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LABORATOIRE DE TOXICOLOGIE ET HYGIÈNE AGRO-INDUSTRIELLE (LTHAI)

COURS MAGISTRAL

TOXICOLOGIE GÉNÉRALE
L3 SCIENCES PHARMACEUTIQUES

AISSATA DIAKITE, PharmD, PhD


Maitre de Conférences Agrégée
diakite.aissata@ufhb.edu.ci

23-05-24 Toxicologie Générale ---- Dr DIAKITE A. 1


TITRE

TOXICOLOGIE DES PESTICIDES


ORGANOPHOSPHORÉS

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OBJECTIFS

1) Décrire la toxicocinétique des pesticides OP

2) Expliquer clairement le mécanisme d’action toxique des OP

3) Citer les 3 syndromes qui caractérisent l’intoxication aux OP

4) Décrire les signes de l’intoxication aux OP lors du syndrome


précoce

5) Expliquer l’intérêt et le principe des méthodes d’analyses


toxicologiques (diagnostic)

6) Connaitre les principes du traitement des intoxications aux OP

7) Décrire à l’aide d’un schéma le mode d’action du Pralidoxime


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PLAN DU COURS

INTRODUCTION
CARACTÉRISTIQUES PHYSICO-CHIMIQUES
ÉTIOLOGIE DES INTOXICATIONS
TOXICOCINÉTIQUE
MÉCANISME D’ACTION TOXIQUE
SIGNES D’INTOXICATION
ANALYSES TOXICOLOGIQUES
PRISE EN CHARGE DES INTOXICATIONS
CONCLUSION

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INTRODUCTION

Ø PesNcides organiques de synthèse, largement uNlisé en


agriculture comme insecNcides, némacides ou acaricides

Ø Toxiques potenNellement létaux en cas d’intoxicaNons aiguës,


parNculièrement fréquentes dans les pays en développement

Ø L’OMS (2008) esNme à 3 millions le nombre de cas


d’intoxicaNons aux pesNcides par an, entrainant plus de
250,000 décès

Ø Parmi les nombreux insecNcides pouvant entrainer la mort, les


insecNcides organophosphorés (POP) sont les agents les plus
notoire en raison de leur toxicité élevée (OMS, 2012)

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CLASSIFICATION DES PESTICIDES

Selon Alain Viala (Toxicologie, 2éme ÉdiHon, Lavoisier)


En foncHon de la cible des pesHcides

1- InsecHcides, acaricides, nématocides;


2- Fongicides
3- Molluscicides
4- RodenHcides
5- Herbicides

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CARACTÉRISTIQUES PHYSICO-CHIMIQUES

Ø ApparHennent à la classe des insecHcides


Ø Liposolubles, mais rapidement dégradés
Ø UHlisaHons principales
* En agriculture
* Arme chimique (tabun, sarin, soman, VX)
Ø Les OP sont souvent appliqués en agriculture avec des solvants
organiques de type pétrolier
Ø Contrairement aux organochlorés, ils sont rapidement hydrolysés dans
le sol et les végétaux très peu de résidus d’OP dans l’eau et les
aliments

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STRUCTURE CHIMIQUE
Les OP répondent à la formule générale: Esters Phosphorés

X : halogène, thiocyanate, carboxylate, etc

R1 = R2 = - CH3 dérivés diméthoxylés


Expl: dichlorvos, diméthoate, malathion

R1 = R2 = -CH2-CH3 dérivés diéthoxylés


Expl: chlorpyrifos, diazinon, parathion

Les OP présentent une structure chimique commune mais diffèrent considé-


rablement dans leurs propriétés physico-chimiques et pharmacologiques.

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PROPRIÉTÉS PHYSICO-CHIMIQUES

Déterminant
majeur de classe
Basique

CLASSE I: X : ammonium quaternaire è PUISSANT POUVOIR TOXIQUE

CLASSE II: X:F è * POUVOIR TOXIQUE = CLASSE I Gaz de combat


* TENSION DE VAPEUR ÉLEVÉE TABUN

CLASSE III: X : CN, OCN, SCN è TOXICITÉ INTERMÉDIAIRE II/IV SARIN

CLASSE IV: X : AUTRES è AGRICULTURE

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ÉTIOLOGIE DES INTOXICATIONS AUX OP

Les OP peuvent pénétrer dans l'organisme et provoquer des symptômes


d'intoxicaNon selon trois modalités:

1- Par ingesNon (voie orale): c'est le mode le plus fréquemment uNlisé pour des
tentaHves de suicide ou d’homicide volontaire

2- Par contact cutané (voie transdermique): la voie la plus fréquente, elle est
surtout accidentelle

3- Par inhalaNon: ceqe voie d'intoxicaNon est fréquente lors des pulvérisaHons

Ces deux dernières voies se rencontrent fréquemment en milieu professionnel.

