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GEOCHIMIE GENERALE
Notes de Cours à l’usage des Etudiants de :
Edition 2012/2013
Cours de Géochimie Générale
La géochimie est une discipline des sciences de la Terre qui étudie : (1) la composition
chimique et isotopique des matériaux géologiques (les roches, les minéraux, les eaux et les
gaz), (2) les caractères et le comportement dans l’écorce terrestre des différents éléments,
c.à.d. leur distribution quantitative, leurs combinaisons, leurs migrations (dispersion,
concentration) et (3) qui tente d’expliquer ces processus pour les rendre utilisables.
Dans ses ramifications théoriques et appliquées, la géochimie couvre aussi bien des
processus endogènes qu'exogènes, sur du matériel organique ou inorganique. Ainsi,
l'application des méthodes de la géochimie à l'étude des êtres vivants a donné naissance à
la biogéochimie.
D'un point de vue applicatif, les buts de la géochimie sont, entre autres :
la détermination de la composition des différentes enveloppes terrestres et de leur
évolution, des hautes couches de l'atmosphère à la graine ;
la quantification des transferts de matière et d'énergie au sein de la Terre ; la
quantification des interactions entre ses différentes enveloppes ;
la détermination de l'âge des roches et des événements ayant affecté la Terre, par le
biais de la géochronologie ;
l'étude des conditions environnementales passées (paléoenvironnements).
Les deux plus grands domaines en restent toutefois l'étude des roches (de profondeur ou de
surface) sur Terre ou dans les autres systèmes planétaires et la géochronologie.
I.2.Historique
Le mot géochimie a été introduit en 1838 par C.F.Schönbein, un chimiste suisse qui
découvrit l’ozone. Déjà les premiers chimistes, comme Lavoisier, tentèrent de comprendre
l’histoire des éléments. Mais ce sont surtout des minéralogistes qui furent à la source de plus
grands progrès.
L’américain Clarke publia, en 1908, les premières études sur la composition de l’écorce
terrestre. Le Russe V.I. Vernadski proposa en 1917 une classification géochimique des
éléments qui ne fut pas retenue car, fondée sur divers critères, et donc difficilement
utilisable. La classification moderne est celle de V.M. Goldschmidt (1888-1947) qui, en
relation avec le système périodique, s’appuie sur les affinités que présentent les éléments
pour les différents matériaux qui constituent l’écorce terrestre.
La recherche des minerais fut un des moteurs de la géochimie. Elle s’applique notamment à
de disciplines telles que la pédologie ou la prospection (pétrole, éléments radioactifs, etc.).
d’analyses consiste à analyser une très petite quantité de matière vaporisée par le faisceau,
ce qui nécessite des appareils d’une très grande sensibilité.
1.4. Plan du cours
I. Introduction : Définition, objectif, historique et outils de la géochimie.
II. La Terre dans le Système Solaire.
III. Classifications géochimiques des éléments.
IV. Composition de la Terre.
V. Géochimique des éléments en traces en processus magmatiques.
VI. Notions de Géochimie isotopique.
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
A. Phase de condensation
Le système solaire s’est formé à partir d’un nuage originel de gaz et de poussières
(nébuleuse gazeuse), large de 50 milliards de km, dont la composition était identique à celle
du soleil. Cette nébuleuse protosolaire a dû subir une concentration gravitaire qui provoqua
une différence thermique entre bordures froides et centre chaud ; ce centre devient le soleil
contenant presque la totalité des poussières et gaz (99,8%).
B. Phase d’accrétion.
Les mouvements mis en œuvre dans la nébuleuse ont favorisé la rencontre et l’agrégation
des condensats, produisant ainsi des noyaux de plus en plus massifs. Au début, l’agrégation
fut principalement causée par des forces magnétiques et électrostatiques. A mesure que leur
masse s’accroissait, les noyaux étaient devenus des attracteurs gravitationnels importants
c.à.d. des météorites puis des planétoïdes, attirant vers eux de plus en plus de matière.
Après quelques dizaines de Ma, un certain nombre de gros noyaux ou protoplanètes,
réchauffés par leur gravité s’étaient formés et avaient achevé d’attirer le reste de
poussières, roches et autres débris qui trainaient dans le disque nébulaire. C’est le
processus de la formation planétaire par accrétion. Cette phase a naturellement été
ponctuée de nombreuses collisions cataclysmiques et d’une forte activité météoritique dont
certains corps célestes, comme la lune ou le mercure, conservent encore la trace. Cette
phase dura quelques dix millions d’années !
apparu très tôt une hétérogénéité d’origine dans la nébuleuse qui se traduit par la présence
de deux cortèges de planètes : (1) les planètes joviennes et (2) les planètes telluriques.
La terre est l’une des planètes du système solaire qui constitue avec Vénus, Mars et
Mercure des planètes intérieures ou telluriques. Il s’agit des planètes rocheuses structurées
en couches de nature et d’épaisseur différentes. Elles présentent une surface solide et une
densité moyenne allant de 3,3 à 5,5. Par contre, les planètes externes dites joviennes
(Jupiter, Saturne, Uranus et Neptune) sont des planètes géantes, gazeuses, de faible
densité (0,7 à 1,5) et entourées d’anneaux et de nombreux satellites. Pluton, très éloigné du
soleil, constitue un gros planétoïde.
Les astéroïdes et les planètes, portés à température élevée par les collisions fondent en se
différenciant. Un rôle important est donc désormais accordé aux collisions. Ainsi de violents
bombardements par de blocs et de planétésimaux se sont poursuivis pendant un milliard
d’années, entre 4450 et 4350 Ma.
La terre primitive s’est ainsi formée par accrétion de poussières, blocs et planétésimaux dont
les collisions et la désintégration des éléments radioactifs (U, Th) libéraient de l’énergie. En
conséquence, la température s’est fortement élevée (2000°C) et un important volcanisme a
permis le dégazage d’une partie du manteau supérieur. En surface on trouvait alors, sur
environ 500 km d’épaisseur, des péridotites fondues ; en profondeur, avec l’intervention de la
pression, la péridotite reste à l’état solide alors que le fer reste liquide et percole.
La structure de la Terre est donc passée par un stade prégéologique où l’on trouvait, de la
périphérie vers le centre :
- 500 km de péridotite liquide ;
- 2000 km de péridotite solide dans laquelle transitait et percolait du fer liquide ;
- Un noyau de fer liquide qui grossissait avec les apports venant de la surface.
On estime que la formation du noyau interne liquide a dû être terminée en moins de 60 Ma.
Le refroidissement de ce noyau est très lent et sa cristallisation donne la graine ou noyau
interne. Cette cristallisation libère de l’énergie qui est à l’origine du champ magnétique
terrestre : celui-ci est engendré par le flux turbulent de la partie liquide du noyau externe.
A. Abondance cosmique
La composition du système solaire nous est donnée par l’analyse spectroscopique de la
lumière émise par le soleil. Comme celui-ci constitue 99,8% de masse du système solaire,
on pense que sa composition est représentative de l’ensemble du système, d’où l’expression
de l’abondance cosmique pour désigner sa composition. En effet, la matière des couches
supérieures du Soleil est en général considérée comme une référence. Cette matière
superficielle n'est pas transformée par les réactions nucléaires qui n'ont lieu que dans le
noyau, on peut donc considérer que sa composition n'a guère varié pendant l'histoire du
Soleil, et qu'elle est assez semblable à celle de la nébuleuse qui a formé le Système Solaire
il y a plus de 4 milliards d'années.
