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ETUDE : Le licenciement pour motif économique : les points

clés à connaître pour sécuriser au mieux l'opération *


Rédigée le 16.07.20
E20493RC

Plan de l'étude
1 . Introduction

2 . Le motif économique
3 . La procédure de licenciement

1. Introduction
E20503RD
⇒ Cette étude a été réalisée sur la base d'un article rédigé par So�iane Coly paru dans la lettre juridique n° 832 du 16 juillet
2020 (N° Lexbase : N4091BY8).

Loi n° 89-549, Le licenciement pour motif économique est un sujet qui est socialement, politiquement, et donc juridiquement
02-08-1989 discuté. En e�et, un licenciement économique peut concerner en une seule fois des centaines de personnes. De
plus, un licenciement pour motif économique entraîne, en général, lorsqu’il est important, des conséquences
Loi n° 2005-32, au-delà des salariés licenciés, souvent sur un bassin d’emploi entier concerné.
18-01-2005, de
programmatio  
n pour la
cohésion
Petit rappel historique :
sociale
 

Le licenciement pour motif économique a pendant très longtemps fait l’objet d’aucune réglementation
spéci�ique. Il existait tout au plus une ordonnance de 1945 qui avait instaurée un contrôle de l’emploi a�in de
déterminer quels étaient les secteurs porteurs d’emploi. C’est en 1979 que les partenaires sociaux ont souhaité
identi�ier le licenciement pour motif économique, le sortir du licenciement de droit commun, au niveau de la
procédure. Après le premier choc pétrolier de 1974, considérant le nombre de licenciements qui avaient été
prononcés, le législateur a adopté, pour la première fois, une loi sur le licenciement pour motif économique, loi
qui soumettait le licenciement économique à une autorisation préalable de l’inspecteur du travail. L’employeur
voyait donc limité son pouvoir de licenciement.

En 1986, cette autorisation a été supprimé, et par une loi du 2 août 1989, le législateur a modi�ié
considérablement le droit du licenciement pour motif économique, en donnant une dé�inition, et en prévoyant
des procédures spéci�iques et des mesures d’accompagnement spéci�iques. Puis, le licenciement pour motif
économique a fait l’objet de nombreuses lois, surtout du fait du changement des majorités au pouvoir. Ainsi, par
exemple, la loi du 18 janvier 2005, qui a rendu obligatoire la négociation d’un accord de GPEC (Gestion
Prévisionnelle des Emplois et des Compétences) dans les entreprises d’au moins 300 salariés. Elle a créé des
dispositifs de reclassement personnalisés et a eu pour objectif de revitaliser les bassins d’emploi lorsque des
entreprises procédaient à d’importants licenciements pour motif économique. La GPEC, en quelques mots, est
un outil de ré�exion prospective : l’employeur se projette en essayant de ré�échir sur les compétences
nécessaires pour l’entreprise. Il y a également une étude de la démographie, la pyramide des âges...

On se projette dans l’avenir, quelles sont les formations que devront suivre les salariés aujourd’hui pour rester
compétents demain. Aujourd’hui, le licenciement pour motif économique béné�icie d’un régime juridique dont
le contenu est globalement bien tracé, la Cour de cassation ayant par ailleurs pu donner son interprétation sur
toutes les étapes.   A l’heure où les entreprises françaises prennent des mesures radicales pour relancer la
machine et notamment soulagent leur masse salariale, notre objectif est d’aborder, en synthèse,les di�érents
aspects du licenciement pour motif économique a�in que le lecteur attentif puisse éviter quelques
écueils.   Attention, il s’agit là d’une synthèse, ce qui signi�ie très clairement que certains sujets ne seront
volontairement pas abordés.

2. Le motif économique
E20513RE
Le motif économique est constitué, d’une part, de la cause économique , c’est à dire les raisons économiques qui
poussent l’employeur à se réorganiser, et d’autre part, la cause matérielle, c’est à dire les conséquences sur
l’emploi. 

Penser le motif économique nécessite toujours de procéder à une analyse du contexte global au sein duquel
l’entreprise évolue : quelles sont les mesures prises par l’employeur pour limiter/éviter les dif�icultés
rencontrées, comment se positionne l’employeur dans son marché/quel est l’état de la concurrence ?

