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06/05/2023 10:46 La chasse à la baleine dans les mers septentrionales selon les sources arabes médiévales

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Médiévales
Langues, Textes, Histoire

80 | printemps 2021
Animaux marins
Animaux marins

La chasse à la baleine dans les mers septentrionales selon les sources arabes médiévales
Jean-Charles Ducène
p. 65-79
https://doi.org/10.4000/medievales.11274

Résumés
Français English
La chasse à la baleine dans les mers septentrionales selon les sources arabes médiévales
Trois textes arabes datant des xe et xie siècles décrivent la chasse à la baleine dans l’Atlantique et, plus au nord, dans la mer Blanche. Le texte se rapportant à l’Atlantique est dû au voyageur judéo-arabe Ibrāhīm ibn Yaʿqūb et décrit une chasse avec harponnage ; il
peut être comparé aux textes latins médiévaux, issus de l’hagiographie et des encyclopédistes, qui décrivent ces pratiques. Quant aux textes relatifs aux us et coutumes des populations finno-ougriennes, ce sont deux descriptions indirectes de voyageurs arabes ayant
circulé sur la Volga et qui ont rapporté des témoignages de leurs hôtes bulgares à propos de la manière de vivre de populations plus septentrionales. Les animaux étaient là-bas non expressément chassés, mais plutôt dépecés après échouage ; sans ces détails, des
sources anglo-saxonnes et scandinaves confirment ces pratiques.

Whaling in the Northern Seas According to Medieval Arabic Sources


Three Arabic texts from the ninth and tenth centuries describe whaling in the Atlantic and the White Sea. The author of the text on the Atlantic is the Judaeo-Arabic traveller Ibrāhīm ibn Yaʿqūb, who describes spear-fishing in detail; his report may be compared to
Latin texts belonging to hagiography and encyclopaedism. As to whaling as carried out by Finno-Ugrian populations, it is indirectly described by two Arab travellers who journeyed on the Volga river and transmitted information given to them by the Bulgars about
the way of life of more northern populations. The whales were not really hunted but skinned after stranding. Anglo-Saxon and Scandinavian sources confirm such practices, albeit without those details.

Entrées d’index
Mots-clés : baleine, pêche, géographes arabes
Keywords: Arabic geographers, whale, whaling

Texte intégral
1 Si la pêche à la baleine est une pratique attestée à partir de l’époque carolingienne pour les populations maritimes du nord de l’Europe, il n’en reste pas moins que les témoignages sont rares ou indirects. Parmi ceux-ci prennent place
plusieurs textes de géographes arabes, qu’il est a priori étonnant de retrouver sur ce théâtre. En effet, alors qu’ils sont au sud de l’Europe, on s’attendrait à ce qu’ils ignorent les pratiques de subsistance des populations européennes
éloignées des rives de la Méditerranée  ; la réalité diffère un peu. Nous allons ainsi présenter trois textes relatifs à la pêche à la baleine  : le premier est dû à Ibrāhīm ibn Yaʿqūb al-Ṭurṭūšī (xe  siècle) et concerne la côte atlantique  ; le
deuxième, plus ambigu, provient d’Ibn Faḍlān (début xe siècle) et aurait pour cadre la mer Blanche ou peut-être la mer Baltique ; le troisième est extrait d’Abū Ḥāmid al-Ġarnāṭī (1080-1169 ou 1170) et porte sur les mêmes mers que le texte
d’Ibn Faḍlān. Cependant, tout en ayant le mérite d’exister, ces textes n’en demeurent pas moins éloignés des réalités qu’ils décrivent ; dès lors, il nous a paru intéressant de les confronter à des textes médiévaux occidentaux afin de les
éclairer ou de les compléter.

1
La baleine et sa chasse au nord-ouest de l’Europe
2 Déjà dans l’Antiquité, Pline l’Ancien mentionne la présence de la baleine dans l’océan Atlantique2, mais manifestement comme un animal hors normes, monstrueux et crachant de l’eau (le physeter), de même qu’il décrit une attaque
d’orques contre un troupeau de baleines en face de Cadix ; mais rien n’est dit de la chasse de ces animaux. Il faut attendre l’époque carolingienne pour avoir les premières attestations littéraires de la chasse3 : les Miracles de saint Vaast
(v. 875) montrent une chasse organisée dans la Manche par plusieurs embarcations provenant des domaines monastiques ; dans les Miracles de saint Bavon (fin du xe siècle), on voit un pêcheur harponner une baleine ; et enfin, dans les
Miracles de saint Arnould, évêque de Soissons (v. 1116), des pêcheurs entourent l’animal, le blessent à coups de lances et l’amènent à terre. En outre, dès cette époque, apparaissent des textes juridiques touchant aux droits à percevoir sur
les bêtes attrapées. Il en est de même dans le golfe de Gascogne4, quoique ce soit à partir du xie siècle que des documents attestent de la chasse à la baleine par les Basques5, car des redevances sont perçues à partir de 1059 sur les animaux
pêchés à l’ancienne embouchure de l’Adour. À Biarritz6, la pêche est certaine au xiie siècle. La raréfaction des animaux dans le golfe de Gascogne amène les pêcheurs au xiiie siècle à s’aventurer en haute mer. On voit aisément l’évolution
des techniques7 : on utilise d’abord les animaux accidentellement échoués ; ensuite, quand ils passent le long des côtes, ils sont chassés et effrayés pour qu’ils s’échouent. Cette technique étant d’abord connue en Scandinavie, il se peut
qu’elle ait été amenée plus au sud par les vikings8. Enfin, tuée en mer, la baleine reste « liée » aux pêcheurs par le harpon et la ligne ; ils peuvent ainsi la ramener à terre.
3 En revanche, en Irlande et dans les îles britanniques, la chasse à la baleine ne semble pas connue avant le xiie siècle. Les morceaux d’os de baleines retrouvés sur différents sites témoignent d’abord de l’utilisation des animaux échoués
sur les plages. Pour l’Irlande, Nancy Edwards écrit : « Les baleines n’étaient pas chassées en mer, mais si elles étaient échouées sur la terre ferme, elles constituaient une source de nourriture bienvenue, et les os de baleine étaient très
prisés9. » Pour les sites anglo-saxons, d’autres archéologues font le même constat : « Très peu de preuves existe de la chasse à la baleine dans l’Angleterre du Haut Moyen Âge. Le quasi-silence des sources anglaises contraste cependant
avec les nombreuses références à cette pratique en Europe continentale datant au moins du ixe siècle10. » Certes, l’auteur anglo-saxon Ælfric d’Eynsham, aux alentours de l’an mil, mentionne dans un dialogue didactique en latin et en vieil
anglais la chasse à la baleine comme une activité périlleuse11, mais l’absence de précisions techniques obère la qualité du témoignage. Il semble bien que l’usage des os de baleine devient nettement plus courant à partir du xiiie siècle12.

