition animale poissée
d’une humeur noire. Des larmes de sang maculent ses joues. Le blanc de son oeil est devenu rouge. Encore
une fois, la scène n’est pas sans rappeler la vieille et gigantesque femme inhumaine rencontrée précédemment.
Dans le bosquet, une lourde et puissante respiration se fait entendre. On ne distingue rien mais les personnages
sentent un souffle fétide et glacial sur leur nuque.

Diane observe le groupe d’un regard vide et éteint. Robert l’interpelle. Elle tourne le visage vers lui et grimace.
Une énorme vrille épineuse surgit alors du bosquet pour venir lui perforer la poitrine de part en part. Robert
s’écroule raide. La médium tourne son attention vers les personnages. Une voix sépulcrale sort de sa bouche figée
: “Je suis celle qui vient car vous m’avez invité”. Puis Diane éclate soudain en sanglots, elle semble reprendre
conscience brièvement : “Je n’en peux plus, sauvez-moi !”. L’adolescente se jette sur eux alors que des lianes
acérées fouettent l’air.

Conseils pour le meneur


Diane n’est plus ! Elle a sombré dans les Vaux, peu à peu aspirée par la dimension forestière
spectrale et son coeur d’humus. Elle est devenue une marionnette d’égrégore ! Cette scène
doit être mémorable. Diane et Robert ont été des personnages récurrents de cette campagne.
Ils ont été en relation proche avec les personnages, ils ne sont pas des inconnus. Leur disparition
n’est pas anodine. Ils ont été les témoins de l’émergence des Vaux et de la chute de la colonie.
Pendant l’aventure “Nos Fautes”, les personnages sont restés impuissants face à l’incarnation
des Vaux rencontrée lors de leur transe. Ici et maintenant, ils peuvent au moins agir et tenter de
libérer Diane de sa malédiction et de sa souffrance. La médium prodige est devenu un portail de
chair vers l’ailleurs... Ses traumatismes l’ont poussée vers l’emprise et l’égrégore.
Les personnages n’ont pas le choix, la Diane qu’ils ont connu n’est plus. Il faut éliminer le monstre qu’elle
est devenue. S’ils survivent à cet affrontement, ils ne sont pas pour autant au bout de leur peine. Alors que
Diane s’éteint un sourire aux lèvres, elle répète la phrase énigmatique prononcée auparavant dans le scénario
“Apparences”: ”L’innocence n’est pas la meilleure des forteresses” (pour mémoire, rappelons-le, il s’agit d’une
référence claire à la devise de De Montcalm : “Mon innocence est ma forteresse.”).

Un rugissement monstrueux retentit au sein du bosquet infernal. Des racines surgissent du cadavre de Diane qui
se disloque et se désagrège. Elles agrippent les personnages et les entraînent au coeur de la mare d’humus qui a
remplacé le corps de leur ancienne protégée. La douleur ressentie est démentielle !

Chapitre III : 13 septembre, jeudi noir en Nouvelle-France


Au cours de cette nouvelle transition, les personnages vont faire un saut dans le temps. Ils ont pénétré dans la
chambre de Diane le 31 août et atterrissent maintenant en pleine bataille de Québec le 13 septembre, soit 13 jours
plus tard ! Leur arrivée est extrêmement pénible. Les personnages sont extirpés des Vaux comme arrachés des
berges du marais par les ronces du cadavre de Diane. Ils ont l’impression que leur chair est aspirée puis que leur
squelette est fracassé. La sensation est horrible (Test d’Endurance puis de Volonté enchaîné ou perte d’un point
de Vitalité et d’un point de Santé mentale). De plus, au cours de ce retour brutal à la réalité, à la limite de leur
champ de vision, dans un brouillard kaléidoscopique, les personnages remarquent des ronces suintantes de sang
qui forment un tunnel tout autour d’eux.

Les personnages réapparaissent couverts de sang et d’humus derrière et à proximité des lignes françaises.
Ils émergent au bord de la suffocation d’un bourbier. Ils sont désorientés et souffrent du contrecoup de cette
chute vertigineuse à travers le temps et l’espace. Face à eux, ce sont plus de 3000 soldats du roi qui font face aux
4000 belligérants britanniques alignés. Personne ne fait vraiment attention à eux. La scène semble étrangement
suspendue dans le temps. Alors que l’action reprend lentement son cours tout autour d’eux, comme au ralenti,

48
le groupe a l‘opportunité d’observer la scène en détail et d’apercevoir nettement le marquis de Montcalm, sabre
au clair, ordonner la charge. 10 heures sonnent aux clochers de Québec, les dés sont jetés…

