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L’addiction :

I- Introduction et généralités :
1- Définition :

Addiction, dépendance ou assuétude est une conduite qui repose sur une envie répétée et irrépressible à faire ou à
consommer quelque chose de faire ou de consommer quelque chose en dépit de la motivation et des efforts du sujet pour
s'y soustraire. L’addiction se manifeste par un phénomène de manque lorsqu’on est privés d’un besoin non-vital (Exemple
de besoins vitaux : Nourriture, sommeil). Elle est dite addiction grave si son sevrage entraîne une violence ou une agressivité.
L’addiction est souvent synonyme de toxicomanie qui désigne toute dépendance nocive à une substance ou à une
activité. L’assuétude a un sens similaire sans toutefois être aussi négatif (Assuétude au chocolat mais dépendance à la
cocaïne).
Enfin, en 1975, l’OMS définit la dépendance comme « Un état psychique, parfois physique, résultant de l'interaction
entre un organisme vivant et un produit, caractérisé par des réponses comportementales ou autres qui comporte toujours
une compulsion à prendre le produit de façon régulière ».

2- Etymologie :

Le terme addiction est d'étymologie latine, ad-dicere « dire à ». Dans la civilisation romaine, les esclaves n'avaient
pas de nom propre et étaient « dits à » leur « Pater familias » (Père de famille). Le terme d'addiction exprime une absence
d'indépendance et de liberté, donc bien un esclavage.

3- Classification des substances psychoactives :

On distingue diverses classifications, on retiendra celle qui les classe selon l’effet psychologique recherché et on les
classe selon leur ordre de fréquence en Algérie :
• Les hallucinogènes : Exemples :
- Dérivés du cannabis.
- L'acide lysergique diéthylamide ou LSD25.
- Dérivé de la Mescaline.
• Les sédatifs : On distingue :
- Les hypnotiques et tranquillisant : Comme les benzodiazépines et les barbituriques.
- Les opiacés dérivés de l’opium : Comme l’héroïne et la morphine.
- Les drogues synthétiques : Comme le Dolosal ou le Palfium.
• Les stimulants : Exemples :
- Les antiparkinsoniens de synthèse : Notamment le trihexyphenidyl.
- La cocaïne.
- Les amphétamines.

II- Clinique :
1- Examen du patient :
Le patient est souvent manipulateur de l’entourage, refuse de parler de son addiction et est dans le mensonge et le
déni. C’est souvent leurs parents, amis ou collègues qui les poussent et les amènent à consulter. A l’examen clinique on
devra :
• Préciser la manière dont est consommé le produit :
- Par injection IV ou sous-cutané (Morphine, héroïne) : On cherchera les cicatrices d’injection, les abcès, les
hématomes… Mais aussi les affections secondaires telles que les infections virales (Hépatites à VHC ou VHB, VIH),
l’endocardite infectieuse, les thrombophlébites.
- Par aspiration nasale ou sniffe (Cocaïne, héroïne) : On recherchera une perforation du septum nasal, une
épistaxis ou une rhinite chronique.
- Fumé (Cocaïne, cannabis) : On recherchera des troubles respiratoires chroniques à type d’asthme ou de
bronchite.
- Avalé (Barbituriques, benzodiazépines, chira = forme de cannabis) : Pouvant être associés à l’alcool.
• Préciser les modalités de consommation :
- Nombre de substances consommées.
- Si la prise est continue ou épisodique.
- Quantité prise.
- Présence ou non de moments de sevrage.
- Déroulement du rituel de consommation : Lieu, seul ou avec un groupe (Toujours le même ou pas).
- Apprécier l’impact de l’addiction sur le fonctionnement familial, social et professionnel.
- Préciser comment le sujet se procure le produit, le cout de la drogue et les moyens financiers du patient.
• Recherche toxicologique dans le sang ou les urines : Pour confirmer l’addiction quand il s’agit de drogues (Alcool ou
barbituriques dans le sang par exemple). L’avantage du dosage urinaire est qu’il peut être réalisé même 48h après la
consommation de la drogue.

2- Critères diagnostics selon le DSM-5 :

Le manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-5) utilise l’expression de troubles de l’usage d’une
substance pour décrire la prise compulsive de drogues, d’une forme légère à une forme grave à rechutes chroniques. Elle se
manifeste par l’apparition d’au moins 2 des manifestations suivantes au cours d’une période de 12 mois :
1. Une consommation plus importante en quantité ou durant une période plus longue que prévue.
2. Un désir persistant ou des efforts infructueux pour réduire cette consommation.
3. Beaucoup de temps est consacré à l’obtention, l’utilisation et la récupération des effets de la substance.
4. Un besoin impérieux de consommation (Craving).
5. Consommation répétée avec incapacité de remplir ses obligations socio-professionnelles.
6. Consommation continue malgré des problèmes causés.
7. Abandon ou réduction des activités socio-professionnelles et de loisir.
8. Consommation répétée dans des situations où cela peut être physiquement dangereux.
9. Consommation poursuivie en toute connaissance de cause de problèmes persistants ou récurrents.
10. La tolérance qui est définie par un besoin de quantité plus forte pour obtenir l’effet désiré, ou par la diminution de
l’effet par usage d’une même quantité.
11. Le sevrage se manifeste par un syndrome de sevrage caractéristique de la substance, ou par la prise de la substance
pour éviter ou soulager les symptômes de sevrage.