Le témoignage d’Ibrāhīm ibn Yaʿqūb al-Ṭurṭūšī (ive/xe siècle)


4 Le premier texte arabe est conservé dans le dictionnaire géographique d’al-Qazwīnī (v. 1233-1283), Aṯār al-bilād wa-aḫbār al-ʿibād, qui reprend le principe du classement alphabétique des toponymes mais à l’intérieur de la division en
climats, ce texte apparaissant à l’entrée Irlānda (Irlande). Al-Qazwīnī, cependant, ne fit pas œuvre originale mais compila des ouvrages antérieurs. La notice qui nous concerne est placée sous l’autorité d’Aḥmad ibn ʿUmar ibn al-Dalāʾī al-
ʿUḏrī (1003-1085), qui a laissé un ouvrage de géographie perdu en tant que tel, mais conservé en un fragment unique et dans des emprunts faits par des auteurs ultérieurs. Le titre du manuscrit unique est Tarbīʿ al-aḫbār, alors que les
auteurs qui le démarquent (al-Qazwīnī, al-Ḥimyarī) nomment son traité Niẓām al-murǧān, ce qui s’expliquerait selon Luis Molina par l’existence de deux versions13. Quoi qu’il en soit, l’ouvrage apparaît comme étant un traité de
géographie compilant descriptions et données administratives, mais aussi historiques, ainsi que des merveilles, empruntées à de nombreuses sources. Or, dans une des citations d’al-ʿUḏrī que donne al-Qazwīnī14, l’auteur andalou cite lui-
même Ibrāhīm ibn Yaʿqūb al-Ṭurṭūšī (xe  siècle)15. On sait que celui-ci voyagea vers  960-962 en Europe occidentale et orientale, sans doute pour des raisons commerciales. Il laissa une relation de voyage à présent perdue et connue
A digital
uniquement par des citations postérieures, notamment d’al-Qazwīnī et au moins une fois sous l’autorité d’al-ʿUḏrī, sans que l’on puisse dire avec certitude si al-Qazwīnī puise au texte du voyageur ou ne le connaît qu’à travers resources portal for the
al-ʿUḏrī.
5 Dans le cas de notre texte, plusieurs indices semblent désigner Ibrāhīm ibn Yaʿqūb comme source. D’abord, l’auteur laissa des notices sur Dax, Bordeaux, Blaye, Saintes, Noirmoutier et Saint-Malo, soit des ports humanities and en
ou des localités social sciences
rapport avec l’Atlantique, et il a atteint Bordeaux en passant par la Gascogne, c’est-à-dire en traversant une région où la pêche à la baleine est pratiquée au Moyen Âge16. Ensuite, le terme qu’Ibrāhīm utilise ici pour désigner l’animal, al-
ablīnā, trahit un étymon latin ou roman (cf. lat. balæna). Il faut garder en tête que l’arabe écrit classique possède, à côté du terme générique samaka (« poisson »), trois autres lexèmes pour désigner la baleine en général. Le premier est
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ḥūt : d’origine coranique, son sens de base semble être « grand poisson17 », mais l’expression coranique ṣāḥib al-ḥūt (Coran 68.58), qui désigne Jonas, l’entraîne à désigner la baleine. Plus spécifiquement, l’étymon persan bāl est emprunté
par l’arabe au milieu du ixe siècle, sous deux formes – soit la forme bāl, soit la forme u/awwāl –, pour désigner un gros poisson, un cétacé, de l’océan Indien18. L’analogie avec le vieil anglais hval (anglais moderne whale) ou avec le vieux
Our le
norrois hvalr remontant en fait à l’indo-européen, aucun emprunt ne doit être envisagé entre ces langues19. Enfin, dans un contexte narratif mettant l’accent sur la monstruosité de l’animal ou l’effroi de l’observateur, c’est platforms
terme tinnīn
(« monstre marin ») qui est employé20. Évidemment, hors les textes littéraires, l’arabe technique des pêcheurs possède un vocabulaire plus précis, mais aussi plus régional, pour désigner les différentes espèces de cétacés21.
6 Voyons le texte conservé par al-Qazwīnī :
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On raconte que sur ses [c.-à-d. : de l’Irlande] côtes, on pêche les petits des baleines, qui sont des poissons énormes. On chasse les baleineaux qui s’y rassemblent. On prétend que ces jeunes naissent en septembre [aylūl] et ils sont chassés en octobre,
novembre, décembre et janvier [tišrīn I, II et kānūn I, II], [uniquement] durant quatre mois. Au-delà, leur viande se durcit et n’est plus bonne à manger. Quant à la manière de les pêcher, al-ʿUḏrī raconte que les pêcheurs se rassemblent OPENEDITION
dans des JOURNALS
bateaux, ayant avec eux une grande lame en fer, dotée de dents métalliques. Cette lame possède un grand anneau solide et celui-ci une forte corde. Quand ils trouvent le baleineau, ils claquent des mains et crient. L’animal est distrait par les
claquements et se rapproche des embarcations en toute confiance. L’un des marins s’attache à lui et gratte énergiquement son front, ce qui plaît au baleineau. Puis, il pose la lame au milieu de sa tête, s’empare d’un maillet de fer et frappe dessus de
toutes ses forces trois fois. L’animal n’est pas touché par le premier et le deuxième coup, mais au troisième, il s’agite énergiquement. Parfois sa queue heurte l’une des embarcations et la fait chavirer. Il continue à s’agiter jusqu’à ce que laHYPOTHESES
faiblesse le
gagne. Ensuite, les marins s’aident mutuellement à le tirer pour l’amener sur le rivage. Il arrive que la mère du baleineau perçoive ses soubresauts et suive les marins, mais ils préparent de nombreuses têtes d’ail hachées et les plongent dans l’eau. Elle
sent alors l’odeur qui la chasse et progressivement s’éloigne vers l’arrière. Ils découpent ensuite la viande du baleineau et la salent. Sa chair est blanche comme la neige et sa peau est noire comme l’encre de noix de galle22. CALENDA
7 La période que l’auteur donne pour la pêche est indirectement confirmée par un texte bien plus récent, les Us et coutumes de la mer d’Étienne Cleirac23 (1661), selon lequel la saison de passage des baleines dans les eaux du golfe de
Gascogne, et donc l’époque la plus propice à leur chasse, commence à partir de l’équinoxe de septembre et dure presque tout l’hiver. Quant à l’animal, il s’agit peut-être de la «  baleine des Basques  », dite aussi Libraries and institutions
«  de Biscaye  »
(Eubalaena glacialis)24, qui fut l’une des premières à être chassée au harpon et qui était d’une taille raisonnable (15 m), d’autant que la remarque sur la couleur de la peau confirme cette identification. La technique utilisée est celle du
rabattage, suivi du harponnage de l’animal et de son remorquage jusqu’à une plage où il est dépecé. On peut noter la remarque de l’auteur au sujet du harpon attaché à une corde.
8 Cet usage est confirmé par les textes médiévaux occidentaux, bien que postérieurs de deux à trois siècles, dans des descriptions de Thomas de  Cantimpré (v.  1201-v.  1270 ou 1272), d’Albert le  Grand (v.  1193-1280) OpenEdition Freemium
et de Vincent
de Beauvais (m. 1264).
9 Ainsi, Thomas de Cantimpré écrit dans son Liber de natura rerum25 :
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On dit que de tels cétacés ont été capturés […]. Des pêcheurs connaissant le lieu où se trouvait le cétacé s’y réunirent avec de nombreux navires ; ils l’attirèrent par un concert de flûtes et de syrinx ; il les suivit, tant lui plaisait ce son. Lorsque les
pêcheurs virent le petit à côté des navires, étourdi par le son de la mélodie, ils lancèrent à la dérobée sur le dos du cétacé un instrument préparé ad hoc, un instrument pointu, doté de dents de fer. Ils se dispersèrent rapidement. Si l’instrument le
blessa sans aucun doute, le cétacé gagna le fond de la mer et, se frottant le dos contre le sol, il poussa violemment le fer plus profond dans la blessure ; la graisse fut perforée et le fer pénétra à l’intérieur de la chair vive. L’eau salée entra alors dans la
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blessure à la suite du fer, et fit périr le blessé. Alors le cétacé mort se mit à flotter sur la mer. Lorsque les pêcheurs l’aperçurent, ils l’accrochèrent avec des cordes et le tirèrent jusqu’à la rive, avec une joie immense, car ils avaient la certitude d’en
retirer de grandes richesses.
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10 Albert le Grand s’inspire de ce texte et le complète dans son De animalibus, rapportant d’abord le témoignage de la pêche par échouage d’une baleine : à la première tentative, les habitants du lieu ne parviennent pas à empêcher l’animal
de retourner à l’eau avec la marée. Cette pratique a sans doute été observée par l’auteur lorsqu’il visita la Frise entre 1254 et 1255 comme prieur provincial. Quant aux méthodes de pêche en mer décrites, elles se caractérisent par l’attaque
de l’animal par des harpons attachés à une corde et terminés par une flèche barbelée très aiguisée. Les pêcheurs attaquent l’animal qu’ils trouvent à la surface de l’eau ; s’il se sauve en haute mer, il est considéré comme perdu,
Follow usmais, s’il
plonge et se débat, il finit par s’affaiblir, et il est alors ramené à terre. Une variante de la méthode consiste à utiliser une arbalète à la place du harpon26. L’animal est ainsi découpé, une fois échoué, ou bien il est chassé, la traque consistant
manifestement à le blesser et à le rabattre vers la plage où il sera achevé.
11 Enfin, Vincent de Beauvais explique dans le Speculum naturale27 que, lorsque les barques étaient rassemblées à proximité des animaux, les pêcheurs faisaient du bruit avec divers instruments. L’animal attiré par la musique était frappé
d’un harpon auquel était attachée une corde, et il était ainsi laissé à l’agonie. Quand il semblait proche de la mort, ne s’agitant plus trop, il était achevé à coup de pique. Il était alors lié et ramené à terre à l’aide de cordages. Dans la
technique décrite, l’animal harponné est remorqué jusqu’à la plage où il est découpé.
12 Retournons vers le texte d’al-Qazwīnī. L’histoire des coups de maillet, scrupuleusement assénés par un des pêcheurs, doit être mise sur le compte de l’exagération littéraire. En revanche, nous retrouvons dans le texte de Vincent de
Beauvais la peur des marins de chavirer à cause des mouvements de la baleine. L’effet de la musique ou du bruit sur les baleines est également cité par Vincent de Beauvais et Thomas de Cantimpré, et était une croyance répandue au
Moyen Âge28. Et l’attachement de la baleine pour son petit est universellement connu29. Par contre, l’ail jeté en mer pour l’éloigner a tout de l’histoire inventée. Cleirac dans les Us et coutumes de la mer30 rapporte que, pour faire fuir
l’animal, il faut jeter des barriques vides pour qu’il s’amuse, jouer de la trompette et – à son époque – tirer un coup de canon.