Voici une liste des questions qu’il faut se poser avant d’aborder un licenciement pour motif économique :

Contexte Les mesures prises par l’employeur pour


éviter le licenciement

→ L’entreprise subie-t-elle une concurrence particulière ? → Des mesures de réduction des coûts et
notamment la diminution de la rémunération
→ Le marché a-t-il fortement baissé depuis quelques années du dirigeant
de sorte que tous les acteurs économiques sont frappés par
la crise ? etc.  

→ Principaux concurrents de la structure → Des innovations faites pour vendre de


nouveaux produits
→ Position de leader ou d’outsider sur le marché
économique  

→ Evolution du marché concurrentielle ces dernières années → Des actions commerciales engagées
et perspectives d’évolutions justi�iant la transformation
envisagé  

La cause économique

Il existe 4 causes économiques que l’on présentera pour plus de simplicité sous forme de tableaux :

 
Cause 1 : les dif�icultés économiques Cause 2 : la mutation technologique

Elles interviennent en cas de baisse signi�icative des commandes ou du Elle peut se manifester par
chi�re d’a�aires, des pertes d'exploitation, ou encore dégradation de la l’introduction de nouvelles
trésorerie.   Il existe une présomption de baisse signi�icative des technologies ou l’automatisation de
commandes ou du chi�re d’a�aires en fonction de la taille de tâches.
l’entreprise, comme par exemple un trimestre pour consécutif pour
une entreprise de moins de 11 salariés.

La diminution de l'excédent brut d’exploitation qui représente la marge Réorganisation d'une société
de l’entreprise après avoir enregistré tout ce qui a été consommé et centrée sur l'imagerie traditionnelle
facturé par des tiers, dû aux salariés et aux impôts et taxes sauf l’impôt entraînée par le déclin de cette
sur les béné�ices, peut constituer des dif�icultés   économiques par technologie au pro�it de l'imagerie
l’assèchement de la trésorerie de l’entreprise. numérique.

Cause 3 : la réorganisation de l’entreprise pour sauvegarde de la Cause 4 : La cessation d’activité


compétitivité

L’objectif est de prévenir les dif�icultés économiques à venir Il s’agit de la cessation d'activité totale et
compte tenu du contexte actuel. dé�initive qui ne doit pas résulter de
l'attitude fautive ou de la légèreté
blâmable de l'employeur.

Une entreprise qui évolue sur le secteur des matériaux de Il est tout à fait possible de maintenir
construction (vente de béton cellulaire) et qui dé�init une nouvelle une activité résiduelle par les organes
stratégie commerciale et réorganiser l’activité en profondeur au sociaux (président de la société par
niveau de l’outil de production a�in de limiter la surproduction, de exemple) dans l’objectif d’achever la
la force de vente a�in de s’adapter aux évolutions du marché, de liquidation des derniers actifs et de
l’encadrement / du support technique, et ce dans le cadre d’une régler les formalités administratives.
constante diminution de son résultat brut d’exploitation.

La cause matérielle, c’est àéconomique


La cause dire les conséquences surniveau
s’apprécie au l’emploi
de l’entreprise ou au niveau du secteur d’activité commun avec les
autres entreprises du groupe auquel elle appartient, établies sur le territoire national.
Il existe 3 causes matérielles envisageables :

Suppression d’emploi Transformation Modi�ication du contrat de travail


d’emploi

Il y a suppression d’emploi Il s’agit d’un changement Cette modi�ication doit porter sur un élément
dès lors que le salarié licencié de nature de l'emploi, essentielle du contrat de travail, telles que la
n’est pas remplacé après son lequel suppose un mutation du salarié, la modi�ication des fonctions
départ de l’entreprise par un changement total du ou encore de la rémunération. La modi�ication du
autre salarié, ou encore contenu de l’emploi contrat de travail pour motif économique obéit à
lorsque ses tâches sont concerné. une procédure particulière : l’employeur doit
réparties entre les salariés de proposer une modi�ication du contrat de travail
l’entreprise. que le salarié est libre d’accepter ou non et il
dispose à ce titre d’un mois pour se prononcer.

