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Cas clinique - Monsieur P

J’ai rencontré Monsieur P en avril 2016, au cours d’une hospitalisation dans le service de
neurologie de l’HPA pour la prise en charge de troubles cognitifs d’étiologie à préciser.

Monsieur P est alors âgé de 55 ans. Il est marié et a une fille de 24 ans. Son épouse a également
deux fils d’un premier mariage dont Monsieur P se dit proche. Il exerce la fonction de chef
d’atelier dans une entreprise de fabrications de produits chimiques. Concernant ses activités, il
se dit sportif, pratiquant marche à pied, footing et vélo. Il apprécie le bricolage et le dessin.

Sur le plan de ses antécédents, nous notons notamment un alcoolisme chronique depuis plus de
30 ans, sevré brutalement de sa propre initiative depuis 3 mois, ainsi qu’un tabagisme actif. Sur
le plan familial, nous notons une probable maladie d’Alzheimer chez sa maman.

Précédemment, en mars 2016, Monsieur P avait déjà été hospitalisé dans le service de
neurologie pour une décompensation délirante suite à l’arrêt brutal d’alcool. Vous trouverez ci-
dessous les données des examens réalisés alors.

En avril 2016, il s’agit donc de sa seconde hospitalisation en neurologie. Suite à sa première


hospitalisation, il avait été orienté dans un centre d’alcoologie dont il a fugué (cf. conclusion
du courrier de sortie de cet établissement copié ci-dessous). Il revient en neurologie pour
l’exploration plus précise de ses troubles cognitifs, dans le cadre d’un maintien à domicile
difficile.
Sur le plan biologique, examen réalisé aux Urgences, le neurologue n’a pas retrouvé
d’anomalie, en particulier l’alcoolémie qui était normale.
A l’examen neurologique, il n’y avait pas de signe de focalisation mais son état était bien
dégradé, avec des troubles de la marche importants, avec marche à petits pas, donc une
composante extrapyramidale (= un signe neurologique) liée probablement à la prise des
neuroleptiques, avec également une désinhibition manifestée par un comportement social
inadapté, mais sans agressivité physique, avec présence de manies d’allure pathologique. Il
existe aussi une apathie évidente, avec un manque de spontanéité, et avec abandon peu à peu
des activités habituelles. Il n’existe plus d’hallucinations, pas de changement de comportement
alimentaire.
Copie de la conclusion du courrier de sortie de centre d’alcoologie
« Monsieur P désire quitter l’établissement avant la date de sortie prévue.
Il a demandé à voir le médecin tôt ce matin : angoissé, il a du mal à se concentrer et déclare une
douleur dans le dos. Il évoque devoir réaliser des soins dentaires sur Castres, de la nécessité de
changer les montures de ses lunettes, de son désir d’aller passer quelques temps à son domicile
avec son épouse. Monsieur P semble avoir oublié le cadre de soins et du règlement intérieur qui
lui sont rappelés. Il se dit prêt à signer une décharge pour rentrer chez lui.
Monsieur P est revu en entretien alors qu’il fait sa valise et veut prendre le bus. Il est
formellement décidé à rentrer chez lui. Son épouse est jointe par téléphone et informée que
Monsieur P ne peut être hospitalisé dans notre établissement contre son gré. »

Données de l’examen psychiatrique effectué en février 2016 :


« Monsieur P est hospitalisé aux urgences suite à un sevrage brutal, il y a 15 jours, d’une
consommation chronique d’alcool depuis plus de 30 ans. Ce sevrage a été décidé par le patient
lui-même suite au décès de sa belle-sœur et après avoir appris que son meilleur ami présente un
cancer du poumon évolué. Depuis quelques jours, sa femme s’inquiète devant des propos
délirants (persécution, complot) et une marche difficile.
A l’entretien avec le patient, il apparait qu’il a perdu beaucoup de poids après le décès de sa
belle-sœur survenu fin octobre 2015 (-12 kg en 1 mois et demi). Il a une fille avec son épouse
et deux beaux-fils qu’il a connu très jeune. Il a des soucis avec l’un de ses beaux-fils, R, qui
présenterai des addictions à l’alcool et au cannabis. Il explique être alcoolique depuis l’âge de
15 ans avec une augmentation importante de sa consommation suite au décès de sa belle-sœur.
Il a arrêté sa consommation depuis 15jours pour tenir sa promesse à J (deuxième beau-fils) de
protéger R car des gens se servaient de lui. Monsieur P dit avoir fait tomber le réseau. Son
épouse explique qu’il souhaite qu’elle reste en permanence avec lui, qu’il évoque la présence
de micro et le sentiment d’être suivi en voiture. Il pense que son ami est décédé malgré le
démenti de son épouse. Au cours de son séjour, il présente des épisodes d’angoisse : se sent en
danger dans sa chambre, sent que son épouse est également en danger, qu’il a eu cette
information à la télévision.
Devant la nécessité d’éliminer une pathologie somatique, il est transféré dans le service de
neurologie. »