La chasse à la baleine au nord-est de l’Europe


13 Les textes descriptifs à propos de la chasse à la baleine au nord de l’Europe avant le xiie siècle sont rares et guère détaillés ; en outre, les populations finno-ougriennes qui en sont les acteurs dans les sources arabes sont encore moins
connues au Moyen Âge. En effet, dans les textes arabes, ces populations sont appelées ʿĪsuʾ, Yūrā et Arw (ces derniers n’étant pas concernés dans le texte par la chasse à la baleine). Les ʿĪsuʾ, ou mieux les Wīsū, et les Yūrā constituent deux
populations finno-ougriennes31. Les premiers sont identifiables aux Ves’ des sources slavonnes. Ils étaient établis près du lac Beloïe et sur la rivière Cheksna ; leurs descendants actuels, les Vepses, habitent autour des lacs Ladoga, Onega et
Beloïe. Quant aux Yūrā, ce sont les populations appelées autrefois Vogouls et Ostyaks, et maintenant Manses et Khantes. Malheureusement, leur localisation ancienne est sujette à débat. On pensait jadis qu’ils étaient primitivement situés
à l’ouest de l’Oural septentrional, mais, suite à la pression des Russes au xiiie siècle, ils seraient passés en Sibérie pour atteindre l’Ob. L’opinion qui prévaut actuellement chez les ethnologues est qu’ils constituent les habitants autochtones
de l’Oural et que leur zone d’extension ancienne était, pour les Khantes, de l’embouchure de l’Ob et le nord de l’Oural jusqu’à la confluence de l’Ob avec l’Irtych, tandis que, pour les Manses, leur zone d’habitat était au sud-ouest de la
première et s’étendait au-delà de l’Oural jusqu’à la rivière Chosva, de toutes manières loin de la mer32. Cependant, il est fort probable que les observateurs médiévaux ont grossièrement situé ces peuples avec lesquels les relations restaient
limitées, de sorte que les ethnonymes anciens devaient recouvrir des réalités humaines plus vagues ou plus larges qu’aujourd’hui, et sans aucun doute en mouvement. Ainsi, les Khantes, situés au nord des Manses, ont-ils été amalgamés
aux Permiens, ethnonyme général pour les populations habitant le nord de l’actuelle Russie, jusqu’à l’océan Arctique. Ceux-ci avoisinaient à l’ouest, avec les Vepses. En outre, suivant les textes arabes, on est obligé de localiser les Yūrā à
l’ouest de l’Oural, en contact avec la mer Blanche, et de les voir comme des fournisseurs de fourrures. Les sources anciennes occidentales autorisent cette hypothèse car elles attribuent aux populations de ces régions, appelées Bjarmaland
chez les auteurs anglo-saxons et scandinaves, les mêmes productions33 ; or, le Bjarmaland désigne les territoires riverains de la mer Blanche, de la Carélie jusqu’à l’embouchure de la Dvina, à l’ouest.
14 Quant à la chasse, on sait par le voyageur Ohthere (fin du ixe siècle) qu’elle était pratiquée de manière saisonnière par les Samis et les Finnois, manifestement jusqu’en mer Blanche34. D’ailleurs, des gravures rupestres dans les îles de
l’embouchure de la rivière Vyg, dans la baie d’Onega, en mer Blanche, montrent des chasses aux bélougas et, sur le site de Zalavruga, une chasse est représentée avec six bateaux d’où six harpons sont lancés vers un animal35. En outre, le
Speculum regale, œuvre didactique écrite en vieux norvégien du milieu du xiiie siècle, énumère vingt-et-une sortes de baleines et fait allusion à la pêche sans en donner les détails pratiques : dans ce cas, nous sommes dans l’Atlantique
nord, entre l’Islande et la Norvège36. Enfin, la Saga de saint Olaf (xiiie siècle) met en scène Olaf et ses compagnons dépeçant une baleine venue s’échouer. On admet généralement que la technique de chasse était le rabattage des animaux
puis leur échouage sur la plage ou dans des filets37. En effet, Olaus Magnus confirme et détaille au xvie siècle ces techniques de chasse38. Il précise en outre que les os des baleines étaient utilisés au nord de la Norvège dans la construction
des maisons.

