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L’article 1er de l’acte uniforme portant organisation des sûretés définis une

sûreté comme « l’affectation au bénéfice d’un créancier d’un bien, d’un


ensemble de bien ou d’un patrimoine afin de garantir l’exécution d’une
obligation ou d’un ensemble d’obligation quel que soit la nature juridique de
celle-ci notamment qu’elle soit présente ou future, déterminé ou
déterminable, conditionnel ou inconditionnel et que leur montant soit fixe ou
fluctuant » Dans la classification des sûretés selon leurs sources, les sûretés
légales sont celles qui sont conféré par la loi autrement appelé privilège.
Le privilège est selon le code civil ivoirien, en son article 2095, un droit que la
qualité de la créance donne à un créancier, d’être préféré aux autres créanciers
même hypothécaire. Les privilèges ont une seule source qui est la loi, il
n’existe pas de privilèges sans texte1. A ce titre l’acte uniforme portant
organisation des suretés prévoit deux types de suretés, qui sont les privilèges
généraux et les privilèges spéciaux. Les premiers sont prévus par les articles
225 et 226 de l’AUS et les seconds, par l’article 182 et suivants de l’AUS.
Ces privilèges confèrent essentiellement un droit de préférence qui permet au
bénéficiaire d’être payé suivant l’ordre prévu par l’acte uniforme.
L’exercice de ces privilèges fait naitre un rang qui doit être respectés dans le
remboursement des créances.
Ainsi le rang, en matière de sûreté désigne l’ordre temporel dans lequel les
créanciers seront remboursés2. En effet le créancier court un risque lorsqu’il ne
bénéficie d’aucune garantie et même lorsqu’il en bénéficie il peut ne pas être
payé systématiquement lorsqu’il rentre en concours avec d’autre créancier.
Lorsqu’un créancier met en place une procédure de saisie d’un bien qu’il soit
mobilier ou immobilier le droit prévoit que le prix de la vente ne lui revienne
pas directement. Cette somme fera alors l’objet d’une répartition particulière,
une procédure qui peut se révéler complexe. Dans notre étude, nous
aborderons l’ordre dans lequel les créanciers sont payés selon qu’il s’agisse
d’un privilège général ou d’un privilège spécial. Ce sujet est d’un intérêt
essentiellement pratique, car il permet tout d’abord aux créanciers de

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Professeur Yvette Rachelle KALIEU ELONGO : Cour de droit des suretés (OHADA)
2
https://www.boursedescredits.com/lexique-definition-rang-3615.php

1
connaitre les avantages que la loi lui octroie en matières de recouvrement de
sa créance et enfin permet aux débiteurs de savoir quel créancier, il doit tout
d’abord désintéressé. Dès lors le problème qui se pose est le suivant : quel est
l’ordre de remboursement des créanciers face à un débiteur défaillant ? dans le
but de répondre à cette préoccupation nous ferons le départ entre l’ordre des
privilèges généraux (I) et l’ordre des privilèges spéciaux(II)

I- L’ORDRE DES PRIVILEGES GENERAUX


L’acte uniforme portant organisation des sûretés établis un ordre différent de
désintéressement des créanciers selon que les deniers proviennent de la
réalisation d’un immeuble (A) ou de la réalisation d’un biens meubles (B)

A- EN MATIERE IMMOBILIERE
En droit OHADA, si la procédure de distribution du prix sur saisie est fixé par
l’acte uniforme portant procédure simplifié de recouvrement3, le législateur a
dans l’acte uniforme portant organisation des sûretés, institué un ordre pour
désintéresser les créanciers lorsque les deniers proviennent de la réalisation
d’un immeuble. Cet ordre est signifié à l’article 225 de l’acte unifiée relatif au
droit des sûretés
En droit OHADA, le législateur a institué un ordre pour désintéresser les
créanciers en matière immobilière. Cet ordre est signifié à l’article 225 de l’acte
uniforme relatif au droit des sûretés.
Relativement à cet article, celui-ci cite entre autre le rang à suivre en ce qui
concerne les créanciers lorsqu'il s'agit de la vente d'un immeuble.
D’abord, vient les frais de justice. Les frais de justice sont l’ensemble de frais
exposé pour la procédure de réalisation des biens du débiteur et de leur
distribution. Ils sont payés à la personne qui a accompli ses actes ou qui en a
fait l’avance. Il faut noter que sont payés en premier que les frais de
distribution en relation avec l’immeuble vendu.