Hydrogène H 1 94 % 73 %
Hélium He 2 5,9 % 25 %
Néon Ne 10 - 0,1 %
Azote N 7 - 0,1 %
Silicium Si 14 - 0,07 %
Magnésium Mg 12 - 0,05 %
Soufre S 16 - 0,04 %
B. Nucléosynthèse
L’abondance des éléments dans l’Univers résulte d’un ensemble de processus physiques et
d’une série des réactions thermonucléaires nommé « Nucléosynthèse » et qui conduit à la
synthèse des noyaux atomiques. On distingue :
Comme le passage par fusion à l’élément suivant encore plus lourd requiert chaque fois plus
d’énergie pour vaincre la répulsion des noyaux de plus en plus lourds, l’abondance des
éléments diminue quand croît leur numéro atomique. Une exception concerne cependant le
fer dont le pic s’explique par une particulière stabilité de son noyau : en effet, comme
l’augmentation de la To n’est plus capable, à ce niveau, de créer de nouveaux éléments, tout
arrangement plus lourd est instable et transmute en éléments de la famille de fer, d’où son
abondance exceptionnelle.
l’addition ou l’absorption des neutrons par des noyaux.
On distingue :
(1) le processus d’addition lente ou processus « s » (de slow ou lent) qui intervient
concurremment à la production du fer dans le cœur de l’étoile au cours de la
phase « géante rouge ». Il rend compte de la production des éléments jusqu’au
Bi (dernier isotope stable).
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(2) le processus « r » (de rapide) permet l’apparition des éléments radioactifs lourds
tels que Th, U, 244Po.
les réactions de spallation surviennent lorsque la matière est bombardée par les
atomes de 12C et 16O issus de l’explosion d’une supernova. C’est un cas particulier de
nucléosynthèse qui concerne et explique surtout l’abondance de Li, Be, B.
Les différences de composition globale des planètes peuvent être expliquées grâce à cette
théorie. En effet, suivant leur contexte de refroidissement, les corps planétaires sont peu ou
pas différenciés par rapport à la nébuleuse initiale, ou au contraire s’en écartent
sensiblement.
Les planètes telluriques, les plus proches du soleil, sont globalement appauvries en
éléments et composés volatils, mais enrichis en éléments réfractaires et ce, à de degrés
variables. Au contraire, les planètes géantes joviennes correspondent aux lieux de l’espace
où les volatils (H, He, eau,…), chassés des zones plus internes, se sont rassemblés. Leur
composition est proche de la nébuleuse initiale.
Dans la classification périodique, les colonnes, Ia, IIa correspondent au remplissage des
orbitales s, les colonnes III et VI correspondent au remplissage de p; les colonnes
intermédiaires (éléments de transition) diffèrent les uns des autres par le remplissage de d. Il
faut noter que lors de leur remplissage, les orbites d se trouvent normalement à l’intérieur
par rapport à l’orbitale s d’ordre supérieur.
d) Les éléments atmophiles : Ce sont des éléments qui ont de l’affinité avec l’atmosphère.
Ce sont : O, N, H, gaz rares.
e) Les éléments hydrophiles : sont ceux qui ont une forte affinité pour les fluides hydratés.
Ce sont Li, Be, Cl, Nb, Mo, Sn, Au. Ils sont liés aux minéraux les plus fréquents tels les
aluminosilicates de Fe, Ca, Na, K et les oxydes de Mg et Fe.
Certains éléments bien que pondéralement moins bien représentés tels C, F, P, S et Cl ont
une importance considérable, car ils participent aux cycles organiques et aux minéraux qui
en proviennent plus ou moins directement tels que les carbonates, les sulfates, les chlorures
et les phosphates par exemple.
Ces affinités ne doivent cependant pas être prises à la lettre. En effet, les éléments tels que
le thallium, classé comme chalcophile, est communément en substitution de K dans les
feldspaths ; de même, l’oxygène classé comme lithophile est également atmophile.
Par ailleurs, la position des éléments dans le tableau périodique n’est pas quelconque. Les
lithophiles se distribuent entre les deux extrémités du tableau, les sidérophiles sont dans les
éléments de transition, les chalcophiles au centre droit, les gaz rares dans la dernière
colonne.
LILE et HFSE constituent les éléments hygromagmatophiles, concept crée par Treuil
(1973) et qui généralise celui d’éléments incompatibles.
III.5. Classification basée sur la solubilité des éléments dans des fluides.
En milieu hydrolytique (altération des roches, diagenèse), les éléments peuvent être classés
en fonction de leur rayon hydraté et donc en fonction de leur potentiel ionique (z/r). On
distingue donc :
Des ions à z/r<1 :¿ 1: leur taille est trop grande par rapport à leur charge, ils
présentent ainsi peu d’attirance pour la molécule d’H20, ils ne sont pas hydratés lors
de la mise en solution. C’est le cas de K, Rb, Cs.
Ils sont insolubles. Ces ions réagissent avec les molécules d’eau pour former les hydroxydes
peu stables en solution. Ce sont des hydrolysats ; c’est le cas de Al3+, Fe3+ et Si4+ qui
donnent respectivement des hydroxydes Al (OH)3, Fe (OH)3 ou Si(OH)4.
Les cations du 1e groupe et les oxyanions solubles sont évacués (lessivés) par les
circulations d’eaux, ils constituent la phase migratrice, ils se recombinent plus tard pour
donner les principales roches sédimentaires (calcaire : Ca et CO3, gypse : Ca et SO4,
phosphate : Ca et PO4). Les hydrolysats insolubles restent sur place et forment la phase
résiduelle.
Dans les fluides crustaux, la solubilité des éléments peut jouer un rôle majeur dans la
composition des roches à travers lesquelles ces fluides percolent, ainsi que dans la
composition des dépôts minéraux ou métalliques qui peuvent en résulter. Ici la solubilité est
fonction des paramètres physico-chimiques tels que T, P, pH,…
Exercice : prédire le comportement de Li+ (rayon ionique : 0.78Ǻ) et Cs+ (rayon ionique :
1.67Ǻ) dans l’eau de mer.
Solution :
- Pour Li+, le potentiel ionique z/r = 1/0,78 = 1,28 ;
- Pour Cs+, le potentiel ionique z/r = 1/1,67 = 0,60
On voit donc que Li développe un champ électrostatique assez fort, il est donc capable de
s’hydrater facilement et demeurer en solution contrairement au Cs qui, de part son potentiel
ionique, montre qu’il ne peut pas suffisamment s’hydrater et demeurer en solution ; il
s’adsorbe sur les matières colloïdales et précipite au fond de la mer.
Toutefois, la Terre étant une planète active et vivante, son activité (tremblements de terre,
volcanisme, formation de chaîne de montagnes) s’intègre dans un schéma dynamique. La
dynamique de la terre résulte des comportements rhéologiques différents de ses différents
ensembles : La partie superficielle de la terre qui comprend la croûte et une partie du
manteau supérieur constitue la lithosphère. Celle-ci a un comportement solide cassant.
Lithosphère et asthénosphère sont séparées par une zone où les vitesses des ondes
sismiques sont ralenties, appelée Lower velocity zone (LVZ). L’asthénosphère est animée
en son sein de courants de convection qui permettent à la plaque lithosphérique de glisser et
de se déplacer sur elle.
Cette constitution interne de la Terre a été établie par différentes méthodes, à savoir :
1) observation directe de la composition de sa surface (les structures superficielles
visibles). Ces observations se limitent à la connaissance très restreinte de notre globe au
regard de ses 6370 km de rayon.
2) sondages (quelques Km de profondeur : 5 à 10Km),
3) méthodes géophysiques (sismique – gravité – magnétisme – flux chaleur) qui
permettent, par des mesures physiques, d’interpréter indirectement la structure profonde
du globe.
4) études de météorites – astéroïdes- qui, comme la terre, appartiennent au système
solaire, et par conséquent sont susceptibles de nous renseigner sur la composition
profonde de notre globe.
