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Résumé : Cet article s’inscrit dans le cadre du Programme Minimaliste (PM). Il analyse la
syntaxe des verbes physiopsychologiques du baoulé (walèbo), parlé dans le Département de
Sakassou. En effet, les verbes physiopsychologiques du baoulé peuvent être classés en
plusieurs groupes ou types. On enregistre également une panoplie de structures internes de
ceux-ci. Les différentes configurations que prennent ces verbes ne sont pas pareilles aux
autres. En d’autres mots, ces verbes ont des particularités qu’on ne rencontre pas avec les
autres types de verbes baoulé. Les verbes physiopsychologiques sont en majorité intransitifs,
c’est-à-dire qu’ils n’admettent pas d’objet ou complément.
Abstract: This article is part of minimalist program (MP). He analyzes the syntax of
physiopsychological verbs of baoulé (walèbo), spoken in the Department of Sakassou. Indeed,
the physiopsychological verbs of baoulé can be classified in several groups or types. There is
also a panoply of structures of these. The different configurations that these verbs take are not
the same as other. In other words, these verbs have peculiarities that are not encountered with
of types of baoulé verbs. The physiopsychological verbs are mostly intransitive, that is to say
they do not admit any object or complement.
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Revue Sciences, Langage et Communication Vol 2, N° 1(2018)
INTRODUCTION
Le baoulé est une langue kwa de Côte d’Ivoire. L’aire linguistique des baoulé ou le pays
baoulé ou encore le V baoulé se situe dans la partie centrale de la Côte d’Ivoire. Il s’étend sur
35.700 km2, soit 11% de la superficie du territoire national. Il est limité au Nord par les
Tagbana et les Djimini, à l’est par les Abron et les Agni, à l’Ouest par les Gouro, au Sud par
les Dida, les Abidji, les Abbey et les Agni (KOFFI, KOUASSI et N’GUESSAN, 2018). Le
baoulé est parlé plus précisément dans les Départements de Bouaké, Béoumi, Daoukro,
Didiévi, Dimbokro, Tiébissou, Toumodi, Sakassou, Yamoussoukro entre autres. Il existe
plusieurs variétés de cette langue. Mais, celle qui a servi de données à cette recherche est le
walèbo (baoulé parlé dans le Département de Sakassou).
Le travail que nous entreprenons ici porte sur la syntaxe des verbes physiopsychologiques du
baoulé. En effet, une telle étude sous-tend bon nombre d’interrogations. Au nombre de ces
préoccupations, nous pouvons noter : Quelle est la particularité des verbes
physiopsychologiques du baoulé ? La structure interne de ces verbes est-elle différente des
autres types de verbe ? Autrement dit, comment se forme la syntaxe des verbes
physiopsychologiques de cette langue kwa ?
A ces questions, nous essayons d’y répondre en organisant ce travail en plusieurs séquences.
La première porte sur le cadre théorique et méthodologique. La deuxième présente les types
de verbes physiopsychologiques du baoulé. Le troisième examine la syntaxe des verbes
physiopsychologiques à l’habituel. Enfin, la quatrième et dernière séquence permet d’analyser
la structure interne de ces verbes à l’accompli.
Cette présente est inscrite dans le cadre de la grammaire générative de Noam Chomsky. C’est
particulièrement le modèle du Programme Minimaliste ou PM qui est utilisé pour expliquer
les faits de langue.
Les verbes physiopsychologiques sont examinés dans le cadre de cette étude à l’habituel et à
l’accompli. Nous présentons dans un premier temps les faits dans chaque conjugaison, ensuite
nous donnons l’ordre, les constituants qui interviennent quant à la configuration de ces verbes
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dans les deux cas. En d’autres termes, on dira comment se réalisent ces verbes lorsqu’ils sont
exprimés à l’habituel et à l’accompli du walèbo.
Les verbes physiopsychologiques sont une catégorie de verbes qui regroupe d’une part, les
verbes physiologiques et d’autre part, les verbes psychologiques. L’union des deux termes
donne ce qu’on a appelé physiopsychologique. Nous analysons dans cet article, comme il a
été libellé la syntaxe de ces verbes sans tenir compte de cette subdivision. Mais, avant
d’aborder le travail à proprement dit, on présente dans cette séquence les différents types de
ces verbes. Il s’agit en clair d’énumérer ici les formations possibles des verbes
physiopsychologiques du baoulé. Soient les exemples ci-dessous.
b. srɛ̀ kú
peur tuer
« Avoir peur »
(2) a. j́ j̀
faire mal
« Avoir mal »
Après l’observation des faits ci-dessus, il ressort qu’il existe plusieurs types de verbes
physiopsychologiques dans cette langue kwa de Côte d’Ivoire. On en dénombre
particulièrement deux types selon les données à notre possession. Les exemples en (1)
illustrent le premier et celui en (2) met en exergue le deuxième. Nous enregistrons
concrètement dans ces cas les verbes physiopsychologiques de types N+V et V+Adj.