La sévérité des troubles est spécifiée en forme légère (2-3 manifestations), moyennes (4-5) et grave (> 6). La rémission
précoce est définie par l’absence de manifestations pendant au moins 3 mois, et la rémission prolongée pendant au moins
12 mois, à l’exception du critère 4 (Craving) dans les deux cas.
Les troubles de l’usage d’une substance sont classés par substances, et le DSM-5 distingue des troubles non liés à des
substances : jeu d’argent pathologique avec critères spécifiques.

Remarque (En +) : Les troubles liés à une substance regroupent 10 classes séparées de drogues : alcool, caféine,
cannabis, hallucinogènes, substances inhalées, opiacés, sédatifs, hypnotiques et anxiolytiques, stimulants, tabac et
substances autres (Ou inconnues). Ces 10 classes ne sont pas complètement distinctes. Toutes les substances qui sont prises
en excès ont en commun une activation directe du système cérébral de récompense, lequel est impliqué dans le
renforcement des comportements et la production de souvenirs. Ces substances produisent une activation si intense du
système de récompense que les activités habituelles peuvent s’en trouver négligées. Au lieu d’aboutir à une activation du
système de récompense par des comportements adaptatifs, les substances donnant lieu à abus activent directement les
voies de récompense.

III- Les principales substances psychoactives :


1- Le cannabis :

Les hallucinogènes sont des substances qui entraînent des troubles de perception (Illusion, hallucination), troubles
de la conscience, ainsi qu’une altération de l’affectivité et du contenu de la pensée. Le cannabis et ses dérivés sont les plus
utilisés au Maghreb.
Le principe psychoactif essentiellement responsable des effets psychotropes du cannabis est le Delta9-tétra-hydro-
cannabinol (Delta9-THC). Il se présente sous les formes suivantes, par ordre de concentration croissante en delta9-THC :
- Herbe (Marijuana).
- Résine (Haschich ou chira) qui contient 40% de THC. C’est une poudre brunâtre qui peut être mangé associé à de
diverses préparations boisson, confiture, gâteaux ou même fumés.
- Huile, plus rare.

Il est souvent proposé sous forme de cigarette, kif avec tabac blanc, ou sous forme de plaquette carré de 1cm.

Le cannabis peut induire :


• Ivresse cannabique : Faite d’une euphorie précédée d’exaltation sensorielle et suivie d’une somnolence avec torpeur
extatique, selon la dose la symptomatologie diffère :
- A petite dose : Elle entraîne un état d’euphorie, une détente, une exaltation de l’imagination et des stimulations
sensorielles (Hyperesthésie auditive, visuelles, tactiles, cinesthésiques). Les couleurs et les sons sont très
intenses, avec des représentations imaginaires, des illusions, des distorsions perceptives… On retrouve aussi des
perturbations des repère temporo-spatiales.
- A dose importante : On peut retrouver
▪ Des signes psychiques : Dépersonnalisation, hallucinations ou même une confusion.
▪ Des signes physiques : Sécheresse buccale, injection conjonctivale, ébriété, tachycardie.
• Intoxication au cannabis :
- Intoxication aiguë : Elle se manifeste par des attaque de panique, une excitation ou une dépression ou encore un
état oniroïde voire une vraie bouffée délirante. On peut aussi retrouver un état confusionnel, une hétéro-
agressivité ou auto-agressivité. Dans les signes physiques on note un vertige, des céphalées, nausées,
vomissements…
- Intoxication chronique : On note :
▪ Des troubles thymiques persistants : Dépression anxieuse ou dépression atypique.
▪ Un syndrome amotivationnel : Avec apathie, apragmatisme, déficience intellectuelle avec lenteur des
idéations.
▪ Organisation psychotique.
• Sevrage du cannabis : Il n’y a pas de dépendance physique mais la dépendance psychique est importante.

2- Les stimulants :
A- Le triphexyphenidyl (Artane) :
Utilisé par de nombreux toxicomane et souvent associés à l’alcool, les revendeurs s’attaquent aux pharmacies des
hôpitaux psychiatriques, parfois les malades simulent les effets extrapyramidaux pour se faire prescrire un antiparkinsonien
de synthèse. La dose peut aller à plus de 50mg/j et provoquer une euphorie, une sub-excitation, et parfois des états oniroide.
Il n’y a pas de syndrome de sevrage, seulement une augmentation de l’anxiété.
B- La cocaïne :

Alcaloïde de la famille de coca, la plante de coca est très répandu en Amérique. La cocaïne est disponible sous 2
formes :
• Une forme chlorhydrate (Poudre blanche) : Obtenue à partir de la feuille de coca, consommée par voie intranasale
(Sniff) ou par voie intraveineuse.
• Une forme base (cailloux, galettes) : Obtenue après adjonction de bicarbonate de soude (Crack) ou d’ammoniaque
(freebase) au chlorhydrate de cocaïne afin d’être inhalée (fumée) ou injectée.