Le témoignage d’Ibn Faḍlān
15 Aḥmad Ibn Faḍlān est connu pour la relation qu’il a laissée de l’ambassade envoyée par le calife al-Muqtadir auprès du roi des Bulgares de la Volga, dans le premier quart du xe siècle (l’ambassade atteint la capitale des Bulgares en 922).
Le texte original n’a pas été conservé et le récit n’est connu que par un seul manuscrit, découvert à Mechhed en Iran en 1924 par Zeki Validi Togan, par les citations de Yāqūt et d’auteurs iraniens39.
16 Selon Ibn Faḍlān, c’est un récit rapporté par les Wīsū au roi des Bulgares. Le souverain les a questionnés par lettre à propos d’un individu des Gog et Magog (Yāǧūǧ wa-Māǧūǧ) découvert chez lui ; et ils lui ont répondu :

Ils habitent à une distance de trois mois de chez nous ; ils sont nus ; nous sommes séparés d’eux par la mer, car ils vivent de l’autre bord de la mer. Ils s’accouplent l’un avec l’autre comme des bêtes. Dieu Très Haut et Puissant fait sortir chaque jour
pour eux un poisson de la mer. Chacun d’eux vient avec un couteau et en coupe un morceau à sa suffisance et à celle de sa famille. S’il en prend plus qu’il ne lui en faut pour se satisfaire, il souffre du ventre de même que sa famille. Quand ils ont pris
de ce poisson ce qui leur est nécessaire, le poisson s’en retourne et se jette à l’eau. Ils vivent ainsi de cette façon tous les jours. Entre eux et nous, se trouve la mer d’un côté et les montagnes les entourent des autres côtés40.

https://journals.openedition.org/medievales/11274 1/3
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17 On sait que les termes de Yāǧūǧ wa-Māǧūǧ désignent deux peuples apocalyptiques, les Gog et Magog, qui apparaissent dans la Bible (Ez 38 et 39 ; Ap 20.7-10) et dans le Coran (18.93-98 et 21.96). En 18.93-98, il est dit que Ḏū l-
Qarnayn – Alexandre le Grand – érigea une barrièreHOME CATALOGUE
contre ces peuples. OF 611 de
La localisation JOURNALS
ces populationsOPENEDITION SEARCH
et de ladite barrière est située au nord des peuples de l’Islam, de l’Asie centrale au Caucase, au gré de la connaissance de ces régions
par les musulmans. Dès le xe siècle, les Gog et Magog sont identifiés, entre autres, avec les populations les plus septentrionales dont les musulmans connaissent l’existence, c’est-à-dire avec les populations finno-ougriennes41.
18 Or il existe un ḥadīṯ42, une tradition musulmane, qui rapporte expressément à propos des Gog et Magog : « ils ont un monstre marin [tinnīn] à manger, au printemps et le réclament à sa saison, tout comme on réclame à sa saison la pluie
abondante ». Les légendes élaborées autour des Gog et Magog par les juifs et les chrétiens ignorent ce poisson. Par ailleurs, bien que cette tradition soit attribuée à des rapporteurs anciens – mais sujets à caution43 –, elle n’est donnée qu’à
partir du début du xe siècle44, c’est-à-dire au moment même où les musulmans prennent connaissance de ces populations finno-ougriennes et les identifient avec les Gog et Magog. La nature de ce poisson n’est pas établie avec certitude :
pour Ibn Faḍlān, c’est un poisson (samaka) qui s’échoue chaque jour, manifestement assez gros pour les nourrir en suffisance avant de retourner à l’eau. Pour Ibn al-Faqīh et al-Masʿūdī, c’est le tinnīn qui leur arrive au printemps, largué
par des nuages. Le terme tinnīn45 – qui est attesté dans plusieurs langues sémitiques dont l’ougaritique – désigne une bête marine épouvantable et, dans ce sens, personnifie la tornade.
19 Il nous semble dès lors qu’Ibn Faḍlān rapporte bien ici un récit d’échouage de baleine, légèrement déformé par son informateur. Quant aux traditions d’Ibn al-Faqīh et d’al-Masʿūdī, elles montrent que cette information avait déjà atteint
le monde musulman au xe siècle, et que les imaginations l’avaient remodelée en utilisant un être fantastique « familier », le tinnīn. Dans le cas du ḥadīṯ, le processus de création est clair : la particularité du mode de subsistance des Finno-
ougriens – la pêche ou l’échouage d’un énorme poisson – passe aux mythiques et coraniques Gog et Magog, qui sont assimilés à ces populations septentrionales. Nous en voulons pour preuve le récit d’al-Masʿūdī qui attribue ce mode
d’alimentation – le « largage » de cet énorme poisson – aux Gog et Magog, hors contexte de ḥadīṯ. Ce serait en somme un récit intermédiaire.

