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Séance 1
Par jugement en date du 15 avril, le Tribunal du commerce hors classe de Dakar a prononcé
le redressement judiciaire de Monsieur Yoro et fixé au 1er mars la date de cessation des
paiements.
Ces faits sont relatifs aux effets du jugement déclaratif de redressement judiciaire à l’égard du
débiteur.
Selon les dispositions de l’article 69-1 de l’Acte Uniforme relatif aux procédures collectives
et l’apurement du passif, parmis les actes pouvant être déclarés inopposables à la masse des
créanciers, s’ils lui ont causé un préjudice sont présents “les actes à titre gratuit translatifs de
propriété mobilière ou immobilière faits dans les six mois précédant la période suspecte”.
En l'espèce la période suspecte est comprise entre le 15 Avril et le 1er mars ce qui fait que
certains actes accomplis durant cette période peuvent être frappés d’inopposabilité à la masse
des créanciers, en outre la donation (qui est un acte à titre gratuit translatif de propriété) à la
maîtresse a eu lieu le 1er Janvier, date antérieure à la période suspecte et compris dans le
délai de six mois, ce qui fait que cette dernière est susceptible d'être déclarée inopposable si
elle porte préjudice à la masse des créanciers. Il s’agira dans ce cas-là d'une inopposabilité
facultative.
Au regard de l’article 68-1 de l’acte uniforme portant organisation des procédures collectives
d’apurement du passif “sont inopposables de droit à la masse des créanciers s’ils sont faits
pendant la période suspecte : tous les actes à titre gratuit translatif de propriété mobilière ou
immobilière”.
En l’occurrence les actes posés sont susceptibles d’être frappés d’une inopposabilité
facultative seulement si deux conditions sont réunies à savoir : celui qui a bénéficié du
paiement avait connaissance de la cessation des paiements et que ce paiement effectué porte
préjudice aux autres créanciers. En l'espèce, si le paiement de la dette du commerçant à son
beau frère avait causé préjudice à la masse des créanciers et que ce dernier avait conscience
de l’état de cessation de paiement, malgré l’échéance de la dette elle serait frappée d’une
inopposabilité facultative.
Selon l’article 212 du Code des Obligations Civiles et Commerciales, “Sans pouvoir être
contraint de recevoir une autre chose que celle qui lui est dûe, le créancier peut convenir avec
le débiteur d’une prestation de remplacement en nature.”. Cette prestation sera la dation en
paiement. De plus, le 4e point de l’article 68 de l’AUPC dispose que les paiements des dettes
échues par un procédé anormal peuvent être considérés inopposables dès lors qu’ils sont
effectués dans la période suspecte.
En l’espèce, la date du 15 mars est incluse dans la période suspecte située entre le 1er Mars et
le 15 Avril. De plus, dans la mesure où le commerçant n’a pas payé la dette échue en se
servant de la contrepartie initialement prévue mais a plutôt opté pour une prestation en nature
il s’agit d’une dation en paiement. En considération de ces différents paramètres, le paiement
de la dette pourra être frappé d’une inopposabilité de droit.
E. Le contrat conclu le 1er Avril par lequel Mr. Yoro prend à bail un entrepôt
nécessaire à son exploitation pour un prix nettement inférieur à la valeur
locative
En l'espèce le paiement du bail a eu lieu le ler Avril soit durant la période suspecte néanmoins
le bail était à un prix nettement inférieur à la valeur locative, on ne peut donc possiblement
parler d'un déséquilibre des obligations au détriment du débiteur.
F. Un paiement réalisé le 15 Mars au moyen d’une cessation de créances,
conformément aux usages de la profession
Relativement au paiement des dettes lorsque ces dernières sont non échues, leurs paiements
sont inopposables de droit à la masse de créanciers si elles sont effectuées durant la période
suspecte comme en dispose l’article 68-3 de l'AUPC. Néanmoins, les paiements de dettes
échues qui ont lieu par le biais d’un “mode normal de paiement ou communément admis dans
les relations d’affaires du secteur d’activité du débiteur ” ne sont pas frappés d'inopposabilité
de droit (art 68-4) .