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TOXICOCINÉTIQUE – ADME - 1

ABSORPTION

Ø La pénétraNon dans l’organisme est possible par toutes les voies :


digesNve, respiratoire, conjoncNvale et cutanée
Ø L’absorpNon par voie orale est rapide et importante soit 70 à 100 % de la
dose ingérée
Ø La pénétraNon percutanée est relaNvement faible: 1 à 6% de la quanNté
d’OP déposée
Ø La voie respiratoire n’est pas quanNfiée

L’absorpNon est favorisée par les solvants organiques et par l’hypersudaNon

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TOXICOCINÉTIQUE – ADME - 2

DISTRIBUTION

Ø Les OP se distribuent dans tous les Nssus; traversent facilement la


barrière hémato-encéphalique, et se concentrent dans le foie, rein,
et Nssus adipeux

Ø Les composés les plus liposolubles (diazinon, fenitrothion, parathion)


font l’objet de stockage dans les graisses et sont responsables de
symptômes retardés et des évoluNons prolongées (phénomène de
relargage)

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TOXICOCINÉTIQUE – ADME - 3

BIOTRANSFORMATION

Ø Certaines molécules peu acNves par elles-mêmes, subissent une


acNvaNon métabolique par oxydaNon

Ø Le métabolisme oxydaNf hépaNque est fréquemment une condiNon


nécessaire à l’acNvaNon métabolique : transformaNon en « oxons »
toxiques avec risque d’évoluNon prolongée et de rechutes

Parathion (thiophosphateoxydase) est oxydé en paraoxon

Malathion se transforme en malaoxon

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TOXICOCINÉTIQUE – ADME - 4

ÉLIMINATION

Ø 80 à 90% de la quanNté résorbée sont éliminés dans les urines, dans les
48 heures sous forme métabolisée

Ø Les métabolites hydroxylés donnent lieu à des conjugaisons avec l’acide


glucuronique

Expl: Le parathion subit une hydrolyse avec formaNon de paranitrophénol


(hydrosoluble) éliminé dans les urines

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MÉCANISME D’ACTION TOXIQUE -1
Les OP ont une ac9on an9cholinestérasique
L’acétylcholine est un médiateur chimique nécessaire à la transmission de
l’influx nerveux. Elle est présente au niveau de la plaque motrice et des
synapses du SNC et du SNAutonome
Dans les condi9ons normales, les cholinestérases sont des enzymes qui
assurent l’hydrolyse de l’acétylcholine en choline et acide acé9que

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MÉCANISME D’ACTION TOXIQUE - 2

AccumulaHon ACh è acHvaHon incontrôlée des synapses


cholinergiques (R muscariniques et nicoHniques)

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MÉCANISME D’ACTION TOXIQUE - 3

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SYMPTOMATOLOGIE DES INTOXICATIONS -1

INTOXICATION AIGUË

Trois syndromes dont l’appariNon est étalée dans le temps, ce


qui explique leur dénominaNon :

* syndrome précoce

* syndrome intermédiaire

* syndrome tardif

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SYMPTOMATOLOGIE DES INTOXICATIONS -2
SYNDROME PRÉCOCE (30-60 min après ingesHon)
Associe trois syndromes: muscarinique, nicoHnique et central qui se
succèdent
Syndrome muscarinique: myosis serré, rhinorrhée, hypersialorrhée, bronchorrhée,
œdème pulmonaire, augmentaNon du péristalNsme avec défécaNon et micNons
involontaires, bradycardie, hypotension et dyspnée asthmaNforme par bronchospasme

Syndrome nico9nique (par dépolarisaNon persistante du muscle strié) : asthénie


intense, faiblesse musculaire, parésie, paralysie respiratoire et fasciculaNons
musculaires. La sNmulaNon sympathique est à l’origine d’une hypertension
artérielle, tachycardie

Syndrome central: état confusionnel, anxiété, céphalées, ataxie, coma avec


convulsions et enfin paralysie des centres respiratoires

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Muscarinic

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SYMPTOMATOLOGIE DES INTOXICATIONS -3
SYNDROME INTERMÉDIAIRE

Il est inconstant et survient 48 à 96 heures après la phase précoce

Se caractérise par des déficits des muscles proximaux des membres, des
muscles fléchisseurs du cou, des muscles fléchisseurs de la nuque, des
paires crâniennes et des muscles respiratoires

Ce syndrome coïncide avec l’inhibiNon prolongée de l’acétylcholinésterase

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SYMPTOMATOLOGIE DES INTOXICATIONS - 4
SYNDROME TARDIF

Ø La polyneuropathie retardée indépendante du syndrome


intermédiaire est observée 2 à 3 semaines après une
exposition aigue
Ø Elle se manifeste par des paresthésies, une parésie d’abord
distale, puis d’évolution centripète
Ø L’EMG montre une atteinte distale avec signes de
dénervation
Ø La résolution est très lente
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SYMPTOMATOLOGIE DES INTOXICATIONS - 5

INTOXICATIONS CHRONIQUES

Les répéNNons des exposiNons aux organophosphorés peut entraîner,


du fait de la lenteur de la régénéraNon spontanée des cholinestérases,
des signes d’intoxicaNon à type de:

ü Neuropathie périphérique

ü ManifestaNons neurologiques avec modificaNon du


comportement, de l’affecNvité, de la mémoire, de la vigilance

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TOXICOLOGIE ANALYTIQUE - 1
RECHERCHE DE MARQUEURS BIOLOGIQUES D’EXPOSITION AUX OP

• l’Acétylcholinestérase (ACHE) ou Cholinestérase érythrocytaire


(globulaire) ou Cholinestérase vraie
- synthéNsée dans le globule rouge
- présente au niveau des synapses dans SNC et joncNon neuromusculaire
- spécifique de l’exposiNon aux inhibiteurs de la cholinestérase (OP+carbamates)

• la Butylcholinestérase (BCHE) ou Cholinestérase sérique/plasmaHque ou


Pseudocholinestérase
- synthéNsée dans le foie
- ubiquitaire: plasma ou sérum, foie, pancréas, intesNn
- indicateur sensible et précoce de l’exposiNon aux inhibiteurs de la CHE
- moins spécifique que ACHE
- facile a doser
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TOXICOLOGIE ANALYTIQUE - 2
INTERPRÉTATION: ACTIVITÉ DES CHOLINESTERASES

L’intensité ou la gravité de l’intoxicaHon par les OP est liée à l’abaissement


de l’acHvité des cholinestérases AChE ou BChE vs acHvité sujet non exposé

baisse inf à 20% : AcNvité considérée normale, baisse


non significaNve

baisse entre 20 et 40 % : AcNvité légèrement abaissée, surveillance


de signes cliniques, traitement si appariNon de signes

baisse sup à 40% : AcNvité significaNvement abaissée,


traitement symptomaNque, décontaminaNon, traitement spécifique,
retrait de poste si applicateur de pesNcides
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TRAITEMENT -1

La prise en charge des intoxicaNons par les Organophosphorés (OP)


associe parallèlement :

Ø le traitement symptomaHque des défaillances vitales

Ø la décontaminaHon

Ø le traitement spécifique (atropine, pralidoxime)

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TRAITEMENT - 2

Traitement symptomaHque

ü OxygénaNon.

ü AspiraNon bronchique répétée

ü IntubaNon, venNlaNon en cas de détresse respiratoire

ü Remplissage vasculaire, uNlisaNon d’amines vasoacNves,

correcNon des troubles hydroélectrolyNques

ü Diazépam si convulsions

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TRAITEMENT - 3

DécontaminaHon

ü En cas d’ingesHon: le lavage gastrique ne doit être praNqué


que dans l’heure suivant l’ingesHon
ü Dans les formes sévères, le lavage gastrique ne doit être
praNqué qu’après stabilisaHon du paNent
ü L’efficacité du charbon acHvé n’a pas été démontré
ü Après exposiHon cutanée : la décontaminaNon cutanée
comprend le déshabillage et le lavage immédiat avec de
l’eau savonneuse

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TRAITEMENT - 4

Traitement spécifique = ANTIDOTE

Atropine : agit par compéHHon avec l’acétylcholine au


niveau des récepteur muscarinique
Pas d’effet sur AChE ni sur les R nicoHniques

Pralidoxime : réacHveur des cholinestérases


corrige les effets nicoHniques et muscariniques
quand il est administré dans les 24 à 48 heures

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TRAITEMENT - 5
Mécanisme d’acHon du Pralidoxime

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TRAITEMENT - 5
Résumé de la conduite à tenir devant une intoxicaHon aux
pesHcides organophosphorés

PaHent asymptomaHque avec acHvité cholinesterasique supérieure à 50 % :


observaNon au moins six heures pour détecter l’appariNon de signes
d’intoxicaNon
Formes mineures: traitement symptomaNque, décontaminaNon, atropine, mise
en observaNon au moins 12 heures
Formes modérées et sévères : la prise en charge se fait en milieu de soins
intensifs où seront mis en œuvre des mesures de réanimaNon symptomaNques,
atropinisaNon et pralidoxime. Dans la forme sévère le lavage gastrique ne sera
praNqué qu’ une fois le paNent est stabilisé.

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CONCLUSION
• Les pesNcides organophosphorés sont des insecHcides inhibiteur de la cholinestérase
• La voie de pénétraNon la plus fréquente est la voie pulmonaire dans un contexte
professionnel (milieu agricole)
• La toxicité des OP est liée à l’inacHvaHon d’abord réversible, puis irréversible des
cholinestérases
• Trois syndromes caractérisent l’intoxicaNon aux OP: Précoce, Intermédiaire, Tardif
• Le syndrome précoce enchaîne: le syndrome muscarinique, le syndrome nicoHnique et le
syndrome central
• La mise en évidence de l’intoxicaNon aux OP repose sur le dosage de l’AChE ou de la
BChE
• Le principe du traitement de l’intoxicaHon aux OP est basé sur le traitement
symptomaHque, la décontaminaHon et le traitement spécifique
• Le traitement spécifique fait appel à l’Atropine (compéNNon R muscarinique) et le
Pralidoxime (réacNvateur AChE)
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MERCI DE VOTRE ATTENTION

Toxicologie Générale ---- Dr DIAKITE A. 35


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