A. Définition
Par « éléments majeurs et mineurs », on désigne normalement les éléments qui constituent
et déterminent les structures des minéraux d’une roche, c.à.d. les éléments à concentration
supérieure à 1%, et qui règlent les types des phases solides. Toutefois, quelques centièmes
de % de Zr ou de P permettent la cristallisation de zircon ou d’apatite. Par contre, certains
minéraux renferment plus de 1% de Li, Rb ou Cs sans pour autant que ces éléments soient
considérés comme des majeurs.
Les éléments majeurs sont ceux qui prédominent dans l’analyse de toute roche. Il s’agit de :
Si, Ti, Al, Fe, Mn, Mg, Ca, Na, K et P. Leur concentration est exprimée en :
% du poids d’oxydes,
% du poids d’éléments ou
% du poids de l’atome.
Les fractions massiques d’oxydes sont de loin les plus répandues dans toute la littérature par
tradition. Cette façon d’exprimer la teneur de l’élément répond au souci de l’électroneutralité
des matériaux de la croûte, l’oxygène étant l’anion le plus abondant dans ce contexte.
B. Substitution géochimique
Les règles de substitution énoncées par V. Goldschmidt ont pour critères principaux valence
et rayon ioniques :
Lorsque deux ions dont la taille ne diffère pas de plus de 15% sont en compétition pour
s’introduire dans un minéral en train de cristalliser, c’est le plus petit ou celui possédant la
plus forte valence qui l’emporte ou encore celui qui est le plus électropositif qui a l’avantage.
Quant aux éléments en trace, trois règles empiriques ont été définies :
- Règle de camouflage : les ions (majeur et trace qui remplace) ont même rayon
ionique, même charge et même électronégativité ; c’est le cas de Hf qui se substitue
au Zr dans le zircon.
- Règle de capture : l’élément en trace a un plus fort potentiel ionique (rapport
charge/rayon ionique) que le majeur qu’il remplace. Exemple : Ba+, Sr2+ se substituent
au K+ dans les feldspaths.
- Règle de l’admission : l’élément en trace a, au contraire, un faible potentiel ionique
que le majeur qu’il remplace ; cas de Rb+ et K+ dans les feldspaths et les micas.
A. Les météorites.
Ce sont des roches extra – terrestres qui tombent sur la terre quand leur trajectoire elliptique
recoupe celle de la terre. Leur dimension varie du µ à 700 km. En traversant l’atmosphère,
elles s’échauffent jusqu’à se volatiliser en surface. La partie interne peut être préservée et
recueillie pour examen. Il existe une grande variété de météorites, parmi lesquelles on
distingue trois groupes :
Les météorites métalliques ou sidérites (4,5% des météorites),
Les météorites métallo – pierreuse ou lithosidérites, elles sont rares (1,2%),
les chondrites carbonées (4,7% des météorites) formées d’un matériau ayant subi un
réchauffement tellement léger que plus de 20% d’eau, de carbone et d’autres éléments et
composés volatiles y sont encore présents. Ce sont les seules météorites qui contiennent
des argiles dans leur fine matrice ainsi que de magnétite, graphite mal cristallisé,
polymères organiques et troïlite FeS, avec accessoirement de l’olivine et de pyroxène,
du verre et des inclusions métalliques. Leur densité est faible (2,2).
Les chondrites ordinaires (80,6%) sont constituées par de la péridotite ferreuse (à
olivine, pyroxène et un alliage Fe-Ni) de composition très différente des péridotites qui
constituent l’actuel manteau terrestre.
Il convient de noter que toutes les chondrites ont un âge de cristallisation de 4,55 Ga qui
correspond pratiquement à l’âge radiométrique de la Terre. La composition chimique des
chondrites est la même que celle de la Terre si l’on mélange toutes ses enveloppes (croûtes,
manteau, noyau). On peut donc conclure que tout le système solaire a le même âge de 4550
Ma, et que Soleil, Terre et chondrites ont la même origine : un gaz de composition solaire.
La Terre serait donc une gigantesque chondrite qui aurait fondu et qui se serait
complètement différentiée.
B. La croûte
La croûte est constituée par les types lithologiques essentiels suivants :
Le granite, le granodiorite, la diorite et leurs équivalents métamorphiques (gneiss)
constituant 45% de la croûte et l’essentiel des continents ;
Le basalte, le gabbro et leurs équivalents métamorphiques (amphibolites, éclogites)
constituant 43% de la croûte, et forment le plancher océanique ;
Les roches sédimentaires et leurs équivalents métamorphiques (schistes, marbres,
etc.) constituant le reste, soit 12%, et se répartissant aussi bien dans les océans que
sur les continents.
La croûte est mieux connue, et les estimations de sa composition sont nombreuses. Les
premières estimations sont l’œuvre de Clarke et Washington (1924). Leurs analyses,
regroupées par aires géographiques, ne concernaient que les continents émergés de sorte
que la composition obtenue ressemble à celle de la croûte continentale. Elle ne correspond
à aucune roche magmatique spécifique, mais se situe entre la composition de granite et
celle de basalte.
SiO2 Al2O3 Fe2O3 FeO MgO CaO Na2O K2 O TiO2 P2 O5 Total
60.18 15.61 3.14 3.88 3.56 5.17 3.91 3.19 1.06 0.30 100.00
C. Manteau
Le manteau est constitué des roches magmatiques de type péridotite. En effet, les roches
basaltiques issues des magmas ayant pris naissance dans le manteau contiennent souvent
des enclaves mantelliques sous forme de nodules de péridotites. Ces roches sont riches
en olivine et contiennent également des pyroxènes (monocliniques et calciques,
orthorhombiques et non calciques) et des minéraux alumineux en quantité mineure
(plagioclase, spinelle ou grenat). Le manteau est donc péridotitique, et est la source de
magmas basaltiques. Selon Ringwood, il existe :
- Un manteau primitif, défini par sa capacité de donner, par fusion partielle, un magma
basaltique et un résidu enrichi en olivine appelé dunite. Ce manteau primitif a été nommé
« pyrolite » (roche à pyroxène et olivine).
- Un manteau résiduel qui est le résidu réfractaire de la FP.
Les compositions chimiques du manteau primitif et du manteau résiduel proviennent des
moyennes des échantillons terrestres, en l’occurrence les roches du massif du Lizard
(Cornouaille) pour le manteau primitif et les nodules de dunite pour le manteau résiduel.
SiO2 TiO2 Al2O3 Cr2O3 FeO MnO MgO NiO CaO Na2O K2O Total
(1) 44,77 0,19 4,16 0,40 8,21 0,11 39,22 0,24 2,42 0,22 0,05 99,99
(2) 41,10 0,08 0,56 0,35 10,55 0,15 46,33 0,44 2,60 2,60 0,03 99,99
(1) : composition chimique du manteau primitif ; (2) : composition chimique du manteau résiduel.
Le manteau primitif (1) se distingue particulièrement du manteau résiduel (2) par de fortes
teneurs en Al2O3 et par ses faibles teneurs en Na2O.
D. Le Noyau
Aucun échantillon du noyau terrestre n’a pu être observé ; cependant, les fortes densités
calculées (10 à 13) par rapport à celles de la croûte (2.7 à 2.9) et du manteau (3.3) et la
présence du champ magnétique terrestre laissent supposer qu’il est constitué
essentiellement d’un alliage de fer et de nickel, avec peu d’éléments légers. Soit 82% Fe, 5%
Ni, 7% Si, 2% S et 4% O, 8000 ppm Cr, 5800 ppm Mn, 3700 ppm P et 2500 ppm Co.
