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UE8 - Médecine

Addictologie : une médecine de la


société ?

I. Addiction
Le patient est un « chantier » caractérisé par un désordre ( social, financier, familial.. ) qui déborde de
l’individu, ce qui entraîne une détresse qui dure et avec des problèmes multiples et intenses.
On ne peut faire face seul aux problèmes nombreux et divers causés par les addictions.
Nous ne pouvons être compétents, efficaces et légitimes qu’avec un ensemble de profession (médecin
du travail, gastroentérologue pour le foie, neurologue, psychologue, AS…)

a. Addictologie

Ce n’est pas une science ni une technique mais une pratique. Ce n’est pas une filière de soin
uniquement mais un « patch work » de ressources avec un médecin coordinateur.

Conjonction de plusieurs facteurs : Addiction = produit + individu + environnement.

b. Définitions

Non usage : absence de consommation, important dans la recherche des consommations et co-
consommations.
Usage simple : consommation d’une substance ou réalisation d’un comportement sans caractère
pathologique.
Mésusage : toute conduite de consommation d’une ou de plusieurs substances avec des risques ou des
dommages :

⮚ Usage à risque : risques de complication qui ne sont pas encore présentes.

⮚ Usage nocif : mode de consommation préjudiciable pour la santé

⮚ Syndrome de dépendance : usage de la substance qui entraîne un désinvestissement


progressif vis-à-vis des autres activités.
c. Evolution
L’addiction n’est pas systématique, elle est la conjonction de plusieurs facteurs, c'est-à-dire
produit/individu/environnement. On ne devient pas addict dès la première consommation.
- Phase de toxicologie : expérimentation, consommation régulière (intoxication-consommation ->
sevrage)
- Phase d’addiction : préoccupation pour la substance au bout d’environ 1 an.

d. Tolérance

Elle augmente avec le temps. Attention à bien l’évaluer car elle protège de l’overdose, elle dépend
de la substance, elle traduit l’adaptation du cerveau.

e. L’expérimentation

Elle comporte des risques quand le sujet n’est pas tolérant ou qu’il est naïf. Ce n’est pas de
l’addiction, peut nécessiter l’intervention d’un addictologue pour la connaissance des substances. Cela
peut tout de même être très dangereux et n’exclu pas la mort.

II. Intoxication éthylique aiguë

Ivresses compliquées ou pathologiques :


- Excito-motrice : état de fureur paroxystique = violence physique +++
- Hallucinatoire : hallucinations visuelles et auditives (ne pas confondre avec un DT)
- Délirante : thèmes variés (jalousie, persécution, auto-accusation), risque de passage à l’acte
auto ou hétéro-agressif.
- Convulsivante : crise comitiale liée à la prise d’alcool par un sujet épileptique.

Prise en charge :
- Entretien et examen clinique : attitude calme et anamnèse, voir l’entourage si présent, et mise
au repos avec surveillance horaire du patient. Elimination de l’alcool 0,2g/h environ.
- Mise en condition : observation en assurant la sécurité comportementale du patient, évaluation
de la nécessité d’une sédation et d’une contention.
- Forme clinique particulière à repérer : Binge Drinking, prise d’au moins 4 verres (fille) et d’au
moins 5 verres (garçons) sur une durée très courte (<2h), touche en particulier les jeunes.

Surveillance à l’hosto:
- Toutes les heures si sédation : pouls, tension, FR, T°, saturation en O2, vigilance
- Biologique : glycémie, alcoolémie.
- Attention à la personne âgée : tableaux cliniques trompeurs lors des chutes, vérifier que c’st pas
dû à l’alcool.

III. Cannabis, THC, CBD


Cinétique de l’intoxication au cannabis : effets du THC

Surtout depuis que la puissance du cannabis est élevée : concentration en THC de plus en plus élevée
qui est responsable des effets psychoactifs.

