Vous êtes sur la page 1sur 1

le christianisme et les autres traditions religieuses la relation n’est pas plus facile et leurs

rencontres conflictuelles ont laissé des cicatrices tout à fait considérables à travers
l’histoire. Dans son ouvrage La rencontre du christianisme et des religions, Jacques
Dupuis a rappelé cet aspect conflictuel à travers un parcours historique. Selon lui, « sans
vouloir entrer dans de longues descriptions des situations conflictuelles qui se sont
créées entre les diverses traditions religieuses dans les siècles désormais loin de nous, il
suffit de se souvenir des crimes contre l’humanité qu’a connus le siècle qui vient de
s’écouler – non sans la complicité, à plusieurs reprises, des traditions religieuses
impliquées dans les conflits. On a suggéré l’idée que le siècle passé a peut-être été le
siècle le plus cruel dans l’histoire de l’humanité »3. Cette tendance révélée par Dupuis
est due à un sentiment de supériorité vis-à-vis de l’autre. Il appelle à surmonter cet
esprit de supériorité par une « purification de la mémoire ». À ce propos, il ajoute ce qui
suit : « Quoi qu’il en soit, il est clair qu’une vraie purification de la mémoire – et des
mémoires – même à propos d’événements récents, est nécessaire de tous les côtés, si
l’on veut arriver à une attitude réciproque rénovée, caractérisée par une rencontre réelle
et sincère entre les différentes traditions religieuses ».4Le caractère conflictuel entre le
christianisme et les autres religions est aussi dû à des jugements de valeurs qui furent
dans le passé et dans la majeure partie des cas, favorables au christianisme. Sur ce point,
il est encore important de considérer l’approche faite par J. Dupuis :
À côté des attitudes souvent hostiles envers les personnes, il faut tenir compte également des jugements
traditionnels négatifs portés sur leur patrimoine, tant culturel que religieux, qui ont traversé les siècles. Au
Ive siècle, une fois devenu religion reçue dans l’Empire romain, et ensuite officiellement religion d’État, le
Christianisme a assumé une attitude exclusiviste liée à une évaluation négative des autres religions. La
prétention d’être la seule « vraie religion » s’est idéologiquement exprimée dans l’axiome : Extra
ecclesiam nulla salus. L’Église fut considérée comme la seule « arche de salut », hors de laquelle les
hommes étaient perdus. La terminologie théologique, employée encore aujourd’hui par de nombreux
prédicateurs chrétiens et même par des théologiens, conserve encore des traces très claires d’un
vocabulaire délétère à l’égard des autres5.
Cette attitude des chrétiens dans leur histoire passée n’a fait qu’augmenter de jour en
jour un ego religieux qui agace les autres religions. Cette situation ne fait que favoriser
le désaccord entre les religions du monde. Sous un autre angle, il faut dire aussi que la
plupart des religions non chrétiennes ont tendance à se comporter en de véritables
victimes du christianisme. En
2 Ibid.,p. 7 3 J. DUPUIS, La rencontre du Christianisme et des religions, de l’affrontement au dialogue,
Paris, Cerf, 2002, p. 17. 4 Ibid., p. 17. 5 Ibid., p. 18.
18
étant « victimes », elles cherchent à justifier certaines actions odieuses en faisant croire
qu’elles ne font que se défendre ou donner une réponse au christianisme. A en croire
Jean Richard, spécialiste dans le domaine du pluralisme religieux, le problème est que
jusqu’à maintenant, certains fanatiques religieux ne veulent pas se rendre compte que «
le pluralisme religieux est […] un fait, une caractéristique de nos sociétés modernes6».
Les considérations de ces divers auteurs expliquent un peu la complexité de la réalité
religieuse haïtienne, où il y a constamment des bagarres idéologiques entre les
regroupements religieux conduisant souvent à des cas d’intolérance extrême. Le
vaudou7 se croit être le patron de la culture haïtienne, le chrétien se prend pour un agent
de civilisation et se dit adhérent de la première religion qui a pu fouler le sol haïtien
après celle des Indiens. Cette coexistence est très délicate étant donné que les
confrontations ne font que croître de jour en jour.

Vous aimerez peut-être aussi