E. Terre globale
IV.4. Distributions des éléments chimiques dans les roches et les minéraux
Pour comprendre la distribution des éléments chimiques dans chacun des réservoirs
terrestres ainsi définis, il faut avoir une idée des minéraux essentiels gros porteurs de ces
éléments. Ainsi :
(1) l’oxygène est présent à peu près partout ;
(2) le silicium se trouve cantonné aux silicates qui sont les minéraux de loin les plus
abondants. La teneur en Si est un paramètre particulièrement important puisque la
concentration en Si mesure l’acidité des roches. Elle augmente dans les minéraux depuis
les olivines, les pyroxènes, les amphiboles et les minéraux en feuillets (biotite, chlorite,
serpentine) des roches métamorphiques. Une roche acide comme le granite ou la rhyolite
est riche en silice et pauvre en Mg et Fe. Par contre, une roche basique, tel que le
basalte, est riche en Mg et Fe.
(3) Le calcium se rencontre surtout dans les pyroxènes et les plagioclases dans les roches
magmatiques, dans les carbonates sédimentaires et dans les amphiboles
métamorphiques.
(4) Le magnésium se rencontre surtout dans les olivines, les pyroxènes et les amphiboles
des roches magmatiques, dans les phyllites des roches métamorphiques et dans
quelques carbonates des roches sédimentaires.
(5) L’aluminium a de nombreux porteurs :
- Dans les roches magmatiques, il se localise par ordre de pression croissante dans les
plagioclases, les spinelles (oxydes) et les grenats ;
- Il se rencontre dans les minéraux argileux des roches sédimentaires ;
- Dans les roches métamorphiques, Al est porté par les micas (biotite, muscovite).
(6) Potassium et sodium ne sont guère présents que dans les micas et les feldspaths.
Fe
(1) Olivine commune des roches basiques (Fo76) Fo= x 100 = 76% (2) Orthopyroxène (En77) ; (3)
Fe+ Mg
augite (Wo40 En46) ; (4) hornblende (Mg69) ; (5) biotite (Ph31).
Il faut remarquer :
1. Une variation de la composition minéralogique d’un type de roche à l’autre, il s’en suit que
la composition chimique d’un type de roche varie dans limites précises.
2. Le nombre de minéraux essentiels qui composent les roches communes est relativement
réduit. Le plagioclase et plus généralement les feldspaths sont des constituants importants
des roches banales. Si on compte un ou deux minéraux ferromagnésiens, une roche est
donc composée de 2 à 5 minéraux.
3. Les roches plutoniques et les roches volcaniques portent des noms différents à égalité de
composition chimique et minéralogique. Cela tient à la tradition qui a nommé les roches
sur base de l’aspect macroscopique avant de les examiner au microscope ou de les
analyser.
Les roches plutoniques se distinguent des volcaniques par la taille de leurs minéraux. Les
premières cristallisant lentement dans les chambres magmatiques profondes, contiennent
des minéraux bien développés, visibles à l’œil nu ou à la loupe. Les secondes, cristallisant
rapidement lors des éruptions volcaniques, apparaissent comme une pâte homogène
enrobant parfois quelques minéraux bien formés et constituée des minéraux très petits,
parfois à la limite de l’observation microscopique. Dans certains cas, le magma a refroidi
tellement rapidement que les minéraux n’ont pas eu le temps de germer et de croître : le
magma forme alors un verre amorphe sans structure cristalline.
On constate que :
(1) Si, Na, K ont des teneurs plus élevés au pôle granitique ;
(2) Fe, Mg, Ca Ti, Mn ont des teneurs plus élevés au pôle basique ;
(3) Al, P ont des tendances variables.
IV.5. Fractionnement des éléments majeurs dans les principaux réservoirs terrestres.
Une comparaison de la composition du manteau par rapport à celle de la Terre globale, par
exemple, permet de constater que le manteau est enrichi en éléments réfractaires comme
Mg et Cr, et appauvri par contre en éléments fusibles tels que Na, K, Al, Ca, Si. Ceci
démontre le caractère résiduel du manteau lors de la fusion. De même, l’olivine et le
pyroxène prédominent dans la minéralogie du manteau supérieur alors que la croûte
continentale est, elle, enrichie en éléments fusibles portés par les minéraux tels que les
feldspaths, le quartz et les argiles, ce qui montre que la croûte constitue un « liquide » de
fusion par rapport au manteau qui, lui, est un résidu de la fusion.
2. Processus sédimentaires :
Pour ce qui est des processus sédimentaires, les éléments tels que Na, K, Ca, et Mg, plus
solubles que les autres, induisent un fractionnement géochimique entre l’eau de l’océan et
les roches sédimentaires de type argiles ou shales. En effet, l’océan se trouve enrichi en
cations (Na, K, Ca) et en anions (Cl, SO 42-) solubles alors que les éléments à la fois
insolubles et fusibles comme Si, Al, Fe s’accumulent dans les roches sédimentaires
détritiques de type argiles ou shales.
chambre magmatique par gravité, soit en étant expulsés par tout autre moyen ; dans tous les
cas, les minéraux ne réagissent pas avec le liquide résiduel.
Le liquide M1 produit le liquide M2 par départ de minéraux X1. D’où M2 = liquide résiduel = M1-
X1. Si la température baisse lentement et passe de t1 à t2, M2 se trouve placé dans des
conditions propices à la cristallisation d’autres minéraux X 2. En conséquence, M2 = liquide
résiduel + X2. Si les minéraux X2 peuvent sortir du système sans réagir avec le liquide
résiduel, on a comme à l’étape précédente : liquide M2 produit le liquide M3 par départ des
minéraux X2, et donc M3 = liquide résiduel = M2-X2.
Exercice : Calculer la composition chimique d’une roche formée de 30% d’olivine, 20%
d’orthopyroxène et 50% de plagioclase sachant que la composition chimique de ces
différentes phases minéralogiques est la suivante :
Olivine Orthopyroxène Plagioclase
SiO2 39.2 55.4 49.7
TiO2 0.15 0.35 0.07
Al2O3 0.11 1.66 31.05
Fe2O3 0.7 0.64 0.86
FeO 19.8 6.39 -
MnO 0.27 0.13 -
MgO 39.4 32.9 0.05
2. Magmas andésitiques
(2) Dans les roches intermédiaires, les teneurs en SiO2 sont comprises entre 63 et 52%.
Le rapport Fe/Mg est modéré. Le quartz en tant que silice libre y est minimal. Ce sont
des roches de type :
Syénites (trachytes) avec Na/K élevé ;
Diorites avec des teneurs en Ca élevées.
Ces roches sont toutes caractérisées par la présence de feldspaths, micas, amphiboles
et quartz.
(3) Les roches basiques sont des roches sans quartz exprimé, la teneur en SiO 2 est
comprise entre 52 et 45%. Leur rapport Fe/Mg est élevé. Ce sont des roches de type
gabbro, dolérite ou basalte formées minéralogiquement de plagioclase, pyroxène et
olivine ;
(4) Les roches ultrabasiques sont des roches sans quartz exprimé, à teneur en SiO2
généralement inférieure à 45%. Le rapport Fe/Mg est élevé. Ce sont des roches riches
en minéraux ferromagnésiens de type pyroxène, olivine. C’est le cas des péridotites,
pyroxénites, etc.
Cependant, leurs très faibles teneurs conduisent à des relations relativement simples entre
la concentration et l’activité. Si la solution est idéale (suffisamment diluée), la relation entre
activité et concentration est donnée par la loi de Raoult : ai = Xi où ai = activité de l’élément i
en trace dans le minéral-hôte et Xi = sa concentration. En d’autres termes, dans ce cas
concentration = activité. S’il y a interaction entre élément en trace et les composants majeurs
du minéral-hôte, la solution est non idéale, l’activité s’écarte de la concentration. Dans ce
cas, la relation activité-concentration obéit à la loi de Henry qui stipule qu’à l’équilibre,
l’activité d’un élément en trace est directement proportionnelle à sa concentration : aij= kijXij
où kij = constante de la loi de Henry qui est une constante de proportionnalité, c’est le
coefficient d’activité de l’élément i dans le minéral j.