La bataille des plaines d’Abraham


C’est le général Wolfe qui a choisi le lieu de l’affrontement après des reconnaissances et
l’expérience de l’échec de Beauport. Il voulait un terrain plat propice à une bataille rangée
classique qu’il savait pouvoir être favorable aux Anglais plus nombreux et moins mal en point
que les Français sous pression depuis plus de deux mois d’hostilités.
Après une diversion sous forme d’un nouveau faux débarquement à Beauport, il a fait
débarquer ses hommes à l’Anse au Foulon, une petite baie proche de la ville. La bataille a
lieu non loin au pied des Buttes-à-Neveu, une série de collines d’une quinzaine de mètres de
hauteur. Le secteur est composé de champs de blé et de pâturages. Même si l’endroit n’est pas
idéal car accidenté à cause de la présence des sillons de labour et de petites palissades, derrière
la petite dénivellation qui fait face à Wolfe, c’est Québec et la Nouvelle-France qui sont à portée
de main (la capitale n’est qu’à 20 minutes de marche forcée).
En position à Beauport, alerté, De Montcalm fait marche arrière et revient vers Québec.
Il appelle des renforts proches (de Vaudreuil et de Bougainville) mais il ne les attend pas et
court au secours de la capitale.

Les Français dévalent les buttes couvertes d’herbe folle et humide. Ils se ruent vers les Anglais sous le couvert
de quelques canons. Malheureusement, les différents régiments n’ont pas la même cadence et rapidement les
rangs se désagrègent. Face au stress de ce délitement, les soldats tirent trop tôt et la distance fait que leur feu est
inefficace. Les Anglais patientent. Après une marche hésitante et un rechargement désordonné, les Français tirent
de nouveau. Ils sont plus convaincants. Néanmoins, les Anglais ont eu le temps de resserrer leurs rangs et de viser.
Leur salve est mortelle. Les Français tombent plus vite que leurs adversaires. Face au désordre ambiant et à cette
charge bâclée, ils se replient. Les hommes de Wolfe les poursuivent. Ralentis par les buttes, les Français pataugent
et sont soit tués, soit fait prisonniers.

Stephane LARRIEU - marcheprime3314@gmail.com - 202303/954491/1977321


Conseils pour le meneur
Il n’est pas question ici de détailler toute la complexité et la réalité historique de cette bataille
décisive mais d’en retracer les grandes lignes. L’important est que les joueurs en aient une vision
assez précise pour imaginer les actions de leurs personnages. Décrivez surtout la situation de
départ, l’environnement du combat, puis la charge française avec sa réception britannique et la
poursuite qui s’ensuit.

Pendant la bataille, les personnages ne seront pas en reste. Ils vont être happés par la fureur du combat et se
retrouver face à la menace anglaise. Bien entendu, un personnage peut très bien décider, parce que trop blessé ou
incompétent au combat, de se mettre en retrait. Néanmoins, il se sentira peut-être mal à l’aise face à l’ardeur de
ses camarades et au sort de la colonie qui semble ici se jouer.

Surtout, la bataille éclate et les personnages y ont apporté avec eux l’écho des Vaux. En effet, la mort de Diane
n’a pas mis fin à l’émergence de la dimension forestière au sein de la Nouvelle-France. Le processus est en cours
depuis longtemps et il ne trouve ici que son climax. Les personnages sont intimement liés aux événements.
Au cours de cette campagne, ils ont été les témoins de ce basculement et de cette contamination. A leur échelle,
ils sont aussi des canaux pour que l’égrégore puisse s’écouler et faire son oeuvre. D’ailleurs, vu les derniers mots
de Diane, les joueurs devraient se douter que Montcalm va être une cible privilégiée.

Pendant toute la bataille, et au cours de leurs actions individuelles ou en groupe restreint, les personnages
se retrouvent au coeur de scènes surnaturelles et horribles. Il semblerait que les Vaux les accompagnent.
Les personnages devraient comprendre qu’ils sont eux aussi des portes, à l’instar de Diane !

p  Autour d’eux, les cadavres sont aspirés avec des bruits de succion infâmes et gourmands par le
sol qui devient soudainement spongieux.

49
p  Des racines putrides et épineuses jaillissent devant eux et accompagnent leur progression.
Elles s’attaquent à tout ce qui bouge.

p  Des esprits éphémères constitués de brume et d’humus apparaissent dans le sillage du groupe.
Ils rampent sur le sol et happent sauvagement les jambes des soldats.

p  La vision des personnages change. Ils réalisent que la bataille se déroule de nuit sur les berges
du marais visité lors du chapitre précédent et non plus au pied des Buttes-à-Neveu.

p  Un rire guttural empli de mots incompréhensibles et de crissements d’insectes assaille les


oreilles des personnages ainsi que celles des soldats à proximité d’eux.