Les différents types de verbes physiopsychologiques baoulé ont été présentés ci-dessus. Ici,
nous analysons la structure interne des deux types de verbes à la conjugaison de type habituel.
Pour plus de précisions, observons très attentivement les données ci-après en (3).
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b. l̀f̀lɛ́ kù b̀
sommeil tuer.Hab 3PL
« Ils/elles ont sommeil »
c. ̀zŵẃ kù ɔ̀
soif tuer.Hab 3SG
« Il/elle a soif »
d. ̀zŵẃ kù b̀
soif tuer.Hab 3PL
« Ils/elles ont soif »
On voit avec ces exemples la conjugaison de ces verbes à l’habituel. Ces exemples montrent
une même configuration quel que soit le verbe physiopsychologique en présence. Nous
observons dans ces faits la structure N+V+Hab+S. En clair, pour la réalisation de ce type de
verbe, il faut : premièrement le N(om), ensuite le V(erbe) plus le marqueur de l’habituel (ton
bas) et le S(ujet). Le verbe autour duquel s’agglutine les autres éléments est le même partout.
C’est le verbe [kù ] « tuer » en baoulé. L’habituel en baoulé se réalise de deux manières. La
première (ton bas sur le verbe) étant ainsi présentée, voyons avec les exemples suivants la
syntaxe de la seconde configuration de l’habituel.
Ces exemples montrent une même configuration quel que soit le verbe physiopsychologique
qu’on a utilisé. Nous observons dans ces faits la structure N+V+S+Hab. En effet, pour la
réalisation de ce type de verbe, il faut : premièrement le N(om), ensuite le V(erbe), aussi le
S(ujet) et t̀t̀ (morphème de l’habituel). On remarque également que c’est seulement le verbe
[kù ] « tuer » qui est utilisé. Il faut dire dans ce cas que sans ce verbe, on ne peut y avoir ce
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(5) a. ɔ̄ t̀ j́ ɔ̀ j̀
3SG tête faire.Hab 3SG mal
« Il/elle a mal à la tête »
b. b̄ t̀ j́ b̀ j̀
3PL tête faire.Hab 3PL mal
« Ils/elles ont mal à la tête »
c. ɔ̄ ɟ̀ j́ ɔ̀ j̀
3SG pied faire.Hab 3SG mal
« Il/elle a mal au pied»
d. b̄ ɟ̀ j́ b̀ j̀
3PL pied faire.Hab 3PL mal
« Ils/elles ont mal au pied »
(6) a. ɔ̄ t̀ j́ ɔ̀ j̀ t̀t̀
3SG tête faire 3SG mal Hab
« Il/elle a mal à la tête »
b. b̄ t̀ j́ b̀ j̀ t̀t̀
3PL tête faire 3PL mal Hab
« Ils/elles ont mal à la tête »
c. ɔ̄ ɟ̀ j́ ɔ̀ j̀ t̀t̀
3SG pied faire 3SG mal Hab
« Il/elle a mal au pied »
d. b̄ ɟ̀ j́ b̀ j̀ t̀t̀
3PL pied faire 3PL mal Hab
« Ils/elles ont mal au pied »
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b. * bl̀ ̀ t̀ j́ ̀ j̀ ẃ ̀
femme def tête faire.Hab 3SG mal serpent def
« La femme a mal à la tête du serpent »
b. ɔ̀ sr̀ ẃ ̀
3SG avoir peur.Hab serpent def
« Il a peur du serpent »
Les exemples ci-dessus en (7) ne sont pas attestés en baoulé. Ils sont mal formés, c’est-à-dire
agrammatical. Cependant, ceux en (8) sont bien formés. On constate dès lors avec ces
données de cette langue que les verbes physiopsychologiques sont en général intransitifs. Ils
ne nécessitent pas de complément ou d’objet quant à leur formation. Les verbes qui acceptent
un complément changent immédiatement de configuration. Ils deviennent donc des verbes
simples. On a dans ces situations des énoncés de type SVO. On note en clair un S(ujet), un
V(erbe) et un O(bjet). Nous faisons le constat avec les exemples en (8a) et en (8b). A ces
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faits, il faut aussi ajouter que c’est avec le verbe [srɛ̀ kú ] « avoir peur » que cela est possible.
C’est d’ailleurs le seul cas qu’on a pu observer les variations.
