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LA METHODOLOGIE DES OPERATIONS DE FUSION

I. Introduction

Les opérations de restructuration, qu’il s’agisse des fusions, des scissions ou des
apports partiels d’actifs obéissent à la même règlementation et suivent la même
logique.

Le cadre général présenté ici pour les opérations de fusion-absorption sera


transposable à toutes les formes de restructuration.

La méthodologie devra simplement être adaptée en fonction des spécificités de


chaque opération.

II. Rappel du contexte juridique et financier des opérations de


fusion :

a) Définition :

Art L236-1 ; al.1 :


« La fusion est l’opération par laquelle deux sociétés se réunissent pour n’en
plus former qu’une seule. »

2 procédés applicables :

Fusion création :
Fusion absorption :
Création d’une société
Absorption d’une
nouvelle par plusieurs
société par une autre
sociétés existantes

-1-
b) Caractéristiques des opérations de fusion (et assimilées) :

▪ Transmission universelle du patrimoine :

Transmission de l’ensemble des éléments d’actif et de passif, droits et


obligations, composant le patrimoine de la société absorbée ou scindée au profit
des sociétés absorbante ou bénéficiaires qui le recueille en tout ou partie.

▪ Dissolution de la société absorbée ou scindée :

Dissolution obligatoire, conséquence de la transmission universelle du patrimoine,


sans qu’il n’y ait lieu de procéder aux formalités de liquidation.

▪ Echange de droits sociaux :

Les associés de la société absorbée ou scindée deviennent associés de la société


absorbante ou bénéficiaire et se voient attribuer des actions
(ou parts sociales) de celle-ci.

• Possibilité de versement d’une soulte en espèces à condition que celle-ci ne


dépasse pas 10% de la valeur nominale des droits sociaux attribués.

• L’échange de droits sociaux ne peut se faire qu’au profit des associés autres
que les sociétés participant à l’opération.

c) Calendrier des opérations de fusion :

• Phase préparatoire conduisant à la rédaction du projet de fusion


1

• Approbation du projet de fusion par les organes de direction des sociétés


2 concernées

• Publicités légales du projet de fusion


3

4 • Intervention du commissaire à la fusion

• Approbation du projet de fusion par les assemblées générales


5 extraordinaires des sociétés participant à l’opération

• Enregistrement et publicité de la fusion


6

-2-
d) Contenu obligatoire du projet de fusion

(1) Forme, dénomination et siège social de toutes les sociétés


participantes

(2) Motifs, buts et conditions de la fusion

(3) Désignation et évaluation de l’actif et du passif dont la transmission


est prévue (valorisation des apports)

(4) Modalités de remise des parts ou actions et date à partir de laquelle


ces parts ou actions donnent droit aux bénéfices, ainsi que toute
modalité particulière relative à ce droit, et la date à partir de laquelle
les opérations de la société absorbée seront, du point de vue
comptable, considérées comme accomplies par la société
bénéficiaire des apports (date d’effet comptable)

(5) Dates auxquelles ont été arrêtés les comptes utilisés pour établir les
conditions de l’opération

(6) Le rapport d’échange des droits sociaux et, le cas échéant, le


montant de la soulte

(7) Le montant de la prime de fusion

(8) Les droits accordés aux associés ayant des droits spéciaux et aux
porteurs de titres autres que des actions ainsi que, le cas échéant,
tous avantages particuliers

-3-
III. Démarche de résolution des opérations de fusion (et
assimilées) :

N° Opération à réaliser

1 Faire un schéma de l’opération

2 Evaluer les sociétés en présence pour déterminer la parité d’échange


des titres

3 Calculer le nombre de titres à échanger et le nombre de titres à


émettre

4 Déterminer le mode de valorisation des apports

5 Déterminer les modalités de réalisation de l’augmentation de


capital :
 Montant de l’augmentation de capital (et de la soulte
éventuelle)
 Montant de la prime de fusion

6 Etablir un tableau de synthèse d’analyse de l’opération

7 Analyser le boni ou le mali de fusion (le cas échéant)

8 Comptabiliser l’opération

APPLICATION :
➢ Les sociétés REMI et ISA ont décidé de fusionner, la société ISA devant
absorber la société REMI :

REMI ISA
absorbée absorbante
• Nombre de titres composant le capital 15 000 3 000
social
• Valeur nominale 250 600
• Valeur nette comptable 4 200 000 2 250 000
• Valeur réelle attribuée aux sociétés 5 775 000 3 465 000

-4-
a) Etape 1 – Schématiser l’opération :

Il faut toujours faire un schéma pour identifier le type de fusion (ou de scission ou
APA) et adopter la méthodologie appropriée.