En un mot comme en cent, les Mille-Et-Un-Vaux se réjouissent et se repaissent du carnage en cours.


“Celle-qui-vient” jouit de cette guerre de civilisation, paroxysme d’années de rivalité qui ont permis à l’horreur et
au surnaturel de se réinviter auprès d’une humanité trop fière de ses conquêtes. Elle se gausse des faiblesses et de
l’orgueil de l’Homme ! Cet abîme de sang, de larmes, d’efforts et d’espoirs détruits est pour elle d’une délectation
quintessentielle.

Les personnages peuvent utiliser les manifestations surnaturelles qui les accompagnent pour pourrir littéralement
les lignes anglaises au bénéfice des forces françaises. Faire le Mal pour un Bien ? A eux de choisir en leur âme et
conscience...
Conseils pour le meneur
Créez vos propres opportunités tactiques et rebondissez sur les idées de vos joueurs. Laissez-
les vivre leur bataille des plaines d’Abraham. N’oubliez pas malgré tout que les Vaux voraces
accompagnent leurs hérauts !

D’autres opportunités plus terre-à-terre peuvent également s’offrir à eux.

Pendant la charge française, les personnages ont l’opportunité de rallier une unité qui se délite en raison de la mort
de leur officier (Test de Tactique et d’Influence à -2).

Alors que les soldats alentour tirent trop vite, les personnages peuvent tirer une salve efficace (test d’Observation,
de Tactique et de Tir).

Lorsque les Anglais chargent à leur tour et que les Français se replient en pagaille, les personnages peuvent repérer
une voie plus praticable et sauver ainsi pas mal de vies (test d’Observation, de Survie et d’Athlétisme à -2).

Vous pouvez aussi mettre en scène un bref combat contre quelques soldats anglais armés de baïonnettes.
Un combat violent et chaotique pendant lequel leur amie Alba Magnifica blessée pourrait intervenir à coup de
vitriol explosif pour leur sauver la mise !

Deux événements majeurs ont lieu pendant cette bataille : la mort de Montcalm et de Wolfe. Au-delà de leurs
actions significatives abordées auparavant, les personnages vont vivre celles-ci au plus près.

A la fin de la charge française, les rangs anglais vont s’ouvrir devant les personnages et le général James Wolfe
va apparaître devant eux. L’homme a le regard fiévreux et la bave aux lèvres tel un loup enragé (insistez sur cette

50
image à la limite de la métamorphose). Il vit son rêve : faire tomber la colonie honnie ! Surtout Wolfe incarne la
folie des hommes sous l’emprise des Vaux. Lui aussi est un vaisseau d’égrégore. L’Anglais pue la décomposition
et tout autour de lui des ronces suintantes fouettent l’air. Les personnages ont l’opportunité de tirer et d’abattre
l’officier supérieur déjà sévèrement blessé à la main droite (c’est un détail historique : ses doigts sont en partie
arrachés. Techniquement, il lui reste 10 points de Vitalité). S’ils n’y parviennent pas, ils verront un milicien
amérindien, un huron pour être précis, achever Wolfe d’une balle dans la poitrine tout en invoquant les esprits de
ses ancêtres.

Lors de la retraite, les personnages apercevront De Montcalm à cheval. Le marquis a été touché dans le bas du
dos par un tir. Les personnages peuvent se porter à son secours. Malheureusement, la blessure est profonde.
Elle suppure une humeur noire comme du pétrole. Une odeur âcre de pourriture et de terre entoure le marquis.
De Montcalm est brûlant de fièvre. Son regard est exorbité. Il marmonne : “Vous aviez raison... Tout cela existe...
J’ai vu Celle qui vient ! Je croyais tout connaître mais je n’étais qu’un idiot ! Nous sommes la graine qui a
pourri ce Nouvel-Eden... Nous sommes cette forêt. Il n’y a pas de monstre, juste nous.”