Les éléments en trace contrastent avec les éléments majeurs par leurs très grandes
variations des teneurs suivant les types de roches. Ils sont donc a prori beaucoup plus
discriminants. Leur répartition dans les roches magmatiques est fonction de l’état et de la
composition des régions-sources et des processus magmatiques.
Ils sont particulièrement utilisés pour caractériser les roches volcaniques (modernes), pour
assigner une affinité géodynamique à des séries magmatiques anciennes que tectonique et
La distribution des éléments en trace entre les phases peut être décrite par un coefficient de
distribution ou coefficient de partage. Il s’agit du coefficient de Nernst, extensivement utilisé
en géochimie des éléments en trace. Il décrit la distribution en équilibre d’un élément en
minéral
C élément
trace entre un minéral et un liquide, et est défini par : K d = liquide où Kd = coefficient de
C élément
distribution de Nernst, et C = la concentration de l’élément en trace i en ppm ou en %. Par
exemple, un phénocristal de plagioclase titrant 500 ppm de Sr est contenu dans une
C plg
Sr 500
mésostase (verre) de lave titrant 125 ppm ; le coefficient de partage K d = = =4
C liq
Sr
125
Un élément i dont la valeur Di>1 est dit compatible : il est préférentiellement incorporé dans
l’assemblage minéral. Un élément est dit incompatible ou hygromagmatophile si la valeur
de son Di <0. Il est parfaitement incompatible si Di = 0.
Il faut noter qu’un élément compatible dans certaines conditions peut être incompatible dans
d’autres. Ainsi, si les plagioclases sont stables dans le manteau supérieur, Sr se substitue au
Ca dans leur structure et est donc compatible ; dans les minéraux les plus profonds du
manteau supérieur où le liquide est plus stable que le plagioclase, Sr peut être incompatible.
De même si la phlogopite est stable, les éléments tels que K, Rb, Cs et Ba, généralement
fortement incompatibles deviennent compatibles.
1° En isolant les phénocristaux dans les roches volcaniques et en comparant leurs teneurs à
celles des mésostases (liquides magmatiques) qui les renferment. Faiblesses de la
méthode : elle suppose qu’il y a eu équilibre entre mésostase et phénocristaux alors que
ces derniers peuvent être des xénocristaux (cristaux étrangers hérités) ; en plus, on
observe fréquemment dans les cristaux des zonation qui peuvent être causées par les
effets de déséquilibre ou de diffusion.
(Fe/Mg)opx
1
0.8
0.6
0.4
0.2
0 (Fe/Mg)cpx
0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8
Géothermomètre et géobaromètre :
La relation mise en évidence dans le test précédent peut-être utilisé comme thermomètre ou
baromètre géologiques. En effet, Kd ou D dépend de la T et de la P. La dépendance avec la
T est beaucoup plus importante que celle avec la pression. Ainsi à P constante et à égalité
de composition chimique des phases, D varie linéairement en fonction de 1/T suivant la
A
relation lnD = +B, A et B étant des constantes. Comme la substitution isomorphe
T
n’introduit que de très faibles variations de volume, Kd variera très peu avec la P.
Exemple de géothermomètre :
Les géothermomètres sont généralement formulés en termes de coefficient de distribution Kd,
défini comme Kd = (a/b)C / (a/c)D où a et b sont les fractions molaires des composants
chimiques dans les phases C et D.
Géothermomètre d’équilibre Grenat-biotite (Ferry et Spear, 1978) est basé sur l’équilibre :
KMg3Si3AlO10(OH)2 + Fe3Al2Si3O12 = KFe3Si3Al10(OH)2 + Mg3Al2Si3O12
Phlogopite almandin annite pyrope
12.454+0.057 p(bars )
T°(K) = où Kd = (Mg/Fe)gt / (Mg/Fe)bi et R = -1.987
4.662−3 R ln K
Les REE sont trivalentes dans les conditions naturelles, à l’exception de cérium (Ce) et de
l’europium (Eu) ; le premier peut être tétravalent (Ce4+) en conditions oxydantes, le second
bivalent (Eu2+) en conditions réductrices. Elles sont en outre caractérisées par une diminution
régulière de leur rayon ionique, depuis La jusqu’au Lu : c’est le phénomène appelé
« contraction lanthanique » : le remplissage de l’orbite électronique interne au lieu de
l’addition d’une nouvelle orbite est tel que l’accroissement de la charge nucléaire produit une
forte attraction des électrons les plus externes qui conduit ainsi à la diminution du rayon
ionique. Cette diminution de rayon ionique correspond à la diminution du degré
d’incompatibilité. Ainsi, l’échelle d’incompatibilité diminue dans le sens : La>Ce>Pr>Nd>…
>Lu.
Les concentrations des REE dans les roches sont habituellement normalisées par rapport à
leurs valeurs respectives dans les chondrites. Cela permet de :
Supprimer les variations en zigzag entre les éléments à Z pair et ceux à Z impair (cf.la Loi
de Oddo-Harkins) ;
Identifier tout fractionnement d’un groupe des terres rares par rapport aux chondrites.
Les REE sont alors représentées sur un diagramme de l’abondance en fonction du nombre
atomique Z. La forme du spectre ou diagramme des REE a un intérêt considérable en
géochimie. Généralement la trace de la position de Eu ou de Ce définit une anomalie qui
peut être soit positive, soit négative. Ces anomalies en Eu et/ou en Ce peuvent être
quantifiées en comparant les concentrations mesurées avec les abondances obtenues par
extrapolation entre les valeurs normalisées des éléments voisins, Sm et Gd pour europium:
Eu/Eu*=EuN/(SmN x Gd N)1/2 , ou La et Pr pour cérium : Ce/Ce*=CeN/(LaN x PrN)1/2
Il faut noter que pour les roches sédimentaires, les abondances en REE peuvent être
normalisées par rapport à des valeurs référentielles des shales. Les valeurs
communément utilisées sont les suivantes : (1) North American Shale Composite (NASC),
(2) Composite European Shale (ES), (3) Post-Archean Average Australian Sedimentary
rocks (PAAS), et (4) Moyenne de l’abondance des REE dans la croûte supérieure
(UCC = Upper Continental Crust).
1000
Roche/Chondrite
100
10
1
La Ce Pr Nd Sm Eu Gd Dy Ho Er Yb Lu
De même, une forte dépression des HREE par rapport aux LREE indique souvent la
présence des grenats dans la roche-source.
2. Parmi les roches sédimentaires, il faut distinguer :
Les sédiments détritiques : ici le facteur le plus important expliquant la teneur en
REE est la source même des ces sédiments ; les REE sont à l’état particulaire et
reflètent la chimie de leur source. Le spectre des REE de la roche source est donc
plus clairement représenté dans les roches argileuses telles que les shales.
Les sédiments chimiques représentent, par contre, la composition de l’eau de
mer dont ils ont été précipités. Or, normalisées aux shales, les eaux marines
montrent un graduel enrichissement en REE, allant des LREE aux HREE et une
importante anomalie négative en Ce. Ce comportement est la réponse à
l’oxydation de Ce3+ en Ce4+ qui précipite ainsi de la solution sous forme de CeO 2.
C’est ainsi que les nodules ferromanganifères qui fixent cet élément présentent un
spectre caractérisé, contrairement à l’eau de mer, par un enrichissement en LREE
et une anomalie positive en Ce.
Cas particuliers :
Ce sont des éléments incompatibles, qui ne se substituent pas facilement aux éléments
Zr, Hf majeurs mantéliques ; ils peuvent néanmoins se substituer au Ti dans les phases
accessoires comme sphène et rutile.