3. La procédure de licenciement
E20533RH
Globalement, la procédure de licenciement pour motif économique comprend 5 étapes :

Etape 1 : les critères d’ordre

En principe, le choix du ou des salariés dont le licenciement pour motif économique est projeté ne peut jamais
être le fruit du hasard et doit ainsi résulter de l’établissement de critères d’ordres.   Cependant, les critères
d’ordres ne s’appliquent qu’au sein d’une même catégorie professionnelle ce qui signi�ie qu’il n’y a pas lieu
d’établir les critères d’ordres quand tous les emplois de la même catégorie professionnelle sont supprimés. La
notion de catégorie professionnelle se caractérise par deux principaux critères : l'exercice de fonctions de
même nature,   d'une part, supposant, d'autre part, une formation professionnelle commune , de base ou
complémentaire, n'excédant pas l'obligation d'adaptation de l'employeur.

Etape 2 : recherche de reclassement

Le reclassement du salarié doit s’e�ectuer sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu’il occupe
ou sur un emploi équivalent assorti d’une rémunération équivalente. Ce n’est qu’à défaut d’emploi disponible et
sous réserve de l’accord exprès du salarié que le reclassement peut s’e�ectuer sur un emploi d’une catégorie
inférieure.

Etape 3 : entretien préalable

Il faut convoquer le ou les salariés concernés à un entretien préalable en vue d’un éventuel licenciement pour
motif économique.

Quel est l’objet de l’entretien ?

L’objet de l’entretien préalable est de :

► En premier lieu, d’exposer au salarié les raisons pour lesquelles le licenciement est envisagé.   Nous
n'insistons jamais assez sur ce point mais tant que la lettre de licenciement n’est pas envoyée, le licenciement
n’est qu’envisagé, ce qui signi�ie qu’il faut utiliser à l’oral comme à l’écrit le conditionnel.   Dans ce cadre, il
convient de remettre au salarié une note comportant l’exposé du ou des motifs économiques.

Que contient la note d’information ?

La note d’information comporte les éléments qui suivent :

• le motif économique du licenciement envisagé : le salarié doit en e�et avoir la possibilité d’échanger
lors de l’entretien préalable, comme pour tout licenciement, sur les faits justi�iants que son
licenciement soit envisagé ;

• les informations relatives à l’acceptation du CSP et en particulier le délai et les conséquences sur la
date e�ective de rupture des relations contractuelles en cas d’acceptation du CSP  ;

• son droit à la priorité de réembauchage (sur poste compatible avec la quali�ication du salarié ou sur
un poste di�érent si le salarié a acquis une nouvelle quali�ication), lequel s’applique pendant un délai
d’un an à compter de la date de rupture du contrat de travail à la condition que le salarié en fasse la
demande.
 

► En deuxième lieu, de lui remettre la documentation sur le contrat de sécurisation professionnelle.

 
Qu’est ce que le contrat de sécurisation professionnelle ?

Le contrat de sécurisation professionnelle (CSP) est un dispositif d'accompagnement de 12 mois destiné aux
salariés dont le licenciement pour motif économique est envisagé dans des entreprises de moins de 1 000
salariés et des entreprises en redressement ou en liquidation judiciaire. Ce dispositif comprend plusieurs
mesures visant à accélérer le retour dans l'emploi par le biais d'un accompagnement personnalisé et des
mesures d'incitation à la reprise d'un emploi.

Pendant le CSP, son béné�iciaire perçoit une allocation spéci�ique de sécurisation professionnelle (ASP) égale
à 75 % du salaire journalier de référence, sans pouvoir être inférieur au montant de l'allocation spéci�ique de
l'allocation d'aide au retour à l'emploi (Are) à laquelle l'intéressé aurait pu prétendre, au titre de l'emploi
perdu, s'il n'avait pas accepté le CSP. Il s’agit donc d’un dispositif particulièrement intéressant pour les salariés
puisqu’ils béné�icient d’une allocation chômage plus importante que celle versée dans le cadre d’un
licenciement pour motif personnel ou d’une rupture conventionnelle.

Quel est le contenu du dossier du CSP ?