Le groupe peut escorter l’officier amoindri jusqu’à Québec où il sera pris en charge par un chirurgien. Peu de temps
après, De Montcalm fait appeler les personnages à son chevet. A leur entrée, le médecin leur glisse à l’oreille que
c’est fini. Le maréchal est blême, sa voix chevrotante. D’étranges veines noires s’étendent de sa blessure. Il invite
les membres de la Compagnie à s’asseoir. Malgré les terribles circonstances, fidèle à ses manières, il prend des
nouvelles d’eux ainsi que de Robert et de Diane. Il sera sincèrement attristé de leur disparition. De Montcalm
évoque les scènes étranges et horribles ayant eu lieu pendant la bataille. Apparemment, lui aussi était accompagné
par les Vaux. Il se confie et affirme que le Roi a eu raison de reformer la Compagnie : “Ce n’est pas le Paradis,
c’est l’Enfer, rien de bon n’attend l’Homme ici. Mais, mon innocence est ma forteresse.”. Il se met alors à
délirer puis perd connaissance. Finalement, malgré sa lucidité première sur l’existence des Vaux et les origines
humaines de ce mal, De Montcalm fait porter le poids des fautes, des larmes et du sang à la Terre. Le chirurgien
revient. De Montcalm agonise. Il mourra sans avoir repris connaissance dans la nuit (vers 3 ou 4 heures du matin
historiquement). Les Vaux seront rassasiés. Les deux camps se sont entretués. Tout est bouleversé et instable.
On peut faire confiance à l’homme pour faire de cette nouvelle donne un terreau propice pour de nouveaux
ressentiments et de futurs carnages...

Stephane LARRIEU - marcheprime3314@gmail.com - 202303/954491/1977321


Conclusion
Jouez cette conclusion de manière narrative et sous forme d’ellipse. La campagne s’achève, prenez votre temps
et soignez cet épilogue. Entretenez un dialogue ouvert avec vos joueurs tout en vous référant aux informations
distillées ci-dessous. Que font-ils ? Où vont-ils ? Quel est leur but ? Comment envisagent-ils l’avenir ? Quels sont
leurs sentiments face à tous ces événements et leur dénouement ? Etc. Clôturez par la fameuse lettre.

Les personnages survivants doivent quitter Québec. Il est clair que le Gouverneur-Général va négocier avec les
Anglais maintenant que De Montcalm n’est plus. La situation va devenir encore plus intenable. Malgré la peine,
la colère et le deuil, il est temps de trouver un autre endroit où exercer voire où réagir. Pourquoi pas Trois-Rivières,
une vielle proche et encore vivace ?

Suite à cette défaite, le Gouverneur-Général De Vaudreuil ordonne un repli des troupes et abandonne Québec
aux Anglais. Ceux-ci assiègent la capitale devant ses murs. Les Québécois sont poussés à bout et demandent une
reddition. De Vaudreuil entérine la capitulation de la ville le 18 septembre. Pourtant, des vivres étaient en route
depuis Trois-Rivières et les troupes françaises étaient encore en état de combattre !

La reddition de Québec et plus largement l’acceptation de la défaite par le Conseil souverain va être un coup dur
pour toute la Colonie. Les Britanniques s’installent dans la capitale et y organisent un gouvernement militaire de
transition. Une frontière se met en place entre Québec occupée et Trois-Rivières. Le siège prolongé de la ville et
les exactions ordonnées par le général Wolfe ont causé des désastres matériels, humains et psychologiques sans
précédent. La colonie ne peut s’en remettre.

Malgré une contre-offensive française à Québec couronnée de succès en avril 1760, la prise de Montréal par
les Anglais et la présence écrasante de leur flotte sur le Saint-Laurent auront raison de la résistance française.
En septembre 1760, acculé et résigné, De Vaudreuil signe cette fois la capitulation de Montréal. Dans la foulée,

51
il cède le Canada et toutes ses dépendances aux forces d’invasion anglaises. Certes, la guerre n’est pas finie,
elle se poursuit à moindre échelle dans d’autres territoires coloniaux (Terre-Neuve par exemple) mais il est évident
que la Nouvelle-France n’existe plus en tant que telle.

De fil en aiguille, après trois ans de négociations difficiles, la France et la Grande-Bretagne signent la paix avec le
Traité de Paris. Malgré le feu d’artifice qui sera tiré à Paris après sa signature, ce traité ne fait que confirmer un état
de fait : la France a perdu. Il marque un tournant dans l’Histoire car le royaume n’est plus la nation européenne
dominante. La France perd son empire colonial. Le monde devient anglo-centré.

Quoiqu’il en soit, de septembre 1759 à février 1763, les personnages peuvent encore vivre bien des aventures.
La guerre n’est pas si terminée que cela ! Le surnaturel est toujours bien présent et actif. Il ne fait pas de distinction
entre les Français, les Anglais, les tribus, etc. Le danger représenté par les Mille-Et-Un-Vaux et ses horreurs reste
d’actualité.

