Vous êtes sur la page 1sur 59

ECOLE NATIONALE DE MEDECINE VETERINAIRE

SIDI THABET

Année 2016-2017

Introduction
à l’Enseignement
de Toxicologie

PHARMACIE & TOXICOLOGIE


Pr Agrégé Samir BEN YOUSSEF
Dr Jamel BELGUITH
Dr Rim Hadiji
2

Introduction
à l’Enseignement
de Toxicologie
Chapitre 1er :
NOTIONS GENERALES, DEFINITIONS & CONCEPTS
EN TOXICOLOGIE

1. DEFINITIONS ET CONCEPTS
• EMPOISONNEMENT ET TOXIQUE
• POISON ET TOXIQUE
2. CLASSIFICATION DES TOXIQUES
2.1. Selon la nature chimique
2.2. Selon le mécanisme d’action toxique
• Toxiques caustiques
• Toxiques thioloprives
• Toxiques méthémoglobinisants
• Toxiques convulsivants
• Toxique anti-cholinestérasiques
• Toxiques provoquant des biosynthèses anormales
• Autres manifestations toxiques
2.3. En fonction de leur usage
2.4. En fonction de la nature du danger
3. ASPECTS DE LA TOXICOLOGIE
3.1. Toxicologie expérimentale
3.2. Toxicologie analytique
3.3. Toxicologie clinique
4. UTILISATION DES QUALITATIFS « AIGU » ET « CHRONIQUE
5. DOSE LETALE 50 : DL50
6. DOSE MAXIMALE TOLEREE
7. DOSE SANS EFFET (NO OBSERVED EFFECT LEVEL = NOEL)
8. DOSE JOURNALIERE ADMISSIBLE
9. LIMITE MAXIMALE DE RESIDUS : LMR
10. PPM : Partie Par Million
10.1. Composés solides
10.2. Composés gazeux
 CONCENTRATIONS DES SUBSTANCES DANS LES LIQUIDES
BIOLOGIQUES

Chapitre 2 :
MECANISMES D’ACTION DES TOXIQUES
INTRODUCTION
I. ACTION NON SPECIFIQUE
1. Action caustique et irritante
2. Liaisons covalentes
II. ACTION SPECIFIQUE
1. INHIBITION ET COMPETITION ENZYMATIQUE
3

1.1. Inhibition des cholinestérases


1.2. Inhibition d’enzymes à groupement thiols
1.3. Inhibition de la cytochrome-oxydase
1.4. Inhibition de l’époxyde réductase
1.5. Inhibition des ATPases membranaires
2. DECOUPLAGE DES REACTIONS DE PHOSPHORILATION
OXYDATIVE
3. ACTION SUR LA BIOSYNTHESE DE L’ HEME
4. ACTION SUR L’HEMOGLOBINE
4.1. Monoxyde de Carbone
4.2. Toxiques méthémoglobinisants
5. ACTION NEUROTOXIQUE
5.1. Plomb
5.2. Méthylmercure
5.3. Pyréthrinoides
5.4. Toxiques convulsivants
6. NEUROTOXICITE
6.1. Polluants organiques persistants
6.2. Méthylmercure
7. FORMATION D’IONS SUPEROXYDE
8. ACTION MUTAGÈNE
8.1. Méthylmercure
8.2. Lindane
9. TOXICITÉ EMBRYOFEOTALE
10. PERTURBATION DU SYSTÈME ENDOCRINIEN
CONCLUSION

Chapitre 3 :
TOXICOCINETIQUE
I. PENETRATION DES TOXIQUES
1. Voie digestive
2. Voie respiratoire
3. Voie cutanée
4. Autres voies
II. DIFFUSION ET DISTRIBUTION DES TOXIQUES
III. BIOTRANSFORMATIONS DES TOXIQUES
1. Formation de métabolites plus toxiques que les substances initiales
2. Détoxification
IV. ELIMINATION DES TOXIQUES
1. Voix rénale
2. Voie digestive
3. Voie pulmonaire
4. Voie mammaire
5. Œufs
4

Chapitre 1 er

Notions Générales,
Définitions & Concepts
en Toxicologie

1. DEFINITIONS ET CONCEPTS

La toxicologie est la science qui traite des toxiques, de leur nature, de


leurs propriétés physiques et chimiques, de leurs actions sur l'organisme,
des méthodes pour les rechercher, les identifier et des moyens pour traiter
leurs effets nocifs.

• POISON ET TOXIQUE

Poison vient du mot latin potio = breuvage et est synonyme de toxique.


Définir le poison n'est pas chose aisée et les nombreuses définitions
proposées sont passibles de critiques.

FABRE et TRUHAUT considèrent que :

« Une substance est un poison quand après pénétration dans


l'organisme à une dose relativement élevée en une ou plusieurs
fois très rapprochées ou par petites doses longtemps répétées,
elle provoque de façon passagère ou durable des troubles d'une
ou de plusieurs fonctions, troubles pouvant aller jusqu’ à
l’annihilation complète et amener la mort »

Dans son traité sur les effets des substances toxiques et


médicamenteuses, CLAUDE BERNARD dit à propos de la définition des
aliments, médicaments et poisons qu'il n'essayera pas de créer des
délimitations illusoires par une définition impossible !

Il n’est pas facile de définir en quoi un médicament diffère


d'un toxique, car de nombreuses, substances ont une action
thérapeutique à petites doses, une action toxique et même
mortelle à des doses plus élevées. Toute substance devient
toxique quand elle est absorbée en trop grande quantité.

Des substances peuvent se comporter, selon la dose, comme des


constituants de l'organisme, des médicaments ou des toxiques: vitamine
A, vitamine D, fluor, cuivre.
5

Comme le disait PARACELSE :

C'est la dose qui fait le poiso n !


« Dosa sola fecit venenum »

PARACELSE
Philippus Theophrastus Aureolus Bombastus von Hohenheim
(1493-1541)

• EMPOISONNEMENT ET TOXIQUE

Le terme empoisonnement désigne les troubles occasionnés par les poisons


lorsque ceux-ci sont administrés dans un but de nuire (acte de malveillance).
Quant au terme toxémie, il s'applique aux troubles dus à la production des
toxines, c'est à dire des substances toxiques produites par des bactéries ou des
parasites et véhiculées par le sang.
On parle de toxicoses, quand il s'agit de substances toxiques dues à des
perturbations des métabolismes.

2. CLASSIFICATION DES TOXIQUES

Parmi les nombreuses classifications proposées, les plus im portantes sont celles
qui se basent sur : la nature chimique du composé, le mécanisme d'action
toxique, l’usage ou enfin la nature du danger.

2.1. SELON LA NATURE CHIMIQUE,

On distingue :

• Les toxiques gazeux : Oxyde de carbone CO, ammoniac NH 3, anhydride


sulfureux…
• Les toxiques minéraux : Métalloïdes (arsenic, phosphore), métaux
(mercure, plomb, cadmium)…
• Les toxiques organiques :
Alcools, phénols, composés hétérocycliques, alcaloïdes, hétérosides…
6

2.2. SELON LE MECANISME D’ACTION TOXIQUE

Le mécanisme d'action de tous les toxiques n'est malheureusement pas connu.


Les mécanismes d'action suivants sont intéressants à considérer :

• Toxiques caustiques :

Les acides et les bases concentrés, les phénols, les halogènes, certains sels
de métaux lourds dénaturent les protéines et causent des dommages
irréversibles à toutes les cellules avec lesquelles. ils sont en contact. Ils
entraînent des brûlures chimiques, très voisines des brûlures thermiques.

• Toxiques thioloprives :

Ces toxiques (As, Pb, Hg) se fixent sur les groupements thiols - SH des
acides aminés soufrés ou des enzymes, inhibant ainsi leurs activités. Cette
inhibition enzymatique peut être levée par administration de composés
riches en groupements - SH (dimercaprol, D pénicillamine) pour lesquels
ces métaux présentent une plus grande affinité (chélateurs). Le complexe
ainsi formé est hydrosoluble et donc facilement éliminable par le rein.

• Toxiques méthémoglobinisants : nitrates et nitrites, chlorates,


paracétamol chez le chat…

Ils oxydent le fer ferreux (Fe ++) de l'hémoglobine en fer ferrique (Fe +++ ),
inapte au transport de l'oxygène, entraînent la mon par anoxie cellulaire.

• Toxiques convulsivants :

C'est le cas de la strychnine, du métaldéhyde, de la crimidine.

• Toxique anti-cholinestérasiques :

Les insecticides organophosphorés et les carbamates ont une grande


affinité pour les cholinestérases et entrent en compétition avec
l'acétylcholine qui est leur substrat naturel. Les organophosphorés sont
hydrolysés : mais une partie de leur molécule reste fixée sur les
cholinestérases qui sont ainsi progressivement inhibées. L'acétylcholine n'est
plus détruite immédiatement après la libération dans le système nerveux
s'accumule dans l'organisme provoquant des manifestations toxiques.

• Toxiques provoquant des biosynthèses anormales :

Le plomb agit sur la biosynthèse de l'hème, à partir du succinyl coenzyme


A. Le plomb perturbe la biosynthèse des porphyrines en s'opposant à la
condensation de 2 molécules d'acide delta amino-lévulinique pour former
le porphobilinogène, puis en ralentissant la transformation des
coproporphyrines en protoporphyrines et des protoporphyrines en hème.

• Autres manifestations toxiques :

Les autres manifestations de la toxicité révélées par des études


7

expérimentales (pouvoir irritant, action aIIergisante, atteinte hépatique,


rénale, sanguine, etc...) doivent également être prises en considération
pour l'évaluation du risque toxique pour les animaux.

2.3. EN FONCTION DE LEUR USAGE

On distingue les intox ications provoquées par les insecticides, les herbicides, les
fongicides et les raticides (rodenticides).

2.4. EN FONCTION DE LA NATURE DU DANGER

En fonction de divers critères (propriétés physiques et chimiques, nature et intensité des


effets toxiques, conditions d'exposition, …), les substances et préparations dangereuses
sont classées en 15 catégories de danger désignées par des abréviations et des
symboles (Pictogrammes).

 explosif : E  irritant : Xi
 comburant : O  sensibilisant : R42 et/ou R43
 extrêmement infl. : F+  cancérogène : Carc. Cat. (1, 2 ou
 facilement infl. : F 3)
 inflammable : R10  mutagène : Muta. Cat. (1, 2 ou 3)
 très toxique : T+  toxique pour la reproduction :
 toxique : T Repr. Cat. (1, 2 ou 3)
 nocif : Xn  dangereux pour l’environnement :
 corrosif : C N et/ou R52, R53, R59

3. ASPECTS DE LA TOXICOLOGIE

Trois aspects de la toxicologie sont à distinguer :

 La toxicologie expérimentale,
 La toxicologie analytique,
 La toxicologie clinique.
8

3.1. TOXICOLOGIE EXPERIMENTALE

C’est la partie de la toxicologie ayant pour objet :

 L'évaluation de la toxicité aiguë d'une substance que l'on exprime


par la dose qui après administration unique entraine la mort de 50
% des animaux: c' est la dose létale 50 ou DL 50
 L’évaluation de la toxicité à court terme à la suite
d’administrations répétées pendant un faible laps de temps.
 L’évaluation de la toxicité à moyen et long terme, notamment du
pouvoir carcinogène.
 L’évaluation de la toxicité pour la descendance avec étude des
effets sur la fécondité, sur le produit de la conception à tous les
stades de la gestation (action embryoléthale, tératogène) et après
sa naissance.

3.2. TOXICOLOGIE ANALYTIQUE

Elle a pour objet l'étude des différentes méthodes analytiques


(chromatographie en phase gazeuse, chromatographie en phase liquide
haute performance, spectrophotométrie d'absorption atomique ...) mises
en œuvre pour rechercher les toxiques dans les prélèvements biologiques
afin de confirmer une suspicion d'intoxication.

3.3. TOXICOLOGIE CLINIQUE

C'est la partie de la toxicologie qui concerne l'étude clinique des


intoxications. Elle s'intéresse aux causes et circonstances, aux doses
toxiques, au mécanisme d'action toxique, aux symptômes et aux lésions
observées, au diagnostic clinique et différentiel et au traitement des
intoxications.

Ainsi le domaine d'application de la toxicologie, autrefois limité a l’étude


des empoisonnements volontaires ou accidentels et des intoxications de
nature professionnelle, s'est étendu peu à peu, au fur et à mesure que la
nature du toxique se précisait, pour une meilleure appréciation de leurs
effets.

Actuellement, elle s'applique à l'étude des effets nocifs potentiels des


médicaments, des cosmétiques, des produits phytosanitaires utilisés en
agriculture, des additifs alimentaires pour l'homme ou les animaux et de
tout produit chimique nouveau.

La plupart des substances de la chimie moderne font partie intégrante de


notre environnement. Selon WHITE, elles sont au nombre de 70 000 et
chaque année apporte un contingent de 1 000 substances chimiques
nouvelles dont les effets au niveau de la sante humaine, animale et sur
celle de notre environnement sont à étudier.
9

4. UTILISATION DES QUALITATIFS « AIGU » ET « CHRONIQUE »

Ces adjectifs ont un sens différent en toxicologie expérimentale et en


toxicologie clinique.

En toxicologie expérimentale :

• « Toxicité aiguë » est synonyme de «toxicité par administration


unique ».
• « Toxicité sub-chronique » et « chronique » sont utilisées pour
désigner les épreuves de toxicité à court, moyen ou long terme.
Pour éviter toute ambigüité, il est préférable de préciser la
longueur de l'essai : toxicité par administration répétée pendant
30 jours, 90 jours, 1 an, 2 ans.