En l'espèce le paiement s’est effectué le 15 Mars soit durant la période suspecte, par
conséquent vu que la dette a été payée conformément aux usages de la profession, si elle était
non échue elle serait inopposable de droit à la masse de créanciers. Néanmoins, si cette
dernière avait atteint son échéance, dans ce cas bien qu’effectué dans la période suspecte, le
paiement serait régulier car conforme aux usages de la profession , ainsi l’inopposabilité de
droit sera écartée.
En l'espèce le Parquet ne pourra pas agir à la place du représentant des créanciers si ils ne ne
demandent pas l’inopposabilité de tout ou partie de ces actes, cette compétence est exclusive
au(x) syndic(s).
2. Les créanciers pourront-ils agir individuellement sur la base d’une action paulienne ?
La masse des créanciers ne peut recourir qu’aux inopposabilités de droit ou facultative dans
la mesure où les poursuites individuelles sont suspendues; ils ne pourront par conséquent pas
recourir à une action paulienne qui est dans le domaine des procédures collectives inefficaces.
Situation 2
Par un jugement du 04 février 2022, le Tribunal du commerce hors classe de Dakar déclare la
société en espèce en état de cessation des paiements depuis le 04 décembre 2021. Néanmoins,
un concordat de redressement a été conclu avec les créanciers étant donné que ladite société
avait encore des chances d’être sauvée. Quoi qu’une homologation n’a pas encore été
effectuée par le tribunal. Malgré tout cela, le DG de la société va quand même continuer à
effectuer des actes liés à la gestion sans l’autorisation du syndic.
En l’espèce, par un jugement du 04 février 2022, la société “Au carrefour du Doigt” a été
déclarée être en état de cessation des paiements depuis le 04 décembre 2021. Néanmoins, un
concordat de redressement a été conclu avec les créanciers étant donné que ladite société
avait encore des chances d’être sauvée. Au regard de cette situation, le directeur général de la
société a continué à effectuer un certain nombre d’actes de gestion. Plus précisément un
renouvellement d’une hypothèque arrivée à expiration qui constitue un acte conservatoire;
cela sans l’autorisation du syndic.
Eu égard à la disposition précitée, le dirigeant de ladite société peut accomplir seul les actes
conservatoires et ceux de gestion courante. Ainsi, l’on peut retenir que le directeur général
d’une entreprise en état de cessation des paiements peut procéder au renouvellement d’une
hypothèque arrivée à expiration.
En principe, deux hypothèses peuvent se présenter à nous. D’après d’une part l’article 110 de
l’acte uniforme relatif à l’organisation des procédures collectives, “Lorsque des licenciements
pour motif économique présentent un caractère urgent et indispensable, le syndic peut être
autorisé à y procéder par le juge commissaire selon la procédure prévue par le présent
article et le suivant, nonobstant toute disposition contraire mais sans préjudice du droit au
préavis et aux indemnités liées à la résiliation du contrat de travail”; et d’autre part l’article
52 alinéa 2 de l’acte uniforme relatif à l’organisation des procédures collectives d’apurement
du passif, “le débiteur peut accomplir valablement, seul, les actes conservatoires et ceux de
gestion courante entrant dans l’activité habituelle de l’entreprise, conformément aux usages
de la profession, à charge d’en rendre compte au syndic”.
En l’espèce, le directeur général d’une société en état de cessation des paiements a procédé au
licenciement d’une partie du personnel sans obtenir l’autorisation du syndic. Nous pouvons
faire face à deux hypothèses: s’il s' agit d' un licenciement ordinaire pour faute, ce dernier
sera considéré comme un acte de gestion courante, conformément à l’article 52 alinéa 2. De
ce fait, il n’aura pas besoin de l’autorisation du syndic; il devra cependant lui rendre compte.
Néanmoins il ne peut licencier une partie du personnel de surface, s’il s’agit d’un
licenciement pour motif économique indispensable ou urgent, il reviendra au syndic de le
faire après accord du juge commissaire.