Et si…
Et si De Montcalm survivait ? Et si les personnages arrivaient à le sauver in extremis
grâce à leurs pouvoirs ? Sentez-vous libre de jouer avec l’Histoire et de bouleverser la trame.
Vous pouvez changer le sort de la Nouvelle-France et faire au contraire qu’elle perdure dans
le temps en créant votre propre uchronie ! Il pourrait être tout aussi intéressant de reconquérir
Québec ou de bouter les anglais avec quelques bouquets de nerfs...

S’ils ont fait preuve de courage et de détermination pendant tous ces événements, si leur conduite n’a pas été
infamante et s’ils ont osé se dresser et faire face à l’inéluctable (c’est à vous meneur de juger ce point et de
délivrer ou non au groupe la lettre...), peu de temps après leur fuite de Québec, alors qu’ils cherchent une voie
pour l’avenir, les personnages vont recevoir de France une mystérieuse missive postée de Paris et portée par un
simple messager.
“Chers Membres de la Compagnie,

Au nom des intérêts supérieurs de la France, du Roi et de


l’Humanité, nous vous remercions de tout coeur de votre engagement
et de votre fidélité.

Sachez que votre dévouement n’est pas vain, ni oublié. Ainsi, je vous
nomme expressément Associés.

Veuillez prendre vos nouvelles fonctions au plus vite à Trois-Rivières où


la Compagnie possède un hôtel particulier fort adapté. La domesticité
52 vous y attend. Forts de votre nouveau statut, vous avez toute notre
confiance pour envisager la suite et l’avenir.

Continuez à lutter et à servir. Des petites étincelles naissent les


grands embrasements.

Détruisez cette lettre après lecture !

Armand Jean du Plessis de Richelieu,


Premier Associé”

Stupeur ! Le Cardinal de Richelieu est mort il y a plus d’un


siècle, en décembre 1642. Nous sommes en 1759… Il est vrai que c’est
lui qui avec Samuel de Champlain a fondé la Compagnie en 1627...

Stephane LARRIEU - marcheprime3314@gmail.com - 202303/954491/1977321


ANNEXE : Protagonistes et créatures

SCENARIO I : PEUR SUR QUEBEC


Renaud Duval (Fantôme souillé par l’égrégore)
Le fantôme de Renaud est translucide et brumeux. Il représente un homme jeune et vigoureux aux traits marqués
par la haine et la folie. Une odeur d’humus prenante l’accompagne. Le sinistre écho des Vaux est audible à
proximité : bruit du vent dans les branchements, feuilles qui craquent, grouillement de vermine, etc. Le regard de
Renaud n’est plus qu’un puit de ténèbres d’où s’écoule une humeur visqueuse et malsaine.

Renaud disparaît définitivement seulement si :

● Sa maison a été brûlée et que le portail vers les Mille-Et-Un-Vaux est fermé.

● Son esprit malveillant a été chassé par la purification de sa propre tombe à grand renfort d’eau bénite et
de flammes au vu des stigmates d’égrégore qui s’y épanouissent.

R +1 Rs +1 V +4 A 1 I +2 Dépl 7m

● Intangible

53
● Vampire (Toucher, Esquive à -2 ou la cible perd 6 points de Vitalité)

● Télékinésie : Lancer +3 (+4), Blessures 4

● Peur -2 (perte de deux points de Santé mentale en cas d’échec)

● Surpuissance : Dans sa demeure et plus particulièrement dans la cave, les pouvoirs de Renaud deviennent
terribles. A chaque début de tour, son Vampirisme s’améliore : Esquive à -1 cumulatif et perte de +1 point
de Vitalité cumulatif également (exemple : deuxième tour = Esquive -3 et perte de 7 points de Vitalité).
De même pour sa Télékinésie dont la distance et la force de projection augmentent. Ainsi, les Blessures
occasionnées augmentent de 1 point à chaque tour jusqu’à doubler (2ème tour : Blessures 5, etc. avec un
maximum à 8).

Diane (une enfant médium surdouée)


Un fillette d’environ huit ans, fragile, aux longs cheveux noirs et au regard gris envoûtant.

F -3 R +1 E -2 Rs +1 V +3 A 1 I +2 Dépl 7m san 23 Vitalité 6 (c’est une enfant, sa Vitalité est divisée par 2)

Compétences : Psyché +3 (+6), Survie +1 (+2), Observation +1 (+2), Esquive +1 (+2), Discrétion +1 (+2).

Traits : Médium (peut voir les fantômes et les âmes en peine et communiquer avec eux).

Bernard Grandpré (contremaître et médecin de fortune)


Un colosse barbu solitaire qui travaille dans la grande scierie de la Basse-Ville. C’est aussi un ex-médecin militaire
hanté par les atrocités des champs de bataille. Il recherche la quiétude mais n’hésite jamais à aider son prochain.