▪ Fusion absorption :

 1 société absorbante et 1 société absorbée


 La société absorbée transmet son patrimoine à l’absorbante et disparaît
 La société absorbante augmente son capital pour rémunérer l’apport et émet
des titres qui seront remis aux associés de l’absorbée en échange des titres
qu’ils détenaient avant l’opération

▪ Fusion réunion :

 Les 2 sociétés sont absorbées par une société nouvelle créée à cet effet
 Les 2 sociétés absorbées disparaissent
 La société nouvelle émet des titres qui seront remis aux associés de chacune
des sociétés absorbées en échange des titres qu’ils détenaient avant
l’opération

▪ Fusion renonciation :

 Applicable lorsque la société absorbante détient des titres de la société


absorbée
 La société absorbante procède à une augmentation de capital pour échanger
les titres détenus par les autres associés de l’absorbée
 La société annule les titres qu’elle détient en contrepartie de la quote-part
reçue dans l’apport et constate un boni ou mali de fusion

▪ Fusion réduction :

 Applicable lorsque la société absorbée détient des titres de la société


absorbante
 La fusion est réalisée dans un premier temps comme une fusion simple
 La société absorbante procède ensuite à une réduction de capital pour annuler
ses propres titres reçus dans l’apport (+ réduction de la prime de fusion)

▪ Fusion renonciation-réduction :

 Applicable en cas de participations réciproques : combinaison des deux


procédés

-5-
▪ Fusion simplifiée :

 Lorsque la société absorbante détient 100% de la société absorbée si


l’opération a été placée sous le régime juridique des fusions

▪ TUP :

 Lorsque la société absorbante détient 100% de la société absorbée mais que


l’opération n’a été placée sous le régime juridique des fusions : application de
l’article 1844 du code civil

▪ Scission / APA

APPLICATION

ISA absorbe REMI : il s’agit d’une fusion-absorption simple (pas de lien de


participation entre les sociétés REMI et ISA)

Schéma Incidences de l’opération

REMI - Transmission de patrimoine


(absorbée)  valeur d’apport à déterminer
- Echange des 15 000 titres contre des titres ISA
15 000 titres à 250 €  Parité à déterminer

ISA
- Augmentation de capital => émission de titres à
(absorbante) remettre aux associés de REMI
- Prime de fusion
3 000 titres à 600 €

b) Etape 2 – Evaluer les sociétés en présence pour pouvoir


déterminer les parités d’échange :

La parité (ou rapport d’échange) des titres de l’absorbante (ou scindée) contre des
titres de l’absorbante (ou bénéficiaire) est fixée dans le projet de fusion.

La parité doit être équitable et représenter le « poids respectif » de chacune des


sociétés par comparaison de la valeur unitaire des titres échangés

-6-
▪ Comment évaluer les sociétés en fusion ?

De nombreuses méthodes d’évaluation « usuelles » peuvent être utilisées dans le


cadre des opérations de restructuration :
- Méthodes patrimoniales (ANC – ANCC)
- Méthodes fondées sur la rentabilité (actualisation ou capitalisation des
résultats, des dividendes ou des flux de trésorerie)
- Méthodes mixtes (ou dualistes)
 Selon l’approche la plus appropriée au secteur d’activité des sociétés
participant à l’opération.

Ce qui importe pour l’évaluation des parités, c’est moins l’évaluation de l’actif des
sociétés participantes au sens strict, que la comparaison de leur « poids respectif ».
Cette comparaison implique, dans le cadre des opérations de restructuration :
- L’utilisation de comptes arrêtés aux mêmes dates
- L’emploi de méthodes d’évaluation multicritères
- L’homogénéité des méthodes retenues et des critères retenus.

La parité d’échange retenue doit respecter l’équité pour l’ensemble des associés des
sociétés participant à l’opération
(caractère équitable du rapport d’échange)

▪ Comment déterminer la parité ?