En toxicologie clinlque :

• Les qualificatifs « aigu » el « chronique » sont surtout utilisés pour


décrire l'intensité et la rapidité d'apparition des symptômes.
• Les intoxications aiguës surviennent le plus souvent à la suite de
l'ingestion d'une dose unique ou de doses répétées pendant une
courte période (24 heures). Elles se manifestent rapidement,
d'une façon intense. Dans certains cas cependant (saturnisme), un
épisode aigu peut survenir à la suite d'ingestion pendant plusieurs
semaines du toxique (Plomb).
• On utilise le terme intoxication subaiguë pour désigner des
manifestations moins violentes que celles des intoxications aiguës.
• Les intoxications chroniques résultent d'expositions répétées
au toxique. Elles se traduisent généralement tout au moins au
début de l'intoxication par des symptômes peu intenses et à
évolution lente qui peuvent atre réversibles ou non. Dans certains
cas, l'administration répétée augmente très fortement le risque
toxique. C'est le cas des anticoagulants coumariniques et dérivés
de l'indane-dione. La dose létale de coumafène est d'environ 50
mg/kg pour le chien en administration unique et de 5 mg/kg /j
pendant 5 à 10 jours (administration répétée).
• De même, un certain nombre de toxiques cumulatifs (plomb,
cuivre, mercure, fluor) ne provoquent des symptômes que lors
d'ingestion prolongée de faibles doses : plusieurs semaines pour le
plomb (saturnisme), plusieurs mois pour le cuivre, plusieurs
années pour le fluor (fluorose).

5. DOSE LETALE 50 : DL50

La toxicité aiguë d'une substance chimique est évaluée par la valeur de sa


DL50, La DL50 est la dose qui entraîne la mort de 50 % des animaux à la
suite d'une administration unique. On applique également dans certains
10

cas ce concept à une administration répétée pendant une courte période


(24 heures).

Elle s'exprime en mg de produit par kg de poids vif La DL pour une


substance chimique doit toujours être indiquée pour une espèce animale
donnée et pour une voie d'administration déterminée (voie orale,
intraveineuse, sous- cutanée, intrapéritonéale, par inhalation ...).
S'il est fort utile d'avoir pour chaque substance chimique, la DL 50 par voie
orale pour le rat ou pour la souris, il ne faut pas cependant extrapoler la
toxicité pour les autres espèces animales. C'est ainsi que, la toxicité aiguë
des insecticides organophosphorés est nettement plus importante chez
les herbivores que chez le rat.

Il en est de même pour les herbicides et notamment de l'aminotriazole,


non toxique chez le rat (DL 50 par voie orale: 24.600 mg/kg) mais toxique
dans les conditions normales d'emploi chez le mouton, espèce pour
laquelle l'ingestion d'une dose de 25 mg/kg pendant 9 jours peut être
mortelle

Pour la faune sauvage, pour rendre compte de certains risques, on


préconise : des essais de toxicité dans lesquels la substance est
administrée de façon répétée pendant cinq jours.

La toxicité pour le gibier (caille, perdrix, canard, lièvre) est la


concentration alimentaire qui provoque en 5 jours la mortalité de 50 %
des animaux.( CL50 - 5 jours). L’administration pendant 5 jours rend mieux
compte du risque présenté par 1 utilisation en agriculture des produits
phytosanitaires.

La toxicité pour le poisson est estimée par la concentration du produit


dans l'eau qui provoque 50 % pour des temps d'exposition de 24, 48 ou
96 heures soit: CL50 24 h ; CL50 48 h; CL50 96 h. Elle s’exprime en
mg/litre.

La CL50 varie en fonction du temps d'exposition (24, 48 ou 96 heures), de


la température de l'eau, de son oxygénation et des espèces utilisées.

Généralement, les salmonidés: Salmo gairdneri (Truite arc-en-ciel) sont


plus sensibles que les autres poissons tels que Lepomis macrochirus (blue
gill), Letalarus punctatus (poisson chat) ou Brachydanio rerio (poisson
zèbre).

La DL50 pour les abeilles doit être connue pour tous les insecticides
(accidents toxiques pendant la période de floraison). Elle s'exprim e en µg
de produit par abeille.
11

6. DOSE MAXIMALE TOLEREE

C'est la dose la plus forte pour laquelle aucune mortalité n'est observée
dans le cadre d'études expérimentales destinées à déterminer la DL 50. Des
symptômes d'intoxication sont observés le plus souvent. Elle s'exprime en
mg de produit par kg de poids vif. Il faut bien différencier dose maximale
tolérée et dose sans effet.

7. DOSE SANS EFFET (NO OBSERVED EFFECT LEVEL = NOEL)

C'est la dose qui à la suite d'une administration répétée pendant une


longue période (30 j à 2 ans), ne provoque absolument aucune
manifestation anormale quelle soit biochimique, microscopique,
macroscopique ou clinique chez 2 espèces de mammifères (rat, chien)
pendant la période d'administration du produit. La dose sans effet
s'exprime en mg/kg/j (milligramme du toxique par kilogramme de poids
vif de l'animal et par jour).

8. DOSE JOURNALIERE ADMISSIBLE

C'est la quantité d'un additif alimentaire qui peut être ingérée


quotidiennement par l'homme dans son régime alimentaire, même
pendant toute une vie sans entraîner chez lui aucun risque.
Cette notion s’applique à l’homme s’exprime en mg/kg de poids et
par jour. La DJA s'obtient en prenant la dose sans effet la plus faible
obtenue lors des études de toxicité par administration répétée que l’on
divise par un coefficient de sécurité (100 ou 1000)

9. LIMITE MAXIMALE DE RESIDUS : LMR

Les limites maximales de résidus (LMRs) ou « tolérances» sont les


concentrations en résidus à ne pas dépasser dans les denrées alim entaires
d'origine animale ou végétale pour éviter tout risque pour le
consommateur du fait de la présence de ces résidus.
C'est une donnée qui concerne les aliments et qui s'exprime en ppm
(ce qui correspond au mg de résidu par kg de denrée alimentaire). Pour
calculer les LMRs, il faut connaitre I la DJA puis recenser les différents
vecteurs de résidus dans les denrées alimentaires (viande, abats, lait,
œufs, fruits, légumes). Les LMRs sont établies par les diverses instances
internationales (OMS, FAO) et nationales (DGSV en Tunisie).

10. PPM : Partie Par Million

10.1. Composés solides

La ppm désigne la concentration, en poids :

1 ppm = 1 mg/kg = 1µg/g


12

Il s'agit d'une concentration et non d'une dose.

Elle est utilisée pour préciser la concentration des composés dans les
aliments ou dans les prélèvements biologiques, pour les compte rendus
des analyses toxicologiques. Les concentrations alimentaires lors
d'expériences de toxicologie où les tolérances s'expriment en ppm, de
même la teneur en plomb du foie ou du rein d'un animal suspect
d'intoxication sera donnée en ppm.

D'autre part, il faut toujours préciser si la concentration est exprimée par


rapport à l'aliment frais ou au tissu frais, ou au contraire par rapport à
l'aliment sec ou au prélèvement desséché. Lorsque la teneur en eau du
prélèvement est élevée, 80 % par exemple, si la teneur du prélèvement
frais est de 1 ppm, celle du prélèvement sec sera de : (Exercice)

Pour les faibles concentrations, on utilise la ppb (partie par billion)

1 ppm = 1 000 ppb

1 ppb = 1µg/kg = 1 ng/g

10.2. Composés gazeux

La ppm désigne des volumes. Elle correspond à 1 ml de gaz par m 3 d'air.


Certains préconisent de remplacer dans ce cas ppm par vpm (volume par
million).

On donne également, pour les composés gazeux, les concentrations en


poids : mg/ m 3) d'air. On passe de la valeur exprimée en ppm à la valeur
exprimée en mg/m 3 en multipliant par la densité du gaz.

 CONCENTRATIONS DES SUBSTANCES DANS LES


LIQUIDES BIOLOGIQUES

Les unités utilisées pour exprimer les concentrations des substances


toxiques .dans les liquides biologiques sont très nombreuses: mg % ;
mg/100 ml ; mg /l, µ/100ml ; milli-equivalent/litre, p.p.m

Depuis 1977, on préconise de prendre pour unité de quantité de matière


la mole et non le kilogramme qui est l'unité de masse.

La mole est la quantité d'un corps contenant le même nombre d'entités


(molécules, atomes, ions, radicaux ...) qu'il y a d'atomes dans 12
13

grammes de l'isotope 12 du carbone (= nombre d'AVOGADRO).

Les concentrations des substances doivent être données en moles/litres


(mol/l) ou en multiples ou sous-multiples.

Les multiples de la mole sont :

- La kilomole k mol = 10 3 moles


- La mégamole : M mol = 106 moles
- Les sous - multiples de la mole sont :
- La millimole : m mol = 10-3 moles
- La micromole : µ mol = 10 -6
14

Chapitre 2

Mécanismes d’Action
des Toxiques

INTRODUCTION

L’action toxique d’une substance chimique pour les organismes animaux


est conditionnée par sa toxicocinétique et par la sensibilité des différentes
espèces animales.

 Les toxiques non résorbés par voie orale ou par voie percutanée
auront une action localisée.
 Les toxiques capables de pénétrer dans l’organisme auront une
action plus diversifiée.

Cette action dépend des biotransformations subit qui peuvent donner


naissance à des métabolites plus toxiques (Hétérosides cyanogénétiques,
parathion , malathion ,aflatoxines, nitrates.. .)

Le malaoxon, métabolite obtenu par oxydation du malathion par les


mammifères à une toxicité également 40 fois supérieure.

L’action toxique dépend également de la localisation et de l’accumulation


de la substance et de ces métabolites. Cependant, si la toxicité de certains
éléments tels que le cuivre ou le plomb est en relation directe avec leur
accumulation dans les organes (d’où le nom de toxiques cumulatifs) dans
d’autres cas au contraire (cyanures) on observe une action toxique très
intense, malgré un métabolisme très rapide (toxique qui frappent et qui
disparaissent).

Enfin certaines manifestations sont complètement réversibles, alors que


d’autres laissent des séquelles graves.

Malgré les progrès de la biochimie moléculaire et de la toxicologie


expérimentale, le mécanisme d’action des toxiques n’est pas connu dans
tous les cas. Le mécanisme de l’action cancérigène reste à préciser ainsi
que celui des effets tératogènes.

On distingue des mécanismes d’action non spécifiques et spécifiques.


15

I. ACTION NON SPECIFIQUE

1. ACTION CAUSTIQUE ET IRRITANTE

Les acides et les bases concentrés, les phénols, les halogènes, les
sels de métaux lourds dénaturent les protéines et causent des
dommages irréversibles aux cellules avec lesquels ils entrent en contact.
Ce sont des brûlures chimiques très voisines des brûlures thermiques .La
peau et les muqueuses sont les tissus les plus exposés.

Les dérives minéraux de l’arsenic , surtout les dérives trivalents


(arsénites)exercent une action caustique nécrotique sur les muqueuses
digestives, entrainant des lésions d’ulcération et de nécrose au niveau
l’estomac et de l’intestin.

Le plomb après ingestion unique de quantités élevées de plomb, entraine


une action caustique sur le tube digestif. A doses plus faibles et répétées,
il entraine une atteinte des tubes proximaux rénaux.

Le paraquat (herbicide) est extrêmement irritant pour les muqueuses


buccal , pharyngée et digestive. Chez le lièvre, des doses nettement plus
inferieur aux doses létales provoquent des nécroses et des ulcérations
étendus et profondes de la langue, lésions fortement préjudiciables pour
les animaux.

2. LIAISONS COVALENTES

Des toxiques ou leurs métabolites peuvent se fixer fortement et d’une


façon irréversible sur les macromolécules des tissus. On constate
fréquemment une relation entre fixation (alkylation par exemple) sur
certains types de molécules et une action toxique (nécrose hépatique,
apparition de tumeurs) sans que le mécanisme exact de l’action toxique
soit compris.

II. ACTION SPECIFIQUE

Les actions spécifiques résultent d’interactions entre les toxiques et des


enzymes ou des protéines ayant un rôle bien défini dans l`organisme.

1. INHIBITION ET COMPETITION ENZYMATIQUE

Il ne suffit pas qu’un toxique modifie l’activité de telle ou telle enzyme,


pour que l’on puisse conclure que cette réaction explique son mécanisme
d’action .Bien que les interactions décrites soient très nombreuses, les cas
où le mécanisme est parfaitement élucidé sont peu nombreux.
16

1.1. Inhibition des cholinestérases

Les organophosphorés et les carbamates insecticides ont le même


mécanisme toxique. Ce sont des inhibiteurs des acétylcholinéstérases.

Ces substances ont une grande affinité pour les cholinestérases et entrent
en compétition avec l’acétylcholine qui est leur substrat naturel.

Les organophosphorés sont hydrolysés, mais une partie de leur molécule


reste fixée sur l’enzyme qui est ainsi progressivement inhibée.
L’acétylcholine n’est plus détruite instantanément après sa libération dans
le système nerveux et va s’accumuler au niveau des fibres nerveuses
post ganglionnaires (syndrome muscarinique), de la plaque motrice
(syndrome nicotinique), et des neurones cérébraux (effets centraux).

1.2. Inhibition d’enzymes à groupement thiols

Les dérivés minéraux trivalents de l’arsenic (arsénite) ainsi que les


dérivés organiques aliphatiques ont une forte affinité pour le groupement
thiol (-SH), intervenant dans la structure d’enzymes jouant un rôle
essentiel dans le métabolisme oxydatif et de protéines indispensable au
fonctionnement de l’organisme.

L’arsénite de sodium inhibe le pyruvate déshydrogénase et l’alpha


cétoglutarate déshydrogénase, deux complexes enzymatiques
intervenant dans le fonctionnement cycle de l’acide citrique.

Le complexe enzymatique pyruvate déshydrogénase intervient dans la


réaction de décarboxylation oxydative du pyruvate qui donne naissance à
l’acétyl-Coenzyme A.

Le complexe enzymatique alpha cétogultarate déshydrogénase intervient


dans la décarboxylation oxydative de l’alpha cétoglutarate. Cette réaction
entraine la formation de succinyl-coenzyme A.

L’arsenic inhibe l’acide lipoïque, (coenzyme pour ces deux complexes


enzymatiques) en se fixant sur ses groupements thiols. Les réactions
d’oxydo-réduction dans les tissus (foie, rein, cœur) notamment la
respiration cellulaire sont perturbées.