F +2 R -2 E +2 Rs +1 V +0 A 1 I -1 San 10 Vitalité 20

Dérangement : Cauchemars (les horreurs vécues lors de sa carrière médicale et militaire)

Compétences : Armes blanches +2 (+4), Equitation +2 (+0), Esquive +1 (-1), Influence +2 (+2), Professions :
Médecin +3 (+4) et Travail du bois +2 (+4), Pugilat +1 (+3), Tactique +2 (+3), Tir +2 (+0)
SCENARIO II : APPARENCES
Guerriers iroquois
Des tueurs fidèles aux anglais.

F +2 R +2 E +2 Rs -1 V +1 A 2 I +1 Dépl 8 m San 21 Vit 20

Compétences : Archerie +3 (+5) , Armes blanches +3 (+5), Athlétisme +3 (+5), Discrétion +2 (+4), Equitation
+3 (+5), Esquive +3 (+5), Lancer +3 (+5), Langues : Iroquois (langue natale) et Anglais +2, Observation +2 (+1),
Pugilat +2 (+4), Survie +2 (+1), Tactique +2 (+1), Tir +3 (+5).

Équipement : Mousquet long “Brown Bess”, arc, plombs et poudre, carquois de flèches, tomahawk et couteau.

Agents anglais
Des soldats d’élite spécialisés dans les opérations discrètes et délicates.

F +2 R +2 E +2 Rs +1 V +2 A 2 I +3 Dépl 8 m San 22 Vit 20

Compétences : Armes blanches +3 (+5), Athlétisme +3 (+5), Discrétion +3 (+5), Equitation +3 (+5), Esquive
+3 (+5), Filouterie +2 (+4), Influence +2 (+4), Langue : Anglais (langue natale), Iroquois +2 et Français +2,
Observation +3 (+4), Psyché +1 (+3), Pugilat +3 (+5), Survie +2 (+3), Tactique +2 (+3), Tir +3 (+5).

Équipement : Mousquet colonial, pistolet à silex, pistolet de voyage (dissimulé), plombs et poudre et couteau.

François Gozon de Crevier

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Un traître qui a vendu son âme à l’ennemi pour sauver ses biens et contre la promesse d’un avenir radieux.

F +1 R +2 E +1 Rs +2 V +2 A 2 I +4 Dépl 8 m San 22 Vit 18

Compétences : Armes blanches +3 (+4), Athlétisme +1 (+2/+3), Equitation +3 (+5), Érudition : Culture coloniale
+3 (+5), Esquive +2 (+4), Influence +3 (+5), Langue : Français (langue natale) et Anglais +1, Observation +2 (+4),
Profession : Logisticien +3 (+5), Pugilat +2 (+3), Tir +3 (+5)

Équipement : Mousquet colonial (à disposition dans le manoir), sabre de cavalerie, pistolet de voyage (sur lui).

Paulin de Matane
Un lâche doublé d’un scélérat, assez crédule pour se laisser entraîner dans une sale histoire.

F +1 R +1 E +1 Rs +0 V -2 A 1 I +1 Dépl 7 m San 18 Vit 18

Compétences : Armes blanches +2 (+3), Equitation +2 (+3), Érudition : Culture coloniale +2 (+2), Esquive +2
(+3), Influence +2 (+0), Langue : Français (langue natale), Profession : Logisticien +3 (+3), Pugilat +1 (+2), Tir
+2 (+3)

Équipement : Pistolet à silex, plombs et poudre et couteau.

Irène de Matane
Une femme rongée par le remord qui aimerait tant changer de vie et racheter ses fautes.

F -2 R +0 E -1 Rs +1 V +0 A 1 I +1 Dépl 6 m San 13 Vit 20

Compétences : Érudition : Culture coloniale +3 (+4), Influence +2 (+2), Langue : Français (langue natale),
Observation +2 (+3), Profession : Logisticienne +1 (+2)

Maréchal et marquis Louis-Joseph de Montcalm


Pas de profil chiffré car, en tant que meneur, vous gérez ce personnage historique important comme vous le
souhaitez, sans aucun carcan technique !

Stephane LARRIEU - marcheprime3314@gmail.com - 202303/954491/1977321


Camille et Benoît, soldats français dévoués
Deux solides gaillards courageux et loyaux.

F +2 R +2 E +2 Rs -1 V +1 A 2 I +1 Dépl 8 m San 21 Vit 20

Compétences : Armes blanches +3 (+5), Athlétisme +2 (+4), Equitation +2 (+4), Esquive +3 (+5), Langue :
Français, Pugilat +2 (+4), Tactique +2 (+1), Tir +3 (+5).