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Article 224 de l’AUS

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Ensuite vient le superprivilège des salariés4.
L’AUPC définit le superprivilège comme correspondant à la fraction incessible
et insaisissable du salaire et où chaque Etat partie à une législation spéciale sur
la détermination de cette quotité. Ce superprivilege est une création du droit
du travail. Il est organisé par lui sur la base de la Convention n° 95 (1949) de
l'OIT concernant la protection du salaire. Les articles 8, 10 et 11 de cette
convention combinée posent plusieurs règles : l'interdiction de faire des
retenues sur salaires autrement que dans les conditions et limites prescrites
par la législation nationale. L’interdiction de faire des saisies et des cessions
autrement que dans les limites et conditions prescrites par la législation
nationale. La nécessité de protéger le salaire contre la saisie ou la cession
s’explique dans la mesure où le salaire présente un caractère alimentaire voire
de subsistance. En outre, le salarié a impérativement besoin de son salaire pour
subvenir à ses besoins et à celui de sa famille. Le salaire étant une créance
privilégiée, il y a donc nécessité de le payer avant les créances ordinaires.
Il appartient à tous les membres de l’OIT de déterminer l’ordre de priorité de la
créance privilégiée de salaire par rapport aux autres créances privilégiées.
Si les deniers provenant de la réalisation de l'immeuble ne suffisent pas à payer
le superprivilège de tous les salariés, ceux-ci concourent à la distribution du
prix dans la proportion de leurs créances, au marc le franc.
Aussi, l’acte uniforme cite les créanciers hypothécaires et séparatistes.
Ces créanciers sont servis selon un ordre précis. Ce rang est déterminé par la
date d’inscription de son hypothèque. Seule la date de l’inscription du livre
foncier compte pour déterminer le rang.
A l’analyse, l’article 226 englobe voire assimile les privilèges des créanciers
séparatistes.
Il convient d’ajouter qu’il ne peut y avoir concours entre les créanciers
hypothécaires sur le prix à distribuer. Lorsque celui-ci est suffisant, cela ne pose
aucun problème. Toutefois, lorsque celui-ci n’est pas suffisant, dans ce cas,
seront payés que ceux qui sont en rang utile pour recevoir quelque chose.

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Article 96 AUPC

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Après les créanciers hypothécaires, suivent les créanciers muni d'un privilège
général soumis à publicité selon son rang au RCCM
Chacun de ces créanciers à savoir la douane, le fisc, la sécurité et prévoyance
sociale tel que désigné par l'article 180, sera servi selon le rang que lui confère
sa date d'inscription et pour le montant des sommes inscrites. Ce qui signifie
que, en cas de réalisation des biens du débiteur et distribution de ceux-ci le
premier inscrit au RCCM sera classé en premier lieu, puis les autres suivront.
Aussi ce créancier sera payé en tenant compte de la somme qu'il a fixé lors de
son inscription.
Ladite inscription se fait au greffe de la juridiction compétente. Le privilège est
conservé par elle, 3ans à partir du jour où elle a été prise.
À l'expiration du délai, celle-ci peut être renouvelée et en l'absence de
renouvellement les effets seront interrompues.
Par ailleurs, les créances fiscales, douanières, de sécurité et de prévoyance
sociale peuvent toujours être privilégiés même lorsqu'elles excèdent le
montant prévue par l'article 180 en son Alinéa 5 et 6. A condition toutefois que
ce privilège soit inscrit dans les 6mois qui suivent l’exigibilité de la créance.
La publicité au RCCM qui se matérialise par l'inscription est donc d'une
importance capitale pour les créanciers de douane, de fisc et sécurité sociale.
En effet c'est par celle-ci qu’ils seront préférés aux autres et à défaut, ceux-ci
redeviennent de simples créanciers chirographaires. Ainsi ils perdront tous
leurs privilèges.
Dans le même sens, les créanciers munis d'un privilège général suivent. Sauf
que ceux-ci ne sont pas soumis à publicité selon l'ordre établie par l'article 180
précité.
Il ressort de cet article que, les créances fiscales, douanières, de la sécurité et
prévoyance sociale sont privilégiées sans exigence de publicité préalable, pour
la somme que chaque État fixe pour l'exécution provisoire des décisions de
justice.
Les créances fiscales se fondent sur le fait que l'Etat représente tout le monde.
Et que les créances octroyées par lui profitent à tous et donc doivent être

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remboursées en priorité. Ces créances recouvrent en général les impôts, taxes,
pénalités liquidés par les services des impôts etc…
Le privilège douane quant à lui couvre les frais dus à l'Etat au titre d'opérations
douanières comme les droits de taxes, amende, et restitution.
Le privilège de sécurité et de prévoyance sociale, profite aux organismes de
sécurité et de la prévoyance sociale pour les cotisations qui leurs sont dues
notamment par les employeurs et éventuellement les travailleurs.
Enfin, l’AUS cite les créanciers chirographaires. Ils sont les derniers du rang. Ils
interviennent à deux conditions : D’abord il faut qu'ils soient munis d'un titre
exécutoire. Ensuite, il faut qu’ils soient intervenus dans la procédure par voie
de saisie ou d’opposition. Cela se justifie par le fait qu’il s’agisse d’un débiteur
in bonis. Il convient de noter qu’en l’absence de titre exécutoire, les créanciers
chirographaires peuvent être accueillis en tant que créancier par le débiteur
lui-même et les créanciers détenant un titre exécutoire.
L’ordre de disposition des deniers provenant de la réalisation des biens
meubles n’est pas le même que celui des deniers provenant de la réalisation
des biens meubles