L’arsenic inhibe également sur les acides aminés soufrés (cystéine,


méthionine), entrainant des lésions de dégénérescence graisseuse du foie.

1.3. Inhibition de la cytochrome-oxydase

Les ions cyanures (CN-) du fait de leur affinité pour les métaux trivalents
se fixent sur le fer ferrique (Fe+++) des cytochromes oxydases,
responsable de l’ionisation de l’oxygène moléculaire grâce aux électrons
17

transportés par les cytochromes. Le complexe formé est stable .Il en


résulte une inhibition irréversible de la cytochrome oxydase, élément
essentiel de la chaine respiratoire, d’où une anoxie cellulaire dont les
effets sont particulièrement nocifs au niveau du système nerveux central.

1.4. Inhibition de l’époxyde réductase

Le point d’impact des raticides anticoagulant est l’étape de régénération


de la vitamine K1 sous forme active à partir de vitamine K1 sous forme
époxyde, inactive.

Les raticides anticoagulants prennent la place de la vitamine K1 époxyde


réductase et agissent par un processus d’inhibition enzymatique
compétitif, par analogie structurale avec le noyau naphtoquinone de la
vitamine k1 .Il en résulte une absence de reconstitution de la vitamine K 1
et l’arrêt de l’activation des facteurs PPSB (Prothrombine, Proconvertine,
Facteur de Stuart, facteur anti hémophilique B)

1.5. Inhibition des ATPases membranaires

Les pyréthrinoïdes non cyanés (perméthrine ) inhibent l’ATPase Na+ K+,


perturbant le mouvement des cations au niveau axones. Il en résulte une
diminution du potentiel d’amplitude et des décharges nerveuses à
répétition.

2. Découplage des réactions de phosphorilation oxydative

Les herbicides dérivés des dinitrophénols (dinosèbe, dinoterbe,


dinitro-orthocrésol) entrainent un découplage des réactions de
phosphorylation oxydative. L’énergie produite au cours des oxydations
cellulaires ne peut pas être mise en réserve sous forme d’ATP .Il s’installe
donc une carence en ATP avec perturbations de nombreux métabolismes.
Les phénomènes d’oxydation cellulaire (notamment les glucides) se
poursuivent sans possibilité pour la cellule de stocker et d’utiliser l’énergie
libérée, d’où une production excessive de chaleur qui déborde les
mécanismes de thermorégulations de l’organisme entrainant un syndrome
fébrile (hyperthermie pouvant 42-43 °C).
En raison des risques de pollution aiguë des écosystèmes aquatiques, il a
été décidé au niveau européen d’interdire la vente et l’utilisation des
herbicides à compter du 1 er Avril 2000.

3. Action sur la biosynthèse de l’hème

Le plomb se concentre dans la moelle osseuse où sa concentration est 50


fois supérieure à celle du sang perturbant ainsi la biosynthèse de l’hème.
Cette biosynthèse de l’hème s’effectue dans la moelle osseuse a partir du
succinyl-Coenzyme A et du glycocolle.
18

Inhibition enzymatique de la synthèse de l’hème par le plomb

Trois enzymes (au moins) sont inhibes par le plomb :

 l’ALA-déshydratase
 la coproporphyrinogène décarboxylase
 l’hème synthétase (ou ferrochèlatase)

L’inhibition de l’Ala déhydratase entraine une élimination accrue de l’acide


amino lévulinique dans les urines.

L’inhibition de la coproporphyrinogène décarboxylase se traduit par une


augmentation de l’élimination des coproporphyrines urinaires. Elle est à
l’origine de l’apparition de granulations basophiles dans les hématies
décrites sous le terme d’hématies ponctuées.

L’inhibition de l’hème synthétase entraine l’apparition dans le sang de


protoporphyrines qui se lient au zinc pour donner un complexe stable
appelé protoporphyrine zinc (PPZ). L’élévation du taux des PPZ est
légèrement différé (3 à 4 semaines) et atteint sa valeur maximale qu’au
bout de deux mois environ ; Cette élévation persiste après la fin de
l’ingestion du plomb.

Ces anomalies dans la formation des hématies, entraînent une diminution


de leur durée de vie et à la longue une anémie marquée.
19

4. Action sur l’hémoglobine

L’hémoglobine est une protéine renferment un hème avec un atome de fer


à l’état ferreux (Fe++) chargée du transport de l’oxygène.

Hb (Fe++) + O 2  HbO 2 (Fe++)

Plusieurs toxiques agissent sur l’hémoglobine, la rendant incapable


d’assurer sa fonction essentielle : le transport de l’oxygène. Ceux qui
interviennent le plus fréquemment sont le monoxyde de carbone et les
toxiques méthémoglobinisants.

4.1. Monoxyde de Carbone

Le monoxyde de carbone (CO) a une affinité pour l’hémoglobine 220 à250


fois plus élevée que celle de l’oxygène. Une grande partie de
l’hémoglobine (Hb) est transformée en carboxyhémoglobine (HbCO)
incapable de transporter l oxygène.

Hb +CO  HbCO

Cette réaction est peu réversible (l’équilibre est difficile à déplacer) d’où
un blocage de l’hémoglobine.

4.2. Toxiques méthémoglobinisants

Les chlorates (herbicides) et les nitrites, sont les toxiques les plus
souvent en cause .Le chlorate de soude est particulièrement dangereux
du fait de sa longue rémanence dans le sol.

Ils oxydent le fer ferreux (Fe++) de l’hémoglobine et la transforme en


méthémoglobine (Fe+++), inapte au transport de l’oxygène. Le sang prend
une teinte brun chocolat. Le mécanisme est complexe souvent indirect en
perturbant le fonctionnement des systèmes d’oxydo-réduction qui
maintient le fer de l’hémoglobine à l’état réduit (Fe++).
L’action des toxiques méthémoglobinisants sur l’hémoglobine aboutit à
une anoxie tissulaire (cyanose) à laquelle le système nerveux central est
particulièrement sensible.
De plus, l’action méthémoglobinisante des nitrites associée à leur action
vasodilatatrice accentue l’anoxie cellulaire.

5. Action neurotoxique

Une substance chimique est qualifiée de neurotoxique si elle est capable


d’induire un état persistant de dysfonction nerveuse ou une altération de
la structure chimique ou physique du système nerveux.
20

5.1. Le plomb : Pb++

La neurotoxicité du plomb relève de plusieurs mécanismes :

 Une démyélinisation et des troubles de la conduction nerveuse au


niveau du système nerveux périphérique.
 Une action compétitive avec le calcium au niveau des synapses
ganglionnaires et des fonctions neuromusculaires dans la
libération de l’acétylcholine et des médiateurs du système nerveux
central.
 Une interférence avec l’acide gamme aminobutyrique (GABA).
 Une interférence avec la dopamine au niveau de son recaptage.

5.2. Méthylmercure : CH3Hg

Le méthylmercure dénature les phospholipides membranaires propres aux


cellules nerveuses, les plasmalogènes, en catalysant l’hydrolyse de ces
molécules .Cette action entraine un affaiblissement de la structure
membranaire et à une lyse cellulaire des neurones.

5.3. Pyréthrinoïdes

Les pyréthrinoides de synthèse cyanés : cyfluthrine, cyperméthrine,


deltaméthrine, fenvalérate exercent une action neurotoxique par
interférence avec le fonctionnement des canaux sodium voltage-
dépendants au niveau du système nerveux central et périphérique. Elles
perturbent la transmission de l'influx nerveux en bloquant les canaux
sodiques.
Le canal sodique reste ouvert et il y à propagation de l’influx nerveux.
Cette action toxique entraîne des décharges nerveuses a répétition et
acquise une paralysie.
Les pyréthrinoïdes cyanés inhibent également la transmission
gabaergique.
Ces composés se fixent sur le récepteur de l’acide Gamma-amino-
butyrique et inhibent le fonctionnement du canal chlore qui lui est associé.
L’ouverture du canal chlore induit une hyperpolarisation de la membrane
nerveuse est son activation.
Lorsque cette inactivation se prolonge, elle perturbe l’ensemble du
fonctionnement du système nerveux.

5.4. Toxiques convulsivants

 La strychnine est le toxique convulsivant type. Elle occasionne une


atteinte médullaire qui entraîne l’apparition de convulsions. Cette
atteinte médullaire résulte d’un blocage de l’inhibition récurrente des
motoneurones par les cellules de RENSHAW conduisant à une
exaltation de la contraction des muscles extenseurs d’où l’attitude en
opisthotonos observé chez les animaux intoxiqués. La suppression
21

des influx inhibiteurs des cellules de RENSHAW due à un


antagonisme compétitif avec le glycocolle neuromédiateur post
synaptique à cet endroit.
 Le métaldéhyde entraine une diminution des concentrations de 5
hydroxy-tryptamine dans le cerveau et de GABA dans le système
nerveux central.
 La crimidine autre toxique convulsivant agit du fait d’un
antagonisme avec la vitamine B6.

6. Immunotoxicité

6.1. Polluants organiques persistants

Plusieurs auteurs ont signalé une immunotoxicité associée à une


exposition de l’environnement à des polluants organiques persistants
(POP), composés résistants à la dégradation photolytique, biologique et
chimique.
On a montré qu’un dysfonctionnement immunitaire était la cause probable
d’une mortalité anormale chez les mammifères marins .Un e alimentation
contenant des POP peut entrainer des carences vitaminiques ainsi qu’une
insuffisance thyroïdienne accompagnées d’une sensibilité accrue une
infection bactériennes chez les phoques. L’exposition à des POP a été
corrélé avec une décroissance de la population chez le phoque commun,
le marsouin commun, le béluga du fleuve Saint Laurent (Canada).
De même on établit une relation de cause à effet chez le vison et le furet
entre une exposition aux PCBs et un dysfonctionnement immunitaire une
mortalité accrue des petits et des adultes.

6.2. Méthyl-mercure : CH3Hg

Des lapins soumis à des rations alimentaires contenant 10 et 20 ppm de


méthylmercure puis exposés au virus influenza A/PV 8 développent des
taux d’inhibition d’hémagglutination 4 fois plus faible que les animaux
témoins .

7. Formation d’ions superoxydes

Le paraquat et le diquat agissent par compétition avec certain


transporteurs d électrons. Ils inhibent la réduction du NADP + en NADPH
en captant des électrons à la place du NADP +.

Le paraquat réduit réagit ainsi sur l’oxygène moléculaire pour donner


-
naissance à des ions superoxydes O 2 qui se fixent sur les lipides
insaturés, pour donner naissance à des peroxydes. Les lipides
peroxygénés sont capables de modifier la nature du surfactant
pulmonaire, d’endommager fortement l’épithélium pulmonaire et de et
de provoquer une fibrose pulmonaire irréversible.
22

8. Action mutagène

8.1. Méthyl-mercure : CH3Hg

L’action mutagène du méthylmercure est due à une fixation sur l’ADN,


au fait du caractère électrophile du groupement CH 3Hg+ qui se comporte
comme un agent alkylant vis-à-vis des groupements azotés des bases
nucléiques notamment de la thymine. Cette fixation aboutit à dénaturation
de l’ADN qui explique des ruptures chromosomiques et les effets
génétiques du methylmercure.

8.2. Lindane :

Le lindane, insecticide organochloré, entraîne des aberrations


chromosomiques sur des fibroblastes de hamster en culture in vitro.

9. Toxicité embryo-foetale

Les effets embryotoxiques des pesticides sont à considérer de manière


attentive, car ils entraînent des dommages importants pour la faune
sauvage.
Un certain nombre de travaux ont montré que dans des conditions
proches des conditions naturelles, certains herbicides présentent une nette
emryotoxicité suite à la pulvérisation de préparation commerciale sur des
œufs d’oiseaux-gibier.
La pulvérisation d’une solution de 2,4 D (acide dichloro 2,4
phénoxyacétique) sur des œufs de faisan, perdrix rouge et grise entraîne
une réduction du taux d’éclosion et des malformations graves chez les
survivants (lordose, déformation des membres, anomalies génitales …)
Les herbicides dérivés des dipyridyliums possédent également des
propriétés embryotoxiques importantes. La pulvérisation d’une solution de
paraquat à 14 pour 1000 sur des œufs de caille entraîne une pseudo -
féminisation des mâles, une importante réduction des gonocytes dans les
deux sexes.

10. Perturbation du système endocrinien

Selon l’US EPA (1997), un perturbateur endocrinien est un : « Agent


exogène qui interfère avec la synthèse, la sécrétion, le transport, la
fixation, l’action ou l’élimination des hormones naturelles du corps qui sont
responsables du maintien de l’homéostasie (régulation du système
endocrinien en fonction d’un équilibre préalablement fixé), de la
reproduction, du développement et/ou du comportement.

Depuis 1991, les toxicologues ont attiré leur attention sur les effets
potentiellement dangereux que certaines substances chimiques même
faible à dose notamment les polluants (PCBs, dioxines) et les pesticides
pouvaient avoir sur les écosystèmes. Parmi ces pesticides, citons les
23

insecticides organochlorés (méthoxychlore), organophosphorés


(malathion), les pyréthrinoides, les herbicides (dérivés phénoxyacétiques,
urées substituées, triazines), les fongicides (dérivés du cuivre,
dithiocarbamates). A l’heure actuelle, 51 composés ont été reconnus
comme pouvant interférer avec le système endocrinien.

Ces substances chimiques sont dénommées perturbateurs


endocriniens, car elles imitent les hormones naturelles (et peuvent donc
agir à très faible dose), inhibent l’action hormonale ou perturbent les
fonctions régulatrices normales des systèmes immunitaires, nerveux ou
endocriniens, et ce faisant induisent d’autres effets.

Plusieurs études mettent en rapport l’exposition à divers pesticides et la


perturbation de fonctions endocriniennes de populations de faune sauvage
et aquatique.