Ivresse cannabique
Puissance du cannabis = THC/CBD

Le CBD
- Pas d’action sur les récepteurs CB1 et CB2
- Autres actions pharmacologiques : 5HT1 (humeur), opioïdes (douleur), acétylcholine, TPVR-1.
- Ne semble pas induire de dépendance ni d’abus ni d’intoxication, profil de sécurité satisfaisant.
- Sativa : THC>CBD, indica : CBD>THC

Cannabis de synthèse
- Fabriquée chimiquement en laboratoire avec de nombreux symptômes (tachy, irritabilité,
vomissement, confusion, nausée…)
- Dose de 70% ex : buddha blues

Durée de positivité : urines : longtemps (plusieurs jours) / salive : court (quelques heures)

IV. Cocaïne
a. Sevrage

« Ensemble des symptômes observés à l’arrêt de la consommation du produit ou du comportement


(addictions sans produits) »

Ces symptômes existent aussi dans les addictions comportementales.

b. Le craving

Sensation de besoin de consommer alors qu’on ne le veut pas. Modulateur ou déclencheur de la


rechute, et persiste très longtemps à la différence du sevrage et de la rechute. C’est ça qui signe la
chronicité de l’addiction.
Il est conscient : le patient peut le percevoir, il sait quand exactement il le ressent, il sait le critique. Il
faut donc donner au patient les moyens de l’exprimer.
Renvoie à la définition de l’addiction : impossibilité de contrôler un comportement (recherche de
plaisir ou évitement d’un malaise).

V. Addiction comportementale

-Addiction cybersexuelle
-Addiction cyberrelationnel
-Compulsion au web, scroling
...
Smartphone : addiction aux écrans
Hyperusage et trouble du sommeil ( lumière bleues )
Nomophobie : peur de ne pas avoir accès à son téléphone ( perte de batterie, recherche de connexion,
panique si perte du tel )
Phubbing : personne qui s’en fou et regarde son téléphone quand tu lui parle

Prise en charge:
- Eviter le multitasking ( pas trop d’écran en même temps )
- Faire des pauses
- Trop de connexions dans la famille
- Pas de detox digitale ( ça marche pas 🡪 effet d’un sevrage )
VI. Alcool
- L’alcool est un facteur de risque de cancers (dont le cancer du sein..). C’est toxique.
- La toxicité est majorée en cas de co-consommation et le risque est corrélé à l’ancienneté et l’intensité
des consommations.
- 41 080 décès évitables sont dus à l’alcool.
- Le risque de mortalité dû à la consommation d’alcool est exponentiel 🡪 une diminution de la
consommation de moitié va diviser par 4 le risque de mortalité, il est donc important de réduire les
consommations.
- Un verre d’alcool = 10 grammes d’alcool pur. Il est important de demander la quantité max
quotidienne.
- Il ne faut pas consommer plus de dix verres par semaine et deux verres par jour avec des jours sans
consommation.

Complications somatiques :
Digestif Neurologique Autres

Hépatiques : - syndrome cérébelleux (perte Cardiovasculaire :


equilibre)
- hépatite alcoolique aiguë - troubles du rythme
- épilepsie
- stéatose - cardiomyopathie
- neuropathie périphérique
- cirrhose - HTA
- démences alcooliques
- CHC Traumatiques :
- atrophie cortico-sous-
Pancréatiques : - hématomes
corticale
- pancréatite aiguë / chronique - hémorragie cérébro-
- atrophie cérébelleuses
Gastro-intestinaux : méningée
- encéphalopathies carentielles
- diarrhée Troubles métaboliques :
- gastrite - lipidiques (cholestérol,
triglycérides)
- cancer : œsophage, estomac
- glucidiques
(hypoglycémie, diabète)

Comorbidités psychiatriques :
Syndrome dépressif Trouble bipolaire Troubles anxieux Co-addictions