Le témoignage d’Abū Ḥāmid al Ġarnāṭī (1080-1169 ou 1170)


20 Abū Ḥāmid al-Ġarnāṭī nous a laissé deux ouvrages, écrits sur la fin de sa longue vie, alimentés par ses voyages. Il s’agit d’abord du Al-muʿrib ʿan baʿḍ ʿaǧāʾib al-Maġrib, récit chronologique de ses pérégrinations, rédigé à Bagdad en
1160 pour le vizir Yaḥyā ibn Hubayra, et ensuite du Tuḥfat al-albāb, traité de cosmologie reprenant les renseignements recueillis durant ses voyages selon quatre grandes thématiques, écrit en 1162 à Mossoul pour son mécène Abū Ḥafṣ al-
Ardabilī.
21 Originaire de Grenade, Abū  Ḥāmid quitte al-Andalus et séjourne en Égypte et au Proche-Orient, puis passe par le Caucase pour s’arrêter dans le delta de la Volga. De là, il remonte la rivière pour séjourner chez les Bulgares de la
Moyenne Volga, avant de continuer vers Kiev puis la Hongrie. En 1159, il quitte définitivement le bassin de la Volga pour rejoindre le Khwārizm, avant d’entamer un pèlerinage qui le ramène finalement à Bagdad puis à Mossoul. C’est lors
de son séjour chez les Bulgares de la Volga, en 1135-1136, qu’il a l’occasion de collecter des informations sur les populations septentrionales, avec lesquelles les Bulgares sont en contact par le commerce des fourrures46.
22 Or Abū Ḥāmid rapporte :

Ces épées sont exportées des pays musulmans [à la ville de] Bulgare avec un profit important, ensuite les Bulgares les portent vers les Ves’ [ʿĪsuʾ] en échange de castors. Les Ves’ à leur tour les amènent aux Khantes [Yūrā] pour acheter des peaux de
martre-zibeline, des jeunes filles et des jeunes garçons. Tout homme a besoin, chaque année, d’une épée qu’il jette dans la mer des ténèbres. Quand les épées sont lancées, Allāh fait sortir pour eux de la mer un poisson aussi énorme qu’une
montagne ; un autre poisson, cent fois plus grand que lui, le chasse, voulant le manger. Le petit fuit le grand et se rapproche de la terre ferme, il arrive à un endroit où il ne peut retourner à la mer et reste là. Le gros poisson ne peut l’atteindre et
demeure à l’eau. Alors, les Khantes [Yūrā] prennent la mer sur des embarcations et le taillent en pièces de tous côtés. Le poisson n’en éprouve rien et ne bouge pas. Ils remplissent leurs demeures avec sa chair et montent sur son dos. [L’animal]
ressemble à une grande montagne. Ils le gardent le temps de le découper. Quiconque jette une épée à la mer, prend une part du poisson. Il arrive que l’eau augmente et que le poisson retrouve son agilité et retourne à la mer. Ils ont déjà rempli plus de
cent mille maisons de sa chair.

On m’a raconté à Bulgare qu’une certaine année, [les marins] avaient percé les oreilles d’un de ces poissons, ils y avaient mis des cordes et l’avaient tiré. Ils avaient ouvert ensuite son oreille et une jeune fille à l’apparence humaine en était sortie. Elle
était blanche, avec des joues rouges et des cheveux noirs ; elle était fessue et très belle. Les Yūrā l’avaient prise et déposée sur la terre, mais elle se frappait le visage, s’arrachait les cheveux et criait. Allāh l’avait dotée d’une peau blanche, comme un
épais tissu robuste, au milieu du corps, de la ceinture aux genoux, qui couvrait son giron. On aurait dit un vêtement serré à sa taille qui cachait son intimité. Les Yūrā l’avaient gardée jusqu’à sa mort. La puissance d’Allāh n’a pas de fin !

On dit : si les Yūrā ne jetaient pas d’épées dans la mer – comme je l’ai rapporté – aucun poisson n’en sortirait et ils mourraient de faim47.

23 À suivre le texte, on voit que les Bulgares échangent des épées avec les Ves’ (ʿĪsuʾ) contre des fourrures de castors, que les Ves’ à leur tour les troquent aux Manses et Khantes (Yūrā) contre des dépouilles de martres-zibelines et qu’enfin
ceux-ci s’en servent pour la chasse à la baleine. Si le commerce des fourrures pour ces régions est assez bien connu pour qu’on ne s’y attarde pas48, en revanche la description de la pêche, du commerce du fer et de la navigation mérite que
l’on s’y arrête.
24 En ce qui concerne la navigation des Khantes (Yūrā), nous avons un texte ancien, source du médecin-zoographe Marvazī (xiie siècle) et de l’anthologue Awfī (m. v. 1232)49, qui nous parle de lutte entre bateaux sur la mer à partir de la
côte habitée par les Manses.
25 Dans le texte d’Abū Ḥāmid, la technique de pêche est décrite de manière confuse mais on peut reconnaître un récit de rabattage avec harponnage et échouage de l’animal, mêlé au scénario d’un échouage « naturel ». Le texte n’établit
aucun rapport entre le fait de lancer une épée – un harpon – dans l’eau et l’échouage de la baleine, hormis le partage qui suit le dépeçage. En fait, le récit de la chasse au harpon possède en son sein celui d’un échouage d’un animal chassé
par un autre (un orque chassant une baleine ?). Abū Ḥāmid attribue à Dieu le don du cétacé, alors qu’il fait de l’épisode de la baleine fuyant le plus grand prédateur une anecdote. Selon nous, nous sommes bien en présence de deux
procédés différents. On peut souligner que, pour les Scandinaves païens, l’échouage d’un cétacé était un don du dieu Njörðr et, après leur christianisation, celle de Dieu, comme en témoigne l’ethno-linguistique50.
26 Quant à l’histoire de la femme découverte dans le ventre d’un poisson, considérons-la comme un thème folklorique mais retenons le fait que le poisson est tiré sur la plage par des cordes. La remarque sur la capacité de la baleine de
retourner à l’eau si la marée le lui permet est comparable à l’histoire relatée par Albert le Grand pour la Frise. Deux éléments demandent cependant à être éclaircis : le commerce des épées et la navigation des Khantes (Yūrā).
27 Selon l’auteur, des épées trempées sont exportées depuis les pays musulmans jusque chez les Yūrā qui les jettent à la mer pour, par la grâce de Dieu, obtenir le gros poisson dont ils se nourrissent. Le sens du trafic de ces armes est
inversé par rapport à ce que les sources51 des ixe et xe  siècles avaient enregistré, à savoir une exportation d’épées rus’ ainsi que de sabres et de flèches bulgares vers les pays musulmans. Cela est d’autant plus vrai que globalement
l’artisanat métallurgique des Slaves était de qualité. Mais la Chronique dite de Nestor donne pourtant un récit rapporté par un voyageur ayant visité ces régions septentrionales, dans lequel se mélangent réalité et fiction52. D’après ses
dires, les populations ougriennes prétendent qu’à l’extrémité de leur pays vers le Nord se trouve un peuple enfermé dans une montagne près d’un golfe. Ce peuple réclame du fer qu’il échange contre des peaux. Enfin, Roman Kovalev
remarque que les archéologues ont découvert sur le site d’Ortinsk (à l’estuaire de la Petchora et de sa confluence avec la mer de Barents) un grand nombre d’ossements d’animaux à fourrure, à côté de têtes de flèche et de couteaux très
usés53. Et R. Kovalev de conclure que cela peut révéler un manque de fer, d’où une demande d’épées de l’extérieur.
28 Ainsi, il paraît évident que ce texte rapporte un récit de chasse à la baleine. Bien que déformés, on peut y reconnaître l’échouage et le dépeçage de l’animal et un récit de chasse au harpon. Géographiquement, il est impossible d’être
précis, nous serions là en mer Blanche ou au débouché de cette dernière dans la mer de Barents. Quant à l’animal, nous nous limiterons à dire qu’il s’agit sans doute de bélougas, comme l’indiquent l’archéologie et l’ethnographie de cette
région54.