Ces perturbations comprennent :

 Le fonctionnement anormal de la tyroïde


 Le développement anormal de poissons et d’oiseaux
 Une diminution de la fertilité de certains mollusques, poissons et
mammifères
 Une diminution des taux d’éclosion de poissons, oiseaux, reptiles
 La démasculinisation et la féminisation chez les poissons
 La déféminisation et masculinisation de gastéropodes, poissons et
oiseaux.
 Une diminution de la survie des portées, une altération des fonctions
immunitaires et du comportement des oiseaux et mammifères.

Le malathion, insecticide organophosphorés exerce les perturbations


endocriniennes suivantes :

 Fonctionnement anormal de la tyroïde.


 Effets sur les hormones hypophysaires des poissons
 Effets sur les stéroïdes ovariens des poissons
 Retard de croissance de poissons attribué à des perturbations du
système hormonal.

Enfin les recherches récentes ont montré que les pyréthrinoïdes peuvent
se fixer sur les récepteurs à androgènes et perturber la fonction
androgénique.

CONCLUSION

La connaissance des mécanismes d’action des toxiques est essentielle, elle


permet un traitement adapté lors de l’intoxication.
24

Chapitre 3

Toxicocinétique

Introduction

La toxicocinétique est l’étude du devenir des substances exogènes


toxiques, dans les organismes vivants, depuis leur pénétration jusqu'à
leur élimination. Elle s'intéresse à l’influence qu'exerce l'organisme sur
un toxique. Cette influence découle des processus (la résorption, la
distribution, le métabolisme et l'élimination) qui gouvernent le
cheminement du toxique dans l'organisme.

I. PENETRATION DES TOXIQUES


25

1. VOIE DIGESTIVE

C’est la voie la plus fréquente empruntée par les toxiques. Elle permet leur
résorption et parfois contribue à leur biotransformation. Les principaux
lieux de résorption sont :

 La bouche permet la résorption de cyanures, de la nicotine au niveau


des muqueuses.
 L’estomac est perméable aux molécules liposolubles (2,4 D, 2,4,5
T). Chez les ruminants, la résorption des composes gazeux (NH) qui
se forme dans le rumen, est intense et rapide.
 L’intestin est le lieu préférentiel de résorption, particulièrement au
niveau du duodénum, et chez le cheval au niveau du gros intestin
très développe. Les substances liposolubles, qui diffusent bien dans
le contenu intestinal, sont les mieux résorbées.

Des processus naturels de défense peuvent s’opposer à la résorption telle


que les vomissements, éructations ou diarrhée.

D’autres phénomènes peuvent modifier la toxicité de poison :

 L’accroître

Exemples :

o Réduction des nitrates en nitrites, qui peuvent réagir avec des


amines tertiaires pour donner des nitrosamines, cancérogènes.
o Hydrolyse des hétérosides cyanogénétique

 La diminuer

Exemples :

o Dénaturation des substances protéiques (venins),


o Dénaturation des alcaloïdes (curares),
o Hydrolyse des insecticides organophosphorés,
o Réduction des nitrites dans le rumen en ammoniac.

2. VOIE RESPIRATOIRE

Elle permet la résorption :

 Soit de toxiques gazeux ou volatils tels HCN, CO, CO 2


 Soit de toxiques présents dans l’air à l’état d’aérosols ou de fins
brouillards, tels le pesticides organophosphorés (c’et une modalité
d’utilisation fréquente). Dès que la taille des particules augmente
(diamètre supérieur à 10µ) le produit atteint plus difficilement les
alvéoles pulmonaires et sa résorption diminue.
26

 La toxicité propre de la molécule résorbée est parfois accrue par


l’apparition de spasmes réflexes ou d’œdème pulmonaire ou laryngé.
L’inhalation répétée de silice ou d’amiante fait apparaitre des lésions
de fibrose broncho-pulmonaire et même des tumeurs des séreuses
(mésothéliome).

3. VOIE CUTANEE

La peau peut être une zone de résorption importante pour les substances
lipophiles particulièrement lorsqu’elles se trouvent en solution organique le
solvant favorisant leurs pénétration, ou encore lorsqu’elles se présentent
en émulsion.
Exemple : insecticides organophosphorés (parathion), nicotine, colorants
dérivés de l’aniline…

Le phénomène se produit non seulement lorsque l’on plonge une partie du


corps dans une solution, mais également lors de pulvérisation. A l’occasion
des campagnes de démoustification, on a constaté que la quantité d’HCH
absorbée par les manipulateurs est 20 fois plus élevée par la voie
percutanée que par inhalation.

4. AUTRES VOIES

Les autres voies classiques de résorption de médicaments sont plus


rarement en cause .La projection de liquides concentrés dans les yeux ou
l’irrigation utérine avec des solutions antiseptiques trop concentrées
peuvent toutefois avoir des conséquences dramatiques.

II. DIFFUSION ET DISTRIBUTION DES TOXIQUES

Les toxiques transportés surtout par le sang sont retrouvées :

 Dans les hématies (composés apolaires tels les anesthésiques


généraux, le plomb, le monoxyde de carbones)

 Dans le plasma sous diverses formes : soit libres dans le cas de


substances polaires, soit liées aux protéines (albumines et
lipoprotéines), dans le cas des molécules apolaires :

o Les premières vont diffuser rapidement dan le secteur


extracellulaire et seront facilement filtrés par le rein.

o Les secondes par leur fraction libre plasmatique en équilibre avec


la fraction liée vont pénétrer plus facilement mais plus lentement
et plus sélectivement dans le territoire en traversant les
membranes cellulaires.
De ce fait les composés lipophiles auront tendance à se localiser
dans les territoires riches en lipides tels le système nerveux, les
27

graisses de réserve, ces dernières pouvant dans certains cas


réaliser une véritable séquestration des toxiques suffisamment
stables et les accumuler (insecticides organochlorés)

Les résultats sont cependant disparates selon qu’il s’agisse d’une


ingestion limitée dans le temps (dose unique) ou d’ingestion
répétées.

 A la suite d’une ingestion unique, ce sont les organes les plus


irrigués qui fixent la plus grande quantité de toxique pendant la
période ou la concentration sanguine est maximale .Ainsi chez un
ovin mort rapidement après l’ ingestion d’une dose en toxique
d’HCH, on retrouve (20ppm) dans le cerveau et dans le foie plus
qu dans la graisse de réserve (inférieur à 10 ppm).

 Par contre lors d’administration répétée de faibles doses, l’affinité


relative de tissu adipeux par rapport au sang joue un rôle
prédominant.

Comme la montre la figure ci-dessous :

La concentration (C) augmente progressivement avec le temps (t) pour


atteindre une valeur maximale d’équilibre (Fig.).

Si au moment T on cesse l’administration du produit, la concentration


diminue généralement d’une façon exponentielle.

C
C

t
T
28

C’est ainsi que des moutons qui reçoivent de petites doses de lindane tous
les jours peuvent en accumuler plus de 100 ppm dans la graisse de
réserve, alors que la teneur dans le foie et le cerveau reste inférieure à 10
ppm. Un amaigrissement rapide de ces animaux libère une forte quantité
de lindane et les symptômes de l’intoxication aiguë peuvent apparaître.

III. BIOTRANSFORMATIONS DES TOXIQUES

1. FORMATION DE METABOLITES PLUS TOXIQUES QUE LES


SUBSTANCES INITIALES

Bien que les biotransformations concourent généralement à la


détoxification, les exemples contraires ne sont pas rares.

 Oxydation du parathion en paraxon, du malathion en maloxon,


inhibiteurs beaucoup plus puissant des cholinestérases.
 Hydroxylation de bromobenzéne, donnant naissance à des
métabolites responsables de la nécrose hépatique.
 Oxydation de méthanol en acide formique qui est toxique pour le
nerf optique et de l’éthylène glycol en acide oxalique qui provoque
des lésions rénales.
 Réduction des dérivés nitrés aromatiques et hydroxylation des
amines aromatiques donnant naissance à des métabolites
hémolytiques.

Ces réactions surviennent surtout dans le foie. Elles s’ajoutent aux


modifications subies dans le tube digestif déjà citées.

2. DETOXIFICATION

C’est la règle générale, car les biotransformations (conjugaisons) rendent


les molécules plus polaires, plus hydrosolubles et favorisent leur
élimination.

Exemples :

o Hydroxylation et conjugaison des dérivées halogènes des


hydrocarbures aromatiques, des salicylés, des barbituriques,
acétylation des sulfamides.

o La détoxification est plus intense lorsque les microsomes hépatiques


ont été stimules par l’administration répétés de certains substrats.

C’est ainsi que l’on note, pour des insecticides organophosphorés les DL 50
suivantes exprimées en mg/kg avec des rats dont les microsomes
hépatiques ont été stimules en administrant pendant 5 jours des
quantités convenables de phénobarbital.
29

RATS TRA ITES


DL50 (mg / Kg) RATS TEMOINS
PHENOBA RBITAL

PARATHION 2,5 7, 3

SYSTOX
1,4 5,8
(mercaptophos)

CO- RAL
(coumaphos) 7,5 13,8

Il est parfois difficile de différencier les réactions d’adaptation bénéfiques,


des réactions néfastes entrainant des lésions organiques.

Ces 2 types de réactions peuvent entrainer des hypertrophies des


organes, en particulier le foie.

C’est ainsi que l’administration quotidienne de 2mg/kg/j de dieldrine


(insecticide organochloré) à des rats entraine une hypertrophie du foie,
une prolifération du réticulum endoplasmique lisse, une activation des
microsomes avec augmentation de la teneur en cytochrome P 450. Ces rats
deviennent plus résistant à la dieldrine, ils supportent 25 administrations
consécutives de 5mg/Kg/j de dieldrine, alors que cette dose provoque 70
% de mortalité chez les sujets témoins.

Cette stimulation des microsomes hépatiques par la dieldrine ne


s’accompagne d’aucune lésion de l’organe pendant les 14 premiers jours.
Cependant par la suite on observe des lésions des mitochondries avec un
réticulum endoplasmiques hypertrophié mais dont l’activité devienne
inférieure à la normale.

De nombreux facteurs modifient les capacités de détoxification. Les fœtus


et les nouveaux nées, ainsi que les sujets âgées sont moins actifs, en
raison de l’immaturité ou de l’imperfection de l’équipement enzymatiques
de foie.

Les rats mâles adultes hydroxylent d’avantage que les femelles. Les chats
ont des possibilités de glucurono-conjugaison réduites pour les dérivés
aromatiques hydroxylés. Ils sont donc plus sensibles aux composées
phénoliques.

IV. ELIMINATION DES TOXIQUES

Les toxiques et leurs métabolites empreintes les voix classiques de


l’élimination à savoir :
30

 VOIE RENALE

Elimination des molécules polaires, solubles, dissociés aux pH de l’urine,


ce qui en ralentie la résorption tubulaire. Certains dérivés peu polaires,
comme l’HCH, le DDT et leurs métabolites se retrouvent cependant dans
l’urine (80%pour l’HCH, chez les rats). Cette modalité peut s’accompagner
de troubles rénaux (néphrites dues aux métaux lourds, aux oxalates qui
précipitent au niveau de rein).

 VOIX DIGESTIVE

Elle permet l’élimination des molécules non résorbées dans le tube digestif
ainsi que celle qui sont excrétées par :

o La salive : alcaloïdes, amphétamines, mercure…


o Le suc gastrique : substances basiques (nicotine)
o La bile : voie d’élimination des dérivées conjugués et des substances
de poids moléculaire élevé (au-delà de 400 daltons)

 VOIE PULMONAIRE

Elle permet l’élimination des toxiques gazeux ou volatils tels les


hydrocarbures volatils (halogène ou nom), les cyanures, les oxydes du
carbone …

 VOIE MAMMAIRE

Elle permet l’élimination de substances liposolubles, tels que les


insecticides organophosphorés et les carbamates, les pyréthrénoides, ou
les métaux lourds.

 ŒUFS

L’élimination par les œufs a surtout été étudiée pour les insecticides
organochlorés. Des poules recevant une alimentation contenant 100 ppm
de DDT, pondent des œufs qui en contiennent 11 à a17ppm dans
l’albumine et 230 à 460 ppm dans le jaune.

En conclusion, la connaissance de la toxicocinétique est intéressante au


moins pour deux raisons essentielles.

