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II
Author(s): Marie-Thérèse de MALLMANN
Source: Arts Asiatiques , 1961, Vol. 8, No. 3 (1961), pp. 203-210
Published by: École française d’Extrême-Orient
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(1) Cf. Mallmann, Un aspect méconnu d' Avalokitesvara, Journ. as., 1952, p. 479-485. Sur le tableau donné p. 485,
nous avons malencontreusement interverti la disposition des accessoires : d'après les sādhana ( infra , p. 206, n. 1), le tri-
dent est à droite et la calotte crânienne à gauche.
(2) Entre autres : A. Foucher, Étude sur l'iconographie bouddhique de l'Inde, I, p. 116 et fig. 16 ; II, p. 31 et n. 3 ;
R. D. Banerji, Eastern Indian School of Mediaeval Sculpture, p. 94-96, pl. XXXVIII ; J. N. Banerjea, The Development
of Hindu Iconography , 2e éd., p. 6, 480-481, 554-561, pl. XXXIX, 1 ; XI,, 4 ; XlyVI, 4 ; XI/VIII, 3 et 4. Iy'on observe
que l'élément « bouddhique » des dieux composites paraît toujours être Iyokeśvara.
(3) Notes d'iconographie tântrique. II : de Vighnāntaka à Mahākāla, Arts as., II (1955), p. 41-46.
(4) Bhauma Art and Architecture in Orissa, Arts as., IV (1957), p. 275-292, spécialement p. 285 et 289 ; cf. également
Mallmann, Notules d'iconographie, Arts as., V (1958), p. 299-302.
(5) Paris, Corrêa (Buchet-Chastel), i960. L,e livre comprend 8 planches hors- texte. I,es œuvres reproduites provien-
nent de Khajurāho (pl. 1 et 8), de Deogarh (pl. 3 et 4) et de Bhuvaneávar (Vaitāl Deul, pl. 2 et 5 ; Mārkaņ d esvara, pl. 6;
Bhāskaresvara, pl. 7). I^a pl. 5, identifiée à Siva en posture de Yoga, est plus précisément I,akulïsa : cf. Banerjea, op. cit.t
p. 6, 480-481, et pl. XXXIX, i et XI,, 4 ; Panigrahi, op. cit., p. 286 et fig. 16.
(6) Suivant les informations recueillies sur place par M. Daniélou.
Cette dernière, de forme humaine, est assise sur le genou gauche du dieu ; sa jambe
droite est repliée sous sa jambe gauche pendante, le pied gauche étant soutenu par un coussin
de lotus ; sa main gauche est cassée, mais tenait une fleur de lotus discernable sur notre
figure 2 ; de son bras droit, elle enlace le cou du dieu. L'un et l'autre sont richement parés.
Il est coiffé d'un triple « chignon-en-tiare » (jaļāmukula) qui paraît être encerclé par un
diadème ; elle porte un chignon orné non seulement d'un diadème, mais aussi d'une guir-
lande de fleurs. A la droite du dieu se trouve un trident dressé, autour duquel s'enroule
un serpent ; à la gauche de la déesse, l'on distingue malaisément (fig. 1) une sorte de fleur
de lotus, qui apparaît plus nettement sur la figure 2, et qui offre l'aspect d'une coupe au
rebord emperlé.
L'observation attentive de cette sculpture - identifiée, nous l'avons dit, à Brahmā
et SarasvatI - fait immédiatement ressortir plusieurs anomalies :
a) L'œil frontal semble n'être dévolu à Brahmā ni par les textes, ni par les monuments
figurés (3) ;
b) Le nombre impair des bras n'est pas concevable pour une image de Brahmā (4) qui
devrait « invariablement » (5) en posséder quatre ; en conséquence, il faut admettre qu'il
existait originellement un troisième bras gauche, disparu aujourd'hui, et que le dieu
n'est pas Brahmā ;
c) Le trident enveloppé par un serpent n'est pas un attribut brâhmique, et évoque aussitôt
soit l'iconographie çivaïte (6), soit certaines descriptions d'Avalokitesvara (7).
Pour ces diverses raisons, il ne s'agit certainement pas d'une image de Brahmā et Saras-
vatI. En revanche nous trouvons, dans un livre déjà ancien de N. K. Bhattasali (8), la repro-
(1) C'est-à-dire en commençant par la main droite inférieure, en remontant, et en continuant à gauche de haut en
bas. Cf. A. Foucher, op. cit., II, p. 30.
(2) I/on pourrait, à la rigueur, y voir le manche d'une des louches sacrificielles, sruc ou sruva.
(3) Pour l'iconographie de Brahmā, cf. Mallmann, Étude sur les enseignements iconographiques de V A gni-purāņa ,
chap. VI (sous presse).
(4) Seuls paraissent avoir des bras en nombre impair : Agni, le Feu (Banerjea, op. cit., p. 525), et Siva sous la forme
d'Ardhanarïsvara (ibid, pl. XXXVIII, 4).