- très fréquent - cooccurrence + fréquente - association fréquente - tabac


chez l’homme - diverses formes
- aggravé par - médicaments
l’alcool - alcoolo-dépendance sévère d’anxiété concernées
(benzodiazépines)
- risque de - épisodes maniaques - apparition de symptômes
passage à l’acte fréquents anxieux ou sevrage - stupéfiants
suicidaire - primaire : conso d’alcool
- risque de passage à l’acte
auto-thérapeutique
suicidaire
- pronostic péjoratif

VII. Tabac
Le diagnostic est fait par le test de Fageström :
- durée de l’intoxication
- habitudes de consommation

Physiopathologie :
- facteur de risque cardiovasculaire
- athérosclérose (abime les artères)
- puissant facteur thrombogène et phlébitique (avec cofacteurs : sédentarité, pilule, surpoids)
- vasoconstriction périphérique
- augmentation de la fréquence cardiaque et la TA : facteurs de stress (effet sympathomimétique de la
nicotine 🡪 problème d’érection)
- facteur de risque de cancer

Complications somatiques :

Pulmonaires Cardiovasculaires Néoplasiques Autres

- bronchite - HTA / cardiopathie - VADS, ORL, - hypofertilité


chronique / digestives,
BPCO hypertensive urologiques, - grossesse :
- coronaropathie / malformations
- aggravation d’un gynécologique…
AOMI congénitales..
asthme préexistant
- complications - libido féminine
thrombo emboliques (cannabis)
- AVC

Comorbidités psychiatriques :
Tout troubles psychiatriques, troubles anxieux et de l’humeur (dépendance sévère), troubles de la
personnalité, troubles du sommeil, co-addictions (alcool ++)

Le tabagisme touche 2 à 4 fois plus fréquemment si la personne est atteinte d’un trouble mental et
précède généralement l’apparition du trouble. Un usage précoce augmente le risque de trouble
mental (phobie, anxiété, dépression, suicide, schizophrénie…)

VIII. L’entretien

1) Structure de l’entretien :

1. Adapter au contexte
2. Avoir en tête les éléments essentiels pour l’orientation : lieu de vie, droits sociaux, suivis en cours
3. Repère l’urgence éventuelle :

- souple et emphatique
- entretien ouvert, adapté à la présentation du patient
- éviter l’interrogatoire policier (ce n’est pas un diagnostic de maladie somatique)
- replacer le contexte (patient contraint) et la demande ( ou la non demande )
- garder à l’esprit qu’une orientation éventuelle est possible
- ne pas se focaliser sur le produit mais plutôt sur les comportements problématiques et leurs
conséquences sur le fonctionnement du patient
- respecter le stade motivationnel du patient
- accepter l’ambivalence
- prêter attention à l’expérience subjective du patient

2) Trame indicative :

Entretien de première fois à visée d’évaluation et d’orientation.


Pour aborder la problématique, cela est possible grâce a des auto-questionnaires :
- DETA : alcool
- ADOSPA : ado substances psychoactives
- CAST : cannabis
- AUDIT (et AUDIT-C)

Ce sont des auto-questionnaires de screening : ils sont rapides, sans intervention du médecin, mais
centrés sur une substance ou un comportement et parfois réalisés par le patient avant la consultation.
Cependant, ils ne permettent pas une évaluation globale et ne font pas le diagnostic d’addiction.

3) Étapes de l’entretien :
Objectif : poser un diagnostic, évaluer le retentissement, dépister les comorbidités, proposer une
orientation.
Exemples :
Chez la femme enceinte : La sévérité augmente avec la durée de la consommation. Plus on repère
l’addiction tôt, plus on limite. Il faut faire attention à l'environnement : interactions précoces, protection
maternelle infantile, allaitement, le père…
Chez les personnes âgés : La présentation peut être trompeuse. Leur addiction est principalement
retrouvée dans l’alcool et les benzodiazépines : 20% des patients âgés prennent un somnifère.

IX. Conclusion

Ne pas oublier : approche globale, centrée sur le patient et non sur la substance.

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