Elle permet :

o par des traitements appropriés d’augmenter l’élimination des poisons


lors d’accidents toxiques.
o de prendre des mesures destinées à éviter la contamination des
denrées alimentaires d’origine animale ou la pollution de
l’environnement.
31

ECOLE NATIONALE DE MEDECINE VETERINAIRE


SIDI THABET

Année 2015-2016

CONDUITE THERAPEUTIQUE
ET DIAGNOSTIQUE
DEVANT
UNE SUSPICION
D’INTOXICATION

PHARMACIE & TOXICOLOGIE


Pr Agrégé Samir BEN YOUSSEF
Dr Jamel BELGUITH
Dr Rim HADIJI
32

CONDUITE THERAPEUTIQUE
ET DIAGNOSTIQUE
DEVANT
UNE SUSPICION
D’INTOXICATION

I. CONDUITE THERAPEUTIQUE
1. Traitement général des intoxications
1.1. Traitement d’urgence
1.1.1. Suppression des convulsions
 Carnivores domestiques
 Animaux de rente
1.1.2 Assistance respiratoire
1.1.3. Assistance cardiovasculaire
1.1.4. Contrôle de la température corporelle
1.1.5. Lutte contre la douleur
1.2. Traitement éliminatoire
1.2.1. Limitation de la résorption du toxique
 Vidange de l’estomac
 Accélération du transit intestinal
1.2.2. Neutralisation du toxique dans le tube digestif
 Administration d’adsorbants
 Administration de neutralisants et d’antiacides
1.2.3. Accélération de l’élimination du toxique résorbé
 Elimination rénale du toxique
 Augmentation de la diurèse
 Modification du pH urinaire
 Dialyse péritonéale
 Les émulsions lipidiques intraveineuses : ELI
1.3. Les Antidotes
II. DIAGNOSTIC DES INTOXICATIONS
1. Examen clinique et nécropsique
 Temps de latence
 Durée d’évolution
 Séquence d’apparition des signes cliniques
 Signes cliniques et lésions dominantes
 Données d’épidémiologie clinique
2. Enquête épidémiologique
 Collecte d’informations
2.1.1. Facteurs prédisposants
2.1.2. Conditions favorisantes
 Appréciation du risque toxique
2..1. Appréciation de l’exposition au danger
2..2. Caractérisation du danger
2..3. Caractérisation du risque
3. Prélèvements - Choix des prélèvements
3..1. Sur l’animal v ivant
3..2. Sur l’animal mort
3..3. Sur le terrain
33

CONDUITE THERAPEUTIQUE
ET DIAGNOSTIQUE
DEVANT
UNE SUSPICION
D’INTOXICATION

I. CONDUITE THERAPEUTIQUE

La conduite générale à tenir devant une intoxication animale comprend


schématiquement 4 étapes.

i. Dans un premier temps, le vétérinaire est fréquemment confronté à une


situation d'urgence. Il doit donc faire face à des signes cliniques graves,
aigus ou suraigus, qui imposent des décisions thérapeutiques
immédiates pour protéger les fonctions vitales de l'organisme, même si
le diagnostic de l'intoxication est incertain.

ii. En deuxième lieu, le diagnostic clinique et nécropsique des


intoxications chez les animaux est souvent difficile, si ce n'est
impossible. Dans bien des cas, les signes cliniques et les lésions sont
frustes, rarement spécifiques voire atypiques. L'hypothèse d'une
intoxication est donc très souvent envisagée par élimination,
après avoir écarté les principales affections connues, d'autant plus que
l'expérience clinique du vétérinaire en toxicologie, du fait de la faible
fréquence de la plupart des intoxications chez les animaux, est
généralement limitée.

iii. En troisième lieu, une démarche complémentaire d'enquête


épidémiologique, qui n'est pas familière au vétérinaire, s'impose ici
tout particulièrement. Elle permet souvent de suspecter la source
toxique.

iv. En dernier lieu, la confirmation de la suspicion d'intoxication par


le laboratoire est parfois indispensable ; elle repose sur l'identification
voire le dosage du toxique dans des prélèvements judicieusement choisis
par le vétérinaire.
34

1. Traitement général des intoxications

Lors d’intoxication, il est indispensable d’instaurer aussi rapidement que


possible un traitement sans attendre la confirmation du laboratoire d’analyses,
car la vie de l’animal en dépend le plus souvent. Indépendamment du
traitement spécifique qui peut être entrepris dès lors qu’un diagnostic clinique
est établi et qu’un antidote existe.

Il est important de mettre en œuvre un traitement non spécifique qui


comprend :

 Un traitement d’urgence destiné à préserver les fonctions vitales de


l’organisme

 Un traitement éliminatoire destiné, d’une part à favoriser


l’élimination du toxique résorbé par l’organisme, d’autre part à limiter
toute résorption supplémentaire du toxique non résorbé, c.-à-d. non
encore parvenu à la circulation générale

1.1. Traitement d’urgence

 Suppression des convulsions


 Assistance respiratoire
 Assistance cardiovasculaire
 Contrôle de la température corporelle
 Lutte contre la douleur

1.1.1. Suppression des convulsions

Les convulsions sont des manifestations de souffrance cérébrale se traduisant


par des contractions violentes, involontaires saccadées des muscles.

La première priorité consiste à supprimer les convulsions, lorsqu’elles existent,


car elles sont sources de perturbations homéostatiques graves comme l’acidose,
l’hypoxie, l’hypoglycémie et l’œdème cérébral.

Les molécules utilisables doivent être douées de propriétés myorelaxantes (ce


qui interdit l’utilisation des phénothiazines, qui peuvent abaisser le seuil de
déclenchement des convulsions et des anesthésiques dissociatifs, comme la
kétamine, qui sont fréquemment à l’origine d’une hypertonie musculaire).

 Carnivores domestiques

Le diazépam est le médicament anticonvulsivant de choix.

Son activité anti-convulsivante est extrêmement puissante, son passage dans le


liquide céphalorachidien (LCR) est très rapide, la moitié de la concentration à
l’équilibre dans le LCR est atteinte en 3 à 4 minutes en moyenne, des effets
35

secondaires dangereux sont pratiquement inexistants et sa demi-vie est très


courte, de l’ordre de quelques minutes, ce qui facilite son utilisation à la
demande et réduit les risque de toxicité cumulative.

Le diazépam (VALIUM®) est généralement administré


à raison de 1 à 2 mg/kg par les voie intraveineuse
ou intra-rectale, toutes les 10 à 15 minutes si nécessaire.

Les barbituriques, notamment le pentobarbital, le phénobarbital ou le


thiopental, peuvent également être utilisés pour des convulsions ne
rétrocédant pas à l’administration du diazépam ou pour prolonger la
thérapeutique anti convulsivante.
Leur délai d’action est plus long que celui du diazépam, mais en contre partie,
leur demi-vie est plus longue, de l’ordre de 40 à 90 heures chez le chien.
Néanmoins, leur toxicité est plus élevé que celle du diazépam et il ya donc lieu
de se méfier d’une éventuelle altération de la vigilance et d’une bradypnée, elle-
même source d’accidents.

 Le pentobarbital (PENTOBARBITAL SODIQUE®) est utilisé à la dose


maximale de 5 à 10 mg par la voie intraveineuse stricte.
 Le phénobarbital (GARDENAL®) est utilisé à la dose maximale de 3 à
5 mg/kg par les voies intraveineuse ou intra musculaire.
 Le thiopental (NESDONAL®) est utilisé à la dose 10 à 15 mg /kg chez
le chien et 20 à 22 mg/kg chez le chat par le voie intraveineuse lente.

La xylazine et la médétomidine peuvent également être utilisées du fait de


leurs effets sédatifs et myorelaxant. Il faut se méfier des éventuels effets
secondaires (vomissement, bradycardie) de ces 2 molécules.

 La Xylazine (ROMPUN 2% ®) peut être employée chez le chat à la


posologie de 0,15 ml/kg par la voie intraveineuse ou intramusculaire.
 La médétomidine (DOMITOR®) peut être utilisée à la posologie 10 à
80 µg/kg chez le chien par la voie intraveineuse ou intramusculaire et
de 80 à 150 µg/kg chez le chat par la voie intraveineuse,
intramusculaire et sous cutanée.

En pratique, chez les carnivores domestiques,


il convient :
 D’administrer un premier bolus de diazépam
ou, à défaut, de pentobarbital, de xylazine
ou de médétomidine,
 De mettre en place un cathéter intraveineux,
 D’administrer une solution isotonique
de chlorure de sodium ou de Ringer-lactate
à raison de 120 à 150 ml/kg/j contenant
du diazépam à (5 à 20 mg/h).
36

 Animaux de rente

 Xylazine

- Ruminants : 0,05 mg/kg IV ; 0,1 mg/kg IM


- Cheval : 1 mg/kg IV ; 2 mg/kg IM

 Pentobarbital

Il peut également être utilisé, mais présente l’inconvénient de


perturber les fonctions digestives chez les ruminants.

1.1.2. Assistance respiratoire

Certains toxiques sont à l'origine de l'apparition de troubles respiratoires très


variés : détresse respiratoire, bradypnée, arrêt respiratoire …).

Chez un animal qui convulse, très faible et ayant des difficultés à déglutir il est
impératif de maintenir la tête plus basse que le reste du corps pour éviter
l'inhalation des matières vomies ou bien d'intuber l'animal si sa conscience est
altérée.

Il est possible alors :

 de combattre des signes respiratoires graves tels qu’une bradypnée


ou un arrêt respiratoire en plaçant les carnivores domestiques sous
respiration assistée,
 d’administrer simplement des analeptiques respiratoires :
doxapram (DOPRAM®) 3 à 5 mg/kg par voies intraveineuse,
intramusculaire, sous cutanée, intra nasale,
 de combattre un encombrement bronchique résultant d’un
œdème aigu du poumon par le recours à des corticoïdes d’action
immédiate (succinate sodique de méthylprednisolone :
SOLUMEDROL®, 20 à 30 mg/ kg par voie intra veineuse lente, à
répéter 2 à 3 fois à 6 heures d’intervalle).

1.2.3. Assistance cardiovasculaire

Le remplissage vasculaire permet non seulement de lutter contre la


déshydratation et les déséquilibres hydro-électrolytiques mais également
d’accélérer l’élimination du toxique au niveau rénal

En cas d’hypovolémie, il est possible d’administrer par voie intraveineuse en 5


minutes :

 Soit 3 à 5 ml/kg d’une solution de NaCl à 7,5%,


 Soit 25 à 30 ml/Kg d’une solution d’hydroxyléthylamidon
(HESTERIL 6% ®).
37

La transfusion sanguine 40 à 100 ml/kg peut être indispensable notamment lors


d’anémie importante.

Le donneur doit être correctement vacciné, cliniquement sain et doit subir un


examen hématologique, biochimique et sérologique (si besoin) complet. Son
groupe sanguin doit être typé.

Les analeptiques cardiaques notamment les bases xanthiques sont rarement


utiles dans les intoxications, voire contre indiqués dans les intoxications à
manifestation convulsives ; d’une part, ils provoquent une tachycardie, souvent
déjà présente d’autre part ils sont des stimulants centraux susceptibles eux
mêmes de déclencher des convulsions lors de surdosage.

1.2.4. Contrôle de la température corporelle

 En cas d’hypothermie : °C

Certaines intoxications s’accompagnent d’une hypothermie (ex : intoxication au


chloralose), d’une part dangereuse pour le maintien des fonctions vitales,
d’autre part responsable d’un ralentissement de la dégradation métabolique du
toxique.

Il convient donc de réchauffer les animaux ou du moins, d’éviter le


refroidissement des animaux en état de coma ou sous sédatifs centraux
(barbituriques,…) à l’aide de moyens adaptés (lampe chauffante, couverture,
bouillote,…).

 En cas d’hyperthermie : °C

Plus rarement, dans certaines intoxications (toxiques convulsivants, herbicides


de la famille des dinitrophénols,…), la température corporelle de l’animal peut
être augmentée, ce qui est à l’origine d’une déshydratation et/ou d’une
aggravation des effets toxiques. Il est possible de refroidir les animaux à l’aide
d’aspersions d’eau froide ou d’immersions dans un bain glacé.
Ces mesures sont à réserver aux seules hyperthermies sévères car il convient
de se méfier des hypothermies spectaculaires qu’elles peuvent engendrer.

1.2.5. Lutte contre la douleur

La lutte contre la douleur qui peut survenir lors d’intoxications (intoxications par
les acides, les bases, l’eau de javel,…) est une autre mesure importante à
mettre en place, on utilise par exemple :

 de la dipyrone = noramidopyrine (CALMAGINE® Solution injectable 50


%) par voies sous cutanée, intra musculaire ou intraveineuse lente selon les
espèces (1 à 2,5 ml)
 du phloroglucinol (SPASMOCALM® 80 mg, Comprimé Orodispersible).
38

 du prifinium (PRIFINIAL®) par voies sous cutanée, intramusculaire ou


intraveineuse (0,1 à 0,2 ml/kg), [RIABAL ENFANT ® Solution Buvable fl/50
ml]
 éventuellement des analgésiques centraux tel sue le chlorhydrate de
morphine (MORPHINE RENAUDIN ® 10 mg/ml Solution Injectable)
(MORPHINE AGUETTANT ® 0.1 mg/ml Solution Injectable) : 0,5 à 1 mg par
la voie intramusculaire chez le chien, 0,1 mg/kg par la voie intramusculaire
chez le chat et par IV chez le cheval.

1.3. Traitement éliminatoire

1.2.2. Limitation de la résorption du toxique

Les voies digestives, cutanées et oculaires et respiratoires sont les


principales voies d’entrée des toxiques chez les animaux.

Lors de contamination cutanée, il convient de laver la peau et le poil en


utilisant de l’eau et des tensioactifs neutres (savon..) de façon à éliminer le
toxique présent à le surface du tégument et donc empêcher, notamment par
léchage, toute absorption supplémentaire de celui-ci :

C’est la règle des « 3 x 15 » :

 lavage dans les 15 minutes,


 eau à 15°C,
 pendant au moins 15 minutes.

Les solvants organiques sont habituellement contre indiqués car ils risquent de
faciliter la pénétration transcutanée du toxique ; néanmoins, en évitant tout
contact direct avec la peau de l’animal, ils constituent le moyen le plus efficace
d’enlever la majeure partie du toxique, par exemple du fioul adhérent au poil.

Lors d’intoxication respiratoire, il convient de soustraire l’animal à


l’atmosphère toxique (monoxyde et dioxyde de carbone,…).

Lors de contamination oculaire, il convient d’irriguer et de rincer l’œil à


l’eau du robinet, au NaCl à 0,9 %ou au Lactate de Ringer (température du
solvant de rinçage de 38 °C de préférence) pendant 20 à 30 minutes.

Lors de contamination digestive, de loin la plus fréquente, il est possible de


limiter la résorption du toxique ingéré, soit en favorisant sa sortie du tube
digestif, soit en le neutralisant dans le tube digestif.
39

1.2.1.1 Vidange du tractus digestif

 Vidange de l’estomac

La vidange de l’estomac n’a d’intérêt que si le toxique a été récemment ingéré,


c.-à-d. en tout début de l’intoxication avant la vidange physiologique complète
de l’estomac : 3 à 6 heures après l’ingestion présumée du toxique chez les
monogastrique.

On fait appel à des moyens médicaux ou chirurgicaux : administration de


vomitifs, lavage gastrique ou vidange chirurgicale.

 Administration de vomitifs

L’administration de vomitifs n’est possible que chez le chien, le chat.

Elle ne permet qu’au mieux d’évacuer 60% du contenu gastrique et est


d’autant plus efficace que le contenu stomacal est plus important.