(5) Banerjea, op. cit., p. 516-519. lorsqu'il compte plus de quatre bras, le dieu est alors « syncrétique » : Brahmā-
Sûrya, Brahmâ-Siva-Sûrya, etc.
(6) Foucher, op. cit., I, p. 172-173.
(7) Id., ibid., et II, p. 29-34. Mallmann, Un aspect méconnu, op. cit .
(8) Iconography of Buddhist and Brahmanical Sculptures in the Dacca Museum , p. 123-130 et pl. 1,1 b. P. 130, l'A. le
décrit avec cinq faces, mais trois seulement apparaissent sur la gravure. I*a position des jambes du dieu, inversée, illustre
l'attitude dite vãmãrdhaparyaiika.
duction d'un groupe en bronze, nettement plus tardif, mais d'une iconographie très s
A l'époque, l'auteur l'avait identifié à un Siva Ālinganamūrti, bien qu'il ne coïncide p
les descriptions : celles-ci attribuent généralement à cet aspect de Siva une seu
quatre bras (i). Sur l'illustration donnée par Bhattasali, le dieu - qui possède tro
visibles et six bras - porte dans sa troisième main gauche un arc, tandis que la
(inférieure) tiendrait la calotte crânienne (kapãla).
Or si - au lieu de chercher dans les iconographies brâhmique ou çivaïte une
pondance qui ne semble pas exister - nous nous tournons vers la Sãdhanamãlã
du dieu est jaune (au lieu d'être rouge), et les attributs de gauche sont disposés ainsi : s
de la « Bien-aimée », lotus blanc, arc (1).
Les seules différences notables entre la sculpture de Bhāskarešvara (fig. i et 2) et les
textes, concernent donc d'une part la disparition du troisième attribut de gauche, l'ar
d'autre part l'absence de détails proprement çivaïtes tels que les ornements de coiffure (2)
et la peau de tigre.
(1) Panigrahi, op. cit., p. 275. I^es Bhauma auraient régné sur l'Orissā soit du début du vu® au début du ixe siècle,
soit de 750 à 950 A.D. environ.
(2) Cf. Mallmann, Un aspect méconnu, op. cit., p. 482-483.
(3) Iy. A. Waddell, The Indian Buddhist Cult of Avalokita..., J.R.A.S., 1894, particulièrement p. 57. Cf. Foucher,
op. cit., I, p. 173 et n. i ; et Mallmann, Introduction à l'étude d'Avalokiteçvara, p. 146, 149.
(4) D'après O. C. Gangooly et A. Goswami, Orissan Sculpture and Architecture, p. vi, Bhāskaresvara daterait au
plus tôt du deuxième quart du xie siècle.
(5) I,a composition de ce groupe offre des analogies avec celui de Bhāskaresvara ; mais - outre que Brahmā et Saras-
vatî sont accompagnés du hamsa et entourés d'assistants - le dieu ne possède que quatre bras : dans ses mains supérieures,
l'on reconnaît à droite la louche sacrificielle (sruc) et à gauche le livre (pustaka). Enfin, la face principale est barbue, ce
qui, selon M. Banerjea (op. cit., p. 517), dénote une date plus tardive que les images à face imberbe.
(6) Cf. supra, p. 204, n. 3.
(7) D'après le Šilparatna, 34 (T. A. Gopinātha Rao, Elements of Hindu Iconography , II, 2, Appendice B, p. 244),
et le Matsya-purãna, 260, 42.
(8) Brahmā peut cependant tenir un arc appelé Parivlta (A. Danielou, op. cit., p. 367). I/on s'explique d'autant
moins la destruction de celui du Iyokesvara de Bhāskaresvara, dont l'identité est, au demeurant, incontestable grâce à la
présence du trident placé à sa droite.
(9) Alors que les textes utilisés par A. Foucher lisent : vāmajānunā sitām devīm dadhānam (supra, p. 206, n. 2), le
sãdhana 27, publié par le Dr Bhattacharyya, lit : vāmajānunā sitām svābhadevīm dadhānam...
Fig. 3. - Brahma et Sarasvatî. Xe siècle (?). Provenant de Mahaban (U.P.), Curzon Museum , Muttra
(Cliché Larkin Bros. Courtesy Royal Academy of Art., London).
ARTS ASIATIQUES 27
Sur le premier point, nous nous permettons de rappeler que le livre compte parmi les
attributs d'Avalokitesvara (i). Quant à la seconde observation, si - comme le pense
M. Daniélou - il s'agit bien de l'imitation inconsciente d'une formule d'iconographie
lokeçvarienne, un tel « plagiat » révèle une imprégnation du brahmanisme par le bouddhisme
eicore plus profonde et plus grave que nous n'aurions osé le penser. Nous nous trouvons
donc ici en présence d'un fait qui - du double point de vue iconographique et religieux -
dépasse largement les simples influences signalées par le Dr Panigrahi à propos de plusieurs
temples de Bhuvanesvar (2) et par M. J. N. Banerjea (3) au sujet des images de Lakuliśa
en Orissā (4).