La parité établit le rapport entre la valeur unitaire des titres de la société absorbée et
la valeur unitaire des titres de la société absorbante :

Parité = Valeur unitaire de l’absorbée


Valeur unitaire de l’absorbante

➢ La parité doit être réduite au maximum mais sans utiliser de chiffre à virgule

➢ La parité obtenue peut être « arrondie » en complétant l’échange de titres par


le versement d’une soulte (la soulte ne doit pas dépasser 10% de la valeur
nominale des titres créés)

Exemple : si les titres de la société absorbée ont été évalués à 200 € et ceux de la
société absorbante à 500 €

Parité = valeur absorbée = 200 = 2


valeur absorbante 500 5

-7-
La parité d’échange est de 2 titres de l’absorbante contre 5 titres de l’absorbée

 Cela signifie que les actionnaires de l’absorbée recevront 2 actions de


l’absorbante en échange de 5 actions détenues avant la fusion.

Vérification :
- 2 titres de l’absorbante valent : 2 x 500 = 1.000
- 5 titres de l’absorbée valent : 5 x 200 = 1.000
=> l’équité du rapport d’échange est donc bien respectée

APPLICATION

➢ La valeur réelle attribuée aux sociétés est indiquée dans l’énoncé :


- REMI = 5 775 000
- ISA = 3 465 000

➢ Il faut en déduire la valeur unitaire des titres de chaque société :


- REMI = 5 775 000 / 15 000 = 385
- ISA = 3 465 000 / 3 000 = 1 155

➢ Détermination de la parité (rapport d’échange) :


REMI / ISA = 385 / 1 155 = 1/3
 le titre ISA vaut 3 fois plus que le titre REMI
 Echange de 1 titre ISA contre 3 titres REMI

➢ Vérification :
- 3 titres REMI = 3 x 385 = 1 155
- 1 titre ISA = 1 155
 l’équité du rapport d’échange est donc bien respectée

-8-
c) Etape 3 – Calculer le nombre de titres à échanger et le
nombre de titres à émettre par l’absorbante:

▪ Nombre de titres à échanger :

La méthodologie applicable varie en fonction du type de fusion :

• Fusion simple Nombre total de titres composant le capital de l’absorbée


• Fusion renonciation Nombre total de titres de l’absorbée
-
Nombre de titres de l’absorbée détenus par l’absorbante
• Fusion réduction augmentation de capital : échange du total des titres composant
le capital de l’absorbée
puis :
réduction de capital pour annuler les titres de l’absorbante
compris dans l’apport

• Fusion renonciation Augmentation de capital :


réduction Nombre total de titres de l’absorbée
-
Nombre de titres de l’absorbée détenus par l’absorbante
puis :
Réduction de capital pour annuler les titres de l’absorbante
compris dans l’apport

APPLICATION

 Cf informations indiquées sur le schéma de l’opération

Il s’agit d’une fusion-absorption simple :

 Il n’y a aucun lien de participation entre les sociétés REMI et ISA

 Tous les titres REMI sont à échanger contre des titres ISA : 15 000 titres REMI
à échanger contre des titres émis par ISA

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▪ Nombre de titres à émettre par l’absorbante :

De la parité résulte le nombre des actions nouvelles émises par la société bénéficiaire
des apports :

NOMBRE DE TITRES A REMUNERER (étape 3)

RAPPORT D’ECHANGE (étape 2)


=

NOMBRE DE TITRES DE L’ABSORBANTE A CREER

(*) hors titres détenus par la société absorbante (fusion-renonciation)

APPLICATION

 Parité d’échange de 3 titres REMI contre 1 titre ISA

 Nombre de titres à émettre par l’absorbante ISA : 15 000 / 3 = 5 000

d) Etape 4 – Déterminer le mode de valorisation des apports :

Les règles de détermination de la valeur des actifs et passifs apportés par la société
absorbée ou scindée sont fixées par le règlement CRC 2004-01 et mentionnées à
l’article 743-1 du PCG :

Type de contrôle Valeur comptable Valeur réelle


Sociétés sous contrôle commun (1) OUI NON (5)
Sociétés sous contrôle distinct (2)
• Opération à l’endroit (3) NON OUI
• Opération à l’envers (4) OUI NON (5)