Les vomitifs sont généralement contre indiqués chez les animaux en état
de coma, en convulsions ou soumis à une anesthésie générale sous
risque de provoquer un reflux du contenu gastrique dans les voies respiratoires
et d’entrainer une bronchopneumonie par corps étranger très grave et souvent
mortelle.

Ils sont également contre indiqués lors d’intoxication par :

- les toxiques caustiques (acides, bases, eau javel…) sous risque


d’exposer de nouveau la muqueuse œsophagiennes à l’action
corrosive des toxiques,
- des toxiques tensioactifs sous risque de former une mousse qui
n’est pas évacuée et pénètre dans les voies respiratoires,
- Des toxiques volatils (White Spirit,…) sous risque d’une inhalation
partielle lors de vomissements,

 Chien : apomorphine (chlorhydrate d’) APIKONON® (solution


aqueuse à 1 % conditionnée en ampoule ou en stylo injecteur) – 0,05
mg/kg par voie sous cutanée, intramusculaire ou intradermique ou
intraoculaire.
La durée maximale des vomissements est habituellement 5 fois
supérieure au délai séparant l’administration de l’apomorphine de
l’apparition des premiers vomissements, en sachant que ce délai peut
varier de 3 à 10 minutes en moyenne. Les solutions aqueuses
d’apomorphine, instables à l’air et à la lumière, doivent être rapidement
employées après ouverture des ampoules.

 Chat : Xylazine (chlorhydrate de) ROMPUN 2% ®, voie


intramusculaire ou sous cutanée ou médétomidine.
40

 La médétomidine (DOMITOR®) peut être utilisée à la posologie 10 à


80 μg/kg chez le chien par la voie intraveineuse ou intramusculaire et de
80 à 150 μg/kg chez le chat par la voie intraveineuse, intramusculaire et
sous cutanée.

 L’apomorphine ne doit pas être utilisée chez le chat chez lequel elle peut
provoquer des signes d’excitation nerveuse.

Il convient de dissuader le propriétaire de faire boire l’animal en lui rappelant


les principales contre-indications des vomitifs.

Par ailleurs, la plupart des préparations vomitives traditionnelles (solution


concentrée de NaCl, solution à 1 % de sulfate de cuivre, suspensions de graines
de moutarde broyées…etc.) qui agissent au niveau périphériques sont peu
efficaces, difficile à faire ingérer de force et donc parfois dangereuses.

 La seule méthode relativement efficace et réaliste consiste à faire prendre de


force, mais avec précautions d’usage, 1 à 2 ml/kg d’une solution d’eau
oxygénée à 10 volumes à l’aide d’une seringue ou d’une bouteille.

Si le propriétaire de l’animal insiste , il est plus judicieux de lui conseiller de


faire boire l’animal pour diluer le toxique ou mieux de lui faire prendre un blanc
d’œuf pour neutraliser le toxique.

 En revanche la prise de lait est déconseillée car le lait à tendance, au


contraire, à favoriser la résorption digestive des toxiques liposolubles.

● Lavage gastrique

Le lavage gastrique est parfois rendu nécessaire chez les carnivores


domestiques du fait de certaines contre indications de vomitifs ou de l’échec de
l’administration d’un vomitif. Il doit être pratiqué dans l’heure qui suit l’ingestion
supposée du toxique sous peine d’une efficacité limitée voire nulle compte tenu
de la lourdeur de sa mise en œuvre.

Le lavage gastrique est généralement contre indiqué lors d’intoxication par les
toxiques caustiques ou tensioactifs pour les mêmes raisons que précédemment.

Après anesthésie générale et intubation trachéale préalable de façon à éviter


toute fausse déglutition, une sonde gastrique fenêtrée de large diamètre est
introduite sur une longueur équivalente à la distance entre le bout du museau
et le cartilage xiphoïde.

La table sur laquelle repose l’animal est alors inclinée de façon à placer la tête
plus basse que l’abdomen.
41

Le lavage est pratiqué en administrant dans la sonde 5 à 10 ml/kg PV d’eau ou


de NaCl à 0,9 % préalablement tiédi pour éviter toute irritation
supplémentaire de la muqueuse gastrique.

La récupération du liquide se fait par simple gravité et le liquide recueilli lors de


ce premier lavage peut être envoyé au laboratoire pour recherche de toxique.
Il faut ensuite répétée les lavages 10 à 15 fois jusqu’a la récupération d’un
liquide clair et dépourvu de particules solides.

Après le premier lavage il est conseillé d’utiliser une suspension de charbon


actif (1g/kg PV) en lieu et place de l’eau ou du NaCl 0,9 %.

Lorsque les lavages sont terminés, l’intubation gastrique peut permettre de


déposer dans l’estomac une suspension de charbon actif plus concentrée ou
d’autres médicaments.

 Vidange chirurgicale

Chez les ruminants (ingestion de plantes toxiques).

 Accélération du transit intestinal

Il peut être intéressant de chercher à accélérer le transit intestinal en


augmentant l’élimination digestive de la fraction du toxique présent dans les
portions ultérieures du tube digestif, notamment dans l’intestin grêle. Ainsi,
uniquement en cas de constipation ou l’absence de diarrhée des purgatifs doux
et non irritant peuvent être administrés à l’animal :

 Sulfate de sodium ou de magnésium en solution aqueuse à 20 % -


0, 5 à 1 g/kg PV –voie orale
 Huile de paraffine (HUILE DE PARAFFINE GILBERT ®, LANSOYL®,…)
1 à 10 ml/kg voie orale

 Les purgatifs irritants (huile de ricin,...) sont contre-indiqués, risquant de


faciliter la résorption des toxiques par suite de l’inflammation des la muqueuse
digestive de même que les huiles végétales (huile d’arachide, de tournesol ou
d’olive) sont contre indiqués car facilitent la résorption digestive des toxiques
liposolubles.

 En outre les purgatifs lubrifiants de synthèse (dioctylsulfosuccinate de sodium)


administré simultanément à l’huile de paraffine sont contre indiqués car
favorisent la mise en émulsion de l’huile de paraffine et donc sa résorption, ce
qui va à l’encontre du but recherche. Enfin, l’administration de purgatifs
anthraquinoniques ne présentent aucun intérêt puisque ces purgatifs ne sont
actifs que sur les portions terminales du tube digestif après activation
enzymatique.
42

1.2.1.2 Neutralisation du toxique dans le tube digestif

Il est possible de chercher à neutraliser le toxique de façon non spécifique dans


le tube digestif en le dénaturant ou en le piégeant à l’aide des moyens
chimiques.

Rappelons que le lait est totalement contre-indiqué dans les intoxications par
des substances liposolubles, mais par contre, que le blanc d’œuf peut
présenter un intérêt, notamment dans les intoxications par les métaux.

● Administration d’adsorbants

L’adsorbant le plus efficace est le charbon actif. D’origine végétale, il est


obtenu par pyrolyse et activé par plusieurs procédés permettant de créer un fin
réseau de pores à l’intérieur desquelles pénètrent des substances chimiques.

Il agit donc en adsorbant à sa surface de façon non spécifique nombre de


toxiques (molécules polaires ou apolaires, de masses relative faible ou élevée, à
l’état solide, liquide ou gazeux,…) non encore résorbés ou éliminés par la voie
biliaire ; les complexes insolubles formés ne peuvent être résorbés et sont donc
éliminés dans les matières fécales.

1 gramme de charbon actif peut adsorber jusqu'à 1 gramme de n’importe quel


toxique et sa capacité d’absorption est proportionnelle aux nombres de pores et
à la surface totale d’absorption.

Le charbon actif se présente sous forme de :

 Poudre orale : poudre de couleur noire, de texture fine et légère,


destinée à être mise en suspension dans l’eau à raison d’environ 1 g de
poudre dans 5 à 10 ml d’eau
 De granulés (in CARBOMIX*,…)
 De comprimés (CARBOPHOS*,…), de gélules…

Le charbon actif est utilisé à la posologie de 1 à 5 g/kg PV. Ses deux principaux
inconvénients sont sa difficulté d’administration et le risque de ralentissement
du transit digestif voire de constipation, ce qui explique qu’il est souvent
recommandé d’administrer un laxatif doux 12 à 24 heures après l’administration
du charbon actif.

Charbon végétal actif


43

● Administration de neutralisants et d’antiacides

 Les neutralisants (acides acétique à 6%, ammoniaque dilué,…),


parfois conseillés lors d’intoxications par les acides et les bases
fortes, sont généralement contre indiqués en raison du caractère
irritant qu’ils présentent eux-mêmes.

 Les antiacides sont également parfois utilisés, en particulier les


sels et oxydes de magnésium. Ils présentent aussi l’intérêt d’agir
comme « pansement gastro-intestinal » et de limiter la
résorption des toxiques en tapissant la muqueuse digestive. Il
peut donc être conseillé utilement au propriétaire de les
administrer à son chien ou son chat avant de conduire son animal
au vétérinaire (une cuillère à café à 2 cuillères à soupe de
® ® ®
MAALOX , GASTRALUGEL , PHOSPHALUGEL , GEL DE
® ®
POLYSILANE , GAVISCON ).

1.2.2. Accélération de l’élimination du toxique résorbé

En pratique, on cherche essentiellement à accroitre l’élimination rénale du


toxique et/ou de ses métabolites et, en cas d’insuffisance rénale, à s’y suppléer
par une dialyse péritonéale.

a. Elimination rénale du toxique

La voie rénale est l’une des voies majeures d’élimination des déchets de
l’organisme et des xénobiotiques. Lors d’intoxication, il est possible de la
favoriser, soit en augmentant la diurèse, soit en modifiant le pH des urines pour
limiter la réabsorption tubulaire passive de certains toxiques.

 Augmentation de la diurèse

Elle peut être obtenue par la mise en œuvre d’une perfusion intraveineuse
d’une solution isotonique de NaCl ou de Ringer Lactate ou de solution
hypertonique de mannitol à 5 ou 10 %.

L’emploi de solutions hypertoniques doit toujours être réalisé en association


avec celui des solutions isotoniques au risque de déshydrater l’animal.

o Le mannitol en solution hypertonique à 10 % s’emploi à une dose


initiale de 1 ml/kg la 1ère heure ; si cette dose produit une diurèse,
il est alors conseillé de continuer la perfusion avec une solution
hypertonique de mannitol à 5 % à la dose approximative de
10ml/kg/h. Par ailleurs il est dans tous les cas indispensable de
s’assurer que la production d’urines accompagne la perfusion, par
exemple en installant une sonde urinaire.
44

L’augmentation de la diurèse peut être potentialisée par le recours à des


diurétiques outre que le mannitol, ce qui suppose d’hydrater l’animal par des
perfusions adaptées à manière à induire une excrétion rénale suffisante. Le
® ®
furosémide (DIMAZON INJECTABLE , FUROZENOL SOLUTION à 1%) est la
molécule de choix : elle est préconisée à la dose de 2 à 8 mg/kg/j par la voie
intraveineuse.

En pratique, chez les carnivores domestiques il conv ient


d’administrer par la voie IV à la posologie de 120 à 150 ml/kg/j une
solution contenant :

o 2/3 d’une solution de NaCl à 0,9 % ou de Ringer Lactate


o 1/3 d’une solution hypertonique de mannitol à 5 %
o Furosémide à raison de 2 à 8 mg /kg

● Modification du pH urinaire

En complément, dans le cas de toxiques ionisables, il est possible d’accroître


leur élimination en modifiant le pH urinaire.

L’alcalinisation des urines est favorable à l’élimination des toxiques acides


(salicylés, éthylène glycol, herbicides de la série des phytohormones,…).

o On utilise alors la solution de bicarbonate de sodium à 1,4 % par


la voie intraveineuse lente à la posologie de 1 à 2 meq/kg toutes les
3 à 4 heures. Cette administration rarement réalisée, n’est pas
anodine du fait des corrections ultérieures en ions Cl - et K+ qu’elle
nécessite.

L’acidification des urines est au contraire favorable à l’élimination des toxiques


basiques (strychnine, crimidine,…)

®
o On utilise alors le chlorure d’ammonium (CHLORAMMONIAC )
par la voie orale à la posologie de 200mg/kg/j chez le chien et 40
mg/kg/j chez le chat, répartie en 2 prises.

o Cette acidification est en pratique rarement nécessaire puisque les


urines des carnivores domestiques sont naturellement acides.

b. Dialyse péritonéale

La dialyse péritonéale est pratiquée chez les carnivores domestiques dans


certaines situations graves : anurie par insuffisance rénale primitive (éthylène
glycol, calciférol,…) ou détérioration progressive de l’animal en dépit du
45

traitement entrepris. Son but essentiel est de suppléer partiellement les reins
au fonctionnement provisoirement défaillant en permettant de détoxifier les
animaux en état d’anurie.

Son principe repose sur la diffusion au travers du péritoine des déchets


endogènes et exogènes présents dans le liquide extracellulaire, notamment
dans le sang. L’administration dans la cavité péritonéale d’un liquide de dialyse
dépourvu des substances que l’on désire éliminer induit un gradient de
concentration entre le sang et le liquide présent dans la cavité abdominale.

L’efficacité de la dialyse dépend donc de la capacité du toxique à diffuser au


travers des membranes biologiques à une vitesse suffisante de manière à
pouvoir passer dans le liquide de dialyse au travers du péritoine. Les toxiques
les plus activement éliminés par ce procédé sont donc les molécules liposolubles
et de faible masse relative.

En pratique les liquides de dialyse utilisés chez les carnivores domestiques sont
ceux qui sont utilisés chez l’homme, même si la teneur sanguine en électrolytes
est plus faible chez l’homme que chez les carnivores domestiques. Le liquide de
dialyse, préalablement tiédi, est administré par la voie intra-péritonéale à la
posologie moyenne de 40 ml/kg à l’aide d’une tubulure en plastique montée sur
un trocard. Il est laissé en place pendant environ 30 minutes puis retiré aussi
complètement que possible.