Lieutenant Pierre Philippe Chassins de Prosnes


Un homme réservé qui voue une grand admiration à son supérieur.

F +1 R +1 E +1 Rs +1 V +1 A 1 I +2 Dépl 7 m San 21 Vit 18

Compétences : Armes blanches +2 (+3), Athlétisme +2 (+3), Equitation +3 (+4), Esquive +3 (+4), Influence +2
(+3), Langue : Français, Pugilat +1 (+2), Tactique +3 (+4), Tir +3 (+4).

Diane (de Matane), jeune médium en pleine progression (profil actualisé car
Diane a grandi)
Étrange enfant trop mature et au regard inquiétant.

F -2 R +2 E -1 Rs +1 V +4 A 2 I +3 Dépl 8m Vitalité 9 (c’est une enfant, Vitalité moins un tiers)

Compétences : Psyché +3 (+7), Survie +1 (+2), Observation +2 (+3), Esquive +1 (+3), Discrétion +1 (+3),
Influence +1 (+5).

Traits : Médium (peut voir les fantômes et les âmes en peine et communiquer avec eux) et Prémonition (a des

55
visions du futur ainsi que des flashs intuitifs sur des personnes ou des lieux spécifiques)
SCENARIO III : NOS FAUTES
Diane, médium inquiétante (profil actualisé car Diane a encore grandi)

F -2 R +2 E -1 Rs +2 V +5 A 2 I +4 Dépl 8m San 25 Vitalité 13

Compétences : Psyché +4 (+9), Survie +1 (+3), Observation +3 (+5), Esquive +1 (+3), Discrétion +2 (+4),
Influence +2 (+7).

Traits : Médium (peut voir les fantômes et les âmes en peine et communiquer avec eux), Prémonition (a des
visions du futur ainsi que des flashs intuitifs sur des personnes, des objets ou des lieux spécifiques), Voyage astral
(Diane peut voyager dans ses propres visions et même maintenant se projeter au sein du Monde des Esprits et
malheureusement également au sein des Mille-Et-Un-Vaux).

Baykok coriace et sournois


F +2 R +2 E +2 Rs +0 V +0 A 2 I +2 Dépl 8 m Vit 20

Compétences : Armes blanches +3 (+5), Archerie +3 (+5), Athlétisme +3 (+5), Discrétion +2 (+4), Esquive +2
(+4), Observation +2 (+2).

Traits : Réduction des dommages (armes à feu et flèches), Peur (-2), Gaz paralysant,
Mort-vivant.

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Equipement : Tomahawk (Blessures 6), Arc (Blessures 4), Poignard (Blessures 4)

Nathorod et les guerriers ou chasseurs algonquins


F +1 R +1 E +1 Rs +0 V +1 A 1 I +1 Dépl 7 m San 21 Vit 18

Compétences : Archerie +3 (+4) (certains guerriers utilisent aussi les armes à feu : Tir à la
place), Armes blanches +3 (+4), Athlétisme +3 (+4), Discrétion +3 (+4), Esquive +3 (+4), Lancer +3 (+4),
Langue : Algonquin (langue natale) et français +1 ou +2,
Observation +2 (+2), Pugilat +3 (+4), Survie +3 (+3), Tactique +2 (+2).

Équipement : Mousquet colonial (Blessures 6) ou arc (Blessures 4), tomahawk (Blessures 6), couteau (Blessures
4), braies en peau de daim, fourrures et mocassins.

Ishatokela, chaman membre du Midewiwin


F -2 R +0 E -1 Rs +4 V +5 A 1 I +4 Dépl 6 m San 25 Vit 13

Compétences : Armes blanches +2 (+2), Chamanisme : Voyage spirituel +5 (+10) , Guide invisible +4
(+9), Guérison des maladies et Souffle guérisseur à +3 (+8), Érudition : Culture coloniale +2 (+6) et Tribus
amérindiennes +4 (+8), Influence +3 (+8), Langues : algonquin (langue natale) et Français à +3, Professions :
Herboriste +3 (+7) et Médecin +3 (+7 ou +9 avec le bonus d’Herboristerie), Observation +3 (+7), Psyché +4
(+9).

Équipement : Tomahawk (Blessures 6), couteau (Blessures 4), pagne de cuir, fourrures et mocassins.