4. L’accompli
b. l̀f̀lɛ́ kù ń b̀
sommeil tuer Acc 3PL
« Ils/elles ont eu sommeil »
c. ̀zŵẃ kù ń ɔ̀
soif tuer Acc 3SG
« Il/elle a eu soif »
d. ̀zŵẃ kù ń b̀
soif tuer Acc 3PL
« Ils/elles ont eu soif »
(10) a. ɔ̄ t̀ j́ ĺ ɔ̀ j̀
3SG tête faire Acc 3SG mal
« Il/elle a mal à la tête »
b. b̄ t̀ j́ ĺ b̀ j̀
3PL tête faire Acc 3PL mal
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c. ɔ̄ ɟ̀ j́ ĺ ɔ̀ j̀
3SG pied faire Acc 3SG mal
« Il/elle a mal au pied»
d. b̄ ɟ̀ j́ ĺ b̀ j̀
3PL pied faire Acc 3PL mal
« Ils/elles ont mal au pied »
Les exemples en (9) et en (10) présentent uniquement les verbes physiopsychologiques dans
sa conjugaison la plus simple. C’est en effet la réalisation du verbe sans complément ou objet.
Ce sont dans ces cas des énoncés de type SV. On voit de façon distincte le sujet et le verbe
dans la phrase. Cependant, que révèle la configuration des énoncés de type SVO en baoulé ?
Les exemples suivants en (11) et en (12) sont énumérés pour donner les précisions sur ce fait
de la langue baoulé.
b. * bl̀ ̀ t̀ j́ ĺ ̀ j̀ ẃ ̀
femme def tête faire Acc 3SG mal serpent def
« La femme a eu mal à la tête du serpent »
b. ɔ̀ sr̀ ĺ ẃ ̀
3SG avoir peur Acc serpent def
« Il a eu peur du serpent »
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Les exemples précédents en (11a) et en (11b) ne sont pas attestés en baoulé. Ils sont mal
formés, c’est-à-dire agrammatical. Néanmoins, ceux en (12a) et en (12b) sont bien formés. On
peut ainsi avec les données en (11) dire que les verbes physiopsychologiques sont en général
intransitifs à l’accompli. Ils ne nécessitent pas de complément ou d’objet quant à leur
réalisation. Les verbes qui acceptent un complément changent promptement. Ils deviennent
donc des verbes simples. On note alors avec les faits de langue en (12) des énoncés de type
SVO. Il s’agit en clair, d’un S(ujet), d’un V(erbe) et d’un O(bjet). Selon les données, c’est le
seul cas qu’on a observé ces différentes mutations.
CONCLUSION
L’étude sur la syntaxe des verbes physiopsychologiques du baoulé est à son terme. Avant
tout, notons que ce travail n’est pas exhaustif. Il a été seulement le lieu d’examiner la
structure interne des verbes physiopsychologiques à un certain niveau de leur configuration.
Pour y arriver, on préciser premièrement le cadre théorique et méthodologique de cette
recherche. Ensuite, nous avons présentés les types de verbes physiopsychologiques du
baoulé. Aussi, il a été question d’examiner la syntaxe des verbes physiopsychologiques à
l’habituel. Enfin, on a analysé la structure interne de ces verbes à la conjugaison de type
accompli.
Au sorti de cette investigation, il faut noter que les verbes physiopsychologiques du baoulé
peuvent être classés en plusieurs groupes ou types. Il subsiste un bon nombre de structures
internes de ces verbes. Ces verbes ont des configurations complètement différentes des autres.
Les verbes physiopsychologiques sont pour la plupart des verbes intransitifs, c’est-à-dire
qu’ils n’ont pas de compléments. A l’habituel, ces verbes ont les configurations d’une part,
N+V+Hab+S ou N+V+S+Hab et d’autre part, S+N+V+Hab+Pr+Adj ou
S+N+V+Pr+Adj+Hab. A l’accompli, nous avons les réalisations : N+V+Acc+S et
S+N+V+Acc+Pr+Adj. Le verbe [srɛ̀ kú ] « avoir peur » avec un complément devient un verbe
simple [sró] à l’habituel et à l’accompli. C’est d’ailleurs le seul cas qu’on a pu observer les
variations selon le corpus à notre disposition.
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BIBLIOGRAPHIE
BOGNY Yapo Joseph, 2005 b, « La réduplication des verbes monosyllabiques dans les
langues kwa de CI », In Journal of African Language and Linguistics, 26.1, 29 P.
KOFFI Koffi, KOUASSI Kan Guillaume et N’GUESSAN Konan Bertiel, 2017, « Syntaxe
et sémantique des anthroponymes baoulé et beng »», In ReSciLaC : Revue des sciences du
langage et de la Communication, PP. 39-50.
NORA Boneh, 2003, « La syntaxe des verbes psychologiques », Cours, Université Paris 7.
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