3. Exercices résolus
1° Soit la cristallisation à partir d’un liquide basaltique d’une tholéiite à olivine constituée de
58% de plagioclase, 25% d’olivine et 17% de verre ; sachant que DSr est respectivement
de 2 dans le plagioclase, de 0.005 dans l’olivine et de 1 dans le verre volcanique. Calculer
sa teneur dans le liquide résiduel après 60% de cristallisation du liquide contenant
initialement 200 ppm de Sr.
Solution : DSr = (0.58 X 2) + (0.25 X 0.005) + (0.17 X 1.0) = 1.33 ; ce coefficient montre
que Sr est ici légèrement compatible, il va donc relativement s’appauvrir dans le liquide
résiduel au fur et à mesure de la cristallisation de cette tholéiite.
CSrL = CoF(D-1) = 200 x 0.4(1.33-1) = 148 ppm de Sr.
2° Soit la fusion partielle d’une lherzolite en trois bains successifs de 5% chacun. Si cette
roche titre 10 ppm de Sr et comprend 40% d’olivine, 30% de cpx , 20% de opx et 10% de
grenat. Calculer la concentration en Sr dans les 3 liquides successifs sachant que
DSrol = 0.05, DSrcpx = 0.1, DSropx = 0.01 et DSrgrt = 0.001
Solution : DSr = (0.4x 0.005) + (0.3 x 0.1) + (0.2 x 0.01) + (0.1 x 0.001) = 0.034. Le calcul
de la concentration de Sr dans les liquides successifs exige de connaître le Cs, c.à.d. la
composition de l’élément Sr dans le résidu laissé après la fusion partielle à l’équilibre.
Ainsi :
10
10
Pour le 1e bain : CL = = 112 ppm Sr et Cs = 1+ 0.034 = 4
0.05+0.034 (1−0.05) 1+ 0.05( )
0.034
4
ppm Sr ; Pour le 2e bain : CL = = 49 ppm Sr et Cs =
0.05+0.034 (1−0.05)
4
1+ 0.034 = 2 ppm Sr
1+ 0.05( )
0.034
2
2
e
Pour le 3 bain : CL = = 24 ppm Sr et Cs = 1+ 0.034 = 1
0.05+0.034 (1−0.05) 1+ 0.05( )
0.034
ppm Sr
3° Deux basaltes contiennent respectivement 1 ppm en Rb et 100 ppm en Sr et 11 ppm en
Rb et 80 ppm en Sr. Calculer leurs rapports Rb/Sr et dire lequel dérive de la fusion
partielle d’une péridotite à plagioclase. Si le basalte choisi représente un liquide issu de
15% de fusion partielle de cette péridotite, calculer le rapport originel (dans la péridotite)
sachant que le coefficient global DRb = 0.085 et DSr = 0.272.
Solution : Basalte 1 : Rb/Sr = 1/100 = 0.01, Basalte 2 : Rb/Sr = 11/80 = 0.14. Sr2+ étant
compagnon diadochique de Ca2+, il se substitue en partie au Ca 2+ dans les plagioclases-
Ca ; dans ces conditions, Sr est compatible, ce qui signifie que le liquide formé en sera
appauvri car il sera attaché au résidu solide. Par conséquent c’est le basalte qui est
relativement pauvre en Sr et donc à rapport Rb/Sr élevé qui est celui dérivant de la fusion
de péridotite à plagioclase, en l’occurrence le basalte 2. Ainsi pour ce basalte :
Les variations des teneurs en éléments en traces dans les différents termes d’une suite des
roches magmatiques peuvent être imputées aux effets superposés de : (1) la fusion partielle,
(2) la cristallisation fractionnée, (3) des hétérogénéités de sources et (4) d’assimilation de
l’encaissant. La démarche du géochimiste consiste :
- à déterminer les rapports d’isotopes radiogéniques (de Sr, Nd,…) et stables (O,…).
- S’il y a identité de ces rapports entre les différents termes, les processus
d’hétérogénéité de sources et d’assimilation d’encaissants sont écartés ;
- dans ce cas, on utilise la modélisation suivante :
( )
a
Ca C o D a + F ste
1) Pour la fusion partielle : ≅ ≠ C ; dans le diagramme, les points
Cb C bo D b + F
représentatifs d’une suite d’échantillons issus de la F.P. ne sont pas alignés, sauf
a
Ca C o
pour des cas à taux de fusion élevés, c.à.d. où ≅ = pente k de la droite passant
Cb C bo
par l’origine, et égale au rapport des concentrations dans le solide initial. a et b sont
des éléments incompatibles, c.à.d. dont les D respectifs sont <1, on a :
0.6
0.4
C(b)/C(a)
0.2
0
0 0.5 1 1.5 2 2.5
(Da+F)/(Db+F)
a
Ca C o F(Da−1)
(2) Pour la cristallisation fractionnée, on a : ≅ = ; il s’agit d’un rapport proche
Cb C bo F(Db−1)
a
Co
ou égaux de b lorsque les D sont faibles (c.à.d. pour les éléments incompatibles).
Co
Dans le diagramme Ca = f(Cb), les points représentatifs d’une suite de C.F.s’alignent sur
a
Co
des droites passant par l’origine, et ayant une pente k = b , c.à.d. celle des
Co
concentrations dans le liquide initial.
1.5
1
C(a)
0.5
0
0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 1.2
C(b)
Treuil (1973) utilise la notion des éléments fortement hygromagmatophiles notés (C+) et
faiblement hygromagmatophiles (C-). Par exemple, les couples Ta-Sm, La-Sm, Ta-Tb, etc.
Dans le diagramme C+/C- = f(C-), la F.P. se traduit par une droite passant par l’origine, alors
que la C.F. produit des droites parallèles à l’axe des abscisses
VI. 1. Introduction
Rappelons que chaque élément chimique est caractérisé par un numéro atomique Z donné,
égal au nombre de protons du noyau ; et que pour un même élément, il peut exister
plusieurs isotopes, qui diffèrent entre eux par leur masse atomique A, égale au nombre de
protons et de neutrons du noyau, et définissant la masse molaire en g/mol.
Chacun des quelques 100 éléments du tableau de Mendeleïev possède plusieurs isotopes.
Certains sont naturels, c'est à dire qu’ils ont été formés soit lors du Big Bang
(nucléosynthèse primordiale), soit lors de la nucléosynthèse dans les étoiles
(nucléosynthèse stellaire), soit encore sous l'effet des rayonnements cosmiques (isotopes
dits cosmogéniques dus aux réactions de spallation). D'autres ne sont connus que par leur
synthèse dans les laboratoires de physique nucléaire et sont donc artificiels.
On dénombre à ce jour plus de 3000 isotopes, mais la plupart ne sont pas observables dans
les échantillons naturels. En effet, la plupart des isotopes sont radioactifs, et ont une durée
de vie extrêmement courte. Seuls 158 isotopes radioactifs ont une période de désintégration
de plus de un an (c'est à dire une durée de vie de 10 ans environ). Seuls 237 isotopes sont
stables, c'est à dire qu'ils ne subissent aucune désintégration radioactive spontanée.
Si on regarde la table des nucléides, on s'aperçoit qu'il existe une relation entre le nombre de
proton et le nombre de neutron. Il existe un domaine de stabilité correspondant à un rapport
proton/neutron égal à 1 pour les éléments légers, et à 1.5 pour les éléments lourds.
Les proportions entre les différents isotopes d'un même élément sont appelées
abondances. Ces abondances sont légèrement variables dans les matériaux terrestres, ce
qui constitue la base de la géochimie isotopique. En effet, les différences de composition
isotopique observées entre les différents réservoirs et matériaux terrestres nous renseignent
sur les processus qui sont à l'origine de cette variabilité. Ces processus étant différents pour
les isotopes stables et les isotopes radioactifs, on distingue donc deux grands domaines en
géochimie isotopique: la géochimie des isotopes stables, et la géochimie des isotopes
radioactifs.