Situation 3
1) Dès lors, se posent les questions à savoir, quel sera le sort de cette sûreté ? Ce
fournisseur pourra-t-il être admis dans la masse des créanciers?
En l’espèce, la période suspecte se situe entre le 03 janvier 2021 et le 12 mars 2021, dont
deux (2) mois et 9 jours. La sûreté dont bénéficie Moussa Fall, le fournisseur, est constituée
deux mois avant la date de cessation des paiements, à savoir le 03 novembre 2020 plus
précisément, donc bien avant. Étant ainsi incomprise dans la période suspecte, la sûreté dont
bénéficie Moussa Fall est régulière et opposable. Le fournisseur Moussa Fall rentre, par
conséquent, dans la masse des créanciers.
En principe, les créanciers dont les droits sont nés régulièrement après la décision
d’ouverture, de toute activité régulière du débiteur ou du syndic, sont des créanciers “contre
la masse”. Ils bénéficient d’un droit privilégié d’être payés car leurs prestations sont
présumées avoir profité à la masse ou au débiteur au désarroi.
Dans la mesure où la créance est issue d’une réparation effectuée sur le matériel de stockage
de produits frais destinés à la restauration du personnel on considère qu’elle tient à une
activité régulière du débiteur, par conséquent, malgré sa naissance bien après la décision
d’ouverture, elle sera opposable à la masse des créanciers.
Le prestataire d’une société dont la cessation de paiement a été prononcée peut-il demander
un droit réel accessoire pour garantir sa créance ?
En l'espèce le partenaire aura la possibilité de demander une sûreté réelle si elles prennent en
compte les deux hypothèses ci-dessus, si le débiteur est en redressement judiciaire il devra
nécessairement être assisté pour les actes concernant l’administration et la disposition de ces
biens; si il s’agit d’une liquidation des biens il devra se faire représenter par le syndic pour les
effectuer. Le débiteur ne pourra effectuer seul des actes d’administration ou de dispositions,
cependant à travers ces précédentes dispositions, le partenaire pourrait effectivement
bénéficier d’un droit accessoire si le débiteur respecte les voies légales mises en place dans ce
cas de figure.
3) Quel est le sort d’une libéralité effectuée à l'endroit d'un des proches des
dirigeants d'une entreprise en cessation de paiements ?
Selon les dispositions de l’article 68-1 de l’AUPC, les actes à titre gratuit translatifs de
propriété mobilière ou immobilière accomplis durant la période suspecte sont inopposables
de droit à la masse. De plus, il ressort des dispositions de l'article 71 de l'AUPC dans la
mesure où l'inopposabilité profite à la masse “l'acte à titre gratuit déclaré inopposable est
privé d'effet s'il n'a pas été exécuté. Dans le cas contraire, le bénéficiaire de la libéralité doit
rapporter le bien dont la propriété a été transférée gratuitement”.
En l'espèce, la période suspecte s'étale du 3 Janvier 2021 au 12 Mars 2021, la libéralité étant
effectuée le 7 Janvier, se situe dans l'intervalle de la période suspecte. Par conséquent il se
devra de restituer la libéralité qui constitue un acte à titre gratuit inopposable de droit dans la
mesure où elle profite à la masse des créanciers.
Le 3e alinéa de l'article 72 de l'AUPC dispose que “la masse est constituée par tous les
créanciers dont la créance est antérieure à la décision d'ouverture, même si l'exigibilité de
cette créance était fixée à une date postérieure à cette décision à condition que cette créance
ne soit pas inopposable en vertu des articles de 68 et 69 ci-dessus”.
En l'espèce, le frère d’un des dirigeants ne pourra prétendre à rejoindre la masse de créanciers
dans la mesure où il a bénéficié d’une libéralité bien qu’elle se soit effectuée avant la décision
d'ouverture car cela ne fait pas de lui un créancier. Il n’aurait pu la rejoindre quelque soit la
nature de l’acte dans la mesure où ce dernier est déclaré inopposable de droit .