Données des examens neurologiques effectué lors de son séjour en février-mars 2016 (15j) :
A l’arrivée aux Urgences, le score de Cushman était à 1 avec de bons paramètres
cardiovasculaires, sans agitation, pas d’état de Délirium Trémens associé.
Le bilan biologique ne note pas d’anomalie particulière, surtout hépatique. L’alcoolémie était
inférieure à 0,1 g/l.
Le scanner cérébral est normal.
L’examen clinique neurologique ne retrouve aucun signe de focalisation. Il n’y a pas de trouble
de la marche avec instabilité. Il n’y a pas de syndrome cérébelleux cinétique ou statique, pas de
trouble de l’oculomotricité. Monsieur P n’a pas présenté d’idée délirante. Il présente une
angoisse importante mais traitée par ALPRAZOLAM.
Le tracé électroencéphalographique ne montre aucun signe d’épilepsie ou de souffrance
cérébrale focalisée.

Question 1 :
Listez les symptômes/signes cliniques qui vous semblent important et en lien avec un éventuel
syndrome dysexécutif
RESULTAT DU BILAN NEUROPSYCHOLOGIQUE du 21/04/2016

NOM : P Niveau scolaire : entre CEP et BAC


Date de naissance : (55 ans) Ancienne profession : responsable d’atelier
Latéralité : Droitier

Légende : ** = Score pathologique ; * = Score faible ; C = Centiles ; ET = Ecart-type ; NS = Note Standard

MADRS = 12/60 Fonctions instrumentales

Fonctionnement général Langage


Dénomination d’images (BECS-GRECO, 2011) :
MMSE = 24/30 35/40** (seuil=36)
Orientation : 7/10 Apprentissage : 3/3
Attention et calcul : 3/5 Rappel : 2/3 Praxies
Langage : 8/8 Praxies : 1/1 Gestes symboliques : 4/5
Pantomimes : 10/10
Fonctions mnésiques Gestes abstraits : 7/8

Test de rappel libre/rappel indicé à 16


items (RL-RI 16) (Normes Van der Linden,
2004) Liste principale
Rappel immédiat : 16/16 (>C50)
RL1= 5(z=-1,72**) ; RT1= 15 (C50) ;
RL2= 7 (z=-1,4*) ; RT2= 11 (C1-C5**);
RL3= 5 (z=-2,96**) ; RT3= 16 (>C25) ;
Reconnaissance :16 /16 (0 fausse
reconnaissance) ;
RLD :8 /16 (-1,72**); RTD: 15/16 (C5-25)
Intrusions : 12**

Echelle Clinique de Mémoire de Wechsler


(MEM-IV, 2012) : Mémoire Logique
Mémoire Logique I : NS = 1/19**
Mémoire Logique II : non réalisée

Figure de Rey - Rappel (Normes Greco-vasc)


Richesse et exactitude : 8/36 (seuil : 10.6)

Ressources attentionnelles :

Test des Cloches (BEN) :


Bonnes omission : 1
Temps : 130 sec

Test du d2 : interrompu en raison de


difficultés visuelles (absence des lunettes)
Résultats des tests évaluant les fonctions exécutives utilisés avec M. P

Question 2 : Coter les tests à coter (BREF, figure de Rey, Mémoire des chiffres, Fluences,
TMT)

Batterie Rapide d’Efficience Frontale (BREF, 2000) :

Subtest Réponse du patient Score


Similitudes Banane/Orange : « la banane c’est /3
jaune et l’orange c’est orange »
[relance de ma part] « on les pèle]
Table/Chaise : « des meubles »
Tulipe/Rose/Marguerite : « fleurs »
Fluences « Super – Saucisse – Salope – /3
Sirop »
Séquences motrices Ok avec moi mais échec seul /3
Consignes contradictoires Coups tapés par le patient : /3
2–2–1–2–1–1–1–2–2-1
Go-No Go Coups tapés par le patient : /3
1–1–0–2–1–1–1–2–2-1
Comportement de préhension Ne prend pas ma main /3
Total :
/18
Mémoire des chiffres (WAIS IV, 2011) :
Empans endroit/direct

Item Réponse correcte Réponse patient Score


1. 9–7 9–7 /2
6–3 6–3
2. 5–8–2 5–8–2 /2
6–9–4 6–9–4
3. 7–2–8–6 7–2–8–6 /2
6–4–3–9 6–4–9–3
4. 4–2–7–3–1 4 – 2 – 7 … oubli /2
7–5–8–3–6 7–5–3–8…
MCD : Score à mémoire des chiffres directs (∑ des points) = ; Note Standard =
Score d’empan endroit/direct (nombre de chiffre dans la plus grande série correctement répétée)
= ; % cumulée =