L’opération peut éventuellement être renouvelée.

c. Les émulsions lipidiques intraveineuses : ELI

Les ELI ont été utilisées pour la première fois comme antidote en Toxicologie
humaine, dans le traitement des intoxications par des anesthésiques locaux,
particulièrement la bupivacaïne. Le premier cas traité selon cette méthode fut
publié en 2006 chez l’homme puis en Médecine vétérinaire chez un chat
(intoxication à la lidocaïne).

Depuis, la liste de intoxications susceptibles d’être traitées par les ELI s’est
accrue. Les intoxications par l’ingestion de médicaments humains ou
d’insecticides et antiparasitaires vétérinaires représentent le groupe le plus
important. Le recours aux ELI représente une nouvelle thérapie lors
d’intoxication par des substances lipophiliques.

Les ELI sont des émulsions lipidiques composées de triglycérides, d’un


émulsifiant phospholipidique et de glycérine, le tout additionné d’eau.
Le principal type de lipide utilisé est dérivé d’huile de soja (triglycéride à chaine
longue contenant de l’acide linoléique).

Les présentations commerciales contiennent principalement de l’huile de soja


(Intralipide ou Liposyn N.D.) ou un mélange d’huile de soja et de tournesol
(Liposyn N.D.), ou d’huile d’olive.
46

La solution ELI la plus souvent utilisée (surtout lors d’intoxication) est


l’Intralipide à 20%, c’est-à-dire qui contient 200 mg/ml de lipides.

C’est une solution d’apparence laiteuse isotonique, c’est-à-dire que son


osmolarité est équivalente au plasma, ce qui autorise son administration par
voie IV. Sa densité calorique est de 2 kcal/ml. Elle est stockée à température
ambiante (< 25°C) mais doit être protégée de la lumière.

La plupart des données pharmacologiques découlent de l’emploi des ELI lors de


nutrition parentérale. La vitesse maximale de clairance des ELI les plus
fréquemment utilisées en clinique est de 3,9 gr de lipides/kg/24h.

Les émulsions lipidiques sont classiquement administrées en perfusion lente


(pompes à perfusion), mais lors d’intoxication on les administre aussi sous
forme de bolus. Les gouttes de lipides sont assez similaires aux chylomicrons et
sont dépurés par les muscles squelettiques, le tissu sous-cutané, le myocarde et
les viscères splanchniques.

Le mode d’action n’est pas totalement élucidé. Deux hypothèses ont été
avancées. D’une part un effet « lipid sink » et d’autre part un effet métabolique.
La théorie du « lipid sink » suppose que la création d’un compartim ent lipidique
dans la circulation sanguine attire les substances lipophiles et les écarte de
leurs récepteurs cellulaires, les empêchant d’ainsi d’exercer leurs effets
toxiques. La théorie métabolique suppose que les lipides peuvent en plus
diminuer l’effet toxique de ces substances en apportant aux cellules une source
d’énergie supplémentaire ( http://www.centreantipoisons.be).

La dose recommandée chez les carnivores est de 1,5 ml/kg d’ELI à 20% en
bolus (sur une minute) suivie d’une perfusion de 0,25 ml/kg/mn administrée sur
½ heure. En l’absence de réponse le traitement peut être renouvelé une fois
(http://vetopressbox.com).
47

II. Diagnostic des intoxications

A l’exception de quelques cas d’intoxications (anticoagulants, chloralose) le


diagnostic clinique des intoxications des carnivores domestiques est souvent
difficile voire impossible. Dans bien des cas des signes cliniques frustres et
non spécifiques ne permettent pas d’aboutir à un diagnostic précis. La clinique
seule est donc souvent insuffisante pour aboutir à un diagnostic.

Le diagnostic toxicologique repose sur la confrontation des données apportées


par :

1. L’examen clinique et nécropsique


2. L’enquête épidémiologique
3. Les analyses toxicologiques

1. Examen clinique et nécropsique

L’examen clinique et nécropsique complet ne débouche que rarement sur un


diagnostic de certitude et ne constitue donc qu’un élément d’orientation vers
une suspicion d’intoxication.
Il s’avère néanmoins indispensable car il est susceptible d’orienter
ultérieurement le laboratoire dans ses recherches après discussion avec le
vétérinaire praticien.
En pratique, étant donné le manque de spécificité de la plupart des signes
cliniques et des lésions ; il importe d’apprécier de façon aussi précise que
possible plusieurs données : temps de latence, durée d’évolution, signes
clinques et lésions (séquence d’apparition et dominantes), données
d’épidémiologie clinique.

o Temps de latence

L’appréciation du temps de latence, du moment probable de l’ingestion du


toxique, est délicate dans l’immense majorité des intoxications.

D’une part de nombreuse intoxications sont consécutives à une ingestion


réitérée de toxiques, rendant difficile la prise en compte du temps de latence à
des fins diagnostiques. D’autre part, ce temps de latence est susceptible de
varier dans des proportions non négligeables en fonction de l’état de réplétion
des estomacs et de la quantité de toxique ingérée.

Généralement, le temps de latence, lorsqu’il peut être déterminé, ne vient donc


que corroborer les suspicions fondées sur d’autres éléments cliniques.
48

o Durée d’évolution

La durée d’évolution est en général beaucoup plus facile à apprécier et permet


de distinguer des formes suraigües (durée inférieur à 1 h), aigües (durée entre
1 et 48 h) et chroniques (durée supérieure à 48 h).
Elle doit y être prise en considération pour quatre raisons s essentielles :

 Sa relative spécificité : certaines intoxications n’évoluent


habituellement que sur un seul mode,
 Son influence sur les lésions : la durée d’évolution détermine en partie
un type de lésions et doit être prise en compte dans l’interprétation de
ces lésions ; ainsi, lors d’intoxication aigües, les lésions sont discrètes et
non spécifiques en raison de la rapidité d’évolution,
 Les choix des prélèvements pour l’analyse : le contenu gastrique ne
peut habituellement être utilisé à des fins diagnostiques pour des
recherches complémentaires que lors d’intoxications suraigüe ou aigüe,
 Sa valeur pronostique : le pronostic de nombreuses intoxications est en
partie lié à la durée d’évolution ; il est plutôt favorable lors
d’intoxication aigüe, plus défavorable lors d’intoxication suraiguë et
chronique.

o Séquence d’apparition des signes cliniques

Tout signe clinique considéré isolément ne présente aucun intérêt, mais fait
partie d’un tableau clinique qui doit être apprécié globalement ; dans un
contexte, l’un des points importants est l’ordre chronologique d’apparition des
signes cliniques.

Il ne faut cependant pas accorder trop d’importance à l’ordre d’apparition des


signes digestifs, lorsque ceux-ci sont présents car ils apparaissent généralement
en premier, la muqueuse digestive étant généralement la première atteinte par
les toxiques.

 Signes cliniques et lésions dominantes

Dans nombre d’intoxications, le vétérinaire peut être surpris par l’ensemble des
manifestations cliniques observées. Il est donc essentiel de classer, de déceler
les signes cliniques et les lésions dominantes. Il est par exemple, possible de
distinguer les intoxications en fonction des manifestations cliniques dominantes
suivantes :

 Signes nerveux,
 Anémie, ictère et trouble de l’hémostase
 Insuffisance respiratoire aiguë
 Signes rénaux
 Signes digestifs
 Signes cutanés
49

Il ne faut pas trop accorder d’importance aux convulsions terminales, celles-ci


ne possèdent évidement aucune valeur diagnostique et doivent donc conduire
le vétérinaire à analyser les signes cliniques qui les ont précédées et qui parfois
ont pu paraitre secondaires au propriétaire.
Par ailleurs, il convient de prêter une attention particulière au caractère
inhabituel de tel signe clinique ou de telle lésion ; ce type d’information,
lorsqu’il est obtenu, peut parfois réduire le nombre de toxiques incriminés.

 Données d’épidémiologie clinique

Les indices de morbidité, de mortalité et létalité n e sont pas à négliger


notamment, en particulier chez les animaux de production.

2. Enquête épidémiologique

L’enquête épidémiologique à pour objectif d’établir les circonstances antérieures


à/ou concomitantes de l’intoxication pour évaluer le risque d’exposition et la
vraisemblance d’une source toxique compte tenu des conditions de vie des
animaux au moment de la survenue de l’intoxication.

Le rassemblement du plus grand nombre d’informations possibles sur le terrain


par le vétérinaire lui permet, d’une part d’orienter sa suspicion, d’autre part
d’aider le laboratoire d’analyse à effectuer les examens complémentaires utiles
à la confirmation de la suspicion.

L’enquête épidémiologique doit déboucher sur la rédaction d’une fiche de


commémoratifs qui suivra les prélèvements jusqu'à leur analyse.

La rédaction de cette fiche oblige le vétérinaire à une certaine rigueur dans


l’établissement de sa suspicion et est une aide précieuse pour le laboratoire,
notamment en cas de résultat négatif pour orienter d’éventuelles recherches
complémentaires.

L’enquête épidémiologique s’opère en 2 étapes : la collecte d’informations qui


permet d’émettre des hypothèses et l’appréciation du risque ce qui permet de
vérifier les hypothèses initiales.

a. Collecte d’informations

La collecte d’information doit être effectuée très méthodiquement de façon à ne


laisser échapper aucune donnée utile ; ces informations sont :

 Soit antérieures à l’intoxication : elles concernent notamment les


antécédents pathologiques des animaux qui sont parois des facteurs
prédisposant importants,
 Soit concomitantes de l’intoxication : il s’agit principalement de facteurs
environnementaux et alimentaires qui sont des conditions favorisantes
souvent essentielles.
50

Facteurs prédisposants :

Espèce :

Certaines espèces animales sont plus sensibles que d’autres à l’action de


certains toxiques.

Age :

De nombreuses intoxications surviennent chez les jeunes animaux et les jeunes


adultes du fait de leur comportement imprudent et curieux et de leur
équipement enzymatique encore insuffisant pour dégrader les toxiques, par
ailleurs, les animaux âgés paient également un lourd tribut aux intoxications du
fait de leurs moindre résistance aux effets néfastes de nombre de toxiques et
d’une éventuelle insuffisance de la fonction hépatique ou rénale.

Facteurs physiologiques et pathologiques :

Une insuffisance hépatique ou rénale grave ainsi qu’une gestation rend les
animaux plus sensibles à l’action de nombre de toxiques.

Conditions favorisantes :

Les facteurs environnementaux sont très importants à considérés dans la


survenue des intoxications.

Beaucoup d’intoxications sont d’origine accidentelle et relèvent soit d’une


méconnaissance du danger, soit d’un manque de précautions, soit d’une erreur
de manipulation, soit s’une pollution.

Les intoxications d’origine malveillantes existent et sont beaucoup plus


fréquentes chez les carnivores domestiques que chez les animaux de
production.

b. Appréciation du risque toxique

La collecte des informations précédentes permet d’émettre des hypothèses dont


il faut évaluer la vraisemblance. C’est l’appréciation du risque toxique, facile à
réaliser dans nombre d’intoxications accidentelles par des pesticides ou des
médicaments.

Cette appréciation exige la comparaison de trois types de données :


l’appréciation de l’exposition, la toxicité potentielle de la substance suspectées
et l’appréciation du risque.
51

i. Appréciation de l’exposition au danger

L’appréciation de l’exposition, c.-à-d. la fréquence de présence du toxique et


donc de contact avec l’animal, est très variable selon les toxiques, les espèces
animales et leurs conditions de vie.

Par ailleurs le caractère appétant ou non du toxique est important à prendre en


compte ; par exemple le chlorate de soude est un herbicide de saveur salée
volontairement consommé par les animaux qui y ont accès.

ii. Caractérisation du danger

La potentialité toxique d’une substance repose sur des données de toxicité par
administration unique ou réitérée qui permettent d’obtenir une DL 50 (dose létale
50) ces données toxicologiques utiles en médecine vétérinaire, sont pour, les
pesticides présentées dans l’index phytosanitaire.

Les limites de ces données sont évidentes. Elles sont obtenues chez les
animaux de laboratoire et leur extrapolation aux animaux domestiques est
toujours délicate. Elles ne tiennent compte ni des variations de sensibilité
d’espèce ni de la formulation employée. Néanmoins elles constituent un
élément d’orientation utile.

Ces données sont parfois complétées, les animaux domestiques, par la


connaissance des doses minimales mortelles ou de doses létales moyennes qui
permettent une estimation plus exacte sur la base d’études épidémiologiques et
non expérimentales.

iii. Caractérisation du risque

La caractérisation du risque dépend de la dose d’application de la substance,


des conditions précises son utilisation, de sa rémanence dans le milieu
extérieur et de la durée d’exposition des animaux à la substance. Il est alors
possible d’apprécier la quantité de toxique vraisemblablement reçu,
généralement ingéré.

L’exemple suivant, chez les carnivores domestiques, est explicatif :

 Des granulés de molluscicide contenant 5 % de métaldéhyde ont été


épandus dans un jardin potager de 100 m 2 à la dose de 200 g de
granulés pour 100 m 2.

o Le chien de ce propriétaire a mangé ces granulés de saveur


appétente ; La dose létale moyenne de métaldéhyde après
administration unique est de 500mg/kg PV chez le chien.
o Sachant que la quantité totale de granulés épandus dans le jardin
potager est de 200g ce qui correspond à 200 g X 5 % soit 10 g de
métaldéhyde.
52

o En supposant que le chien pèse 40 kg et qu’il a ingéré la totalité


des granulés,
o La dose de métaldéhyde alors ingérée est de 10 g soit 250 mg/ kg
PV.

 Ainsi la dose ingérée étant 2 fois plus faible que la dose létale moyenne
et l’ingestion de la totalité des granulés par le chien étant illusoire, le
risque toxique pour l’animal peut être considéré comme très faible voire
nul.