Les isotopes d'un même élément ont des propriétés chimiques comparables car ils ne
différent entre eux que par la composition de leur noyau, et non par leur structure
électronique. Mais la différence de masse entre les isotopes induit des différences
d'énergie des liaisons moléculaires dans lesquelles les isotopes sont impliqués. Ces
différences de masse et d'énergie des liaisons moléculaires entre les isotopes induisent des
fractionnements isotopiques, c'est à dire des différences de composition isotopique entre
les matériaux terrestres.
La composition isotopique d'un élément donné dans un objet donné peut s'exprimer de
plusieurs manières:
par les abondances isotopiques, c'est à dire les proportions atomiques entre les
différents isotopes de l'élément. Par exemple, pour les 3 isotopes de l'oxygène, les
abondances sont de 99.63% pour 16
O, 0.0375% pour O et 0,1995% pour
17 18
O. Les
abondances servent généralement à exprimer la composition isotopique moyenne
d'un élément, mais pas les variations de composition isotopique.
par les rapports isotopiques entre deux isotopes du même élément (par
convention, en général, l’isotope le moins abondant sur le plus abondant). Par
exemple, pour l'oxygène, on utilise les rapports 18O/16O et 17O/16O.
par les "δ", c'est à dire les rapports isotopiques relatifs à un standard, exprimés
en ‰. Par exemple, pour l'oxygène:
La notation en "δ" est la notation qui met les mieux en évidence les variations de
compositions isotopiques, qui sont généralement très faibles.
Par exemple pour l'oxygène 18O, le standard de référence est le rapport isotopique 18O/16O
très constant des eaux océaniques (Standard Mean Ocean Water : SMOW). Ce rapport
RSMOW : 18O/16O est égal à 2,035.10-3. Si pour un échantillon, le rapport isotopique
18O/16O (R -3
échant.) est égal à 2,043. 10 , on peut calculer δ :
= ( 2,043.10-3
2,035.10-3
) -- 1 X 1000
δ = 3,931 %o
Les compositions isotopiques sont mesurées par spectrométrie de masse. On obtient par
spectrométrie de masse des rapports isotopiques.
par le "Δ", différence de composition isotopique exprimée en notation "δ" entre deux
objets. Par exemple, pour exprimer la différence de composition isotopique de
l'oxygène entre l'eau liquide et l'eau vapeur, on écrira: Δliq-vap = δ18Oliq - δ18Ovap
Noter que lorsque α est voisin de 1 (c'est le cas pour l'oxygène en particulier), il existe une
relation fort utile entre les α et les Δ qui est: Δa-b=1000lnαa-b
Types de fractionnements :
On distingue deux types de fractionnements entre les isotopes stables: les fractionnements à
l'équilibre et les fractionnements cinétiques.
Soit encore :
Le rapport entre la composition isotopique de l'eau et celle de la calcite est fixé par
cette constante d'équilibre, qui dépend de la température.
Les fractionnements cinétiques sont dus au fait que les réactions impliquant les
isotopes légers sont en général plus rapides que celle impliquant les isotopes lourds.
Prenons l'exemple de l'évaporation de l'eau. L'évaporation d'H218O est plus lente que
celle d'H216O. Si l'évaporation est continue, la vapeur sera donc enrichie en H216O par
rapport à l'eau liquide.
Les isotopes les plus couramment utilisés en sciences de la Terre sont ceux de l'oxygène, du
carbone, et de l'hydrogène, mais la géochimie des isotopes stables concerne des éléments
de plus en plus variés tels que N, S, Ca, Si, Fe, ....
Traçage isotopique
Oxygène-hydrogène
- Les altérites
Les compositions isotopiques des altérites sont directement liées à
celles des eaux météoriques. Toutefois les minéraux argileux
13
Dans l’eau de mer, la teneur en C est fonction de la présence de la MO ; le
δ C des carbonates pélagiques semble être fonction de la profondeur de
13
sorte que les périodes de haut niveau eustatique correspondent à un fort δ 13C.
C’est donc un traceur de la température et du niveau eustatique fortement
appliqué aux études paléoclimatiques du Quaternaire récent.
Dans les roches ignées continentales, le δ13C est de -23‰ en moyenne, mais
il est en général fonction de l’état du carbone ; ainsi pour le graphite (C réduit),
le δ13C est compris entre -20 et -32‰ alors que pour les carbonates et les
inclusions fluides de CO2 (C oxydé), les valeurs de δ13C sont comprises entre
-18 et +3‰.
La composition isotopique du manteau est difficile à atteindre, néanmoins le
δ13C de kimberlites, carbonatites, diamants et inclusions de CO 2 dans les
MORB, compris entre -2 et -8‰, en donne une estimation qui est en accord
avec celle de la Terre globale, à -7‰.
Dans les météorites, les carbonates des chondrites carbonées sont le matériel
le plus lourd (δ13C = +60‰), leur carbone réduit étant plus léger (-7< δ13C< -
30‰).
Le soufre
32 33 34
Le soufre possède 4 isotopes tous stables : S (95,02%), S (0,75%), S
(4,21%) et 36
S (0,02%) ; toutefois dans la pratique, on ne s’intéresse qu’aux
variations du rapport 34S/32S.
La géochimie des isotopes stables s'avère également utile dans le traçage des
pollutions: par exemple, les nitrates naturels des aquifères n'ont pas la même
composition isotopique que les nitrates apportés par les engrais. On peut même
utiliser la composition isotopique des composés organiques pour tracer les fraudes
alimentaires.
Les isotopes stables sont également fort utiles en cosmochimie où ils donnent des
indications sur l'origine des matériaux extra-terrestres.
Thermométrie
La constante d'équilibre K dépendant de la température, les fractionnements
isotopiques dépendent de la température. On détermine généralement des relations
de la forme 1000 ln α =A/T+B, ou 1000 ln α =A/T2+B où A et B dépendent du
système isotopique considéré et des matériaux entre lesquels on estime le
fractionnement.
Ainsi, les fractionnements isotopiques de l'oxygène entre l'eau et les carbonates sont
à la base de la paléothermométrie et de la reconstitution des paléoclimats ou des
paléoaltitudes. Les fractionnements isotopiques de l'oxygène sont également des
thermomètres utilisés en pétrologie magmatique et métamorphique.
donnée par la formule : 1000 ln αqz-px = 2,75 x 106/T2 (Chiba et al. 1989) ;
1000+δ A
αA-B = , ainsi αqz-px = 1010,2/1007,9 = 1,00228 ≈ 1 d’où :
1000+δ B
1000lnα = 1000ln 1,00228 = 2,277
D’où : 2,277 = 2,75.106/T2
2,75.106
T2 = = 1207729
2,277
T = 1099K = 825°C
Les isotopes se désintégrant par radioactivité s'appellent des isotopes radioactifs, et ils
génèrent des isotopes dits radiogéniques. On parle aussi d'isotopes pères et d'isotopes fils
des réactions de désintégration radioactive.
a - Radioactivité α
4
Un atome se désintègre en émettant une particule α c'est à dire un noyau d'hélium ( 2He ).
M M −4 4
Z X -------> Z−2 X ' + 2He .
b - Radioactivité β-
M
Z
M
X -----> Z +1 X ' + e (β -) : M ne change pas, Z augmente d’une unité.