La cocaïne entraine :
• Lors de sa consommation : Elle entraîne une euphorie avec stimulation intellectuelle hyperactive. Lors de l’usage
répété, elle a un effet euphorisant qui se termine par un atterrissage désagréable associant léthargie, hypersomnie,
hyperesthésie et même des idées délirantes de persécution avec hallucinations.
• Intoxication à la cocaïne :
- Intoxication aiguë :
▪ Signes psychiques : Entraîne une anxiété, agitation, logorrhée et idées délirantes paranoïaques (Grandeur,
persécution), une insomnie et une anorexie.
▪ Signes physiques : On peut retrouver une mydriase, des mouvements stéréotypés… A forte dose on a un
délirium, des convulsions, des symptômes cardiaques (Tachycardie, HTA) voire une mort subite.
- Intoxication chronique : En plus des risques liés aux injections (VIH, VHB, septicémie, thrombose veineuse) ou
sniff (Rhinite, épistaxis), on peut assister à une déchéance psychosociale et à l’installation d’une tolérance, d’une
anorexie, d’une hypertonie et de troubles cardiaques.
• Sevrage de la cocaïne : On note une fatigue, une léthargie, anxiété, sentiment dépressif et d’incurabilité, de
culpabilité, une impuissance et des idées suicidaires.

3- L’alcool :

L’alcool est connu pour ses effets sédatifs et anxiolytiques, pour cela il est consommé par les personnes
insomniaques, anxieuses et dépressives. Dans notre pays, il est utilisé sous forme de bière qui est consommée soit
quotidiennement et régulièrement, soit massivement par période.
• Intoxication alcoolique aiguë : On distingue différents degrés de sévérité de l’intoxication alcoolique aiguë en
fonction de l’alcoolémie du patient :
- A faible dose, l’ivresse associe une incoordination motrice, une dysarthrie, une expansion de l’humeur avec levée
de l’inhibition et une baisse de la vigilance.
- A dose plus élevée, l’ivresse pathologique se manifeste par des crises clastiques, fureur, hallucination, et activité
délirante. L'amnésie est possible. Il y a un risque accru d’accident de la circulation, traumatisme, coup et
blessure, et auto agressivité.
- Si l’alcoolémie dépasse 3g/l, le coma peut s’installer.
• Sevrage alcoolique après plusieurs années de consommation : On note des tremblements, des convulsions ou un
delirium tremens (Etat confuso-onirique).
• Complications métaboliques de l’alcoolisme :
- Encéphalopathie de Gayet et Wernicke : Syndrome lié à la carence en thiamine (B1). Il se manifeste par une
paralysie oculaire avec nystagmus et ataxie, puis des fabulations, des troubles végétatifs, (Tachycardie,
hypotension artérielle, collapsus) et des signes de polynévrite. Le traitement se base sur la supplémentation en
vitamine B1.
- Syndrome de Korsakoff : Rare, s’installe suit à l’encéphalopathie de Gayet et Wernicke. Il se manifeste par une
amnésie rétrograde et antérograde, désorientation temporo-spatiale, fabulation et polynévrite. On le traite par
la supplémentation en B1 parfois on aura recours à la clonidine (Catapresson) ou au propranolol (Avlocardyl).
IV- Prévention et prise en charge :
1- Selon la loi :

Le code de la santé et le code civil obligent le soin du patient addicte, d’ailleurs le ministère de la santé a mis en place
une commission national de la lutte contre l’addiction et l’alcoolisme par un décret du 15 aout 1992 qui permet à différents
associations d’intervenir dans la prévention.

2- Prise en charge du sevrage :

La personne doit être motivée. Il faut favoriser le dialogue à l’école, à l’université, au sein de la famille, dans des lieux
de rencontre organisés par les associations et le ministère de la santé. Un dialogue qui va axer sur une certaine mise en
question et de créer un lien solide, de constituer une alliance thérapeutique qui aidera à supporter l’état de manque. Une
fois la décision de sevrage prise et que le patient adhère et est motivé, on à 4 situations :
- Une situation favorable ou une consommation ralentie, le sevrage se fait en ambulatoire.
- Si prise ancienne ou poly-toxicomanie, on hospitalise pour une cure de sevrage soit en médecine interne ou en
médecine général ou en psychiatrie.
- Pour les personnes qui consomment les drogues dures (Héroïne, cocaïne…) la cure de sevrage se fait en service
de psychiatrie.
- Si pas de motivation et s’il y a des actes agressifs, le patient sera dirigé vers un centre spécialisé pour toxicomanie.

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