3. Prélèvements

La suspicion d’intoxication, repose sur la confrontation des informations


cliniques, nécropsique et épidémiologiques, doit parfois être confirmée par le
laboratoire. En pratique, cela conduit le vétérinaire :

 A choisir correctement les prélèvements en fonction des intoxications


suspectées,
 A ne jamais envoyer de prélèvements non accompagnés de
commémoratifs ou accompagnés de la seule mention
« recherche de toxiques »,
 A expédier les prélèvements dans des conditions qui assurent la
meilleure conservation des toxiques.

a. Choix des prélèvements

Lors d’intoxication le vétérinaire peut reconnaitre immédiatement la nature du


toxique et faire appel au laboratoire pour confirmer sa suspicion clinique. Dans
ce cas les prélèvements sont sélectionnés en tenant compte du comportement
pharmacocinétique du toxique suspecté et de ses particularités physiologiques
dans l’espèce animale atteinte.

Deux facteurs sont particulièrement déterminants : la vascularisation des


organes et les affinités tissulaires spécifiques des toxiques.

La plus part du temps, le vétérinaire n’a pas de suspicion clinique précise. Dans
ce cas, il doit adresser au laboratoire d’analyse un nombre assez important de
prélèvements en quantité suffisante (voir tableau).

Cette attitude prudente évite d’oublier certains prélèvements qu’il aurait eu


tendance à délaisser à priori et qui seraient ultérieurement irrécupérables. Par
ailleurs, il importe de respecter, dans la mesure du possible, les quantités à
expédier car certaines analyses ne peuvent pas être réalisées en raison des
prélèvements quantitativement insuffisants.

Enfin, des dispositions particulières doivent être prises lorsque le propriétaire


décide d’intenter une action en justice.
53

Fiche de commémoratifs

Date……………………

Vétérinaire demandeur
●Nom et prénom
●Adresse
●Téléphone et le téléfax

Propriétaire des animaux


●Nom et prénom
●Adresse
●Téléphone et le téléfax

Identification des animaux


Espèce, sexe, poids, race, âge.

Données épidémiologiques chiffrées

Nombre Pourcentage
Totalité des animaux
Indice de mortalité
Indice de morbidité
Indice de létalité

Anamnèses
●Maladies survenues dans les 6 derniers mois
●Traitement effectué (nature, date,…)

Facteurs environnementaux d’exposition


●Logement
 Intérieur en permanence
 Extérieur en permanence
 Mixte
 Changement récent
●Alimentation et abreuvement
●Climat
●Locaux d’élevages et alentours
 Degré de vétuste
 Lieu de stockage des pesticides
 Traitement phytosanitaires récents
 Présence des batteries abandonnées
 Proximité de décharge de déchets
 Proximité d’industries

Exemple de fiche de commémoratifs


54

i. Sur l’animal vivant

Sur l’animal vivant, cinq types de prélèvements peuvent être réalisés : les
vomissements, les urines, le sang, le lait et les phanères par ordre d’’intérêt
décroissant :

 Vomissures ou matières fécales

Les vomissures voire les matières fécales présentent un intérêt certain lors
d’intoxication aigüe ou suraigüe survenant par ingestion chez le chien et le
chat, en effet outre leur couleur et leur odeur est parfois caractéristique, ils
contiennent généralement une concentration suffisante de toxique pour
autoriser une caractérisation.
Les vomissements peuvent être spontanés ou provoqués par le recours à des
vomitifs. En tous les cas ils ne sont intéressants qu’avant la fin de la vidange
gastrique naturelle, au maximum 6 heures après l’ingestion présumée du
toxique.

 Urines

Les urines constituent un prélèvement utile dont l’importance est souvent


sous estimée en pratique. D’une part, de nombreux toxiques sont en partie
éliminés sous forme inchangée par la voie rénale. D’autre part les toxiques y
atteignent souvent des concentrations élevées, 100 à 1000 fois supérieures aux
concentrations sanguines, par suite du processus de filtration glomérulaire et de
sécrétion tubulaire active.

 Sang

Le sang est généralement un prélèvement peu intéressant pour la mise en


évidence directe des toxiques organiques dont les concentrations sanguines
sont faibles, de l’ordre de µg/ml. Par contre il peut être intéressant :

 Pour l’identification et le dosage de nombreux toxiques


minéraux (Plomb…) dans ce cas, le sang total doit généralement
être prélevé sur anticoagulant (édétate, citrate ou héparinate) et
conservé réfrigéré et non congelé,

 Pour certains examens indirects (dosage le méthémoglobine, dosage


du calcium, mesure de l’activité cholinestérasique , mesure de
l’activité de diverses enzymes, mesure du temps de Quick, …) : le
sang selon les cas doit être prélevé sur anticoagulant ou tube sec et
conservé réfrigéré (sang total) ou congelé (plasma ou sérum). Le
vétérinaire a donc intérêt à contacter le laboratoire d’analyses avant
l’envoi des prélèvements sanguins, sous peines quelques fois d’avoir
à réitérer les prélèvements avec la perte d’information qui peut en
découler.
55

 Lait

Le lait peut parfois être un prélèvement intéressant en cas de suspicion


d’intoxication par des substances liposolubles éliminée par vois mammaires
(organochlorés …)

 Phanères

Les phanères facilement accessibles ont malheureusement un intérêt


relativement limité chez les animaux. Ils peuvent éventuellement être très utiles
lors d’intoxications chroniques par les métaux, dans le cadre d’étude de la
pollution, bien qu’il ne soit pas toujours facile d’établir une distinction entre la
contamination superficielle externe et l’accumulation à l’intérieur des
constituants des phanères.

ii. Sur l’animal mort

Sur l’animal mort, les prélèvements sont plus nombreux que sur l’animal
vivant.

 Contenu digestif

Le contenu digestif présente les mêmes intérêts que les vomissements et les
mêmes limites (durée de vidange des estomacs : 6 heures chez les
monogastriques). Il permet également l’identification macroscopique et
microscopique de fragments de végétaux dans le cas de suspicion d’intoxication
par une plante ; il ne doit alors en aucun cas être congelé sous peine de
détruire les cellules de la plante.

Chez les carnivores domestiques, il peut être intéressant de prélever, soit la


totalité de l’estomac préalablement ligaturé à ses deux extrémités pour éviter
toute perte de prélèvement, soit les matières fécales.

 Foie

Le foie est le deuxième prélèvement intéressant sur le cadavre. Il est richement


vascularisé et est le passage obligé des toxiques résorbés par la voie
digestives ; en outre, il est riche en lipides (insecticides,…) et en
méthallothionéines (plomb, cuivre,…)

 Reins

Les reins présentent le même intérêt que le foie du fait de l’importance de la


quantité de sang qui y afflue et sa richesse en métallo-thionéines (plomb,
cuivre,…)
56

 Urine et sang

Les urines et le sang présentent les mêmes intérêts et les mêmes limites que
chez l’animal. Le prélèvement d’urine n’est cependant pas toujours possible car
la vessie des animaux peut être vide lors de l’autopsie.
Concernant le sang, c’est le caillot intracardiaque qu’il convient de prélever le
plus rapidement possible après la mort de l’animal et de stocker dans un flacon
sans anticoagulant.

 Tissu adipeux

Le tissu adipeux peut être parfois utile dans le cas de toxique très liposolubles.
Il convient de prélever de préférence de la graisse mésentérique ou péri rénale
en raison d’une vascularisation. Néanmoins, des difficultés d’interprétation
peuvent se présenter car la présence de faibles concentrations peu signifier une
contamination ancienne (pollution) sans relation avec le toxique réellement en
cause.

 Encéphale

L’encéphale peut également être utile dans la mesure ou il est très vascularisé
et ou le toxique est suffisamment liposoluble pour traverser la barrière hémato-
méningée. En revanche, son prélèvement est plus compliqué que les autres car
il oblige à ouvrir la boite crânienne.

 Os

Rarement prélevé. Un os de préférence long, peut permettre d’apprécier un


niveau d’exposition chronique à certains métaux comme le plomb ou au fluor.

iii. Sur le terrain

Sur le terrain, les principaux prélèvements possibles sont l’eau, les aliments, les
plantes et les appâts suspects. Ils doivent être prélevés en plusieurs
emplacements puis conditionnés :

- dans des récipients en plastique rigide,


- dans des poches en polyéthylène ou en polychlorure de vinyle dans le
cas les aliments ou des organes volumineux de plantes (fruits, racines),
- entre deux feuilles dans le cas de plantes entières,

Ces prélèvements s’avèrent particulièrement intéressants car ils peuvent


contenir des concentrations en toxiques plus élevées ; la reconnaissance du
toxique dans ces prélèvements contribue à établir un faisceau de
présomptions. Néanmoins, ils n’apportent jamais de certitude complète comme
les prélèvements réalisés sur l’animal vivants ou mort. Leur valeur à elle seule
pourra toujours être contestée en justice dans la mesure ou rien n’indique que
les animaux ont consommés de telles plantes toxiques ou tel aliment.
57

Au bilan, les prélèvements les plus utilisés lors d’intoxications animales par les
toxiques courants sont le contenu gastrique, le foie, les reins et à moindre
degré, le sang et les prélèvements alimentaires.

Prélèvement Quantité Conservation Commentaires

Vomissements ou Totalité R ou C Intoxication aiguë


fèces ou suraiguë
Urines 50 à 200 ml R ou C Toutes
intoxications
Sang total 5 à 15 ml R Utiles pour nombre
plasma et sérum 5 à 10 ml C d’examen indirects
Lait 20 à 50 ml R ou C Intoxication par des
composés
liposolubles
Phanères 1 à 10 g R ou C Intoxication
chronique par les
métaux
Contenu Totalité C Intoxication aiguë
stomacal R (plantes) et suraiguë
Foie 50 à 100 g C Intoxication aiguë à
chronique par des
métaux et aiguës
par composés
liposolubles
Rein 50 à 100 g C Intoxication aiguë à
chronique par des
métaux
Encéphale Moitié C Intoxication par des
composés
liposolubles
Graisse 100 g R ou C Intoxication
chronique par des
composés
liposolubles
Os Os long R Intoxication
chronique par
certains métaux
Aliments 1 à 2 kg R ou C Impossible d’établir
que l’animal a
Eau 1 litre minimum R ou C réellement
consommé ces
Plantes totalité R prélèvements

Appâts suspects totalité R ou C

Prélèvements en vue d’une analyse toxicologique


Abréviations : R (Réfrigéré) – C (Congelé)
58

b. Préparation et conditionnement du prélèvement

Plusieurs règles doivent impérativement être respectées dans la préparation et


le conditionnement des prélèvements de façon à permettre la meilleure
conservation possible des toxiques :

 Chaque échantillon doit être séparément placé dans un emballage individuel


hermétique (poche ne polyéthylène et polychlorure de vinyle, flacon, tube,
ou boite en plastique,…) ; il faut éviter les pots à bouchon vissé en métal
surtout lorsqu’une intoxication par un métal est suspectée,
 A de rares exceptions, aucun conservateur ou antiseptique ne doit être
ajouté au prélèvement : le seul moyen efficace de conservation étant le
froid, l’idéal est souvent la congélation des prélèvements,
 Chaque prélèvement doit être identifié à l’intérieur de son emballage
individuel (nature du tissu, nom de l’animal ou du propriétaire),
 L’emballage extérieur doit être isotherme, ce qui permet d’incorporer des
réfrigérants, hermétique et résistant ce qui permet d’éviter des
désagréments pour les transporteurs ou le personnel du laboratoire à
l’ouverture du colis ; il est impératifs d’y placer des absorbants de veiller à
parfaitement caler les tubes et les boites renfermant des liquides
biologiques,
 Une fiche de commémoratifs la plus complète possible doit être placée, soit
à l’intérieur du colis dans une poche en plastique, soit de préférence à
l’extérieur du colis dans une enveloppe de papier.

c. Moments et voie d’expédition des prélèvements

Les prélèvements doivent été expédiés le plus tôt possible et le plus rapidement
possible.

Néanmoins, il convient d’éviter les retards d’acheminement par l’expédition des


prélèvements en fin de semaine ou la veille des jours de fériés et alors de
conserver ce colis pendant ce temps au congélateur ou au réfrigérateur.
Parfois, les propriétaires au lieu d’expédier les colis se déplace et livre eux-
mêmes les prélèvements au laboratoire d’analyse aussitôt après leur collecte
par le vétérinaire.

d. Les laboratoires d’analyses toxicologiques

La difficulté de certaines analyses toxicologiques fait que le praticien est obligé


de recourir à des laboratoires spécialisés.

Pour les analyses de routine, les laboratoires de diagnostic toxicologiques de


l’école vétérinaire assurent ce service. Pour les analyses plus spécifiques il est
prudent avant d’expédier les prélèvements de contacter le laboratoire de
l’ENMV.
59

Les laboratoires d’analyses toxicologiques utilisent soit :

 Soit une méthode qualitative (colorimétrie) lorsque la seule présence du


toxique est anormale (strychnine, crimidine, métaldéhyde, chloralose…)
 Soit une méthode qualitative et quantitative (spectrométrie d’absorption
atomique, chromatographies avec détection UV/Visible, fluorimétrie,..)
lorsque le toxique est présent à l’état physiologique dans l’organisme
(nitrates, nitrites, cuivre) ou lorsque compte tenu du mode de vie de
l’animal, certains prélèvements peuvent contenir une concentration de
toxique basses (lindane,..).

CONCLUSION

La suspicion d’une intoxication animale repose sur la précision de l’examen


clinique, de l’autopsie et l’enquête épidémiologique. La confirmation de cette
suspicion passe obligatoirement par l’envoi de prélèvements adéquats à un
laboratoire d’analyses toxicologiques.

Le diagnostic analytique est souvent, en toxicologie, une opération aux résultats


incertains et économiquement lourde. Sa mise en œuvre justifie dons une
coopération étroite et intelligente entre les différents partenaires, si elle veut
être conduite à bon escient.

Nos vifs remerciements aux Professeurs : Martine Kammerer et Hervé Pouliquen de l’Ecole Vétérinaire de Nantes -
Oniris, Lotfi El Bahri de l’ENMV Sidi Thabet, leurs travaux et documents ont servi de base pour la réalisation
de ce polycopié.

Vous aimerez peut-être aussi