Un électron de la couche électronique la plus interne K réagit avec un proton du noyau pour
M M 40 40
Z X + e ----> Z−1 X ' ; Ex : 19 K + e ----> 18 Ar
d - Fission spontanée
Un noyau lourd éclate en deux noyaux de masses voisines, avec émission de neutrons ;
Exemple : 235U
dP
(1) = - P
dt P = nombre d'atomes pères radioactifs
λ= constante de désintégration
Si Po représente la quantité d'atomes- pères à l'instant to, l'équation (1) s'intègre selon les
équations (2) et (3) :
(2) P = P 0 e -t
(3) P0 = P e t
Dans la pratique, on ne doit faire intervenir dans l'équation que des grandeurs mesurables
actuellement. Or,
On pose alors l'hypothèse que le nombre (P) d'atomes- père à un temps t est égal au
nombre P0 d'atomes -pères initiaux au temps to moins le nombre F d'atomes fils
radiogéniques produits au cours du temps t. Soit : P = Po – F ou Po = P + F
P + F = P e λ t ou F = P e λ t - P ; soit :
(4) F = P ( e t - 1 )
(5) 1 ln 1 + F
t =
P
présents dès le départ dans le système. C'est à dire que : F total mesuré = F radiogénique +
F0 existant au départ. L'équation (4) peut alors s'écrire :
(6) F = P ( e t - 1 ) + F0
Cette équation (6) est l'équation fondamentale de la géochronologie. Elle permet d'obtenir
l'âge d'une formation géologique (ou d'un minéral) selon l'équation (7) :
(7) t= 1 ln 1+ F - F0
P
(3) que l'on connaisse F0 ; ce qui est souvent délicat, voir impossible ;
(4) que le système soit resté clos (rien ne se perd, rien ne se crée, tout se
transforme).
Il existe plusieurs systèmes isotopiques utilisés en radiochronologie, les plus en vogue sont
les systèmes Rb-Sr, Sm-Nd et K-Ar. Pour ce cours ne sera étudié que le système Rb-Sr.
(radioactivité ß). Sa période de désintégration est très grande (~50 Ga, soit
λ = 1,42.10-11/an). Selon l’équation fondamentale de désintégration(6) du 87Rb (éléments-
père radioactif, P) se désintègre en 87Sr (élément-fils radiogénique, F) :
t 87
(8) (87Sr) = (87Rb) (e λ
- 1) + ( Sr)
0
Sr38 possède 4 isotopes: 84-86-87-88. Seul 87Sr est radiogénique. Dans l'équation (8), 87Sr
et 87Rb peuvent être mesurés et sont connus ; par contre, la quantité de (87Sr)o est une
inconnue. Le 86Sr étant un isotope stable non radiogénique, non radioactif, sa quantité dans
le système est donc une constante.
Dans l'équation (8), on rapporte (on divise) les concentrations de (87Sr)actuel, (87Rb)actuel et
87Sr 87 Rb t 87Sr
(9) ( )actuel = ( ) (e λ
- 1) + ( )initial
86Sr 86Sr 86Sr
Cette équation est de la forme linéaire : y = ax + b, avec (eλt -1) la pente qui peut être
assimilée à λt à cause de la très faible valeur de λRb (1,42.10-11), d’où :
87Sr 87 Rb 87Sr
( )actuel = ( ) (λt - 1) + ( )initial
86Sr 86Sr 86Sr
Voici à titre indicatif les abondances des Rb et Sr dans les principaux types de roches :
Rb Sr R/Sr
Grès 60 20 3
87Sr
86Sr
*4
*3
*2
* 1
( 87Sr
)
86Sr 0
87Rb
86Sr
Fig.1 : tracé d'une isochrone dans le système radiochronologique Rb - Sr
Age « absolu» : lorsque tous les points analytiques sont, dans le diagramme
(87Sr/86Sr) - (87Rb/86Sr), alignés (aux incertitudes analytiques près), cela signifie que 3
conditions ont été remplies :
L'âge obtenu peut être alors considéré comme un " âge absolu."
Les roches acides et intermédiaires sont les mieux adaptées à la datation par cette méthode
en raison de la valeur relativement élevée et souvent assez étalée, au sein d’un même
massif, de leur rapport Rb/Sr et donc des rapports 87Rb/86Sr. Les roches plus récentes que
la centaine de Ma ne sont pas abordables par cette méthode (les difficultés d’analyse sont
d’autant plus réduites que l’âge est ancien).
Exercices :
Echantillon Sr/86Sr
87
Rb/86Sr
87
1 0,7130 0,12
2 0,7187 0,95
3 0,7245 1,75
4 0,7262 2,00
5 0,7250 2,50
6 0,7310 2,70
Tracer la droite isochrone passant par au moins 5 de ces points ;
Calculer la pente de l’isochrone et déterminer ainsi l’âge de ces échantillons sachant
que λ pour 87Rb = 1,42.10-11 an-1
Calculer le rapport (87Sr/86Sr)o et donnez-en une interprétation quant à l’origine de
matériau-source.
Quelle est, à votre avis, la raison pour laquelle l’un des échantillons ne s’aligne pas
sur l’isochrone ?
Traçage isotopique
Les isotopes radiogéniques des éléments lourds ont une particularité: ils ne sont pas
fractionnés par les processus physico-chimiques tels que la fusion, la cristallisation ou les
réactions métamorphiques, alors que les éléments pères le sont.
Comme les rapports isotopiques des laves ne sont modifiés ni par la fusion partielle ni par la
cristallisation fractionnée, ils fournissent donc des informations directes sur les
hétérogénéités des « régions-sources ». Les isotopes radiogéniques et particulièrement ceux
de Sr procurent donc des informations sur la composition et les variations éventuelles de
compositions des sources au cours de temps.
Dans le manteau le rapport isotopique initial 87Sr/86Sr varie entre 0,702 et 0,706.
Pour la Terre globale, comme il n’y a aucune roche terrestre aussi vieille que 4,57 Ga (âge
de la Terre), c’est le rapport des météorites qui est utilisé ; ces dernières étant demeurées
des systèmes clos depuis leur formation, leur rapport Sr/86Sr initial, appelé BABI (basaltic
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achondrite best initial), qui est donc celui du système solaire, est de 0,69897±0,00003.
On utilise donc à cet effet un diagramme dit d’évolution isotopique : 87Sr/86Sr = f(t). L’intérêt
de ce diagramme est qu’il permet d’illustrer comment varient les rapports ( 87Sr/86Sr) avec le
temps. Comme la pente correspond dans ce diagramme au rapport λ ( 87Sr/86Sr), on peut
calculer le rapport Rb/Sr du manteau ou de n’importe quel milieu.
2,8925 x Rb/Sr pour des milieux riches Sr commun, la pente est aussi approximativement
proportionnelle à Rb/Sr ; ce qui permet de calculer ce rapport.
Cette approche conduit à un rapport Rb/Sr d’environ 0,025 pour le manteau, ce qui est en
accord avec la nature basique du manteau et témoigne de l’appauvrissement global de la
Terre en volatils par rapport aux chondrites, qui ont conservé au contraire la chimie de la
nébuleuse solaire initiale.
Cette croûte a une composition moyenne granodioritique, son rapport Rb/Sr est d’environ
0,25 ; soit 10 fois plus que celui du manteau. Ses constituants les plus acides, comme les
granites, ont des rapports Rb/Sr encore plus élevés, souvent supérieurs à 10 (même à 100
dans le cas des roches hyperalcalines).
Prof. Pierre Mashala 68
Cours de Géochimie Générale
L’augmentation du rapport Sr/88Sr en fonction du temps est donc beaucoup plus rapide
87
Lorsque une portion de la croûte continentale radiogénique fond, elle produit des liquides
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radiogéniques puisque le rapport Sr/88Sr du liquide est le même que celui de sa région
source à l’époque de la fusion. Par exemple, la fusion à l’époque hercynienne (~300 Ma)
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d’un vieux bouclier de 3 Ga produit des magmas dont le rapport Sr/88Sr initial est d’environ
0,730. L’âge de la fusion est donné par la datation du matériel (magma), le rapport initial
élevé (0,730) de ce matériel indique une origine crustale.