B- EN MATIERE MOBILIERE

La distribution du prix de la réalisation des biens meubles à l’instar de des biens


immeubles développé plus haut se fait selon un ordre bien précis prévu par
l’article 226 de l’AUS.
Aux termes de cet article, les deniers provenant de la réalisation des meubles
seront distribués selon un ordre ; toutefois, cela ne doit pas porter préjudice à
un éventuel droit de rétention ou d’un droit exclusif au paiement.
Entendons par là que l’ordre de distribution du prix de réalisation tel qu’établis
par l’article 226 intervient dans la mesure aucun droit de rétention ou droit
exclusif au paiement n’est exercé par ledit bien.
Au premier rang donc, que ce soit dans la réalisation des biens meubles comme
dans la réalisation des biens immeubles comme développé plus haut ce sont les

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créanciers en charge des frais de procédure pour la réalisation des biens du
débiteur et leur distribution.
Au second rang, il y’a les créanciers de frais de conservation d’un bien du
débiteur dans l’intérêt des créanciers dont le titre est antérieur en date.
En effet, certains créanciers exposent des frais ou fournissent des prestations
en vue de conserver un bien du débiteur ; à ceux-ci la loi accorde un droit de
préférence sur le meuble conservé.
Au troisième rang, il y a les créanciers de salaires superprivilégiés
Quant aux créanciers garantis par un privilège général, un gage ou un
nantissement, ils sont placés au quatrième rang.
Ils sont payés après réalisation du bien meuble sur lequel existe le gage ou le
nantissement, chacun à la date de son opposabilité aux tiers.
Viennent ensuite, les créanciers munis d’un privilège général non soumis à
publicité. C’est l’article 180 de l’AUS qui les consacre et les classe. Rappelons
que la liste donnée par l’article n’est pas exhaustive l’acte uniforme laissant la
possibilité aux états partie d’en prévoir tout en précisant leur rang.
Au titre des privilèges généraux sans publicité, on peut citer conformément à
l’article 180 les sommes dues aux auteurs d’œuvres intellectuelles, littéraires et
artistiques pour les trois dernières années ayant précédé le décès du débiteur.
Au dernier rang, on retrouve les créanciers chirographaires qui eux participent
à la procédure de distribution soit par voie de saisie ou par voie d’opposition à
condition d’être muni d’un titre exécutoire.
En cas d’insuffisance des deniers pour désintéresser les créanciers du rang
1,2,3,4,6,7 venant à rang égal, le dernier alinéa de l’article 226 précise qu’ils
concourent à la distribution dans la proportion de leurs créances totales, au
marc le franc.
Les privilèges généraux ne sont pas les seules prévus par l’acte uniforme.

II- L’ORDRE DES PRIVILEGES SPECIAUX

A- LES DIFFERENTS TYPES DE PRIVILEGES SPECIAUX

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Avant tout propos, il convient de préciser que les privilèges spéciaux ne portent
que sur les biens meubles à la différence des privilèges généraux qui peuvent
Quant à eux porter aussi bien sur les biens meubles que immeubles.
D’abord il cite le privilège du bailleur d’immeuble qui a un privilège sur les
meubles garnissant les lieux loués. Le privilège porte sur les « meubles
garnissant les lieux loués 5» ou meubles meublant, c'est-à-dire les meubles qui
se trouvent dans l’immeuble loué qu’il s’agisse des meubles appartenant au
locataire ou aux tiers. Peut bénéficier du privilège, tout bailleur d'immeuble
que le bail soit commercial ou civil (à usage d'habitation), écrit ou verbal, qu'il
soit le propriétaire, l'usufruitier ou même un locataire principal en cas de sous
location.
Ensuite, Vient le tour des privilèges dont bénéficient les transporteurs
terrestres excluant ainsi les transports
Maritimes ou aérien. La particularité de ce privilège résulte dans le fait qu'un
lien de connexité doit exister entre la marchandise transportée et la créance.
Autrement dit l'on ne peut invoquer ce privilège que lorsque la créance dont
bénéficie le transporteur résulte de manière directe et total du transport de la
marchandise. Il s'agira ainsi de frais de transports, les frais liés à la conservation
de la marchandise.
il faut évoquer les privilèges reconnus aux travailleurs d’un ouvrage a
domicile6. Ces deniers s’apparentent le plus souvent aux travailleur Sauf qu’ils
sont liés à des employeurs particuliers qui exerce à domicile. Et généralement
dans l’exercice de leurs activités ces employeurs ont recours à des salariés qui
bénéficient de ce type de privilège en obtenant le droit de se faire payer sur les
sommes reçus à l’occasion de l’exercice de l’activité s’ils ne le sont pas encore.
En plus il faut ajouter les privilèges des travailleurs et fournisseurs des
entreprise de travaux7. Ce privilège ne peut être utiliser qu’en cas d’exécution
d’un marché de travaux aussi bien dans le domaine privé que public. Le
privilège est constitué par les sommes dues à l’entrepreneur par le maître de
l’ouvrage au titre du marché qui a donné lieu à la ou fourniture de travail. On
ne parlera plus de privilège lorsque le paiement est effectué entre les mains de