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(1) Une des sociétés participant à l’opération contrôle préalablement l’autre, ou bien
les deux sociétés sont préalablement sous le contrôle d’une même société mère.
(2) Aucune des sociétés participant à l’opération ne contrôle préalablement l’autre
ou ces sociétés ne sont pas préalablement sous le contrôle d’une même société
mère.
(3) L’actionnaire principal de l’absorbante conserve son pouvoir de contrôle sur
l’absorbante. La société absorbée (la cible) passe sous le contrôle de la société
absorbante (l’initiatrice).
(4) L’actionnaire principal de l’absorbée prend le contrôle de l’absorbante. La
société absorbante (la cible) passe sous le contrôle de la société absorbée
(l’initiatrice).
(5) Possibilité de dérogation : les valeurs réelles peuvent être retenues :
-En cas de filialisation d’une branche d’activité en vue de la céder à une société sous
contrôle distinct (PCG art 741-1)
-En cas d’actif net comptable apporté insuffisant pour permettre la libération du capital
(PCG art 743-1)

Précisions sur le contrôle commun :


La notion de contrôle est déterminée de la même façon que pour les comptes
consolidés lorsque la société :

• détient directement ou indirectement la


majorité des droits de vote (>50%).

• exerce un contrôle dominant du fait d’une


convention ou de clauses statutaires.

• a désigné pendant deux exercices la majorité


des membres des organes de direction, où elle
détient directement ou indirectement plus de 40%
du capital et aucun autre actionnaire ne détient
une fraction du capital supérieure à 40%.

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ATTENTION !

Ne pas confondre le mode de valorisation des apports


(valeurs comptables ou valeurs réelles en fonction du contexte de l’opération)

et le mode d’évaluation des valeurs retenues pour la détermination des parités


(toujours fondé sur les valeurs réelles des sociétés participantes).

APPLICATION

➢ Le capital de la société ISA sera constitué, après l’opération de 8 000 titres :


3 000 + 5 000 émis à l’attention des anciens associés de REMI

 Ce sont donc les associés de REMI qui prennent le contrôle après l’opération
de fusion
 La fusion absorption de la société REMI par la société ISA constitue donc une
opération à l’envers

 S’agissant d’une opération « à l’envers » entre société sous contrôle


distinct, les apports doivent être évalués à la valeur comptable, soit
4 200 000.

➢ Remarque : Si REMI avait absorbé ISA, l’opération aurait été « à l’endroit »

e) Etape 5 – Déterminer le montant de l’augmentation de


capital et de la prime de fusion :

▪ Calcul de l’augmentation de capital :

Les titres sont émis à la valeur nominale de la société absorbante :


- Fusion absorption : valeur nominale déjà existante
- Fusion création : valeur nominale déterminée dans les conditions de réalisation
de la fusion

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NOMBRE DE TITRES A CREER
X
VALEUR NOMINALE DE L’ABSORBANTE
=
AUGMENTATION DE CAPITAL

APPLICATION

Augmentation de capital
=
5 000 titres à créer par ISA
X
Valeur nominale ISA de 600
=
3 000 000

▪ Calcul de la prime de fusion :

PRIME DE FUSION
=
VALEUR GLOBALE DES APPORTS STIPULEE DANS LE PROJET DE FUSION
-
VALEUR NOMINALE DE L’AUGMENTATION DE CAPITAL REALISEE PAR LA
SOCIETE ABSORBANTE (+SOULTE éventuelle)

APPLICATION

Prime de fusion
=
4 200 000
-
3 000 000
=
1 200 000

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f) Etape 6 - Etablir un tableau de synthèse d’analyse de
l’opération

Cette étape est moins importante dans le cadre d’une fusion simple mais trouvera
tout son intérêt pour les fusions renonciation et les fusions réduction, opérations
pour lesquelles il sera indispensable de décomposer la valeur d’apport.

Tableau de synthèse dans le cadre d’une fusion simple :

Valeur d’apport de la société Augmentation de capital à la valeur


absorbée nominale (+ soulte éventuelle)
Prime de fusion (par différence)

APPLICATION

Valeur d’apport de la société Augmentation de capital à la valeur


absorbée : 4 200 000 nominale : 3 000 000
Prime de fusion : 1 200 000

(Les étapes 7 et 8 seront développées au cours des séances consacrées à ces aspects)

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