***

29 Ibrāhīm ibn Yaʿqūb al-Ṭurṭūšī, par l’intermédiaire d’al-Qazwīnī, nous apporte le récit d’une pêche à la baleine par rabattage, harponnage et échouage pour une époque où nous n’avons pas de documents occidentaux aussi explicites
(xe siècle). La confrontation avec les textes latins ultérieurs montre que la plupart des éléments – factuels et imaginaires – étaient déjà présents dans la narration. La localisation exacte de la pratique décrite par le voyageur est impossible,
mais rien n’autorise à penser qu’il faut la situer près des îles Britanniques comme l’entrée « Irlande » le laisserait présager ; nous serions plutôt là le long des côtes françaises actuelles.
30 Quant aux témoignages rapportés par Ibn Faḍlān et par Abū Ḥāmid, ils nous mettent en présence d’un double récit, soit celui d’une pêche avec harponnage et rabattage et celui du dépeçage de la bête après son échouage sur la plage.
L’intérêt de ce texte est d’autant plus grand qu’il concerne les Khantes (Yūrā), encore installés au xiie siècle à l’ouest de l’Oural jusqu’aux rives de la mer Blanche. Bien entendu le texte d’Ibn Faḍlān est plus mythifié et mêlé d’éléments
folkloriques, mais l’on reconnaît néanmoins dans la trame du récit le dépeçage par les habitants des côtes d’une baleine échouée, phénomène présenté comme périodique et interprété comme providentiel.