Empan envers/indirect
Item Essai Réponse correcte Réponse patient Score
1. 3–1 1–3 1–3 /2
2–4 4–2 4–2
2. 4–6 6–4 6–4 /2
5–7 7–5 7–5
3. 6–2–9 9–2–6 6–2–9 /2
4–7–5 5–7–4 5 - oubli
MCI : Score à mémoire des chiffres directs (∑ des points) = ; Note Standard =
Score d’empan endroit/direct (nombre de chiffre dans la plus grande série correctement répétée)
= ; % cumulée =

Ordre croissant

Item Essai Réponse correcte Réponse patient Score


1. 1–2 1–2 1–2 /2
4–2 2–4 2–4
2. 3–1–6 1–3–6 1–3–6 /2
0–9–4 0–4–9 0–4–9
3. 8–7–9–2 2–7–8–9 2–7–8–9 /2
4–8–7–1 1–4–7–8 1–4–6–8
4. 2–6–9–1–7 1–2–6–7–9 1 – 2 – 6 – 7 oubli /2
3–8–3–5–8 3–3–5–8–8 3–3–5–8–9
MCC : Score à mémoire des chiffres directs (∑ des points) = ; Note Standard =
Score d’empan endroit/direct (nombre de chiffre dans la plus grande série correctement répétée)
= ; % cumulée =

MCH : Score à l’épreuve de mémoire des chiffres (∑ des points direct+indirect+croissant)


= ; Note Standard =
Fluence verbale 2 minutes - Normes Grefex, 2008
Notez le nombre de mots produits puis le nombre de mot seuil pour M. P (cf tableau
ci-dessous)

Fluence formelle (lettre "P") : (seuil= )


Fluence catégorielle (Animaux) : 14 (seuil= )

P= « pirate ; pissenlit ; pipi ; pisser ; parapluie ; papa ; pantalon »


Animaux = « chat ; chien ; vache ; zèbre ; lion ; panthère ; perroquet ; puce ; [temps
de latence en raison d’une persévération sur la consigne précédente : rappel de la
consigne de ma part] ; chèvre ; cheval ; salamandre ; truite ; saumon ; requin »

> ou = CEP >CEP , <BAC BAC et +


«P» Animaux «P» Animaux «P» Animaux
20-40 ans 7 18 11 18 12 20
41-60 ans 8 15 10 18 15 24
>60 ans 6 15 9 15 12 15
Godefroy, O et le Grefex (2008). Fonctions exécutives et pathologies neurologiques et psychiatriques.
Evaluation en pratique clinique. Paris : Solal
NB : Scores seuils indiqués au risque de 5% (à utiliser de préférence au percentile 5 ou 95 brut étant
donné la faiblesse des effectifs dans certaines cellules
Trail Making Test (Tombaugh, 2003)
TMT A: 41 sec (z= ) Erreurs A: 0
TMT B: 144sec (z= ) Erreurs B: 1

Test de Stroop
(Version Victoria, 2009)
Couleurs : 23 sec (z=-2,57)
Erreurs non corrigées : 0
Mots : 48 sec (z=-5,38)
Erreurs non corrigées : 0
Interférence : 57 sec (z=-2,27)
Erreurs non corrigées : 3 (C5)
Erreurs corrigées : 1 (C25
Erreurs Totales : 4 (C10)
Indice if : 2,09 (z=-1,77)
Indice IF : 2,48 (z=-0,03)
Figure de Rey - Copie (Normes Greco-Vasc)
Richesse et exactitude : /36
Temps (minutes) : 4
Figure de Rey- avec programme
Richesse et exactitude : /36

Score sur 36.


Méthode : prendre chaque numéro et coter en fonction du barème si dessous. Exemple : item
n°1 qui correspond à la croix à gauche → est-elle bien reproduite et bien placée (2 points) ou
correcte mais mal placé (1 point) ou déformée et mal placée (0.5 point)
Une fois le score total sur 36 obtenu, se référer au tableau des normes ci-dessous.
Référence : Roussel, M., & Godefroy, O. (2016). La batterie GRECOGVASC : Évaluation et diagnostic
des troubles neurocognitifs vasculaires avec ou sans contexte d’accident vasculaire cérébral. Louvain
la-Neuve : De Boeck Supérieur

NB : M. P est de niveau 2 pour ces normes.


Les résultats ne suivent pas une loi normale et il est donc recommandé d’utiliser le centile 5
(C5) comme valeur seuil lorsqu’on utilise les normes de la Greco-vasc.
COPIE de la figure de Rey

COPIE avec aide pour la programmation


Question 3 : interprétez les résultats de Monsieur P concernant son fonctionnement exécutif.

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