Stephane LARRIEU - marcheprime3314@gmail.com - 202303/954491/1977321


SCENARIO IV : DU SANG ET DES LARMES
Alba Magnifica

F +0 R +1 E +0 Rs +4 V +3 A 1 I +5 Dépl 7 m San 23 Vit 16

Compétences : Alchimie : Transmutation +5 (+9) / Vitriol +4 (+8) et Composés climatiques (nouvelle Spécialisation,
exemple : poudre d’orage) +3 (+7), Equitation +2 (+3), Érudition : Philosophie Naturelle +3 (+7) et Cartographie
+3 (+7), Influence +2 (+5), Langues : Français (langue natale) / Grec +3 et Anglais +2, Professions : Marchand
+3 (+7) et Logisticien +2 (+6), Psyché +3 (+6), Tir +1 (+2).

Équipement : Atelier avec un athanor, trousse d’alchimie et chariot-laboratoire, pistolet à silex.

Esprit de la terre en colère

Il peut être chassé grâce à un rituel chamanique tourné vers les esprits de l’air ou être amadoué grâce à des
offrandes matérielles à ensevelir.

R +3 Rs +1 V +5 A 2 I +4 Dépl 8 m

Traits : statufication (toucher, - 4 en Vitalité, test d’Esquive à -2 pour la cible), Intangible (naturellement), Influence
spirituelle sur la terre et la roche, Peur (-1).

Spécial : Tabou (si on effectue une danse aérienne sur le rocher qui l’abrite).

57
Soldats anglais/Rangers américains

F +2 R +2 E +2 Rs -1 V +1 A 2 I +1 Dépl 8 m San 21 Vit 20

Compétences : Armes blanches +3 (+5), Athlétisme +2 (+4), Esquive +3 (+5), Langue : Anglais (natale), Pugilat
+2 (+4), Tactique +2 (+1), Tir +3 (+5).

Équipement : Mousquet colonial, plombs et poudre et couteau.

Charnier vivant

Un amas mobile d’humus, de vase et de cadavres putréfiés à demi digérés.

F +2 R +4 E +0 Rs +0 V +0 A 4 I +4 Dépl 10 m Vit 18

Compétences : Athlétisme +3 (+5 ou +7), Pugilat +3 (+5), Esquive +3 (+7), Observation +3 (+3), Discrétion +4
(+8).

Traits : Peur (-3), Vision nocturne, Flair, Puanteur (comme un mort-vivant, -1 à tous les tests).

Chaman maudit

F +0 R +0 E +1 Rs +3 V +3 A 1 I +3 Dépl 6 m San 23 Vit 17

Compétences : Armes blanches +1 (+1), Chamanisme : Guide invisible et Voyage spirituel à +3 (+6), Érudition
: Divination (Augure) +3 (+6) et Tribus amérindiennes +3 (+6), Influence +2 (+5), Langues : Iroquois (langue
natale) et Anglais à +3, Professions : Herboriste +3 (+6) et Médecin +3 (+6 ou +8 avec le bonus d’Herboristerie),
Psyché +3 (+6).

Équipement : Tomahawk, couteau, diverses herbes autres colifichets


Brutes cannibales

F +1 R +1 E +1 Rs -2 V -1 A 1 I -1 Dépl 7 m San 19 Vit 18

Compétences : Armes blanches +2 (+3), Athlétisme +2 (+3), Esquive +2 (+3), Langue : Français (langue natale),
Pugilat +2 (+3).

Equipement : Gourdin ou couteau.

Diane transformée
F +2 R +3 E +2 Rs +2 V +5 A 3 I +5 Dépl 9m San 0 Vitalité 40

Compétences : Athlétisme +2 (+4 ou +5), Psyché +4 (+9), Survie +3 (+5), Observation +4 (+6), Esquive +3 (+6),
Discrétion +3 (+6), Influence +2 (+7), Pugilat +2 (+4).

Traits : Médium (peut voir les fantômes et les âmes en peine et communiquer avec eux), Prémonition (a des
visions du futur ainsi que des flashs intuitifs sur des personnes, des objets ou des lieux spécifiques), Voyage astral
(Diane peut maintenant voyager d’un monde à l’autre : la réalité, le Monde des esprits et les Mille-Et-Un-Vaux),
Morsure (Blessures 3), Griffes (Blessures 4), Flair, Peur (-3), Vision nocturne.

Bosquet de ronces épineuses et putrides

F +2 R +2 E +1 Rs -3 V -4 A 2 I Spécial (agit en même temps que Diane) Dépl 8 m* Vit 40

58
Compétences : Pugilat +3 (+5)

Traits : Écrasement/Étreinte, Vampire (toucher, Vitalité).

* Les ronces ne se déplacent pas, ce sont les lianes qui se tendent brutalement du bosquet vers leurs cibles.

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