Notes
1 D’une manière générale, des synthèses de qualité croisant textes et archéozoologie ont été menées par Fabrice Guizard : F. Guizard, « Retour sur un monstre marin au Moyen Âge : la baleine », dans A. Gautier, C. Martin éd., Échanges, communications et
réseaux dans le haut Moyen Âge. Études et textes offerts à Stéphane Lebecq, Turnhout, 2011, p.  261-276  ; Id., «  Delfines nec non et ballenae… Les cétacés de l’Atlantique  nord au haut Moyen  Âge  : représentation, identification et consommation  »,
Anthropozoologica, 53 (2018), p. 115-123. Une série de textes peu connus ont été réunis et analysés par Stéphane Lebecq : S. Lebecq, « Scènes de chasse aux mammifères marins (mers du Nord, vie-xiie siècles) », dans É. Mornet, F. Morenzoni éd., Milieux
naturels, espaces sociaux. Études offertes à Robert Delort, Paris, 1997, p. 240-253.
2 Pline l’Ancien, Naturalis historia, IX, § IV et § VI, éd. et trad. E. de Saint-Denis, Histoire naturelle, Livre IX, Paris, 1955, p. 40-44. Par ailleurs, Élien mentionne l’utilisation des fanons et la salaison de la chair de baleines par les habitants de Cythère : voir De
natura animalium, XVII, 6, éd. et trad. A. F. Scholfield, Aelian, On the Characteristics of Animals, Cambridge (Mass.), 1940, p. 329-330. Et Oppien raconte dans ses Halieutica une pêche à la baleine en Méditerranée avec l’emploi d’un hameçon à deux pointes,
presque aussi gros qu’une ancre ; l’animal était appâté avec de la chair : voir Oppian, Colluthus, Tryphiodorus, éd. et trad. A. W. Mair, Cambridge (Mass.), 1963, p. 471-475.
3 L. Musset, « Quelques notes sur les baleiniers normands du xe au xiiie siècle », Revue d’histoire économique et sociale, 42/2 (1964), p. 147-161 (p. 147-148) ; J. Lestocquoy, « Baleine et ravitaillement au Moyen Âge », Revue du Nord, 117 (1948), p. 39-43
(p. 40-42).
4 A. Rebsomen, « Les droits de naufrage, de baleine et d’ambre gris sur la côte du pays de Buch », Revue historique de Bordeaux, 25 (1932), p. 5-134.
5 M. Degros, « La grande pêche basque des origines à la fin du xviiie siècle », Bulletin de la Société des sciences, des arts et des lettres de Bayonne, 35 (1940), p. 162.
6 E. Goyhenech, « La pêche à la baleine », Vasconia. Cuardernos de historia-geografía, 2 (1984), p. 7-24.
7 A. Thomazi, Histoire de la pêche, des âges de la pierre à nos jours, Paris, 1947, p. 325 ; N. Cazeils, Dix siècles de pêche à la baleine, Rennes, 2000, p. 6 et 16-17 ; M. Vaucaire, Histoire de la pêche à la baleine, Paris, 1941, p. 63-65 ; Y. Cohat, Vie et mort des
baleines, Paris, 1986, p. 48 ; O. Lindquist, Peasant Fisherman Whaling in the Northeast Atlantic Area, ca 900-1900 AD, Akureyri, 1997, p. 23. A digital resources portal for the
8 N. Cazeils, Dix siècles de pêche à la baleine…, p. 21, 26 et 28 ; A. Thomazi, Histoire de la pêche…, p. 322 ; L. Musset, « Quelques notes sur les baleiniers… », p. 151-152. La technique d’échouage est parfois améliorée par la pose de filet surhumanities
l’estran pourand social sciences
piéger
l’animal. Il n’est pas interdit de penser que ces procédés de rabattage et d’échouage d’origine scandinave aient été répandus par les invasions vikings.
9 N. Edwards, « The Archaeology of Early Medieval Ireland, c. 400-1169 : Settlement and Economy », dans D. Ó Croínín éd., A New History of Ireland, vol. I-A : Prehistoric and Early Ireland, Oxford, 2005, p. 235-300 (p. 274).
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10 M. Gardiner, J. Stewart, G. Bell, « Anglo-Saxon Whale Exploitation : Some Evidence from Dengemarsh, Lydd, Kent », Medieval Archaeology, 42 (1999), p. 96-101.
11 G. N. Garmonsway éd. et trad., Ælfric’s Colloquy, Londres, 1965, p. 29-30.
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12 R. Moffat, J. Spriggs, S. O’Connor, « The Use of Baleen for Arms, Armour and Heraldic Crests in Medieval Britain », The Antiquaries Journal, 88 (2008), p. 207-215 ; M. Gardiner, « The Exploitation of Sea Mammals in Medieval England : Bones and their
Social Context », The Archaeological Journal, 154 (1997), p. 173-195 ; V. E. Szabo, « The Use of Whales in Early Medieval Britain », Haskins Society Journal, 9 (1997), p. 137-257.
13 L. Molina, « Las dos versiones de la Geografía de al-ʿUḏrī », al-Qanṭara, 1 (1982), p. 249-260.
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14 Al-Qazwīnī, Aṯār al-bilād, Beyrouth, 1984, p. 555-556.
15 M. Canard, « Ibrāhīm ibn Yaʿqūb et sa relation de voyage en Europe », dans E. García Gómez et al. éd., Études d’orientalisme dédiées à la mémoire d’Évariste Lévi-Provençal, Paris, 1962, vol. II, p. 503-508 ; A. Miquel, Du monde et de l’étranger. Orient, an
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1000, Arles, 2001, p. 103-113 ; P. Engels, « Der Reisebericht des Ibrāhīm ibn Yaʿqūb (961/966) », dans A. von Euw, P. Schreiner éd., Kaiserin Theophanu, Begegnung des Ostens und Westens um die Wende des ersten Jahrtausens, Cologne, 1991, vol. I, p. 413-
422 (p. 414) ; J.-C. Ducène, « 960-962 : le tour d’Europe du marchand juif catalan Ibrāhīm ibn Yaʿqūb », dans R. Bertrand éd., L’Exploration du monde. Une autre histoire des grandes découvertes, Paris, 2019, p. 47-51.
16 Voir supra. HYPOTHESES
17 Ibn Manẓūr, Lisān al-ʿArab, Beyrouth, 1997, vol. 3, p. 377. Il est à remarquer que le texte hébreu (Jonas, 2, 1) dit simplement « un grand poisson » ; par ailleurs le terme arabe ḥūt désigne également la constellation zodiacale des Poissons.
CALENDA
18 Ibn Manẓūr, Lisān al-ʿArab, vol. 1, p. 542 ; J. Sauvaget, Aḫbār aṣ-Ṣīn wa-l-Hind. Relation de la Chine et de l’Inde rédigée en 851, Paris, 1948, p. 34, n. 2 ; J.-C. Rolland, Étymologie arabe. Dictionnaire des mots de l’arabe moderne d’origine non sémitique,
Paris, 2015, p. 38.
19 V. E. Szabo, Monstrous Fishes and the Mead-Dark Sea. Whaling in the Medieval North Atlantic, Leyde, 2008, p. 196. Libraries and institutions
20 Voir infra.
21 G. Oman, L’ittionimia nei paesi arabi del Mediterraneo, Florence, 1966, p. 193-196.
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22 Al-Qazwīnī, Aṯār al-bilād…, p. 577-578 ; trad. A. Miquel, Du monde et de l’étranger…, p. 108-109. Voir aussi A. Miquel, La Géographie humaine du monde musulman, Paris, 1975, vol. II, p. 348.
23 N. Cazeils, Dix siècles de pêche à la baleine…, p. 38.
24 R. Hainard, Mammifères sauvages d’Europe, Lausanne, 2001, p. 599 ; N. Cazeils, Dix siècles de pêche à la baleine…, p. 16-17 ; V. E. Szabo, Monstrous Fishes…, p. 191-196.
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25 Thomas Cantimpratensis, Liber de natura rerum, l. VI, § 6, éd. H. Boese, Berlin/New York, 1973, p. 233-234. Je remercie Madame Laurence Denooz pour sa traduction.
26 Albertus Magnus, De animalibus, Libri XXVI, éd. H. Stadler, Münster, 1916, vol. 2, p. 1522-1525 ; Albertus Magnus, On Animals. A Medieval Summa Zoologica, trad. F. K. Kitchell, I. M. Resnick, Baltimore, 1999, t. II, p. 1666-1671 et 1669, n. 86 ;