Il faut le récupérer auprès de Pôle emploi mais, concrètement, il comporte :

• pour l'employeur : un document d'information ,

• pour chaque salarié concerné : un document d'information du contrat de sécurisation


professionnelle ; un récépissé de ce document d'information et un bulletin d'acceptation du CSP ;
un formulaire de demande d'allocation de sécurisation professionnelle ; une attestation
d'employeur.
 

Le salarié dispose d’un délai de 21 jours pendant lequel il peut accepter ou refuser le CSP.

 
Etape 4 : la lettre de licenciement dite « ouverte »
L’employeur doit-il payer le préavis même si le salarié accepte le CSP ?

 
Pendant le délai de ré�exion du CSP, la procédure de licenciement peut parfaitement suivre son cours
(notamment pour
La réponse est faire
oui. Enpartir
e�et, le préavis) etcontribue
l'employeur la jurisprudence admet depuis
au �inancement du CSPlongtemps la possibilité
en s'acquittant auprèsdede
noti�ier
Pôle
emploi
une d'une
lettre somme correspondant
de licenciement « provisoireà l'indemnité de préavis ». En
» ou « conservatoire que led’autres
salarié aurait perçue
termes, s'il n'avait
est noti�iée au pas adhéré
salarié une
au dispositif,
lettre dans laqui
de licenciement limite
: de 3 mois de salaire majoré de l'ensemble des cotisations et contributions
obligatoires a�érentes. Le préavis n’est donc pas versé au salarié mais à Pole Emploi ce qui signi�ie qu’il faudra
  bien le provisionner pour éviter toute mauvaise surprise.

• soit devient sans objet si le salarié accepte le CSP, la rupture prenant e�et à l’expiration du délai de 21
jours précité,
 

• soit, à défaut d’acceptation du CSP, constitue l’acte de rupture des relations contractuelles . Le préavis
court à compter de la présentation de la lettre recommandée et le contrat prend �in selon les règles de
droit commun, soit à l'issue du préavis.
 

Illustration pratique :

« Il vous a donc été proposé d’adhérer à un contrat de sécurisation professionnelle et nous vous rappelons que
vous disposez d'un délai de ré�exion de vingt et un jours pour y adhérer. Si vous acceptez cette proposition,
votre contrat de travail sera réputé rompu d'un commun accord à la date d'expiration de votre délai de
ré�exion pour le motif énoncé ci-dessus, soit le [...] . Dans cette hypothèse, la présente noti�ication de votre
licenciement deviendra sans objet.   En revanche, si vous refusez d'adhérer au contrat de sécurisation
professionnelle ou omettez de nous faire part de votre accord dans le délai mentionné ci-dessus, cette lettre
constituera la noti�ication de votre licenciement  ».

Quel est le délai de noti�ication de la lettre de licenciement ?

La lettre de licenciement ne peut pas être expédiée moins de 7 jours ouvrables à compter de la date prévue de
l’entretien préalable pour un non-cadre et moins de 15 jours ouvrables pour un membre du personnel cadre.
Etape 5 : information de l’administration

L’administration a établi un portail en ligne pour être informée des mesures de licenciement pour motif
économique prises au sein des entreprises lorsqu’elles sont collectives. Il faut se connecter sur le site internet
 www.ruptures-collectives.emploi.gouv.fr .

Lorsque le licenciement ne concerne qu’un seul salarié, il convient d'adresser un courrier à la DIreccte pour
l’informer du licenciement et dont le contenu est strictement dé�ini par décret (nom, adresse, nature de
l'activité, e�ectif employé,  etc. ). Bien évidemment, ces règles de droit commun peuvent être modi�iées dans
certaines situations notamment lorsque de nombreux licenciements sont envisagés.   Il faut ajouter à cela
l’obligation d’informer et de consulter le comité social et économique dans le cadre des licenciements collectifs
(moins de 10 comme plus de 10 licenciements).   Nous pourrions ainsi développer bien plus encore le
licenciement pour motif économique mais disons que pour la grande majeure partie des TPE/PME qui
souhaitent le mettre en œuvre, les mesures grandes lignes ont été rappelées.

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