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Article 184 AUS

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Article 186 AUS

7
Article 187 AUS

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l’entrepreneure. Il importe de préciser que selon la loi les travailleurs sont
payés par préférence aux fournisseurs en cas de concours entre eux.
A tout ce qui vient d’être dit il est judicieux d’ajouter les privilèges des
commissionnaires sur les marchandises qu’ils détiennent8. Le commissionnaire
est une personne qui en vertu d’un mandat agit en son nom propre et pour le
compte du commettant. A ce titre il peut arriver que le commissionnaire
dépose, consignes ou expédies des marchandises qui appartiennent au
commettant ou pas. Quoi qu’il en soit le concessionnaire bénéficie de privilèges
spéciaux lui permettant de se faire payer sur le prix de ces marchandises. Il
peut arriver cependant que l’on prête à confusion les privilèges du transporteur
et ceux du concessionnaire. Mais pour dissiper toutes doutes on retiendra que
l’on exige un lien de connexité dans les privilèges du transporteur ce qui n’est
pas le cas du concessionnaire.
Et enfin les privilèges des frais de conservation9, qui peuvent être prévus ou pas
dans tous les cas il faut que ces frais évaluables en argent aient eu simplement
pour but d’éviter la disparition totale ou partielle de la chose ou de préserver
son usage le privilège port sur les meubles qui ont bénéficié des frais et
prestations uniquement.

B- CONCOURS ENTRE LES CREANCIERS MUNIS DE PRIVILEGES SPECIAUX

Au vu de tout ce qui a été énoncé en amont, il revient qu’il y a effectivement


des situations dans lesquelles les créanciers qui rentrent en concours
bénéficient tous d’un privilège général. Dans cette hypothèse, ce sont les
articles 179 à 181 qui règlent l’ordre de désintéressement des créanciers. Il y a
également des situations dans lesquelles les créanciers qui bénéficient de
privilèges généraux rentrent en concours avec ceux qui bénéficient de
privilèges spéciaux, cette situation est également réglée par l’article 226 de
l’AUS.
Cependant il existe des situations dans lesquelles les créanciers en concours
sont tous munis d’un privilège spécial sur le même bien meuble. Dans cette

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Article 188 AUS

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Article 189 AUS

8
situation une seule solution a été retenue : la préférence est accordée au
premier saisissant et après lui, aux saisissants et opposants ultérieurs par
application de l'article 226, 5° de l’acte uniforme portant organisation des
sûretés. On peut se poser la question de savoir pourquoi le législateur n’a pas
établi un rang, c’est-à-dire un ordre de distribution ou encore un classement
des privilèges spéciaux, comme pour les privilèges généraux.
À cette question nous répondons que les privilèges spéciaux ne font peut-être
pas l’objet d’un classement comme les privilèges généraux, mais qu’il est bien
de considérer l’article 226, 5• comme l’ordre de distribution en présence de
créanciers bénéficiant de privilèges spéciaux et qu’au vue de l’évolution de
droit des sûretés, le législateur procédera peut-être à leur classification. Pour
l’heure considérons qu’ils sont tous au même rang et que c’est le premier
saisissant qui sera tout d’abord désintéressé et ainsi de suite.

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BIBLIOGRAPHIE

- Document
. Dr MANH YOLI BI, PROCEDURES COLLECTIVES D’APPRUREMENT DU PASSIF
. Yvette Rachelle KALIEU ELONGO, COUR DE DROIT DES SURETES (OHADA)
. François ANOUKAHA et ali, sûretés (OHADA) collection Droit uniforme Africain
- Textes de lois
. Acte Uniforme portant organisation des Sûretés
. Acte Uniforme portant Procédures simplifiés de Recouvrement et Voies
d’Exécutions
. Acte Uniforme portant Procédures Collectives d’Apurement du Passif.
. Code Civil Ivoirien

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