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Albert the Great, Man and the Beasts, De animalibus (Books 22-26), trad. J. J. Scanlan, New York, 1987, p. 338-341 et 338, n. 17.2 : la baleine qui donne de l’huile est sans doute le cachalot, Physeter catodon, la plus grande des baleines à dents ; Search
L. Moulinier,
« Les baleines d’Albert le Grand », Médiévales, 22-23 (1992), p. 111-128.
27 Vincent de Beauvais, Speculum naturale, Douai, 1624, l. 17, chap. 42 ; A. Thomazi, Histoire de la pêche…, p. 323. Newsletter
28 A. Thomazi, Histoire de la pêche…, p. 324. Cet effet est cependant ambivalent, pour certains, le bruit attire les animaux, pour d’autres, il les chasse.
29 J. Lestocquoy, « Baleine et ravitaillement… », p. 42 ; N. Cazeils, Dix siècles de pêche à la baleine…, p. 93-94.
30 N. Cazeils, Dix siècles de pêche à la baleine…, p. 11. Follow us
31 Ibn Faḍlān, Voyage chez les Bulgares de la Volga, trad. M. Canard, Paris, 1988, p. 59, 65 et 113, n. 183 ; J. Markwart, « Ein arabischer Bericht über die arktischen (uralischen) Länder aus dem 10. Jahrhundert », Ungarische Jahrbücher, 4 (1924), p. 261-334
(p. 288-309) ; A. Miquel, La Géographie humaine…, vol. II, p. 331-332.
32 J. Forsyth, A History of the Peoples of Siberia, Cambridge, 1992, p. 11-12 ; R. K. Kovalev, « The Infrastructure of the Northern Part of the “Fur Road” between the Middle Volga and the East during the Middle Ages », Archivum Eurasiae Medii Ævi, 11
(2001), p. 25-64 (p. 29).
33 Snorri Sturluson, La Saga de saint Olaf, trad. R. Boyer, Paris, 1983, p. 158. Pour une discussion approfondie de ce problème, voir A. S. C. Ross, The « Terfinnas » and « Beormas » of Ohthere, Londres, 1981 [1940], p. 66-82.
34 Pour une traduction en français, voir S. Lebecq, « Ohthere et Wulfstan : deux marchands-navigateurs dans le Nord-Est européen à la fin du ixe siècle », dans H. Dubois, J.-C. Hocquet, A. Vauchez éd., Horizons marins, itinéraires spirituels. ve-xviiie siècles,
Paris, 1987, vol. 2, p. 167-181 ; J. Bately, A. Englert éd., Ohthere’s Voyages. A Late 9th-Century Account of Voyages along the Coasts of Norway and Denmark and Its Cultural Context, Roskilde, 2007, p. 45 et 57 ; I. Valtonen, The North in the Old English
Orosius. A Geographical Narrative in Context, Helsinki, 2008, p. 305-331.
35 I. Valtonen, The North in the Old English Orosius…, p. 310, n. 203.
36 E. Már Jónsson éd., Le Miroir royal, Paris, 1997, p. 50-51 ; L. M. Larson éd., The King’s Mirror (Speculum Regale – Konung’s Skuggsja), An English Translation, New York, 1917, p. 119-126 ; R. Meissner éd., Der Königsspiegel. Konungs skuggsja. Fahrten
und Leben der alten Norweger, aufgezeichnet im 13. Jahrhundert, Berlin, 2019, p. 124-131.
37 N. Cazeils, Dix siècles de pêche à la baleine…, p. 6 ; A. Thomazi, Histoire de la pêche…, p. 322.
38 Olaus Magnus, Historia de genibus septentrionalibus, Rome, 1555, éd. P. Foote, trad. P. Fisher, H. Higgens, Description of the Northern Peoples, Londres, 1996, vol. III, p. 1091-1094, p. 1098, p. 1105-1107 ; V. E. Szabo, Monstrous Fishes…, p. 201-205 ;
C. Dubler, Abū Ḥāmid el Granadino y su relación de viaje por tierras eurasiáticas, Madrid, 1953, p. 213.
39 Ibn Faḍlān, Voyage chez les Bulgares…, p. 67 ; Z. D. Togan, Ibn Faḍlān’s Reisebericht, Leipzig, 1939, p. 72 et 196-200 ; E. Tixier du Mesnil, « 921-922 : Ibn Faḍlān chez les Bulgares de la Volga », dans R. Bertrand éd., L’Exploration du monde…., p. 42-46.
40 Ibn Faḍlān, Voyage chez les Bulgares…, trad. M. Canard, p. 67.
41 A. Miquel, La Géographie humaine…, vol. II, p. 507-511 ; T. Zadeh, Mapping Frontiers across Medieval Islam. Geography, Translation and the ʿAbbāsid Empire, Londres, 2011 (voir l’index) ; E. Van Donzel, A. Schmidt, Gog and Magog in Early Eastern
Christian and Islamic Sources. Sallam’s Quest for Alexander’s Wall, Leyde, 2010, p. 3-120.
42 Ibn al-Faqīh, L’Abrégé des merveilles, trad. H. Massé, Damas, 1973, p. 355 ; voir aussi al-Masʿūdī, Les Prairies d’or, trad. C. Barbier de Meynard, A. Pavet de Courteille, révisée par C. Pellat, Paris, 1962 [1859], vol. I, p. 110.
43 Il s’agit de Wahb ibn Munabbih, conteur yéménite d’origine persane (654-728 ou 732), qui transmit notamment des légendes bibliques et à qui on attribua par la suite des récits de nature légendaire ou extraordinaire.
44 A. Miquel, La géographie humaine…, vol. II, p. 510 : selon lui, ce poisson n’est qu’une marque surnaturelle de plus qui participe à l’aspect marginal de l’humanité de ces populations aux yeux des auteurs arabo-musulmans.
45 Ibn Manẓūr, Lisān al-ʿArab, vol. 2, p. 58.
46 R.  Hennig, «  Arabische Händler in Nordrussland und am nördlichen Eismeer (10.-14.  Jhd.)  », dans Id., Terrae incognitae. Eine Zusammenstellung und Kritische Bewertung der Wichtigsten vorcolumbischen Entdeckungsreisen an Hand der darüber
vorliegenden Originalberichte, Leyde, 1950, vol. II, p. 245-267.
47 C. Dubler, Abū Ḥāmid el Granadino…, p. 18-19 ; G. Ferrand, « Le Tuḥfat al-albāb d’Abū Ḥāmid al-Andalusī al-Ġarnāṭī », Journal asiatique, 207 (1925), p. 118-119 ; al-Qazwīnī, Aṯār al-bilād, p. 418 ; J.-C. Ducène, De Grenade à Bagdad. La relation de
voyage d’Abû Hâmid al-Gharnâtî (1080-1168), Paris, 2006, p. 89.
48 R. K. Kovalev, « The Infrastructure… », p. 25-64.
49 J. Markwart, « Ein arabischer Bericht… », p. 309-310.
50 O. Lindquist, Peasant Fisherman Whaling…, p. 23.
51 A. Miquel, La Géographie humaine…, vol. II, p. 275 et 335 ; Ibn Faḍlān, Voyage chez les Bulgares…, p. 72 et p. 120, n. 260.
52 Chronique dite de Nestor, trad. L. Léger, Paris, 1884, p. 196-197 ; le chroniqueur ajoute qu’il s’agit probablement des peuples de Gog et Magog (voir supra).
53 R. K. Kovalev, « The Infrastructure… », p. 39 et p. 57, n. 152.
54 J. M. Gjerde, « Stone Age Rock Art and Beluga Landscapes at River Vyg, North-Western Russia », Fennoscandia Archaeologica, 30 (2013), p. 37-54.

Pour citer cet article


Référence papier
Jean-Charles Ducène, « La chasse à la baleine dans les mers septentrionales selon les sources arabes médiévales », Médiévales, 80 | 2021, 65-79.

https://journals.openedition.org/medievales/11274 2/3
06/05/2023 10:46 La chasse à la baleine dans les mers septentrionales selon les sources arabes médiévales
Référence électronique
Jean-Charles Ducène, « La chasse à la baleine dans les mers septentrionales selon les sources arabes médiévales », Médiévales [En ligne], 80 | printemps 2021, mis en ligne le 02 janvier 2023, consulté le 04 mai 2023. URL :
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http://journals.openedition.org/medievales/11274 ; DOI : https://doi.org/10.4000/medievales.11274 OPENEDITION SEARCH

Auteur
Jean-Charles Ducène
EPHE-PSL

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Les Canariens selon les sources arabes et occidentales médiévales [Texte intégral]
Paru dans Médiévales, 81 | automne 2021

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